LE MOT DE LA RÉDACTION
TROIS P'TITS TOURS ET PUIS S'EN VA Voilà trois semaines que l'île et avec elle, nos colonnes, vivent au rythme du premier, second et troisième tour. Et en trois semaines, vives ont été les émotions. D'abord, Mayotte a vu en Maymounati la potentielle première présidente féminine de son histoire. Puis, Mayotte a vu des dizaines d'électeurs radiés sans raison, à Chirongui, possiblement pour priver une partie de l'opposition de son droit de vote et ainsi influencer le scrutin. In extremis, Mayotte a vu des alliances se faire et se défaire, des mariages inattendus, des divorces, aussi. Elle a vu un sursaut de ce que certains appellent le dégagisme, puisque seuls trois conseillers de l'ancienne mandature ont finalement été reconduits. Reste à voir, désormais, et à juger, les premiers pas de notre nouveau président pour les six prochaines années. Bonne lecture à toutes et à tous.
PROPOSENT UNE FORMATION AU TITRE D’ASSISTANT DE VIE AUX FAMILLES A DIEPPE en MÉTROPOLE La formation d’une durée de 6 mois permet d’obtenir le titre d’assistant de vie aux familles et, ensuite, de travailler au domicile notamment auprès des personnes âgées. Aucune condition de diplôme n’est requise pour s’inscrire. Il faut néanmoins réussir l’épreuve orale. Début de la formation : 10 janvier 2022
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Conditions d’entrée : Être inscrit au Pôle Emploi / avoir au moins18 ans / Avoir un foyer fiscal à Mayotte dont le quotient familial est inférieur à un montant qui vous sera communiqué par LADOM / Ne pas avoir bénéficié d’une autre aide à la mobilité dans l’année / Satisfaire à l’épreuve orale.
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TCHAKS
L'ACTION
LE CHIFFRE 242
C’est le nombre d’habitations illégales détruites mercredi dernier à Koungou, au lieu-dit “Digole”, où vivaient près d’un demi-millier de personnes. En marge de l’opération orchestrée par la préfecture dans le cadre de la loi Elan, 51 étrangers en situation irrégulière ont été interpellés et expulsés. Si 79 personnes ont accepté d’être placées en hébergement temporaire, plusieurs centaines d’autres se retrouvent à la rue. La plupart d’entre elles n’auront pas d’autres choix que de reconstruire clandestinement leur maison de fortune sur un autre terrain. Cette nouvelle opération porte à 850 le nombre de cases en tôle détruites à Mayotte depuis le début de l’année. Un record. Reste à savoir si le successeur de Jean-François Colombet, qui devrait prendre ses nouvelles fonctions dans quelques jours, poursuivra les décasages à un rythme aussi soutenu.
IL FAIT L’ACTU
La SNSM secourt un pêcheur disparu pendant 48 heures Opérationnels depuis moins d’un mois grâce à la livraison de leur nouveau navire d’intervention, les secouristes mahorais de la société nationale du sauvetage en mer (SNSM) ne chôment pas, puisqu’ils ont sauvé deux pêcheurs perdus en mer en moins de 48h. Le premier, alors activement recherché depuis deux jours, a été retrouvé sur sa barque à demi coulée et dont le moteur était noyé et n’avait plus aucun moyen de rejoindre le littoral. Le second était lui à la dérive, son moteur ayant lâché alors qu’il était à l’extérieur du lagon, et ne parvenait pas à signaler sa position, à une vingtaine de kilomètres de la côte. Enfin samedi, suite à un signalement du Cross, les sauveteurs sont venus à la rescousse de deux hommes à la mer accrochés à un bidon, à l’eau depuis une demijournée. Ils auraient été victimes d'un naufrage, dont les 18 autres disparus n’ont pas été retrouvés à ce jour.
LA PHRASE
" La vigilance doit être redoublée face à la diffusion du variant Delta dans le monde” Avec un taux d’incidence de 4,7, un taux de positivité de 0,5% et seulement 13 nouvelles contaminations détectées la semaine dernière, le Covid-19 est assurément en perte de vitesse à Mayotte. Pourtant, “La vigilance doit être redoublée face à la diffusion du variant Delta dans le monde”, s’inquiète l’Agence régionale de santé. “Ce variant, initialement identifié en Inde, est bien plus contagieux que les autres en circulation. L’enjeu aujourd’hui est de poursuivre la vaccination de tous pour limiter les conséquences sanitaires d’une résurgence épidémique”. Dans le 101ème département, seul le vaccin PfizerBioNTech est actuellement disponible, et celui-ci “se montre efficace avec une réduction du risque de forme grave de plus de 90% après deux injections”, rappelle encore l’ARS. “ pour permettre au plus grand nombre d’être protégé contre la Covid-19, un nouveau centre de vaccination sera ouvert à la MJC de Tsoundzou 2. Celui-ci sera accessible tous les mardis et mercredis de 9h à 15h".
