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La forêt tropicale guyanaise, où l’accumulation de la biomasse joue un rôle de régulateur du climat. © Éric André Nicolini | Cirad

LE RÉSEAU DE DISPOSITIFS GUYAFOR, UN OBSERVATOIRE PRIVILÉGIÉ POUR LA RECHERCHE SUR LES FORÊTS DE GUYANE

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Cogéré par des organismes de recherche (Cirad et CNRS) et par l’ONF, gestionnaire des forêts de Guyane, Guyafor est un réseau de dispositifs forestiers permanents disséminé sur 16 sites en Guyane. Il a pour mission l’étude à long terme de la dynamique forestière et de la biodiversité.

Plus de 95 % du territoire guyanais est couvert de forêt, un écosystème qui abrite une très grande biodiversité. On estime qu’il existe 1 500 à 2 000 essences d’arbres en Guyane et il n’est pas rare de trouver 200 espèces d’arbres différentes au sein d’un même hectare de forêt. Les forêts guyanaises jouent également un rôle important dans l’atténuation des changements climatiques puisqu’elles stockent une quantité de carbone équivalente à celle de l’ensemble du territoire métropolitain sur une surface huit fois plus petite. L’exploitation forestière qui y est menée contribue à l’économie locale : la filière forêt bois est la troisième filière économique de Guyane.

De nombreux chercheurs travaillent à comprendre l’écologie de ces forêts :

À quoi est due une telle biodiversité ? Comment les différentes espèces animales et végétales interagissent pour maintenir le bon fonctionnement des milieux forestiers ? De quelle manière les espèces présentes répondent-elles à leur environnement ?

Un enjeu actuel majeur est également de comprendre comment les activités humaines telles que les changements climatiques mais aussi les changements d’usage des terres et l’exploitation forestière modifient le fonctionnement des écosystèmes forestiers.

Le dispositif Guyafor, géré par le Cirad, l’ONF et le CNRS, permet d’apporter des réponses à ces questions. Il regroupe environ 250 hectares de parcelles forestières sur lesquelles la dynamique des forêts est suivie sans interruption. Si certains dispositifs ont été mis en place récemment, depuis 2000, d’autres ont été installés dès les années 1970 (Bafog, Paracou).

La carte du réseau de recherche Guyafor.

© UMR EcoFoG

Ce réseau de surveillance inédit a pour objectif d’une part de mieux comprendre la structure de la forêt et sa composition floristique selon le type de sols et le niveau de précipitations. Cette activité inclut des inventaires forestiers – cartographie et identification de plus de 250 000 arbres à ce jour, mesures de circonférence... – et le recueil de données environnementales : description des sols et précipitations mensuelles notamment. Le réseau Guyafor permet d’autre part d’étudier sur la longue durée la dynamique des forêts naturelles et exploitées, et tout particulièrement : les processus démographiques (régénération, croissance, mortalité), le cycle du carbone de la biomasse, ainsi que les conséquences des variations du climat.

À partir de ces multiples collectes de données, les chercheurs peuvent ainsi évaluer la biomasse des forêts et estimer les stocks et flux de carbone. Par ailleurs, les stations de recherche forestière de Paracou et des Nouragues accueillent chacune près de 150 chercheurs par an et contribuent à la formation des étudiants et des élèves guyanais. Le réseau de laboratoires à ciel ouvert Guyafor est exceptionnel pour faire progresser la recherche sur la dynamique de la biodiversité face aux changements climatiques. Il est un outil précieux pour l’aménagement du territoire et les projets guyanais de développement durable.

PUBLI-COMMUNIQUÉ

L’AGROÉCOLOGIE, UN OUTIL DE VALORISATION RESPONSABLE DES VARIÉTÉS AMAZONIENNES

Les projets de recherche du Cirad s’engagent à promouvoir une agriculture qui préserve la durabilité des ressources naturelles, avec une forte exigence de qualité alimentaire. Trois exemples d’espèces végétales dont le Cirad accompagne en Guyane la structuration et l’essor des filières.

Cacaoyer

© Michel Boccara

CACAOYER

Theobroma cacao est un arbre de sous-bois originaire du continent sud-américain. Un groupe en particulier – le cacaoyer guiana – est originaire du plateau des Guyanes.

