Cahiers michel lombardo
Clair Charpentier
Quand les mots se pressent aux bords des lèvres vides leur sens se fendille.
Tu ne peux rien dire
toi, ombre aux lèvres scellées,
Premier Cahier Bleu
prison de silence.
Quelques saisons autour du printemps
Quand les mots tressaillent et frôlent tes lèvres sèches aucun sens n’affleure. Quand tu veux parler, du sable sec et avide jaillit de ta gorge.
fin d’hiver 2008
1
Premier Cahier Bleu
Quelques jours encore
et les fleurs de cerisiers nargueront l’hiver.
Le soir tombe vite : elle tremble encor de froid
Une heure perdue,
la fleur d’amandier.
le soleil n’en finit pas de rougir ce soir.
Surprise au matin
Comme un long soupir
la guêpe est perdue.
par l’air glacé du jardin
le matin mauve apparaît au bout du sentier.
Je suis cette ombre acescente
L’instant est fugace,
farouche dans la nuit vide,
reste suspendue.
las, j’avance libéré.
que les mots ont désertée,
ma plume a tout oublié,
aux yeux vidés eux aussi,
2
Premier Cahier Bleu
Souffle entre les branches,
Trois petits vers courent
goûte le printemps.
avides de sens.
Matin de mai bleu
Vers le soleil rouge
le ciel impose sa paix
tu t’en iras dédaignant
Dans l’herbe mouvante
Le ciel sans couleur
et le soleil rit.
sans chaleur ni ombre.
la feuille nue qui frissonne
sur un champ de papier vide
à l’ombre des pins.
le passé poudreux.
saignent des coquelicots
se blesse d’un soleil morne
Trois fleurs minuscules
Insensé qui croit
Je souris alors.
contre la bassesse.
sur l’olivier planté naguère.
que l’âge est une muraille
3
Premier Cahier Bleu
Le pré embrasé
La brusque hirondelle
implore la faux.
a rayé le ciel.
Quelques pas dans l’herbe,
Une pensée perdue
nuée d’insectes fuyant
comme une hirondelle brusque
Des nuages lourds,
Dans le vieux mur
retient son souffle.
j’ai retrouvé ma serpe.
de coquelicots courbés
comme une pensée oubliée
le lent promeneur.
abuse mes yeux.
l’étendue d’herbe coupée
éboulé après l’orage
Une pie perchée
Ocre, l’arbre est mort.
domine le monde.
souillent le ciel ocre.
sur la branche d’un vieux cèdre
Ses feuilles encor figées
4
Premier Cahier Bleu
Dans la nuit d’été
Le vent s’est levé,
inclinent la tête.
le moindre nuage.
Averse en juillet,
Le bruits des chenilles
minuscule offrande d’eau
qui éventrent la colline :
J’ouvre la fenêtre,
Juste avant l’aurore
me souhaitent bonjour.
ponctue mon réveil.
même les fiers réverbères
je surveille dans le ciel
sur le sol aride.
la ville s’étend.
les cris de joie d’un oiseau
le fracas d’un train au loin
Déjà les cigales
J’ouvre le volet,
Il va faire chaud.
je suis terrifié.
s’émiettent dans mon cerveau,
la ville gronde à ma porte,
5
Premier Cahier Bleu
Il est midi.
Passée l’euphorie
les insectes se murent.
les jours sont bien courts.
L’odeur du matin
Le petit muret
après la pluie de la nuit
est tombé après l’orage
Après la rentrée
Il pleut sans arrêt.
les mots se bousculent.
Vite la rentrée !
Sous le soleil sans nuage
du premier matin qui dure
reconstruit le monde.
sur l’herbe surprise.
comme un rituel joyeux
Quelles vacances pourries !
La terre asséchée
Confiné chez moi
doutent de l’automne.
je rêve au soleil.
et l’herbe avide de pluie
par la pluie interminable
6
Premier Cahier Bleu
Dans le matin frais
Comme un vieux volet
réchauffe un oiseau.
mes os crient et craquent.
Replié sur moi,
Les branches fléchissent
sur mes pensées brumeuses,
sous le fardeau des averses
Le vent turbulent
A travers la vitre
s’en prend aux cheveux.
Je suis bien au sec.
La brume de la piscine
trop longtemps battu de pluie
la nuit tue mes rêves.
je rentre la tête.
qui déchiquète les feuilles
je vois l’oiseau qui s’ébroue.
Il pleut tellement
Ma mémoire hésite.
le bois sent la mousse.
Oh, j’ai oublié !
que même tout près du feu
De quoi parlions-nous déjà ?
7
Premier Cahier Bleu
Une année s’achève ;
Perdu sous le ciel
et mes cheveux tombent
l’olivier a rompu.
je suis trop vieux maintenant
comme un agave enneigé
Encore une nuit
L’odeur de l’hiver
je suis fatigué.
la nuit sera blanche.
L’écran a souri,
La nuit tombe vite ;
comme ça, d’un simple clic,
on a bien changé d’année
Sur la nappe sale
Le silence pèse
subsiste une rose.
le temps s’est figé.
où je cours après un rêve ;
est trop prégnante ce soir :
d’un petit message.
mais pas de saison.
d’un improbable banquet
dans la grande pièce obscure ;
8
Premier Cahier Bleu
De la lettre lue Je vais me coucher.
un lent rayon de soleil
Y aura-t-il un soleil
veut tourner la page.
après cette nuit ?
J’étais à la fenêtre
L’herbe est plus vivace
quand un arbre est tombé.
et le rosier a fleuri
Je n’étais pas dans l’arbre,
juste après la neige.
j’étais à la fenêtre.
Les chiens qui palabrent
Je saute du lit ;
ont pris soin de mon sommeil
un matin humide et froid
La lune est perdue,
Un lacis de brume
le ciel semble lisse.
jusqu’à l’arbre inquiet.
toute la nuit.
traverse la vitre.
les étoiles travesties ;
se traine sur la pelouse
9
Premier Cahier Bleu
Un soleil timide
Le soir implacable
la rosée qui brille.
au ciel déjà sombre.
Je pense à mon père
Dans un repli sombre,
que je n’ai pas vu mourir,
dans le secret se tapit
La nuit s’éternise
Tu vas sous les branches
Demain est si loin.
ton pas broie les feuilles.
ose à peine caresser
dissimule la colline
le front dans la paume.
un lit de violettes.
sur le jardin engourdi.
qui travestissent le ciel,
L’ombre se découpe
Le soleil se couche
sur le ciel flétri.
comme un cœur guéri.
par la petite lucarne
par-dessus la frondaison
10
Premier Cahier Bleu
Par petites touches,
dans chaque bourgeon gonflé, le printemps s’impose.
La pluie de printemps
Dans le lavabo
teintée de mille promesses
quelques cheveux sont tombés :
me trempe la tête.
automne en janvier !
Une goutte d’eau
Un ciel mauve et terne
se cramponne au pissenlit
pèse sur les branches nues :
loin de ses racines.
les feuilles sont mortes
Les feuilles sont mortes.
Le vent se déchaîne,
Un ciel mauve et morne pèse
entre ses cris on distingue
sur les branches nues.
le chant d’un oiseau.
Quelle vanité !
Dans la cheminée,
à l’assaut du ciel.
le bruit du vent seul.
Les pins toujours vifs s’élancent
pas de feu, pas de braise,
11
Premier Cahier Bleu
Rêve cette nuit :
Tu peuples mon rêve,
Oh ! Que tu es jeune !
toi que je protège ?
je te perds, tu me retrouves.
jeune fille ! Qui es-tu,
La nuit, nous marchions
Une vaste place
sans la moindre étoile.
d’une foule dense.
Là, une façade.
Je suis égaré
Quelle était cette maison
au milieu de cette foule
De cette bâtisse
Un manteau de laine
des couples sortaient.
pendant notre course.
réfugiés l’un contre l’autre
s’embrase dans la nuit froide
qui ouvrait sa porte ?
quand tu reparais.
pleine d’escaliers sonores
se serre sur nos épaules
Nous avons suivi
Je te perds encore !
jusqu’au port brillant.
dans une aube noire.
les venelles inquiétantes
Tout se fond finalement
12
Premier Cahier Bleu
Les cimes des arbres
forcées par le vent furieux se plient de colère.
Un voile de sang
Je tourne une page,
obscurcit mes paupières.
le livre demeure ouvert
Il faut que je dorme.
mais le jour faiblit.
Mes tempes suintent
Après la nuit blanche
d’un grondement douloureux.
je me lève dans le froid
Je ferme les yeux.
de la chambre nue.
Nuit d’insomnie,
Un cri à l’aurore,
saut du lit dans l’air glacé
sursaut et affolement,
d’une aube noire.
un faux numéro !
Ce goût dans la bouche,
Il pleut dans ma tête.
serait-ce la mort ?
sur les pissenlits.
ni acide, ni amer,
Le soleil brille pourtant
13
Premier Cahier Bleu
Le soir se prolonge,
les boutons qui se referment taisent leur trésor.
Quelques fleurs encore,
Déjà l’impatience !
d’un été sucré.
les pêchers font la promesse
Les feuilles impertinentes éclipsent les fleurs.
J’ouvre la fenêtre ;
Dans les amandiers
l’odeur d’un soir de printemps
l’audace des feuilles lestes
me saute au visage.
a raison des fleurs.
Un soir sous la lampe
Il a trouvé la mort, il ne la cherchait pas. Quelle aubaine !
égaré dans la pénombre,
Il a perdu la vie, il ne sait pas où. Elle lui manque !
Quelqu’un l’avait perdue avant qu’il ne la trouve.
l’insecte languit.
Et puis, il l’a perdue lui-même.
Quelqu’un d’autre la trouvera.
La nuit a surgi,
Le long du chemin
tout autour de moi.
sourient mille fleurs.
que tu peines à gravir
silencieuse, dans la pièce
14
Premier Cahier Bleu
Il fait frais ce soir.
L’instant attendu
n’était qu’illusion.
pour en garder l’essence.
La douceur de la journée
qu’on repousse infiniment
Il en met du temps !
Dans le soir brumeux
mais le soir il fuit.
se sont refermées.
Paupières rougies,
Comme des flocons
éternuements et front lourd :
sur les branches des pêchers
Sur la page floue
Paisible pêcheur
raillent mon histoire.
des branchies hurlantes.
On le devine à midi
les petites boules jaunes
merci les cyprès !
les souvenirs bruissent.
les lettres qui s’entrelacent
qui détourne le regard
15
Premier Cahier Bleu
Perdues dans le pré
les fleurs retiennent leur souffle, la nuit va tomber.
Le livre se referme
sur une interrogation.
Les larmes de pluie
Ai-je bien compris ?
parent la branche rompue d’éclairs de diamants.
Le vent est tombé
Quelques gouttelettes
dans le murmure du soir ;
ornent la branche cassée
les feuilles se posent.
de subtils éclats.
La porte est fermée ;
Décalage horaire :
et la nuit immense.
sans quitter mon lit ?
dehors sont restés le vent
jusqu’où suis-je donc allé
Au-dessus des pins
Le jour cède enfin !
sans le moindre bruit.
sans oser la nuit.
Le ciel mange la colline
Des heures interminables
16
Premier Cahier Bleu
Les lents cognassiers
Dans la flaque d’eau
se couvrent de fleurs.
avec mes pantoufles ;
Une averse froide
Pollen prisonnier
a interrompu l’élan
de grandes flaques brillantes
après tous les autres arbres
j’ai sauté malgré mon âge
du printemps frileux.
nappes brodées d’or.
Une averse glaciale a coupé la parole
Sous la lampe pale
au printemps frileux.
un ruban de mots musarde en quête de phrases.
Penché sur la nuit
Blottis dans le soir
qui submerge mon cerveau
les mots ont perdus leur sens
le sommeil me fuit.
sur la page vide.
Par les fleurs d’avril
Ce bruit de moteur
d’été parfumé.
Je clos les volets.
le verger tient sa promesse
Venu de la route en bas !
17
Premier Cahier Bleu
Du tronc écimé
Dans les feuilles mortes
comme un éclat de rire.
Des bonsaïs sauvages
surgissent des branches vertes
au fond du jardin se cachent
La route s’égare
Jusqu’au point du jour
ne va nulle part.
caché sous les draps.
La pluie tombe lente
Ferme le volet
et mon pas va chancelant
car l’hiver frappe à la porte
Un léger frisson
Un soleil craintif
il faut bien rentrer.
sur la terre sèche.
et l’orage qui l’inonde
j’ai couru mille aventures
dans le vieux jardin.
en ce mai frileux.
quelques gouttes sur la tête,
s’est levé dans un ciel terne
18
Premier Cahier Bleu
Affligé d’ennui
Je me lève encore
le matin paraît.
obscurcie de rêves.
dans la pluie et le vent noirs
dans une aurore douteuse
À travers la baie,
J’ouvre la fenêtre
l’herbe ivre de pluie.
Je referme vite.
Sous le poids des nues
Le bruit de la ville,
le paysage s’effrange
comme une bile acescente,
Il est temps je crois ;
Soleil capricieux.
j’allume la lampe.
à chercher de l’air ?
l’esprit confus, je contemple
sur un monde sans odeur.
d’étranges lueurs.
me monte au gosier.
un frisson me prend ce soir,
Que faire d’une journée
19
Premier Cahier Bleu
La pie qui sautille
Sur le ciel tranchant
son repas d’insecte.
l’illusion de loin.
déconcerte, soupçonneuse,
l’ombre d’un cèdre incrustée
Dans le vent la pie
Sans la moindre angoisse
a quitté la terre.
en me réveillant.
Une tourterelle
Il est mort ce père
seule et perdue sur son fil
que je croyais invincible
Vif, l’oiseau craintif,
J’ai lâché ma faux
a rejoint son nid.
n’étaient pas éclos.
chaotique et maladroite
je me souviens de ma mort
attend des nouvelles.
et ma voix se fend.
comme un rayon de soleil
les pauvres coquelicots
20
Premier Cahier Bleu
Posée sur ma pierre
je regarde la vallée
J’ai dit au-revoir
qui vibre et s’égare.
au verger.
Demain sans faute
Dans le pré, fragile,
j’aurai les mains propres.
le premier coquelicot semble bien timide.
La nuit espérée ;
dans le vent et la fournaise
Ce matin de mai
l’occident s’embrase.
une odeur d’herbe coupée surprend mon éveil.
Tu vois le soleil, tu vois la terre et le ciel
Le ciel sans soleil
encore un moment.
après une nuit sauvage à espérer dormir.
Des paupières lourdes
Une nuit sauvage
sous la lampe fatiguée :
à poursuivre le sommeil
un soupir ce soir.
un ciel sans soleil.
21
Premier Cahier Bleu
Dominant la brume
le soleil se dresse enfin sur les prés brillants
Gravé au fronton
L’odeur de buis lourde
sur la porte des nuages :
pèse sur l’herbe trempée
« soyez doux mais sûrs »
d’un matin brouillée.
Une odeur de buis
elle prend ma main
pèse sur l’herbe trempée
elle me conduit sans heurt
d’un petit matin.
elle me sourit.
