4 minute read
TAAF
LE CRAYON POUR DÉCRIRE LA BEAUTÉ DES TAAF
Rare spécialiste en outre-mer du crayon graphite et de couleur, Nadia Charles nous livre son regard d’artiste sur les Terres australes et antarctiques françaises (TAAF), qu’elle a eu la chance de découvrir lors d’un fabuleux voyage à bord du Marion Dufresne.
Ci-dessus : un timbre dédié à l’éléphant de mer. © Nadia Charles
INTERVIEW
NADIA CHARLES, DESSINATRICE NATURALISTE DANS L’OCÉAN INDIEN
• Quelle est votre spécialité en dessin ?
Ma spécialité est le crayon graphite et de couleur, expression originale et pourtant basique au regard des nouvelles technologies infographiques. Une technique sèche sur papier, de la matière pigmentaire écrasée sur le support en superposition, en couches lisses qui donne un aspect cireux. J’utilise également le pastel sec pour les plus grands formats. L’aérographe est aussi une technique rapide et intéressante pour rendre des matières et des transparences.
• Quel regard portez-vous sur la faune et la flore de Crozet, Kerguelen, Saint-Paul et Amsterdam ?
Dans le cadre d’une importante commande d’inventaire de la faune pour la Réserve naturelle des Terres australes françaises, j’ai eu l’opportunité de vivre une expérience unique en me rendant, lors d’une rotation du Marion Dufresne en novembre 2017, dans ces lieux grandioses peuplés d’espèces emblématiques telles que les albatros, les manchots, les orques...
J’ai été éblouie, émerveillée, fascinée devant tant de beauté. J’ai pu croquer des oiseaux, comme par exemple le prion bleu, que j’ai ensuite décliné sur un timbre-poste. J’ai réalisé des tableaux de sensibilisation que l’on retrouve au siège des TAAF, mais aussi dans les différents districts, des illustrations pour des rapports d’activité, etc. Pour ce faire, j’ai échangé des crobars contre des photos de professionnels qui étaient à bord du bateau. J’ai des trésors dans mes malles !
Éloigné des centres d’activité humaine, ce patrimoine naturel unique est resté un sanctuaire de la biodiversité dont les paysages volcaniques spectaculaires abritent l’une des plus fortes concentrations et diversités d’animaux et de mammifères marins au monde. La volonté de préserver cette partie de l’océan Austral pour les générations futures est un enjeu digne d’être célébré par un travail graphique complémentaire en termes visuels. Isabelle Autissier se souvient « de ce sentiment d’approcher un paysage évoquant l’aube du monde et de fréquenter des animaux qui ont oublié que l’homme a été leur ennemi mortel ». J’ai eu cette impression en observant le vol majestueux et serein des albatros au-dessus du bateau. Dans ce monde hostile, ces seigneurs des airs semblent nous regarder avec amusement, comme de petites choses fragiles et inadaptées à cet environnement.
• Lors d’une résidence d’auteurs au Muséum d’Histoire naturelle de La Réunion, vous avez publié récemment un ouvrage imposant qui recense la collection de vos plus beaux dessins. Les TAAF sont à l’honneur dans cet ouvrage ?
Ce livre s’intitule Dessins naturalistes, une traversée de l’océan Indien... à la pointe du crayon. Il regroupe 25 à 30 ans de commandes dont la plupart sont issues de l’île de La Réunion. Les TAAF occupent un bon tiers du livre. Les planches réalisées à l’occasion de mon voyage illustrent la faune, la flore, mais aussi la vie des habitants, le travail des agents de la Réserve, l’activité liée la pêche australe et les actions menées dans cette immense Réserve naturelle.
Au bout de mon crayon, j’essaie de faire ressortir le caractère unique et exceptionnelle de ces îles, des espèces qui y vivent, pour sensibiliser tout un chacun à la nécessité de préserver ce joyau inscrit au titre du Patrimoine mondial de l’UNESCO et sur la Liste verte des aires protégées et conservées de l’UICN. Le crayon est un outil de communication qui parle à tout le monde !