Dossier de presse 2022 - Acharnière

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, Realiser un film, c'est prendre position Sarah Maldoror — Traduction par Emilie Notens "Je fais partie de ces femmes modernes qui tentent de concilier le travail avec la famille et comme pour toutes les autres cela me complique la vie. Les enfants ont besoin d'une mère et d'un foyer. Raison pour laquelle j'essaie de préparer et de monter mes films à Paris, pendant les vacances d'été, lorsque les enfants sont libres et peuvent me rejoindre. Ma situation est très compliquée. Je réalise des films sur les mouvements de libération. Les fonds nécessaires à la production de ce type de films ne se trouvent pas en Afrique mais en Europe. Il me faut donc vivre là où l'argent se trouve pour ensuite pouvoir travailler en Afrique. Pour commencer, Sambizanga est une histoire vraie : celle d'un combattant pour la liberté parmi de nombreux autres qui meurent sous les coups de la torture aggravée. Mon souci principal était de donner à voir aux Européens qui ont une connaissance très parcellaire des films de l’Afrique, les guerres oubliées de l’Angola, du Mozambique et de la Guinée-Bissau. Si je m'adresse aux Européens.n.es c'est parce qu'il appartient aux distributeurs français de décider si les Africain.e.s verront ou non ce type de films. Après douze années d'indépendance, ce sont vos entreprises -UGC, Nef, Claude Nedjar et Vincent Malle- qui ont entre leurs mains le destin de l'éventuelle distribution africaine de Sambizanga. Je me refuse à réaliser un "gentil film nègre", refus dont on m'a fait régulièrement le reproche. On me reproche également de réaliser des films d'une grande perfection technique, à l’Européenne. La technologie appartient à tout le monde. Le concept de la "négresse à talents” doit être renvoyé dans mon passé français. Mon film raconte l'histoire d'une femme qui part à la recherche de son mari. Il pourrait s'agir de n'importe quelle femme, dans n'importe quel pays. Nous sommes en 1961. La conscience politique des peuples ne s'est pas encore éveillée. Je m'excuse si cette situation n'est pas perçue comme "satisfaisante", et si elle échoue à informer substantiellement le public des luttes africaines.. Je n'ai pas le temps de réaliser des films politiques didactiques. Dans le village de Maria, les gens n'ont aucune idée de ce que peut signifier "l'indépendance". Les Portugais empêchent l'information de circuler et le débat public est impossible. Il est tout autant interdit à la population de vivre en accord avec leur culture traditionnelle. Si vous pensez que ce film peut être interprété comme étant négatif, vous tombez dans le même piège que mes frères arabes qui m'ont reproché de ne pas montrer les bombes et les hélicoptères portugais dans mon film. Les bombes ne pleuvent sur nous qu'au moment de notre prise de conscience. Les hélicoptères n'ont fait que très récemment leur apparition - vous les avez vendus aux Portugais uniquement parce que nous étions en train de prendre conscience. Il n'y a pas si longtemps la population imaginait que les évènements en Angola n'étaient la conséquence que d'une petite guerre tribale. Notre désir d'indépendance n'était pas pris en compte : serait-il possible que les Angolais.e.s soient comme les Portugais.e.s ? Non, c'est impossible! Je suis contre toute forme de nationalisme.

Réaliser un film, c'est prendre position

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