Via son Centre de ressources biologiques, le Cirad participe à la conservation active de ce patrimoine. Ses équipes, en collaboration avec des acteurs locaux, s’intéressent à la mise en valeur de ces cacaoyers endémiques. De la sélection génétique des individus potentiellement les plus intéressants à cultiver et à transformer en produits chocolatés, en passant par la formation au champ ou en atelier de chocolaterie, les dernières années de travail ont permis de fédérer un noyau de cacaoculteurs et de transformateurs sur le territoire.

À terme, le Cirad s’engage dans le soutien à l’émergence d’une filière durable et de qualité, respectueuse des hommes et de l’environnement, dont les produits seront destinés tout autant à la consommation locale qu’à l’export.

Bois de rose

© Nadine Amusant

BOIS DE ROSE

L’exploitation de l’huile essentielle du bois de rose (Aniba rosaeodora), espèce patrimoniale de Guyane, a largement contribué à son économie de la fin du XIXème siècle jusqu’au milieu du XXème . Cependant, la surexploitation de la ressource dans son aire naturelle a entraîné sa raréfaction, conduisant à une interdiction de son exploitation en 2001.

Encore recherchée pour ses vertus, c’est dans ce cadre que le Cirad et ses partenaires (ONF, INRAE) ont démarré un programme de recherche (Anib@rosa), visant à mieux comprendre le développement de la plante en lien avec la qualité de l’huile essentielle. Il était aussi essentiel de proposer des outils de traçabilité en vue de relancer une filière de production dans un contexte de gestion durable. L’espèce ne fructifiant pas annuellement, des méthodes de multiplications végétatives ont été développées afin de disposer de ressources pour la mise en place d’une filière écoresponsable dédiée au marché de l’aromathérapie, la cosmétique ou la parfumerie.

Emblématique de la biodiversité guyanaise, cette espèce se veut être un fer de lance pour un développement endogène et durable.

Fruit de palmier açaí

© Nathalie Ciadella

FRUIT DE PALMIER AÇAI

Comment faire de l’exceptionnelle biodiversité un atout de développement économique et social pour les Guyanais ? Accompagner les acteurs à mieux valoriser leurs savoir-faire et les initiatives locales est une option possible.

Le fruit de palmier açaí, nommé wassaï en Guyane (Euterpe oleracea Mart.,) est un aliment très riche et qui contient des substances intéressantes pour la santé, dont des antioxydants. Consommé par l’ensemble des populations amazoniennes, il constitue un trait d’union culturel et alimentaire. Le Cirad, en coopération avec ses partenaires d’enseignement supérieur et de recherche de Guyane, du Brésil et du Suriname (DP Amazonie) conduisent des recherches pour mieux comprendre comment les populations d’Amazonie cueillent, cultivent, consomment et commercialisent l’açaí dans un double objectif.

Le premier est d’identifier les points forts et les points de blocage à une meilleure valorisation économique, alimentaire et culturelle d’un produit issu de la biodiversité forestière non ligneuse.

Le deuxième est de construire, avec les acteurs locaux, un socle de connaissances scientifiques et empiriques à mobiliser dans des démarches de qualité adaptées aux circuits de distribution, qu’ils soient locaux ou à l’export.

PUBLI-COMMUNIQUÉ

ÉTUDIER LA BIODIVERSITÉ MARINE FACE AU CHANGEMENT CLIMATIQUE ET À LA SURPÊCHE

Plusieurs menaces pèsent sur la biodiversité marine, notamment la surpêche et le changement climatique. Il est souvent difficile de démêler leurs effets, leurs conséquences étant fréquemment semblables.

Les campagnes scientifiques ont permis de détecter une augmentation de la diversité des espèces côtières guyanaises suite à une baisse de la pression de pêche.

© Ifremer | Vincent Vallée

Les eaux côtières de Guyane, où coexistent des espèces subtropicales (en limite sud de leur aire de répartition) et des espèces typiquement tropicales, ont subi une hausse de température d’un peu moins de 1° C entre 1990 et 2017. Dans le même temps, la pression de pêche a fortement baissé. Ceci donne une opportunité rare d’étudier comment les peuplements de poissons réagissent à une diminution de la pression de pêche dans un contexte de réchauffement climatique.

