Luxe

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LE

LUXE EXPOSÉ D’ÉCONOMIE ET GESTION

2DSAA Chloé Jauffrineau Mickaël Pacult Lucas Blanchy



LE LUXE

une définition complexe

La notion de luxe est complexe et subjective. Ses contours sont difficiles à dessiner et les définitions sont multiples : Pour certains, le mot luxe vient du latin « luxus », qui signifie excès, débauche et faste. Pour d’autres, le mot a pour origine « lux », la lumière, le rayonnement, le goût, l’élégance. On retrouve cette ambivalence dans la notion de luxe selon la façon dont on l’aborde. On distingue d’un côté le luxe authentique et esthétique et de l’autre le luxe ostentatoire et excessif. On dénonce le superflu tapageur de l’un et on loue l’excellence du savoir-faire de l’autre. Il convient, par conséquent, de dépasser ces polémiques pour appréhender le sujet du luxe sans préjugés, positifs ou négatifs. Pour cela, il est possible de reprendre la formulation de Rémy Tessonneau : « En soi, en effet, le luxe n’est ni bon, ni mauvais. Comme l’art, il est amoral ». L’envie de luxe est une aspiration naturelle de l’homme qui cherche sans cesse à améliorer son quotidien. «le luxe commence là où le besoin s’arrête » disait Coco Chanel, en effet, il ne répond ni à un besoin physiologique ni à un besoin de sécurité, c’est ce qui n’est pas indispensable. Le luxe d’hier n’est pas celui d’aujourd’hui et probablement pas celui de demain. Mais, aussi longtemps que l’homme sera consommateur, il distinguera des produits qui le font vivre, des produits qui le distinguent ou qui le valorisent. Le luxe évolue en même temps que les besoins des gens et est donc témoin et révélateur des évolutions sociologiques des sociétés. On se rend compte par exemple qu’actuellement, avec l’internationalisation, les avancés technologiques et l’augmentation constante de la classe moyenne, la gestion du luxe s’est rationalisée. Le potentiel de croissance du secteur est donc considérable.

RARETÉ

SAVOIR FAIRE ET AUTHENTICITÉ

Le produit ou le service de luxe doit être rare et exclusif. Il existe différentes formes de rareté (naturelle ou virtuelle) : - celle des ingrédients : rareté naturelle et physique liée aux composant précieux (peau de crocodile ou diamants), - celle de production : objet unique, sur-mesure ou en série limitée, souvent matérialisé par un numéro de série particulier. (chez Ferrari, par exemple, la production est limitée volontairement à moins de six mille véhicules par an et chez Patek Philippe, il faut parfois plus d’un an d’attente pour obtenir certains modèles.) Il ne faut pas répondre systématiquement à la demande en hausse ! - celle des savoir-faire/technique (composition des montres) ; - la rareté de la distribution : distribution à petite échelle dans des endroits spécifiques, prestigieux, et souvent propre à la marque (comme Montagut qui fait de la publicité en Chine sans y être présent) . Un produit trop visible peut nuire à l’image d’une marque de luxe !; - et la rareté institutionnelle (Amex et rumeur ou les allocations chez Dom Perignon). Sachant que le désir croît par l’inaccessibilité réelle ou virtuelle, on constate que les marques de luxe créent des barrières à l’entrée. Parmi ces barrières, on dénombre celles qui sont financières, culturelles (savoir apprécier), logistiques (magasins à proximité) ou temporelles (temps d’attente). Actuellement, face à la relative démocratisation du luxe, pour maintenir la rareté du luxe, les acteurs de se secteur s’orientent de plus en plus vers les vecteurs d’exclusivité plus virtuels liés au marketing et à l’information qu’ils diffusent à leurs clients.

En se référant à une tradition et à un savoir-faire intemporel, le luxe entretient un rapport particulier au temps. Jean Louis Dumas, ancien Président de la maison Hermès, affirmait : « le luxe, c’est ce qui dure plus longtemps que vous ». Quant à l’horloger suisse Patek Philippe, il a pris pour slogan: « Vous ne possédez

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jamais complètement une Patek Philippe. Vous en prenez soin pour la prochaine génération ». Le luxe est par essence durable. Réparer, conserver, transmettre sont les mots d’ordres du luxe.

PRIX ÉLEVÉ

IMAGINAIRE ET MODE

LE LUXE ET LA MODE

DIFFÉRENCE ENTRE LUXE ET MARQUE DE LUXE

Le produit de luxe est, par définition, un objet dont l’utilité n’est pas essentielle pour les activités quotidiennes d’un individu. Son prix (sa valeur sur le marché) ne correspond pas à sa seule utilité immédiate. Un vêtement de luxe, coûte dix, cent, voire mille fois plus cher que le même vêtement produit en série pour une consommation de masse. Au final, le consommateur fera le même usage de ce vêtement. La marque du produit du luxe et son utilité sociale liée jouent alors un rôle beaucoup plus prépondérant que pour n’importe quel autre produit. Ainsi, lorsqu’on achète un vêtement de luxe, le prix se décompose entre une valeur d’usage minoritaire (le vêtement) et une valeur sociale majoritaire (la marque). Lorsque le consommateur évalue la différence de prix entre l’objet marqué et un objet équivalent non marqué, il faut que cette différence de prix soit justifiée à la fois par une qualité de fabrication au moins égale à l’objet non marqué et par des représentations liées à la marque suffisamment positives et modernes. En effet, les effets de mode jouent un rôle fondamental dans l’industrie du luxe.

Le produit de luxe est un produit qui raconte une histoire. L’univers de la marque structure l’imagination et permet à celle-ci d’entrer en résonance avec l’inconscient collectif. Il semblerait que l’importance du poids de l’histoire d’une marque de luxe s’avère être un facteur déterminant, seulement si les spécificités de cette marque, ses repères, ses codes de reconnaissance sont toujours émergents, facilement lisibles et d’actualité ou actualisés, grâce à une politique de création - innovation significative et habilement corrélée avec le style et l’identité de la marque. Seules les marques anciennes, ayant du sens, révélant un acquis traditionnel émergent, intelligemment adapté au nouvel environnement, sans rupture d’image violente et sans provocation décalée, se perpétuent et continuent de compter parmi les marques porteuses à l’international. Les marques ayant prouvé, à travers l’histoire, une capacité permanente d’invention et disposant d’un territoire symbolique riche, peuvent développer leur notoriété à l’international, en se distinguant de plus en plus efficacement au sein de leur champ concurrentiel. La plus grande richesse d’une marque de luxe est la culture de ses différences, qui constitue son patrimoine symbolique.

L’une des principales caractéristiques de la mode est sa dimension éphémère : « une mode a à peine détruit une autre mode, qu’elle est abolie par une plus nouvelle, qui cède elle même à celle qui la suit » constatait déjà Jean de La Bruyère. De manière plus concise, Jean Cocteau affirmait que « la mode, c’est ce qui se démode ». Le rapport au temps observé dans la mode est donc diamétralement opposé à la temporalité du luxe. La mode aime se surexposer. Elle se projette vers l’extérieur alors que le luxe est censé être plutôt une expérience intime. Cependant, de nombreux acteurs de la mode se sont laissés attirer par les sirènes du luxe. Et le luxe s’est offert corps et âme à la mode. Ainsi, il est possible de dégager des caractéristiques communes à la mode et au luxe. La mode est l’une des meilleures vitrines du luxe car elle repose sur la magie du créateur, la beauté, la séduction et la fonction sociale.

Il est difficile de définir ce qu’est une marque de luxe, Jean-Noël Kapferer dans son ouvrage sur les marques explique que « le flou définitionnel du luxe ne fait que préfigurer la disparition de certaines différences essentielles entre le management d’une marque de luxe et le management d’une marque, disons d’une grande marque. (…) Le problème du mot luxe est qu’il est à la fois un concept (une catégorie), un sentiment subjectif et un terme porteur d’une critique sous-jacente, d’une contestation sur le plan moral. Ainsi ce qui est

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luxe pour les uns, est banal pour les autres, certaines marques se voyant étiquetées de marque de luxe par une partie de l’opinion et de grande marque tout simplement par une autre partie ».

LA TRANSFORMATION DU BIEN DE LUXE EN PRODUIT DE NÉCESSITÉ

Une observation attentive des habitudes de consommation contemporaines démontre que de nombreux produits autrefois considérés comme luxueux sont devenus des produits de consommation courante : c’est le cas du saumon fumé, du foie gras, de certains matériels électroniques ou informatiques, etc… Certaines marques se démocratisent largement pour pouvoir toucher une clientèle plus large et accroître leur chiffre d’affaires. Des grands couturiers s’associent avec des réseaux de distribution populaires pour vendre des produits griffés à prix cassés comme Karl Lagerfeld avec H&M ou Jean-Paul Gaultier avec La Redoute. Il semblerait alors que tout ce qui paraît luxueux aujourd’hui a vocation à être vendu demain à grande échelle au plus grand nombre à prix modéré. En ce sens, l’industrie du luxe constitue un des principaux fondements de l’économie capitaliste de marché. La transformation d’objets de luxe en produits de nécessité et la popularisation progressive des normes de confort qui étaient autrefois réservées aux classes aisées semblent être les deux principes constitutifs de la modernisation en marche induite par ce type de système économique.

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LES ACTEURS DU LUXE LE COMITÉ COLBERT

Il est impossible de parler du Luxe et notamment du Luxe français sans évoquer le Comité Colbert. Souvent moins connu que des grands groupes du luxe comme LVMH ou PPR dont on parlera plus tard, il a un rôle fondamental et essentiel dans l’industrie du luxe en France. Mais qu’est-ce que le Comité Colbert ? Le Comité Colbert, créé en 1954 à l’initiative de Jean-Jacques Guerlain, a choisi de porter le nom d’une figure marquante de l’histoire française, celle de Jean-Baptiste Colbert qui, surintendant des bâtiments du roi Louis XIV, des arts et manufactures, a fondé la renommée du savoir-faire français à travers le monde. Il a encouragé la création de manufactures, en important parfois des savoir-faire d’excellence, et l’exportation, en développant la marine, l’aménagement des ports et en créant la Compagnie des Indes orientales et des Indes occidentales. Homme de culture, c’est notamment lui qui a fondé la Comédie-Française. Rassemblant 15 maisons en 1954, le Comité Colbert en compte aujourd’hui 78. Depuis son origine, il regroupe des maisons exportatrices autour des savoir-faire et de la création. Des plus anciennes, créées au IX° siècle aux plus récentes, nées au XXI° siècle, ces maisons sont issues de 12 secteurs d’activités qui représentent ensemble l’art de vivre français. Le Comité Colbert rassemble 78 maisons de tailles diverses, de création ancienne ou récente. Elles partagent les mêmes valeurs et portent l’image de la France dans le monde. Les membres sont cooptés – et se cooptent annuellement – sur la base de cinq critères : l’ambition internationale et le caractère identitaire de la marque, la qualité, la création, la poésie de l’objet, l’éthique. Il réunit donc vraiment l’excellence française dans tous les champs possibles : Argent et Bronze, Cristal, Cuir, Décoration, Édition, Faïence et porcelaine, Gastronomie, Haute Couture / Mode, Hospitalité, Or et matière précieuses, Parfum et cosmétique, et Vigne. On trouve, parmi ces prestigieuses maisons, Alain Ducasse au Plaza Athénée, Baccarat, Berluti, Boucheron, Cartier, Céline, Chanel, Chloé, Christian Dior Couture, Christofle, Flammarion Beaux Livres, Hermès, Hotêl Ritz, Jeanne Lanvin, Le notre, Louis Vuitton, etc… Le luxe français est le seul secteur industriel qui a choisi de se doter d’un porte-parole et d’une stratégie collective, complémentaire de l’identité propre à chaque maison. Partant du seul principe qu’à plusieurs, on est plus fort. C’est aussi s’assurer d’une meilleure représentation et d’une communication plus efficace. Missions Le Comité Colbert à diverses missions, que l’on peut regrouper sous 4 grands pôles : Incarner Par la diversité de ses membres, le Comité Colbert incarne le goût français et porte les valeurs qui lui sont spécifiques. Il élabore et met en oeuvre la stratégie collective du luxe français, complémentaire de la stratégie individuelle de ses membres. Anticiper Lieu d’échanges de bonnes pratiques et de réflexion prospective, le Comité Colbert fournit à ses membres les outils de leur développement futur.

