République Centrafricaine 1984 par Jocelyne

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VOYAGE EN RÉPUBLIQUE CENTRAFRICAINE en 1984

Auteur : Jocelyne Pruvot


Du 3 Octobre au 7 Novembre 1984 A l'époque, existait "le Point de Mulhouse" et tout le monde savait qu'ils organisaient des circuits hors du commun, proche de l'expédition. C'est une bande d'amis avec qui je voyageais à cette époque qui m'a lancée là-dedans.

Notre circuit s'appelait "Délivrance"


On est arrivé à Bangui, capitale de la République Centrafricaine, et on est parti en pirogue à moteur sur la rivière Lobaye, qui marque la frontière avec le Zaïre. Arrivés dans un petit village, on y a laissé le gros des bagages, et on est parti, sac à dos, et tentes canadiennes, marcher pendant cinq jours, à la rencontre des pygmées. On était accompagnés de guides et de porteurs. Oui c'était un véritable expédition en Afrique. On montait les tentes à côté des villages pygmées. Ils venaient nous voir, on allait les voir. On s'observait, eux et nous, sans se parler. Non, il n'y a pas eu de grosses bêtes, mais des petites : les moustiques et les foumis qui grimpent à toute vitesse dans le pantalon. Et la pluie : on marchait sous la pluie, on attendait la pluie chaque nuit en sachant que l'eau rentrerait par les coutures de la tente qui n'étaient pas hermétiques. On dormait avec des somnifères pour pouvoir marcher le lendemain. Ce voyage au pays des pygmées était le but de l'expédition. Un contact avec l'une des populations les plus intactes du globe, en tout cas, la plus ancienne d'Afrique. Les Pygmées étaient méprisés par leurs concitoyens centrafricains, considérés comme une tare dans un pays qui s'efforçait de rattraper le retard technologique. De cette population, je ne connaissais à Paris qu'une chose : un disque OCORA intitulé "Anthologie de la Musique des Pygmées Aka", enregistré entre 1972 et 1977 au temps de l'empire centrafricain. Ces chants, qui sont basés sur une technique vocale du Yodel, m'avaient fascinée par leur beauté et leur originalité. Et je rêvais d'aller entendre de tels chants sur place. En plus, une rencontre avec une population vivant encore comme il y a deux mille ans (quoique de plus en plus des relations de travail s'établissent entre les Africains et les Pygmées - et souvent de maîtres à serfs. Surtout une population qui est restée en contact permanent avec la Nature, la forêt vierge, primaire, qui existait aux premiers temps du Monde. Contact que nous allions vivre au cours de ce voyage et qui ne fut pas l'un des côtés les moins enrichissants.



DÉPART DE PARIS Lundi 22 Octobre 1984 22 hres. Porte d'Orléans, devant la statue du Général Leclerc, un bus de l'Association "Le Point de Mulhouse", m'attend, et est déjà presque rempli. Nous allons tous à Lyon, pour prendre un vol charter, très tôt demain matin, en direction de Bangui, en République Centrafricaine. Le bus est presque entièrement rempli d'Africains. J'ai déjà l'impression d'être en vacances, d'être déjà en Afrique. 22 h 30, le bus démarre. je fais connaissance d'une joyeuse bande de jeunes Centrafricains qui s'amusent comme des fous. Ce sont des jeunes qui ont fait leurs études au Lycée français André Malraux de Bangui, et sont venus poursuivre leurs études universitaires à Paris. Maintenant ils retournent dans leur pays. "On n'est pas bien à Paris" me dit l'une des filles... "Il fait trop froid". Le bus va rouler toute la nuit en s'arrêtant deux fois une demie heure. Il va mettre six heures pour arriver à Lyon. Evidemment je n'arrive pas à dormir. On arrive à l'aéroport de Lyon, il est 4h 30 du matin. L'avion doit décoller à 9 hres ! A Lyon je retrouve les amis venant de Strasbourg, avec qui je pars faire ce voyage : Roselyne, Bertrand, Claude, François et Micheline. Ils sont à la base de cette expédition, c'est eux qui me l'ont proposée. Sans eux je ne me serais jamais aventurée dans un voyage qui présageait tant de difficultés.


BANGUI Mardi 23 Octobre 1984 9 hres du matin. L'avion Charter du "Point de Mulhouse" décolle. Nous prenons un léger repas. Puis je crois que je me suis quand même endormie, au moins l'espace de deux heures, exténuée par cette nuit passée dans le bus.


15 hres. Arrivée à Bangui Il n'y a aucun décalage horaire. A la réception des bagages dans l'aéroport, il y a même un chien et un perroquet en cage qui ont voyagé dans l'avion. "Oui oui, je connais la réglementation, j'ai tous les papiers qu'il faut" déclare l'homme qui tient son chien en laisse à un Centrafricain. Nous récupérons nos sacs à dos, passons sans problème la douane, sans que nous ayons même à ouvrir les sacs (Il faut dire qu'ici le charter du Point est bien connu). Alors une lueur d'inquiétude surgit sur nos visages : sommesnous bien attendus par un représentant de l'agence "Le Point". Je sors de la Douane la première et un centrafricain me demande, si je fais partie de "Délivrance". Il n'avait pas de pancarte. Evidemment je suis assez reconnaissable avec mon sac à dos et mes pataugas aux pieds ! Le groupe se réunit. On est 16 personnes. C'est beaucoup. On est un peu déçus, car on nous avait dit qu'on serait 12 au maximum. Une camionnette, pour les bagages, et un petit bus nous attendent. Nous préférons monter à l'arrière de la camionnette, avec les bagages, à l'air libre, pour respirer cette chaleur tant attendue, agrémentée par le vent de la route. En fait, à cette époque de l'année, il ne fait pas chaud, 25 °, mais nous sommes à la fin de la saison des pluies. Pour notre arrivée il fait très beau et sec. Nous passons par de grandes allées de terre ocre. Bangui c'est la capitale, mais ce n'est pas la grande ville, c'est une ville au milieu de la brousse, de grandes allées et des petites maisons africaines. Nous logeons au Rock Hotel, le plus bel hôtel de Bangui ... quoique pas terrible, terrible. Il y a une piscine (si sale qu'on ne peut pas s'y baigner, la salle de bain est correcte, il y a un radio-réveil, et la climatisation, toujours aussi glaciale et bruyante, mais il y a un interrupteur.