Le directeur général de la Croix-Rouge inaugure le nouveau siège mahorais Il aura fallu prendre son mal en patience, mais la délégation territoriale de la Croix-Rouge française à Mayotte bénéficie d’un siège flambant neuf à Passamaïnty depuis la semaine dernière et ce après deux ans de travaux. Une inauguration réalisée en présence du directeur général, Jean-Christophe Combe, qui a rappelé les principes et les valeurs de l’association fondée par Henry Dunant afin de porter secours aux populations dans le besoin, sans distinction de nationalité, de religion, de condition sociale ou d'appartenance politique. Des efforts démultipliés pendant la crise sanitaire. "De mémoire de Mahorais, nous n’avons jamais vu autant la Croix-Rouge auprès de la population", se félicite Jean-Christophe Combe, convaincu de devoir "assurer la résilience des individus et des collectifs vers un retour à l’autonomie" et "tendre la main à celui qui en a besoin pour lui rendre sa dignité". En clair, cela ne se résume pas seulement à "nourrir les gens" et à "leur donner accès à la santé".
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LU DANS LA PRESSE
Chaque semaine, découvrez le regard porté sur l’actualité locale à travers la presse nationale ou régionale
GRANDE EXPOSITION DU FABRIQUÉ EN FRANCE : LES OUTRE-MER S'EXPOSENT À L'ÉLYSÉE Le 3 juillet, par Eline Ulysse pour Outremers360 C'est en présence des membres du jury de la Grande Exposition du Fabriqué en France et des représentants des entreprises exposantes que le président de la République, Emmanuel Macron, a officiellement inauguré cette deuxième édition, à l'Élysée, hier soir [vendredi dernier]. La Grande Exposition du Fabriqué en France [était] ouverte au public inscrit ce samedi 3 et le dimanche 4 juillet. Ce sont ainsi 126 produits issus de tous les départements et territoires de l’Hexagone et 9 des Outre-mer que le grand public pourra découvrir le temps d’un week-end. Le Président a même cité des produits des Outre-mer dans son discours comme le Rhum Clément. Interview des exposants ultramarins. Guadeloupe : Lunettes à base de sargasses colorées à l'indigo de Guadeloupe par le Laboratoire Phytobòkaz et Bellatrix La lunette Or Bleu, Collection Outre-Mer, est une monture optique faite-main, co-créée par Bellatrix Créateur Lunetier et le Laboratoire Phytobòkaz. Elle est entièrement composée de fibres naturelles d’algues sargasses marines valorisées et colorées de manière 100% végétale et naturelle, en Indigo de Guadeloupe dit Or Bleu. La composition est ensuite intégrée dans de l’acétate de cellulose du Jura. Ce procédé de transformation des fibres naturelles est développé par le Laboratoire Phytobòkaz, spécialisé en agrotransformation phytosymbiotique, pigments et colorants végétaux. Un produit haut de gamme 100% made in France issue de 40 ans de recherches et de valorisation de la biodiversité ultra-marine par le Dr Henry Joseph. À cela s’ajoute les 15 ans d’expertise design du créateur lunetier d’exception, Richard Trèfle. Guyane : Lampadaire solaire Luzeko par Solamaz Implantée sur la commune de Remire-Montjoly, en Guyane, Solamaz est une entreprise experte de l’énergie solaire et aujourd’hui un acteur majeur de l’éclairage autonome. Spécialiste des énergies renouvelables, l’entreprise est implantée dans 3 pays différents, permettant d’exporter sa technologie à l’international, avec plus de 5 000 lampadaires déployés dans le monde à ce jour. La société développe et produit en Guyane des solutions complètes et adaptées qu’elle propose aux entreprises et collectivités, afin de les accompagner dans leur démarche de transition énergétique. De par sa position géographique, l’entreprise a développé un produit adapté aux réalités climatiques tropicales. En effet, depuis sa création, elle conçoit, installe et maintient un parc en Amérique du Sud. Ses lampadaires répondent ainsi à des critères de robustesse et de résistance auxquels ils doivent faire face dans un environnement climatique spécifique et parfois difficile. La Réunion : Béton drainant DrainBox par Australe Concrète Australe Concrete SAS détient un savoir-faire dans le développement de produits permettant de réaliser des bétons décoratifs. Ces produits sont fabriqués à La Réunion. Son savoirfaire ces dernières années s’est concentré sur le développement de solutions respectueuses de l’environnement, notamment en développant des solutions à base de ciments bas carbone (intégrant des produits alternatifs issus de l’économie circulaire). Martinique : Rhum Vieux Agricole Clément VSOP AOC par Héritiers H Clément SAS Depuis 1887, l'élaboration du prestigieux Rhum Clément se fait dans la plus pure tradition et selon les règles héritées d'Homère et de Charles Clément. Le Rhum agricole Clément est produit à partir de la distillation directe du pur jus de canne et dans le strict respect des règles d'Appellation d'Origine Contrôlée (AOC Martinique). Julien Thimon, le Maitre de Chai, veille au vieillissement de ce Rhum agricole Vieux Clément AOC VSOP.