Dans le cerisier
Un soleil falot
pour l’abeille et moi.
dans l’air pas un souffle.
il y a assez de cerises
s’est emparé du ciel jaune ;
Après la pluie
Dans l’air surchauffé
fusent au soleil.
sur mes nerfs tendus.
mille et un coquelicots
le bruit de la ville ondule
22
Premier Cahier Bleu
Dans le pré fauché
Remontant son cours
une larve âprement.
apparaît limpide.
des pies revêches disputent
l’eau troublée de la rivière
Le ciel pommelé
Là-haut, les nuages
un cœur déchiré.
à narguer la terre.
Sous le ciel avide
Dans le vent les branches
j’ai parcouru le verger
Se courbent nerveusement
Le soleil s’applique
Le temps sur ma peau
d’un coup de rasoir.
de vent et de sable.
se raye de sillons pourpres,
jouent dans l’ombre du soleil
d’une sueur lente.
et sifflent de rage.
et découpe les objets
a tracé un paysage
23
Premier Cahier Bleu
Courbé de fatigue
Droite comme un sabre,
sans mélancolie.
tranchant l’air épais.
je peine sur ce chemin
brutale, la pluie s’abat
Un cri dans la tête,
Sous la pluie subite,
couvert de silence.
avec mon tuyau.
L’horizon figé
L’odeur de la pluie
sans tentation de lumière
entêtante mais fugace
Faut-il spéculer
Voilà, c’est fini !
sur le temps perdu ?
du petit cahier bleu.
je m’éveille brusquement
hagard, j’ai l’air bien stupide
séquestre le monde.
efface mes pas.
avant de tourner la page,
et nous perdrons la mémoire
1/06/2009
24
Perdu dans un rêve
toutes les portes se ferment jusqu’au point du jour. Dans la main, ma tête vide d’espoir et de rêve pèse lourdement
Second Cahier Bleu
La fenêtre ouverte
Deux saisons sans printemps
sur une journée sans ombre retient la lumière.
L’ombre sur le mur,
empreinte dans le béton, a peur d’un nuage. La peau au soleil
scintille de mille étoiles comme une nuit claire. Il fait doux ce soir,
9/06 2009
la terrasse ouverte au ciel désire la nuit.
25
Second Cahier Bleu
D’une nuit sans rêve
Les muscles se crispent
qu’on ne peut saisir.
usés par l’attente.
ne subsiste qu’un néant
sur des os endoloris,
Sur le ciel sans tache
Le ciel est voilé
d’un coup de vent vif.
l’herbe desséchée.
un grand pin signe son ombre
mais la pluie ignore et nargue
Où vont ces pensées
L’été se prépare
par peur d’un sourire.
de chaleur épaisse.
que l’on ne peut pas confier
à couvrir les paysages
Dans un rêve abrupt
C’est inévitable,
sur la route froide.
sur le carnet noir.
je suivais seul mon cercueil
tu auras le dernier mot
Ici la chaleur
Sur ce monde noir
jusqu’au fond des pierres.
où le jour se lève.
éclipse le moindre souffle
il y a toujours un lieu
Personne ne sait
Dans le chant des oiseaux
où nos pas conduisent.
ouvre l’horizon.
dans la poudre des chemins
le velours de l’aube rose
26
Second Cahier Bleu
Un arc-en-ciel s’ouvre
Encore un obstacle !
offrande de fleurs.
peut se contourner.
dans les gouttes du jet d’eau :
La montagne qui résiste
Roulé sur la grève,
Dans l’été brûlant,
petit grain de sable.
mon esprit vacille.
qui saura te reconnaître
sur la colline ondulante,
Où vas-tu, petit ?
Bientôt les cigales
te conduit ta joie ?
et les chants d’oiseaux.
Vers quel probable naufrage
vont grignoter ma cervelle
Tombée de ma gorge,
Dans le jardin jaune
qui entend ma voix ?
dédaignent l’été.
brindille dans l’océan,
trois coquelicots encore
Je te reconnais
Le temps a passé ;
dans l’odeur des pins.
sans savoir l’ouvrir.
à la porte de l’été
on reste devant la porte
Dans le soir qui vient
Un matin féroce,
allège ton cœur.
l’air brûle déjà.
une odeur d’herbe arrosée
sur la terrasse insolente
27
Second Cahier Bleu
Éclairs et tonnerres
Le vent s’est levé
d’un orage aride.
je retiens mon souffle.
ont mordu la nuit ardente
dans les arbres desséchés,
L’onde de chaleur
De gros frelons jaunes
liquéfie la route.
de flammes en feux.
qu’un soleil en rage attise
bourdonnent sur la garrigue,
Déjà le matin
Combien de baisers
que les oiseaux scellent
cet homme sans lèvres ?
tient le gage de l’été
avant que je ne devienne
Dans la glaise tendre
Dans le crépuscule
on creuse ma tombe.
sont cernés de sang.
accueillante et maternelle
les nuages distendus
Tu peux regarder,
Une aube venteuse
Ton cœur en a-t-il ?
et des pins craintifs.
mon jardin n’a pas de murs !
pointe au-dessus des collines
L’illumination
L’été est bien là :
sombre dans l’oubli.
ça sent la fumée.
surgie à l’ombre des chênes
il a fait chaud malgré le vent,
28
Second Cahier Bleu
On m’a dit un jour
« tu prends le train pour l’enfer ! »
Ce n’est pas possible,
parce que ce train, Monsieur,
pas la mort déjà !
J’ai déposé plainte
ces quelques mots sur l’écran,
était en retard.
Furtive et vorace,
Un cri dans le vent :
elle attend sans impatience,
la tourterelle s’inquiète
fidèle à sa borne.
du sort de son nid.
Journée d’examen.
Fatigué, tu rentres
On redoute le verdict
d’un long périple au jardin
du laboratoire.
les yeux pleins d’odeurs.
Dès le matin tôt,
Juillet fut fatal ;
enflammé par les cigales,
le pêcher n’a pas grandi
mon crâne s’émiette.
l’ombre est restée courte.
Je rentre accablé ;
Même en plein été
mais même à l’intérieur
on ne peut compter sur rien : le ciel s’est couvert.
adhère à ma peau.
J’attends sur le quai,
Le jour s’est levé
ni amer ni triste.
à l’incertitude.
mon bagage presque vide,
sur une vallée soumise
29
l’ombre
Second Cahier Bleu
Surgis de la terre
les oliviers étincellent
Courir la colline,
de gouttes d’argent.
les pas roulent des cailloux, coule la sueur.
Par-dessus les arbres
ce soir le ciel est lavande et l’air parfumé.
Le ciel est lavande,
une odeur de vieille armoire teinte mon regard.
Plongé dans les songes
face à l’écran, j’interpelle les signes du clavier.
Le ciel soudain sombre
Chats, chiens, coqs enfin
don d’un bref orage.
ma mine au matin !
a pris l’été en pitié :
Ont accompagné ma nuit :
A l’est la colline
L’araignée soucieuse
comme une dent usée.
a la panse pleine.
émerge de l’aube sale
qui protège sa portée
Je me sens stérile.
En rayant la nuit
a froissé ma joue.
Je ne souhaite rien.
Mais un tout petit sourire
l’étoile a filé vers l’ouest.
Un doigt de lumière
Pousse le volet
des liens de la nuit.
midi va venir.
me libère doucement
et savoure le frisson,
30
Second Cahier Bleu
On pousse la porte,
on sait la couleur du soir
Où est ce jeune homme
mais c’est le matin.
qui avançait fièrement ? Assis, las, au bord…
Lentement ouverte
Les ombres s’allongent
sur l’hésitation
cette page de carnet
sur les oliviers brûlés
les fruits se recueillent.
Cherche bien la porte close
Quelques brins de paille
depuis si longtemps
vont-ils soumettre l’élan
mais ne l’ouvre pas.
d’un olivier sauvage ?
Parcours le chemin
Qui peut s’en lasser ?
décevant
Odeur de l’herbe mouillée
des souvenirs
par la pluie d’été.
sans nier demain.
Odeurs des matins,
Dans cet air visqueux
lèche mon écorce.
respirer fatigue.
l’étroite langue de ciel
respirer est difficile,
Les feuilles de viorne
Un soupir ce soir,
sentent le cadavre.
la crainte est rentrée.
Luisantes de gouttes d’eau
derrière la fenêtre
31
Tu peux parcourir
le chemin des souvenirs sans nier demain.
Second Cahier Bleu
Un rayon affleure
les murs. D’une main humide l’automne s’installe.
L’automne s’installe
un rayon frôle les murs d’un matin humide.
Ce calme au jardin !
Soudain des pies se disputent. je rentre agacé.
La colline au loin
Esprit soupçonneux ;
coiffée de soleil.
sous un ciel trop clair.
perce brusquement la brume
l’automne se dissimule
On est en septembre
Sans craindre l’automne
du vieux cerisier.
des fleurs du vieux lierre.
quelques feuilles sont tombées
les frelons graves se gavent
Malgré les averses
À l’aube sanglante
Demain c’est l’automne.
pleine de soleil.
le pré ne reverdit pas.
je prédis une journée
Un frisson me prend,
Elle m’atteint même
sur ma lassitude.
la ville hurlante.
un soir humide est tombé
dans la chambre d’hôpital
La pénombre arrive
Je ne peux atteindre
La nuit effrayante.
après la fenêtre.
comme un trait sur les paupières,
les platanes qui jaunissent
32
Second Cahier Bleu
Sur l’écran sans joie
Surpris par l’air vif,
picorer le ciel.
m’adresse un clin d’œil.
sept étoiles sont venues
un rayon du soleil neuf
Narquois, je regarde
Le soir installé
dans le même pré.
lentement médite.
champignons et pâquerettes
dans le silence des feuilles
C’est un crépuscule
Le ciel s’ennuage :
Je n’ai pas sommeil.
dans le soir humide.
qui est tombé sur ma vie.
le soleil s’est dilué
Ma tête rouillée
Jardin délaissé,
vieille girouette.
sans aucun regret.
tourne et grince dans le vent,
il s’en retourne au chaos
Je me sens d’octobre,
L’orage d’octobre
sait l’été fini.
de tous ses indices.
comme dans le vent la feuille
a lessivé la chaussée
Douleur dans le ventre.
La pluie insistante
octobre est bien froid.
du vieux toit qui tremble.
Je frisonne ce matin,
martèle les tuiles gauches
33
Second Cahier Bleu
L’aube grise étend
Octobre s’achève,
un rictus malade.
demain est si loin.
étend sur les briques de la ville
l’ombre approche des fenêtres,
Des gouttes de soir
J’ouvre la fenêtre
Ferme les paupières.
novembre frissonne.
se sont posées sur mon cœur.
dans l’aube éteinte et la brume,
Dans le soir d’octobre
À l’abri des chênes,
d’un monde achevé.
novembre s’emporte.
pèse la mélancolie
les glands craquent sous les pas,
Une heure s’arrime
Au loin dans le soir,
de l’automne inerte.
le monde se ferme.
aux heures déjà épaisses
on ne voit plus la colline,
L’herbe s’évapore,
Toussaint, jour des morts ?
aspire le ciel.
joue de l’air,
la prairie ensoleillée
Mon esprit embarrassé
joue des mots !
La nuit
lentement
Quelle brume cache
s’insinue entre les troncs
les fils de mon avenir
figés par la peur.
et le verger froid. 34
Second Cahier Bleu
Il pleut ce matin
Parfois le soleil
Sur mon cœur ridé.
la route s’éclaire.
sur les feuilles qui jaunissent,
perce l’épaisseur de brume,
Sur la vieille pierre
Je ne sens plus rien
un bourdon attend la mort.
sous la lampe dure.
où j’étais assis
qu’un interminable trait
Dans le miroir trouble
Franc soleil d’automne,
Enfin je m’éveille.
je me sens vivant !
je ne me reconnais pas.
l’aube renverse les vitres,
Les nuages roulent
Sur l’herbe bien rase
coiffe d’affliction.
Le fier jardinier !
juste au dessus de ma tête :
tant de fleurs décapitées.
La nuit de novembre
Venue lumineuse.
nuit mélancolique.
Retour sous la pluie.
frissonnante de brouillard,
Je regarde, mais personne.
Il fait froid ce soir.
Sourire au soleil,
mon ombre vacille.
ploc, ploc ! C’est la pluie !
Dans la lumière falote
le temps de passer la porte,
35
Second Cahier Bleu
Après-midi lente
La pluie et la brume
d’un dimanche de novembre,
ont figé le paysage. J’avance en silence.
le temps sait se perdre.
Privé de jardin
Un sourire aux lèvres
je vais prendre un bain.
l’odeur du café.
par la pluie interminable
dans la maison endormie :
Quelle belle averse !
Il fait nuit encore
à travers la vitre.
l’aurore est sereine.
Je m’enrhume en regardant
et pour mon cœur apaisé
Retour du soleil
J’ai remis de l’ordre
Je ris, j’éternue.
Ah, l’odeur de l’herbe !
avec son ami le vent.
dans le jardin chaotique.
Coupée de sa branche
Les roses d’automne
guide mon esprit.
la brume sans doute.
la feuille soumise au vent
ont une couleur lavée :
Je ferme le livre
Quelle prétention !
-attendre à demain.
ne sont que des ronces.
sur une interrogation.
Les roses que l’on courtise
36
Second Cahier Bleu
L’air est si piquant ce matin
que le soleil
Ivre et aveuglé,
en a les joues rouges.
prisonnier de la lumière, papillon de nuit.
Il faut bien fermer
les fenêtres et les cœurs :
Dans le ciel noirci
odeur de l’hiver.
rampent les vieux souvenirs, le morne passé.
Le froid vient bien tôt
fixer la brume aux toitures
Ce qu’on sait du monde
et meurtrir mon ventre.
et ce qu’on sait de soi-même : Un éclat de rire.
Surpris par le jour
dans la chambre silencieuse,
Matin équivoque :
assis dans le froid.
le soleil perce la brume de rayons rageurs.
Un soir sous la lampe,
je raconte des histoires
Sur le monde humide,
au papier prudent.
j’ouvre portes et volets et sur le seuil glisse.
Un jour passé encore
Le verger obscur
de mon propre corps.
je rôde sans âme.
à me détacher
se détourne de mes pas,
37
Second Cahier Bleu
Une seule feuille, obstinée,
Tu es fier du mur
au pêcher pudique.
contre les saisons.
reste accrochée
que tu as dressé solide
Le jardin humide
Il faut bien rentrer ;
soir mélancolique.
le verger transi.
un frisson des feuilles mortes,
la nuit a couvert de brume
Aiguë et glacée,
Les couples d’oiseaux
L’hiver est précoce.
dans l’arbre effeuillé.
une lame a coupé tes rêves.
ont l’air d’ignorer l’automne
Sur les cauchemars
Dans la nuit cendrée
s’est enfin dressée.
de mes prochains rêves ?
une aube majestueuse
quelle sera la couleur
Entre les collines
Las, j’ai tout laissé.
Je cligne des yeux.
qu’un triste sourire.
un soleil mutin émerge.
