Espace-vie n°286 | Novembre 2018 - Quel avenir les Wallons veulent-ils pour leur territoire ?

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Belgique–België PP 1300 Wavre 1 BC 0481 Bureau de dépôt 1300 Wavre

197 286 novembre 2018 décembre 2009 mensuel mubw.be

espace-vie La revue de la Maison de l’urbanisme / Centre culturel du Brabant wallon La revue de la Maison de l’urbanisme / Centre culturel du Brabant wallon

Le Schéma de Développement du Territoire à la loupe Quel A avenir les Wallons veulent-ils pour L leur territoire ?

HABITAT A L'habitat léger sur A la voie de la reconnaissance

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JODOIGNE La nouvelle vie du Stampia

CULTURE BW BW CULTURE Pub, L travail, migration… en questionnement artistique


Cet Espace-vie recueille des étapes importantes qui amorcent ou annoncent un changement significatif pour nos territoires

sommaire

édito

Des étapes et nos modes d’habiter. Tout d’abord, le Schéma de Développement du Territoire (SDT) est, à l'heure où s'écrivent ces

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En deux mots

lignes, en phase d’enquête publique. Cet outil stratégique

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Dossier Comment va s’opérer la transition du territoire wallon

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Habitat L'habitat léger sur la voie de la reconnaissance

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Interview « Fini d'être considérés comme des originaux »

trace l’avenir de la Wallonie à l’aune des enjeux de la polytransition que traversent nos territoires. Plusieurs séances d’information sont organisées dans toute la Wallonie pour vous permettre d’appréhender ce document et exprimer votre avis.

Environnement La nouvelle vie du Stampia à Jodoigne

Notre Maison de l’urbanisme est là pour vous accompagner

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dans ce processus d’appropriation. S’approprier et s’exprimer

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Architecture Ce que Jean Cosse a apporté et continue d'apporter

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Cirque Pub, travail, migration… en questionnement artistique

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Art contemporaine Quand l’enclos manifeste un désir d'évasion

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épinglé pour vous… L’agenda du mois

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Visite guidée à la découverte de l’œuvre de Jean Cosse

sont les premiers pas pour permettre aux citoyens de participer à la définition de leur cadre de vie. Le SDT encourage cette approche inclusive, clé de voute d’une cohésion territoriale. Une mission qui guide aussi notre Maison de l’urbanisme depuis sa création au sein d’un centre culturel. Autre changement important, la reconnaissance légale de l’habitat léger, fruit d’un long travail mené par nos collègues du RBDL. Ces deux changements importants dans le paysage actuel et futur de la Wallonie sont relayés voire amorcés par un centre culturel riche d’avoir en son sein des espaces d’information, de participation et de transformation des usages du territoire. > Karima Haoudy

Espace-vie est la revue mensuelle de la Maison de l’urbanisme du Brabant wallon - CCBW. Elle a pour objet de vous informer sur des sujets ayant trait à l’aménagement du territoire, à l’urbanisme et à la définition du cadre de vie. Le CCBW y ajoute quatre pages dédiées à l’actualité culturelle du Brabant wallon.

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Éditeur responsable : Olivier Roisin - Coordination : Xavier Attout, Karima Haoudy, Joëlle Rigaux (CultureBW) - Rédaction : X. Attout , C. Dunski Équipe de la Maison de l’urbanisme : X. Attout, A. Chevalier, K. Haoudy, M. Schmetz - Président de la Maison de l’urbanisme : Mathieu Michel Maquette : www.doublepage.be - Mise en page : Béatrice Fellemans - Imprimeur : IPM Printing –Tirage : 7 200 exemplaires Adresse : 3, rue Belotte, 1490 Court-Saint-Étienne - Contact : 010 62 10 30 ou m.urbanisme@ccbw.be - www.mubw.be - www.ccbw.be Espace-vie est publié avec le soutien de la Wallonie et de la Province du Brabant wallon. Publication gratuite (dix numéros par an) pour les habitants du Brabant wallon, 10 €/an hors Brabant wallon (877-7092102-57). Ne peut être vendu. Toute reproduction partielle ou totale nécessite une autorisation préalable de l’éditeur responsable. Dessin : Marco Paulo. Photo de couverture : D. R.

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LOGO IMPRIMEUR


Un compromis de vente pour l’achat d’un terrain de 14 hectares situé à Wavre et appartenant à Immobel, le long de la N25, entre l’établissement Le Domaine du Blé et la E411 a été signé avec les responsables de la Clinique Saint-Pierre. Ce déménagement d’Ottignies à Wavre ne sera toutefois pas immédiat : le temps de valider toutes les décisions, de dessiner les plans (le bureau Assar Architects a travaillé sur les esquisses de ce dossier de 300 pages), d’effectuer les demandes de permis et de construire un nouvel hôpital, une décennie devrait s’écouler. L’investissement total s’élève à 300 millions. Si le projet entre dans les conditions de la Région wallonne, il pourrait bénéficier d’un subside de 150 millions.

… et réaménagement imaginé du site actuel Le solde sera financé par un apport de fonds propres et par la vente du site d’Ottignies. Ce site d’une dizaine d’hectares pourrait être reconverti en projet résidentiel. La direction de la Clinique a déjà fait savoir qu’elle souhaitait que l’on maintienne une polyclinique sur le site.

Julien Taymans, président de la Régionale Natagora Brabant wallon.

en deux mots

Déménagement de la Clinique Saint-Pierre

« Le contourne­ ment nord a été pour nous le dossier le plus énergivore de ces dernières années. »

Une neuvième réserve naturelle pour Natagora La carrière Hannotelet, à Lasne, une ancienne sablière de 66 ares qui abrite plusieurs espèces rares ou protégées, va devenir une réserve naturelle. Sa gestion a été confiée par la commune à Natagora, via la signature d’un bail emphytéotique. Natagora sera chargée de l’entretenir afin de préserver sa biodiversité.

Toujours autant de déchets illicites Près de 110 tonnes de déchets illicites sont déposés aux abords des bulles à verre chaque année en Brabant wallon. Un chiffre qui ne diminue pas. Cela représente près de 400 kg par jour. Cet incivisme concerne des encombrants, vitres, miroirs, ampoules, tubes néon, céramique, sachets ou encore caisses en carton contenant des déchets divers non triés. Le cout pour la collectivité s’élève à 110.000 euros par an. in BW rappelle que des solutions existent : collectes en porte-à-porte, recyparcs ou encore enlèvements sur inscription.

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Le nombre de logements prévus dans le cadre du projet Esprit Courbevoie à Louvain-la-Neuve. Les premiers habitants sont attendus pour l’automne 2020. La première phase concerne 213 logements dont 63 % sont déjà vendus.