Rencontre avec Claudine Nous avons à Bangui deux contacts. Nous avons à Bangui deux contacts. Trois d'entre nous doivent contacter un professeur de gastro-enterologie, à l'hôpital de Bangui, qui a fait ses études à Strasbourg. (Il ne faut pas oublier que certains de mes amis avec qui je voyage sont des médecins). Nousautres, nous avons l'adresse d'une amie d'une amie, Claudine, qui est professeur de Lettres au Lycée Français André Malraux. Nous prenons donc un taxi, direction Avenue Boganda. Nous identifions la maison de Claudine d'après les indications que nous avons, car il n'y a pas de numéro. Une voiture se trouve dans la cour. Un boy nous ouvre la porte. Claudine est là et nous accueille à bras ouverts, sans nous connaître. Son amie avait du la prévenir de notre arrivée, puisqu'une lettre d'elle nous attendait à l’hôtel. Elle nous fait visiter sa maison, qu'on lui a trouvée quand elle est venue travailler ici, un peu éloignée du centre, mais qu'elle ne veut pas quitter, parce qu'elle est très spacieuse. Les pièces sont en effet très grandes et très hautes. Il y a une terrasse abritée, un grand salon avec un canapé, une petite table et des banquettes, qui doivent servir de lits pour des amis de passage, un bureau donnant sur le salon, et une énorme moustiquaire surplombant le bureau et le fauteuil ... "C'était devenu insupportable" dit Claudine "Je ne pouvais plus travailler, j'étais dévorée, alors je me fiche là dessous". Dans sa chambre, un grand lit est également surplombé d'une moustiquaire, tel un baldaquin. Quant à la salle de bain, elle rappelle nos rêves de salle de bain comme en France, avec tous les produits moussant bien de France, et en plus elle a un Boy prêt à essuyer la moindre éclaboussure ! Claudine nous propose une boisson : apéritif ou jus de fruit. Nous prenons un sirop de cassis et un jus de tonic amer qui mélangé à l'eau (eau buvable) donne une boisson au goût de Schwepps. Nous devons retrouver l'autre partie de notre groupe à l'hôtel, et nous proposons d'emmener Claudine. Nous devons aussi trouver à acheter une


paire de pataugas pour Bertrand qui les a oubliées à Strasbourg. Et nous demandons aussi à Claudine si nous pouvons laisser quelques vêtements d'hiver chez elle, que nous serions bien ennuyés pour le retour si nous les perdions en les laissant à l’hôtel. Et commence une grande traversée des rues de Bangui, à bord de la Suzuki de Claudine, une voiture extraordinaire, élastique pour le nombre de ses passagers : deux ou trois places à l'avant, des portières qui s'ouvrent avec des poignées de porte, et des fenêtres qui s'ouvrent avec une fermeture éclair. A l'arrière, c'est comme une petite camionnette bâchée, deux sièges pas confortables sur les côtés, mais les sièges sont des coffres. On tient à quatre "confortablement" en se tenant à la grosse roue de secours qui se trouve accrochée à l'arrière de la voiture. Car, il faut dire que les cahots à l'arrière de la Suzuki valent leur pesant d’or. Nous faisons d'abord la tournée des magasins de chaussures Bata (il y en a deux à Bangii) mais les pataugas ... il n'y a que des tennis ... en plastique ... Bertrand finit par trouver une paire de tennis, avec une pointure supérieure à la sienne. Nous faisons ensuite le tour des amis de Claudine.Tous les amis de Claudine s'inquiètent de notre sort : ils ont entendu parler du circuit "Délivrance" comme étant une épreuve assez redoutable, et ont eu vent que le groupe précédent a eu pas mal de problèmes, et était épuisé. Nous arrivons à l'hôtel, et nous retrouvons le reste du groupe dans le jardin, au bord du fleuve Oubangui. Nous prenons un pot tous ensemble.

Dîner Nous demandons à Claudine de nous emmener dans un "bon" restaurant. Nous voilà à nouveau dans la Suzuki, tous, encore plus entassés qu'avant. Claudine nous raconte ses problèmes de voiture : l'oubli de son permis de conduire, les démarches à la police, le fameux rond-point qu'il faut éviter car il y a toujours des policiers prêts à vous coincer …


Nous allons donc dans un restaurant chic, tenu ... par un Français, un ancien de Djamena.On a le choix entre la salle climatisée et la salle en terrasse... que nous choisissons. On nous prie de nous asseoir au salon autour d'une table basse en attendant qu'on nous installe une grande table sur la terrasse. On nous donne le menu pour que nous fassions notre choix. Nous avions en tête, en venant ici, de manger du capitaine, ce gros poisson délicieusement fin et sans arêtes que j'adore. Mais capitaine grillé ou capitaine au beurre blanc ? Là est le dilemme. Le patron nous conseille le capitaine au beurre blanc (sauce cuisinée tout à fait dans les normes de la gastronomie française), et il nous donne l'eau à la bouche. Il nous raconte ensuite, qu'avant de s'installer ici, à Bangui, il vivait à Djamana au Tchad. ici il dit qu'il a une vie de privilégié, et que jamais il n'a eu envie de retourner en France, où il n'aurait jamais la qualité de vie qu'il a en Afrique. Le capitaine au beurre blanc était excellent, mais le prix très élevé : avec un sorbet en dessert, du café, et du vin, nous en avons eu pour 100 F par personne ... un restau français !!! Claudine nous précise que le café cultivé en Centrafrique est très mauvais, c'est du très mauvais Robusta. Mieux vaut boire du café importé. Je crevais de sommeil, ma nuit précédente passée presque "blanche", avait été terrible ... C'est moi qui étais blanche de fatigue. Et malgré la sympathique soirée que nous avions passée, je ne souhaitais que me coucher. Nous rentrons à l'hôtel vers 22h 30. L'hôtel est loin d'être désert, il y a beaucoup d'animation encore à cette heure. Claudine nous donne rendezvous demain à 7h 30 pour nous apporter une moustiquaire.


BANGUI Mercredi 24 Octobre 1984 La nuit fut très calme. Pas un bruit dans la rue, mais le matin, les voitures qui passaient nous ont réveillé. Nous regardons par la fenêtre qui donne sur la rue : c'est une grande allée de terre, devenue boueuse car... il pleut ! Nos visages s'assombrissent car c'est aujourd'hui que nous débutons notre "croisière" sur le fleuve Oubangui. Nous comptions mettre bermuda et débardeur, et même maillot de bain, mais du coup, nous optons déjà pour la tenue de brousse : pantalon, chemise et pataugas. Pataugas qui entraînent l'envie des garçons de l'hôtel, l'un deux voudrait absolument nous les acheter.Il me demande de les lui vendre à mon retour d'expédition. j'ai beau lui dire qu'en France cela coûte très cher et que pour lui, ce serait une fortune... En effet il ne s'attendait pas à un tel prix. "Mais très bonnes chaussures" affirme-t-il ! On ferme une partie de nos bagages, on trie les affaires pour en laisser une partie à Bangui. Et on descend prendre le petit déjeuner. Nous avions rendez-vous avec "Le Point" à 8 hres.

Petit déjeuner Le petit déjeuner un plaisir ! On nous apporte sur un plateau une énorme tranche de papaye, une petite cafetière qui remplit deux tasses, un pot de lait, un petit carré de beurre individuel, de la confiture, un croissant (africain bien sûr, pas si bon que le parisien) et un petit pain.