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Rayonner Le Comité Colbert promeut à travers le monde l’art de vivre français qu’il représente. Il met en scène des événements sur les 5 continents qui manifestent les liens étroits qui unissent le luxe à la culture. Influencer Pour assurer le développement de ses maisons, le Comité Colbert intervient en tant qu’interlocuteur privilégié auprès des pouvoirs publics en France, en Europe et dans le monde. Il œuvre pour la préservation de la valeur patrimoniale des savoirfaires français, au respect de la propriété intellectuelle, et à la prise en compte par l’environnement législatifs les intérêts des membres du comité, en France et en Europe. Organisation Il peut être difficile de saisir à quoi correspond exactement Le Comité Colbert. C’est une entité très particulière, à ne pas confondre à un grand groupe du luxe. Le Comité Colbert est une entité originale, ni fédération ni syndicat. Son fonctionnement est celui d’une association régie par la loi du 1er juillet 1901. L’importance du réseau Le comité est un vrai lieu de réflexion et d’anticipation, et constitue un creuset d’échanges et de propositions apportant des outils de développement aux maisons membres. Il mobilise un réseau de 1 200 collaborateurs soucieux de pouvoir échanger autour de thématiques et de projets communs. Le travail s’élabore au quotidien au sein des 9 commissions de travail, composées de membres des maisons, présidents ou personnes occupant des fonctions dirigeantes. On retrouvera par exemple à la présidence de la commission Économique Françoise Montenay, présidente du conseil de surveillance chez Chanel, Yves Carcelle à la tête de la commission internationale et culturelle qui n’est autre que le président du LV Group, ou encore Sydney Tolenado à la commission des pouvoirs publics, président de Christian Dior Couture. L’ensemble de ces commissions réunies rassemble 120 personnes qui pilotent les projets et les actions du Comité sur tous les sujets d’intérêt collectif : création, économie, éthique, international et culturel, métiers et ressources humaines, règlementation…Ces commissions travaillent quant à elles, en relation avec de plus larges réseaux d’expertise dans lesquels sont impliqués plus de 1 000 collaborateurs dans les maisons. Si, l’intérêt du Comité paraît encore flou, prenons des exemples plus concrets. Ainsi, on retrouve le Colbert Labo, un vivier d’idées neuves initié par la Commission Economique, qui rassemble près de 70 jeunes collaborateurs, âgés de 25 à 33 ans, au sein des maisons Colbert. Ils sont invités à réfléchir sur des thématiques prospectives et sur les valeurs du luxe français. La Commission Métiers et Ressources Humaines a, de son côté, convié les membres des maisons, responsables des ressources humaines, à une matinée d’échanges sur le bien être au travail et sur l’égalité professionnelle entre femmes et hommes tandis que la Commission Ethique et Nouveaux Membres réunissait les responsables du développement durable pour réviser le document de valeurs et objectifs adopté en assemblée générale l’année précédente… Un dernier exemple du rôle du comité, qui nous intéressera davantage, car elle concerne l’emploi et notamment la recherche de jeunes talents, grâce la collaboration mise en place depuis deux ans avec l’ENSAAMA Olivier de Serres, sous l’impulsion de la Commission Création. Dans le cadre du Master Viénot en stratégie du Design, en co-habilitation avec l’université d’Evry, une vingtaine d’étudiants en post-diplôme, titulaires d’un DSAA ou équivalent en design produit, graphisme, ou architecture d’intérieur on accès à ce qui s’apparente à un laboratoire de recherche. Le Comité Colbert, dans ce programme souhaite offrir à ces talents qu’il qualifie d’émergents, de vraies passerelles avec le monde de l’entreprise, celui de l’univers spécifique du luxe français, en leur donnant l’opportunité d’en apprivoiser les codes au contact des professionnels du secteur. Ainsi, l’année du master se décompose en deux semestres autour de thèmes de recherche élaborés par chacune des maisons participantes en concertation avec l’équipe pédagogique. Un premier semestre est composé de cours et de conférences donnés à la fois par des enseignants chercheurs et des intervenants pro-

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fessionnels, le tout complété par des workshops organisés avec les entreprises et les institutions. Au second semestre, les étudiants effectuent un stage de six mois à partir de la mi-février en immersion totale. L’obtention du diplôme se fait après évaluation finale de l’ensemble des deux semestres en septembre. Les maisons participantes ont à proposer un sujet et développer un brief précis en collaboration avec l’équipe enseignante, donner des conférences pour mieux faire connaître le secteur du luxe, organiser des demi-journées de découverte in-situ dans les lieux de production, les archives ou les boutiques. Enfin, il y a aussi et surtout le travail de suivi du ou des étudiants ou groupes ayant choisi le sujet de la maison qui va durer les deux mois du workshop sans oublier la participation au rendu final des projets et la réunion de jury. L’an passé, Bernardaud, Chanel, Hermès, Ercuis, ST Dupont et Boucheron ont tenté l’expérience, en donnant de leur temps et en mettant à disposition leurs équipes pour un résultat très positif. Notamment treize embauches dont une chez Chanel et un contrat indépendant chez Boucheron. Pour l’année 2012-2013, les maisons Chanel, Hermès et Bernardaud continuent sur leur lancée, rejointes par Longchamp, Christian Dior et Yves Delorme. Jusqu’à présent, le Comité Colbert n’était composé que de maisons françaises mais, depuis le 30 juin 2011, le Comité s’est ouvert à 4 maisons étrangères. En effet, le Comité Colbert a coopté 4 maisons de luxe non-françaises: Herend (Hongrie, porcelaine), Moser (République Tchèque ; verrerie), Montblanc (Allemagne, instruments d’écriture et horlogerie) et Leica (Allemagne, instruments de photographie et d’optique). C’est une véritable révolution pour le Comité qui se place ainsi comme véritable lobby européen du Luxe et non plus comme défenseur du Luxe français. Le but de ces opérations étant de défendre les intérêts de l’industrie du Luxe face à la mondialisation et à l’explosion du commerce électronique. Les enjeux auxquels sera confronté le Comité seront notamment d’influencer la législation européenne sur le e-commerce afin de préserver les avantages comme les règles de distribution sélective obtenues en 2010.

LES GRANDS GROUPES

Après le Comité Colbert, emblème du luxe à la française, qu’on a bien pris soin de distinguer des grands groupes du luxe par son identité, je vais maintenant m’intéresser à ces grands groupes, dont on entend très souvent parler, à l’instar de LVMH ou de Kering, anciennement PPR. Ces grands groupes de luxe sont en réalité ce que l’on appelle des Holding. Un ou une1 holding ou société faîtière est une société ayant pour vocation de regrouper des participations dans diverses sociétés et d’en assurer l’unité de direction. La création d’une holding permet aux majoritaires d’accroître leur pouvoir dans les affaires gérées. Via des participations financières, le (la) holding gère et contrôle des sociétés ayant des intérêts communs. Il est souvent qualifié de « société consolidante » dans la mesure où elle se contente de faire remonter dans son bilan les différents postes-comptables de ses participations. En général, la société holding est une société mère. Elle permet à une personne ou à un groupe de personnes de détenir et/ou de contrôler une multitude de sociétés nationales et internationales sans avoir besoin d’apparaître en tant que dirigeant de toutes les sociétés « filles ». Une holding peut également effectuer des actions de contrôle, d’aide au lancement d’entreprises récemment créées, gérer des brevets, placements et financements. Un des grands intérêts des holdings est de pouvoir détenir de nombreuses participations, et partant un contrôle relativement important, à partir d’un capital réduit, ce grâce à la possession de holdings par d’autres holdings. En effet, il suffit de posséder 50 % + 1 action d’une entreprise pour la contrôler.

La plus connue, le leader c’est bien sûr LVMH. Moët Hennessy Louis Vuitton est une holding détenant plus de cinquante marques dans le secteur du luxe. Le groupe LVMH est né en 1987 du rapprochement

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de Moët Hennessy et de Louis Vuitton qui a permis de constituer le leader mondial des produits de luxe. Héritier d’une longue histoire, LVMH réunit des métiers nobles, à fortes traditions et un ensemble unique de marques mondialement établies. Dans le domaine du champagne, des spiritueux et de la maroquinerie, les sociétés qui le composent sont plus que centenaires, voire bicentenaires : les origines de Moët & Chandon remontent à 1743, celles de Veuve Clicquot Ponsardin à 1772, celles du cognac Hennessy à 1765 ; Johan-Joseph Krug fonda sa Maison en 1843, les origines d’Yquem et de son vin remontent à 1593. La Maison Louis Vuitton a été fondée, pour sa part, en 1854. Dans le domaine des parfums et cosmétiques et dans celui de la couture, les sociétés, parfois de création plus récente, ont développé au fil du temps leur rayonnement international. L’origine de la Maison Guerlain remonte à 1829, celle de Christian Dior à 1947. Givenchy a été fondé en 1951 et le lancement de ses parfums remonte à 1957.C’est une série de rapprochements successifs, opérés par des sociétés que leurs affinités destinaient à s’unir, qui a concouru à la constitution du groupe LVMH. Aujourd’hui le groupe LVMH compte plus de 50 marques grâce à une politique de croissance externe agressive. On y compte parmi les marques de mode Louis Vuitton évidemment, Céline, Berluti, Kenzo, Givenchy, Marc Jacobs, Fendi, ou encore Emilio Pucci. Bernard Arnault s’était penché aussi sur des marques moins prestigieuses comme Sandro, Maje et Claudie Pierlot qu’il avait racheté en 2010, avant de les revendre en 2012. Formant alors le groupe SMPC, ces marques se font rachetées en 2013 par le fond d’investissement KKR qui détient désormais 65% du capital (le montant de la transaction n’ayant pas été dévoilé). Sandro, Maje et Claudie Pierlot comptent 5 boutiques à Hong Kong, ont ouvert au total 69 points de vente en Amérique du Nord en 18 mois et doivent en ouvrir deux à Shanghai en juillet. On remarque bien là le schéma classique de l’exportation du luxe ou du haut de gamme de l’Europe à l’Asie, puis à l’Amérique du Nord, et l’importance des groupes pour le développement d’une marque. En juillet dernier, LVMH acquiert la célèbre marque de luxe Loro Piana pour 2 milliards d’euros, de 80% du capital de la marque.

Autre groupe très important, le groupe Kering. Kering, anciennement Pinault-Printemps-Redoute (PPR), est une holding française, elle-même composée de plusieurs groupes ou marques, créée par le milliardaire François Pinault et pilotée par la holding Artémis. Kering développe au travers de ses filiales un portefeuille de marques grand public et de luxe qui sont distribuées dans cent-vingt pays. C’est le 2 juin 1962 que François Pinault inaugure les Établissements Pinault spécialisés d’abord dans le négoce du bois, puis également dans les matériaux de construction. Le groupe va grandir avec la prise de contrôle d’enseignes de distribution grand public comme le Printemps, la Redoute, ou encore la Fnac. Mais c’est l’année 1999 qui marque l’entrée de PPR dans le secteur du Luxe avec l’acquisition de 42% de Gucci Group NV. Désormais, le groupe possède des marques de luxe de renom telles que Yves Saint Laurent, Sergio Rossi, Bottega Veneta, Balenciaga, et a signé des accords de partenariat avec Stella McCartney et Alexander McQueen. Les derniers chiffres publiés de PPR montrent des résultats en forte hausse, et une nouvelle fois portés par les performances de ses marques de luxe. En effet, celle-ci compense la baisse des résultats de la filiale Puma. Le groupe propriétaire de Gucci, a publié un résultat opérationnel courant en hausse de 19,3% à 1,79 milliard d’euros. Le chiffre d’affaires a progressé de 20,8% (+10,6% à taux de change constants) à 9,73 milliards d’euros. Cela fait suite à un recentrage progressif sur le luxe entreprit par PPR depuis 2005. Effectivement, les activités de distribution, considérées comme non stratégiques par le groupe qui se recentre sur le luxe et la mode sportive, ont été sorties des comptes de PPR pour l’année 2012. Ensemble, elles représentent une perte nette de 276 millions d’euros qui inclut des dépréciations d’actifs de 288 millions d’euros et des coûts de restructuration de 149 millions d’euros. Par exemple, la Fnac a reculé en 2012 de 23% à 79 millions d’euros, tandis que celui de Redcats, dont la cession a été engagée, est resté stable à 115 millions d’euros.

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Cédant Conforama au sud-africain Steinhoff en 2011, le groupe se transforme et se recentre vers ses deux pôles Luxe et Sport, pour abandonner petit à petit la distribution ; Redcats et la FNAC allant être revendus. En janvier 2013, PPR signe avec Christopher Kane un partenariat, le groupe rachetant 51% de la marque. Et finalement, en décembre 2013, la Redoute cède la redoute à ses dirigeants. Pour parachever totalement le recentrage du groupe entamé en 2005 autour des marques de luxe et de sport, le PDG François Henri Pinault propose un nouveau nom pour le groupe : Kering. Ker signiant « maison », « foyer », et le suffixe anglais –ing suggérant l’action.