Il ne me reste à présent
Après les nuits brunes
Propos dérisoires,
s’ouvre vers l’orient.
si vite oublié.
la fenêtre de ma chambre
comme un cahier qu’on referme, 18/11/2009
38
Assis sous la lampe
je n’écris pas de poèmes pourtant je respire. Les mots se répandent il n’y a pas de réglure
Cahier Bulle
pour les retenir.
Un petit cahier
Ils vont d’où ils viennent
pour tes charmants poèmes
Bise - Lyliane
un saut par-dessus la page dans des cris d’enfants. Un mot innocent
s’accuse de tous les maux il y a maldonne.
17/01/ 2010
39
Cahier Bulle
Un mot s’est glissé Comme un mot d’amour
sous la porte de ma chambre
le soleil frappe à ma porte
avec son secret.
j’ai fermé les yeux.
Où sont-ils cachés
Parole donnée
les mots qu’on ne peut pas dire
au petit rayon de lune :
par peur de rougir ?
veille mon sommeil !
J’entends ces paroles
C’est un cri de joie :
pourtant incompréhensibles
l’arc-en-ciel dans les nuages
dans la paix du soir.
va chasser la pluie.
Une odeur de neige
Un saut dans la flaque
parcourt la nuit
j’ai toujours sept ans.
blanchissent de givre.
mes chaussures sont mouillées,
et les prés
40
Cahier Bulle
Un souffle de vent
Un bouquet de mots
murmure dans les branchages
a décoré mon écran :
Départ dans la nuit,
Des raies de lumière
rougeoie dans le froid.
les gouttes de pluie.
l’hiver finira.
écris-moi encore.
maintenant pourtant l’orient
éclaboussent de couleur
Dans le vent glacé
Que les mots soient dits
par des lèvres dures.
le vent les efface.
Quel mot peut décrire
Les mots sont aveugles
cette absence de désir
ils s’égarent sur la page
les paroles sont gauchies
que les choses soient bien claires,
de vivre ou de mourir.
et ils se croient libres.
41
Cahier Bulle
Sortir du sommeil
Les oiseaux transis
chercher les mots sur la table
dans le soleil d’hiver
Les dits du vieillard,
Ils n’ont pas chanté
tellement il rit.
parole coupée.
et ne rien trouver.
chantent malgré tout.
qui pourra les croire encore
quand s’est levé le soleil,
Quand un livre s’ouvre
Les phrases s’étirent
si la fin existe.
des dents du râteau.
Dans le vent d’hiver
Le sillon des mots
on distingue maintenant
s’enracine avec lenteur
on ne sait pas vraiment
comme les graviers qui coulent
un air de printemps.
sur la page avide.
42
Cahier Bulle
Répondre à l’hiver
Las, il se souvient
par la froideur des propos,
d’une vie sans envolée,
Paroles, mots, chants,
Les mots engourdis
passe le message.
ne se pressent pas.
rendre mot pour mot.
le vieillard sourit.
sur la page ensoleillée
par un hiver nonchalant
Hiver sur la plage,
La feuille vole
les débris du conte.
de mots ténébreux.
Une histoire encore
Une averse brusque
s’est brisée sur la muraille
a brouillé le sens des phrases
ils sont venus renoncer
de porte en porte couverte
des rumeurs sournoises.
du feuillet perdu.
43
Cahier Bulle
Désordre des choses :
Être sans mes mots,
dangereusement la fin
je m’agite et me débats
Un mot pour un autre ;
Malade et mortel,
je ne sais quoi dire.
les mots tus me manquent.
frise le début.
sans respiration.
dans la confusion des sens,
muré de mutisme amer,
Sans un mot, sans bruit,
Armés jusqu’aux mots,
morte sur le banc.
d’un bâillon féroce.
Sans un mot non plus
Un mot doucement
je suis assis sur le banc
chuchoté et caressant
une feuille s’est posée
les cris couvrent les murmures
tremblant dans le vent.
m’a guéri du froid.
44
Cahier Bulle
Quelques mots blessants
Un mot après l’autre
sont postés en embuscade
comme un mur entre nos vies
Prendre l’air du temps
D’un mot murmuré
vivre à pleine dents.
saura s’émouvoir.
derrière un sourire.
jusqu’au dernier mot.
à la porte des saisons
une oreille scrupuleuse
Qui m’en dira tant
Au bout de la langue,
sont demeurés cois.
mots ne soufflant mot.
On peut conjuguer
Le péché d’orgueil
la vie qu’on a convoitée
a avalé l’hameçon,
et m’en laissera conter
sac de billes répandues,
au futur décomposé.
la ligne et la canne.
45
Cahier Bulle
On a perdu l’heure
Il est revenu
qui venait après les heures
la tête dans les épaules
Quelques mots à lire ;
Armé de mots creux
de ce livre à vivre.
se frotte à l’ennui.
comme on rend des comptes.
les pieds dans le plat.
je n’ai pas choisi les pages
le messager inaudible
Sur la flaque flotte
Foncer bille en tête,
qui rêve d’un fleuve.
Je tente ma chance.
Des mots dans la poche
Qui se reconnaît
se heurtent dans le désordre
dans les errances passées ?
Une brindille hasardeuse
un chien dans un jeu de quilles !
en quête de point.
Un mot chasse l’autre.
46
Cahier Bulle
L’averse a surpris
D’un battement d’ailes
la colonne de fourmis :
le sens des mots s’est enfui :
« Au sec… un abri ! »
le livre se ferme.
Plume suspendue !
Mais quel motif
Aux grands mots, les grands aèdes,
couper les cheveux en quatre,
personne ne souffle !
sans vous défriser ?
À la fin des taons,
J’ai ouvert un livre :
ils remâchent leur victoire,
ils m’ont sauté au visage,
les bœufs fastueux.
les mots dits sauvages.
Soudain apparaît
Le vent a molli.
en vêtement d’apparat
C’est le soir, le rêve court
le coquelicot.
dans le lit des mots.
47
Cahier Bulle
Rêvant sous l’auvent
ou se levant du divan fervent survivant.
Rouge, il parait rouge !
Mais quelle couleur prend-il dans le bleu du vent ? Dans le soir de mai j’ai laissé la porte ouverte sans une objection. Part, petite bulle,
à la conquête du ciel
dans l’éclat d’un rire.
48
après la colline
un espace sans relief brule sous le ciel un étranger dort à l’ombre crue des rochers voyageur sans rêve
Travaux Pratiques Troisième Cahier
cet homme se lève il quitte l’ombre des roches nargue la lumière il reste immobile
style d’un cadran sans heure sous le feu brutal il avance enfin sur la route pour y faire ses travaux pratiques
49
Travaux Pratiques
La pluie revenue
La nuit est venue,
de pleurs d’impuissance.
dans son habit noir.
tapisse l’herbe attristée
humide et lugubre nuit,
Un ciel pommelé
La nuit a mangé
court sur la vallée.
l’ennui me recouvre.
Soirée en souffrance,
L’ennui m’enveloppe,
la nuit va passer bien grise
la nuit recouvre la terre
Novembre finit
Ce n’est qu’un clin d’œil :
surpris de soleil.
cèle la lumière.
comme une harde fougueuse
tous les rayons de miel ;
vers un matin morne.
et le temps s’égare.
dans un grand éclat de rire,
la muraille de nuages
50
Travaux Pratiques
Un signe éphémère,
Les flammes qui craquent ;
scelle la lumière.
tout mon corps grelotte.
la muraille de nuages
encore une année passée,
Le soir est venu
Dans la cheminée
mes orbites sombres.
l’année est passée ;
Le ciel ce matin
Un ciel impassible
est lacéré de blessures
témoin d’une nuit glacée
Dans l’aube glaciale
Croissant dans le ciel,
déchirent le ciel.
lune énigmatique.
douloureusement graver
il ne reste que des cendres,
encore saignantes.
recouvre le monde.
des nuages écarlates
acérée comme une lame,
51
Travaux Pratiques
le soleil y règne sur la plaine poussiéreuse
Des lambeaux de brume
il n’y a pas d’ombre
comme des rêves blessés
souillent l’herbe blanche.
il faut inventer il n’y a pas non plus d’herbe
Le jardin est blanc.
aux bords des sentiers
Dans le froid qui m’enveloppe
les chemins poudreux
le ciel va tomber.
n’existent que dans son rêve ce sont des rivières
L’hiver est figé ; pas d’étoiles dans le ciel,
des torrents de sable
juste la pâleur.
qui courent comme des larmes et creusent son corps
Rentré dans la nuit :
aucun souvenir
je ne vois pas le chemin,
n’a pu résister au souffle
seulement mes pieds.
du temps aboli
52
Travaux Pratiques
Un profond soupir Dans le soir glacé
s’abandonne du fauteuil ;
un souffle vient enflammer
le soir des vacances.
Mes pensées figées.
C’est l’aube écarlate :
L’air semble immobile
Se découvre un paysage
au dessus de la prairie
figé dans le froid.
décembre frissonne.
Dans le vent d’hiver
Ma vie a roulé
il ya mille poignards
dans la fureur d’un torrent
qui coupent les doigts.
comme un galet, lisse.
Les nuages sales
Dans le carnet noir
pèsent
une rangée de cyprès
sur mes yeux dolents
feint le cimetière.
et la vallée grise.
53
Travaux Pratiques
L’aube rouge encore
Bientôt l’an prochain ;
Je frissonne inquiet.
mais l’hiver timide.
s’impose sur les ténèbres.
ce n’est déjà plus l’automne
La pluie tombe à verse ;
À l’est une brume,
de mon cœur humide.
la nuit équivoque.
D’une année encore
Lancinants ils passent
on a coupé les rubans.
les jours pesants des vacances
Pas tout à fait mortes,
Les mains dans l’eau froide
les feuilles fourbues.
je nargue l’hiver.
un soupir grinçant s’échappe
une lumière diffuse :
Après, combien d’autres ?
comme un vent très lent.
je les regarde qui tombent
de la piscine enfeuillée
54
Travaux Pratiques
créer l’univers jusqu’à sa propre histoire
Un petit message
à partir de miettes
comme un fanal dans la nuit ouvre mon regard.
la vaste étendue libérée du moindre signe
Un soir fin décembre,
surprend son regard
l’année pèse sur ma peau
parfois un froid vif
comme un hiver moite.
blanchit la plaine sans ombre aveuglante et lisse
Je sens l’amertume des nourritures passées
il baisse les yeux
tordre mes entrailles.
le dur soleil l’humilie la plupart du temps
Gorgé de paresse
si sa trace est droite
un nuage ôte la nuit ;
il progresse lentement
je baille et me lève.
d’un pas hésitant
55
Travaux Pratiques
L’an neuf apparaît
Tu reprends la route
un amer présage.
mais où t’en vas-tu ?
au matin humide et froid,
homme aux semelles de plomb,
Cette pluie sur l’eau,
Les bourgeons frileux
des années enfuies.
rêvent de printemps.
Dans ce soir de brume
Il pleut, il fait froid ;
la nuit et le jour se mêlent
au fond de moi je souris :
Piqure de froid,
La pièce est obscure,
questionner mon sang.
et je n’ai pas froid.
gouttes froides sur la mer
sur les branches dénudées
à mes yeux fiévreux.
le vent a cessé.
je vais au laboratoire
j’entends ma respiration
56
Travaux Pratiques
Deux petits flocons
Noir comme l’hiver
la pluie a souri.
de toute espérance.
ont fleuri sur mon chapeau :
un corbeau raye le ciel
Comme l’hiver, noire,
La neige indécise
Dans un long manteau
J’ai le cœur glacé.
la vallée transie.
Fatigué, je marche
Sous la couette épaisse
sur la route sans étoile
j’égrène les saisons mortes ;
Quand tombe le soir
Le front tourmenté
pétrifie mes tripes.
que le ciel charrie.
flotte dans un air figé.
une corneille a rayé
la brume humide enveloppe
vers un lent repos.
cet hiver me pèse.
un froid et profond silence
je guette les nuées lourdes
57
le ciel d’amertume.
Travaux Pratiques
le voilà enfin
posé au milieu du vide
Tu tournes les cartes
sans monde à porter
croyant au geste du ciel
mais seul le temps tourne.
rien que la plaine uniforme blanche et nue et son ombre courte
Enfin le soleil
caché depuis si longtemps,
infiniment lent
enfin je respire !
il pose un regard figé tout autour de lui
Réveil en sursaut : la nuit étend son emprise
il reprend sa marche
sans but et sans espérance
même sur mes rêves.
en courbant l’échine
La nuit est tombée
vers un horizon
brutale sur les massifs ;
qui se dérobe sans cesse
partout il fait noir.
d’un pas inutile
58
Travaux Pratiques
Une autre journée
Une odeur de neige
des pensées amères.
blanchissent de givre.
le vent a purgé le ciel
parcourt la nuit, et les prés
Ils sont revenus
Le vent froid soulève
les nuages gris.
et brule mes yeux.
J’écoute une voix
Le rhume est tenace :
dans le silence attentif ;
entre mes orbites
Par-dessus la haie
L’hiver s’est durci,
j’ai vu le printemps.
comme un verre vide.
couvrir le ciel sans espoir
les feuilles lustrées de glace
je suis apaisé.
le monde dans un mouchoir.
comme un enfant qui se cache
il est devenu cassant
59
Travaux Pratiques
C’est un matin vif ;
Le ciel effrayé
l’hiver est coupant.
a blanchi soudain.
l’herbe craque sous mes bottes,
par le vol des étourneaux
La salle d’attente
Le ciel sans étoile
comme eux je patiente.
des pas dans le froid.
Février s’endort,
Ivre de fatigue
il fait toujours aussi froid,
le soir finit par tomber
Le vent les déchire
Tremblements et larmes,
les nuages noirs.
rage du vaincu.
est pleine de vieux malades ;
couvre un paysage nu :
seuls les jours rallongent.
dans le caniveau.
comme de vieilles guenilles,
arrogance du vainqueur,
60
Travaux Pratiques
Le vent s’est levé
sans comprendre il pose
sur des cendres mal éteintes
sur le long chemin sans borne
emportant l’odeur
un pied après l’autre
acre des feuilles qu’on brûle entre les pierres tombales.
le sel et le sable obstruent ses yeux et ses pores transpirent du sang
Le vent insolent
redresse un visage pourpre
un point sur la plaine
dans l’hiver tranchant.
au bord de l’horizon vierge capte son regard
Le vent qui me glace
un jalon obscur
emplit ma tête d’effroi
c’est une petite tache
et fige mes membres.
qu’il distingue à peine
Dans le vent dément
ce n’est qu’une stèle
les chênes ont perdu leurs feuilles ;
vers laquelle il se dirige
c’est toujours l’hiver.
et lui donne un but
61
Travaux Pratiques
Noce dans le froid :
Le ciel est si bas
l’a unie au vase.
la porte fermée.
l’eau restée dans la coupelle
qu’il est entré dans ma chambre
Piqûre de froid
Je sors du sommeil
ma peau a grogné.
la nuit pèse encore.