J'ai demandé si le café était du nescafé (de peur du redoutable café robusta centrafricain) et le garçon m'a répondu "Non, c'est du Legal". Sans doute du Legal, moulu, importé de France car il était excellent. Et on n'oublie pas de prendre la Nivaquine pour nous préserver du paludisme, qui sera notre dose quotidienne. Le petit déjeuner était extra, mais cher : 1500 CFA c'est à dire 30 FF (le prix dans un hôtel en France). Nous nous étions assis près de l'entrée pour que Claudine puisse nous trouver en arrivant. Elle arrive en courant, car elle se rend à ses cours. Elle nous laisse la moustiquaire et nous dit qu'elle a trouvé des pataugas pour Bertrand, qu'il faut qu'il se rende au Lycée français à 10h 20, l'heure de la récréation, c'est un prof qui a promis de les apporter au lycée. Quant à la moustiquaire, elle me semble bien lourde : c'est la grande qui était au dessus de son bureau, qu'elle a décroché pour nous. Et j'hésite à l'emporter dans mon sac à dos qui est déjà si lourd. En fait, c'est François qui sera intéressé, et c'est lui qui l’emportera. On attend le représentant du "Point". Première attente à l'Africaine. On remonte et on redescend sans cesse des chambres. On fait et on refait nos bagages, enlevant le maximum des choses qui pourraient ne pas être utiles (je ne dis pas "inutiles" mais dont on peut se passer. Le représentant du" Point" arrive à 10 hres avec la camionnette. On y charge les sacs à dos, et nous grimpons à l'extérieur de la voiture, ça devient une habitude de grimper sur les roues. Nous nous rendons ainsi à l'agence du" Point", en plein centre, près du carrefour des deux Arches.


Pour se représenter un peu Bangui

Le centre de la ville de Bangui

Mais ce que nous appelons le Centre, n'est pas vraiment le Centre. Le centre de la ville, c'est le quartier africain, le "marché aux voleurs" etc. Ce qui, pour nous, est le centre, c'est le centre du quartier européen, la Place avec les avenues goudronnées en étoile, dont deux deux débutent à partir de


deux arches blancs, l'une allant vers l'aéroport, à l'hôpital et à la mission catholique. Le Rock Hôtel où nous logions, est en fait assez excentré (relativement puisque l'on peut tout de même aller à pied jusqu'au centre européen), il se trouve près de la rive du fleuve Oubangui, qui est au Sud de la ville. A côté se trouve le Rock Club, un Club privé fréquenté par les Européens, avec piscine propre et night-club. En avant, se trouve le Port. Une grande avenue longe l'Oubangui, sur laquelle donnait notre fenêtre de notre chambre à l’hôtel.

Le groupe Nous nous rendons donc à l'agence du" Point", pour y laisser une partie de nos affaires, dans des sacs que nous plaçons dans une grande pièce à l'arrière de l’agence. Une fille blonde nous attendait. C'est Marie-Hélène, qui elle, est déjà arrivée à Bangui en vacances depuis quinze jours, et qui vient se joindre au groupe. Le groupe c'est, en plus de mes amis de l'Est : Christine (le cerveau et économe du groupe) Richard "le marcheur" Josette "la dynamique" Didier "l’adorable"... tous venant de Paris. Bernadette de Besançon (à qui il arrive toutes les tuiles), Brigitte et Eliane, les "jumelles" de Lyon, Anne-Marie, "la pressée", médecin à Montpellier, et Eric "le silencieux" Nous serons accompagnés par Honoré le chef des expéditions "Délivrance", qui fait ce voyage tous les quinze jours, mais qui s'était blessé à la jambe, et qui n'avait pas pu accompagner le groupe précédent. Il y a aussi Louis-Marie, le plus jeune, responsable surtout du bateau, qui, lui, avait accompagné, seul, le dernier trek, et c'est soit-disant lui qui avait mené cette marche à vive allure au point que les participants avaient dit que c'était pire qu'au régiment. Honoré a encore un bandage au genoux (ce qui, malheureusement pour nous, n'a pas du tout ralenti son allure de marche).


Les courses Nous constituons une caisse commune pour faire les achats des vivres que nous allons emporter dans l'expédition, et qui seront transportées d'abord sur le bateau, puis par des porteurs africains pendant le trek. Ayant entendu dire que le groupe précédent avait avait "crevé de faim", parce qu'ils n'avaient pas prévu assez de nourriture, et qu'ils avaient terminé à sept sur un pot de confiture ... nous avions décidé de ne pas lésiné sur les achats. Nous mettons chacun 500 FF dans la caisse commune, mais il faudra rajouter 200 FF une fois fait les courses, ce qui nous a fait une caisse de nourriture de 700 FF par personne, pour 12 jours d’expédition. On se sépare en deux groupes. l'un ira au supermarché, l'autre au marché. la pluie a cessé.

LISTE DE COURSES : Petit déjeuner : café (grosses boites de café soluble) thé (sachets individuels) lait en poudre (grosses boites en fer) sucre en poudre (il moisit moins vite qu'en morceaux, à conserver dans des tupperwares) pots de confiture farine (pour faire du pain ou .. des biegnets quand le pain sera moisi, ou qu'il n'y en aura plus) vache qui rit (pour tous les repas, ce sera le "dessert")

Midi : boites de paté (toute la gamme qui peut exister) boites de thon, sardines, corned beef Soir : soupes (toute la gamme existante, 5 paquets par dîner pour 16 de la même sorte si possible, ou se mariant).


sel-poivre huile (plusieurs bouteilles) pas de vinaigre puisqu'on ne peut pas manger de salades crues Des féculents (300 g par jour par personne) - soit du riz (il est mauvais... le riz importé de France est hors de prix ici, et le riz africain est dégueulasse) - soit du couscous - soit des pâtes (macaroni locaux très bons et moins chers que les "européens") + des tas de grosses boites de concentré de tomates qui agrémenteront soit le riz, soit le couscous, soit les pâtes, tous les soirs, avec quelques oignons frits tant qu'on en aura encore.

Ne pas oublier : deux produits pour faire la vaisselle et des éponges. des fruits des citrons verts pour changer le goût de l'eau hydrochlonazonnée. A tout cela s'ajoutent : des paquets de sel pour donner aux Pygmées des cigarettes (pour nous et pour les Pygmées) et une réserve supplémentaire de papier WC pour le groupe.