En troisième exemple, je citerai le groupe Hermès International. Cette société, qui a su quasiment rester familiale puisqu’elle appartient majoritairement à ses héritiers, qui œuvre dans la conception, la fabrication et la vente de produits de luxe, notamment dans les domaines de la maroquinerie, du prêt-à-porter, de la parfumerie, de l’horlogerie, de la maison, de l’art de vivre et des arts de la table. Fondée à Paris en 1837 par Thierry Hermès, l’entreprise était à l’origine une manufacture de harnais et de selles. Hermès n’a pas participé au mouvement de concentration du luxe lors des années 1999 et 2000. Cependant, dans les années 1990, la maison achète l’orfèvre Puiforcat par l’intermédiaire de Castille Investissement, une holding conjoint de Hermès et de Pochet mais également le groupe devient actionnaire majoritaire des cristalleries de Saint-Louis, et acquiert la maison de soierie BUCOL à Lyon. Hermès prend également des participations minoritaires de 35 % dans le capital de la maison Jean Paul Gaultier en 1999, puis 15 % une dizaine d’années après, et de 31,5 % dans celui de Leica, participation revendue depuis. Fin 2012, les « familles Hermès » prennent une participation significative dans le capital du joaillier Arthus-Bertrand. C’est donc une grande bataille que mènent ces géants du luxe, et qui les poussent à établir les stratégies parfois les plus fourbes. À l’instar de l’affaire LVMH-Hermès. En effet, tout commence à l’automne 2010. Le samedi 23 octobre, à la stupéfaction générale, LVMH déclare posséder 14,2% et bientôt 17,1% du sellier du Faubourg Saint-Honoré, coté en Bourse depuis 1993 mais détenu en majorité par les héritiers du fondateur Thierry Hermès. Et ce, grâce notamment à des produits financiers dérivés, révélant l’ingéniosité des financiers du leader mondial du luxe. Tout commence à l’automne 2010. Le samedi 23 octobre, à la stupéfaction générale, LVMH déclare posséder 14,2% et bientôt 17,1% du sellier du Faubourg Saint-Honoré, coté en Bourse depuis 1993 mais détenu en majorité par les héritiers du fondateur Thierry Hermès. Et ce, grâce notamment à des produits financiers dérivés, révélant l’ingéniosité des financiers du leader mondial du luxe. Pourtant, la loi oblige toute société achetant un certain nombre d’actions d’une entreprise cotée à se déclarer auprès de l’AMF (le gendarme de la Bourse), rendant ainsi l’information publique. Une façon de «voir arriver» les prises de contrôle et éviter les rachats sauvages en Bourse. Comment Bernard Arnault a-t-il pu faire alors? Dès lors qu’un actionnaire franchit la barre symbolique d’une société cotée (5%, 10%, 15%...), il est tenu d’effectuer une déclaration préalable de franchissement de seuil. Ce que LVMH n’a jamais fait avant octobre 2010. En 2001, le groupe rachète très exactement 4,9% d’Hermès, via ses filiales luxembourgeoises et américaines. Ces 4,9% d’actions d’Hermès sont pour l’instant transférées dans des paradis fiscaux. En 2006, LVMH organise alors le rachat de titres Hermès en étoile, via trois banques, de façon à ce qu’aucune d’entre elles ne franchisse le cap symbolique des 5%. Natixis acquiert de son côté 4,7%, la Société Générale 4,5% et le Crédit Agricole 3%, par une astuce : l’utilisation d’»equity swaps à dénouement monétaire». Pour faire simple, ces instruments financiers opaques permettent de jouer sur un titre boursier sans le posséder. Mais tout en gardant la possibilité de l’obtenir à terme. Il s’agit donc d’une sorte d’option d’achat.

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Selon l’AMF, cette technique a pour «effet opportun de ne donner aucune information claire et individualisée sur ces equity swaps et de les rendre indétectables par le public». Vient alors le mois de juin 2010, quand LVMH décide de rentrer officiellement dans la bergerie. Le groupe de Bernard Arnault demande ainsi aux trois banques d’être payé en actions, et non plus en cash. Et les titres Hermès atterrissent dans le giron de LVMH. Le 23 octobre, le groupe annonce officiellement détenir 14,1% d’Hermès, puis 17,1% le 26 octobre, 20,21% le 21 décembre, 21,4% en juillet 2011, 22,28% en décembre 2011. La famille Hermès s’est depuis constituée sa holding H51 qui rassemble 50,2% du capital, soit des titres de 52 héritiers pour contrer LVMH. On retrouve donc d’un coté LVMH qui ne souhaite pas voir son intégrité entachée, de l’autre, Hermès, pour qui le véritable enjeu se situe ailleurs, dans la plainte au pénal qu’il a déposée en septembre 2012 contre LVMH pour manipulation de cours et délit d’initié. Avec la nomination d’un juge d’instruction aux moyens d’enquête élargis, Hermès espère avoir accès aux contrats des fameux «equity swaps» pour pouvoir les attaquer et les faire annuler pour fraude.

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LE MARCHÉ MONDIAL DU LUXE

LES CHIFFRES

Le marché mondial des biens du luxe a plus que doublé entre 1995 et 2010 et pourrait à nouveau doubler d’ici 2025. En 50 ans, la part du luxe dans la consommation individuelle a augmenté 100 fois plus que celle des autres produits. Il s’agit d’un des secteurs de croissance les plus prometteur. Pour l’année 2010, le marché du luxe représentait 168 milliards d’euros à l’échelle du monde, répartis sur 6 secteurs d’activité: - horlogerie/joaillerie : 12 M€ - gastronomie/vin et spiritueux : 47,5 M€ - parfums/cosmétique : 33,5 M€ - mode/accessoires: 48 M€ - voyage/tourisme/hôtellerie/sport: 30 M€ - art/haute fidélité : 9 M€ Secteurs où nous pourrions également ajouter les autres formes que peut prendre le luxe telles que l’automobile de prestige, la nautique, la décoration intérieure ou encore les biens de haute technologie.Toutefois, le secteur du luxe mondial paraît relativement modeste en comparaison de la grande distribution avec l’exemple d’un des leaders du marché, Carrefour, qui représente à lui seul 101M€, soit plus de la moitié du secteur mondialisé du luxe.

LE LUXE ET LA FRANCE

La France représente à elle seule un tiers du chiffre d’affaires du luxe mondial. La principale raison de ce succès provient de son histoire. En effet, en 2009, 39,9 % des groupes de luxe mondiaux composés des marques les plus prestigieuses, sont originaires de France et le plus important y est établi. Les Etats-Unis ne représentent que 19,5%, l’Italie 18,1% et les Anglais, loin derrière, avec seulement 2,1%. De plus, elle possède, avec l’Italie, des savoir-faire uniques dans tous les domaines du luxe aussi bien dans la mode, la maroquinerie, que dans la cosmétique. Son ancrage culturel et son rayonnement international en font le premier pays visité du monde, assurant un afflux de visiteurs et d’argent permanent. La France est un symbole du « vieux continent » pour beaucoup d’américains et un idéal de style pour la population asiatique. L’industrie du luxe est également dopée par des emblèmes mondiaux comme les marques (Chanel, Dior, Hermès,…), des produits uniques (le champagne, les vins, la gastronomie française,..) mais aussi et surtout par l’aura de Paris. La France représente, encore aujourd’hui, et dans de nombreux esprits, une référence et la définition la plus simple du luxe. La renommée de la France dans le monde permet au luxe Français de s’exporter très facilement au point de faire 80% de ses résultats en dehors du pays. Les marques françaises adhérentes du comité Colbert possèdent plus de 1600 points de vente en Chine . Le secteur du luxe est en tête des revenus à l’export devant l’aéronautique et assure 38000 emplois sur son territoire.

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QUI : CLIENT ET MARCHÉ D’AUJOURD’HUI, DE DEMAIN ET D’APRÈS DEMAIN.

Le luxe, par sa définition ne s’adresse pas à l’ensemble des consommateurs et se divise en biens matériels ou de services. Dans les pays matures, comme les pays européens, le Japon ou les USA, le marché du luxe est occupé à 68% par des prestations et des services alors que les pays émergeants comme la Chine, l’Inde et plus récemment le Moyen-Orient, n’y consacrent que 45% de leurs dépenses. Ils privilégient des produits visibles et « affichés », affirmant leur nouveau statut, alors que les acteurs du luxe plus anciens et donc plus matures se tournent vers des biens plus sophistiqués et moins tangibles

LES PAYS ÉMERGEANTS L’appétit des classes aisées chinoises, indiennes et brésiliennes semble pour l’heure insatiable. La Chine, malgré un récent ralentissement de son économie, compte plus d’un million de millionnaires et les dirigeants asiatiques, Chine et Inde majoritairement, annoncent un potentiel de plus de 400 millions de sujets à fort pouvoir d’achat prêts à consommer le luxe à haute dose. Selon la banque HSBC , la clientèle chinoise a déjà représentée 35% des achats luxe dans le monde en 2012 devenant ainsi les deuxièmes consommateurs mondiaux. De plus la clientèle chinoise est jeune. La moyenne d’âge d’un consommateur chinois est de 25 ans, soit 15 ans de moins qu’un européen ou qu’un américain. Les nouvelles classes aisées, même sans être très riches, souhaitent bénéficier rapidement de ce confort mais aussi en faire profiter, tout aussi rapidement, leurs enfants. Autrefois, les fortunes se construisaient plus lentement, les nouveaux venus avaient le temps de raffiner leur goûts, animés par la volonté d’intégrer les élites. Désormais, on fait fortune très vite et le temps manque pour intégrer cette culture Frédéric malle, parfumeur français Dorénavant, l’avenir et les efforts des maisons de luxe se concentrent sur trois zones géographiques: le Moyen-Orient, le Brésil et la Turquie. Le Moyen-Orient et le Brésil sont en plein essor économique et voient affluer dans leur pays des capitaux très importants. Des fortunes se créent tous les jours et de nouvelles classes aisées sont, à la manière des asiatiques, désireuses d’accéder rapidement à des produits ostensiblement luxueux. Le cas du Brésil est néanmoins particulier car le commerce ne se fait pas dans la rue. Les achats de produits de luxe s’effectuent encore exclusivement à l’intérieur de gigantesques centres commerciaux. Reliés directement à de nouveaux complexes immobiliers acquis par des familles aisées, ces zones d’achats sont entièrement fermées sur elles-mêmes avec tous les services réunis en un seul et même endroit : boutiques, restaurant, spas,… L’implantation des différentes marques haut de gamme est entièrement contrôlée par deux groupes leaders qui construisent et gèrent ces centres. Le développement dans ce pays est donc entièrement dépendant de l’évolution de ces « zones sécurisées du luxe ». La nécessité de ces bulles de sûretées est le reflet du manque de sécurité qui règne encore au Brésil.

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LE MOYEN ORIENT

La région du moyen orient est devenu un phare dans la stratégie du luxe mondiale. Sa population, relativement jeune a, ses dernières années, acquis un pouvoir d’achat très important en raison du dynamisme de son économie mondiale. Les grands représentants de cette nouvelle puissance sont Dubaï, le Quatar, Abou Dhabi, Bahrein ou encore le Koweït. Le shopping est profondément ancré dans la culture régionale car 90% des nationaux déclarent faire des achats régulièrement, et 95% quand ils en ont envie. Pilier de la vie sociale, il favorise les rencontres, surtout pour les jeunes, puisqu’ils sont parmi les rares lieux de mixité hommes-femmes. De plus, l’offre de loisirs est restreinte et les conditions climatiques contraignantes limitent les activités de plein air. Ainsi, pendant plusieurs mois de l’année, la vie se passe à l’intérieur de grands centres commerciaux dédiés à la consommation.Chez eux, ils dépensent en moyenne 1 300 $ par mois en vêtements et accessoires, dont 700 $ en prêt-àporter et 300$ en chaussures. Contrairement au reste du monde, les consommateurs de la jeune génération ont connu la richesse depuis leur naissance et sont déjà des consommateurs de luxe expérimentés. Ils disposent notamment d’un budget de 100$ par mois. Basé sur le concept de la consommation-divertissement, il s’agit d’une région où le commerce se base sur les relations, la confiance et la fidélité, ce qui fait des réseaux un élément incontournable pour réussir. Le tourisme mondial est également un point fort de cette zone géopgraphique, située entre l’orient et l’occident. Avec une croissance rapide de visiteurs, le Moyen-Orient en attend 101 millions d’ici 2020, doublant le chiffre actuel. Le nombre de voyageurs vers le Moyen-Orient a augmenté de 17% en 2012, contre 6,6% au niveau mondial. Il y a eu une augmentation de 21% pour le Qatar, de 20% pour Abou Dhabi, et de 11% pour Bahreïn. Même pour Dubaï, une destination déjà bien fréquentée, l’augmentation a été de plus de 13% En 2011, Dubaï était la ville la plus recherchée au monde par les grands groupes, devant Londres, Paris ou New York, avec 82% des grandes marques de luxe mondiales représentées. En 2009 l’Arabie Saoudite a accueilli beaucoup plus de nouveaux détaillants que partout ailleurs et en 2012 le pays était devenu la 10e destination la plus recherchée au monde par les détaillants, devant Hong Kong. Le Koweït est, quant à lui, passé de la 13e position en 2011 à la 12e position cette année.