Le jardin caché,
J’ai passé l’hiver
il est couvert de feuilles mortes
à me plaindre des frissons
Planté dans l’hiver,
Le vent me raconte
j’attends les beaux jours.
pleine de colère.
ou piqûre dans l’épaule,
mes pieds sur les carreaux froids
qu’il faudra brûler.
que je n’aurai plus.
contenant mon impatience,
une histoire trop connue,
62
Travaux Pratiques
Un bruit dans la nuit,
J’arpente un jardin
miaulement de chat.
infinie lenteur.
un cœur qui cogne soudain,
dont je connais chaque pierre ;
Le rideau découvre
Au milieu du jeu
je retourne au lit.
me suis endormi !
Pourtant je me lève
Après les collines
avec un profond soupir,
le regard se perd et fuit ;
Les mains dans les poches,
Il n’est plus très loin,
que le ciel est bas.
d’une odeur subtile.
un ciel chaotique et noir,
et au milieu du gué, je
j’accepte ce jour.
je pense à la mer.
il fait moins froid à présent
les bourgeons gonflés l’affirment
63
Travaux Pratiques
il arrive enfin au pied d’un dôme de sable
Cette pluie d’hiver
ridé par le vent
qui me fait rentrer la tête, comme je la hais !
craintif il avance poussé d’un désir curieux
Le vent cette nuit
vers le point sans forme
a martelé les volets
mille précautions
de mon insomnie.
il contourne plusieurs fois cet arrangement
Un train dans la nuit a traversé l’espérance
prudent il s’assoit
sans trouver de gare.
dans l’ombre distante et froide figé dans l’attente
Il en met du temps !
une fois encore
Le soir vient si lentement !
il contourne l’éminence
Une feuille morte.
puis reprend sa route
64
Travaux Pratiques
Le soleil soudain
La nuit qui déjà
sur les tombes blanches.
oppresse mes tripes.
dessine des ombres crues
couvre les herbes couchées
L’ordre dans ma vie
D’autres jours aussi
couche de cendres.
le vide s’installe.
L’hiver vieillissant
Aube inaccessible
n’a pas rangé ses frissons :
à l’affût de mes angoisses,
Le vent s’est levé
L’hiver insolent
la nuit sera floue.
la plaine sans ombre.
s’impose par une épaisse
la grande maison raisonne,
il ronge son frein.
une nuit encore.
dans un crépuscule terne :
écrase de tout son froid
65
Travaux Pratiques
La grande illusion !
Séance du soir :
elle continue !
pour brûler mon ventre.
L’ombre de ma vie
Les lasers se croisent
se faufile entre les tombes,
sur mes tripes entravées
Vague après vague
Eux posent leur canne
des plages de printemps.
ouf ! J’ai mes deux jambes !
On ne refait pas sa vie,
sourires vêtus de blanc
veule, vieille et sèche.
de rayons glacés.
l’hiver s’est emparé
d’autres roulent en fauteuil,
La ville est sans âme :
Sur le mur l’horloge
mange mes jardins.
que ma vie a prise.
une tomate sans goût
n’affiche pas l’avance
66
Travaux Pratiques
après tant de pas une autre fois l’horizon
Venu par surprise
se grave d’un point
le soleil chauffe le pré,
sans curiosité
j’ôte mon chapeau.
il inspecte le chemin qu’il doit parcourir
Je remplis des pages qui comme les feuilles mortes
sans joie maintenant
jonchent les sentiers.
il regarde un arbre sec noir et péremptoire
Le printemps s’en vient
il sent que ses os
une écharpe de nuages
sont aussi noirs que les branches
autour du soleil.
de l’arbre brulé
Les fleurs de pêcher
il n’apprendra rien
roses comme le désir
de cette halte inutile il reprend la route
perdent leurs pétales.
67
Travaux Pratiques
J’ai passé l’hiver
Dans le ciel limpide
et j’ai toujours froid.
le nuage noir.
Les journées ont pris
Il s’est déchiré
une couleur de cancer
comme un cœur abandonné
Arbre foudroyé
Comme un voile sombre
sur la plaine humide.
un horizon noir.
des cinq saisons de ma vie
il prend des airs monstrueux,
irascible et moite.
de toute espérance.
qui reste debout, hirsute,
le ciel accroche à mes yeux
Les nuages noirs,
Le chemin rugueux
et avril frissonne.
les scories du temps.
le ciel pèse sur ma tête
s’est creusé d’ornières sales :
68
Travaux Pratiques
Assis dans le noir
La dernière feuille
cette longue nuit.
dans l’avril soyeux.
Sur la flaque d’eau
Le vent aboli
une parcelle de ciel
il ne reste que l’odeur
Las, regardez-le
Sur la branche morte
d’un port improbable.
roucoule au soleil.
je me demande où me mène
est tombée morte du chêne
pétille dans l’ombre.
d’un lent crépuscule.
immobile sur le quai
un couple de tourterelles
Il se dresse fier
Je regarde de haut
-cèdre foudroyé !
aux griffes amères.
seul sur la pente rocheuse
les flammes des pissenlits
69
Travaux Pratiques
encore plus loin
Rentré en sueur,
une écharde point du sable
l’odeur du verger me suit
vers un soleil cru
jusque sous la douche.
comme un cri aigu
Dans l’aube d’avril
elle transperce le ciel
l’hiver las et le printemps
frémissant et pale
se font des courbettes.
la douleur la peur
froissent ses tripes liquides
C’est la fin du jour,
pourtant il s’approche
un crépuscule doré voile mon sourire.
ce n’est que la poutre
d’une toiture effondrée planté dans le sol
Ce matin de pluie fine
haussant les épaules
dans le printemps moite
il tourne vers l’horizon
me fait frissonner.
un triste regard
70
Travaux Pratiques
Rouge d’embarras
Dans la chambre sombre
apparaît sans bruit.
je marche sans trêve.
le premier coquelicot
les yeux rivés au plafond
Que peut-on rêver
Ce n’est qu’un désert
comme un bout de viande ?
là où tu n’es pas.
Lentement je rentre
Le ciel en lambeaux,
d’une journée sans espace
je marche sur un nuage,
Comme des oiseaux
Dépouillés du vent
les cris suspendus.
blottis dans leur cage.
étendu là, sur la table
froid, sans flamme et sans sourire
dans ma conque vide.
mon jean s’effiloche.
perdus dans la nuit des villes,
ils se sont tus maintenant
71
Travaux Pratiques
Bleus, comme passés,
Rangés dans l’armoire
les cahiers que je griffonne
encore tant de cahier
ont perdu leurs feuilles.
sans un mot patientent.
Dans un grand éclat de rire
Sur mes doigts je compte ;
la foudre a signé
subitement un hoquet
la chute de l’arbre.
trempé de sueur !
Toute une journée
À la fin du jour
passée à tondre,
les fleurs se rassemblent.
gronde dans ma tête.
À travers les grilles
Je rentre fourbu,
en fermant les yeux.
la pelouse rase.
contre les peurs de la nuit
un moteur
ils échangent leur silence
mon cœur satisfait contemple
72
Travaux Pratiques
plus loin le chemin lui révèle une étendue
Trop de mots perdus,
glauque sombre et froide
trop de phrases égarées,
le cahier déborde.
la surface lisse laisse voir un fond de fange
Juste après l’averse
mouvante et fétide
dans la luzerne luisante
cette boue sans forme
l’escargot se hâte.
c’est la peau de son visage tendue sur son crâne
Un charbon brillant se glisse dans les salades :
issu de la roche
limace vorace !
mordue de vent dur et froid il retourne au sable
On arrive au bout :
l’espoir est passé
dans le champ couvert de pierres
la fin des travaux pratiques
le sillon est droit.
est enfin venue
2/05/2010
73
un sourire au cœur
j’ai regagné le verger dans le mai trempé
Fourniture Gratuite
dans le vent je claque
Extraite des Paroles Suivantes
comme un vieux linge à sa corde raidi sous l’averse réveil épuisé
après la nuit étouffante le chant d’un oiseau dans le vent l’odeur
de l’herbe coupée saignante
mai – novembre 2010
de coquelicots 74
Fourniture Gratuite
le chêne a chuté
ma tête bascule
un roseau pugnace
dans un feu d’étoiles
la fin du printemps
mois de juin féroce
même à l’orée de l’été
les derniers coquelicots
la plume en suspens
les crayons rangés
l’esprit en vacance
que celle du vide
il a croisé sur sa route
regard perdu vers le ciel
c’est aussi la fin
saignent dans le pré
au-dessus du papier vide
les jours n’ont plus de couleur
le soir est venu
matin de juillet
au croc de mon crâne
la fenêtre ouverte
pendre son manteau de vent
le soleil frôle en baillant
75
Fourniture Gratuite
la haie que j’abreuve
je pousse la porte
m’offre un arc-en-ciel
la chaleur du soir
le chant des cigales
la fenêtre s’ouvre
les durs rayons du soleil
le matin sent l’espérance
dans l’aube d’été
le matin s’installe
un peu de fraîcheur
odeur de café
dans le soir incandescent
odeur de menthe et de foin
grincent dans les pins
le monde est en ordre
les oiseaux vifs se disputent
dans la torpeur des cigales
dans l’air agité
une soirée molle
trouble les cigales
sur la chaise-longue
une odeur de bois brûlé
le mois d’août traîne sa flemme
76
Fourniture Gratuite
murmure du soir
sur la route la poussière
il fait déjà chaud
lentement se pose
ce matin sous les nuages la pluie prend son temps
matin dans la brume, la vapeur de café noir
un trou dans le ciel
submerge mon front
le soleil emprisonné tente une évasion
un brouillard s’étire de la vallée endormie
l’automne est précoce
jusqu’à la fenêtre fin d’été
le vent qui rage à la porte veut chasser l’été
des nues
aujourd’hui il pleut
jouent encore dans le ciel
sur un paysage amer
du jardin d’enfant
où l’été sanglote
77
Fourniture Gratuite
l’orage menace
l’automne est pesant
éclair effrayant
aboient dans le ciel
c’est le soir déjà
le ciel s’est voilé
je me hâte doucement
et le soir déjà annonce
par la vitre opaque
sous la pluie je rentre
le soleil se lève
comme un escargot
la maison lève les mains
les nuages qui menacent
vers le sombre seuil
la pluie retenue
la brume abuse les arbres
mettre mes os à l’abri
le froid de la nuit
septembre frissonne
frisson sous les pieds
du pays d’octobre
a saisi l’aube écarlate
bientôt va s’ouvrir le gouffre
78
Fourniture Gratuite
le s nuages roses
la pluie a cessé
dans le matin froid
la nuit se résigne
le ciel invite au voyage
le soleil n’est pas sorti
c’est un soir paisible
quelques pâquerettes
se noient dans la brume
pour narguer l’automne
sur le bureau terne
je vais sans courage
un crayon facétieux glisse
à la rencontre du soir
le ciel est si las
un mistral nerveux
et courbe la tête
la nuit en faction
les bornes du bord des routes
ont tavelé la prairie
un trait de couleur
que l’ennui recouvre
octobre a mis un manteau
a succédé à l’orage
79
Fourniture Gratuite
l’air humide et froid
le volet ouvert
rode entre les pierres
hommage à l’aurore
des derniers matin d’octobre
sur la raideur de la nuit
éloge du soir
une fumée lente
subjugue mes yeux
jardin honoré
les yeux éblouis
j’entends le murmure
je dévisage le soir
des feuilles que le vent froisse
puis la nuit s’étale
je l’ai lu déjà
sur le corps du monde
du livre jauni
la caresse du soleil
s’élève du tas de feuilles
enveloppé d’or
le jour se retire
comme une caresse lente
toutes les pages s’envolent
80
Fourniture Gratuite
le cèdre se dresse
le temps d’un instant
noir majestueux et fier
le ciel est devenu noir
contre le ciel noir
le vent a tourné
la branche s’incline
sur l’herbe trempée
leste un écureuil bondit
les feuilles déchiquetées
mes os ont craqué
se plaignent du vent
le soir de novembre
dernier jour d’octobre
blanc comme un manteau de fée
sombre et inondé d’averse
filtre sous la porte
j’ai le nez qui coule
puis le soir surgit
claques sur les tuiles
qui efface d’un frisson
quelques gouttes égarées
le soleil hautain
ont gâté mon rêve
81
Deuxième Fourniture Gratuite
l’aube est loin encore dans l’orient lugubre et sale la nuit est patiente le froid de novembre
Deuxième
en lentes volutes blêmes
Fourniture Gratuite
se perd dans le pré
Extraite des Paroles Suivantes
petit jour maussade
le soleil brillait pourtant dans la nuit rêvée les étoiles songent en silence dans le ciel d’une terre inerte
novembre 2010 janvier 2011
82
le froid de novembre
le soleil s’élève
s’est glissé sous les feuillages
au dessus des brumes sales
un soleil narquois
la pluie invitée
matin ivre et vif
ronge la lumière
à l’abri du vent
d’une ville aigrie
dénoue la brume d’automne
aux balbutiements de l’aube
la nuit a voilé
sur la terre lasse
le cri des oiseaux
l’orage s’acharne
dans le froid de l’aube
l’averse a cessé
le soleil frôle mes yeux
les barrières de la nuit
d’un épais linge de cendre
encombrée de feuilles mortes
à travers la vitre
s’écartent enfin
83
Deuxième Fourniture Gratuite
brusque et vif le froid
dans l’incertitude
de l’onctueux novembre
s’écrasent sans bruit
a rayé la nostalgie
des gouttes noires de soir
au-dessus des brumes
une feuille morte
perdue dans l’hiver
figuier pitoyable
une brume froide
novembre est plus froid
a arrimé les restanques
sous son chapeau de nuages
des filaments sombres
un souffle de brume
qui longe la nuit
fantôme blafard
la colline émerge au loin
une seule encor demeure
à leur cœur de pierre
le soleil s’épuise
s’enchevêtrent sur la route
le soir s’étend sur la neige
84
Deuxième Fourniture Gratuite
ce linceul trop lâche
la journée s’étire
après tous ces draps froissés
le soir se glisse sans bruit
sa pâleur m’aveugle
dans la nuit frileuse
un horizon rouge
malgré la douceur
s’est emparé des collines
j’ai fermé toutes les portes
qui saignent de froid
pour traquer la brume
il n’y a plus d’encre
à travers l’imposte
dans le stylo que tu poses
la nuit coule dans la chambre
vois, ta main tremble
comme un fleuve froid
et dans le soir las
le froid sur l’épaule
sous la lampe impitoyable
comme des serres rapaces
tu courbes la tête
tourmente ma chair
85
Deuxième Fourniture Gratuite
des barreaux de pluie
traces dans le ciel
prisonnier du temps
demeure incertaine
me clouent derrière la vitre
la direction du voyage
la nuit m’a surpris
le mistral glacial
l’ombre de mes jours
broie la nuit sans ombre
la vie reprend sève
les grains s’entrechoquent
quand la nuit cède et se rompt
au milieu du sablier
sur le pré figé
de la terre froide
le cri de mes pas
brise le silence
je ne l’ai pas vue couvrir
comme une goule hurlante
quand le jour se lève
et le temps s’égare
par le silence du givre
une averse brusque et dure
86
Deuxième Fourniture Gratuite
des nuages lourds
sur la terre froide
le soleil se couche
j’éternue je rentre
une averse gifle
j’hésite à la porte
férocement une affiche
comme un vieux volet rouillé
c’est l’hiver dehors
brusquement le soir
aux pieds des cadeaux
de taches obscures
aboient aux portes du ciel
quelques gouttes sont tombées
de sous-vêtements
l’an s’ouvre en grinçant
la maison prudente veille
éclabousse mes pensées
courbé sur mon ombre
rester sans bouger
les miettes du soir
demain comme hiver
je sépare de la terre
dans l’aujourd’hui impassible
87
Deuxième Fourniture Gratuite
à travers la vitre
parsemée de gris
zèbrent le couchant
crie au cauchemar
quelques branches effeuillées
la tournure de mes rêves
des nuages ronds
je pousse la porte
comme un édredon
le jour baille au loin
c’est un soir très lent
le soir est rentré
qui a rabattu la porte
comme une vieille harassée
la mer sans sommeil
j’ouvre la fenêtre
les troncs des regrets
se colle au matin.
