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art contemporain - occitanie / pyrénées-méditerranée - octobre novembre décembre 2017 - numéro 45


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Ils sont deux et on ne les lâche pas du regard, ni l’une, Tamar Shelef, ni l’autre, David Wampach, et nous entraînent d’une élégance mesurée à un expressionisme exacerbé jusqu’au grotesque flirtant alors avec le Beau. C’était « Endo », dernière pièce de David Wampach, créée le 26 juin lors du Festival Montpellier Danse 2017. A voir à Charleroi Danse en avril 18 puis à Uzès Danse en juin. Photo Karim Zeriahen

4 2 1 - Corinne Rondeau rookie, dit-il - Maxime Sanchez s’entretient avec Diego Bustamante supports refont surfaces - Carré d’Art, Nîmes (30) le bureau de - Patrick Saytour à la maison salvan - Labège (31) la panacée, saison 3 - Montpellier acturama - Mrac, Sérignan - Fondation Écureuil, Toulouse - Crac, Sète a-chroniques - Benoist Bouvot silhouette - Dominique Rochet la dramatique vie de marie r. - Marie Reverdy i’m back - Laurent Goumarre

offshore est édité par BMédiation 39 avenue Bouisson Bertrand 34090 Montpellier

Couverture : Tamar Shelef et David Wampach par Karim Zeriahen © offshore 2017

directeur de publication : Emmanuel Berard rédacteur en chef : Jean-Paul Guarino

ont collaboré à ce numéro : Benoist Bouvot, Laurent Goumarre, Marie Reverdy, Dominique Rochet, Corinne Rondeau

site : offshore-revue.fr tél. : 04 67 52 47 37 courriel : offshore@wanadoo.fr ISSN 1639-6855 dépôt légal : à parution impression : JF Impression. 34075 Montpellier

crédits photos : Sylvain Boyé, Laurent Goumarre, Jean-Paul Guarino, Cédric Prat, Dominique Rochet, Rachid Sayet, Karim Zeriahen

vous pouvez recevoir chez vous les 3 prochains numéros d’offshore en envoyant vos coordonnées et un chèque de 10 € à BMédiation, 39 avenue Bouisson Bertrand 34090 Montpellier


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Un dé au creux de la main. Imaginons qu'il n'y ait ni table ni sol pour le lancer. Comment pouvoir connaître le chiffre du hasard, bondir de joie ou râler d'être mauvais joueur ? Parler d'art n'est-il pas un peu cette affaire sans plan d'effectuation, sans à-faire. Comme si l'impossibilité de découvrir la face figée des six nous accordait, pour toute certitude, le chiffre 7 traversant à jamais les airs. Finalement la tâche de celui ou celle qui cause art, par la parole et par une sorte de langage non accompli dans les arcanes des concepts des actualités mondaines, doit s'accorder à cette certitude que l'infini est le septième des nombres entiers naturels. S'accorder ne signifiant rien d'autre que de produire une note entre un corps et un objet capable de produire un son. Critique-instrumentiste dont toute l'action est de se dissoudre dans l'écoute. Maintenant qu'on a dit cela, qu'on le trouve idiot ou charmant, reste que nous ne vivons pas hors-sol, même si l'on peut vivre sans table ce qui est plus salissant. Ainsi le plan, dans sa matérialité en relation avec la pesanteur, nous invite à penser deux choses, peut-être trois. On ne joue pas par terre sinon à deux époques, passées voire fictives, celle des cours de récréation et celle au pied de la Croix pour tirer au sort la tunique du Crucifié. C'est connu Dieu ne joue pas aux dés. Et si on joue plutôt sur une table c'est qu'elle est, sans qu'on n'y pense jamais, le dispositif par lequel le jeu a lieu. La table est déjà de la partie. Elle est un peu comme le langage avec ses conventions qui prolonge le geste jusqu'à l'arrêt d'une face. Elle est faite pour un résultat. Rien n'est plus agaçant que celui qui jette hors cadre, foutant en l'air la partie. Cris, insultes, bras levés. Un peu comme si une pièce de théâtre ou de danse avait lieu derrière des pendrillons. Par chance nous avons aujourd'hui la vidéo, rien ne peut nous échapper. Pour connaître le chiffre du hasard il faut que cesse la chute, c'est là qu'on retrouve le dé au sol, et tous les yeux rivés sur le compte, l'expertise, la virtuosité. Bravo ! Beaucoup d'artistes se sont voués à la chute ces dernières années… désir d'arrêt, fatigue du mouvement, effroi de l'infini ? Pourtant s'il n'y a plus rien pour la recevoir alors qu'on peut toujours lancer le dé, il n'y a plus à s'agacer, être bon ou mauvais artiste, juste une fin qui n'en finit pas, relancer l'art. Si on n'y voit pas on peut toujours sentir, une histoire de musique encore. En définitive, le dé traversant est la meilleure façon d'arrêter de jouer un rôle et de le laisser passer entre les œuvres et nous, lieu de l'art. Car autre chose est à penser : causer art (causer en tant qu'il ne s'agit que d'une occasion d'expression sinon il faut se taire, pour être tout à fait exempt d'être à l'origine) ne suppose pas de dimension concrète, non plus abstraite pour valider une interprétation. Il y a un dé, une main, un geste et plus de table. Le respect de l'art serait ce geste en reste. Geste qui ne compte pas d'avoir été projeté sans but. C'est le dé traversant « le plateau de la table et toute la maison » du poème JEUX de Rilke. Causer art ça n'a pas de but où alors seulement de faire sortir les gens de chez eux, ceux qui ont des tables et des projets. Causer art c'est jeter la langue dans les airs sans but ou presque.