Nous, nous nous occupons du marché et de l'achat des fruits. Nous allons d'abord au marché en plein air. C'est très dur de marchander, même en achetant de si grosses quantités comme nous le faisons. Tout ce à quoi on arrive, c'est de demander un "cadeau" en plus, c'est à dire que quelques fruits soient rajoutés en rab. On doit aussi acheter de grands sacs en nylon, 150 FCFA, très solides, pour y transporter les fruits. Nous achetons des oranges, des pamplemousses, des bananes (pour les premiers jours, car nous savons qu'elles périront vite). Pas de pommes d'eau, fruits que nous ne connaissions pas, que nous découvrons, un peu acides, mais que nous pensons ne pas pouvoir transporter ni conserver. Quant aux avocats ... ils ne sont pas mûrs, ce n'est pas la saison. Au marché couvert, nous achetons des oignons, et nous créons un scandales au sujet de deux ananas que nous voulions acheter, et quand la vendeuse nous a dit le prix, l'Africain qui nous accompagnait a dit que c'était trop cher, et qu'il fallait nous rendre notre argent. Et ce fut la révolte. Toutes les femmes du marché s'en sont prises à lui, se sont mises à hurler... et des femmes africaines en colère, il faut voir ce que c'est ! Bref, l'argent nous a été rendu


sous les huées, et nous avons acheté deux ananas ailleurs, à l'extérieur du marché. Nous voulions des cacahuètes, mais ici elles sont vendues soit décortiquées, ou, si elles ne le sont pas, elles ne sont pas grillées. Et ce n'est pas bon du tout. On vend aussi sur le marché des chenilles grillées. Nous n'en avons pas acheté (sauf certains de nous qui, au retour, ont voulu les rapporter pour les servir à l'apéritif pour leurs amis en France). Puis, nous partons à la recherche de chapeaux (avec des publicités dessus) pour ceux, qui, ont omis d'en apporter dans leurs bagages de France. Il reste à trouver le pain. Claudine nous a conseillé d'aller aux "Graineries de Dakar", et d'acheter du pain serré en miches, et pas de baguettes qui s'abîmeraient vite.Il ne reste pas beaucoup de pain à la boulangerie et il nous en faut beaucoup. Nous achetons du pain en grosses miches et du pain de mie (350 F CFA). Comme il n'y en a encore pas assez, on va dans une autre boulangerie. Et là, on tombe sur les amis de Claudine, toute étonnées de nous voir encore à Bangui. Nous dévalisons la boulangerie de Bangui : 50 kgs de pain ! On se retrouve à l'agence du "Point". Roselyne et Bertrand ont trouvé leurs pataugas. Les autres ont rapporté tout ce qu'il faut du supermarché, excepté le café, et la boutique est fermée, il fauta attendre 15h 30 pour acheter le café, c'est capital. Autre chose capitale, que nous ne pensions pas "capital", et qui le sera : nos guides ont poussé à acheter du vin, c'est la coutume dans les groupes, disentils. Ils ont chargé 4 ou 6 grosses bonbonnes de vin rouge qui s'avérera être excellent et le bonheur de nos repas.

Déjeuner Les estomacs commencent à avoir faim. Honoré et Louis-Marie nous emmènent au marché pour déjeuner en plein-air, près de gros fourneaux de cuisine locale. Nous mangeons du riz au poisson. Très épicé. Le poisson, une belle tranche, mais avec quelques arêtes, avait un goût pas de poisson, mais


l'assiette était trop remplie, on ne pouvait pas la finir. Avec tout ça, de grandes bouteilles de soda. Honoré et Louis-Marie, eux, accompagnent leur plat d'une grosse boule de manioc, blanc, gluant, gélatineux, le "fou-fou", mélange de farine de manioc et d'eau bouillante : c'est leur "pain" à eux. e manioc, à lui seul sert à nourrir tout le pays. On retourne à l'agence du "Point". On attend 15 hres pour pouvoir acheter le café. on passe notre temps à essayer d'alléger encore nos sacs à dos, et à laisser quelques produits de plus à Bangui. Enfin on va acheter les pots de café. Une ruine : 4000 F CFA le pot ! Le double du prix en France (80 FF). Il va falloir l’économiser.

Cette fois-ci c'est le vrai départ Direction le Port de Bangui (à deux pas). Je citerai cette phrase très significative : "L'hôtel, le restaurant, la voiture, tout cela écarte le voyageur du milieu où il se trouve. Qu'il le veuille ou non, il creuse d'avantage le fossé qui sépare les deux civilisations." Nous quittons tout cela pour partir à bord du "Ngo" le bateau du "Point de Mulhouse". Nous allons naviguer sur l'Oubangui, puis sur son affluent, la rivière Lobaye, et ensuite nous allons marcher à pied par les sentiers cachés de la forêt équatoriale, jusqu'à la frontière du Congo.


DÉPART DE BANGUI Mercredi 24 Octobre 1984 Le bateau, amarré en contre-bas, nous semble précaire. C'est une grosse barque à moteur, jaune, avec un toit en son milieu, et un avant-pont ... qui nous permettra de bronzer. Mais il fut tout à fait OK. Il y a même une lampe à pétrole, qui sera très utile. Au port, il faut accomplir les formalités de douane. On donne nos passeports, nos certificats de vaccination (fièvre jaune) et on remplit une fiche indiquant tout ce qu'il y a d'écrit sur le passeport, et notre destination. Ensuite une brave dame prend chaque cas, un par un, vérifie les informations, regarde si la photo est ressemblante, demande à celui-là s'il est bien "médecin" ? Et on nous tamponne notre beau passeport ! On aura quatre pages en tout de beaux gros énormes tampons ronds : "vu au départ de" - "vu au passage de" "revu au passage de" - "vu à l'arrivée de". On embarque les sacs à os. Il y a une grande bâche imperméable, ouf ! pour recouvrir les sacs en cas de pluie. Les banquettes de bois nous accueillent, ainsi par trois facilement.

L'après-midi est déjà bien avancée, on ne va pas pouvoir naviguer très longtemps. Il ne pleut pas. La balade est très agréable. On croise des


piroguiers qui nous font signe. Et ce qui nous surprend, c'est de voir ces plantes en fleurs qui surnagent par centaines au milieu de l'eau. Ce sont des jacinthes d'eau, qui viennent, dit la légende, du fleuve Congo, où un missionnaire dépassé par leur prolifération excessive dans son jardin, aurait fini par les déverser dans le fleuve, et là, leur prolifération aurait été telle, qu'elles avaient envahi même le fleuve Oubangui et aussi la Lobaye, et les autres affluents du Congo.

Premier bivouac La nuit va tomber. Honoré pense au bivouac possible. Comme ce n'est pas le village où il s'arrête d'habitude, étant donné qu'on est parti tard, et qu'on a pris du retard dans la navigation, il descend à terre, va saluer le chef du village, et lui demande l'autorisation de monter les tentes à côté du village. Il revient à bord et nous naviguons encore un peu, pour accoster un peu plus loin. Nous descendons à terre (ou plutôt on grimpe à terre, car la rivière est toujours en contre-bas), et la montée sur le rivage, avec le sac à dos est toujours très épineuse. A la fin du voyage, on sera plus organisé, on fera la chaîne pour débarquer tout, sacs et vivres. Ce village n'est pas si éloigné de Bangui que cela, puisque l'on voit sur l'autre rive, les lumières du port de Bangui, et des réservoirs du parc à carburant. D'ailleurs les villageois commercent chaque jour avec la capitale, et y font des allers et retours en pirogue. Montage des tentes Le terrain est très en pente. Nous prenons une tente au hasard, biplace, et l'installons près de l'eau, au bout de la pente, chose qu'il ne faut pas faire .... D'abord c'est près des crocodiles qui remontent sur la rive (de la rivière .. mais .. il n'en a pas ...). Et puis, quand il pleut, c'est la tente la plus en contre-bas qui reçoit tout. et puis, il ne faut sûrement pas placer l'ouverture de la tente face à l'eau, puisque c'est de là qu'arrivent les moustiques, les insectes, et .. les bêtes ! ... Premier bivouac, encore inexpérimentées ! La tente, ultra légère bien sûr, mais toute petite, est constituée simplement d'une toile de nylon cousue à un tapis de sol, de deux piquets en trois parties emboîtables, et de sept "sardines". elle est très vite montée. Il n'y a pas de