couvrent la terre endormie
le ciel noir palpite et luit
sur la nostalgie
s’asseoir en silence
parmi les débris des rêves
un brouillard tenace et lent
88
dans le ciel d’hiver
seule éperdue grelottante la dernière étoile
Campus
il neige et les arbres
Extrait des Paroles Suivantes
s’inclinent sous le fardeau de la pureté
le soleil qui court
sur la neige illuminée joue avec les pies janvier 2011
le pré garde encore
mars 2011
la trace des sauts du lièvre gravée dans la neige 89
Campus
c’est un soir d’hiver
encore un matin
pour tracer la route
fige les nuages
tout doucement l’aube
prises sous la glace
s’enroule dans les replis
dans le seau de zinc rouillé
un arc dans le ciel
il court le soleil
accrochent la lune
pour fuir cet hiver
pas d’étoiles dans le ciel
où la morsure du froid
d’une nuit distraite
les feuilles sont mortes
où des manteaux de nuages
tout autour de l’horizon
clin d’œil du soleil
la nuit s’éclaircit
quand s’ouvre la porte
l’aube affleure enfin
un sourire arque mes lèvres
le songe amer se dilue
90
Campus
dans une cellule
malgré les matins
brille sans éclat
qui fouille mon ventre
dans le froid piquant
passager d’un train
le soleil hier timide
qui brûle toutes les gares
la brume du soir
ici l’hiver muse
jusqu’au seuil de pierre
restent mitouflées
fier de sa chaîne un boulet
toujours la même piqûre
revient conquérant
insensible au monde
coule entre les pins placide
même les fleurs d’amandier
sous la lampe fade
de ce pas je vais
de la mine usée
qui frappe à la porte
un souvenir s’émancipe
ouvrir la porte au jardin
91
Campus
la nuit s’est passée
les vols d’étourneaux
couverts de poussière
sculptent les nuages
me voilà rentré
à travers les rues
j’ai refermé d’un soupir
d’une ville sans odeur
la mélancolie
dans son manteau sombre
d’un foulard de soie
frisson dans la brume
à mettre au jour des registres
au-dessus des villes grises
l’huis de la mémoire
le soir se promène
recouvre le crépuscule
le soir chasse les étoiles
matin dans la brume
depuis la terrasse
séquestrent les rêves
et les sons s’éloignent
les yeux arrimés aux larmes
on ne voit plus la vallée
92
Campus
les moineaux s’ébrouent
poser d’un soupir
l’aube étreint les pierres
sur la terre lasse
soir - la lassitude
l’aube se dévoile
engourdit ma rêverie
lentement comme à regret
matinée lugubre
sur le fil tendu
brouille mon réveil
printemps à l’affût
dans les branches des cyprès
la mélancolie du soir
l’hiver se termine
je pousse le drap
une couche de brouillard
tourterelles là venues
la pluie – quelques gouttes
l’orage est passé
par un hiver lent
dans l’herbe couchée
pendent aux feuilles fourbues
les étourneaux se querellent
93
Campus
chassés par le vent
aube d’un jour neuf
frileux sous mon crâne
de l’incertitude
les nuages se blottissent
la chambre aspire l’odeur
matin d’hiver froid
dans la pièce sombre
trotte dans les têtes
seul un cœur qui brille
soleil du matin
les dernières feuilles
le vent dans les feuilles mortes
qui fuient le vent se blottissent
les traces de sang
la pluie a brouillé
brûlent dans mes yeux
la chanson de l’aube
pourtant l’idée du printemps
pas de souffle pas de bruit
joue comme un enfant
à l’abri des souches
qui ont lacéré le ciel
d’un coup de pinceau rageur
94
Campus
ouvre le volet
le soir s’est posé
sont couverts de feuilles
la lampe vacille
les carreaux de la terrasse
sur la maison qui frissonne
le vent s’est levé
un soleil blafard
affligées s’envolent
par peur de chuter
l’air froid revenu
de mes dents jaunies
a recouvert le jardin
ne reste que des chicots
des rivières d’or
pesant sur le soir
transpercent le ciel
au fond de la brume
les dernières feuilles fauves
s’accroche au faite des arbres
d’un rêve de gaze
pour mordre la vie
tranchantes comme des lames
la colline s’assoupit
95
Campus
rayé de poussière
le soleil peine à sauter
le printemps s’attarde
par-dessus le vent
qui déguise les chimères par-dessus la brume
un lent cauchemar la brume se colle aux arbres
allée de cyprès
au fond du vallon
quelques gouttes sont tombées sur les graviers aigres
l’aube m’a surpris
je courais vers le printemps
épris d’espérance
en pleine lumière
le verger tourne le dos aux griffes du soir
le temps s’est couché
les épis saillants d’espoir
tout doucement close
cèdent à la faux
la porte a pu retenir
quelques confidences 96
les fruits disparaissent dans la poussière de l’aube les journées s’allongent
sur la table on ne voit plus que l’ombre de la corbeille
Vélin
Extrait des Paroles Suivantes
les rayons rangés
plus aucun livre ne brille là, tout est en ordre
coup d’œil dans la flaque plic ploc des gouttes se battent
mars 2011
pour des ronds dans l’eau
septembre 2011
97
Vélin
la fenêtre s’ouvre
le soir s’éternise
le soleil sur le mur blanc
fourbu sur les fleurs fermées
j’échangerais bien
il ronge son foin
contre un dé d’eau claire
le temps au galop
d’en haut du verger
un soir paresseux
le soleil en face
de fatigue molle
un éclat de rire
comme un long soupir
mon tonneau de vers souillés
il a senti l’écurie
avec fierté je regarde
emmaillote mon squelette
l’ombre lente croît
l’ombre d’un oiseau
sur le gazon sans relief
qui passe fugace et leste
odeur du couchant
sur la terre sèche 98
Vélin
comme des enfants
il est donc en ordre
les parfums flous du printemps
le tiroir que je referme
pages insolentes
j’ai ouvert les yeux
j’ai du mal à lire
je retiens des larmes
ce matin d’avril
quelques grains de cendre
prise sur le faîte
si longtemps fermé
rient dans le jardin
d’un geste nerveux
les mots m’ont tranché la gorge
sur un matin chiffonné
la pluie a surpris la pie
se sont posés sur un livre
une goutte brille
les nuages passent
dans les feuilles d’olivier
derrière la vitre terne
seule après la pluie
dans mes yeux humides 99
Vélin
les cigales crissent
la chaleur du soir
sur les écorces rugueuses
pas un souffle d’air n’apaise
un rayon se pose
un vol de corneilles
laboure la joue
je chasse une mouche
le soleil se couche
un coup d’œil furtif
autour du verger
qui glisse sur moi
été de rocaille
mon cœur desséché
de la paupière une perle
a obscurci le soleil
exténué par sa course
j’ai cherché ce regard
je ferme la porte
une main se tend
malgré moi et d’un soupir
il suffirait d’un regard
averse d’été
pour pouvoir la prendre 100
Vélin
le vent qui s’engouffre
comme un ruisseau sale
dans le verger desséché
les journées passent visqueuses
le vent en colère
se frotter les yeux
je retiens mon souffle
réveil dans les brumes
le cœur si serré
la vie est passée
je vais dans l’été
dans un désert sombre
grogne entre mes tempes
happant mes pensées
malmène le vieux volet
n’efface pas la nuit moite
las presque désespéré
grains de sable déplacés
dans la nuit j’écoute
tôt dès le matin
les secrets que les étoiles
le soleil fouille mon crâne
osent me confier
brûlant les pensées 101
Vélin
les mains poisseuses
les yeux pleins de larmes
je dispute les figues
je compte les battements
à travers les vitres
la journée commence
je vois l’air qui brûle
semblable à demain
verger désolé
une nuit encore
courbe les pêchers
à trainer des songes
aux frelons voraces
de mon cœurs broyé
confinées de la maison
semblable aux journées passées
le poids des remords brûlants
passée dans la moiteur noire
le vent se panique
blafards sans visage
la cime sèche des arbres
des cauchemars anonymes
dépèce les nues
traversent la chambre 102
Vélin
sur le seuil ouvert
de je ne sais où
dans la nuit épaisse et chaude
une abeille dans l’oreille
après les ardeurs
sculpté par l’aurore
une averse tiède
que veux-tu me dire
le mistral encore
espérer la pluie
à l’écorce sèche
crissent dans mes pores
les doutes hésitent
me conte des fables
du passage de l’été
ciel étrange de septembre
qui vient effrayer les pins
les bruits tristes de la ville
l’automne insidieux
dans la nuit j’écoute
tanche peu à peu la gorge
le dialogue de mon corps
aux jours de septembre
et de mon cœur inertes 103
Vélin
dans la fumée bleue
nostalgie d’un soir d’automne le cœur cahin-caha
seul dans le verger
ainsi va la vie
sans même mon ombre
qui roulent qui roulent
sans une pensée
une poignée de pois chiches
là sur le banc blanc entre le ciel et le pré
tout au long du jour
la fin de l’été
j’ai contemplé par la vitre le temps qui coulait
las je ne crains plus l’odeur sure de la mort qui rode mes nuits
vers quel monde éteint
le vent mauvais me détourne de mes souvenirs
104
Vélin
un jour je dis
crépuscule
je me sens seul depuis
entre les vagues
je fixe la lampe
ciel chiffonné
une soirée tiède
coule des façades
fais de nous ce que tu veux
bruit rouge des galets
impassible et sans pensée
une vague d’amertume
plus jamais
ils fuient apeurés
il ne montrera le ciel
comme des lapins craintifs
répandue sur l’herbe
dans le lit
du bois tronçonné
j’ai gardé sa place
le tronc que j’ai abattu
les jours et les jours
on ne voit plus que la sciure
comme une rivière
105
Cambridge
Hiver
Extrait de Paroles Suivantes
les mains dans les poches oreilles dans les épaules
janvier 212
figé dans le froid
mars 2013
j’attends qu’un premier rayon me poignarde entre les yeux
106
Cambridge
elle est passée l’heure candide —
la musique en reste le soir d’hiver tinte
la lumière blême
prêt à se briser
a mangé mon ombre
les moineaux se baignent
le froid a saisi
dans les flaques de soleil
les bourgeons trop audacieux
les prés d’herbe blanche
d’une voix inquiète
mon souffle une vapeur blême
la voix de la neige
comme un verre de cristal
qui tient le ciel cette nuit
clair matin d’hiver
le printemps s’esquive
fument au soleil —
je guette sur le silence
107
Cambridge
le soir traine
sa mélancolie
à la surface du jour
on ne sait quelle couleur les étoiles froides
prend le ciel
éclats d’un verre brisé
la neige et le soir se mêlent
crissent dans la nuit
où mènent ces traces
la pluie fine et lente
dans la neige
comme une robe de gaze
le grand silence à l’entour
qui pare l’hiver
le verger s’afflige
au-dessus de l’aube
des pas dans la neige sale
rayé par des doigts de glace
le froid mord le ventre
l’hiver s’engrisaille
108
Cambridge
soir de glace
un souffle farde le ciel et les étoiles crépitent
mistral sans pitié
filaments de brume
des nuages pourchassés
je suis la vallée
l’écureuil
par la vitre trouble
glisse avec adresse
qui masquent la route
les mille couteaux
au bord de l’hiver
ne ratent jamais leur cible
la couleur des prés
l’hiver seul domine
où coule la nostalgie
sur le fil glacé
je recense les flocons
du mistral
la neige délie
109
Cambridge
par-dessus l’hiver
le soleil passe un manteau tissé d’espérance
vague de nuit
l’aube est froide
— l’hiver se creuse
chauffe ma carcasse
qui couvre les collines
et le soleil facétieux
boules de neige—
le temps reste humide
les enfants riaient
encore ces vieilles larmes
dans la nuit
sans surprise
sont toujours tranchantes
dans un bâillement
au soleil
qu’on disait taries
les lames du vent
la journée s’achève
110
Cambridge
une année qui passe une borne un autre pas bruissement de feuilles
les branches des chênes
chair et glace
— l’hiver ne joue pas
dans un cœur de verre
je frotte mes yeux
ne l’arrosez pas
— matin d’hiver rouge
que le ciel aspire
ne cachent plus les mésanges
le nord cherche sanctuaire
pour en chasser le sommeil
trop tard dit le haricot
sous la pluie / l’hiver
des pas dans la brume
tous les arbres pleurent
faut-il craindre ou espérer que le ciel se fende 111
Cambridge
l’averse brutale
a surpris le crépuscule j’hésite à rentrer
il griffe et il souffle
les étoiles glissent
le vent coulis sous la porte
sur la terrasse mouillée
pas un son —
le soleil étale
sur la banquise du ciel
j’ai sommeil je baille
la ville était sombre
confusions des nues
autour de la place
qu’il chasse rageur
comme un chat de glace
et la nuit s’installe
le soleil semble figé
la brume sur la vallée
les ombres grattaient les murs
le gris s’en est pris au ciel
112
Cambridge
juste dans l’hiver
un vent fin comme une lame scie le crépuscule
je rentre à pas lents
ciel limpide
nostalgie d’un soir d’hiver
la carafe d’eau glacée
rêver à demain —
depuis le ciel d’hiver
sous la nef d’étoiles
dans mes yeux
un hiver languide
le soir d’hiver verse
— dernier jour de l’an
dans le tilleul-menthe
soie du crépuscule
entre le soleil et moi
l’odeur des feuilles qui brûlent
le vent sème des étoiles
prend des mollesses d’automne
un trait de mélancolie
113
Cambridge
Printemps
un oiseau m’accueille
un bonjour dans une langue étrangère et belle
coquelicots frêles
avant de perdre la tête qu’en reste une image
114
Cambridge
soirée irascible
un pollen acre se frotte au printemps farouche
du feu de branchage
sur la peau du monde
monte jusqu’au ciel
rampent les chenilles
une odeur d’eucalyptus
qui s’exaspère et s’enflamme
seul sous les étoiles
qu’il a été long
odeurs de la nuit de mai
ce dimanche au bord du vide
un soleil timide
la cigogne à l’aube
plaisir du printemps
espoir de voyage
les crapauds se taisent
une heure de moins
caresse mes os rouillés
a fait ployer le cyprès
115
Cambridge
j’ouvre le volet le soleil frappe en plein cœur les miettes de nuit
déjà chaud
averse d’avril
le soleil brouille mes rêves
d’effluves vivaces
elles sourient vertes
un lent crépuscule
premières cerises
je rentre apaisé
quand je pousse le volet
du verger vient la vigueur
encore et crispent les dents
clap de fin sur la journée
on grelotte encore
un dernier rayon
les saints de glace passés
passe et effleure mes doigts
il reste un frisson
j’écris les mots brillent 116
Cambridge
mon abeille dans l’oreille vient me faire
une confidence nuit de mai la nuit
frôlant mon l’épaule
vers le sud enfui
passé effleuré
les façades suintent
que l’ordre règne
le mai ne rit plus
il se prend pour un chêne
saute par-dessus la haie
un pétale de pêcher
la ville est noire de pluie
je dois tailler le bonsaï
le front sur la vitre
les yeux pleins d’éclat
tous les arbres sont des saules
j’ai parcouru le verger
pluie interminable
dans l’espoir des fleurs 117
Cambridge
prendre le soleil
comme une claque au matin bonheur du réveil
mai le joli mai
les rues semblaient vides
au jardin sucré
seuls comptaient nos pas
s’invite avec le soleil
dans le printemps incertain
un ciel gris les cache des étoiles
les vrilles de brume
la nuit les grenouilles
s’ensoleillent lentement
une odeur sucrée—
le silence pèse
sur l'herbe mouillée
indolent et tiède
se rient de la pluie
la vallée s’éveille
glisse la nuit sans étoile
au bord du jour qui s’écoule
118
Cambridge
à l’orée du soir
on n’entend plus son murmure la ville se tait
le ciel fuit devant
le soir se travestit
mai prend ses quartiers
rose et le vent le siffle
la lune qui strie les nues
il passe une robe
le volet qui grince
j’ai vu des nuages