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Disons que cela relève du propre de ceux pour qui l'expression est une façon d'être un passeur qui court toujours après le témoin, pour le coup il ne témoigne jamais de rien. Causer art c'est dire pour rien, dans le respect de ce rien. C'est le dé toujours hors table, hors compte, hors projet. D'une certaine façon le dé lui-même est chiffre de l'énigme : 7. Et il n'est pas nécessaire en cette espèce de cas d'art de comprendre quoi que ce soit aux chiffres, car comme le dit encore Rilke dans Les Carnets de Malte Laurids Brigge, mieux vaut ne pas trop leur accorder d'importance. D'autant qu'on n'en a jamais vu ailleurs que sur du papier, avez-vous déjà dit « Bonjour 7 » ? Seulement dans la série Le Prisonnier qui prenait soin de mettre le mot de « numéro » avant le chiffre, « Bonjour chez vous ». Et la série avait bien compris que les chiffres peuvent être une prison pour celui qui se contente de répondre sans essayer de sortir des limites du territoire, « je ne suis pas un numéro, je suis un homme libre » disait Patrick McGoohan à la fin du générique d'ouverture. Une vie comme une table avec ses bords que certains cassent ou que d'autres évitent avant de se casser sur les arêtes comme autant de bâtons dans les roues. Causer art c'est ce qui reste à raconter de la traversée du dé, mouvement au caractère parfaitement abstrait et concret. Voilà que le dé a tourné sur lui-même car en s'accordant à l'œuvre celui qui cause ne peut déroger à éliminer tout ce qui fait le jeu, de suivre le trajet inédit d'un geste fait de la main. Mais il ne peut pas non plus se contenter de dispositifs, autoroutes menant au but. La dualité est un mouvement existentiel, et l'art un « ici » qui n'a point d'arrêt. Causer art c'est ouvrir et fermer en même temps, juste des détours jetés dans le temps, et refuser l'unanimité d'un langage qui comme la table au profit d'un score instrumentalise et fige la compréhension. Ni moyen ni fin encore moins de rapport entre eux. Il faut craindre le langage, le but, et les projets sinon le compte est bon et tout est à refaire. Et c'est très fatigant de refaire, de redoubler le faire qui est toujours la contrainte de la politesse ou du salaire. Faire ou refaire ce n'est pas créer. Il y a une vingtaine d'années on disait dans les écoles d'art, « vous devez faire votre place », il y a une dizaine « vous devez créer une place ». Je crains qu'avec le temps créer se soit fondu dans le faire, avec tout ce que cela emporte de projection socio-économique, de réussite. Jabès rappelle que le poète est l'être qui a perdu sa place. Je me demande si le « ici » n'est pas le lieu même où qui que ce soit plutôt que quelqu'un s'amuse à faire des détours, n'est pas l'espace où flotte des 7 sans interroger leur destination. Car le poète ou le critiqueinstrumentiste ont un point commun c'est qu'ils se foutent hors de tout abri, ils s'exposent. « Ici, hors d'abri », encore Rilke. Ils connaissent la limite, raison pour laquelle ils n'ont pas besoin de faire, mais de faire exister une présence qu'aucun œil ne sera capable de voir, mais qu'une oreille quelconque sentira. Le bruit du passage d'un objet quelconque dans les airs ou bien les mots d'un autre poème de Rilke, l'histoire d'un poète qui a quitté la vallée du langage courant, Délaissé sur les flancs des montagnes du cœur. C'est du cœur aussi que l'on s'accorde.

Corinne Rondeau est Maître de conférences Esthétique et Sciences de l’art à l’Université de Nîmes, critique d’art, collaboratrice à La Dispute sur France Culture.


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rookie, dit-il maxime sanchez s’entretient avec diego bustamante Maxime Sanchez est un tout jeune diplômé félicité en juin dernier de l'Esban – École supérieure des beaux-arts de Nîmes. La définition d'artiste en poly-technicien, de Jacques Rancière, peut s'appliquer à ce symptomatique « émergent ». Au passage et rapidement, notons que si l'institution tente de réfléchir à « l'émergence », pour avant tout conserver son autorité sur ce qui est appelé la création, les jeunes artistes, réellement émergents, eux, n'ont que faire des structures au fonctionnement du siècle dernier. Poly-technicien donc, l'artiste qui poursuit « la révolution esthétique », si chère à Rancière, et dans une direction bien plus politique qu'il n'y paraît. « L'invention hic et nunc de formes du commun en écart par rapport aux formes dominantes reste aujourd’hui le cœur des pratiques et des idées d’émancipation. Et l’émancipation, hier comme aujourd’hui, est une manière de vivre dans le monde de l’ennemi dans la position ambiguë de celui ou celle qui combat l’ordre dominant mais est aussi capable d’y construire des lieux à part où il échappe à sa loi. » développe Rancière lors de sa conversation avec Éric Hazan parue aux éditions La fabrique sous le titre En quel temps vivons-nous ? Idée de l’émancipation en tête et témoin du dialogue de Maxime Sanchez avec Diego Bustamante – son condisciple de l'Esban – tentons d'articuler les racines du travail de ce nouveau profil à cerner. J.-P. G. Le hip hop me semble au centre de ton travail plastique. Comment serait lié le rap à l'art contemporain ? Je ne pense pas qu'il soit lié, c'est simplement qu'aujourd'hui le rap est la musique que nous écoutons le plus. Certains groupes font l'unanimité et touchent des classes sociales ou des profils que l'on n'aurait pas imaginé il y a encore 10 ans. C'est la nouvelle pop. Les Rae Sremmurd sont plus comparables à des rockstars qu'à des rappeurs, c'est cool comme évolution, même si les clichés persistent. Le rap est actuellement de plus en plus décomplexé dans les références entremêlant le spleen et « l'ego trip ». L’art est un moyen d'évoquer des anecdotes ou des constatations que je fais sur l'évolution de cette musique, qui est fondamentale dans ma vie. Une pièce est souvent le résultat d'une attention à un moment insolite ou en lien avec mes passe-temps, un moyen de parler de phénomènes de société et de mode. J'aime mettre l'accent sur des ressentis qui concernent ma génération. Aujourd’hui, par exemple, certains rappeurs émergents cachent leur visage et se livrent très peu, pour plusieurs raisons liées à l'éthique ou à la pudeur et très conscients de la précarité de leur statut. Je ne dirais pas que je rejoue les codes du rap ni ne fais d'anthropologie, je n'ai pas vraiment de recul sur tout ça, mais j'ai grandi avec, c'est ma culture avant d'avoir été confronté à celle des musées. Par la sculpture je me sens en bonne mesure de participer, comme je peux, à ce mouvement, tout en faisant plein d'autres choses à côté. Il y a encore quelques temps, faire du rap en province n'était pas aussi bien accepté que maintenant, ce n'était pas motivant : on devient alors un auditeur acharné et on développe son énergie ailleurs. Il ne faut pas grandir trop vite, l'époque que l'on vit est trop intéressante et il n'y a pas de musique décryptant aussi bien les situations d'urgence que le rap. En tant que jeune sculpteur, que souhaiterais-tu changer dans notre société, ou dans le monde de l'art ? Avant de changer quoi que ce soit, il faudrait que j'y appartienne à ce monde car je me sens plus dans le réel, que dans celui de l'art ; je sors juste de l'école. Ce que je fais devient sûrement de plus en

Raptorz (série). 2017 Parpaings, fers à béton, mortier, résine d’accroche, revêtement U-Pol Raptor.

plus politique mais je ne sais pas si cette voie offre des solutions. Il faut voir avec le temps. Pour le moment, je veux mettre en avant des sujets plutôt éloignés de l'histoire de l'art, je me sers de mon background. Je garde les pieds sur terre, même si ça peut paraître contradictoire avec des sujets comme le tuning, les indiens, les mangas ou encore les dinosaures. L'art est plus un exutoire quotidien qu'un métier, c'est un moyen de penser autrement les situations. Mais j'y trouve aussi un équilibre car les travaux alimentaires que je fais, souvent liés à la construction, me permettent de penser la sculpture de façon technique. Cela rend le travail physique plus agré-


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Roro. 2017 Or, plâtre, plastique, mastic, bois, rétroviseur. 30 cm x 15 cm x 18 cm.