fermeture éclair à l'entrée, mais seulement trois liens, ce qui n'arrête pas les insectes ! A notre première installation, déjà des hurlements : en mettant le nez en dehors de la tente, on découvre un insecte de plus, à grosses pattes. Le premier rituel de l'installation d'un bivouac, est la cérémonie "repellent" anti-moustiques. Ensuite on installe à l'intérieur de la tente, matelas et sacs de couchages. Il y a tout juste l'espace pour deux couchages ! On fait tout cela à quatre pattes, ou à genoux, puisqu'on ne peut se tenir qu'ainsi. On accroche la plaquette anti-moustiques à l'entrée de la tente. Par la suite on fera même brûler des tortillons, avant de se coucher, car l'odeur de la fumée est plutôt asphyxiante dans un espace aussi réduit. La cérémonie "WC" est aussi assez typique. A la lampe électrique, en groupe (surtout au début, car on n'était pas très rassuré, par la suite on n'aura plus du tout peur) et au milieu des vers luisants (je n'en avais jamais vu autant).

Le dîner Installation du feu de bois. Pour l'allumer, on met quelques brindilles au milieu, et on allume. Parfois il faudra souffler comme une machine pour l'allumer, et là, c'est Eric qui est le plus doué. La corvée d'eau : Aller chercher de l'eau dans le fleuve, assez périlleux, puisque les descentes vers la rivière sont loin d'être "aménagées" ! C'est une pente glissante. Avec une bassine d'eau ans les mains, c'est loin d'être facile. Le rituel du repas : L'attente que l'eau bouillisse. A trois reprises : pour la soupe, puis pour faire cuire les féculents pendant qu'une autre bassine servait à préparer la sauce tomate. Tous les soirs le même repas : riz ou couscous ou pâtes, mais toujours à la sauce tomate. Alors que les soupes étaient très variées.


Puis il fallait refaire bouillir de l'eau pour laver la vaisselle. On avait du produit à vaisselle et des éponges. Et là, on se rendait compte que l'eau était vraiment bouillante, car on s'ébouillantait les mains ! On avait même la lampe tempête du bateau (sauf pendant le trek) pour éclairer notre repas. Après le dîner, les villageois sont venus en grand nombre nous rendre visite à notre campement. Il y avait bien sûr beaucoup d'enfants. Un jeune villageois nous a fait bien rire en nous parlant de sa femme, qu'il avait épousé à 15 ans, mais "mise sur le coup" à 14. Il porte son bébé dans les bras, mais on doit insister pour qu'il accepte de nous présenter sa jeune femme. Il y a aussi parmi eux, une fillette très belle, mais sourde et muette et très souriante. Les fillettes autour de nous se mettent à murmurer des chants, à esquisser quelques danses. Nous les encourageons en les éclairant de nos torches électriques et en les applaudissant.

Le coucher Les heures tournent et chacun trouve qu'il se fait tard. Les villageois rentrent chez eux, et nous, nous apprêtons à passer notre première nuit sous la tente? C'est une difficile organisation dont nous prendrons, par la suite, l'habitude.Au début, cela nous donnait des suées tellement on se remuait à l'intérieur de cette tente pour installer notre "litière", puis placer les sacs à dos en bout de tente, à nos pieds. Il faudra dormir les pieds posés au dessus des sacs, tellement la longueur de la tente était petite. Et nous installons un morceau de gaze moustiquaire, (1 mètre acheté chez Bouchara, à Paris) épinglée à l'entrée de la tente avec des épingles à nourrice, pour fermer plus hermétiquement l’entrée. Une fois allongées, on n'est pas plus à l'aise, car les côtés de la tente retombent sur nos visages, et sont trempés par l'humidité tombée des arbres dès que la nuit tombe. On dort les pieds sur-élevés, ou les jambes recroquevillées, l'humidité au dessus du nez, et crevant de chaud. Il faut quelques instants de calme après cet échauffement pour se refroidir un peu, puis on peut se rentrer à l'intérieur du drap de couchage, on arrive même à ne pas avoir besoin de duvet.


Il faut dire que ces conditions peu confortables de sommeil feront que peu à peu, dans le groupe, pour la grande majorité, on se passera toutes sortes de somnifères. Nous voilà bien installées, ne bougeant plus, parées contre les insectes, prêtes à trouver le sommeil.... quand ... un autre trouble de notre sommeil survient ... d'énormes ronflements venant de la tente d'à côté. D'abord j'ai cru que c'était Bertrand, dont la tente était la plus proche de la nôtre... Erreur ! l'ennemi fatidique de notre sommeil, ce sera François !


Jeudi 25 Octobre 1984 Je commence à ne plus savoir quel jour on est, quelle date on est. Je vis au rythme de la nature, du soleil, de la nuit, de la faim et du sommeil. oubliées toutes les structures sociales pour ne plus rien faire d'autre que vivre et agir en fonction des circonstances, en oubliant tout ce qu'on a laissé derrière. Le matin, on prend le petit déjeuner (il y a encore du pain !) et re-corvée d'eau pour le café. Puis on démonte les tentes.

Un tampon sur les passeports Nous reprenons le bateau et descendons encore un peu l'Oubangui. Au confluent de l'Oubangui et de la Lobaye, se trouve, ZINGHA, le poste de douane où il faut faire tamponner les passeports. "Zingha est le lieu de rupture de charges aux basses eaux, le seuil du rocher de Zingha interdit ce passage." Louis-Marie prend tous nos passeports pour leur faire apposer le gros tampon rond "Vu au passage de Zingha le …" Pendant ce temps, on va visiter les WC publics sur la place : un trou entouré de paravents de paille, des WC habituels de Centrafrique. Puis nous allons boire une bière, une mousse comme dit Bertrand, au café Saint Raphaël. La "mousse" a eu une importance des plus considérables pendant ce voyage, le ravitaillement en mousse devenu le problème capital à résoudre. Quant au soda, il était encore plus difficile à trouver … Sur le chemin de retour vers le bateau, on trouve des oranges à acheter, moins chères qu'à Bangui. On revient avec un cageot de bières et un sac d'oranges, sous une chaleur très forte.


Navigation sur la la Lobaye La barque repart. Au bout d'un moment de navigation, nous abandonnons l'Oubangui pour prendre un autre bras de fleuve : c'est la Lobaye ! affluent de l'Oubangui, qui est lui-même un affluent du grand fleuve Congo.