Ce rhum agricole a vieilli un minimum de 4 années dans des fûts roux de Bourbon ainsi que des fûts de chêne américains neufs. Il contribue au rayonnement international de la marque et de la Martinique dans plus de 70 pays. Mayotte : Perle Mabé de Mayotte sertie clos or 18 carats montée sur jonc argent brossé par Nuru Kombe Nuru Kombe est une marque de bijoux qui met en valeur les perles mabés de sa production. Nuru Kombe dispose de sa propre ferme perlière à Mayotte. L’île de Mayotte dispose d’un des plus grands lagon du monde. Les conditions naturelles préservées permettent la production de perles dont la couleur est unique au monde. Nuru Kombe est la seule ferme perlière française à produire des perles mabés sur moule perlière. Toutes les attentions s’imposent pendant 4 ans avant la récolte. Les perles sont ensuite confiées aux meilleurs artisans de la Joaillerie française. Nouvelle-Calédonie : Tablettes de chocolat par Biscochoc.NC. Les tablettes de chocolat sont issues d’une plantation situé à 700 km de Nouméa sur l’île de Malekula . Biscochoc réalise entièrement le process dans son usine à Nouméa, seule du Pacifique Sud à posséder le savoir-faire français pour le chocolat, avec toutes les valeurs de qualité (ex : pur beurre de cacao). Biscochoc exporte aujourd’hui sur le Japon, la Chine, les îles avoisinantes du pacifique. Avec une stratégie basée sur la diminution radicale de l’empreinte carbone ; des chocolats océaniens du sud Pacifique et des ingrédients de chez nous (vanille, sucre de coco, miel, etc. …) Polynésie française : Brut d'Ananas Méthode traditionnelle par Manutea Tahiti Le Brut d’Ananas Méthode traditionnelle est une boisson alcoolisée par vinification de l’ananas Queen Tahiti. Enracinée dans le terroir polynésien, cette boisson festive revendique son origine locale et son caractère unique alliés au savoir-faire de la tradition française pour la fabrication du champagne. C’est à Moorea, île sœur de Tahiti, au pied du mont Rotui, que le chai a pris place en restant au plus proche des plantations d’ananas qui se développent dans la caldeira de l’ancien volcan. Considéré comme l’une des meilleures variétés au monde, l’ananas Queen Tahiti est également un fruit exempt de pesticides ce qui lui garantit ses qualités gustatives et son goût si parfumé. Saint-Pierre-et-Miquelon : Homards des îles Saint-Pierre et Miquelon Le savoir-faire de l'entreprise est la valorisation du Homarus Americanus. Un macaron QR code affiche les couleurs de la France ainsi que des Îles Saint-Pierre et Miquelon. Il permet un système de traçabilité jusqu’au lieu exact de pêche (seul territoire français en Amérique du Nord), ce qui le rend unique par sa provenance et également par sa qualité gustative exceptionnelle. Wallis-et-Futuna : Huile de Tamanu par Tagaloa O.C. L’huile de Tamanu (Calophyllum inophyllum) recèle d’incroyables propriétés cicatrisantes et anti-inflammatoires. Des tests scientifiques ont également démontré ses vertus antibactériennes et régénérantes. Elle est donc fréquemment utilisée pour les infections de la peau. C’est l’une des rares huiles végétales que l’on peut recommander en cas de plaie ou de peau « lésée ». Ses propriétés protectrices aident à la cicatrisation en régénérant les cellules supérieures de l’épiderme tout comme celles des muqueuses. La plupart de ces entreprises sont engagées dans une démarche d'exportation et plusieurs d'entre elles avec l'appui de la Team France Export.
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DOSSIER
L.S - S.P
DÉPARTEMENTALES 2021
CARIBOU PRÉSIDENT ! Retournement de veste, trahison, surprise et coup de théâtre… Cela aurait pu ressembler au teaser d'une nouvelle série à dévorer et pourtant, il s'agit là, ni plus ni moins, de l'élection du nouveau président du Conseil départemental, ce 1er juillet. Retour sur le sacre de Ben Issa Ousseni.
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DOSSIER
R.G
REPORTAGE
TRAHISONS ET INCOM AU MENU DE L’ÉLECTIO
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MPRÉHENSIONS ON DE BEN ISSA OUSSENI À PEU DE CHOSE PRÈS, LE CONSEIL DÉPARTEMENTAL AURAIT PU ÉLIRE CE 1ER JUILLET SA PREMIÈRE FEMME PRÉSIDENTE EN LA PERSONNE DE MAYMOUNATI MOUSSA AHAMADI. MAIS C’ÉTAIT SANS COMPTER LE RETOURNEMENT DE VESTE DE CERTAINS ÉLUS DANS LES DERNIÈRES HEURES PRÉCÉDANT LE SCRUTIN. FINALEMENT, C’EST LE VICE-PRÉSIDENT EN CHARGE DES FINANCES SOUS L’ANCIENNE MANDATURE, BEN ISSA OUSSENI, QUI REMPORTE LA VICTOIRE 14 VOIX CONTRE 12. RÉCIT D’UNE MATINÉE QUI RAPPELLE À QUEL POINT LA POLITIQUE À MAYOTTE N’A PAS D’ÉGALE EN FRANCE. « On l’a fait ! La droite reste au pouvoir ! » À la lecture du 26ème et dernier bulletin de vote, Abdoul Kamardine, élu dans le canton de M’Tsamboro, ne peut cacher sa joie à l’annonce de la victoire de Ben Issa Ousseni. L’ancien vice-président en charge des finances sous la mandature de Soibahadine Ibrahim Ramadani succède à son mentor, au nez et à la barbe de Maymounati Moussa Ahamadi. « La démocratie a parlé… », avoue, quelques minutes après le dépouillement, celle qui avait remporté sa place dans l’hémicycle au soir du premier tour sur DzaoudziLabattoir. Si la directrice de la chambre régionale de l’économie sociale et solidaire la joue fair-play à l’égard de son adversaire, elle analyse tout de même ce résultat final avec une certaine amertume : « Peut-être que Mayotte n’est pas encore prête à avoir une femme à la tête de son territoire. » En face, la coalition de droite et de centre-droite, porté par 14 voix contre 12 pour l’opposition, exulte. Les scènes de liesse et les embrassades se multiplient. À l’image de Rossette Vitta et Madi Velou qui se ruent vers le nouveau chef de l’exécutif pour lui tomber dans les bras. « C’est une première dans l’histoire de Mayotte depuis l’avènement de la décentralisation que nous avons une majorité cohérente. Au lendemain de cette séance de droit, il va falloir construire le projet de mandature et fixer un cap », récapitule le duo de Zouhourya Mouayad Ben. Le programme territorial annoncé par Les Républicains durant la campagne risque
de revenir sur un coin de table, histoire de poser quelques bases pour les six prochaines années.