UN AVANT GOÛT DE LA TURQUIE

En 2013, le cap des maisons de luxe, françaises principalement, est mis sur la Turquie. À l’aide du Comité Colbert, qui concentre son action sur les marchés émergents pour le développement du luxe, les grands groupes ont appris à comprendre et se sont informés précisément sur l’état actuel du pays. Ils ont mis en place des stratégies internes pour appréhender au mieux leur implantation sur ce nouveau marché. Une conférence réunissant les adhérents du Comité Colbert à permis de définir les enjeux géopolitiques et économiques de cette puissance qui connaît une croissance sans égale en Europe, et qui s’inscrit, de fait, parmi les pays les plus dynamiques du monde sur le plan économique.Territoire charnière entre l’Europe et l’Asie Centrale, la Turquie est un partenaire privilégié qui réduit progressivement les droits de douane et les frais sur l’importation des produits industriels de l’Union Européenne. Pays en pleine révolution culturelle, la Turquie voit augmenter son nombre de visiteur. Istanbul et son attractivité renouvelée, parient sur la multiplication des projets prestigieux de centres commerciaux et espèrent attirer 28 millions de visiteurs par an. Les pays matures Cependant, l’avenir du luxe passe aussi par les pays matures qui restent des facteurs clés dans la stratégie mondiale de cette industrie. Selon les estimations du BCG (Boston Consulting Group), 70% des parts de marché du luxe demeurent détenus aujourd’hui par les pays matures. L’enquête annuelle menée par Ipsos (le World Luxury Tracking) montre que malgré la crise, les consommateurs des pays matures continuent d’apprécier le luxe et que la crise a même accru sa valeur à leurs yeux. Malgré une population souvent vieillissante, mais, avec une espérance de vie qui ne cesse d’augmenter, le nombre de seniors qui ont le souci de leur

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apparence et de leur qualité de vie, augmente. Ils sont plus nombreux en 2011 qu’en 2007 à considérer le luxe comme un symbole de « qualité supérieure », plus nombreux à l’envisager comme un « investissement à long terme » et plus nombreux également à rechercher dans les produits de luxe une façon d’exprimer sa personnalité à travers des créations fortes, mélanges de savoir faire et d’innovation.

EXEMPLE DU JAPON

Au Japon le luxe est ancré dans la culture nationale et se retrouve dans la conviction très largement partagée qu’il s’agit, avant tout, d’un savoir faire fondé sur un héritage. 62% des Japonais considèrent que le luxe est « une façon de ne pas se tromper ». Un trait frappant de la société japonaise est le niveau d’expertise atteint par un très grand nombre de personnes. A l’inverse de ce que l’on constate dans d’autres marchés matures, le niveau d’expertise ne dépend ni de l’âge, ni du sexe, ni du revenu et force les marques de luxe à nourrir en permanence l’axe de la qualité. EXEMPLE DE L’AMÉRIQUE DU NORD De plus, ces consommateurs de pays matures renouvellent sans cesse leur désir d’accéder au service haut de gamme. L’exemple d’un Américain démontre clairement qu’il associe beaucoup le luxe aux hôtels, aux spas, ou au voyage et sa vision du luxe est sans complexe. Au-delà de récompenser le succès (57% des Américains attendent d’une marque de luxe qu’elle leur permette d’être « reconnus pour leur réussite »), elle doit lui faire plaisir. Pour un Américain, le luxe est une récompense et un plaisir qui témoigne de sa fidélité à des valeurs. Le marché des services de luxe devrait croître deux fois plus que celui des produits dans un futur proche. Les marques qui commercialisent actuellement du produit doivent dorénavant intégrer la notion d’expérience en accentuant leur effort sur les différents points de contact avec le consommateur. La clientèle asiatique, qui commence à se familiariser peu à peu avec ce niveau de vie nouvellement acquis, fait preuve d’une exigence accrue alors que les pays matures accordent désormais une importance essentielle à l’accueil et aux conseils personnalisés. Les grands noms du luxe ont la charge nouvelle de proposer une offre unique et différenciée. Les leaders du marché peuvent, néanmoins, s’appuyer sur leur savoir-faire et leur expérience pour assimiler rapidement ces nouveaux segments dans leur stratégie de vente.

FONCTIONNEMENT D’UNE MARQUE DE LUXE

Comme nous l’avons vu dans la définition du luxe, l’achat d’un produit haut de gamme est poussé par un désir d’originalité, de satisfaction personnelle et sociale, mais il est aussi encouragé par une stratégie marketing. Les différents produits proposés par une enseigne de luxe « classique » , avec une histoire basée sur la mode, sont repartis en plusieurs échelons et s’inscrivent dans différents «niveaux du luxe ». Inaccessible Les marques célèbres mettent en avant des produits leader au travers de leurs campagnes de pub et de leur défilé saisonnier, mettant en avant la préciosité des matériaux, l’intemporalité du modèle. Ces articles sont édités en petite série et issus d’un haut travaille d’artisanat. Il s’agit ici de créer un produit, inaccessible à la plupart des consommateurs du fait de son prix, mais d’en faire une référence du style et des codes de la maison. La marque crée ainsi une essence et une aura de luxe. Intermédiaire Les produits affichés en page des magazines et portés lors des défilés sont la plupart du temps réservés à une clientèle médiatique et célèbre (placement de produit) ou bien extrêmement fortunée. La cliente des maisons de luxe doit se contenter d’un niveau de luxe intermédiaire basé sur les premières déclinaisons des produits prestigieux. Il s’agit toujours d’un produit de grande qualité mais souvent produits en quantité pour alimenter les points de vente du monde entier. La durée de vie de cet article est réduit à la saison ce qui en fait un produit de mode.

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Accessible Le dernier niveau du luxe est certainement l’un des enjeux essentiels pour une marque. Il s’agit des déclinaisons plus éloignées de l’activité principale comme les cosmétiques, le parfum, les sacs et accessoires ou encore les arts de la table. L’ensemble de ces gammes de produits sont les moteurs de l’industrie du luxe car ils financent en grande partie l’ensemble de la machine. En effet, leurs prix abordables, quelques dizaines d’euros pour un produit cosmétique à quelques centaines d’euros pour un sac, sont bien loin de ceux des vêtements où, pour les plus grandes maisons, de la haute couture. Ainsi, la maison démocratise ses produits, fabriqués en grande série avec des moyens de production parfois automatisés. Elle attire un consommateur en quête de satisfaction personnelle, sociale mais n’ayant pas les moyens de garantir son originalité et sa distinction. A son niveau et avec ses moyens il achète une part de l’aura et de l’essence mis en place par les produits de luxe inaccessibles. L’autosatisfaction et le sentiment de luxe que procurent ces produits entretiennent le chiffre d’affaires des maisons de luxe, permettant de financer de nouvelles collections et de nouveaux produits inaccessibles.

« Le parfum c’est le Canada dry du luxe. Ca ne coûte rien à produire, rien à offrir. C’est un véritable tour de passe-passe. Avec ce genre de produits, on promet le bonheur pour tous ; mais c’est une fausse idée. Pareillement pour un sac, même cher, qui est en vente dans tous les aéroports du monde, n’est pas un objet de luxe. C’est, au mieux, un objet à la mode. » Pierre Bergé.

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TROIS MARQUES « DE LUXE » HERMÈS

HISTORIQUE

PRODUIT

La maison Hermès, crée par Thierry Hermès en 1837, était à ses débuts une entreprise artisanale, spécialisée dans la vente de produits de selleries, de harnais et d’équipements pour chevaux. Dans le seconde moitié du XIXème siècle, l’entreprise familiale diversifie sa production en proposant des articles d’équitation dans sa nouvelle boutique du Faubourg Saint Honoré. Dès le début du Xxème siècle, cavaliers et voyageurs reconnaissent le talent de la maison pour ses grand sacs en cuir, à la fois fonctionnels et esthétiques. Avec l’essor de l’industrie de l’automobile et du bagage, les héritiers Hermès ont su adapter leur savoir-faire artisanal aux innovations modernes. Dans les années 1920, ils étendent leur influence sur la mode féminine et masculine, à l’horlogerie et la bijouterie et inventent des produits qui deviendront iconiques. Leur ligne de conduite reste inchangée depuis leur création, Hermès n’est pas une maison de luxe, c’est une maison de qualité absolue. « Nous sommes des artisans, notre but est de faire des produits les meilleurs du monde. Nous ne sommes pas dans le luxe, nous sommes dans la qualité » Bertrand Puech, ancien directeur du conseil de gestion et membre de la famille Hermès.

Hermès est devenu un groupe multi produits basé sur un cœur de métier qui est la maroquinerie mais proposant néanmoins une offre globale. Il est présent dans tous les secteurs haut de gamme : - la maroquinerie : sacs, bagages, commandes spéciales, agendas… 50% du CA - les vêtements et accessoires : pap homme et femme, chaussures, ceintures… 19% du CA - produits divers : parfums, montres, bijoux, art de la table,… 19% du CA - soie et textile : carrés de soie et cravates 12% du CA La maison est riche d’un catalogue de 50 000 références dont 33 500 sont changées tous les 6 mois. En réalisant la moitié de son chiffre d’affaires sur la vente de maroquinerie, Hermès légitimise toujours sa présence historique sur le marché en réussissant tout de même à toucher une clientèle diversifiée grâce à un élargissement de son offre. Le style classique de ses produits, les best-sellers commerciaux, les séries limitées et les commandes spéciales réalisées sur mesure permettent d’assurer une renommée internationale permanente. Si la maison Hermès continue d’afficher une réussite constante, c’est qu’elle a su installer des produits indépassables, qui ne se démodent pas et que les créateurs réinventent chaque saison en conservant leurs essences. Le plus bel exemple de cette réussite est le sac Kelly. Inventé en 1935 et destiné principalement aux cavaliers, le sac séduit rapidement les femmes et surtout une icône de l’élégance à la française, Grace Kelly. Cette visibilité exceptionnelle pousse la maison à renommer son modèle qui, à partir de 1956, s’appellera le Kelly. Depuis, il fait l’objet de rééditions et de réactualisations. Disponible en plusieurs tailles, il est personnalisable avec une gamme de 90 couleurs et matières différentes. Son prix moyen est de 3500€ mais certains modèles ne sont disponibles que sur liste d’attente, s’étalant parfois sur 2 ans. Le deuxième emblème de la maison est le carré de soie. Crée en 1937, il s’est écoulé à des millions d’exemplaires. Comme le sac Kelly, plusieurs tailles sont disponibles. L’édition de 20 dessins originaux par an et la réédition de 5 classiques permet de répondre à l’envie de nouveauté des consommateurs mais aussi de proposer des produits plus classiques. Adaptés en fonction des pays où il est commercialisé, les dessins, les couleurs et les thèmes peuvent varier. Fabriqué dans les ateliers lyonnais, le carré est l’œuvre d’une technique de confection et d’impression artisanale. Sa qualité reconnue permet à Hermès de proposer ses carrés aux

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alentours de 330€.

La famille a néanmoins réussi à s’imposer dans le monde du luxe en explorant des sphères plus éloignées de son domaine historique. La marque est devenue incontournable dans le secteur de la mode mais aussi de l’art de vivre. Il s’agit du parfait exemple de l’alliance entre plaisir d’avoir et plaisir d’être. Elle a su s’imposer dans le domaine de la mode en confiant la direction artistique à des talents confirmés comme Martin Margiela, Jean-Paul Gaultier et depuis 2011 à Christophe Lemaire. S’assurer une visibilité dans le domaine de la mode « médiatique » participe à la frénésie autour de ses « produits de mode » et reste essentielle pour attirer les clients vers des produits plus classiques. Associer la création et le « métier » est une force rare que la maison Hermès réussi à conserver. De plus en plus présente dans le secteur de la maison, la famille Hermès n’a pas échappé à l’attrait nouveau pour la décoration et le mobilier design. Il est important de noter qu’elle a souhaité investir dans une entreprise mythique du cristal, Saint Louis, pour garantir la survie de ce métier d’art. Elle possède d’ores et déjà une ligne complète dans les arts de table et propose sa vision personnelle d’un art de vivre. Toujours fabriqués avec des matériaux précieux et selon des techniques artisanales l’univers de la maison de décline en gamme de cristal, de porcelaine et des services de couverts. On retrouve aussi une très large gamme de produits d’intérieur comme les coussins et tout autres produits de décorations. Ces gammes de produits sont affichés à des prix très élevés, réservés à un consommateur avec des moyens importants (assiette à partir de 60€ l’unité, des plaids à 1000€ et des vases à 2600€).

