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Edito
PAR KARINE CLAIREAUX, MAIRE HONORAIRE DE SAINT-PIERRE ET ANCIENNE SÉNATRICE DE SAINT-PIERRE-ET-MIQUELON
Portrait : © Grégory Pol
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Au sud de l’île de Terre-Neuve, l’archipel de Saint- Pierre-et-Miquelon se compose de 4 îles principales : Saint-Pierre avec en face du port, l’Île aux Marins, abri naturel de ce dernier ; Miquelon et Langlade reliées par un isthme de sable fin de 12 kilomètres de long, fermé naturellement depuis le XVIIIème siècle.
Saint-Pierre, le chef-lieu grâce à son port abrité, est l’île où se concentre 90 % de la population sur 25 km2 . Miquelon et Langlade sont elles plus sauvages et préservées, avec des enjeux différents à tous les niveaux.
À la confluence du courant froid du Labrador et des eaux chaudes du Gulf Stream, Saint-Pierre-et-Miquelon est un trésor de biodiversité unique en France, avec plusieurs écosystèmes aussi remarquables que fragiles mais assez peu connus, sauf de quelques spécialistes. C’est la seule collectivité d’outre-mer (COM) française en zone subarctique. Le climat est plutôt froid et humide, même si les températures extrêmes en hiver sont très éloignées de celles des zones continentales comme le Québec.
De par sa situation géographique et les aléas climatiques qui s’accélèrent, l’archipel de Saint-Pierre-et- Miquelon est très exposé aux risques littoraux et en particulier les risques liés à l’érosion et à la submersion. En effet, il est composé de petites îles basses sur l’eau et une partie de la population est installée dans ces zones basses. C’est particulièrement le cas de Miquelon dont le village est installé en bord de mer sur un cordon littoral de faible altitude et en recul.
L’une des conséquences prévisibles du changement climatique dans la région est une montée du niveau des océans et une intensification des tempêtes. Force est de constater que depuis quelques décennies l’archipel subit des phases d’érosion plus actives. La mer entame le littoral avec plus de force à chaque tempête hivernale et les cordons dunaires s’amenuisent. Ce recul généralisé du trait de côte est avéré et risque de s’accélérer dans le futur.
Les changements climatiques, avec des hivers plus doux, provoquent l’absence récurrente de pieds de glace protecteurs pour le littoral et l’élévation du niveau marin. Ce ne sont pas des signes positifs en faveur d’une stabilisation du système. Les cordons littoraux constitués de sable et de galets offrent peu de résistance aux assauts de la mer et sont de plus en plus fragilisés. La zone la plus fragile apparaît être celle dite des « buttereaux » sur l’isthme de Langlade où l’érosion dégrade régulièrement la route d’accès Miquelon-Langlade et menace la lagune saumâtre du Grand Barachois, un écosystème particulièrement riche et varié. Certaines infrastructures notamment routières sont régulièrement mises à mal par les tempêtes. Il faut alors agir dans l’urgence par la réalisation d’ouvrages lourds et coûteux visant à protéger ces infrastructures et plus généralement les zones menacées.
Face à la montée des eaux, l’adaptation devient aussi nécessaire qu’inévitable afin de protéger la population et préserver les zones remarquables et la biodiversité sur laquelle pèsent déjà de nombreuses menaces. Les hommes comme la biodiversité marine et terrestre ont dû et su s’adapter face à de grands bouleversements au fil des siècles. À Saint-Pierre-et-Miquelon, comme dans d’autres Outre-mer, la résilience est une seconde nature pour tous les organismes vivants…
Karine Claireaux
Karine Claireaux a été maire de Saint-Pierre de 2001 à 2020. L’ancienne sénatrice de l’archipel (de 2011 à 2017) est spécialiste des questions maritimes, environnementales et polaires, et a également présidé le Conseil national de la mer des littoraux (CNML) de 2014 à 2021.