“UN VÉRITABLE CAPHARNAÜM” Pourtant, dix heures encore avant le dépouillement, aucune majorité claire et précise ne se dégageait… « Je ne sais pas si nous sommes dans la surprise. En tout cas, l’organisation pour arriver jusque-là a été un véritable
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capharnaüm », se désole Mansour Kamardine, abasourdi de toujours constater que « les puissances visibles de l’argent s’immiscent dans le jeu démocratique et prennent en otage le conseil départemental ». Et modifient ainsi à leur guise un échiquier politique fébrile tout au long des quatre derniers jours. Dans sa ligne de mire ? Ida Nel, pistée lors de visites domiciliaires nocturnes, qui « a contacté les environnements des conseillers » pour arracher ces derniers des griffes de son groupe. « Je demanderai de nous pencher très sérieusement
sur l’intérêt de Mayotte vis-à-vis du port de Longoni. Il en va de l’économie de ce territoire. » Des accusations lourdes de sens qui risquent de faire couler beaucoup d’encre ! Face à ces délations, Elyassir Manroufou défend les agissements du MDM au sujet des retournements de veste qui ont fait pencher la balance. « Certains binômes n’ont pas été soudés et n’ont pas parlé d’une seule et même voix. » Exemple avec Omar Ali et Daoud Saindou Malide qui ont préféré les rangs de la majorité pour devenir respectivement 3ème et 6ème vice-présidents. À l’inverse de Maymounati Moussa Ahamadi et d’Echati Issa. Une « trahison » visible avant même le début du scrutin au regard du plan de table. Toujours selon lui, le coupable se nomme Ambdilwahedou Soumaïla. « Nous trouvons regrettable que le maire de Mamoudzou n’ait pas saisi cette opportunité de travailler avec les trois cantons (les candidats LR ont tous perdu le 2nd tour). Il a préféré faire élire un président issu davantage de sa famille politique, en oubliant la proximité et le choix des électeurs de sa commune. »
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BOYCOTT AU RETOUR DE SÉANCE
ENTRE ESPOIR ET DÉSESPOIR
Dans ces conditions et avec deux camps bien distincts, comment envisager la suite ? « Nous assumerons la responsabilité d’avoir fait le choix de porter la candidature d’une femme. Mais cela ne nous empêchera pas de travailler. Nous sommes là pour l’intérêt des Mahorais et rien d’autre », assure le vainqueur sur M’Tsapéré et Doujani. Même son de cloche pour la candidate malheureuse du jour.
Place enfin au premier discours de Ben Issa Ousseni. Au cours de celui-ci, le nouveau responsable de la collectivité rabâche les indispensables défis de la jeunesse, de la formation, de la précarité sociale, du renforcement des soins médicaux de proximité, de l’économie, de l’aménagement. « Pour les relever, nous devons travailler en synergie », prône-t-il. Avant d’insister sur l’utilisation à bon escient du plan de relance, des fonds européens
« Ce n’est pas ce qui va m’arrêter et m’empêcher de porter haut et fort les engagements pris auprès de la population de Dzaoudzi-Labattoir. Au contraire, cela me donne la force d’aller voir tout ce que nous pouvons faire pour développer Mayotte et surtout donner de l’espoir », assure la Petite-Terrienne. Nouveau retournement de situation inattendu à l’issue de la suspension de séance. Pendant cette pause d’une heure, chacun détermine et propose sa liste des membres de la commission permanente. Mais patatra ! Le temps est écoulé et les élus de l’opposition boycottent leur présence. « Ils viennent ou ils ne viennent pas », s’impatiente Ben Issa Ousseni, en se tournant vers quelques agents administratifs de la collectivité. Plus de 15 minutes s’écoulent avant qu’ils ne pointent le bout de leur nez… « Il n’y a que les Mahorais pour faire la politique de la chaise vide », chuchote Bahati Houmadi, suppléante de « Fifi » sur Koungou. Un retard assumé aux conséquences non négligeables ! Avec une seule note en sa possession au bout du temps imparti, le chef de l’exécutif n’a pas d’autre alternative que de constituer le nouveau bureau du Département avec les sept premiers noms de la liste présentée (voir encadré), à savoir Salime Mdéré, Tahamida Ibrahim, Ali Omar, Zouhourya Mouayad Ben, Bibi Chanfi, Daoud Saindou Malide et Madi Vélou.