CLIENTÈLE

La clientèle d’Hermès est hétérogène. Elle regroupe à la fois des clients fortunés ayant les moyens d’acquérir ses produits de luxe mais aussi, à la différence d’autres marques, des clients occasionnels avec un budget plus restreint. En effet, si la qualité supérieure des produits attire les clients fortunés c’est aussi ce qui attire des clients moins habitués des marques de luxe. La qualité au profit du luxe, que n’a de cesse de privilégier Hermès, opère sur des consommateurs prêts à économiser pour acquérir un bien d’exception mais dont

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ils sont sûrs de conserver et même de transmettre. Un article est également un objet de plaisir que l’on aime offrir. La vente d’un carré Hermès passe, durant les fêtes de Noël, de 70 à 200 unités journalières. Le caractère hyper-luxe de certains produits attire une clientèle plutôt affichée comme Victoria Beckham et sa déclinaison colorée de Kellys, où comme les potentiels acheteurs du t-shirt le plus cher du monde produits par Hermès et vendu 70 000€. Cependant, ces opérations de pub qui crée le buzz autour de la marque sont rares. Être un client Hermès se vit non comme un luxe mais plutôt comme un privilège mérité.

PRODUCTION

En effet, les produits Hermès ne sont pas accessibles, pour les plus précieux, au bon vouloir de la clientèle, même riche. À la différence de ses concurrents tels que Louis Vuitton ou Gucci, l’entreprise familiale est considérée comme un artisan et non comme une machine de production d’articles griffés. La marque Hermès s’accompagne même souvent de la mention « artisan contemporain depuis 1837 ». La grande majorité des sites de production sont situés en France et quelques-uns en Italie, en Suisse, aux USA ou en Angleterre. La maison a récemment annoncé qu’elle ouvrirait deux unités de productions supplémentaires dans l’Est de la France pour répondre à la demande grandissante. Elle a d’ailleurs crée en 1989, une unité de formation sellier/maroquinier au sein d’un lycée spécialisé où elle forme et recrute la majorité des promotions sortantes. Ces agrandissements répondent aux listes d’attentes pour des articles comme le Kelly ou le Birkin qui sont closes car déjà saturées. En veillant à conserver la dimension artisanale de ses produits, Hermès ne peut s’agrandir et proposer aussi rapidement des produits comme le font ses concurrents. Néanmoins, la qualité « made in France » que la famille Hermès veut absolument conserver fait partie intégrante de sa stratégie de vente. En s’imposant de telles restrictions, elle légitimise auprès des consommateurs des prix plus élevés car soucieux de conserver leur valeur du luxe et respectueux du temps de production de leurs articles. Maintenir l’image du produit reste la priorité de la maison pour justifier son prix. De plus, faire attendre son client est aussi un atout pour sa notoriété. La restriction imposée au client, les listes d’attentes, la limitation de ces listes permet de susciter l’ envie et renforce le désir de posséder un article obtenu avec le temps. À la différence d’un sac acheté à tout moment en magasin, la maroquinerie Hermès s’anticipe et s’acquiert avec patience. En justifiant les délais par le respect de la chaîne de production, Hermès renforce son engagement de qualité et le client s’imagine avec quelle minutie et quel soin les artisans sont en train de réaliser son sac. En comparaison du célèbre sac de Longchamp, composé d’une toile nylon, d’une anse, d’un logo et fabriqué en 17 minutes, un sac Kelly nécessite 17h de travail au point main.

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DISTRIBUTION

Les points de ventes à travers le monde Hermès est présent, comme la majeure partie des grands groupes, dans le monde entier. Son réseau est néanmoins, composé de boutiques exclusivement en propres et n’est disponible dans aucun « multimarque ». Avec seulement 330 boutiques à travers la planète, le gérant depuis 2006, Patrick Thomas, dit vouloir les agrandir plutôt qu’en ouvrir d’autres. Hermès vend également ses gammes de cosmétiques et d’art de vivre dans des grands magasins, parfumeries, corners et duty-free. Le marché asiatique reste un enjeu essentiel.En 2012, les dirigeants disaient ne voir aucun symptôme de ralentissement en Chine et Hermès enregistrait une croissance de 36% malgré un léger recul des ventes de montres. La Chine représente toujours leur marché leader en Asie. 4 des 10 plus récentes ouvertures se sont déroulées en Chine après les opening en 2009 de trois boutiques en Turquie, au Brésil, au Panama et plus récemment à Beirut au Liban. La marque a également inaugurée un magasin spécialement dédié à l’univers masculin au cœur de New-York.

Le cas particulier de l’Inde Un attention particulière est réservée au secteur indien. En 2011, Hermès ouvrait sa première enseigne en propre et en dehors des hôtels où les marques de luxes sont habituellement situées. Les dirigeants du groupe ont déclaré vouloir s’implanter modestement sur ce marché, parier sur le long terme pour se faire connaître petit à petit. En effet, cette intrusion timide dans le marché colossal que représente l’Inde est due à la présence et à l’attachement des Indiens à leurs produits locaux qui se révèlent déjà d’excellente qualité. Déclarant n’avoir aucun objectif de rentabilité, le plan d’action de ce point de vente est basé sur une dizaine d’année.

La qualité des services sur le point de vente « Faire du chiffre » n’est pas le but stratégique chez Hermès, les indicateurs étant sur la bonne pente. Les efforts sont faits sur la qualité de vente, sur la satisfaction du client, quel que soit son statut, quel que soit le pays. Les vendeurs sont en charge d’un seul client, de son entrée, à sa sortie du magasin. L’accompagnement personnalisé permet de fidéliser le client qui revient tout naturellement vers « son » vendeur s’il a l’occasion de revenir. Les clients de chez Hermès sont d’ailleurs enregistrés dans une base de données permettant de les situer géographiquement, de suivre leur fidélité d’achat et de leur proposer des services supplémentaires. Les boutiques Hermès permettent également à leur clientèle de réserver des articles mais permet aussi d’échanger ou d’obtenir un avoir sur un produit, un an après son achat. Le rôle de ces services de vente est d’assurer un confort et une sympathie totale du consommateur envers Hermès. L’ensemble du personnel s’attache à donner une importance à chaque client pour lui faire vivre une expérience de luxe durant sa visite. Il est mis en valeur par son acte d’achat et dispose d’un degré de service égal à la qualité du produit.

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La vente en ligne Le groupe Hermès a été, avec Gucci, le premier acteur du luxe à explorer Internet et mettre en place un site de vente en ligne. Il ouvre sa première plateforme aux Etats-Unis en 2002, puis en France en 2005, pour finalement le proposer aux Chinois en 2011. Toutefois, l’ensemble des 50 000 références n’est pas disponible à la vente et le site marchand ne regroupe qu’une petite partie de la gamme de produits. La volonté de rareté et de vente privilégiée s’accorde en effet très mal avec cet outil de distribution. Dans un soucis de conservation de ses valeurs et pour ne pas perdre en notoriété d’ image, Hermès préfère faire de son site un enjeu de communication. Un nouveau site lancé en 2008, les ailes Hermès, interactif et très graphique permet davantage de découvrir l’univers de la marque et encourage le client à pousser la porte de ses boutiques.

COMMUNICATION

Le site Hermès Hermès jouit d’une réputation et d’une histoire dans la mode lui permettant d’être déjà bien ancré dans l’imaginaire collectif. La qualité connue de ses produits reste la meilleure de ses publicités. Le challenge de la famille Hermès est donc de maintenir son niveau d’exigence pour garantir sa réputation, tout en restant inventive et active sur le secteur de la publicité. Tout cela commence par le site, mentionné auparavant, qui est un outil médiatique essentiel car il permet de toucher un nombre très important de potentiels clients. Crée par une filiale de Publicis, le site est un reflet exemplaire de la stratégie d’Hermès. À la fois ludique et interactif, sympathique et original il séduit par son graphisme qui touche tout le monde tout en restant moderne. Il véhicule ses valeurs, son histoire et permet de visionner les produits mais aussi de connaître des aspects sur leurs productions. Il met également en avant toutes les orientations de la marque dans différents domaines : courses hippiques, prix d’excellence, mécénats, eux aussi importants pour la visibilité et le rayonnement mondial de Hermès.

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La publicité À travers ses différentes campagnes de pub, la maison met l’accent sur l’art de vivre et sur un style de vie. Toujours épurée et chaleureuse, on ne retrouve aucun signe de luxe ostentatoire ou de mise en scène criarde. Un soin tout particulier est apporté au rendu des textures et des matières pour démontrer visuellement leur qualité supérieure. Au milieu de la multitude des publicités de mode, il est difficile pour les acteurs du luxe de se différencier. Hermès essaye au maximum de se démarquer en investissant l’extérieur des magazines comme la quatrième de couverture et intervient dans des supports diversifiés comme les magazines de décorations ou d’art de vivre.

L’art de la mise en scène L’art de vivre, c’est aussi ce que veut transmettre le département visuel merchandising du groupe au travers du design de ses boutiques. L’emplacement mythique du Faubourg Saint Honoré, où fut ouverte la première boutique, est encore aujourd’hui l’essence même de l’esprit Hermès. Une importance particulière est apportée aux vitrines de ce magasin mais aussi celle du monde entier, chaque responsable de boutique étant chargé de sa décoration. Renouvelées toutes les saisons, ces vitrines sont de véritables œuvres d’art dont la réalisation est confiée à des artistes. La marque se paye le luxe de rester totalement libre et indépendante dans le choix de ces visuels et laisse une grande liberté aux designers pour laisser libre cour à leur imagination. On peut y voir des scènes narratives très diverses ou bien des œuvres d’art conjuguées aux produits mais toujours très différentes les une des autres et en décalage total avec les présentations classiques d’un produit de mode.

CONCLUSION

Le chiffre d’affaires de la maison Hermès a augmenté de 22,6 % par rapport à 2011 pour atteindre 3,48 milliards d’euros en 2012, ce chiffre étant supérieur aux attentes des analystes. Au cours des deux dernières années, les ventes ont augmenté de 45,1 % et le résultat net de 75,3 %. Selon Patrick Thomas, gérant d’Hermès International : « Le plus important, c’est que notre business model résiste aussi bien dans les pays développés que dans les pays émergents. Hermès sera encore plus beau dans vingt ans qu’aujourd’hui, on a encore de très belles années devant nous. »

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COURRÈGES HISTORIQUE Courrèges a été créé en 1961 par André et Coqueline Courrèges. La marque est alors résolument moderne et visionnaire. Elle se caractérise par une silhouette épurée, détonante. Sa dynamique l’apparente au futuriste et son esthétique au constructivisme. Roland Barthe dira « Le chic inaltérable de Chanel nous dit que la femme a déjà vécu, le neuf obstiné de Courrèges qu’elle va vivre. » Courrèges crée des vêtements adaptés aux pratiques sportives de la vie moderne « voir une collection Courrèges c’est assister à un spectacle de gymnastique, de danse et de musique » (l’officiel de la couture, septembre 1967). En 1963, ils inventent la mini-jupe qui sera portée par les idoles du moment : Brigitte Bardot, Catherine Deneuve, Françoise Hardy. Puis après être passée entre les mains de plusieurs financier, Courrèges revient en 1993 à André et Coqueline qui se recentrent sur les archives et les parfums et rachètent les licences. En 2011, Coqueline revend la maison à Jacques Bungert et Frédéric Torloting, deux publicitaires. L’épouse du couturier, qui avait repris les rênes de l’entreprise en 1995, alors que son mari se retirait des affaires, n’a jamais voulu faire de Courrèges une marque «à la mode». Elle voulait une «maison de style et de design», ainsi elle refusa de vendre la marque à LVMH qui lui avait également fait une proposition.