Le paysage se transforme : le vert des rives est plus profond, on entre dans la région de la forêt équatoriale. Le long du fleuve, sur les rives, de curieuses flèches blanches attirent mon attention. Ce sont des flèches qui servent d'indicateurs pour la navigation, qui signalent les chenaux à emprunter, et les bas fonds. On trouve cela partout en Afrique. On croise quelques rares piroguiers, et, ce qui est typique sur la Lobaye, de grands radeaux qui transportent des troncs de bois. Il y a aussi, ça et là, un grand bateau pousseur, d'où les gens nous saluent. Les rives de la Lobaye ne sont pas monotones. la végétation y est étonnante, et les grands oiseaux en haut des arbres captent notre attention. On rencontre également des toiles d'araignées géantes comme un voile accroché aux branches au bord de l'eau.


LE CAMP DE BASE Arrivée au camp de base, ou Camp des Caféiers, surnommé ainsi par nous, parce que, au lieu de nous installer là où les villageois nous le proposaient, nous avons aperçu un terrain d'herbe bien verte, et certainement plus moelleuse que le sol de sable dur de la place du village, et nous leur demandons de nous installer à cet endroit... au milieu des caféiers. Le village est constitué de quelques maisons seulement. En RCA, il n'y a plus de cases, les villageois ont depuis longtemps abandonné la case pour la maison style européenne, faite de bois et de briques comme ici, recouverte de feuilles de palmiers, ou ... de tôle ondulée ... Il n'y a que les Pygmées qui ont conservé l'habitat de cases traditionnelles. Ce village est situé à l'orée de la forêt, et au bord de la Lobaye. Il sera notre camp de base, de départ et d'arrivée du trek. C'est là aussi que l'on recrute les porteurs, deux villageois, dont Achille, un type épatant, dont on connaîtra bien la famille, sa femme, ses deux petits enfants. Il y a aussi deux Pygmées, qui eux, connaissent très bien la forêt et la région. Les Bantous aussi connaissent bien la forêt, car quand ils vivent au village, ils y vont chasser tous les jours.


On nous dit qu'on peut se baigner dans la Lobaye, car elle n'est pas contaminée. Des prélèvements réguliers sont effectués par des scientifiques, et le prouvent... Moi, méfiante comme toujours, je décide de ne pas y aller, et me contente de mon spray d'eau d'Evian et de mon tonique pour faire ma toilette. Dîner, puis de nouveau, installation sous la tente. Une fois encore on a des suées, on a transpiré tellement on se remuait là dessous. Et la tente était trempée, au point que nos corps étaient trempés parce que la toile de tente nous tombait dessus.


MARCHER EN FORÊT Vendredi 26 Octobre 1984

Ce que je vais porter Avant de quitter le camp de base, on refait un tri de nos affaires, car on peut laisser des choses dans les maisons des villageois. Je laisse une partie de mes produits de toilette, pour n'emporter que ce qui sera nécessaire sur cinq jours de marche. J'emporte quand même un pull (et j'en serai bien contente de l’avoir). En fait pendant les 5 jours de trek, j'ai utilisé :

1 pantalon de marche 1 chemise à manches longues 1 pantalon de rechange sec pour le soir 1 chemisette à manches courtes 2 paires de chaussettes pour la marche 2 paires de chaussettes sèches pour le soir (car on ne pouvait pas laver !) 1 bermuda qui sera bien agéable le jour où l'on sera de repos et le maillot de bain bien sûr.

Je n'emporte qu'une petite serviette de toilette, et laisse la grande serviette de bain au camp. En chaussures, en plus des pataugas pour marcher, je prends une paire de ballerines plastiques pour me délasser des pataugas le soir.

Etre avec tout ça, eh bien, le sac à dos fut quand même bien lourd à porter ! On constitue un sac commun pour les médicaments. Comme on a parmi notre groupe, quatre médecins, deux infirmières anesthésistes, une pharmacienne, et deux dentistes, on est plutôt parés. On fait le tri de la nourriture aussi, pour n'emporter que ce qui est nécessaire pour cinq jours. Deux bassines et deux jerricanes de 20 litres pour l'eau, plus le sel pour donner aux Pygmées.


Tout cela sera porté par les porteurs dans des hottes typiques, semblables à celles utilisées par les Pygmées, faites de lianes tressées, et qui se portent sur le dos, et retenues par une anse en écorce d'arbre qu'ils se passent sur le front. Chaque porteur avait environ 20 kgs, ce qui est bien lourd. Nous avions quatre porteurs pour seize personnes, c'était peut-être insuffisant. Les tentes, nous les portons nous-mêmes. Mais ce n'est pas lourd à deux : l'une prend les piquets démontés en trois parties et les sardines, et l'autre la toile (en nylon).

Le trek allait pouvoir commencer Voilà, le trek allait pouvoir commencer, alors que le ciel se met à se couvrir, à devenir sombre…

Notre itinéraire de trek


Sous la pluie ! Ce fut notre première expérience de pluie équatoriale, qui devint par la suite... une habitude ! Là encore, on s'est habitué au rituel bien précis de la pluie qui va tomber. Le ciel se couvre, le vent se lève, la tornade fait rage, et d'un coup la pluie tombe en trombes. Quand on voit ce ciel devenir si noir, on se dépêche d'emporter nos sacs et d'aller nous abriter avec les villageois dans leurs maisons. Des trombes d'eau descendent du ciel.Puis c'est l'accalmie. C'est toujours comme ça. Ensuite il pleuviotte. Alors nous partons sous une pluie fine, nous pénétrons dans la grande forêt. La pluie tombe mais est filtrée par les arbres, et ne nous mouille pas trop.

Traverser les marigots Le premier choc a été la rencontre avec notre premier marigot. La hantise de la bilharziose ! Au début, on a retiré nos chaussures, nos chaussettes, pour traverser le marigot... pour ne pas les mouiller... par la suite on ne retirera plus les chaussures. On traversera en chaussures. En plus de la bilharziose, il peut y avoir les serpents aussi…


Marcher dans la forêt Ce que l'on appelle "les difficultés de la progression en forêt" prend maintenant tout son sens. Le terrain est plat mais jonché d'obstacles. Tantôt des troncs d'arbres tombés au sol, qu'il faut soit franchir à califourchon, alors que le poids du sac à dos vous entraîne vers l'arrière, soit s'accroupir, toujours avec ce sac à dos, pour passer en dessous. Tantôt des lianes tellement enchevêtrées, qu'avec la largeur du matelas Korimat attaché en bas du sac, on se retrouve complètement coincé, ou aussi qui vous accrochent les cheveux, ou aussi qui rebondissent comme des élastiques, et il faut faire attention pour ne pas éborgner celui qui vient derrière. Certaines sont très épaisses, presque des branches, et j'ai regretté de ne pas les avoir testées en tant que balançoires, tout comme Tarzan, mais on ne pouvait pas s'arrêter pour s'amuser, autrement on perdait le groupe.

On marche en file indienne, et comme il y a ceux qui marchent vite, et ceux qui ne marchent pas vite, on s'espace pas mal. On se guide alors à la voix "oh oh !!!" et réponse "oh oh !!!". Et on entend si la voix vient de droite ou de la gauche. A chaque croisement, dès qu'il y le choix entre deux pistes, on crie "à droite" ou "à gauche" pour ceux qui sont derrière.