et du contrat de convergence. « Nous voulons un territoire fort qui s’affirme davantage dans la région de l’océan Indien et le canal du Mozambique. Restons unis et solidaires pour conforter Mayotte dans un élan social et économique. » Des mots forts qui n’attendent que des actes concrets. Mais en ce 1er juillet, reste surtout l’espoir déçu pour certains de voir une femme accéder pour la première fois à la présidence du Département. « La difficulté est que ce n’était pas [Maymounati Moussa Ahamadi] qui était candidate. C’est ça le problème, elle a été mise comme un paravent. Elle était avec nous jusqu’à hier [mercredi 30 juin]. À 14h, elle était première vice-présidente… Quelqu’un l’a arrachée pour la présenter en face et la faire reine. Était-ce vraiment une façon de promouvoir la femme ? », confie et s’interroge Mansour Kamardine. De quoi nourrir de profonds regrets pour la principale concernée. Qui a raison, qui a tort dans tout ce schmilblick ? C’est toute la singularité de la vie politique dans le 101ème département…
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L'ÉLECTION EN BREF LA RÉPARTITION DES SIÈGES DE LA COMMISSION PERMANENTE Aussitôt après l’élection du président et sous sa présidence, le conseil départemental fixe le nombre des vice-présidents et des autres membres de la commission permanente. Ces derniers sont élus au scrutin de liste. Chaque conseiller départemental peut présenter une liste de candidats, qui doit être composée alternativement d’un candidat de chaque sexe. Les listes sont déposées auprès du président dans l’heure qui suit la décision du conseil départemental relative à la composition de la commission permanente. Si, à l’expiration de ce délai, une seule liste a été déposée, les différents sièges de la commission permanente sont alors pourvus immédiatement dans l’ordre de la liste et il en est donné lecture par le président. Dans le cas contraire, le conseil départemental procède d’abord à l’élection de la commission permanente, à la représentation proportionnelle à la plus forte moyenne, sans panachage ni vote préférentiel. Les sièges sont attribués aux candidats dans l’ordre de présentation sur chaque liste. Si plusieurs listes ont la même moyenne pour l’attribution du dernier siège, celui-ci revient à la liste qui a obtenu le plus grand nombre de suffrages. En cas d’égalité de suffrages, le siège est attribué au plus âgé des candidats susceptibles d’être proclamés élus. Si le nombre de candidats figurant sur une liste est inférieur au nombre de sièges qui lui reviennent, le ou les sièges non pourvus sont attribués à la ou aux plus fortes moyennes suivantes. Après la répartition des sièges de la commission permanente, le conseil départemental procède à l’élection des vice-présidents au scrutin de liste à la majorité absolue, sans panachage ni vote préférentiel. Sur chacune des listes, l’écart entre le nombre des candidats de chaque sexe ne peut être supérieur à un. Si, après deux tours de scrutin, aucune liste n’a obtenu la majorité absolue, il est procédé à un troisième tour de scrutin et l’élection a lieu à la majorité relative. En cas d’égalité de suffrages, les candidats de la liste ayant la moyenne d’âge la plus élevée sont élus.
LE PARCOURS DE BEN ISSA OUSSENI, NOUVEAU PRÉSIDENT DU CONSEIL DÉPARTEMENTAL Il est le nouvel homme fort du 101ème département. À 47 ans, Ben Issa Ousseni vient d’être élu président de la collectivité territoriale pour les six années à venir, en l’emportant à 14 voix contre 12 face à Maynounati. Si assurément, cette élection a été placée sous le signe du dégagisme des partis et figures traditionnels, son visage n’est pourtant pas inconnu des Mahorais, puisqu’il était le septième vice-président de Soibahadine. Il avait intégré le conseil départemental près de 15 ans plus tôt, d’abord en tant qu’agent administratif, où Ben Issa Ousseni était amené à gérer le personnel et l’administratif. Avant de faire ses premières au sein de l’institution dont il prend aujourd’hui les rênes, le Mahorais a exercé trois ans, de 1997 à 2000, en tant que comptable pour le compte de la SIM, avant de s’envoler vers la Picardie, pour officier cette fois comme comptable financier. Un domaine qu’il a étudié après l’obtention de son baccalauréat au sein de l’IUT de Bourges, dans le Centre-Val de Loire.
LES FEMMES N’ONT PAS EMBOÎTÉ LE PAS DE MAYMOUNATI À l’issue du scrutin, Said Omar Oili ne remet aucunement en cause le choix de la désormais opposition d’avoir présenté Maymounati Moussa Ahamadi au poste de présidente du Département. « Le combat de Mayotte a été mené par des femmes, donc nous avons voulu [en] présenter [une] qui a la tête sur les épaules et les compétences », précise le maire de Dzaoudzi-Labattoir. « Les élus n’ont pas voulu rentrer dans l’histoire, c’est dommage… Celui-ci fustige surtout les autres élues qui ont préféré jouer la carte politique plutôt que de saisir la balle au rebond. « J’avais l’espoir qu’elles auraient une réaction. Certaines ont rejeté cette candidature. Il y a à méditer. » S’il dit n’avoir « ni frustration ni déception », il regrette « cette continuité dans l’incertitude ».