PRODUIT

La marque développe une ligne prêt à porter femme, une ligne accessoire maroquinerie, une gamme de parfums et compte lancer en 2014 une ligne homme. Quand Frédérique et Jacques ont repris Courrèges, au départ ils disposaient de 25 000 pièces invendus à Pau qui leur ont permis d’amorcer et de relancer l’économie de la marque. Ils ont dans un premier temps réédité certaines pièces d’archives. Ils revendiquent Courrèges comme étant une marque de luxe en communiquant, lors d’interview pour la presse, les valeurs de Coqueline Courrèges. Selon eux, le vêtement Courrèges ne se démode pas. Le « style Courrèges » se caractérise par : les chaussures plates, la mini-jupe, les collants « seconde peau », la combinaison, le blouson vinyle, les vêtements au contour souligné, le point mousse pour la maille, des matières épaisses et réversibles, le blanc mais aussi la couleur argent et des couleurs vives tel que le rouge ou le orange (surtout jamais de noir). Ils jouent avec les codes du patrimoine Courrèges, apportent parfois quelques modifications au vêtement pour le rendre plus actuel, et parfois s’en écarte pour des raisons marketing. Par exemple les couleurs ont changées, maintenant le blanc est accompagné de rose, et on remarque qu’il y a des vêtements noirs car le noir se vend bien.

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Prix relevé des prix de la collection hiver 2013-2014 : - manteau : 1200, 1700, 1900, 1450€ - cape : 1250€ - veste : 1250, 1400, 980, 1000€ - robe : 1400, 1350, 1650, 1450€ - blouson : 890 (vinyle) , 820, 1850€ (cuir) - jupe : 680, 550, 920, 500€ - pantalon : 450, 740, 1200, 650€ - maille : robe 390 tshirt 230 pull 560, 430€ - sac : 1380, 980, 550€ - porte clé : 70€ - bottines : 380€ - lunettes : 315, 270, 295€ - parfums : eau de courrèges 55€, empreinte 52€, blanc de courrèges 47€

CIBLE

PRODUCTION

La cliente Courrèges a entre 18 et 70 ans. On distingue différentes classes d’âges : - les clientes de la première heure, âgées de 60-65 ans, celles qui s’habillaient en Courrèges à l’époque d’André et de Coqueline dans les années 70. Elles achètent les articles en boutique, connaissent Grazia, la vendeuse qui faisait déjà partie de la maison à l’époque, qui les accueille et les conseille. Ce n’est à priori pas la cible de la marque mais elles sont tout de même choyées. Par exemple, si une cliente fidèle trouve 10 amies qui toutes voudraient une réédition de pièces vintages qu’elles adorent, ils le font pour elles en exclusivité. Ils sont agiles et réactifs du fait de la petite taille de l’entreprise - les femmes de 30-40 ans - les jeunes qui découvrent la marque et son univers et s’y intéressent. Cela est en partie du à l’engouement actuel pour le vintage et la mode des années 70. Ces dernières passent régulièrement à la boutique mais vont aussi chercher la perle rare en brocante ou en fripe. Ce sont des fans qui cherchent le total look Courrèges.

Courrèges dispose d’une usine à Pau, destinée à produire les prototypes, les collections spéciales et une partie des vêtements chaine et trame pour femmes. Le reste est sous-traité chez une douzaine de façonniers, tous français . À terme, ils aimeraient localiser à Pau 20 à 25% de la production contre 12% cette année. La production de maille se fait en Italie et en France chez des fabricants spécialisés dans la maille.

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Actuellement, l’usine comporte environ 25 salariés (40 personnes à paris), une partie de ceux-ci arrive en fin de carrière et l’autre partie, qui vient d’être embauchée, est composée de femmes d’une vingtaine d’années. Ces dernières doivent être formées. L’objectif des deux directeurs de Courrèges est de créer un centre de formation avec de véritables savoir-faires, ils souhaitent développer une industrie haut de gamme. Pour ce faire ils ont donc signés des contrats de génération et de professionnalisation et bénéficie d’aides de l’état. Les directeurs de Courrèges cherchent à entretenir les valeurs sociales de la marque (ils proposent par exemple aux employés des cours de fitness et de yoga durant la pause déjeuné 2 jours par semaine) L’inauguration de l’usine de Pau, qui a été remise à neuf, a eu lieu le 7 octobre dernier. Arnaud Montebourg (ministre du redressement productif) était présent pour l’événement et a approuvé les choix de la marque de garder sa production en France, avant de quitter les lieux il a dit : «Vive la renaissance de Courrèges, vive le redressement productif, vive la République, vive la France!». À titre de comparaison, dans les années 1970, l’usine employait 300 ouvrières, qui confectionnaient 4000 pièces par semaine.

DISTRIBUTION

COMMUNICATION

La boutique principale se situe à paris, rue François I, au rez de chaussé des bureaux. Ils possèdent une seconde boutique au Luxembourg depuis décembre 2013. Les collections sont également disponibles dans 130 points de ventes multimarques (New York, Sao Paolo, Londres, Milan,Moscou, Séoul et Tokyo) ainsi que sur le leur site internet. Ils comptent ouvrir un corner aux Galeries Lafayettes Haussmann en février et environ 25 boutiques d’ici à 3 ans. Pour y parvenir, Jacques Bungert et Frédéric Torloting recherchent des investisseurs susceptibles d’injecter 20 millions d’euros dans l’affaire. Ils cherchent une filiale qui pourrait être rebaptisée Courrèges Distribution, ils souhaitent rester propriétaires à 100% de Courrèges Design. Ils ne veulent donc pas faire entrer de fonds d’investissement mais des amis industrieux non obnubilés par un retour sur investissement à 3 ans.

Courrèges d’un site internet sur lequel ils proposent un service de vente en ligne. Le service E-commerce offre à la cliente un suivi personnalisé, une personne est là pour répondre au téléphone à chaque cliente, un guide des tailles très détaillé et adapté à chaque catégorie de vêtement est mis à disposition pour faciliter l’achat. Ils cherchent même par le biais de leur site internet à créer une relation unique avec les clientes, ils parlent de famille d’affinités électives. Il utilisent également le site pour communiquer sur l’histoire de la marque. On peut donc consulter en ligne le « livre courrèges » qui affiche des photos et des citations d’André et Coqueline. Courrèges est aussi active sur Facebook, Twitter, et Pinterest, notamment pour se faire connaître de la nouvelle génération.

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Boutiques La boutique principal se situe rue François Ier à Paris, au rez de chaussé du siège social et des bureaux de créations. L’espace est resté comme à l’époque d’André Courrèges. Tout est blanc et lumineux, mobilier en plexi transparent très années 70. Au 1er étage, un espace showroom est dédié à la présentation des collections aux acheteurs pendant 1 mois pour chaque nouvelle collection. Se juxtapose à la boutique, une seconde boutique : la boutique millésime. Cette boutique musée vitrine présente les pièces d’archives Courrèges. Elle est fermée au publique mais peut être ouverte sur demande. Cela montre encore une foi l’attachement au passé de la marque qui mise beaucoup sur son aura pour se relancer. Entre les 2 boutiques, il y a aussi le café blanc dont la carte et l’espace ont été repensés depuis la relance de la marque.

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Partenariats Courrèges multiplie les partenariats : Evian, Sofitel, collection capsule pour La Redoute, Alain Mikli. Ces actes commerciaux sont en même temps des actes de communications. Selon eux cela ne galvaude pas l’image de la marque qui se veut proche et non arrogante. Ils souhaitent avant tout générer de la visibilité et faire savoir que Courrèges est relancée.

Présentation des collections La marque ne propose pas de défilé, les collections sont présentés aux acheteurs et à la presse dans un showroom situé au cinquième étage de l’immeuble rue François Ier. Les directeurs justifient ce choix en expliquant que « notre époque est à l’écoute d’autre chose en matière de luxe, le timing est important mais nous n’allons pas nous précipiter. Pour commencer, nous ne ferons pas de défilés classiques (…) André Courréges mettait un temps certain pour créer ses vêtements car il voulait que tout soit pensé, réfléchi, utile à la femme. Aussi, porter un vêtement Courrèges, ça doit signifier quelque chose, comme si la cliente devenait la porte parole d’une éthique et d’un art de vivre. » Ils ajoutent «L’idée de faire des collections qui se poussent l’une l’autre n’est pas très moderne, selon nous. Nous ne voulons pas fabriquer notre propre obsolescence ». On peut également se demander si ce choix n’est aussi/surtout un choix financier et s’il va perdurer. Dans une même démarche, ils expliquent qu’ils n’ont pas voulu faire appel à un créateur en vogue. Ils affirment leur rejet du star système, toujours en s’appuyant sur les valeurs d’André Courrèges : « avec l’affaire Galliano, on a vu la fin des créateurs stars. Le luxe doit porter des valeurs d’optimisme, de gaité ; nous sommes dans une tendance générale qui, progressivement, rejoint l’esprit de Courrèges. »

CONCURRENTS

CONCLUSION

Les concurrents de Courrèges sont : Stella Mc Cartney, Lacoste, Jil Sander, et les autres belles endormies qui se sont relancées telle que Pacco Rabanne.

Les deux directeurs communiquent beaucoup sur le style avant garde et les valeurs que défendaient André et Coqueline Courrèges. Ils reviennent toujours à l’histoire de la marque (livre sur le couple que l’on peut feuilleter sur le site internet, boutique millésime qui est une vitrine mini musée...) , ce principe est une caractéristique commune à toutes les marques « endormies » qui se réveillent. Reprendre une marque qui avait disparu est moins coûteux que de créer une nouvelle marque. Le lien émotionnel avec le client est déjà créé, l’aura de la marque fait son effet. Seulement, Courrèges n’a pas été repris par un créateur mais par des entrepreneurs issus du monde de la pub qui pour l’heure se contentent de jouer avec les codes stylistiques de la marque sans créer de véritables nouveautés. Ils sont donc plus dans une démarche marketing que dans une démarche de création.

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ÉCLECTIC

HISTORIQUE

PRODUIT

La marque éclectic a été fondée il y a deux ans et demi par Franck Malègue, un ancien d’HEC. Il a travaillé pendant 15 ans dans le milieu de la mode et des cosmétiques, et est donc un habitué du luxe. Sa propre marque est essentiellement monoproduit : ce sont uniquement des vestes et des manteaux pour homme. Le concept de la marque est la volonté d’allier innovation et authenticité. Pour cela, chaque pièce est réalisée à la main dans les ateliers italiens de la marque en plein coeur du Veneto, l’entreprise familiale Sartena. Héritée de la cultura sartoriale, l’architecture du vêtement reste la clé de voûte des collections éclectic. Par l’entoilage traditionnel, la coupe des tissus au ciseau et autres particularité du savoir-faire artisanal, vestes et manteaux aspirent à une structure solide et élégante. On ne trouvera pas de costumes chez éclectic : uniquement des vestes, courtes et ajustées, car l’objectif du créateur est de les porter dépareillées, et d’adapter la veste au style de chacun, non l’inverse.

La technologie chez éclectic consiste à adapter des textiles innovants à la construction de vestes taillées de façon artisanale. Pour ce faire, la marque détourne des matières techniques du monde du sport extrême, de l’automobile ou de l’équipement militaire. Une véritable réingénierie de la veste est nécessaire pour faire cohabiter méthodes traditionnelles et fibres nouvelles, tel que le Cordura® ou les microfibres thermorégulatrices.
 Pour une sélection de pièces, éclectic fait également développer par des spécialistes des textiles exclusifs. Matières traditionnelles et fibres innovantes sont dès lors fusionnées ou juxtaposées. On peut trouver par exemple un caban qui associe la laine naturelle à un textile ultra-performant, ou encore une membrane micro-perforée qui vient renforcer le coton brossé d’un blazer ajusté. Thermicité, protection, isolation, confort, résistance sont les enjeux des vestes eclectic.

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PRIX

COMMUNICATION & CIBLE

Tentant de vendre uniquement un savoir-faire — et là s’explique le choix du monoproduit, qui est pour le créateur le meilleur moyen de privilégier la qualité — et non un savoir-faire et un nom, comme le font généreusement d’autres maisons, le prix des vestes prétend au meilleur rapport qualité/prix. Ou tout du moins, le prix le plus bas possible pour que la marque puisse se développer de façon pérenne, et que l’acheteur puisse accéder à une technique souvent réservée à une élite. Les prix varient donc de 670€ pour la veste d’entrée de gamme, jusqu’à 980€ pour le manteau le plus pointu. Les vestes sont toutes des demi-mesures. Le client, une fois arrivé dans la boutique est entièrement pris en charge par le vendeur ou par le créateur lui même, des retouches jusqu’à la livraison de la veste. En cela, le service peut-être qualifié de luxe.