-able, et si je fais du terrassement, par exemple, dans ma tête ce sera de l'archéologie. Tu traites du monde contemporain, et pourtant tu as réalisé des pattes de dinosaure et une œuvre que tu nommes Teepee... Les tipis ont été conçus quand j'ai vu un garagiste réparer, à l'aide d'un décapeur thermique, des bâches de transport routier trouées ; une technique que j'ai ensuite détournée dans la concrétisation d'une forme et d'une idée. La bâche de camion qui devient une toile de tipi pourrait être vue comme le trophée d'une attaque indienne contemporaine, s'en prenant directement à la marchandisation. On sait qu'au 19e siècle certaines bâches de charrettes américaines étaient faites de peaux de bisons, une pratique empruntée aux amérindiens qui utilisaient les peaux pour fabriquer leur habitat. Les pattes de dinosaure, elles, je les ai traitées avec une technique hydrographique empruntée au nail art, qui a ensuite été industrialisée dans le domaine du tuning automobile. J'aime l'opposition des contraires, la rencontre entre l'univers préhistorique et les nouvelles techniques do-it-yourself. Le chercheur d'or, rappeur, tuneur, dormant dans son tipi et s'échappant sur un radeau en PVC sont pour moi autant d'histoires qui finis-

sent en formes plastiques, mais ne seraient-ce des métaphores de ton ambition ? En d'autres termes, te nourris-tu de la force de ces personnes qui vivent entièrement de et pour leur passion ? Bien sûr, je me sens même très concerné et pas différent d'eux. Partir faire de l'orpaillage pour me fabriquer un grillz est une idée plutôt fantaisiste au départ, mais on entre dans un état passionnel, on cherche le « roro ». C'est une idée bling-bling mais qui peut être mise en relation avec le rappeur texan qui essaie de percer par le rap pour devenir riche et avoir de l’or plein les dents. L'art est un moyen de survoler certains sujets ou de les approfondir, on peut toucher à tout, rien n'est défini, on peut être maçon, orpailleur et coursier la semaine d'après. Je me nourris de beaucoup de choses souvent liées à des fictions, des faits divers ou des lifestyles inapplicables, mais j'aime me dire qu'artiste n'est pas un métier prédéfini et que la démarche ne repose pas sur les concessions. Je n'arrive pas à dissocier ma démarche de la distraction, c'est pour cela que je parle souvent de l'art comme une condamnation à la cogitation. Je sais que tu projettes dans tes pièces des valeurs sentimentales, comme avec le grillz qui était anecdotiquement lié à une personne qui t’était proche, si mon souvenir est bon. Quelle est la place des anecdotes dans ton travail ?


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Teepee (ensemble de 3). 2016 Bâche de transport en PVC soudé. 220 cm x 100 cm x 2 cm.

Elles sont très importantes, c'est souvent l'élément déclencheur. Que ce soit en famille, dans un club, dans la rue ou même dans un petit village reculé, beaucoup d'anecdotes et d’histoires – qu'elles soient tirées par les cheveux ou très probables – m'inspirent. Ma contribution est de les réinventer en formes plastiques, souvent de façon littérale. A titre d'exemple, les explorations de Robert Smithson sur les chantiers de Passaic où il est question d'alliance entre tyrannosaure et bulldozer figé par la boue, est un truc qui reste dans la tête. C'est comme une punchline accrocheuse, ou une description dans un roman de Ballard, c'est très imagé ; la science-fiction et le land art new-yorkais sont d'ailleurs souvent comparés. Je suis également fasciné par les personnages atypiques et leurs biographies, celles qui sont truffées d'histoires rocambolesques comme celles qui planent autour de Gucci Mane ou 21 Savage. Ça peut provenir aussi de personnages fictifs comme Onizuka (GTO), qui aura le pouvoir de se rendre réel de par sa personnalité marginale et son passé de bosozoku, même si sa création est issue du concept monomythe que l'on retrouve dans nombre de mangas. Si j'ai fait de l'orpaillage pour me faire un grillz, c'est en partie car je suis fasciné de sous-genres de rap comme le Dirty South et de ses déviations tel le Crunk ou la Trap et qu'en même temps je lisais des romans d'aventuriers et de chercheurs d'or infréquentables, pas très loin des rappeurs américains pour le côté consumériste, remplis d'his-

toires improbables sur les serpents, la drogue ou les coups de feu... Ces histoires de par leurs narrations brutes pourraient s'apparenter à certains storytellings rapologiques. Tous les jours j'apprends des trucs dérisoires, que ce soit sur les réseaux sociaux ou dans la vie courante, à travers la musique et ses chroniques spécialisées. Je me sers de tout ça. Les sculptures qui en découlent ont plein de choses à dire : ce n'est pas anodin si Roro est une sculpture semi-figurative, l’expression d’un cri. Si mes pièces sont bavardes c’est qu’elles sont bien sujets à m'exprimer. La couleur est très présente dans ton travail, quel rôle remplit-elle ? La couleur c'est la décomplexion totale, c'est un kiff de fabriquer en crépi un fragment de stégosaure violet, rose et jaune avec comme modèle les figurines de chez Tati. Je viens du graffiti, la couleur y est très importante si l'on pratique le Wildstyle ou même d'autres typologies. Plus jeune, dans la rue, j'ai eu des chocs visuels en voyant des associations de couleurs dans certains lettrages. Beaucoup de mes sculptures sont traitées à l'aérosol, c'est un cache-misère, le résultat est immédiat. Le spray remplit une tâche, celle de l'uniformisation en un temps record. Je fais souvent une composition de divers matériaux assemblés, la couleur vient relier une deuxième fois l'ensemble. Je tiens vraiment à trouver la similitude avec l'objet