La piste n'est pas évidente à voir. Il faut avoir des yeux d'Africain ou de Pygmée, pour la voir. Mais peu à peu, au bout de quelques jours, on finit par voir comme eux. Quoiqu'il suffit d'avoir l'esprit qui vagabonde, de penser à quelque chose d'autre, ou de fixer son regard ailleurs, pour tout à coup se dire "Mais où est-elle passée ?". La piste c'est plutôt un sentier, on l'appelle la sente, percé au milieu des sousbois, des fourrés. parfois c'est un chemin percé par le passage des éléphants au milieu des lianes. Souvent elle devient invisible à nos yeux. Nos guides ont une machette pour se frayer parfois un chemin au milieu des lianes, mais surtout pour "marquer" la piste pour les suivants. Pour cela, on casse les arbustes dans le sens de la marche, ou on fait des signes sur les arbres. Comme difficultés traîtresses, il y a aussi ces horribles racines qui sortent du sol, en forme d'arceau, et dans lesquelles on se prend le pied, et on trébuche. Chutes et glissades sont fréquentes.les pieds se tordent, et ces affreuses racines se trouvent toujours là après qu'on ait franchi un tronc d'arbre difficile, si bien que venant de franchir un obstacle, on ne pense pas si vite à en retrouver un autre. Et vlan, il y a une racine au pied de l'arbre couché, et on se prend le pied dedans ! Il y a aussi les lianes qu'on attrape à pleines mains pour se retenir en franchissant un obstacle, et qui se révèlent être d'affreux épineux qui vous abandonnent leurs épines dans la main. La forêt est un lieu de contraste entre l'ombre et la lumière. Parfois on marche en plein sous-bois, et parfois le soleil à percer au travers des arbres et des lianes et donne des contre-jours et des verts incroyables de beauté. Par contre, la bonne odeur de nature que l'on s'imaginait humer nous a bien déçus. la forêt ne sent pas bon. une odeur de bois pourri très spécifique, de moisi, une odeur qui envahit jusqu'à nos propres vêtements, nos sacs, et nos chaussettes ... n'en parlons pas ! Au point qu'à la fin du voyage, j'ai laissé en Centrafrique pas mal de mes vêtements de trek tellement cette odeur était devenue une obsession.


Non il n'y a pas de grosses bêtes... Une autre déception, dont on a été en un sens ravis, c'est l'absence d'animaux. On avait quand même un peu peur des rencontres qu'on pouvait faire, et évidemment on en rigolait, tout en y pensant au fond de soi. Et là, aucune grosse bête, pas d'éléphants (quoique un jour, l'un de nos porteurs nous signala qu'un éléphant venait de passer car les branches étaient fraîchement coupées). Même pas des gazelles, ni de singes. L'explication, c'est sans doute qu'on faisait beaucoup trop de bruit en marchant.On discutait sans cesse, on lançait des "ouh ouh" sans arrêt, et même le bruit de nos pas n'était pas de toute discrétion. Les seules rencontres que l'on faisait étaient les scolopendres (c'était la saison paraît-il) mais inoffensifs, et les fourmis. Quand on arrivait au niveau de l'armée des fourmis, on passait à toute vitesse en crabe, c'est à dire les pieds écartés de chaque côté de la sente, et en courant. On avait bien un fusil avec nous, ce qui nous sécurisait, mais il servait principalement pour la chasse... pour nous tuer quelque gazelle pour agrémenter les repas.

Le sac est trop lourd et la marche est trop rapide Outre les conditions naturelles qui font que la marche en forêt n'est pas facile, le poids du sac à dos est un lourd handicap. En début de journée ça va, mais, en fin de journée, il tire sur les épaules, et je cherchais en vain de passer le poids d'une épaule sur l'autre, et de la ceintures aux épaules, en tirant ou en relachant les sangles. En plus, il déséquilibre vers l'arrière quand il faut escalader des troncs, et il devient d'une largeur handicapante, avec le matelas en mousse roulé et passé au travers, quand il faut se faufiler entre les lianes. Quant à l'allure de la marche, n'en parlons pas...! Les porteurs et les guides africains font un marathon ! Et ils le font avec des sandales en plastiques, des


shorts et des pull à manches ! Ils foncent, ils sautent les obstacles, un train d'enfer, et nous disent toujours "IGOUé, "IGOUé" c'est à dire "On y va". Ce mot retentira longtemps dans notre tête ! Il paraît qu'ils n'avaient jamais vu de groupe qui marchait si lentement !! La terre a une couleur légèrement ocre par endroits mais rarement et est surtout d'un brun foncé. On est surpris par de gros trous que l'on rencontre sur les côtés des sentiers, et qui semblent être comme de grands pièges pour y faire tomber les animaux. Mais l'un de nos guides nous dit que c'est un Allemand qui creuse la terre et l'envoie en Allemagne — curieuse réponse— Il y a aussi beaucoup de champignons sur notre chemin, beaucoup doivent être vénéneux, seuls les hommes de la forêt le savent.


PREMIÈRE RENCONTRE AVCE LES PYGMÉES Vendredi 26 Octobre 1984 Nous marchons ainsi en file indienne jusqu'à midi environ. Cela fait deux heures que nous marchons. Et nous faisons halte dans "notre" premier village pygmée pour déjeuner de nos sandwiches au pâté, de crèmes de gruyère et oranges.

Pause déjeuner

C'est notre première rencontre avec les Pygmées, les Hommes de la forêt, ces hommes "hauts d'une coudée" comme disait Aristote. D'abord, ils ne sont pas si petits, ils font en moyenne 1m50 et nous arrivent à l'épaule. Ils sont loin d'être des petits garçons ou des nains ! Ils ont en général la peau plus claire que celle des Africains, et les traits du visage très caractéristiques, surtout les hommes qui ont le visage très vieux, très mature. Les villages sont situés dans des clairières inondées de soleil. Les Pygmées ont défriché la forêt à l'endroit où ils ont décidé de s'installer, et entretiennent sans cesse la netteté de la place du village en la balayant avec des balais de feuilles chaque jour. Près des huttes, des bassines noires pour la cuisine, et des hottes tressées comme celles de nos porteurs.


Ils sont nomades et migrent très souvent, à la recherche de nourriture, principalement de miel et de gibier, quand ceux-ci sont épuisés dans la partie de la forêt où ils se sont installés. Ils sont donc souvent en migrations. la forêt alors s'empare du village abandonné et il ne reste plus rien que des huttes. Les Pygmées construisent alors un autre village. Les huttes pygmées sont évidemment très petites. Elles ont la forme d'un igloo et sont constituées d'arceaux de tiges de bois recouvertes de grandes feuilles de palmes (qui changent de couleur avec le temps, et roussissent, et brunissent), et qui sont cousues avec des lianes aplaties.

Hutte pygmée

Quand on arrive dans un village comme celui-ci, on commence par serrer la main du Chef, puis celle de tous les gens qui sont ici. En général, il n'y a pas grand monde dans la journée car les hommes sont partis à la chasse et les femmes à la cueillette. Dans ce village, il n'y a que les femmes avec les enfants. Elles portent uniquement un cache-sexe, et leurs seins sont tout aplatis et flasques. Elles ont la peau assez claire, et on note des scarifications faites sur les épaules ou sur d'autres parties du corps, qui sont, paraît-il, un signe de beauté.