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LE CHOIX DE LA CONTINUITÉ POUR SOIBAHADINE IBRAHIM RAMADANI Soibahadine Ibrahim Ramadani est un ancien président de Département heureux. Pour lui, l’élection de Ben Issa Ousseni est « le choix de la continuité ». « D’autant plus qu’il a fait pour l’essentiel sa campagne sur le bilan et les projets de cette mandature. » Une manière de légitimer ses réalisations. « Si ce bilan était si mauvais que cela, il aurait dû être victime de dégagisme. Or, les électeurs lui ont renouvelé leur confiance et ses pairs l’ont choisi majoritairement. » Le désormais retraité de la vie politique a également un œil très averti sur la vision des femmes dans le milieu. « Malgré leurs compétences, les Mahoraises et les Mahorais ne sont pas encore prêts à les placer à la tête des grandes institutions et entreprises. Mais cela ne les déclasse pas. » Avant d’adresser un message à Maymounati Moussa Ahamadi. « Elle fait partie de ces femmes qui ont crevé l’écran pendant la campagne. Nous pouvions penser qu’elle était prédestinée à un avenir au plus haut sommet du Département. Il y a peut-être un moment où il faut enrichir l’expérience, se faire connaître, entretenir des relations encore plus fortes et convaincre les réticences. »
UN CANDIDAT DEMANDE L'ANNULATION DE L’ÉLECTION DANS LE CANTON DE SADA À quelques jours du premier tour, coup de tonnerre. Selon un communiqué reçu par la presse, 200 habitants de Chirongui auraient été radiés des listes électorales, sans raison apparente, et ce “au mépris des dispositions du code électoral”. Parmi les personnes concernées, au moins six seraient liées à l’opposition municipale de la commune, à l’image de son ancienne maire, Roukia Lahadji. Au total, ce sont pas moins de 101 ordonnances qui ont été rendues par le président du tribunal judiciaire afin que le maire procède à la réinscription des électeurs radiés. Ouf de soulagement, enfin en partie, puisque certains d’entre auraient été, selon leurs propres mots, “empêchés de voter” afin de favoriser un candidat plutôt qu’un autre, et en l'occurrence, Mansour Kamardine (LR), comme l’affirme Mohamed Assani Abdou, candidat déchu du canton de Sada, qui a décidé de déposer plainte afin de faire tout bonnement annuler l’élection dans la localité.
UNE PARTICIPATION EN HAUSSE À 17 heures, dimanche 27 juin, Mayotte enregistrait un taux de participation de 60,6%, contre 37% à La Réunion et 33% au niveau national. Finalement, à l'issue du second tour, 68,14% des votants locaux avaient fait le déplacement jusqu'aux urnes, avec plus de 70% de participation à Bandraboua, Bouéni, Dembéni, Ouangani, Sada et Tsingoni. À l'inverse, la mobilisation a été la plus faible à Koungou (50,52%), Dzaoudzi-Labattoir (57,57%) et Pamandzi (58,53%). Des résultats moins homogènes que ceux enregistrés lors du second tour de l'élection de 2015, où le plus fort taux de participation s'était joué à Tsingoni (71,27%) et le plus faible à Mamoudzou 3 (53,64%) Cette forte mobilisation des Mahorais pour les élections départementales peut s’expliquer en partie par la proximité des candidats avec la population. Elle s’explique aussi par des campagnes électorales importantes, contrairement à ce que l'on peut voir en métropole pour ces élections. Mayotte est d'ailleurs le département où les habitants se sont le plus mobilisés sur l’ensemble du territoire national. Si en 2015, la population mahoraise avait déjà fortement participé au scrutin, cette année, les votants ont été encore plus nombreux. On peut aussi noter que l'engouement a été plus fort au second qu’au premier tour, une conséquence de l’acharnement des candidats à faire campagne, malgré la situation sanitaire compliquée. Pour cette nouvelle mandature, les Mahorais ont choisi de nouveaux visages et en général, des candidats plutôt jeunes. On note par exemple l’arrivée de Maymounati Moussa Hamadi et Omar Ali à Dzaoudzi ou encore Hélène Pollozec et Nadjayedine Sidi dans le canton de Mamoudzou 3. Des choix qui peuvent s’expliquer par la volonté des habitants de l’île de voir des changements dans la façon dont est géré le développement de l’île. Et qui souligne aussi une forte mobilisation des jeunes, qui ont choisi d’élire des conseillers qui leur ressemblent.