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Stégosaure. 2017 Pelle, versoirs de charrues, cardan, fer à béton, crépi, mousse polyuréthane. 190 cm x 80 cm x 65 cm

industriel, d'où l'hydrographie qui, en plus de la couleur, permet l'application d'un motif. La façade, le masque sont des choses qui t'intéressent. Pourraistu nous en dire plus ? Le masque, c'est un truc super actuel. Ce qui est intéressant, c'est l'utilisation d'un tel objet dans la vie courante ; en Europe on commence à voir le masque antipollution des cyclistes, ou ceux des touristes asiatiques. Comme je te l'ai dit, les chanteurs dissimulent leur visage derrière différents types d'objets, ce qui pourrait devenir une nouvelle tendance après la résurgence du grillz. Tu as vu qu'au concert de Kekra, des anti-poussière avaient été distribués au public, ce qui a contribué à décontracter la salle et à plonger les spectateurs dans une expérience collective. Le masque n'est pas forcément un objet, on voit de plus en plus d'exemples de personnes médiatisées qui ne répondent plus aux interviews et ne font pas de featurings, c'est le cas de PNL, tout est dans les textes. Ça peut aussi passer par le simple fait de porter des lunettes de soleil en permanence, c'est une forme de protection publique et on est plus à l'aise pour parler et pour affronter l'autre. J'ai toujours été fasciné par les personnages qui cachent une double identité comme Ken Kaneki, Usopp masqué devenant Sogeking, les super-héros tel Batman…

Des pratiques comme le cosplay ou même le tuning, sont aussi des modes de dissimulation. Même si à première vue une voiture augmentée paraît très ostentatoire avec ses extensions, l'une des premières opérations du propriétaire consiste à cacher son origine en enlevant le logo par un travail de carrosserie, après ça, elle n'appartient plus à PSA et trouve sa propre identité hybride via des pièces d'autres modèles. Le crépi aussi peut être considéré comme une matière masquante et uniformisante : on cache le côté brut des parpaings en ajoutant un choix de peaux très variables. Je sais que tu regardes beaucoup de films et de séries. Existe-t-il un rapport entre ces formes et tes sculptures ? Oui je pense que comme beaucoup de jeunes ayant grandi dans les années 90, les productions HBO, les blockbusters américains m'ont bousillé, dans le bon sens du terme. Je peux parfois m'en inspirer mais ça peut arriver avec des films moins « grand public », plus pointus. Herzog, Kramer, Marker sont pour moi des réalisateurs très importants dans la façon qu'ils ont d’envisager comme une mission de montrer le monde. Maxime Sanchez. bosozoku – Arc Romance Dawn Galerie Vasistas, Montpellier. 27 octobre - 9 décembre 2017


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supports refont surfaces carré d’art, nîmes (30) En septembre 1970 a lieu au Musée d'Art Moderne de la Ville de Paris une exposition intitulée Supports/Surfaces. Ce nom, choisi par les artistes va désigner un groupe qui transformera durablement les pratiques artistiques en France. Sous cette appellation exposent ensemble au début des années soixante-dix André-Pierre Arnal, Vincent Bioulès, Louis Cane, Marc Devade, Daniel Dezeuze, Noël Dolla, Toni Grand, Bernard Pagès, Jean-Pierre Pincemin, Patrick Saytour, André Valensi et Claude Viallat. Les artistes ainsi rassemblés vont incarner une des dernières avant-gardes, contemporaine des mouvements comme l'Arte Povera en Italie ou le Land Art américain. Singularité du mouvement durant cette période, les artistes se réclament pour la plupart du champ pictural – à l'exception de Bernard Pagès et de Toni Grand – bien que les œuvres déstabilisent le spectateur alors habitué aux toiles tendues sur châssis. L'exposition Supports/Surfaces. Les origines 1966-1970 – pensée par Romain Mathieu – montre la constitution de ces démarches au cours des années soixante, jusqu'à l'apparition du groupe. Comprendre ce mouvement à la fois important et éphémère que fut Supports/Surfaces nécessite de se replonger dans ces années de recherches, de confrontations et d'oppositions. Ces quatre années sont celles d'une extraordinaire effervescence artistique au sein d'une période de contestations sociales et politiques puisque traversée en son milieu par mai 68.

Vincent Bioulès. Issanka, 1969. Acrylique sur toile. Photo Yves Bresson/Musée d’art moderne et contemporain de SaintEtienne Métropole. © ADAGP, Paris, 2017

CLaude Viallat. N° 024, 1966. Colorant sur toile, recto-verso. Collection Henriette Viallat. © ADAGP, Paris, 2017

Reprendre cette histoire à son début permet de porter un regard inédit sur le mouvement. Cette histoire commence avec la mise en crise, voire la mise en pièce littérale du tableau de chevalet, opérée par des artistes qui, peu après leur sortie des Beauxarts, s'affranchissent de l'héritage de l'École de Paris et s’intéressent aux abstractions américaines alors peu connues en France. Cette remise en cause est alors partagée par différents artistes comme Pierre Buraglio, Jean-Michel Meurice, ou encore François Rouan et Michel Parmentier dont les travaux resteront proches du groupe Supports/Surfaces pour les premiers ou s'éloigneront vers d'autres directions pour les seconds. Ce moment fondateur se matérialise en particulier lors de l'exposition Impact en 1966 organisée par Claude Viallat à Céret. Au cours des années suivantes, les démarches des artistes s'affirment en même temps que se nouent les premières solidarités aux environs de Nice et Montpellier : ce sont notamment les expositions en plein air dans le sud de la France qui réunissent d'abord Daniel Dezeuze, Bernard Pagès, Patrick Saytour et Claude Viallat. Ces rapprochements s'opèrent aussi dans une confrontation avec le Nouveau Réalisme. Alors que le Pop Art domine la scène de l'art et que le multiple sérigraphique d'Andy Warhol apparaît comme un dépassement de la peinture, les artistes de Supports/Surfaces opèrent une forme de renversement qui propose un nouveau développement de la peinture. A l'opposé de la fascination industrielle des trente glorieuses, Supports/ Surfaces présente un mouvement à rebours qui s'accompagne d'un intérêt pour des gestes premiers de transformations, pour des matériaux et objets traversés par l'usage et finalement pour une pratique buissonnière de la peinture. Réunissant des œuvres majeures de cette période, certaines n'ayant pas été montrées depuis, l'exposition restitue les grands questionnements mis en jeu dans les différentes réalisations : crise du tableau, confrontation aux Nouveaux Réalistes et à une certaine mort de la peinture, exposition en extérieur, déploiement des œuvres dans l'espace, importance de l'objet et de sa manipulation. Elle entend faire émerger un nouveau regard sur ce mouvement en se focalisant sur ces années traversées par une véritable jubilation liée à une volonté des artistes de réinventer leur pratique. Carré d’Art, Nîmes. Supports/Surfaces. Les origines 1966-1970. Commissariat de Romain Mathieu. 13 octobre - 31 décembre 2017