> Christian Radelet devait être admis à la pension au 31 octobre 2017. Le fonctionnaire délégué avait alors été prolongé d’un an par le cabinet du ministre de l’Aménagement du territoire. D’après nos informations, son contrat sera prolongé une dernière fois, jusqu'au 1er février 2019. Une procédure de recrutement est en cours. espace-vie novembre 2018 n° 286   l

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dossier

Le Schéma de Développement du Territoire à l’enquête publique jusqu’en décembre

Une vision pour le territoire à l’horizon 2050 C’est le document le plus important à l’échelle du territoire wallon. Celui qui donne les grandes orientations sur le devenir de toute une région. Comme l’instauration du Stop au béton ou l’interdiction d'aménager des centres commerciaux dans les villes. L'occasion de donner votre avis sur ce projet.

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ne brique de 131 pages parue au le SDER, (Schéma de Développement Moniteur. Ecrite, de plus, en petits de l’Espace Régional). Un document qui caractères. Le document qui est situé date de 1999. « Il était donc opportun de au sommet de la hiérarchie des outils procéder à sa réévaluation et à son acd’aménagement du territoire ne fait pas tualisation, explique Fabrice Evrard, avodans la dentelle. Seuls les plus témécat au sein du cabinet HSP, spécialisé raires devraient pouvoir arriver au bout. en droit de l’urbanisme et de l’environLe Schéma du Développement du Terrinement. Une révision avait été lancée en toire est actuellement soumis à enquête 2013 par le ministre Henry mais n’avait publique. Ce texte balise les grandes pu aboutir. Un tel document n’a pas de orientations et ambitions en matière de durée de vie précise. Mais le SDER était, développement territorial. Il détermine de toute évidence, inadapté aux évolula Wallonie de demain et élabore les tions actuelles. Le monde change. Il y a stratégies pour y parvenir. Il reprend « Le monde change. Il y a eu des donc des indicaévolutions notables dans les politions sur là où on tiques d’aménagement du terridevrait construire, toire. Avec le SDT, nous devrions comment, quelle sera la transition être repartis pour 20 ans. » énergétique à suivre, les endroits où seront situés à l’avenir les comeu des évolutions notables dans les polimerces, etc. Un vaste document qui n’a tiques d’aménagement du territoire, de qu’une valeur indicative mais qui insmobilité et en matière d’environnement. crira néanmoins noir sur blanc la vision Avec le SDT, nous devrions être repartis vers laquelle il faudra tendre. « Ce propour 20 ans. » jet de territoire est, avant tout un projet Donner un cadre aux compolitique en ce qu’il opère des choix munes pour trancher parmi plusieurs voies possibles, dans le Le projet de territoire qui est aujourd’hui respect des obligations internationales sur la table est ambitieux. Il veut, par de la Région, en cohérence et en comexemple, rencontrer les besoins acplémentarité avec les plans et les outils tuels et futurs en matière de logements stratégiques qu’elle a déjà adoptés, accessibles, anticiper les besoins écopeut-on lire dans les premières pages du nomiques dans une perspective de SDT. Il ambitionne d’assurer un dévelopdéveloppement durable et de gestion pement durable, humain et attractif du parcimonieuse du sol, inscrire la Walterritoire qui tienne compte des dynalonie dans la transition numérique, renmiques et des spécificités territoriales forcer l’attractivité des espaces urbaniet de la cohésion sociale. » sés, soutenir une urbanisation économe Pour les plus anciens, le SDT remplace espace-vie novembre 2018 n° 286   l

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en ressources ou encore soutenir des modes de transport plus durables, adaptés aux spécificités territoriales. Un vaste chantier donc qui sera mis en œuvre par les communes. Ce document devant leur donner le cadre dans lequel elles devront évoluer à l’avenir. D’autant qu’il doit tracer la vision du territoire à l’horizon 2050.


Parmi les très nombreuses mesures que comprend le SDT, deux ont déjà fait pas mal parler d’elles en début d’année, lorsque l’avant-projet a été dévoilé. La première est l’instauration progressive d’un Stop au béton. « Réduire la consommation des terres non artificialisées à 6 km2 d’ici 2030, soit la moitié de la superficie consommée actuellement et à 0 km2 à l’horizon 2050 » peut-on lire dans le SDT. Un taux annuel d’artificialisation des terres sera notamment mis en place pour suivre l’application de la mesure.

concerne les ensembles commerciaux dans les centres-villes. Après plusieurs échanges entre les cabinets wallons, il est désormais proposé « d’autoriser les ensembles commerciaux de plus de 2 500 m2 uniquement dans les centres villes et plus en périphérie, sauf à démontrer qu’une installation périphérique ne porte pas préjudice aux commerces dans les noyaux urbains environnants. » L’idée étant de privilégier la ventede mobilier, de literie ou autres mobiliers de grande taille à l’extérieur des villes.

Un PEB A pour tous les bâtiments en 2050

L’enquête publique se déroulera jusqu’au 5 décembre. Les communes devront ensuite remettre leur avis. Après analyse des différentes remarques déposées lors de l’enquête publique et de celles des communes, le Gouvernement wallon devrait se prononcer sur le texte pour la fin mars.

Autre volet relativement ambitieux, surtout quand on connait l’état plus que vieillissant du parc immobilier wallon (trois bâtiments sur quatre ont été construits avant 1980) : l’objectif, pour les bâtiments résidentiels, d’atteindre le label PEB A en moyenne pour l’ensemble du parc en 2050. Il va falloir se retrousser les manches. Pour les bâtiments tertiaires, l’ambition est d’atteindre des bâtiments neutres en énergie. On relèvera aussi la volonté d’établir un référentiel d’aide à la décision pour le recyclage immobilier des tissus bâtis. Le second élément qui a fait parler de lui

interview

« Le SDT ne touche pas au plan de secteur ! »

Thierry Berthet est directeur de la Cellule

Adoption en avril prochain

de Développement

> Xavier Attout

Plusieurs séances d’information sont organisées à travers toute la Wallonie. En Brabant wallon, une séance se déroulera le lundi 12 novembre à 18h au sein de l’Hôtel de Ville de Nivelles (Place Albert 1er à 1400 Nivelles). Infos : http://lampspw.wallonie.be/dgo4/site_ amenagement/amenagement/sdt

Le Schéma de Développement du Territoire doit permettre aux citoyens d'appréhender au mieux les enjeux futurs de la Wallonie. © JCX Immo.

territorial. Il a piloté la mise en œuvre le SDT.

