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Saint-Barthélemy

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Guadeloupe

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SAINT-BARTHÉLEMY

ENQUÊTE PIONNIÈRE SUR LES PLAGES DE L’ÎLE !

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Une étude est actuellement menée sur le fonctionnement et l’évolution des plages coralliennes de Saint-Barthélemy par des chercheurs de l’Université Paul Valéry Montpellier (UPVM) et des agents de l’ATE, avec le soutien de la collectivité. Des campagnes de mesure des plages ont ainsi été programmées jusqu'en 2023. Observer, étudier et surveiller les milieux côtiers : un préalable indispensable pour faire progresser les connaissances et aider à une gestion du littoral efficiente et durable.

Les plages de Saint-Barthélemy concentrent des enjeux humains, socio-économiques et environnementaux qui sont exposés aux événements météo-marins (tempêtes, ouragans) et géodynamiques (tsunamis) ou encore aux phénomènes d’érosion. En septembre 2017, les impacts de l’ouragan Irma ont souligné la vulnérabilité de ces milieux (Rey et al., 2019). Quatre ans plus tard, l’absence de suivi des côtes sableuses ne permet pas de savoir si les plages de l’île ont récupéré leur état initial ou du moins un état d’équilibre. Force est de constater que les savoirs en matière de risques d’érosion et de submersion sont encore trop lacunaires. Pour combler cette méconnaissance, une équipe associant géomorphologues, géographes et géomaticiens a entrepris le suivi inédit des dynamiques morphologiques et sédimentaires des plages coralliennes de Saint-Barthélemy, leur évolution saisonnière et pluri-annuelle, de même que la caractérisation de leur capacité de résistance et d’adaptation dans un contexte de changement climatique.

LES OBJECTIFS DE L’ÉTUDE SE RÉSUMENT EN CINQ POINTS :

1. Un suivi de la mobilité du trait de côte, en créant des indicateurs tels que : la position du rivage, la quantification du bilan sédimentaire, la granulométrie, la mesure des pentes de plages, l’état de la végétation...

2. Une évaluation de la capacité de relèvement des plages face aux tempêtes et ouragans. Les événements météo-marins sont-ils uniquement destructeurs ou sont-ils aussi un moyen de régénérer les plages en mobilisant des sédiments sableux situés plus au large ? Sur quelles temporalités ? Quelles différences d’ajustement entre plages naturelles et urbanisées ?

3. Une approche spatiale de l’antagonisme entre urbanisation et protection du littoral. Les aménagements côtiers modifient progressivement et durablement les dynamiques côtières en court-circuitant les échanges sédimentaires. Les dommages causés par Irma ont mis en exergue la forte exposition et la vulnérabilité des biens lorsque ceux-ci sont construits trop près du rivage. Comment concilier l’urbanisation du littoral et la maîtrise du foncier avec la préservation durable des plages et la gestion des risques côtiers ?

4. Un diagnostic de l’état de santé des écosystèmes marins à Saint-Barthélemy pour déterminer dans quelle mesure ils participent à la protection des plages et à leur alimentation en sédiments. Les récifs peuvent réduire de 97 % l’énergie des vagues et de 84% les hauteurs de vagues avant d’arriver sur le rivage (Ferrario et al., 2014). Leur préservation est ainsi un atout indéniable pour réduire risques côtiers et impacts du changement climatique à moyen et à long terme.

5. La création de fiches de synthèse sur le fonctionnement global des plages, depuis la compréhension des dynamiques naturelles jusqu’au diagnostic des phénomènes.

Les vagues de l’ouragan Irma ont entraîné une sévère érosion de la plage Flamands et d’importants dommages sur les habitations et infrastructures à proximité du rivage.

© Tony Rey

UNE INVESTIGATION MULTI-MÉTHODES ET MULTI-SITES POUR DES RÉSULTATS INÉDITS

Le suivi des côtes coralliennes nécessite une approche multi-méthodes avec des mesures in situ, le relevé d’indicateurs topo-morphologiques, sédimentaires, botaniques, l’utilisation de technologies aéroportées, l’emploi d’outils de géospatialisation et de méthode participative pour échanger avec les acteurs locaux et recueillir leurs témoignages. La première mission a été réalisée en juin. Les levés de terrain seront poursuivis avant et après la saison cyclonique.

LE CHALLENGE : PRODUIRE DES DONNÉES FIABLES, PRÉCISES ET ROBUSTES

Les levés de terrain réalisés en juin croisés aux images drone soulignent la variété morphologique des plages coralliennes. Comprimées entre la mer et les habitations, les plages urbanisées sont moins larges que les plages plus naturelles, elles ne possèdent pas suffisamment d’espace pour évoluer sans contraintes.

Cette tendance ne doit pas masquer la forte saisonnalité de certaines plages, avec des périodes d’érosion et des périodes d’engraissement. Les profils de plage et les indices granulométriques révèleront les disparités à l’échelle locale. La saisonnalité ne doit pas non plus masquer les tendances d’évolution car toutes les plages ne s’équilibrent pas d’une année sur l’autre, sans que l’on en connaisse encore les raisons. Le suivi des plages permettra de quantifier les tendances d’évolution du trait de côte et contribuera à révéler les processus de résilience côtière encore insuffisamment connus.

UNE OPPORTUNITÉ POUR LES DÉCIDEURS

Le devenir des systèmes côtiers est une préoccupation majeure pour les îles tournées vers le tourisme mais aussi pour réduire les risques côtiers et les impacts des catastrophes naturelles dans un contexte de changement climatique. Une meilleure connaissance des phénomènes d’érosion et d’engraissement sur le littoral de Saint-Barthélemy constitue alors un atout majeur dans les politiques publiques de protection, de prévention, de gestion de crise et leur application par les acteurs de la gouvernance sur le terrain.

Sur le littoral de l’île de Saint-Barthélemy, se succèdent côtes rocheuses et plages coralliennes, certaines naturelles, d’autres urbanisées.

Un atelier participatif afin d’intégrer les savoirs vernaculaires (c’est-à-dire des habitants du territoire, issus de leur vécu, de leur expérience) aux savoirs scientifiques dans l’analyse des dynamiques côtières saisonnières. Le post-it du document indique que sur la partie orientale de la plage de Lorient, une tendance à l’érosion est observée depuis cinq ans.

© M. Diab

Un modèle numérique de terrain (MNT) produit avec des images drone, géoréférencées et traitées sous un logiciel 3D. La comparaison diachronique des MNT permettra de localiser les zones en engraissement, celles en érosion ainsi que leur évolution (cliquer sur le visuel pour l’agrandir).

© S. Defossez

Rédaction : Tony Rey | tony.rey@univ-montp3.fr

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