Aux tous débuts de la marque, la communication se voulait intimiste et privilégiée. Le créateur a misé sur du bouche-à-oreille. Possédant un réseau certain dans l’univers de la mode et du luxe, mais aussi dans les différents milieux qui constituent les cœurs de cible de sa marque — architectes, artistes, milieu artistique en somme. Il a pour habitude, à raison d’une fois tous les deux mois, d’organiser ce qu’il appelle des « cocktails éclectic ». Il invite et reçoit dans sa boutique qui pour l’occasion se transforme en showroom et buffet dinatoire une sélection de gens, proches, personnes influentes dans le milieu de la mode ou à l’entourage potentiellement intéressant. La communication reste donc essentiellement verbal jusque là, et parie donc sur une communication virale. Néanmoins, lors de ces cocktails éclectic, il organise parallèlement dans un studio photo qui se trouve à l’arrière-boutique un shooting nommé « eclecticportraits » avec les gens présents à la soirée. Le concept « eclecticportrait : vision croisée entre un créateur et un photographe » résulte de l’association entre Franck Malègue et le photographe Nils Herrmann. L’idée est que chaque personne s’approprie une veste sous l’objectif de l’artiste allemand. Plus de 300 personnes ont déjà été prises en photo, et posent ainsi la question de l’expression de l’identité à travers le vêtement.

Ce concept plaisant pour l’invité l’incite nécessairement à se faire immortaliser avec une veste éclectic, à l’apprécier, et devient donc une façon de séduire le potentiel client.

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De surcroît, ces visuels, qui ont pu être exposé un temps à la galerie Next Level, sont largement relayés sur la page FaceBook de la marque. Les réseaux sociaux représentent ainsi un enjeu fondamental pour éclectic. Ils permettent de communiquer massivement et gratuitement. La marque effectue donc des mises à jour régulières en alimentant la page avec des nouveaux modèles de vestes, mais aussi des photos « eclecticportraits » où les gens pourront alors s’identifier et ainsi partager leur photo, ce qui permettra à éclectic une toujours plus grande visibilité. Éclectic a également eu l’occasion d’exposer l’artiste Isabelle Tournoud au sein de la boutique, pour une exposition dont le fil était au cœur de la problématique. Un moyen de toucher une cible très précise. Depuis peu, éclectic commence à publier des annonces dans la presse spécialisée, à savoir des magazines comme GQ, Monsieur Magazine ou encore The Good Life, qui sont des magazines dont la cible représente un fort potentiel pour la marque.

BOUTIQUE & DISTRIBUTION

C’est donc pour ces raisons que le magasin ne possède qu’un point de vente qui est la maison mère, située au 8 rue Charlot dans le 3ème arrondissement de Paris. La boutique possède une esthétique très épurée et radicale, dans l’esprit post-industriel, et quelque part assez éloigné des codes du luxe. La boutique aux allures de galerie d’art représente clairement pour la marque éclectic un médium de communication. Ils ont eu l’occasion en septembre 2013 d’ouvrir une boutique éphémère au Bon Marche Rive Gauche pendant un mois. Là encore il s’agit de la part du créateur d’un choix très réfléchi. Le Bon Marché Rive Gauche connaît, contrairement aux Galeries Lafayettes et au Printemps un rayonnement international. En effet, ces deux derniers étant seulement des d’immenses espaces immobiliers, ils ne font que louer des surfaces. Le Bon Marché Rive Gauche, quant à lui, effectue une réelle sélection des produits dans chaque marque qu’il sélectionne. Il y a donc un parti pris stylistique qui a fait la réputation de ce grand magasin. À l’international, éclectic a décidé de s’implanter sur le marché japonais. Le japon car le créateur y a vécu plusieurs années et connaît ce marché, d’autant plus que selon lui le Japon représente la culture qui sait allier technologie et authenticité, concept à la base de la marque. Dans un futur assez proche, le prochain objectif est de conquérir les Etats-Unis en ouvrant une boutique dans le célèbre quartier de SoHo à New York.

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PrécéDEntEs maisons : - Marc Jacobs - Alexander Wang

PrécéDEntEs maisons : - Roberto Cavalli

alExanDEr WanG

oliviEr roustEinG

PrécéDEntEs maisons :

PrécéDEntEs maisons :

- Stella MacCartney - Chloé

PhœBE Philo

- Jean Patou - Chloé - Fendi

Karl laGErFElD

PrécéDEntEs maisons : - Donna Karan - Gucci

christoPhEr BailEY

clairE WriGht KEllEr

- Cerruti

DomEnico DolcE & stEFano GaBBana

PrécéDEntEs maisons :

- Christian Lacroix - Yves Saint Laurent - Thierry Mugler - Christope Lemaire

- Christian Lacroix - Iceberg - Sonia Rykiel - Louis Vuitton

christoPhE lEmairE

PEtEr coPPinG

PrécéDEntEs maisons :

oscar rEnta

DE la

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silvia FEnDi

GiorGio armani

KatE & laura mullEavY

Jil sanDEr

PrécéDEntEs maisons :

- Céline

- Elizabeth Arden - Christian Dior

rEi KaWaBuKo

PrécéDEntEs maisons :

PrécéDEntEs maisons :

PrécéDEntEs maisons :

GuillaumE hEnrY

- Calvin Klein - Ralph Lauren - Gucci - Pringle of Scotland

- Raf Simons - Jil Sander

michaEl Kors

- Givenchy - Paul Ka

PrécéDEntEs maisons :

PrécéDEntEs maisons :

raF simons

PrécéDEntEs maisons :

- Diesel

consuElo castiGlioni

Giovanni PunGEtti

PrécéDEntEs maisons :

PrécéDEntEs maisons :

- Balenciaga

JuliEn DossEna

anGEla missoni

- Malo - N°21

miucci PraDa

alEssanDro

DEll’acQua


PrécéDEntEs maisons : -Tom Ford - Fendi

FriDa Gianinni

PrécéDEntEs maisons : - Martin Margiela

- Guy Laroche - Givenchy

YoshiYuKi miYamaE

PrécéDEntEs maisons :

PrécéDEntEs maisons :

PrécéDEntEs maisons :

carol lim & humBErton lEon

- Pierre Cardin - Jacques Esterel - Jean Patou

- Max Mara - Christophe Lemaire - Cerruti - Felipe O. Batista

JEan Paul GaultiEr

FEliPE oliviEra Batista

PrécéDEntEs maisons :

- Laroche - Saint Laurent

- Puma

sarah Burton

PrécéDEntEs maisons :

PrécéDEntEs maisons :

- Christian Lacroix - Yves Saint Laurent - Thierry Mugler - Christope Lemaire

- Christian Lacroix - Iceberg - Sonia Rykiel - Louis Vuitton

hEDi slimanE

PrécéDEntEs maisons :

valEntino Garavani

PrécéDEntEs maisons :

alBEr ElBaZ

- Jean Dessès - Guy Laroche

viKtor & rolF

- Opening Ceremony

ricK oWEns

PrécéDEntEs maisons :

viviannE WEstWooD

ricarDo tisci

PrécéDEntEs maisons : - Jean Paul Gaultier - Thierry Mugler - Trussardi - Balenciaga

nicolas GhEsQuiÈrE

PrécéDEntEs maisons : - MiuMiu

Da

GEralDo concEicao

DonattEla vErsacE

Bill GaYttEn

CARTOGRAPHIE DES DIRECTEURS ARTISTIQUES 37


La carte réalisée montre l’historique des principaux Directeurs Artistiques contemporains à travers les grandes maisons de Haute Couture. Un phénomène apparaît très clairement : les Directeurs Artistiques les plus jeunes ont déjà derrière eux une longue liste de maisons par laquelle ils sont passés. Les plus anciens, qui sont toujours présents, sont finalement eux passés par très peu de maisons, ont fait le succès d’une — ou de la leur — et y sont restés. Cela permet de mettre en avant un phénomène nouveau que l’on pourrait appeler « le mercato des DA ». De nombreuses maisons s’arrachent de jeunes designers prometteurs avant de les remercier, ou alors de les voir partir pour d’autres maisons. Ainsi, il n’est pas rare d’avoir un directeur artistique à la tête d’une grande maison pendant seulement quelques années. Par ailleurs, on constate aussi une tendance nouvelle : celle de réveiller les belles-endormies. De vieilles maisons, telle que Carven, Courrèges ou Kenzo, qui ont connu leur heure de gloire avant de péricliter. Il est légitime de se poser la question de l’intérêt. Lorsqu’un artiste meurt, personne ne continue son œuvre après sa mort. Pour les maisons, il est alors question de l’ADN de la marque. Est-ce que réanimer une maison comme Carven aujourd’hui prolonge l’ADN qui faisait l’identité de la marque avant ? Il est peu probable aujourd’hui que les gens retrouvent du la singularité Carven de l’époque dans les collections d’aujourd’hui. Pareillement, lorsque d’Hedi Slimane dessine à la maison Dior, il est difficile de voir ce qu’il persiste de Dior dans ses collections. Ainsi, pourquoi ne pas laisser l’opportunité à ces jeunes Directeurs Artistiques de monter leur propre maison plutôt que d’investir beaucoup d’argent dans certaines qui ont déjà fait leur temps ? Cela est évidemment une question de marketing. Il est plus facile de faire revivre quelque chose qui a déjà vécu, une machine qui a déjà roulé plutôt que d’en construire une de toute pièce. Une potentielle cible est déjà atteignable pour les gens pour qui le nom a été retenu. Une émotion est plus facilement provoquée chez celui chez qui sommeille un souvenir de la marque. Il y a déjà eu des succès de la sorte avec l’exemple de Gucci. Lorsque Tom Ford et Domenico De Sole s’associent pour relancer la maison italienne, avec beaucoup d’investissements en jeu, c’est une réussite. Néanmoins, cela reste un cas isolé. Lorsque les hommes d’affaire ont vu qu’un de leur confrère avait eu la méthode parfaite pour ressusciter une marque de luxe, beaucoup s’y sont essayé avec la même recette, connaissant des échecs cuisant, à l’instar de De Beers, le célèbre conglomérat diamantaire sud-africains, et Belstaff. Ces deux exemples sont les plus gros échecs de l’industrie du luxe de ces 10 dernières années.

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LES NOUVELLES ORIENTATIONS DU LUXE

LE SERVICE EST L’AVENIR DU LUXE

La boutique de luxe doit être inaccessible mais une fois la porte franchie, l’accueil doit être parfait et tout les rêves doivent devenir réalité. Les vendeurs se doivent d’être légers et sincères, respectueux et décontractés, proches et précis, efficaces et discrets, disponibles sans jamais être pesants, ils sont les meilleurs ambassadeurs des marques. Le service se poursuit après la vente, il faut fidéliser le client avec un service après vente irréprochable et rapide. Le luxe est l’art de recevoir, le plaisir de servir et l’intelligence de l’écoute, c’est donc un savoir-faire mais aussi un savoir-être. Le service doit être personnalisée, le client doit se sentir chez lui, il s’attend à être reconnu et apprécie la relation interpersonnelle qu’il a noué avec le vendeur. Il n’est pas juste un client mais un initié faisant partie du cercle de la marque. Le luxe est un état d’esprit qui peut s’appliquer à tous les secteurs. On peut, par un service irréprochable, montée en gamme des biens ordinaires (ex : boulangerie Paul, Monoprix pour la grande distribution, Nespresso, bar à eau). LE LUXE, OUI, MAIS COMME UN ART DE VIVRE... L’occident rêve désormais de vertus orientales. Il réhabilite le corps, le temps présent, les plaisirs des sens, une conception plus immatérielle et hédoniste de la vie. L’homme occidental ne veut plus s’épuiser dans une course folle mais profiter du moment présent et s’enraciner dans la nature sans plus chercher à la dominer. « On ne peut croître qu’à partir de ses racines ; le re-enchantement du monde est le propre du luxe » Michel Maffesoli Le luxe comme expérience : On associe généralement l’idée du luxe à des objets rares et précieux, et une vie de luxe à la possession de ces mêmes objets. Ce n’est plus vrai. Car penser ainsi reviendrait à dire que le luxe est uniquement une question de pouvoir d’achat. Or la richesse, si elle est, bien sûr, nécessaire pour vivre dans le luxe, n’est plus un critère valable lorsqu’il s’agit de définir les nouvelles formes luxueuses de vie. Le philosophe Yves Michaud explique dans Le Luxe fragile que l’on constate depuis une vingtaine d’années que les « consommateurs » du luxe cherchent de moins en moins à « entrer en possession » d’objets de valeur et de plus en plus à « vivre des expériences » où le poids du monde se fait moins sensible. Bien sûr, on associe encore l’idée du luxe à des objets comme les voitures, les bijoux, les œuvres d’art, les vêtements, les montres. Mais le phénomène nouveau est qu’on l’associe également aux avions privés, yachts, hôtels, villas, voyages, parfums, clubs réservés, « toutes choses, dit-il, qui renvoient à des expériences comme celles du voyage, du tourisme, de l’évasion rapide et rare ». Le luxe, c’est en ce sens « l’expérience de la vie légère et rêvée, une qualité d’expérience rare réservée à des happy few et qui échappe aux objets banals produits en masse pour les masses ». Le luxe éthique et bio : - Des marques de luxe telle que Stella Mc Cartney adopte une démarche éco-responssable. La créatrice a par exemple lancé une ligne de cosmétiques 100% bio baptisé Care (mise au point par YSL beauté), elle confiera sur le site de l’Express lors du lancement de cette ligne «Je ne trouvais rien à me mettre sur le bout du nez, rien qui ne soit assez luxueux à mon goût «. Elle s’engage également à ne pas utiliser de cuir, et de fourrures. D’autre part, elle utilise des matériaux avant garde tel que des bioplatiques pour les montures des lunettes où les semelles des chaussures. - Les entreprises de luxe tel Hermès, Courrèges, Van Cleef & Arpels, Chanel mettent en avant l’aspect artisanal de leur production, le made in France, ils axent leur communication sur ce point en publiant notamment des photos des ateliers.