et la fraicheur de l’aurore
courir dans le ciel d’avril
matin sans pitié
dans le tronc de l’olivier
hachent le feuillage
son nid l’inquiétude
délivrent la nuit
lestés d’hirondelles
déjà des rayons féroces
une mésange a fait
119
Cambridge
pluie de la nuit le soleil libère l’odeur profonde de la terre
le mai a surpris
un nuage escorte
reviennent les giboulées
en pleine journée
soleil et ciel clair
la pluie quelques gouttes
pour se sentir vivre
d’où je le sud espère
les fleurs frileuses
la lune bien téméraire
vraiment il en faut si peu
ont humecté la terrasse
sur les fleurs du pré
les coquelicots
le soir lentement s’étend
après la pluie ont grandi
—langueur, elles prient
jusqu’au bord du ciel 120
Cambridge
allongé dans l’herbe je plantais des fleurs carmin dans l’eau des nuages
un rayon dans l’œil —
à travers la vitre
n’était pas si haut
se font des grimasses
une tourterelle
sandwich et demi
le temps incertain
sur un banc de square
hier encore le soleil
le soleil et la poussière
seule sur le fil sans voix
le printemps s’est attardé
le chant d’un oiseau
frais le matin trompe
dans les chênes interpelle
la journée sera torride
la fin du printemps
dit la tourterelle 121
Cambridge
Été
soleil sur le mur
souvenir du flux salé ombres émouvantes
des odeurs de sauge
brassent la mélancolie lent le jour s’en va
122
Cambridge
deux fourmis en quête d’un peu de fraicheur arpentent la salle de bain
le soir tergiverse
lent crépuscule
odeurs du verger
sent l’herbe coupée
la nuit m'interroge
le soir s’est perdu
un vent haletant
prudent je me tais
entre les feuilles tremblantes
les cheveux collent ma peau
des gouttes grasses traversent
entre les pins et les chênes
transpirant je rentre
le vent du sud prend
de faire le tour du monde
les arbres à rebrousse-poil
le long du verger
ils sont en colère 123
Cambridge
aube incandescente la ville monte à l’assaut du silence
un frelon traverse
la peau torturée
ma tête grésille
il faut l’arracher
dans le ciel si bleu
le ciel est lavande
les heures fatiguent
tellement bleu
le pré vibrant de chaleur
par la frénésie des mouches
une joie dorée éclate
au dessus des collines
la ville s’embrase
le ciel s’est couvert
à l’épreuve du soleil
dans le verger j’arrosais
ah, ombre promise
les petits pêchers 124
Cambridge
laçant le troène le parfum du chèvrefeuille précède juillet
le vieil abricotier
plus de vent la lune
à son ombre
la nuit de juillet
clin d’œil du soleil
le jardin me suit
il fait déjà chaud
soirée de juillet
donne ses derniers fruits
seule emplit
qui secoue les draps froissés
les odeurs collent la peau
en nage je rentre
il a plu
de mon offrande au jardin
cette nuit et il n’en reste
don d’un arc en ciel
plus la moindre flaque 125
Cambridge
j’ouvre le volet un oiseau prend peur
un autre me dit bonjour
cruauté de l’aube
lune de juillet
de dards de lumière
d’un voile de neige
dans le vent j’arrose
odeur du café
tous les arbres rient
et le temps s'arrête
ce matin griffe mes tempes
les oliviers sont parés
fabrique d’arcs-en-ciel
le matin sent la lumière
matin de juillet
perdus dans le ciel
la maison sent le café
des nuages sans espoir
qu’on fait en vacances
traversent l’été 126
Cambridge
les collines ploient une couche de nuage tartine l’été
frisson ce matin
une tourterelle
le soleil s’aiguise
matin en coton
odeur de lavande
cognassier au tronc
sont très parfumées
qui déjà nous masque
il faut vite en profiter
se pose dans l’olivier
les caresses de midi
ridé ta fane sent l’ombre
un moineau sautille
sous le ciel couvert
sur les brins d’herbe brulante
planté espérant la pluie
il a les pieds nus
vieille branche sèche 127
Cambridge
matin sans pitié déjà des rayons féroces hachent le feuillage
le ciel est immense
orage d'été
règnent les étoiles
le don de l'automne
les gouttes chuchotent
sous les feuilles
à l’herbe cassante
mais brutale
même à travers les nuages
le moindre brin d'herbe accepte
une musique espérée
la voix du vent était chaude
le soleil contourne
entre les pêchers
l’ombre des barreaux enfin
l’herbe a jauni elle sèche
la fenêtre s’ouvre
à l’ombre des troncs 128
Cambridge
remplir le bassin bruit de l’eau
dans la torpeur de midi
de rayons cuisants
odeur de foin sec
aussitôt levé
la journée s’achève
frisson du matin
un été de lave
lenteur de l’été
sous les lune froides
le soleil frappe à la porte
l’été crisse dans les pins
je l’accueille d’un sourire
s’incruste dans les collines
dans des jours plus courts
dans le vent du soir
toujours la même chaleur
sous le regard de la lune
l’été en croisière
août ferme la porte 129
Cambridge
Automne
feuille morte — où le vent la porte
l’ombre l’accompagne
rêveur sous les chênes
un gland roule sur la table la nuit est tombée
130
Cambridge
Garlaban coiffé septembre s’est déguisé
d’un manteau de brume
sous le composteur
des yeux de myopes
font leurs provisions
un soir d’automne
le vent qui soulève
le vieux tronc rongé
a cassé un pot
envol des alludes
au carrefour des fourmis
mélancolie du bitume
fripon le jupon des filles
ondule d’excitation
d’une chiquenaude
l’escargot se hâte
l’automne pousse l’été
ce n’est pas le mont Fuji
au bord de lui-même
ce brin de fenouil 131
Cambridge
une aube ne lambeaux bâillon d’ouate sur le ciel soupir résigné
sur le sol du verger
gaze du matin
ont quitté les branches
les étoiles
la fraicheur de l’aube
odeur humide du soir
le cap de septembre
octobre gémit
les premières feuilles rousses
la lune snobe
la nef des jours a passé
les branches ploient sous l’averse
une seule goutte
le tonnerre roule
trouble la surface
son tambour de pierre
octobre brouille les cartes
le ciel rentre les épaules 132
Cambridge
la pluie a cessé les volets grincent au vent — brumaille d’octobre
drops of rain and dew
le ciel fier de lui
gift of the morning
au nuage gris
gouttes de pluie et rosée
Garlaban coiffé
cadeau du matin
garrigue en silence
together on the brown weed
apprend le nom des couleurs
ensemble sur l’herbe brune
de lourds nuages replets
la pluie
verger humide
suit l’éclair
quelques taches rousses
comme son ombre
sur le départ 133
Cambridge
écran noir l’éclair a volé
toute la lumière
le vieux volet grince
l’aube patiemment
vent du soir
à une aube blanche
l’orage s’annonce
sous l’auvent sonore
aux premières gouttes
la leçon d’octobre
les fleurs capitulent
montre en détails ses couleurs
les pâquerettes se ferment
la pluie bégaie goutte à goutte
de lents bancs de brume
elle coule et coule
trôlent au font du vallon
toujours la pluie sur les feuilles
une ombre sans joie
que brule l’automne 134
Cambridge
une aube d’automne
une aube grise et fardée précède le jour
des éternuements
coup d’œil de côté
vengeance de l’aube
la mésange inquiète
les chaussettes sont à tordre
sur la branche qui balance
de ma promenade
le long des allées
je n’ai ramené qu’un rhume
se dressent des pâquerettes
des éclats d’argents
tout autour des tombes
derniers mots des feuilles
— novembre cynique
chasseur maladroit
— douceur de novembre
tintent sur l’herbe humide —
les pâquerettes se dressent
135
Cambridge
la chute du jour
seul le manteau d’arlequin frise lentement
ruisselant des murs sans ombre
une pâquerette
le soir bat aux portes
nargue la tondeuse
d’un poing ténébreux
au milieu de la pelouse
le ciel se découvre
les bruits de la ville
sur novembre tourmenté
qui embourbe la vallée
sur le mur
couverture grise
saisie de frisson
jour mélancolique
d’une aube frileuse
se noient dans la brume
l’ombre du rideau de perles
presque le soir à midi
136
Cambridge
le front sur la vitre je dévisage la pluie
inlassable et sourde
passants qui passez
la mélancolie
sur ce quai pressé pensez à poser
était au réveil
vallée aveugle
le ciel est si froid —
se prend dans les arbres
dans les feuilles mortes
il pleut beaucoup trop
entre les nuages
se dit l’escargot
collier de la lune
un œil apaisé
avec un bol d’amertume
d’un bout à l’autre la bruine
le vent gris se prend les pieds
vite vite il faut rentrer
scintillent des points d’argent
137
Cambridge
Hors saison
bruit des origines grains de riz grains de café aurore du monde
cauchemar sucré
tous les timbres se décollent les lettres se brouillent
ne parle pas reste
là tout contre mon cœur reste mes bras sont silence
138
Cambridge
l’ombre vient
combler les brèches du temps avant qu’il ne sombre
le vent s’encolère
sous la houle sombre
entre les arbres nerveux
nul ne sait ce que la mer
dans ma poche comme
un portail qui grince
le vide palpite
ou rage de dent
les objets parfois
vers vous je me tourne
mon micro me nargue
la nuit je m’enterre
matin hors saison
dévore sans bruit
une plainte du silence
éruption de nostalgie
sont plus têtus que des mules
neiges des ans lumineux
139
Cambridge
mal gré mon désir
je n’ai pas participé à ma destruction
du haut du verger
l’odeur du café
le nord se dérobe
au dernier matin
la vallée guide le soir
dans la maison silencieuse
l’invisible fuit
le silence dit
devant l’implacable
des mots que je ne comprends
soubresaut de larmes
le silence était
le rêve brisé
effrayante et belle
personne ne s’en rend compte
que les yeux fermés
au beau milieu de la nuit
comme la rive des mondes
140
Cambridge
soir suivant
un autre soir la mémoire prend des chemins de traverse
le soir s’est vêtu
la porte franchie
sans bruit je ferme la porte
submerge l’espoir
d’un soupir
une vague sombre et aigre
un regard vers l’ouest
l’ombre encore
la grande ville est trop grande
transforme le mur
le ciel les étoiles
sur le quai sans geste
reste impénétrable
un mouchoir pour deux
la cible incertaine
en écran de cinéma
elles brillent mais le ciel
l’un s’en va l’autre reste
141
Cambridge
les jours passent vite
tu sais qu’il n’en reste plus mais tu joues encore
pauvre équilibriste
noir contre le ciel
le monde m’échappe
l’essence du vide
sur le banc où je rêvasse
le cyprès montre du doigt
offrande au matin
une feuille s’ombre
le seuil du sud lui résiste
elle-même de ténèbres
sur la joue un trait
je ne parle plus
de la nostalgie
à mes lèvres closes
mais il sait le code
l’encre est vraiment noire
une peinture de guerre
le silence pèse un peu
142
Cambridge
derrière l’écran
je flaire les fils rompus j’adopte leur pas
dans ma poche comme
la glu du sommeil
le vide palpite
je cogne au matin
une plainte du silence
pèse sur le moindre geste
je t’écris
un à un tu comptes
et l’encre se teinte
pourvu qu’il y ait assez
cauchemar sucré
quelques arcs-en-ciel
les lettres se brouillent
détournée
de ciel bleu
de pas pour le dire
tous les timbres se décollent
plus tard est revenue la lumière
143
Cambridge
des paroles tues
sont malgré tout entendues — mystère insondable
vivre par un geste
la lune offre
embrase le ciel
aux nuages
la caresse que l’on offre
son argent
un cri dans la nuit
odeur de café
a déchiré le sommeil
je retiens les souvenirs
la lune découpe
un papillon sur l’épaule
avec des ciseaux d’argent
comme un gué instable
— erreur de casting
au-delà du seuil
la pénombre
je passe la nuit
144
Cambridge
le silence
vapeurs de l’oignon
blanche la nuit sera longue
larmes équivoques
longue nuit
la nacelle gîte
pas de trace
le passeur trépigne
au bout du chemin
que la lame décortique —
sans escale sur les rives
plage où le rêve se perd —
posés sous la lampe
d’une rive à l’autre
les mots s’enlisent dans l’encre
la traversée de l’ennui
d’une écriture légère
boules de coton
tu retiens ton souffle
le soleil se démaquille
des phrases patientes
laisse un goût de sel
qui dit l’amertume
dans le ciel de l’aube
145
Cambridge
soirée sous la lampe
sous la lampe pale
ma plume s’égare
les mots s’abandonnent
entre les mots et les rêves
comme l’eau lente d’un fleuve
les lignes se brouillent
qui traversent des contrées baignées de pénombre
sous la lampe
la ville était sombre
l’ombre de mes doigts
les ombres grattaient les murs
je me lève usé
la nuit a coulé
sur des fils instables
au loin le méandre
dessine un soupir
autour de la place
toute la nuit j’ai couru
un galet sur une plage
146
matin charitable qui me dépouille des peaux grasses de la nuit
chenille immobile
sur un ruban surchauffé — bouchon de juillet
Sans couverture
pensif sur le banc
il laisse le soin au soir d’aller vers demain corvée d’arrosage — ma peau sens l’herbe frôlée
Avril 2013
par un arc-en-ciel
Août 2014
147
Sans couverture
sous la pluie
soirée de velours —
l’hiver
les pétales des fleurs lasses
une étoile
les branches des chênes
pointe vers le port
— l’hiver ne joue pas
tous les arbres pleurent
inondent la nappe
seule entre les nuages
ne cachent plus les mésanges
comme une cheville
vague de nuit
au mur du silence
— l’hiver se creuse
comme un vieux tapis
les mille couteaux
sa peau de soir dénudée
du mistral
les mots sans contours me clouent
qui couvre les collines
le jour perd ses poils
ne ratent jamais leur cible
148
Sans couverture
la nuit à la porte
perdu dans le gris
la lampe tressaille
retient la lumière
un bol fumant sur la table
un petit nuage roux
l’odeur de fumée
feuilles mortes —
vers la lune froide
se sont embrasées
sous la lampe pale
les étoiles froides
comme l’eau lente d’un fleuve
éclats d’un verre brisé
dessus les collines
sans odeur
se fait remarquer
—rhume impitoyable
se répand dans la colline
les pages d’un vieux journal
les mots s’abandonnent
crissent dans la nuit
la montagne de nuages
le café n’a pas de goût
149
Sans couverture
le soleil sourit —
assis sur le banc
le pont japonais
le ciel traverse les branches
là sur la pelouse
le jour s’est levé
au bout du regard
— un long bâillement
a franchi le ciel
—éblouissement
une seule feuille rousse
dans un ciel ni gris ni bleu
le soir est glissant —
d’un geste feutré
même l’ombre passe
le huitième ciel
les oiseaux se taisent
camaïeu de ciel
les averses ont cessé
entre gris et bleu —
souvenir éteint d’un rêve
le crépuscule traverse
— le soir fait silence
carnation de mes pensées
150
Sans couverture
le soir est entré
je franchis le seuil
dans ma tête
vers la lampe
au loin l’horizon
il fait soir
l’aube sautait les collines
court entre les ombres
comme une balle de plomb
mon ombre me suit
barrait les nuages —
le vent inlassable
mon ombre a quitté
soirée sous la lampe —
mangée par le soir
ma plume s’égare
rentré à la nuit
je franchis la porte
le soir m’a volé mon ombre
l’ombre me précède au seuil
le sillage de mes pas
entre les mots et les rêves
— je me sens bien seul
du soir languissant
151
Sans couverture
marchant sur la sente
l’aube en blouse rose
dos au soleil qui se lève
danse au-dessus des collines
le passé revient
les yeux se replient
sur les plages sans soleil
—un corps inutile
l’ombre me dépasse
dans les bras des nues
las par vagues molles
la mémoire rend les armes
des nuages noirs
quel vacarme !