> Proposer une révision du SDER était essentielle ? Il s’agit d’un souhait du Gouvernement. Il était repris dans la Déclaration de politique générale. Un outil de ce type permet d’avoir une vision sur quinze ou vingt ans. Le SDER arrivait donc en bout de course. > Quel a été le processus pour arriver au document que l’on tient aujourd’hui entre nos mains ? Relativement rapide ! Nous avons été nommés en mai 2017. Quatorze mois plus tard, en juillet 2017, le SDT était adopté par le Gouvernement en première lecture. Au départ, cet outil a été enrichi par diverses études de la Conférence permanente du développement territorial. Cela nous a permis de déterminer des objectifs à long terme. Une fois validés, nous avons pu les détailler. Il y a ensuite eu des consultations diverses avec des acteurs d’horizons variés avant de lancer des Ateliers du territoire, qui ont été menés par les Maisons de l’urbanisme et Inter-Environnement Wallonie. De quoi prendre le pouls du terrain. Après une étude d’incidence et des discussions intercabinets, nous voilà aujourd’hui avec ce SDT. > Qu’attendez-vous de cette enquête publique ? Il s’agit d’une matière difficile à appréhender mais nous espérons que le plus de monde possible pourra se l’approprier. En 2013, lors de la révision du SDER, nous avions reçu seulement 700 remarques. Ce qui était très faible à l’échelle de la Wallonie. Et il n’y avait qu’une dizaine de personnes à la réunion d’information à Nivelles. Il faut espérer que ces chiffres soient plus élevés. > Avec des questions diverses ? Deux questions sur trois que nous avons déjà reçues concernent des changements au plan de secteur. Les gens veulent savoir si leur terrain situé en zone agricole va passer en zone à bâtir. Mais le SDT ne parle pas de cela !

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> Propos recueillis par X. A. espace-vie juillet 2018 2010 n° 203 espace-vie novembre 286   l

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habitat

Elles ne devraient bientôt plus poser de problème de légalité urbanistique

L'habitat léger sur la voie de la reconnaissance Un pas en avant important pour les habitations légères. Elles vont être reconnues dans les prochains mois dans le Code du logement, ce qui devrait faciliter le quotidien des 20 000 personnes qui vivent dans ce type d’habitat. Elles devraient pouvoir désormais régulariser leur situation plus aisément.

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a décision est peut-être passée inaperçue pour certains. Mais c’est pourtant un immense pas en avant qui a été franchi mi-octobre en matière de logement. Sur papier, cela ne se traduit actuellement que par l’insertion d’une petite phrase dans le Code wallon du logement et de l’habitat durable. Dans les faits, cela modifie considérablement l’approche qu’auront à l’avenir les services urbanisme vis-à-vis des habitants de yourtes, roulottes, cabanes et autres chalets. « Il s’agit d’une grande victoire pour ceux qui défendent l’habitat léger, se réjouit Vincent Wattiez, cheville ouvrière du Réseau brabançon pour le droit au logement (RBDL). Le résultat de cinq ans de sensibilisation. Il reste encore beaucoup de travail sur cette matière mais on ne peut que saluer l’ouverture et l’écoute de la ministre du Logement Valérie De Bue par rapport à notre action. » L’avant-projet de décret adopté en première lecture par le Gouvernement wallon valide donc la reconnaissance de la notion d’habitation légère. Une décision qui en appelle d’autres en la matière, de manière à mieux encadrer le phénomène des habitats légers qui tend d’ailleurs de

plus en plus à se développer. Les raisons sont multiples, que ce soit pour les volets économiques, sociaux, sociétaux voire environnementaux. Les personnes qui souhaitent vivre dans ce type de logement (20 000 à l’échelle de la Wallonie) ne disposaient jusqu’à présent d’aucune reconnaissance juridique. Cette avancée devrait leur permettre, à terme, de pouvoir s’implanter plus aisément dans des zones où la fonction résidentielle est autorisée (zone d’habitat ou de loisirs), même si elles devront toujours suivre les règles habituelles en matière d’aménagement du territoire. « Un de nos prochains objectifs sera de pouvoir déposer une demande de permis sans devoir recourir à un architecte, comme c’est le cas actuellement », note Vincent Wattiez.

Affiner les questions juridiques Si on analyse la notion de l’habitation légère d’un peu plus près, on relève que ce logement ne peut désormais pas être un bâtiment et doit répondre à au moins trois caractéristiques : démontable, déplaçable, d’un volume réduit, d’un faible poids, ayant une emprise au sol limitée, autoconstruite,

sans étage, sans fondations et qui n’est pas raccordée aux impétrants. « Nous émettons une réserve sur la notion de bâtiment car cela n’intègre pas les spécificités des chalets, kerterre, dômes ou encore des cabanes qui sont bâties sur place, précise Vincent Wattiez. Il y a donc un risque que les communes s’approprient ce qu’elles veulent du contenu du décret, même si ce n'est pas l'intention première de la Région.» Quelques notions juridiques devront encore être définies à l’avenir. Le groupe de travail qui planche sur ces questions depuis décembre 2017 (1) devra notamment s’atteler à la rédaction de normes spécifiques, que ce soit en termes de salubrité, de sécurité ou de surpeuplement. « Nous devons nous assurer que ces habitations remplissent les conditions permettant de garantir un cadre de vie digne à leurs occupants », souligne Valérie De Bue. > Xavier Attout

(1) Habitat et Participation, Réseau wallon pour le droit à l’habitat, RBDL, HaLé!, Centre de médiation du voyage, MOC, encadré par des professeurs d’université de l’UCL et de Saint-Louis.

© RBDL

Le fruit d’un long travail Le Réseau brabançon pour le droit au logement a été créé en 2012. Il a multiplié les initiatives depuis lors (conférences, expositions, mémorandum, etc.), dont l’une d’elles visait notamment à faire reconnaitre l’habitat léger comme un mode d’habitat ayant ses spécificités à part entière. Mais qui, de ce fait, ne pouvait plus être ostracisé. Pari réussi aujourd’hui. La structure brabançonne est reconnue pour son expertise en la matière, dispose d’un réseau dense d’affiliés, d’une communication dynamique et a l’oreille des (collaborateurs) des ministres successifs. Sa prochaine activité d’envergure se déroulera les 10 et 11 mai prochains à Louvain-la-Neuve avec l’organisation d’une journée européenne de l’habitat léger. > X. A.

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interview

Dix ans d’actions pour la Régionale Natagora Brabant wallon

« C'est fini d'être considérés comme des originaux »

Julien Taymans est président bénévole de la Régionale Natagora Brabant wallon. Cet expert naturaliste est

Arrivée sur la pointe des pieds, Natagora Brabant wallon est aujourd’hui un interlocuteur reconnu dans le paysage brabançon. Ses opérations de préservation de l’environnement sont incontournables. Retour sur dix années d’actions avec son lot de satisfactions et de déceptions.

également chargé de mission chez Natagora.