Le projet STUDY II (financeurs : Feder et Cnes), démarré en 2016, a ainsi pour objectif de déterminer les effets de différents facteurs sur la biodiversité, de définir des indicateurs de suivi de l’état de la biodiversité marine et d’identifier de nouvelles espèces exploitables en Guyane. À travers des campagnes de chalutage accompagnées de mesures de paramètres physico-chimiques réalisées depuis 1993, les scientifiques ont détecté des changements de composition et d’abondance des populations. Des mesures morphométriques ont été faites sur les espèces échantillonnées, pour avoir des données de référence précises. Ces campagnes ont également été l’occasion d’adapter les indicateurs utilisés en métropole pour le suivi de la biodiversité marine en Guyane. Dernier objectif du projet, l’identification de nouvelles espèces, non sensibles au changement climatique, qui pourraient être exploitées...

Les résultats globaux montrent une bonne capacité de l’écosystème à retrouver un état de diversité riche et stable en espèces de poissons en une période relativement courte d’une dizaine d’années : certains indicateurs de diversité ont augmenté significativement, ainsi que la taille moyenne des poissons, et la biomasse relative des espèces tropicales au détriment de celle des espèces subtropicales. Ceci témoigne d’une restructuration des communautés suite à une réduction de la pression de pêche, mais sous la contrainte du réchauffement. Ces résultats sont encourageants pour promouvoir une gestion durable des pêches, en diminuant la pression de pêche pour préserver les écosystèmes, tout en garantissant une viabilité économique et sociale à la filière en Guyane.

Contact : Fabian Blanchard | fabian.blanchard@ifremer.fr

Mieux connaître les espèces vivant dans les mangroves permet de mieux les protéger.

© Ifremer | Morgana Tagliarolo

LES ÉCOSYSTÈMES CÔTIERS DE GUYANE

Les écosystèmes côtiers et estuariens de Guyane sont riches en biodiversité. Constitués majoritairement de mangroves, ils fournissent de nombreux services écosystémiques, comme l’assainissement des eaux ou le stockage du carbone. Ils sont également essentiels pour les premiers stades de vie de nombreuses espèces de poissons et d’invertébrés, leurs apportant abri et nourriture.

Certaines de ces espèces sont l’objet de pêches lorsqu’elles quittent les mangroves au stade adulte. Les deux projets BioCotEs (Biodiversité côtière et estuarienne – financement Feder) et NurseHab (Characterisation of nearshore habitats as nurseries for fish and shrimp communities – financement Labex CEBA) – ont pour but l’étude de ces écosystèmes et leur fonctionnement. Ils permettront aux chercheurs de caractériser les habitats côtiers et d’évaluer l’état de pollution de ces milieux. Une base de données pour inventorier les espèces sera créée.

Contact : Morgana Tagliarolo | morgana.tagliarolo@ifremer.fr

Post-larve de rouget (Lutjanus jocu)

ENFIN DES BASES DE DONNÉES GÉNÉTIQUES POUR LES POISSONS DE GUYANE

L’inventaire des espèces de poissons guyanais reposait jusqu’à présent sur des descriptions morphologiques. Des analyses génétiques ont montré que cet inventaire était incomplet et présentait des erreurs, mais aussi que les bases de données génétiques internationales étaient incomplètes concernant les espèces de Guyane.

Post-larve de loubine (Centropomus sp.)

Le projet GuyaGenFish (financement par l’Office de l’Eau) a pour objectif de constituer une collection de référence des poissons marins et estuariens de Guyane et de créer la base de données moléculaires correspondante de deux gènes mitochondriaux (COI et ADNr12S). Ces deux bases de données pourront ainsi permettre d’une part de faciliter l’identification des espèces (COI), notamment des stades larvaires, et d’autre part de mettre en place une méthode de métabarcoding (ADNr12S) pour l’analyse de l’ADN environnemental (ADNe) qui pourrait constituer à terme une alternative aux inventaires par capture.

Post-larve d'acoupa rouge (Cynoscion acoupa)

Contact : Yann rousseau | yann.rousseau@ifremer.fr

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