l’aube en darnes grasses
s’est rattrapée au volet
le mur perd son ombre
même la vallée
entre les mains de la nuit
étouffe les plaintes
fins comme des lames coupent
la nuit en tombant
— trouble crépuscule
qui s’échappent de ses routes
152
Sans couverture
dans la maison silencieuse
le soir qui te broie
je guette les craquements
ne masque pas l’espérance
le ciel devient blanc
sous la lampe
court les horizons
en faisant des vers
de mes rêves
d’une aube sereine
une voile sans carène
le soir se prélasse
le ronronnement
furtive elle rode
berce mes paupières
j’en suis la pâture
la nuit est venue
une mouche entrée
répandre du sable sombre
par étourderie
du micro au crépuscule
peu à peu la nuit me guette
sous la lampe
illisible sous la lampe
153
Sans couverture
souriant je rentre
la mélancolie
et mes muscles se souviennent
encore s’est répandue
la nuit s’éclaircit
le bruit du vent dans les branches
déchire le ciel
médusé
du poids de la pioche
entre encre et papier
au loin la ligne des crêtes
rive son clou au soleil
puis le jour se lève
l’aube peine à se lever
béance empourprée
dans les os
la nuit prend élan
le volet fermé
sur les lézardes du mur —
une brisure de nuit
entre les collines noires —
je sens sa souffrance
la soirée s’égare
reste dans la chambre
154
Sans couverture
l’aube ennuagée
l’aube me rattrape
use la lumière
je ne la vois plus
colline sur les collines
bientôt elle me dépasse
seul et résigné
l’hiver s’encolère
— ciel d’hiver en miette
la glace des nues
sur les pierres sèches
l’ombre hésite
caresse du crépuscule
le soleil cherche son lit
au-dessus de l’aube
soir de lassitude
veillant l’horizon
sur mes mains inertes
un gabian retourne en mer
le vent du nord mord violent
le lierre frémit
entre les nuages
il ne reste qu’une étoile
la lumière coule jaune
155
Sans couverture
l’ombre de la plume
odeur de poussière
le soir les mots pèsent
des vies sans visages
hésite sur le papier —
sur un rayon quelques livres
contre le volet
face au miroir sombre
je bats la mesure
— un ciel sans étoiles
des traits de couleur
avec un sourire
rose orange à l’horizon
pour un jour sans importance
sans savoir marcher
un soupir
la vie sans escale
avec la mésange agile
la pluie danse avec le vent
l’aube lisse ses cheveux
— le matin crayonne
le son d’un haïku
j’ai longé mille chemins
je m’en vais trainer la patte
156
Sans couverture
les yeux envoutés
accroché aux crêtes
— un livre se ferme
rose après la pluie
je reviens du bout du monde
barbe à papa le nuage
j’ai laissé la nuit
zélés les moineaux
cachées dans mes yeux
mais ils ne jouent pas
lentement
le ciel s’entrouvre entre
je finis mon verre —
les nuages éclairés
un éclair à l’est
lumière pionnière
— le soleil sursaute
entre les collines
me révéler des étoiles
caracolent sur le pré
j’aurais bu toute la mer
d’une aube de soie
entre nuage et colline
une goutte d’or surgit
157
Sans couverture
envol d’une feuille
la journée paresse
le vent s’encolère
entre herbes et tiges
l’ombre d’un battement d’aile
entre aurore et crépuscule
une porte claque
un manteau de pluie
tintent sur la vitre
suit le cours des choses
encore une fois
ce matin la brume
le vent rogue s’est couché
sent l’herbe et le bois qu’on brule
la langue de feu
soirée de satin —
— éblouissement
les premières étoiles
quelques perles du rideau
dans les méandres du vent
les crocs menaçants
— lumière diffuse
des nuages qui s’embrasent
lentement le ciel dévoile
158
Sans couverture
le fauteuil balance
j’ouvre le volet
sans but je voyage
le jour a berné la nuit
et grince je suis assis
sur des murs qui pleurent
un sac de lumière
dans le laurier-tin
— le soleil crépite
affute ses ailes
couleur de grisaille
un ciel jaune
la lumière ce matin
a dérobé le soleil —
une tache rousse
journée sans soleil
— bal du rouge-gorge
et crient au voleur
jeté roule entre les arbres
la mésange matinale
fronce les sourcils
le jardin sanglote
se trémousse sous les viornes
les mésanges s’égosillent
159
Sans couverture
digues sans lumières —
quelques pas
suintent d’ennui
les vagues se cabrent
les tuiles du toit glissantes
les galets crient sur la plage
de plus en plus terne
le soleil dégrise
d’un ciel sans sourire
le matin à petit pas
un linge est tendu
je lève les yeux
gorgé d’eau sur une corde
vers les étoiles narquoises
à travers la pluie
la joie des moineaux
apparait sournoise
il s’est recouché
le verger est recouvert
entre les collines
— le ciel dégouline
— soir et amertume
la vallée exubérante
ne secoue pas le soleil
160
Sans couverture
heure des ramiers —
les heures se grisent
ils se piquent
de l’auvent fourbu
de glands germés sous les chênes
et la pluie lisse les tuiles
le front sur la vitre
sur un fil
du calendrier
désespère du printemps
au banquet de l’aube
la brume surplombe
les oiseaux donnent le la
la colline ébouriffée
ciel maussade
j’ai laissé la trace
tarde le printemps
pour ne pas me perdre
je contiens les bâillements
une tourterelle
la nuit sort en douce
— une aube d’étain
même dans mon cœur
de mes pas dans l’herbe humide
161
Sans couverture
le printemps se traîne
d’un pinceau léger
perclus et crissant
griment l’horizon
masqué d’un ciel sans couleur
les nuages empressés
une aube veinée
loin après la brume
le jour vient au monde
troublées d’un frisson
vient le crépuscule
concert de crapauds
je m’attarde sous les branches
grenouilles sous les étoiles
flaque de soleil —
du vent dans le linge —
vers le ciel d’avril
se prend pour un geai
palpite au bout de la nuit —
on devine les collines
— parfum de la pluie
la nuit sera chaude
la rosée qui s’évapore
une chemise qui sèche
162
Sans couverture
brin des heures lentes
lentement les sèves
soirée de coton
les feuilles s’étirent
crépuscule à pas de loup
se rassasient de printemps
une brume lente
timides quelques oiseaux
retient le soleil
le soleil humide
je secoue les rêves
quelques pas —
— un tapis à la fenêtre
la trace dans l’herbe brille
je bâille et m’étire
brumes matinales —
de vénérer le soleil
s’achève en bâillant
dans la vallée endormie
osent défier
couvert de poussière
— diamant de rosée
ma façon à moi
une nuit de peu de lune
163
Sans couverture
sur le mur les ombres
silence du soir —
qui se font des révérences
mes os recrus de fatigue
il y a longtemps
l’ombre s’est lovée
au bord du matin
pour passer la nuit
saluent le printemps
ont cessé de geindre
que le coq ne chante plus
du mauvais côté du mur
le papillon terne
auprès du verger
aux mille couleurs
je l’abreuverai
ville horizontale—
une soirée glisse
le béton broie le silence
sur la pente de la nuit —
a oublié la chenille
s’il y avait une source
d’un cri métallique
lourdeur des paupières
164
Sans couverture
le vent plie les feuilles
sur le bord du jour
toutes les fleurs tremblent
un bouton hésite
le printemps fait une pause
entre se clore et s'ouvrir
le soleil guéri
d'un vol lent et ample
un manteau de perles
retour du printemps
j’imagine au loin
les miettes des rêves
après les chemins du sud
secoués par la fenêtre
rosée au soleil
les bruits de la nuit
au creux de mes mains
glissent lentement
offre à la terre spongieuse
le gabian retourne en mer
le chant d’une plage
se diluent dans l’herbe
l’odeur du café brulant
bercés d'une lune claire
165
Sans couverture
le lilas lilas
un ciel en lambeaux —
—échange d’abeilles
à rallier la terre
penche vers le lilas blanc
ce matin le soleil peine
la mésange accourt
âpre vent d’Afrique
du soleil conquis
et gerce la terre
ce soir j’ai ravi
je ferme le livre
aux esprits de la garigue
qui tombe sur la poitrine
je rentre harassé —
l’éclair a rongé
une soirée moite
figé blanc de peur
à cheval sur un rayon
qui traverse le ciel jaune
une odeur de thym
— l’odyssée commence
sous la lampe se profile
la lumière de l’écran
166
Sans couverture
la soirée s’approche
le voile de soie
et me tend la main
— grincement de dents
de mon fauteuil fatigué
au bout de mes doigts s’accroche
la terrasse humide
lentement se glisse
un mur de silence
pourtant bien fermé
les perles de pluie
somnolent encore
malicieuses s’ensoleillent —
j’ai glissé sur les carreaux —
la nonnette inquiète
incertain je pose
les pas de l’intrus
au bout du chemin
reflète le gris du ciel —
le crépuscule sous l’huis
doux parfums de l’aube
la pluie se réveille
d’un trou de l’olivier guette
mon bagage inexistant
167
Sans couverture
un rayon de soleil
une tourterelle
tentative avortée
espère un message
vite éteint par la pluie
seule et coite sur le fil
rainurant les nues
la barge traverse
les blancs goélands
un Styx apaisé
présent de fleurs blanches
entre les oreilles
la pluie promet au jardin
même les paupières closes
le jour sans couleur
ce vieux fauteuil flasque
printemps aux orties
berce ma défroque
vers une route incertaine
une nuit sans traquenard —
l’odeur du lilas
le bruit des galets
souille le calendrier —
aussi ridé que le monde
168
Sans couverture
au loin les collines —
s’il te plaît soleil
couronne leurs pins
de secouer le ciel
un crépuscule de soie
lève-toi il est grand temps
on ne sait pas qui
la lueur s’essouffle
sera le plus sombre
entre les collines
odeur d’herbe repue
au loin une tache
qui se froisse sous mes pas
sur le ciel le gris des nues
très timidement
lumière du quai —
opaque des nues
ne reste que l’ombre
du soir ou du ciel de pluie
dans l’étroit sillon qui peine
— gorgées de printemps
le temps se maquille
le soleil surprend le voile
du voyageur anonyme
169
Sans couverture
vapeur du café
c’est un matin moite
à l’aube du monde
— même le ciel bâille
qui trouble les collines
un de ces matins qui poissent
le monde commence
léthargie de soie —
gorgé de soleil
rampe sur les troncs
terreur chez les pies
au ras du sol flotte
dans les nids se nouent des drames
une odeur de pin brûlé—
tout au bout du pré
le banc semble attendre
louent la faux clémente
sous le marronnier
dans le parfum du café
une bruine somnolente
—cruelle corneille
soir d’automne en mai
les coquelicots tremblants
l’odeur d’une confidence
170
Sans couverture
la lucarne s’ouvre
vers le vieux fauteuil
sur un matin parfumé
la soirée traine la patte
les chênes frissonnent
frôlant le soleil
— volent les chatons
la première aronde
du vol des mésanges
— épaisse fatigue
le vent se prend dans les branches
elle déchiffre le ciel
une soirée trouble
le vent broie le ciel
sur la vitre sale
ne se montrent plus
quel est cet oiseau
un sphinx sur le toit —
dont le chant chaque matin
le soleil dans les paupières
absent le regard s’égare
les hirondelles bernées
balaie tous mes rêves
résout son énigme
171
Sans couverture
toute une journée
entre les nuages
le printemps suffoque
l’herbe s’illumine
à lutter contre le vent
noirs un rayon de lumière
le soir se respire —
elles semblent calmes
semblent parfumés
rassasiées de vent
il attend inquiet
un bout de printemps
que le jour chasse la nuit
parfois entre les averses
seul un vent mutin
le chant de la pluie
ce soir est de soie
tocsin au printemps
même les coquelicots
dans le ciel les hirondelles
— oiseau échaudé
— un coquelicot
traverse l’or des collines
assourdissant sur les tuiles —
172
Sans couverture
ils ont l’air si flou
il n’en finit pas
les arbres sans ombre
l’automne sangsue
sous la pluie comme des spectres
il pavane encore en mai
une soirée fourbe
avare à son or
glisse sous le seuil
l’automne est tenace
par moment les ombres
pour un rêve sombre
s’éloignent du mur et tiennent
j’ai ignoré les rayons
arômes du soir —
averse de mai —
avec nonchalance
grappille des glands
fardée d’un voile de pluie
il s’accroche au mois de mai
un conciliabule
du soleil de mai
ils arpentent le jardin
l’écureuil indifférent
173
Sans couverture
le soleil scintille
lancinant ce chant
— le chant d’un oiseau
sur le seuil du soir
sur le bord de la fenêtre
de l’oiseau insaisissable
quelques gestes lents
les frissons de mai
la houle du soir
le temps joue aux dés
fil télégraphique —
vol d’un papillon
les moineaux tiennent conseil
à travers la vitre close
la brume de mai —
j’enfouie mes joues
parent les collines
la paix se respire
lassitude et bâillement
valent bien ceux de novembre
sous les hirondelles
— découragement
des haillons ensoleillées
dans les plis du cachemire
174
Sans couverture
fleurs déchiquetées —
sur le ciel lavande
malmenés par le mistral
la trace d’une hirondelle
le verger émerge
le rideau des rêves
sous une aube grise
frappe sur mes murs
mille papillons
— mai malgré le froid
à la surface du jour
dans le vent de ma tempête
asphalte luisant
mai rempli de doute
pleure une lumière grise
les saisons se froissent
lenteur impassible —
hardie la mésange
ils rêvent sur les collines
vers le nord à grands coups d’ailes
à midi des lampadaires
le calendrier se brise
les nuages blancs
se fraie un passage
175
Sans couverture
de grands planeurs blancs
dans le ciel sans tache
au dessus de la vallée
une virgule de vent
mue des souvenirs
ce bourdonnement
à tordre la nuit
— besogneuse abeille
en quête d’embruns
brusque l’hirondelle
qui dans le soir se préparent
qui court d’une oreille à l’autre
pour la nuit de mai
contre-jour à l’aube —
demain juin rira peut-être
prend des airs de buse
encore endormi —
à peine semé
le volet ouvert s’envole
guerriers et ouvrières
voici la dernière
sur la branche le ramier
volé par le vent
écument le pré
176
Sans couverture
des filament d’ouate
odeurs du jardin
moite défient la vallée
après la pluie de la nuit
concert des oiseaux —
à coups de gosier
impose son jeu
plumes en colère
— somnolence ingrate
—éclosion du monde
la tourterelle arrogante
d’un arbre à l’autre ils se toisent
le soleil gravit
au bord d’une flaque
avec le sourire
à rêver d’espace
sonnerie stridente—
les fleurs de yuccas
seule ma respiration
tintent —clochettes de neige
la montagne de nuages
parfois un fétu se prend
sonde le silence
fraicheur du matin
177
Sans couverture
”toujours s’assurer
froissant le rideau de perles
du voisinage d’un tronc“
la nuit s’est glissée
brille dans l’armoire
la terrasse brule
—rayon de lumière
d’airs incandescents
bon sens d’écureuil
au cœur de mes rêves
la tranche d’un livre lu
et s’écaille en longs copeaux
tournant la cuillère
les premières gouttes
— odeur du café
coulent sur mon front
après tant d’années
quelques pas sur l’herbe
le pétale était resté
déjà sèche du verger
la nuit rêche se dilue
chaudes et gorgées de sel
fidèle à la fleur
—la sueur me poisse
178
Sans couverture
une brume sale
frais comme une source
dans les replis des collines
les premiers rayons du jour
d’un bleu fatigué
ils volaient quatre
l’écho de la nuit
quatre papillons blancs
—gangue de moiteur
sourient de rosée
le ciel se farde masquant
à l’ombre du figuier
la tombée du jour
un souffle d’air frais
de lambeaux de nuit
—le matin enfin
langueur d’un soir de juin —
là, la tache rouille —
les crapauds n’en finissent pas
une feuille morte en juin
enveloppe les collines
traverse la chambre moite
de compter les étoiles
ou un rouge-gorge ?