Que représente aujourd’hui Natagora en Brabant wallon ? nous ouvre aujourd’hui plus facilement les portes. Les communes Nous sommes actifs dans 22 communes et nous nous occupons collaborent davantage avec nous. La peur des “ayatollahs” verts a de la gestion de huit réserves naturelles, sur les onze que compte disparu. Une relation de confiance s’est tissée. la province. Soit 63 hectares à gérer. Notre force est de posséder Si vous jetez un regard dans le rétroviseur, que retenez-vous pardes relais dans chaque entité. L’avantage, c’est de pouvoir rassemticulièrement ? bler les énergies, de tisser un réseau et de disposer d’une force de En dix ans, nous avons traité 173 dossiers de vigilance, effectué frappe plus importante. Notre travail consiste surtout dans la pré166 balades guidées, obtenu une centaine de parutions dans servation de l’environnement par le biais de la gestion de réserves les médias, assuré 260 présences événementielles et effectué et d’actions de sensibilisation. 226 jours de gestion dans les réserves. Nous organisons, en Cinq communes ne font pas partie de votre réseau. Pourquoi ? moyenne, quatre à cinq journées d’entretien par an. Nous déUne régionale s’est créée à Gembloux. Chastre, Perwez et Villers-laveloppons également de plus en plus de journées dédiées au Ville l’ont donc rejointe. Même chose pour Ittre et Tubize, qui se sont team-building. Cela marche très bien, même un peu trop bien ! dirigées vers la régionale Les plus belles acde Braine-le-Comte. tions ? Le Brabant wallon La plus grande satisfac« Notre force est de posséder semble être particuliètion, c'est la préservades relais dans chaque com­ rement bien fourni en tion du site de la Grandematière de membres… mune du Brabant wallon. Nous Bruyère à Rixensart. Nous disposons de 3 000 C’était inespéré au disposons de 3 000 membres, membres, pour 1 200 il y départ. C’était d’autant a dix ans. Par contre, le pour 1 200 il y a dix ans. » plus difficile que cette noyau dur de bénévoles région est soumise à une qui sont vraiment actifs ne tourne qu’autour d’une vingtaine de perimportante pression foncière. Le contournement nord a par contre sonnes et se renouvelle peu. Je lance donc un appel aux bonnes été le plus énergivore. Heureusement, cette mobilisation est partavolontés. Il faudrait, de plus, que davantage de jeunes s’impliquent. gée avec douze associations. Qu’est-ce qui motive vos bénévoles ? Les plus grandes déceptions ? Le constat d’une nature qui se dégrade autour d’eux. La cohésion D’une manière générale, il faut être très patient. Mais aucun dosd’équipe est un aspect qui les attire. Globalement, nos actions sier ne m’a particulièrement déçu. Sauf peut-être à Ittre récemportent leurs fruits. Il y a donc un degré de satisfaction élevé. On ment, où nous n’avons pas réussi à acheter un beau terrain de dix essaie surtout d’être présent en amont, de manière à préserver la hectares qui était en vente. biodiversité dès le début du projet. Quels sont les principaux défis à venir ? Comment jugez-vous l’état actuel du Brabant wallon ? Le principal sera de maintenir le cap que nous nous sommes fixé et Il y a du positif et du négatif. Les sites sur lesquels nous travaillons de poursuivre nos projets. De continuer à être aussi actifs que nous restent de petits bijoux. Les sites forestiers sont bien préservés. le sommes. Il faudra aussi veiller à élargir le cercle des bénévoles. Pour les prairies humides, c’est par contre beaucoup plus compliEt puis, avec ce cap des dix ans, c’est aussi une raison d’entamer qué, malgré la sensibilisation que nous avons effectuée. Les spéciune réflexion sur nos priorités. Il serait par exemple opportun de ficités du Brabant wallon sont une difficulté supplémentaire. laisser tomber certaines actions énergivores pour se concentrer Le regard des gens sur votre action a-t-il évolué au fil du temps ? sur d’autres plus importantes. > Propos recueillis par Xavier Attout Il y a dix ans, nous étions considérés comme des originaux. On espace-vie novembre 2018 n° 286   l

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aménagement du territoire

Un réaménagement paysager d’envergure pour le site des Baladins du Miroir

La nouvelle vie du Stampia à Jodoigne Le site du Stampia va connaitre une profonde mutation dans les prochains mois. Un vaste réaménagement paysager et urbanistique qui doit le transformer en parc ouvert. Il deviendra, à terme, un pôle pour plusieurs associations qui mettent en valeur le territoire et ses ressources.

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n site de sept hectares à quelques centaines de mètres du centre de Jodoigne. Vert, aéré mais plutôt mal organisé. Si après quelques années d’abandon durant lesquelles le site a semblé davantage séduire les amateurs de jeux nocturnes que les amoureux de la nature, il a depuis trois ans repris un semblant de vie avec la présence de la compagnie théâtrale des Baladins du Miroir et du Groupe d’action locale Culturalité. Le Stampia s'ouvre à une nouvelle destinée d’ici peu. Un rebond qui n’est encore rien par rapport à ce qui l’attend dans les prochains mois. L’Agence de promotion immobilière du Brabant wallon (APIBW) a mis la main sur ce site en 2015 pour un montant de 900 000 euros, via un subside de 1,150 million octroyé par la Province. Un vaste projet de réaménagement paysager est prévu avec le solde. Des perspectives qui doivent redonner une certaine attractivité à ce site déchu. Que va-ton y retrouver ? Un nouvel accès via la chaussée de Charleroi, un parking dalle/ gazon d’une centaine de places à l’arrière du site, des espaces pour installer les chapiteaux, des lieux d’accueil et de convivialité, un pont au-dessus de la rivière, un hangar pour stocker le matériel et des aménagements paysagers. Des éléments qui permettront de redonner une certaine cohérence à l’endroit et de permettre à ce parc d’être bien plus accueillant pour le futur. Notons que, si de nombreuses manifestations publiques y seront organisées, le parc ne sera pas accessible librement au public. « Avec espace-vie novembre 2018 n° 286   l

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l’achat de ce site, nous avons transformé un problème en opportunité, explique Mathieu Michel, président d’APIBW. Les Baladins du Miroir cherchaient une nouvelle implantation. Nous souhaitions de notre côté qu’ils continuent à faire rayonner la culture dans l’est de la province. Le site du Stampia est tombé à point nommé. D’autant que nous pouvons y créer un véritable lieu tourné vers le territoire et ses habitants, avec la présence du GAL Culturalité. Le réaménagement du site doit permettre de donner une nouvelle dimension et d’offrir des conditions de travail agréables à ces associations. »

Un premier permis refusé Si une première demande de permis a été recalée, la seconde a été acceptée. Le fonctionnaire délégué Christian Radelet vantant même la qualité de ce réaménagement imaginé par le bureau C2 Project, de Lasne. « Les travaux sont relativement basiques et peuvent être effectués rapidement, explique Cédric Levaux, directeur d’APIBW. C’est l’affaire de quatre à cinq mois. Ils devraient débuter au printemps. Tout le projet ne sera pas réalisé en même temps. Le hangar, qui doit être financé par les Baladins du Miroir, devrait par exemple être réalisé dans un second temps. Ce réaménagement respecte par contre scrupuleusement l’environnement. Du ciel, nous ne verrons pratiquement pas les interventions sur le site. » Le budget global des travaux s’élève à 2 millions d’euros. Notons que le financement n’est pas en-

tièrement bouclé. Une fois que les travaux seront terminés, l’APIBW cèdera le terrain aux Baladins du Miroir selon les modalités d’un bail emphytéotique de 99 ans. > Xavier Attout

« Une zone verte vue du ciel » Fabian Keutgen est co-gérant du bureau d’études C2 Project (Lasne) qui a dessiné le projet. > Quelle a été la philosophie du projet ? La particularité du dossier réside dans le fait que l’on se trouve en zone verte. Et ce, alors que nous venons avec des aménagements qui doivent résister au passage de camions pour le démontage et le montage de chapiteaux. L’autre demande émanait du fonctionnaire délégué qui souhaitait que, vu du ciel, l'on puisse percevoir une grande zone verte. > Des contraintes particulières pour le site ? Nous sommes dans une zone qui est en risque d’inondation. Nous étions donc tenus de nous coller au maximum au terrain agricole. Nous avons dès lors prévu une passerelle pour permettre de poursuivre la circulation au-dessus du cours d’eau.