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DOSSIER
TÉMOIGNAGES
LE MODE DE SCRUTIN… SCRUTÉ ANNÉE APRÈS ANNÉE, LE PROCESSUS ÉLECTORAL AU SEIN DU 101ÈME DÉPARTEMENT EST REMIS EN QUESTION PAR LES FIGURES POLITIQUES LOCALES. CAR CONTRAIREMENT AUX MUNICIPALES, LES CANDIDATS À LA PRÉSIDENCE DU DÉPARTEMENT NE SE PRÉSENTENT PAS AVEC UNE LISTE, MAIS UN BINÔME. DE QUOI PERMETTRE À CHACUN DE CHANGER SON FUSIL D’ÉPAULE À LA VEILLE DE L’AVÈNEMENT DU NOUVEAU RESPONSABLE DE LA COLLECTIVITÉ, COMME CETTE ANNÉE L’A ENCORE PROUVÉ. UN JEU D’ALLIANCES QUI, POUR CERTAINS, EMPÊCHE DE DÉFINIR UN CADRE CLAIR ET HONNÊTE POUR LES SIX ANNÉES À VENIR. “S’il y a une urgence pour Mayotte c’est de modifier le mode de scrutin”, tambourinait le jour de l’élection le candidat et député Mansour Kamardine (LR). Et l’avocat n’est pas le seul à plaider pour une refonte du processus électoral à Mayotte. Déjà en 2014, Daniel Zaïdani, alors président du Département, avait demandé aux parlementaires une réforme sur le sujet. De quoi, par la même occasion, augmenter le nombre d’élus de la collectivité afin de lui permettre, enfin, d’exercer comme elle le devrait la casquette de DépartementRégion, alors que Mayotte ne perçoit pas pleinement les fonds prévus par le statut pourtant ancré dans la Constitution. Le sénateur Thani s’était alors emparé de la question. “J’avais préparé une proposition de loi et la commission des lois du Sénat avait commencé à l’examiner mais pendant l’examen, d’autres élus mahorais, dont Soibahadine qui
était devenu président du conseil départemental entre temps, avaient écrit au président de la commission pour dire qu’il fallait stopper ce projet parce que Mayotte n’était pas encore prête”, se souvient le parlementaire. En 2016, la proposition de loi en question introduit alors : “La collectivité unique de Mayotte exerçant tout à la fois les attributions d'un département et d'une région ; il apparaît cohérent de s'inspirer du mode de scrutin applicable aux élections régionales. Celui-ci a d'ailleurs démontré sa pertinence en métropole.” Est alors proposée l’instauration d’un scrutin proportionnel de liste à deux tours. “La représentation des différents courants politiques sera assurée et les risques de blocage institutionnel neutralisés par la fixation d'un seuil de maintien au second tour de 5 % des suffrages exprimés et une prime majoritaire de 33 %, soit huit sièges sur vingt-six, pour tenir
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compte des faibles majorités issues des élections récentes sur l'île. (...) Un même nombre de sièges sera attribué à chaque section. Les sièges acquis par chacune des listes seront ensuite répartis au prorata des voix obtenues par section.” Alors, pour éviter les alliances de dernière minute comme en a connu cette élection, le texte proposait une élection “au scrutin de liste à deux tours sans adjonction ni suppression de noms et sans modification de l’ordre de présentation”. Dans un souci d’équité et de représentativité, chaque liste doit dès lors être constituée “d’autant de sections qu’il y a de cantons”, avec un nombre de sièges identique attribué à chacun de ces cantons. En outre, “les listes qui n'ont pas obtenu au moins 5 % des suffrages exprimés ne sont pas admises à la répartition des sièges”. Or, aujourd’hui, le scrutin repose sur bon nombre d’étapes : “Une fois le président élu, il faut élire les conseillers départementaux puis se réunir, dans un troisième temps, pour former une majorité et s’accorder dans un quatrième temps
pour définir un programme politique à mener”, résume le sénateur Thani Mohamed Soilihi. “Ce qui me semble complètement absurde puisque cela ne donne pas un cap clair dès le départ et ne permet pas non plus d’avoir des compétences et des dotations claires. Tout ça est de nature à handicaper le département, voire même à faire dépendre plus qu’il n’en faut les élus locaux de l’État.” Reste désormais à voir si, comme ses prédécesseurs, le nouveau président du Département rouvrira le dossier.
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Nora Godeau
RENCONTRE
LE MARACANA : UN CLUB SPORTIF POUR LA NATATION ET LE KAYAK
LE CLUB SPORTIF DU MARACANA, SITUÉ SUR LE FRONT DE MER DE PAMANDZI, A OUVERT SES PORTES EN AOÛT 2020. SON PRINCIPAL OBJECTIF EST DE DÉMOCRATISER L’APPRENTISSAGE DE LA NATATION À MAYOTTE, MAIS IL PROPOSE ÉGALEMENT D’AUTRES ACTIVITÉS LIÉES À LA MER COMME LE CANOË-KAYAK ET L’AQUAGYM. PAR AILLEURS, LE MARACANA S’EST ÉGALEMENT DONNÉ POUR MISSION DE SENSIBILISER LA POPULATION MAHORAISE À LA PROTECTION DU LAGON. 16•
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Apprendre à nager aux enfants est l’objectif n°1 du Maracana !
"Bien que nous vivions sur une île, la plupart des Mahorais ne savent pas nager", déplore Soyfoudine Abdou Razak, le directeur du club sportif Le Maracana. C’est devant ce constat alarmant que sa compagne Véronique Perrin et lui-même ont décidé de fonder ce club en août 2020 avec pour noble ambition de développer l’apprentissage de la natation sur l’île au lagon. En effet, seuls 1 à 2% de la population de l’île sait véritablement nager. "Beaucoup d’hommes savent barboter, mais très peu savent nager sans avoir pied", poursuit Soyfoudine. "Quant aux femmes c’est encore pire, la plupart ont carrément peur de l’eau", ajoute-il. La culture locale serait à l’origine de cette aquaphobie des habitants de l’île au lagon. La croyance dans le "moinaïssa", un esprit de l’eau maléfique habitant les mangroves, n’encourage guère les gens à tenter d’apprivoiser l’environnement aquatique. Résultat
des courses : il y aurait au moins une noyade par mois à Mayotte. "Quant aux noyades des étrangers en situation irrégulière, on n’a aucune idée de leur nombre exact", affirme le directeur du Maracana. Pour remédier à cela, le club propose des cours de natation pour les enfants et les adultes. "Beaucoup de femmes mahoraises, qui ont toujours vécu cloîtrées, se rendent compte à présent qu’il est important de savoir nager et viennent s’inscrire à nos leçons", déclare Soyfoudine. D’autant plus que le club propose également des séances spéciales pour lutter contre l’aquaphobie ainsi que de l’aquagym, discipline qui peut permettre aux plus rétifs d’apprivoiser en douceur le milieu aquatique. L’un des autres objectifs du club est de pallier les manquements du dispositif "tous nageurs en 6ème" mis en place par l’Education nationale, mais
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L’équipe du Maracana avec quelques-uns de leurs petits adhérents.