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Supports/Surfaces. Les origines 1966-1970 Carré d’Art, Nîmes. 13 octobre - 31 décembre 2017


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Vue de l’atelier de Guillaume Rojouan à Borderouge (Toulouse). © Maison Salvan

Paul de Sorbier, directeur de la Maison Salvan, peu enclin à la réunionite supposée prospective, opte pour le présent et l’action et, pour faire focus sur une scène locale, tente un nouveau mode de rencontre tant entre l’œuvre et le public qu’entre les artistes eux-mêmes. La balle est dans leur camp. Partageant le même atelier du quartier Borderouge à Toulouse, plusieurs artistes acceptent donc le projet d’une exposition qui se donnera à voir selon quatre états successifs. À partir d’une exposition solo de Guillaume Rojouan, chacun à leur tour, Pauline Zenk, Sophie Bacquié et A4 Putevie, viendront rendre toujours plus collective la proposition. Outre le souhait d’insuffler du « jeu » dans le commissariat, le projet rejoue, à l’aune de l’exposition, les porosités inhérentes à la promiscuité de l’atelier. Déborderouge se donnera donc à voir comme un seul et même projet au travers de quatre séquences successives. Il ne s’agit pas de proposer un mouvement permanent par un déplacement bouillonnant de l’espace de l’atelier mais un entre-deux : plusieurs situations d’une seule et même exposition. Les quatre artistes impliqués dans ce projet véhiculent une pratique qui, directement, documente le réel, le malaxe et le digère. Leurs œuvres découlent parfois de sources tangibles qu’elles soient journalistiques ou historiques. Avec Guillaume Rojouan et Pauline Zenk, les peintures puisent dans des supports, des images existantes, des archives. Ils travaillent avec ces données pour, semble-t-il, les oublier, les rendre caduques ou inopérantes et les conduire ailleurs. Les œuvres de Sophie Bacquié racontent les lieux, travaillent la perspective de bâtiments ou de paysages de manière contemplative et racontent des paysages où la trace de l’homme est là : il agit, par construction ou abandon, sur les environnements. A4 Putevie propose des dessins qui semblent relever d’une forme d’instantanéité. Non exempts de poésie sombre, ils semblent insolés

par une énergie écorchée, une colère face à une frange du réel fait de domination, d’humiliation, de violence sociale et politique. Intervenant en dernier dans le projet, il mettra à profit la dimension instinctive de sa pratique pour réagir aux œuvres des autres artistes, en travaillant en atelier, en parallèle des trois premiers états de « Déborderouge ». Au-delà du lancement du projet par le premier vernissage le mercredi 15 novembre, trois autres rendez-vous permettront d’appréhender les différents temps de l’exposition : les 22, 29 novembre et le 6 décembre 2017. Maison Salvan - Labège (31) Déborderouge Guillaume Rojouan, Pauline Zenk, Sophie Bacquié, A4 Putevie 15 novembre - 23 décembre 2017


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la panacée, saison 3 montpellier (34) Jusqu’au 14 janvier 2018, La Panacée accueille son troisième cycle d’expositions simultanées, toujours sous la direction de Nicolas Bourriaud. Tout d’abord, une monographie consacrée à Jacques Charlier. En fait, une rétrospective – la première de celui-ci en France. L'artiste belge est l'un des pionniers de l'art conceptuel européen auquel il a intégré l'humour et la bande dessinée, mais également la vie professionnelle et le rock – il a sorti plusieurs albums postpunk à la fin des années 1970. Partant d'une sociologie critique du monde de l'art, Jacques Charlier a évolué vers un art complexe et inclassable, qui évoque l'esprit de Francis Picabia tout en anticipant sur l'art américain des années 1990 et notamment Mike Kelley. Son œuvre porte un éclairage décisif sur les rapports entre l'Europe et les Etats-Unis dans les années 1960, avant de se prolonger vers une totale excentricité par rapport à l'art de son temps. Ci-contre : Jacques Charlier. Problème de mur, (extrait-photo1), 1974. Courtesy J. Charlier

Une seconde monographie, intitulée Là-bas., présente 3 projets récents de Saâdane Afif. Ce dernier pratique un art de la traduction, navigant d'une discipline à une autre : ses œuvres sculpturales deviennent des poèmes écrits par de multiples auteurs, interprétés à leur tour par de multiples musiciens. Brouillant les frontières de l'art, Saâdane Afif crée une esthétique de la collaboration et interroge d'une manière ludique la question de l'unicité de l'œuvre, les siennes fonctionnant comme des chaînes de coopération, des chambres d'écho. Ci-contre : Saâdane Afif. Là-bas., 2014. Vue d'exposition Doable, Sayable, Thinkable, 8th Berlin Biennial for Contemporary Art Museum Dahlem, Berlin. Crédit photo : Katharina Kritzler. Courtesy Saâdane Afif

Enfin, une exposition thématique – Plurivers. Quatre études d'ethnologie imaginaire – travaillant la question : les musées archéologiques relèvent-ils de la fiction ? L’exposition présente quatre artistes qui élaborent, illustrent et commentent des civilisations imaginaires – tel l'écrivain argentin Jorge Luis Borges dans sa nouvelle Tlön Uqbar Orbis Tertius – remettant ainsi en cause les certitudes qui fondent nos systèmes de pensée et de perception. Avec des œuvres de Mai-Thu Perret, Iman Issa, Norman Daly, Charles Avery Ci-contre : Iman Issa (née en 1979, vit et travaille au Caire et à New York). Heritage Studies #20, 2016. Bronze, socles en bois peint, texte vinyl sur mur. Courtesy Carlier / Gebauer, Berlin

La Panacée - Montpellier (34) Monographie de Jacques Charlier – Rétrospective 60-80 / Monographie de Saâdane Afif – Là-bas. / Exposition thématique Plurivers. Quatre études d'ethnologie imaginaire avec des œuvres de Mai-Thu Perret, Iman Issa, Norman Daly, Charles Avery Les 3 expositions : 14 octobre 2017 - 14 janvier 2018