> Xavier Attout

Le site du Stampia à Jodoigne devrait connaitre une importante mutation dans les prochains mois. © Culturalité & C2 Project espace-vie novembre 2018 n° 286   l

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architecture

Le Brabant wallon compte de nombreux bâtiments dessinés par cet architecte

Ce que Jean Cosse a apporté et continue d’apporter Jean Cosse a profondément marqué le paysage de l’architecture belge. Pour découvrir son œuvre et son enseignement, un guide lui est consacré, conçu par Jean-Paul Verleyen et Brigitte De Groof, architectes, enseignants émérites et tous deux anciens collaborateurs de Jean Cosse. Focus sur cet architecte.

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essentiel réside dans une sorte de politesse envers le lieu, doublé d’une attitude active qui participe à ce grand mouvement évolutif des civilisations (Jean Cosse). Inscrire la nouveauté induite par l’acte architectural, dans la continuité du lieu, pourrait être le fil conducteur qui compose le maillage étoffé de la pensée et du travail de l’architecte Jean Cosse (1931-2016). Jean Cosse est bien plus qu’un architecte. C’est un poète, un philosophe, un pédagogue dont l’enseignement a enthousiasmé nombre d’étudiants et qui continue toujours à nous inspirer. C’est la force de son enseignement, atemporel et universel, qui est transmise à travers un ouvrage « Jean Cosse. Une architecture à la rencontre de l’Homme. Guide de réalisations en Région bruxelloise et en Brabant wallon ». L’ouvrage nous invite à parcourir les paysages de Bruxelles et du Brabant wallon, parsemés ici et là par des réalisations de Jean Cosse. La diversité du programme créatif et l’inaltérable adaptation au milieu – depuis des maisons implantées à la lisière de forêts à une église-maison insérée dans un tissu périurbain, en passant par des fermes ou encore un musée – , le guide traduit bien l’agilité de Jean Cosse, attentif au caractère du lieu et aux aspirations des habitants. Et ce, depuis les prémices. À propos de ses origines, Jean Cosse note la chance qu’il a eue de ne pas appartenir à une famille d’architectes. Fils de cultivateurs du Condroz, il a longuement arpenté espace-vie novembre 2018 n° 286   l

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la campagne qui lui a enseigné l’humilité et l’indispensable écoute du lieu. Et, lorsque l’on confondra plus tard ses maisons avec des fermes (et non à des fermettes… nuance), on ne s’étonne guère de sa joie, confortée par ce retour aux bons principes de l’architecture vernaculaire de son Condroz natal. L’origine paysanne l’ancre et l’enracine dans la terre, à l’instar de ses maisons qu’il aspire à voir sortir de terre tout comme les arbres. Ces mêmes arbres qui ne cesseront d’agripper, branche par branche, son émerveillement et son désir de comprendre forme et structure, lesquelles font écho à l’architecture.

Ses sources/ressources Si la nature constitue un intarissable gisement, l’architecture sacrée magnifiée par les bâtisseurs de cathédrales l’élève vers d’autres préoccupations. Il s’ouvre à cette esthétique au cœur de la cathédrale de Tournai, qu’il côtoie régulièrement lorsqu’en 1954 il entame ses études à l’Institut Supérieur d’Architecture SaintLuc. La mécanique structurelle des cathédrales gothiques l’incite à saisir la raison des choses, le fameux « pourquoi », levier de tous les possibles. Entre l’attachement au paysage rural/ natal, sa fascination pour la haute technologie du gothique et l’amour des arbres, le jeune diplômé se confronte à la réalité de l’organisation de chantiers de construction de maisons, en travaillant pour la Société nationale terrienne. En 1958, Jean Cosse réalise sa premiè


reconstruction : un prototype de maison sociale rurale pour la Petite Propriété terrienne, à l’occasion de l’Exposition de Liège.

De la maison individuelle... Entre sa maison individuelle à Waterloo et la maison Goethals à Ohain, soit de 1959 à 1970, le travail de Jean Cosse connait, au fur et à mesure, une évolution : recherche de simplicité, quête d’une nouvelle relation à l’espace, mise en exergue des éléments constructifs, introduction de modules répétitifs capables d’enrichir tout en unifiant. Cette évolution est perceptible dans l’ouvrage que Jean Cosse coécrit avec F. Debuyst Des Maisons pour vivre (1975) et qui témoigne de l’importance du thème de la maison dans son travail et dans sa réflexion-méditation. La « maison humaine » nourrira l’ensemble de son programme architectural. Elle est foyer d’harmonie entre les habitants ou les usagers et leur environnement. La porosité en est l’assise : porosité entre le dehors et le dedans, porosité entre le

sacré et le quotidien. Des maisons-églises aux églises-maisons, il n’y a qu’un pas ou un trait de dessin. Une convergence de fonctionnalités et de symboliques qui est synthétisée par l’église-maison Saint-Paul de Waterloo (1968). Sa réflexion sur le sacré irriguée par les enseignements de l’architecture gothique est naturellement en phase avec son temps : les révolutions liturgiques et sociétales de Mai 68 et Vatican II sont à l’œuvre.

… à la maison-forum À la fin des années 1970, Jean Cosse revient à une architecture plus ascétique, avec des matériaux simples, une volumétrie robuste et dépouillée, autant de réminiscences de l’architecture romane. Ses réalisations en milieu urbain : le collège Erasme à Louvain-la-Neuve, l’Institut Saint-Luc à Saint-Gilles et le CREPAC à Limal marquent un tournant vers une expression tectonique plus vigoureuse. Sa quête constante de spiritualité s’incarne dans de nombreux programmes (églises, monastères, prieurés, etc.) réalisés en

Quelques réalisations de Jean Cosse à Louvain-la-Neuve : Place Cardinal Mercier, l'église Saint-François d'Assise et le Collège Mercator. Et un projet de cité résidentielle élaboré par Jean Cosse . © M. Schmetz et LOCI-UCL

Belgique et en France. En Brabant wallon, retenons l’église Saint-François d’Assise, l’église Saints-Marie-et-Joseph (Louvainla-Neuve), le monastère Saint-André de Clerlande (Ottignies) ou encore la restauration de l’église Saint-Martin (Dion). Parallèlement à la pratique du métier d’architecte, Jean Cosse a prodigué un dense et généreux enseignement au sein de l’Institut Supérieur d’Architecture Saint-Luc de Bruxelles et de la Faculté polytechnique de Mons. > Karima Haoudy