qui ne fonctionne pas du tout à Mayotte, notamment à cause d’un manque de formation des enseignants.
DES FORMATIONS DIPLÔMANTES Pour aller plus loin, le Maracana propose des formations diplômantes appelée PSE1 et PSE2. Ces dernières sont normalement nécessaires dans certains corps de métiers tels que les pompiers, les gendarmes, les policiers municipaux et même les stewards ! Or concrètement à Mayotte, très peu de personnes les possèdent. Madi Souf, le maire de Pamandzi, s’est dernièrement engagé à faire passer ces formations à ses
policiers municipaux et pompiers avec l’aide justement du Maracana. L’ambition du club ne s’arrête pas là. Soyfoudine et Véronique ont aussi pour objectif de former les 150 surveillants de baignade nécessaires pour couvrir l’intégralité des plages de Mayotte. "Cela évitera aux mairies de se décharger du problème en mettant un panneau interdisant la baignade", ironise le directeur. Ce dernier a décidé de franchiser son enseigne afin de créer bientôt des bases nautiques aux quatre coins de Mayotte. "Nous nous sommes déjà mis d’accord avec M’tsamboro et la Cadema. Des négociations sont en cours avec d’autres communes", explique Véronique. Via
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Le restaurant, situé sur le front de mer, propose des plats à base de produits de la mer et de délicieux jus de fruits frais !
Le Maracana allie apprentissage du kayak et protection de l’environnement.
leurs différents projets, les deux complices espèrent également préparer de jeunes nageurs mahorais pour les prochains Jeux des îles. "Nous souhaitons former des enfants autonomes et compétiteurs", précise Soyfoudine
SENSIBILISER LA POPULATION À LA PROTECTION DU LAGON Outre la natation, l’apprentissage du canoë-kayak fait partie des activités du club qui propose aussi des formations diplômantes dans cette discipline. Par ailleurs, le Maracana a été nommé "ambassadeur du lagon" et "sentinelle de l’îlot M’bouzi" par le Parc Marin. "L’idée est d’allier la pratique du canoë-kayak avec la protection du lagon", explique Soyfoudine. Des circuits nautiques sont organisés en kayak pour ramasser les déchets. La présence régulière de ces embarcations à proximité de l’îlot M’bouzi décourage en outre les braconniers de s’y attaquer. Le Maracana organise
aussi des campagnes de nettoyage des plages de l’île avec les enfants du club afin de les sensibiliser à la protection de l’environnement.
BIEN MANGER POUR ÊTRE EN FORME ! Enfin, last but not least, le Maracana est aussi un restaurant qui a pour ambition d’offrir une nourriture saine à ses sportifs en herbe. Tous les plats sont à base de poisson frais et de brèdes. "Il faut arrêter de manger des mabawas, car les graisses animales qu’ils contiennent sont très mauvaises pour la santé !", affirment de concert Soyfoudine et Véronique. Leur restaurant, situé sur le front de mer, offre également une vue imprenable sur le lagon pour les amateurs de beaux paysages ! Son accès n’est pas réservé qu’aux adhérents du club et le tout un chacun peut venir y déguster de bons petits plats ou y siroter l’un de leurs délicieux jus de fruits maison !
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MAGAZINE D’INFORMATION NUMÉRIQUE HEBDOMADAIRE Edité par la SARL Somapresse au capital de 20 000 euros 7, rue Salamani Cavani M’tsapéré BP 60 - 97600 Mamoudzou Tél. : 0269 61 20 04 contact@mayottehebdo.com Directeur de la publication Laurent Canavate canavate.laurent@mayottehebdo.com Directeur de la rédaction Mohamed El Mounir dit “Soldat” 0639 69 13 38 soldat@mayottehebdo.com Rédactrice en chef Solène Peillard
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Couverture :
Départementales 2021 Caribou Président
Journalistes Romain Guille Raïnat Aliloiffa Constance Daire Direction artistique Franco di Sangro Graphistes/Maquettistes Olivier Baron, Franco di Sangro Commerciaux Cédric Denaud, Murielle Turlan Thomas Lévy Comptabilité Catherine Chiggiato compta@mayottehebdo.com Secretariat Annabelle Mohamadi Première parution Vendredi 31 mars 2000 ISSN : 1288 - 1716 RCS : n° 9757/2000 N° de Siret : 024 061 970 000 18 N°CPPAP : 0121 I 92960 Site internet www.mayottehebdo.com
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