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Maxime SANCHEZ bosozoku Arc Romance Dawn 27 octobre – 9 décembre 2017

Galerie Vasistas 37 avenue bouisson bertrand – montpellier / du mercredi au samedi 15h – 18h30


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acturama mrac, sérignan (34) - fondation espace écureuil, toulouse (31) - crac, sète (34) Pour cet automne le Mrac annonce deux expositions monographiques d’envergure : la première, consacrée au lauréat 2005 du Turner Prize, Simon Starling et la seconde, à l’artiste français Maxime Rossi. Depuis une quinzaine d’années, Simon Starling développe une pratique artistique contextuelle, articulée autour d’une situation géographique, écologique, historique ou artistique. Son penchant pour la mise en scène du voyage, le place dans la lignée d’artistes tel Robert Smithson. S’appuyant sur les notions de déplacement géographique et symbolique, il définit des protocoles empreints d’une certaine mélancolie, permettant de relier territoires et temporalités différents. Conçue en tant que « passage à travers l’espace », la sélection d’installations récentes présentée explore le thème de la mémoire et de l’invocation aux morts en s’appuyant sur des récits et des univers sonores réalisés en collaboration avec musiciens et compositeurs. Provocateur, désireux de révéler les rouages de situations en apparence anodines, Maxime Rossi, lui, s’inspire dans son travail de télescopages entre univers qui n’ont a priori rien à voir entre eux. Le projet Christmas on Earth Continued, conçu spécifiquement pour cette exposition, se présente comme un thriller psychédélique de contre-cultures sixties... Ci-contre : Simon Starling et Graham Eatough. Performance At Twilight, Holmwood House, Glasgow, 2016. Photo Alan Dimmick Courtesy de l’artiste et du Modern Institute/Toby Webster Ltd., Glasgow.

Mrac – Musée régional d’art contemporain Occitanie - Sérignan (34) Monographie de Simon Starling et Christmas on Earth Continued, projet de Maxime Rossi. 4 novembre 2017 - 28 janvier 2018

« Du temps que nous donnerons à cette exposition, nous serons transportés dans un ailleurs. Nous serons dans l'interstice, là où l'œuvre prend sens. Là où, dans Etat des lieux, le lieu, vidé de sa fonction de vie, nous regarde de son œil unique. Là où, dans Insomnies, le poivrier qui apporte le sommeil remplace le corps absent du dormeur. Là où D'un soleil à l'autre, l'énergie solaire bruisse au fond des caves ? Rien n'est là dans sa fonction initiale. Alors émane de chacun de ces déplacements la force de l'imaginaire ; de celui qui fait, de celui qui regarde. » Ci-contre : Stéphane Thidet. Extrait de « Etats des lieux », 2009

Fondation Espace Écureuil - Toulouse (31). Stéphane Thidet. 15 septembre - 11 novembre

Une tempête. Le fracas du tonnerre. Des éclairs. William Shakespeare

William Shakespeare n’a besoin que de ces quelques mots pour évoquer la violence de la tempête qu’il campe dès l’ouverture de sa pièce éponyme. Résonne alors en nous cette peur mêlée de fascination que nous éprouvons face aux éléments qui, soudainement, se déchaînent. La tempête dans un crâne, dans un verre d’eau, éblouissante, intime, bouleversante, destructrice, source de vie, d’envies et de peurs… C’est autour de ces quelques notions que s’est articulé le choix des artistes, de leurs œuvres, pour faire de cette exposition un « événement indéfinissable » écrit l’artiste Hugues Reip, commissaire de cette exposition qui rassemblera une quarantaine d’artistes dont nombre – comme lui – ont déjà exposé au Crac. Ci-contre : Hugues Reip. La Tempête, film d'animation N&B, 2007. Collection Frac Corse, Corte

Crac – Centre régional d’art contemporain Occitanie - Sète (34) La Tempête. Exposition collective. Commissariat de Hugues Reip 25 novembre 2017 - 11 mars 2018


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a-chroniques benoist bouvot

Sabotage. Ne me dites jamais « vas-y, mets du son ! » Il y a sans doute trop de réponses un peu partout pour ne pas commencer ou recommencer à se poser quelques questions. Quand on glisse un sabot dans un engrenage on le bloque, mais pourquoi vouloir bloquer une chose qui fonctionne ? Les ordinateurs nous ont fait jouer en place, chanter juste, générer des sons inouïs, ils ont en grande partie offert l'inverse de ce que toute la pratique musicale a toujours donné. Il n'est pas question de savoir si c'est « bien ou mal », mais plutôt ce que ça génère. Avant l'arrivée des DAW (digital audio workstation) et de leur accessibilité, les musiciens se sont caractérisés par leur impressionnante capacité à tendre vers la perfection rythmique, harmonique et mélodique en pratiquant la répétition, pour finalement se démarquer de ce désir de sommets glacés par leurs échecs. Des échecs qui, comme des portes invisibles, ont donné à l'ensemble le relief que la lumière crue du perfectionnisme aurait aplati sans les obscures, mais salvatrices, occurrences du raté. La musique numérisée et sa pratique numérique ont la capacité de la répétition parfaite et le réflexe de dégager ce long chemin de l'apprentissage technique de l'instrument, pour le remplacer par une voie dirigée vers la création et l'épanouissement personnel du créateur, incorporant même dans son vocabulaire personnel le glitch (défaillance électronique ou électrique qui correspond à une fluctuation dans les circuits électroniques ou à une coupure de courant). Tout comme les improvisateurs incorporent l'accident dans leur jeu, le doute électronique devient un élément de langage, au risque de faire du musicien non pas le marcheur avide de sonorités singulières et complexes mais l'ouvrier blasé qui parfois, faute d'attention, construit un mur sans fenêtres. Aujourd'hui, d'un point de vue tout à fait superficiel on peut avoir l'impression que certains musiciens pensent qu'en poussant une commande, le son sort, sans s'être posé la question essentielle de la genèse de celui-ci. Est-il bien raisonnable de ne pas connaître la mécanique humaine qui a rendu possible la présence cet événement sonore derrière sa commande ? Ce souci de la connaissance du matériau a-t-il une importance pour la réalisation d'une pièce musicale ou sonore ? On a longtemps parlé d'acousmatique, une musique dont les sources sont cachées, qui ne donne pas de rapport visuel immédiat avec la création sonore, une magie du son pour lui-même. Mais quand on arrive à un moment où les autoproclamés compositeurs se définissent eux-mêmes comme arrangeurs de sons – sons dont la provenance n'est souvent pas connue quand elle n'est pas tout simplement un élément industriel utilisé comme on saisit l'objet à proximité – est-on totalement dans l'expérience du timbre, une plongée dans la matière sonore pour ce qu'elle a de sensible, ou