L’ouvrage « Jean Cosse. Une architecture à la rencontre de l’Homme. Guide de réalisations en Région bruxelloise et en Brabant wallon » appartient à la collection des guides de voyage « CROguide » (édition ISA Saint-Luc de Bruxelles et Faculté LOCI de l’UCL). Intéressé·e par l’ouvrage ? Contactez-nous m.urbanisme@ccbw.be ou 010 62 10 53 Prix de vente : 10 €

Quel héritage nous a-t-il laissé ? Quelle est la place de l’héritage de Jean Cosse dans le paysage contemporain de l’urbanisme et de l’architecture ? Si Jean Cosse appartient à un contexte historique bien défini, il nous a transmis un faisceau de savoirs d’une intarissable actualité. De ce faisceau émerge l’écoute des usagers et du lieu. Si ces valeurs sont aujourd’hui préconisées et défendues au travers des principes de frugalité et de parcimonie, du temps de Jean Cosse et de l’ère « du tout-au-pétrole », c’était une avancée - un augure - considérable. « La modernité d’aujourd’hui passe par la prise en considération du lieu. Le lieu étant considéré comme un territoire précis dont les limites font naitre le dedans et le dehors. Il va de la région à la ville, la place, la rue, la pièce (…). On se souvient d’un lieu. Nous avons la chance de bénéficier d’un patrimoine attachant, un héritage précieux, produit du lieu et de ses caractéristiques physiques, climatiques, morphologiques, indissociables d’une manière de vivre. Face à cet héritage précieux, l’architecture doit actualiser la réponse aux besoins et désirs des hommes et des femmes d’aujourd’hui (...) ». C’est sans doute dans cette prise en considération des identités du lieu sous ses aspects tangibles et intangibles (topographie, orientation, climat, matériaux, morphologie, usages, etc.) que Jean Cosse nous rappelle l’importance d’une intégration active de l’architecture dans son environnement. > K. H.

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En l’air, festival de cirque contemporain en Brabant wallon

Pub, travail, migration… en questionnement artistique Les 9, 10 et 11 novembre, En l’air, seul festival dédié au cirque contemporain en Brabant wallon, présentera sa 7e édition, dans une formule itinérante qui créera un lien entre différents lieux stéphanois.

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vénement haut en couleur, « En l’air » allie spectacles professionnels et formes artistiques en création. Une belle manière de découvrir, à travers un circuit créatif ponctué de spectacles et d’animations circassiennes, le bouillonnement du cirque d’aujourd’hui et de ses artistes pluriels. Mais En l’air n’est pas qu’un simple festival de cirque. Le cirque contemporain ne se limite d’ailleurs pas non plus à régaler les spectateurs de performances et prouesses, aussi époustouflantes soient-elles. Par le choix des spectacles programmés, les organisateurs d’En l’air et les compagnies invitées interpellent le public avec des thématiques fortes, des enjeux de société qui secouent tous les milieux, culturels, médiatiques et politiques, comme la question des migrations, mais aussi celle de l’immixtion de la publicité jusque dans des spectacles vivants, ou encore celle du travail.

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Souvenez-vous : en février dernier, En l’air présentait en avant-première Burning. Je ne mourus pas et pourtant nulle vie ne demeura. Alliant forme et fond avec une efficacité redoutable, la création circassienne montre un homme confronté à sa condition de travailleur, pris au piège dans un système qui le conditionne et lui échappe. Métaphore de son existence, le plateau duquel il ne peut s’extraire s’incline doucement pendant le temps de la représentation. « Nous avons fortement soutenu ce spectacle pour qu’il puisse aller au festival Up! à Bruxelles, mais aussi au festival d’Avignon, souligne Christophe Rolin, coordinateur d’En l’air. Il s’agit d’un spectacle fort, tant en espace-vie novembre 2018 n° 286   l

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cirque qu’au niveau du contenu, et cela nous touche beaucoup. » Le monde culturel et créatif s’immerge volontiers dans cette thématique qui concerne tout le monde : ceux qu’il rend malades, ceux qui en manquent, ceux qui n’y sont pas « adaptés », pour proposer des créations mettant en œuvre diverses disciplines, comme du théâtre participatif ou une œuvre littéraire collective.

çaise, se présentent comme « les artistes d’un genre nouveau au service d’un conglomérat de lobbies venus à votre rencontre pour consolider et booster votre capital bonheur ». Cela nous ferait rire si cela ne ne faisait pas frémir… De son côté, avec AllerJamaisRetour, un spectacle de cirque burlesque et oni-

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La publicité omniprésente Le thème de cette édition d’En l’air, c’est la publicité détournée, omniprésente dans l’espace public, mais aussi dans nos vies, au point de les guider… C’est le thème du spectacle phare du festival, Pub Show Urbain, et de la scénographie créée dans la continuité par Eva Madeira et Victoria Vandermeersch (Espace-vie 284 de septembre 2018). « Nous avons organisé une sortie avec les participants des différents ateliers estivaux pour réfléchir à cela. Nous sommes allés dans Court-Saint-Étienne, dans notre espace de tous les jours, il n’est pas nécessaire d’aller loin pour se rendre compte de l’omniprésence de la publicité, explique Christophe Rolin. Nous avons aussi été en contact avec des chercheurs sur le sujet… » Dans Pub Show Urbain, les compagnies Lady Cocktail et Du Grenier au Jardin s’interrogent sur le phénomène grandissant du placement de produits dans des spectacles vivants. Usant du trapèze ballant, du mât chinois, du chant et de musique live, Violaine Bishop, Anna Blin et Lola Ruiz – les Lady Cocktail belges –, Nadine Bechade, Gilles Favreau et Thomas Dardenne, de la compagnie fran-

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rique sur hamac mexicain, La Bastarda Company touche au sujet de la guerre et des migrations qui en sont la conséquence, tout en employant un langage imagé et fantaisiste. Elle soulève le questionnement de l’origine de la fuite, et évoque le parcours d’un voyage sans refuge à l’arrivée incertaine.

tion d’un cabaret et d’un déambulatoire sous forme de défi : une création commune de trois écoles de cirque, celles de Gembloux, du Brabant wallon installée à Ottignies-Louvain-la-Neuve, et de Jodoigne.