179
Sans couverture
premier soir d’été —
le vent s’est calmé —
sur le pré les pâquerettes
s’il s’agite maintenant
traversée de nuit
premières cigales —
à l’entrée du port
orneront les pins
sont restées ouvertes
c’est entre mes tempes
aucun fanal sur la passe
bientôt leurs chants dévêtus
franchir la limite
tasse de café
— le soleil hésite
rosée sublimée
au fil du courant
une libellule
les clapotis sur la coque
dans le crépuscule rêve
de la toile d’araignée
sur la terrasse d’air frais
—rêve de cap Horn
sur une lavande
180
Sans couverture
des grains de poussières
un soleil habile
lentement se font dorer
accroche des arcs-en ciel
ils tournent si lents
un été soyeux
si loin de la mer
ouvre ses matins
sur d’épais rayons
au cœur des nuages
au dessus des roches sèches
pour une rosée fugace
le matin s’étire
la mue de cigale
— tintement des verres
offrande du vent
le chant du loriot
tiédeur caressante
indifférent aux humeurs
le silence des cigales
jusqu’à l’ombre de midi
une tige de lavande
du passant maussade
dans le soir d’été
181
Sans couverture
le vieux sur le banc
qu’il a de la chance
résiste à la tentation
le coquelicot flétri
matin équivoque —
la mésange fuit
se sent observée
qui vibre et sourit
d’ouvrir les mains
entre deux poèmes
une araignée sur la vitre
d’une branche d’olivier
chaleur belliqueuse —
le sable s’écoule
se met à l’abri
des instants perdus
soirée implicite —
passant d’une feuille
l’araignée reste au plafond
à l’autre un papillon cherche
une araignée sur le mur
minuscule monticule
cachée des regards
celle qu’il imite
182
Feuilles Volantes
âme de sa fleur
la graine de pissenlit erre entre les ciels
pensif sur le banc il laisse le soin au soir
Feuilles Volantes
d’aller vers demain
corvée d’arrosage —
ma peau sens l’herbe frôlée par un arc-en-ciel
Août 2013 Mars 2014
vieille photo grise —
aux sourires impassibles l’impossible amour
183
Feuilles Volantes
j’en soupire encore
mon pauvre arc-en-ciel
d’un très long silence
brouillé dans le vent
la nuit se précise
au fond de ma poche
j’ai gardé le souvenir
papillon multicolore
les cigales sont parties
j’ai conservé un caillou
pour faire la fête
pour ne pas me perdre
une tourterelle
le ciel devient pâle
sur un fil bat la mesure
la température peine
—l’orchestre s’accorde
dans le thermomètre
le ciel a tendu
mélancolie du couchant dans mon verre
sur les collines sans souffle
un papillon s’est noyé
un linceul brûlant
184
Feuilles Volantes
deux pies polyglottes
matin sans souci —
ne s’entendent plus
prennent de la graine
j’ouvre le volet
odeur des tomates
— parfums du matin
— le goût du soleil
brisant la paix du matin
sur le pré quelques ramiers
le monde inonde la chambre
mures salées dans l’assiette
le rideau du ciel
dans le soir ils flottent
se prépare à découvrir
comme un sombre duvet
soudain une étoile
déjà la nuit
a rayé un vœu
sur les rêves à venir
le bal des étoiles
les papillons de nuit
perdue dans l’immensité
qui tire un drap d’étoiles
185
Feuilles Volantes
un livre entrouvert —
l’ombre de la lampe
les rêves de cette nuit
qui balance sur le mur
un haïku m’échappe
animal exténué
quel était ce rêve
ce soir le vent s’est couché
posés sur la table
menace la nuit
d’une course interminable,
souffle au bord de l’horizon
sur un lit d’aiguilles.
sur ce banc je pense
pudique la lune
à rester assis
un voile de gaze
aux années que j’ai perdues
remonte sous son regard
"incognito
silence de l’aube —
"le chef de gare
le grincement du volet
"poinçonne son billet
réveille une huppe 186
Feuilles Volantes
de ses yeux qui brillent
les feuilles jaunissent
dans un sac de billes
— ma peau s’est ridée
un soir de satin
un piaf sur l’antenne —
pose son silence
passe à la télé
un enfant plonge la main
sur les arbres de Judée
sur la terre rassasiée
un programme animalier
la branche a frémi
sécateur rouillé —
une goutte un gland la feuille
la vendange à Saint-Amour
ciel couleur de zinc
odeur de verveine
— fin d’un jour d’octobre
la gorge nouée
s’en sont échappés
crisse entre les lames
au-dessus des roches grises
j’avale les aspirines
187
Feuilles Volantes
sur le tronc pourri
sourde lassitude
travail de fourmis
d’un manteau de brume
se rassemblent les alludes —
l’heure en trop s’est travestie toutes les horloges scandent leurs accords mélancoliques
le soir a glissé si vite
sous les arbres sidérés
un silence sans audace
froid crépuscule
fige le jardin
à l’heure d’hiver
un bouchon qui saute —
les boutons de porte
il est l’heure où se referment
brusquement c’est le matin couleur de champagne
l’aube imperturbable sourit aux heures nerveuses
le fauteuil balance
qui ploient le cadran
il hésite entre torpeur et résolution
188
Feuilles Volantes
dans la nuit d'octobre
nuit d’insurrection —
le ton sec des glands
le palais des songes
les feuilles mortes modèrent
les cauchemars ont pillé
la nuit se hâte et efface les indices sur l’ardoise
l’air se fige et tinte —
peut graver son orbe
un verre se brise
du ciel — la lune à présent
sous les étoiles stridentes
une heure a poussé
le ciel devient rouge
le journée hors de l’ornière —
au loin l’or du crépuscule
sur son trente-et-un
les rails se rejoignent
à se retirer
que l’acier malmène
la nuit joue des coudes
dénude la nuit
l’octobre élégant s’apprête
dans le fracas du ballast
189
Feuilles Volantes
des tuiles ruissellent
dans le froissement
vieilles gargouilles sans tête
des pages que j’ai tournées
le volet m’échappe
brumes de novembre—
mistral courroucé
claquent les volets
un théâtre d’ombres —
les étourneaux
à l’abri du mur
ont posé leurs doutes
les sanglots d’automne
la soirée languit
des mains — soleil déjà haut
les battements de la ville
le pin embrasse le cèdre
sur le pré illuminé
le ciel blanc de zinc
les nuages de laine
peu à peu s’est camouflé
franchissent le ciel
en soldat de plomb
en frissonnant 190
Feuilles Volantes
dans la nuit d'octobre
odeur d’encre fraiche
le son sec des glands
journal du matin
diamants dans la nuit
le jour s’est levé
veille mon sommeil
glacée de novembre
sur les feuilles se répand
et de papier encor lisse —
la constellation de l'ange
collé au sol par la pluie
la brume mesure
ce soir une feuille
l’épaisseur de mes paupières
se repose sur le banc —
le nord en colère
lueur au crépuscule
où le thym se tait
saison des kakis
— soirée de novembre
oublier l’automne
s’est perdu dans la garrigue
qui s’accroche aux branches noires —
191
Feuilles Volantes
la charpente grince
portée par le vent
remonte sa couette
hante les collines
un profond silence
étincelle
une branche craque
éclaire le monde
c’est l’hiver une souris
une pâle odeur de neige
sur le chemin de la nuit —
une luciole
sous la lampe il tourne
dans le froid j’attends
autour des mêmes poussières —
l’aube qui en met du temps
petit moucheron
pour se maquiller
sous la lampe tu écoutes le silence qui chuchote
prudence des feuilles—
à un moucheron
sur le pré blanchi
ses confidences d’un soir
une pie glisse en silence
192
Feuilles Volantes
soleil de décembre —
le geai bleu des chênes
de leurs monnaie d’or
au marché des branches
le jour prend des airs
petit matin sombre
il fait grise mine
on oublie les rêves
les chênes brillent encore
choisit les glands les plus mûrs
de conspirateur sournois —
les pieds sur les carreaux froids —
vibrant sur le pré
froissement de soie —
une feuille morte emporte
au milieu des feuilles fauves
un premier rayon
froissement de soie —
frissons dans les pins
les nids se rendorment
la rumeur du vent
les nids se réveillent
vient taquiner les aiguilles —
au milieu des feuilles mortes
193
Feuilles Volantes
une flaque
un matin grisâtre
avant le lever du jour
les bruits du départ
solstice d’hiver —
un silence tiède
c’est le soir – déjà
et des bougies froides
s’est dépêchée de sécher
et mélancolique estompe
l’ombre peine sur le mur
quelques miettes sur la table
les livres se serrent
la pluie sur les feuilles
rayant sous la lampe
s’entête et rive mon front
dans les flaques grises
le soleil d’hiver
brouille les façades
le froid resplendit
la poussière des rayons
à la vitre froide
le reflet du ciel d’étain
glisse sur les troncs humides —
194
Feuilles Volantes
un abricot glisse
dans la flaque triste
entre les dents de l’hiver
reflet de la nue captive
dans les branches nues
le tas s’illumine
en feuilles vibrantes
se déguise en feuille
les volets se ferment
le temps fait la tête —
dans la nuit brumeuse
boudent les oiseaux
— crépuscule
d’un ciel sans merci
tous les oiseaux se déguisent
la petite chatte rousse
mélancolie du silence
sur les branches qui sanglotent
l’or du crépuscule
un matin encore
explose dans les nuages
qui paresse sous la couette
et se pare d’étain
grise des nuages 195
Feuilles Volantes
lenteur de la flamme
le volet proteste
qui de contorsions lascives
la certitude du jour
le jour se termine
la lune se pare
sur l’ombre et le vide
ruisselant de nuit
une feuille s’est posée
des diamants perlent des branches
pèse sur le ciel
d’un sourire
caresse la bûche…
hésite un instant
je ramène le volet
d’un énigmatique masque
— l’hiver en silence
me voilà plus riche
fumée blanche —
flânerie d’un soir d’hiver
les feuilles qui brûlent
les feuilles grasses de pluie
ont élu un pape
glissent sous les pas 196
Feuilles Volantes
petit serin pris
le vieux volet grince —
dans l’étau de sa volière
l’étoile ce matin vibre
émissaire
confessions du vent
une risée dans le grain
sous les portes closes
du vent et la pluie
la nuit lame froide
du vieux mur boiteux
au fil de l’hiver
son esprit pépie
sur la peau de l’aube
du soleil absent
qui glisse des doigts glacés
quelques pierres sont tombées
passe les ombres inquiètes
la pluie s’est calmée
crissements sinistres
un coup de vent sec secoue
le vent affute ses lames
la torpeur des branches
entre les collines 197
Feuilles Volantes
le volet dévoile
crépuscule —
un jour grimé par l’orage —
le vol bas et sans espoir
le cœur de la nuit
derrière la brume
redoute de battre
en riant sous cape
la pluie inlassable
éclosent les fleurs
des grèves de mousse
fourbit sa vindicte
la nuit a des cils
d’un ramier blessé
malmené sous les averses
les étoiles se dérobent
dessine sur les façades
naïves—l’hiver sournois
marcheur misérable
la brume dilue
le long des rues maussades
le ciel — se froissent les feuilles
les rêves s’émoussent
du calendrier 198