sommes-nous simplement dans un geste las, voire fainéant, qui essaye d'aller au plus vite à l'essentiel ? Mais a-t-on une idée de l'essence ? Rencontre-t-on de nouveaux Ravel soucieux de la rencontre des timbres avec l'architecture de l'ensemble ou sommes-nous condamnés à un monde d'horlogers, programmateurs aveugles qui assemblent des pièces de plus en plus grosses sans en connaître leur constitution ? Pour assombrir le ciel, au moment où les questions d'argent entrent en jeu, à la manière des vendeurs d'armes, beaucoup se soucient peu de la provenance comme de la destination de ce qu'ils manipulent et produisent. Une marche militaire serait aussi harmonieuse à leurs oreilles que le Requiem de Fauré si jamais ils peuvent en tirer leur compte. Le plus grand malheur d'une partie de la musique est alors lié au fait qu'à un moment elle rapporte de l'argent, peu importe ce qu'elle génèrerait. A quoi ressemble un sabot musical aujourd'hui, avec ou sans ordinateur ?

Sabotage I can't stand it I know you planned it I'm gonna set it straight, this watergate I can't stand rocking when I'm in here Because your crystal ball ain't so crystal clear So while you sit back and wonder why I got this fucking thorn in my side Oh my God, it's a mirage I'm tellin' y'all it's sabotage So listen up 'cause you can't say nothin' You'll shut me down with a push of your button? But yo I'm out and I'm gone I'll tell you now I keep it on and on 'Cause what you see you might not get And we can bet so don't you get souped yet You're scheming on a thing that's a mirage I'm trying to tell you now it's sabotage Why; our backs are now Listen all of y'all it's Listen all of y'all it's Listen all of y'all it's Listen all of y'all it's ...

against the wall a sabotage a sabotage a sabotage a sabotage

Beastie Boys, « lll communication », 1994.


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silhouette dominique r ochet

The Get Down S weat-shirt tingdean B azaar, weat-shirt et jogging baggy à impression impression 3D de chez Rot Rottingdean azaar, la marque marque arty arty de James Theseus B uck et Luke Luke B r ooks et tennis en toi le de laine côtelée.


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la dramatique vie de marie r. marie reverdy

Il est des moments, dans la vie, où l'on a du mal à dire… Des moments pendant lesquels l'émotion l'emporte sur notre capacité à comprendre la situation… C'est ainsi que l'on tire sa révérence, que le rideau tombe, et que nous devons quitter un monde pour revenir au réel en signant la fin du spectacle. Baudelaire, dans Le rêve d'un curieux, avait fait du tomber de rideau le signe de la mort, la fin de la cynique farce, car : J'étais comme l'enfant avide du spectacle, Haïssant le rideau comme on hait un obstacle... Enfin la vérité froide se révéla : J'étais mort sans surprise, et la terrible aurore M'enveloppait. – Eh quoi ! n'est-ce donc que cela ? La toile était levée et j'attendais encore.

J'attendais encore… sans faire de bruit, au lieu d'applaudir à tout rompre dès le noir venu. Mais je me sentais seule parmi le retentissement des mains qui s'entrechoquent. « Étrange angoisse que de ne pas supporter que la fin existe, et qu'elle ressemble à la nuit et au silence », me dis-je. Je vis un peu la même chose au cinéma lorsque, dès la dernière image, les corps se lèvent, les bouches éructent, toussent, parlent, commentent, rigolent, niant au générique son droit à l'existence. Mais pour le moment je suis dans la salle, face à la scène plongée, tout comme nous, dans le noir, pour quelques secondes de flottement exquis qui précède la lumière totale. Ce n'est qu'à ce moment, pour ma part, que je commencerai à applaudir, pas avant, car je sais que la fin viendra se contredire, et que tout finit toujours par des saluts. En effet, l'étymologie du mot salut nous rappelle que ceux-ci viennent compléter la proposition et achever l'œuvre. Le latin salvus, littéralement « entier, intact », nous donnera autant les saluts que la santé. Tout va bien, si Hamlet est mort, le comédien, lui, est sain et sauf ! Car il s'agit bien de cela, de la frontière entre fiction et réel, celle à travers laquelle le comédien refait surface et se présente à nous en tant que lui-même, après avoir quitté son personnage. Pas de représentation sans clôture qui en signale l'entrée et la sortie, mais un petit sas de décompression possible pour se remettre du voyage, couronné d'une révérence. Le salut est alors un signe extratextuel de la représentation et de l'art du comédien. Les performeurs, eux, ne saluent pas, puisque leur œuvre ne consiste pas en l'incarnation d'un personnage. Dans Et Balancez mes cendres sur Mickey, tous les comédiens étaient venus saluer, à leurs côtés les figurants, exception de la jeune fille qui avait été tondue en avant-scène, soulignant ainsi sa qualité de performeuse et non de comédienne. Absence significative, puisque notre œil de spectateur n'avait pu s'empêcher de voir, dans cette tonte, la référence histo-

rique de la Libération. Par l'absence de salut de la jeune fille, nous comprenions que le geste de la tonte échappait au jeu de comédien, qu'il ne racontait rien d'autre que lui-même, et que la référence historique ne résidait que dans notre réception de spectateur, située en dehors de l'œuvre, dans notre connaissance commune de l'Histoire. C'est fin, c'est malin, tu vas vraiment nous manquer Rodrigo. Au crépuscule des idoles, comme dirait Nietzsche, j'attends encore, dans le silence. Car je sais que pour tout comédien il y a un ailleurs, une retrouvaille, au moins un salut. Je ne vais pas essayer de taper des mains pour conjurer l'idée de fin. J'essayerai peut-être lorsque je serai au seuil du tombeau. Qui sait ? Peut-être que ça marche ? Mais pour le moment, je la savoure cette fin, et je m'éclipse à pas de loup, vous souhaitant Salut et Santé !!!