Photos 1 et 3 : AllerJamaisRetour, de La Bastarda Company © Philippe Watel 2 et 7 : Hircus, de la Cie des Chaussons Rouges © Yves Kerstus 4 : Manneken Cirk, des Argonautes DR ESAC 5 : Frédéric Piot, Allal Al Barraghi, Eva Madeira

« C’est l’esprit du festival de montrer les différentes étapes de la création circassienne, de l’amateur acharné au spectacle de haut vol, en passant par une création en cours, avec toute ses richesses et ses fragilités. » Le spectateur pourra découvrir Circular Paranoïa de la Compagnie Smart Hands, en résidence au Foyer populaire depuis le mois de septembre. Les Lady Cocktail furent la toute première compagnie accueillie en résidence dans l’espace de création ouvert au sein du CCBW en 2012, avec leur spectacle Les filles du 2e. Depuis, elles sont venues en résidence à plusieurs reprises et elles seront à nouveau présentes en avril prochain, au PAMexpo, pour peaufiner leur nouvelle création, après leur première qui a eu lieu fin septembre aux Fêtes romanes, festival des arts de la rue à Woluwe-Saint-Lambert, et les représentations lors de cette 7e édition d’En l’air.

Des défis à relever « Le ‘lien’ est le fil conducteur qui nous a permis de construire le festival. C’est le lien entre les ‘centres’ de Court-SaintÉtienne – en faisant circuler le public d’un lieu culturel à l’autre, afin d’utiliser le RAVeL comme artère entre le PAMexpo et un chapiteau, le Centre culturel du Brabant wallon et la coopérative Quatre Quarts installée dans l’ancienne gare – mais aussi le lien avec la population et les associations, à travers les défis cirque et scénographiques qui leur ont été lancés. Nous avons aussi associé le CPAS de Court-Saint-Étienne au projet. C’est lui qui permettra aux artistes de se sustenter pendant En l’air. » Les écoles de cirque de la province ont aussi été associées. Leur intervention ne se limite pas à proposer quelques numéros. Le CCBW leur a commandé la créa-

et Victoria Vandermeersch 6 et 8 : Pub Show Urbain, des Cies Lady Cocktail et Du Grenier au Jardin

> Caroline Dunski

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En l'air : le programme Répartie sur un week-end, la programmation du festival est identique le samedi et le dimanche. Vous pourrez également voir des artistes ayant transité par le « Foyer populaire », l’espace de résidence artistique mis à disposition par le CCBW, et assister à des numéros d’écoles de cirque. Les plus téméraires pourront aussi s’initier aux techniques de cirque. Une activité qui ravira toute la famille, du plus petit au plus grand. > Vendredi 9 novembre à 20h Sous chapiteau, PAMexpo Manneken Cirk des Argonautes

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> Samedi 10 et dimanche 11 novembre de 14h à 18h PAMexpo, Court Village (accès par la Via Fregona) Même programme, même horaire chaque jour :

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• Pub Show Urbain, des Cies Lady Cocktail et Du Grenier au Jardin • Hircus, de la Cie des Chaussons Rouges

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+ Scène découverte (au choix) : - AllerJamaisRetour, de La Bastarda Company - Circular Paranoïa, de la Compagnie Smart Hands - Cabaret d’écoles de cirque + Animations Infos et réservations : www.festivalenlair.be

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Art contemporain : 53e Fêtes de la Saint-Martin

Quand l’enclos manifeste un désir d’horizon Du 4 au 25 novembre, Tourinnes-la-Grosse accueille deux nouveaux commis­sai­ res pour son parcours IN d’art contemporain. Avec « Enclos, cet horizon qui nous poursuit », Manu vb Tintoré et JeanF Jans répondent dans une certaine mesure à la thématique de l’année dernière « À gorge sèche, après la traversée »...

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n 2017, Medhi-Georges Lalou, commissaire de l’exposition IN des 52e Fêtes de la Saint-Martin, rassemblait des artistes habités par la question du déplacement et par celle, sous-jacente, de la place que chacune et chacun cherche ou occupe. Pour cette nouvelle édition, Manu vb Tintoré et son complice l’artiste multimédia JeanF Jans, ont choisi d’évoquer l’« Enclos, cet horizon qui nous poursuit ». À travers ce titre pour le moins singulier, les commissaires questionnent nos constructions mentales, comme celle du bonheur, et nos actes au quotidien, qui constituent autant de possibilités d’enclos, alors qu’ils manifestent au départ un désir de liberté. Pour s’emparer de cette vaste thématique, les commissaires ont invité huit artistes à les rejoindre pour explorer le contexte tourinnois et rencontrer les habitants. Cet été, des résidences participatives leur ont permis de concevoir leurs œuvres in situ, avec la participation

active des habitants. « La résidence de dix jours a permis de désamorcer beaucoup de choses et de démystifier notre travail, par une participation suggérée aux habitants à faire œuvre commune, souligne JeanF Jans. Les contacts ont été excellents. On a perçu une très forte réactivité, positive et engagée. »

Engouement des habitants Joëlle Verstraeten a provoqué l’engouement en proposant de faire de la gravure au rouleau compresseur. Les habitants apportaient des objets de leur quotidien afin de les écraser avant de les encrer pour les imprimer et ainsi en garder une trace à jamais. Avec Dries Meddens, d’autres villageois ont imbriqué de vieux vélos afin d’obtenir une éolienne parlante. Quelques-uns se sont prêtés comme modèles en face de l’objectif précis et discret de Philippe Herbet, pendant que la fanfare du village répétait du Kurt Weill pour un court métrage de JeanF Jans.

rôle d’ambassadeurs. Ils seront à la disposition des visiteurs sur les lieux d’exposition pour donner, à ceux qui le souhaitent,
des clés de lecture sur les œuvres exposées. Et, bien sûr, chaque weekend de ce mois de novembre les visiteurs pourront faire une grande balade culturelle et familiale pour découvrir les beautés du paysage et les richesses du patrimoine architectural local, ainsi que 180 artistes présents dans 90 lieux ouverts au Parcours d’artistes. > Caroline Dunski

Une série d’habitants de Tourinnes se sont portés volontaires pour jouer le

En collaboration avec Pulsart, plateforme d'art contemporain, le Centre culturel de la vallée de la Néthen propose des visites guidées gratuites des expos d’art contemporain les samedis 10, 17 et 24/11 et les dimanches 4, 11, 18 et 25/11 à 14h30. Rendez-vous à 14h15 sur le parking du Centre culturel, rue Auguste Goemans, 20a à Hamme-Mille. Catalogues et badges en vente sur place. Un covoiturage sera organisé. Réservation obligatoire : 010 86 64 04 reservations@ccvn.be www.ccvn.be (billetterie en ligne).