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Les marques de luxe cherchent également à commercialiser des produits éthiques et bio, cela est devenu un atout marketing et offre une valeur ajoutée au produit (meilleur qualité de fabrication, matériaux sain pour le corps et pour la planète). La clientèle de luxe est sensible à ces nouvelles valeurs.

DIVERSIFICATION DES ACTIVITÉS

Les acteurs du luxe profitent de leur ADN bien particulier et de leur capacité financière pour explorer des marchés parfois très éloignés de leur sphère d’origine. Les marques ont cette force d’incarner un art de vivre transposable dans différents domaines. Basé sur le même schéma de la démocratisation par la cosmétique, elles jouent sur l’aura et l’authenticité de leurs codes, de leur histoire pour diversifier au maximum leurs activités et ainsi lancer de nouvelles gammes de produits. En passant du monde de la mode à celui de l’horlogerie, Chanel avait ouvert une voie autrefois explorée par Hermès. Vuitton leur emboîte le pas en s’ immiçant, après la joaillerie, dans l’univers de la parfumerie et Courrèges se lance dans la musique. Toutefois les deux gagnants de cette diversité sont italiens. L’empire de la marque Armani ne cesse de croître. Après une ligne complète dans les domaines de la mode et de l’accessoire, le créateur italien lance successivement une ligne maison (Armani casa), une chaîne de fleuriste (Armani fiori) mais s’associe également avec des promoteurs immobilier pour faire construire une dizaine d’hôtels à travers le monde, entièrement aménagés et meublés selon les codes et l’esthétique de la marque pour un coût total d’1 milliard de dollars. Mais les extensions ne s’arrêtent pas là car le groupe fait construire, en plein cœur du quartier du luxe de Tokyo, une tour où l’ensemble de l’univers Armani est regroupé avec en prime un restaurant, un spa ainsi qu’un centre de soin. Pour finir, la décoration d’intérieurs, nouvel eldorado du luxe, n’échappe pas à Armani qui lance une ligne de meubles précieux numérotée et limitée à 50 exemplaires. Le groupe a également développé une activité de conseil pour l’aménagement et la décoration d’appartements ou de villas.

La marque italienne Versace a, elle aussi, décidé d’investir l’univers de la maison et de l’hôtellerie. Après le lancement de sa ligne home, elle est la première à inaugurer en 2000 son Palazzo Versace sur les côtes de l’Australie. Fort de son succès, la marque a signé pour 14 nouveaux hôtels à travers le monde eux aussi entièrement signés Versace, des meubles à l’éclairage en passant par la vaisselle.

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La diversification des activités du secteur du luxe montre l’attachement du consommateur à l’expérience que lui procure cet univers. Au travers de ces nouveaux secteurs, les marques haut de gamme imposent et apposent leur nom et leur image dans tous les aspects de la vie créant un « life style ». La migration des marques dans des domaines annexes accentue le sentiment que le luxe accessible n’est plus du luxe. Elles visent deux types de clientèle opposées. Tout d’abord, une clientèle de « super-riches », souvent « nouveaux riches », issue d’Inde, de Chine ou de Russie, décomplexés vis-à-vis de l’argent et qui n’ont pas peur de l’ostentation. Cette clientèle privilégie le plaisir d’être avec une empreinte forte du plaisir d’avoir (rattachement à une enseigne connue et affichée ). Toutefois la migration du secteur du luxe fonctionne également avec une riche clientèle souhaitant le confort et la qualité mais aussi la singularité des services tout en restant dans l’anonymat. Le nouvel essor de la décoration d’intérieur doit son succès à ces consommateurs qui n’hésitent plus à engager des décorateurs et même des architectes réputés pour créer leur propre produit et leur propre expérience de vie. Des hôtels mythiques de Paris comme le Plaza, le Ritz ou le Bristol ont d’ailleurs senti ce changement et ont entrepris de grands travaux de rénovation pour agrandir leurs suites, moderniser leurs équipements, surenchérir dans la préciosité des matériaux. Cette tendance qui se dessine sur le marché mondial est appelée l’hyper luxe. Elle traduit une volonté de se distinguer d’un luxe abordable devenu trop démocratique et de pousser toujours plus loin les limites du confort, de la préciosité et de la dépense. Une catégorie de personnes que Karl Lagerfled désigne comme « des gens plus riches que l’air, qui se déplacent en jet privé et qui savent être invisibles ».

INTERNET N’EST PLUS UN TABOU

Comment le luxe et Internet pourraient se conjuguer alors que leurs valeurs sont si paradoxales ? Les marques de prestige sont attachées au monde réel, leur but est de créer une relation personnelle dans des lieux physiques pour alimenter le rêve or, internet, purement virtuel ne peut en aucun cas matérialiser ce lien. La montée, depuis 15 ans, du e-commerce restait pour les enseignes du luxe mondial, un canal de distribution grand public avec des produits d’occasion ou contrefait. Le marketing poly-sensorielle que permet le contact physique entre le consommateur et le vendeur et permettant de le fidéliser n’est pas assuré. Seul la vue et l’ouïe sont possible par informatique, réduisant considérablement le champ d’intervention commerciale et limitant les méthodes de séduction. Le e-commerce du luxe Longtemps le web a constitué une vitrine bien trop discount pour les grands acteurs du luxe. Dorénavant, ils ont compris tout l’intérêt à être présent dans des magasins en ligne. Ils permettent essentiellement de toucher des consommateurs trop éloigner des points de vente et de proposer leurs produits à la planète entière. Pour l’Oréal, Vuitton ou Hermès, internet est bel et bien devenue « glamour ». « Concilier internet et luxe n’est pas seulement possible, c’est aujourd’hui une démarche souhaitable, et même incontournable », commente le cabinet Xerfi. Des grands groupes français comme Kering ont même investi dans des sites de ventes multimarques en ligne comme Yoox et son dirigeant, Bernard Arnault, dit vouloir atteindre le milliard d’euros de chiffres d’affaires avant 2020. D’autres sites références, bien connus des acheteurs habituels du luxe, se sont imposés sur le net. Les plus visités sont Net-à-porter, Mr.Porter, The Corner Shop, Ssense ou Farfetch. L’objectif d’Internet est d’élargir le territoire de vente mais aussi de conquérir de nouvelles cibles et notamment les jeunes. Le marché du luxe mondial s’intéresse désormais à toutes les générations et plus particulièrement aux plus récentes. La jeunesse est devenue un nouvel âge de la vie qui commence plus jeune et finit plus tard. En effet, si l’adolescence commence plus tôt, l’âge adulte arrive plus tard. Avec l’intrusion d’un média comme internet dans leur mode de vie, les enfants disposent de beaucoup d’informations, diffusées ensuite à la famille, aux amis. À un âge où « l ‘habit fait le moi », ils acquièrent plus vite une forme d’indépendance et deviennent même des prescripteurs auprès de leurs parents. En effet, ils n’ont pas peur des sites marchands et encouragent des adultes, souvent plus méfiant avec le commerce en ligne.

Selon les analystes, le marché du luxe en ligne devrait peser près de 10% des ventes du secteur en 2015

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soit une vingtaine de milliards d’euros à l’échelle de la planète. Selon le cabinet de conseil Precepta, les ventes online devraient prioritairement bénéficier aux accessoires d’habillement (maroquinerie et chaussures), mais aussi au secteur de la parfumerie et des cosmétiques déjà très présent dans l’e-commerce. Le business de la joaillerie et surtout de l’horlogerie ne devrait quant à lui pas être bouleversé avant une dizaine d’années. Ce qui n’empêche pas certaines maisons d’investir dans des sites vitrines de plus en plus spectaculaires comme Boucheron ou Cartier.

Internet, un enjeux économique mais aussi de notoriété Internet ne se définie plus, dorénavant, sans ses réseaux sociaux : Facebook et Twitter. L’alliance entre la rapidité, l’instantanéité de ces réseaux et la volonté de pérennité et d’Histoire que façonne le luxe ne semblait pas prometteuse . Pourtant, les grands noms du secteur ont dû se positionner rapidement sur ce marché pour ne pas se trouver en marge de l’innovation. Le nombre toujours croissant d’internautes actifs sur ces réseaux permet de garantir une présence permanente et surtout réactualisée fréquemment (Twitter). De plus, Internet permet une auto-segmententation de la société qui le fréquente. En donnant son avis sur ce qui l’intéresse et en « s’abonnant » lui-même à des actualités,le consommateur se manifeste auprès des marques. Celles-ci définissent alors mieux leur cible et accentuent leur effort de communication en s’adressant directement à leurs adeptes. Par le biais de « groupe » d’intérêts, les marques de luxe dialoguent avec la communauté qui l’intéresse. Elles permettent aux consommateurs de suivre les actualités de la maison mais aussi de participer au futur de la marque. Certaine enseignes leurs permettent de donner un avis sur les produits existants, de discuter avec le créateur, de partager ses expériences avec d’autres adeptes ou encore de participer à la conception d’un produit en votant pour des couleurs, des formes… Internet et les réseaux sociaux sont également des moyens de buzz et de bouche à oreille très rapides. Très facilement, le consommateur voit apparaître dans son actualité la sortie d’un nouveau sac ou d’un nouveau produit cosmétique. Le Web permet de mettre en place des supports numériques nouveaux et interactifs qui accentuent les codes de la marque. L’exemple le plus récent est l’apparition du storytelling. Sous la forme de sagas, découpées en plusieurs vidéos lancées à intervalle régulier sur Internet (Youtube, Dailymotion et sur le site de la marque) on relate l’histoire d’un produit phare de l’enseigne. Cependant, ces nouveaux divertissements à visé publicitaire en disent plus long sur l’ADN de la marque que sur son produit. Chanel et Dior très présents sur ce secteur, en raison de leur histoire unique, ont réalisé plusieurs campagnes de ce type. Celle réalisée en 2010 par Dior autour de son sac mythique, le lady Dior, a permis de faire bondir les ventes de +43% mais aussi d’accroître sa notoriété. Bien qu’Internet semble permettre aux marques de luxe une communication plus informelle avec leur communauté, une grande partie de celles-ci, et notamment les marques françaises, craignent pour leur image et hésitent encore à être présentes sur Internet, ne serait-ce qu’en utilisant les réseaux sociaux. La peur vient du fait que les marques assimilent le Web à une banalisation de l’image ou pire encore, à une perte de contrôle sur celle-ci. Certaines n’ont toujours pas franchi le pas de la boutique en ligne alors que d’autres

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mises toujours plus sur la publicité intéractive et la densité de leur image visuelle devenant de vrais précepteurs dans l’art de faire rêver les gens visuellement.

D’ici à 2015, le marché mondial du luxe devrait progresser de 4 à 6 % par an, pour atteindre 250 milliards d’euros. C’est bien plus que la croissance attendue du PIB au niveau mondial.

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BIBLIOGRAPHIE

http://www.lemonde.fr/economie/article/2013/03/21/le-modele-d-hermes-resiste-aussi-bien-dans-les-paysdeveloppes-qu-emergents_1851594_3234.html (Express du 22/8/2005 ) La tribune: Luxe: plaisir d’avoir ou plaisir d’être, du 11/02 2011 Les échos: Le luxe, moins tentant pour la clientèle européenne 25/09/2013 Luxe, un management spécifique, collection luxe et art Bibliothèque de l’IFM

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