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i’m back laurent goumarre

« Etes-vous triste ? » C’est la première chose que j’ai vue pendant trois ans, ou quatre, quand j’ouvrais les yeux le matin : « Etes-vous triste ? », en trois fois, dans une œuvre de Sophie Calle. A gauche, la photographie carrée d’une nappe-papier de bistrot avec, écrit en bas en manuscrit – comme on prend des notes à la va-vite ou alors sans y penser pendant une conversation au téléphone – deux fois cette phrase : « Etes-vous triste ? » A côté, à droite, dans un format carré plus petit, encadré blanc, le texte d’une liste de questions auxquelles on répond avant un examen de santé finissait par cette ultime interrogation « Etes-vous triste ? » Le matin, c’était ça que j’avais devant les yeux : « Etes-vous triste ? » trois fois face au lit, au-dessus d’une commode blanche USM Haller. J’ouvrais les yeux : « Etes-vous triste ? », et le soir pareil, c’était la dernière chose que je voyais avant de les fermer. Au-dessus, plus à droite encore, j’avais accroché le dessin noir et blanc et gris d’un gisant sous la neige, le dessin d’une bûche aux formes humaines recouverte de neige, une œuvre sur papier d’Hippolyte Hentgen. Et puis dessous exactement, posée sur le radiateur, une photographie noir et blanc de moi prise pour une série de mode dans le magazine encens : je suis assis, en costume noir et blanc Dries Van Noten, je fais vraiment mon âge, je suis vieux, je suis mort, je ne me suis jamais vu comme ça. Et bien c’est ça une collection, ne pas se voir comme ça. Alors que partout ailleurs chez moi, au salon, dans le bureau, cuisine, salle de bains, partout, dans les placards, des nichons côtoient des bites et des couilles, que des naturistes caressent des petits chats ou achètent du yaourt à poil au rayon frais d’un supermarché du Cap d’Agde, que la peinture a la forme d’un mur de briques, que des paillettes éclaboussent des Saint Laurent Paris période Slimane ou ruissellent de paysages de cartes postales tendance restau chinois... bref, alors que tout ça sent le kitsch, le faux, le foutre, là, face à mon lit, il y avait un gisant, un type vieux en costume, et une question, qui, pendant trois ou quatre ans m’ont regardé me réveiller et m’endormir. Jusqu’au jour où je finirais bien par comprendre que j’avais là, devant les yeux, l’inconscient de tout le reste, ce kitsch, ce faux, ce foutre. Il y a donc des œuvres que je regarde couché, je lève les yeux sur elles qui me regardent de haut, à moins qu’elles ne me protègent. Ce sont celles-là qui disent la vérité. Pendant trois ou quatre ans, elles ont posé la question : « Etes-vous triste ? » sans attendre de réponse. Aujourd’hui je me réveille et m’endors devant la photographie noir et blanc d’une cascade à gauche, la photographie d’une toile de sac bleu dépliée/épinglée comme une carte monochrome à droite. Et tout à côté du lit, au niveau de l’oreiller, je viens tout juste d’accrocher la photographie d’un naturiste en baskets qui caresse deux adorables petits chats dans une clairière. J’ai le sentiment que ça va mieux. Laurent Goumarre est critique d’art, journaliste et producteur de l’émission Le nouveau rendez-vous sur France Inter du lundi au jeudi de 22h00 à minuit


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addenda languedoc montpellier - 34 Galerie Vasistas 37 avenue Bouisson Bertrand bosozoku – Arc Romance Dawn Maxime Sanchez 27 octobre - 9 décembre 2017 Iconoscope 25 rue du Courreau Friture sur la ligne Hippolyte Hentgen 15 septembre - 23 décembre 2017 La Panacée 14 Rue de l'École de Pharmacie Expositions monographiques Rétrospective 60-80 Jacques Charlier Là-bas Saâdane Afif Exposition thématique Plurivers Mai-Thu Perret, Iman Issa, Norman Daly, Charles Avery 14 octobre - 14 janvier 2018 Mécènes du Sud MontpellierSète 13 rue des Balances Simulation(s) Vincent Broquaire, Alex McLeod, Paul Souviron Commissaire : Philippe Riss-Schmidt 8 septembre - 15 décembre 2017

nîmes - 30 Carré d’Art Musée d’art contemporain Supports/Surfaces. Les origines 1966-1970 Commissaire : Romain Mathieu 13 octobre - 31 décembre 2017 CACN – Centre d’Art 25 rue Saint-Rémy Topologie de l’absence Caroline Bach, Anaïs Boileau, Audrey Guiraud, Guillaume Le Moine, Eric Tabuchi... 7 octobre - 16 décembre 2017 sérignan - 34 MRAC Musée régional d'art contemporain Occitanie Simon Starling Maxime Rossi 4 novembre - 28 janvier 2018 sète - 34 CRAC Centre régional d'art contemporain Occitanie La Tempête / Exposition collective Commissariat d’Hugues Reip 25 novembre - 11 mars 2018 MIAM Le carnaval des yeux Carmelo Zagari 13 octobre 2017 - 11 mars 2018

midi-pyrénées labège - 31 Maison Salvan 1 rue de l’Ancien Château Déborderouge Guillaume Rojouan, Pauline Zenk, Sophie Bacquié, A4 Putevie 15 novembre - 23 décembre 2017 saint-gaudens - 31 Chapelle Saint-Jacques Le grand atelier Carl Hurtin 23 octobre - 2 décembre 2017

toulouse - 31 Lieu Commun Brico-Drama Thomas Bigot, Laura Freeth, Stéphane Castet, Pierre Mersadier, Yannick Papailhau, Didier Hébert-Guillon 30 septembre - 28 octobre 2017 Julien Tardieu 17 novembre - 23 décembre 2017 nègrepelisse - 82 La Cuisine – Centre d’art et de design Contrairement au gibier Collectif Rovo 7 octobre - 21 janvier 2018

toulouse - 31 Fondation Espace Écureuil 3 Place du Capitole Stéphane Thidet 15 septembre - 11 novembre 2017 L’art de la discrétion 24 novembre - 24 février 2018 Les Abattoirs – Frac Occitanie Toulouse 76 allées Charles-de-Fitte Medellin, une histoire colombienne 29 septembre - 14 janvier 2018 Hessie, Survival art 29 septembre - 4 mars 2018 Mezzanine Sud 15 décembre - février 2018

provence arles - 13 Fondation Vincent van Gogh La Vie simple – Simplement la vie Commissaire : Bice Curiger 7 octobre 2017 - 2 avril 2018 saint-rémy-de-provence - 13 Musée Estrine Whisky et Tabou Carte blanche à Moly-Sabata Commissaire : Joël Riff 13 octobre - 26 novembre 2017


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