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agenda 11/18 épinglé pour vous…

lu 5/11 à 20h, à Nivelles – le 23/11 à 20h, à Waterloo / théâtre La double inconstance Silvia aime Arlequin et Arlequin l’aime en retour, mais le Prince, tombé amoureux de Silvia, met tout en oeuvre pour tenter d’éloigner les amants l’un de l’autre. Si elle est d’abord une histoire d’amour, l'oeuvre de Marivaux nous amène à penser le jeu de miroirs dont chacun de nous devient de plus en plus allègrement victime consentante, et à vivre avec davantage d’authenticité. 067 88 22 77 – www.centrecultureldenivelles.be 02 354 47 66 – www.centre-culturel-waterloo.be ve 9/11 à 20h, à Tubize / théâtre Le cas Martin Piche Martin Piche est atteint d’un mal étrange : il souffre d’un manque absolu de curiosité et se décide enfin à aller consulter. Son cas très inattendu conduit le psy à mener une séance spectaculaire et irrésistible, où les situations comiques s’enchaineront, passant de l’insolite au burlesque, du touchant au cruel, de l’absurde à l’inquiétant. 02 355 98 95 www.tubize-culture.be

les 9, 10 et 11/11, à Court-Saint-Étienne / cirque En l’air Le seul festival dédié au cirque contemporain en Brabant wallon présente sa 7e édition, dans une formule itinérante qui crée un lien entre différents lieux stéphanois. Événement haut en couleur, « En l’air » allie spectacles professionnels et formes artistiques en création. Une belle manière de découvrir, à travers un circuit créatif ponctué de spectacles et d’animations circassiennes, le bouillonnement du cirque d’aujourd’hui et de ses artistes pluriels. www.festivalenlair.be sa 10/11 à 20h, à Waterloo / théâtre Callas, il était une voix Sur le ton de la confidence, François Grenier, un journaliste radio chargé de réaliser une émission spéciale, retrace les moments clés de la vie de la diva, révélant un parcours d’artiste et de femme jalonné de surprises. 02 354 47 66 www.centre-culturel-waterloo.be

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invitation LA FERME !!! FESTIVAL

public à poser un autre regard sur ce domaine historique et ses pierres. www.villers.be di 18/11 à 15h, à Braine-l'Alleud – di 25/11 à 15h, à Vieusart / jeune public La guerre des buissons Le conflit raconté à hauteur d’enfant. Dans le pays de Toda, une petite fille de 7 ans, les uns se battent contre les autres et il faut fuir. Toda ne comprend pas bien le conflit, elle le subit et essaie tant bien que mal de se l’expliquer avec sa logique. Avec poésie, l’histoire raconte sa traversée, son déracinement, ses rencontres, pour atteindre « là-bas », où elle sera en sécurité... 02 854 07 30 – www.braineculture.be 010 22 48 58 – www.columban.be di 18/11 à 16h, à Jodoigne / théâtre Ma bibliothèque Pour fêter dignement ses 10 ans, la Bibliothèque de Jodoigne vous invite à une mémorable visite guidée assurée par la Cie Téatralala. Son spectacle déambulatoire littéraire, ludique et burlesque vous embarquera pour un périple toutes voiles dehors, au gré de citations émaillées d’humour, de poésie et de sagesse, ponctuées de rires et de surprises. 010 81 99 57 – www.culturejodoigne.be di 25/11 à 15h, à Ottignies / jeune public Sale frousse Prenez une peintre au travail qui ne veut pas être dérangée, surtout pas par des enfants ! Aurait-elle peur d’eux ? Ajoutez à cette mauvaise humeur pas mal de naïveté, de mauvaise foi et de fantaisie, malaxez le tout dans des cris de joie et des coups de pinceau, vous obtenez une frousse tonique, vivifiante et crapuleuse. De 5 à 8 ans. 010 43 57 10 – www.poleculturel.be

Ne manquez pas le festival qui montre qu’il existe d’autres formes musicales que celles que l’on peut entendre sur les ondes. Le 24 novembre, soyez curieux de découvrir Peter Kernel (CH), DC Salas (BE), Wild Classical Music Ensemble (BE), Gablé (FR), Jean Jean (FR), Hypochristmutreefuzz (BE), Seno Nudo (BE) et Peritelle (BE).

Ferme du Biéreau Avenue du Jardin Botanique 1348 Louvain-la-Neuve En prévente : 14 € – Sur place : 17 € www.lafermefestival.be

Cet agenda est absolument incomplet ! Consultez nos articles et Culturebw.be, vitrine de la culture en Brabant wallon

jusqu'au di 11/11, à Villers-la-Ville / arts numériques Digital Contemplation L’Abbaye de Villers et Numeric’Arts présentent la première exposition d’art numérique au cœur du site de l'Abbaye qui, de Victor Hugo à nos jours, a largement nourri l’imaginaire artistique. Émergences numériques et sonores invitent le

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portrait invitation

À la découverte de l’œuvre de Jean Cosse

Visite de quelques-unes de ses oeuvres à Louvain-la-Neuve : > école fondamentale Martin V > église Saint-François d’Assise > Collège Mercator > Place Cardinal Mercier > Maison Moulart

Samedi 24 novembre De 10h à 16h30

Jeux de lumière, spatialité, matérialité, frugalité, bien-être des occupants… Jean Cosse, figure marquante de l’architecture, nous a laissé un dense patrimoine fait d’enseignements, de pensées, de livres et d’ouvrages bâtis habilement, inscrits dans leur environnement. Par ses nombreuses et diverses réalisations et son langage singulier, Jean Cosse a profondément marqué de son empreinte le paysage de l'architecture belge contemporaine. Pour appréhender l’étendue de son œuvre et le legs de son héritage, rendez-vous ce 24 novembre à Louvain-la-Neuve afin de découvrir ensemble, en compagnie de son ancienne collaboratrice Brigitte De Groof (Architecte, Professeur émérite UCL-LOCI), plusieurs de ses œuvres sur Louvain-la-Neuve. Pour accompagner cette découverte, le guide « Jean Cosse. Une architecture à la rencontre de l’Homme » confectionné par Brigitte De Groof et Jean-Paul Verleyen vous permettra de suivre la genèse des édifices explorés et, aussi, de parcourir d’autres entités du Brabant wallon et de la région bruxelloise arpentées par le savoir-faire de Jean Cosse. Un repas commun nous permettra de prolonger les échanges autour de cette découverte. La journée est accessible à tout le monde, le rythme de la balade s’imposera en fonction du nombre, de nos capacités, de la météo et de votre curiosité.

Place Louis Pasteur 1348 Louvain-la-Neuve Une visite organisée dans le cadre de l’événement-hommage à Jean Cosse à l’initiative de la Faculté d’architecture, d’ingénierie architecturale, d’urbanisme - UCL LOCI, des Instituts Saint-Luc de Bruxelles, de l’Union professionnelle d’Architectes, des Assureurs de la Construction, de l’Association des Architectes du Brabant wallon et de la Maison de l’urbanisme du Brabant wallon.

Inscription obligatoire (nombre de places limité) avant le 20 novembre m.urbanisme@ccbw.be ou 62 10 53 Rendez-vous Place Louis Pasteur (bibliothèque des Sciences) 1348 Louvain-la-Neuve Début : 10h00 - Fin de la visite à 16h30 Tarif : 25 €

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(Guide « Jean Cosse. Une architecture à la rencontre de l’Homme », repas de midi et boisson chaude compris)

© M. Schmetz

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Agréation P102024–Exp.–édit. resp. : Olivier Roisin , 3, rue Belotte 1490 Court-Saint-étienne–Bureau de dépôtt : Bruxelles

Visite guidée


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