Ce village-ci est très proche encore des villages africains et donc en contact avec la "civilisation" d'ailleurs. Notre présence ne trouble guère. Ils acceptent volontiers que nous prenions des photos, car notre guide leur rapporte d'années en années les photos faites par les groupes précédents, et les Pygmées sont ravis de recevoir des images. Les Pygmées vivent encore en condition de servage vis à vis des Bantous. Pour les Africains, le Pygmée qui vit comme une bête au sein de la forêt, est une tare pour un pays en voie de technologie, et qui fait honte et qu'on veut cacher. Alors pourquoi les touristes veulent-ils donc venir de si loin pour s'intéresser à ces gens là !!!


Nous mangeons nos sandwiches et nous leur laissons ce qu'on a ouvert et pas terminĂŠ, ainsi que quelques oranges. La marche reprend. Pour encore deux heures environ. On arrive dans un champ de bananiers. Quand il y a un champ de bananiers, cela veut dire qu'il y a un village tout proche.


CAMPEMENT AU MILIEU D'UN VILLAGE BANTOU On est très surpris car on se retrouve à nouveau au bord du fleuve, de la Lobaye.En fait, on a longé le fleuve, en s'enfonçant dans la forêt, pour notamment tomber sur ce village pygmée, et l'on se retrouve simplement juste un peu plus loin sur le fleuve que le précédent campement où nous avions bivouaqué. C'est un village non-Pygmée, mais Bantou, fait de longues maisons. Nous nous écroulons sur des chaises, les jambes allongées, et les pieds battants ! Et dire que ce n'était que la première journée de marche ! Nous n'avons marché que quatre heures. Honoré fait une distribution de photos auprès des villageois, si bien que nous pouvons photographier autant que nous voulons avant que la nuit tombe. Nous montons le camp, au milieu même des maisons, sous l'oeil des villageois. Nous sommes l'attraction. On nous observe dans nos installations, dans nos gestes. Je remarque la curieuse coiffure des Centrafricaines : pas de nattes, mais des antennes de cheveux dressées sur le crâne.


Désinfecter nos blessures Nos docteurs commencent déjà à être sollicités pour soigner les blessures. Les Africains, qui n'ont pas de moyens pour désinfecter, voient leurs blessures se remplir de pu à une rapidité monstre, et devenir très moches, et très douloureuses. Mais il y a aussi d'autres sortes de maladies puisque je surprends Bertrand lancer à Claude : "t'as pas quelque chose pour une chaude-pisse ?" Didier attribuera un surnom à chacun de nos médecins : Bertrand, le "Docteur Gono", Claude "le Docteur Erratum", et François "Docteur Uterus" (il est gyneco). On fait un feu de bois et en même temps qu'on prépare le dîner, on sèche nos chaussures trempées auprès du feu, ainsi que nos pantalons et chaussettes. C'est ainsi que j'ai fini par avoir des pataugas brûlées, cramées, bonnes au bout du voyage à laisser dans la poubelle (Mais à la fin du circuit).

Les chants des Pygmées Au cours du dîner, on entend les chants de Pygmées venant d'un villages voisin. Ces chants ne cessent jamais. Après le repas, certains se rendent à ce village. Moi je suis trop crevée pour les suivre et je n'ai pas envie de ré-enfiler les pataugas. Nous sommes quelques uns à rester là, à sécher les vêtements auprès du feu. J'en profite pour raconter à Honoré le succès du disque sur le Pygmées Akka en France, et il me dit "c'est pourquoi les gens viennent ici avec des magnétophones ?". Il a bien du mal à comprendre que ces chants fassent autant de succès chez nous, et que nous portions tant d'admiration vers "ces gens-là". Les chants durent très tard dans la nuit. C'est inutile de nous coucher car nous n'aurions pas pu nous endormir. On a donc attendu la fin des "célébrations" et le retour des autres au camp. Nos copains n'ont rien trouvé de mieux que de secouer nos tentes pour nous faire peur, au point de les faire s'écrouler.


Samedi 27 Octobre 1984 Petit déjeuner sous le regard des villageois, notamment les enfants. On est l'attraction du village. Pour nous, ce matin, l'attraction c'est un pangolin, un curieux animal avec une peau en écailles comme une carapace, et une longue queue, comme celle d'un renard, qui se nourrit de termites et de fourmis. Il grimpe au pied d'une chaise et s'enroule sur lui-même pour se mettre en boule. Nous faisons la distribution d'eau pour chacun, dans nos gourdes, à partir du gros jerricane "chloronozé", et nous partons.

Les marigots Encore un marigot couleur de rouille. Au premier qu'on a traversé, on a fait une sale tête. A la fin de l'expédition, on en rigolera. Au point où on en sera !!! Dans ces marigots, on trébuche aussi sans arrêt car le fond de l'eau est aussi recouvert de bouts de bois, de branches, de racines. On n'a même pas pensé une seconde qu'il pouvait y avoir des serpents... et il pouvait y en avoir.

On trébuche dans les marigots


L'ennui avec ces marigots, c'est que sans parler de la bilharziose, il n'est pas drôle du tout d'avoir les pieds trempés ainsi que les chaussures, et de faire floc-floc en marchant. Et, quand, les chaussures et les chaussettes commencent à être sèches, voila, qu'on retombe face à un nouveau marigot ! Et il faut se re-mouiller. On aura des fois de l'eau jusqu'aux genoux. Un jour j'ai posé la question à Honoré au sujet de la bilharziose. D'après lui, les eaux ne seraient pas infectées. Il était du pays ... je me faisais un plaisir .. à le croire ! A vrai dire ce sont les eaux de pluie qui ne peuvent s'évacuer, qui emplissent ces marigots, et elles sont en cette saison bien ... renouvelées. Ce ne sont pas vraiment des eaux "stagnante". Enfin, il vaut mieux se donner de bonnes justifications pour garder le moral, car de toute façon il faut y passer, on n'a pas d'autres choix, on ne va pas rester au milieu de la forêt !

Pause déjeuner Au bout de deux heures environ de marche, on s'arrête en pleine forêt pour déjeuner. Le matin, la marche, ça va toujours. Là, on prend le temps de faire un bois de bois, et Honoré nous prépare un repas de poissons achetés au village où nous avons dormi la nuit dernière. Il n'est pas évident de s'asseoir par terre parce qu'il y a... des fourmis.


La chasse aux papillons Pendant ce temps, Bertrand a commencé à s'adonner à son occupation préférée pendant cette expédition( en dehors de la désinfection des plaies et la recherche de la "mousse" (le bière)... c'est la chasse aux papillons. Il a emporté avec lui le matériel adéquate : une boîte en verre dont le bouchon est rempli de chloroforme. Il faut dire que la Centrafrique est réputée pour être l'un des pays d'Afrique des plus peuplés en papillons. Au point qu'il y en a même sur leurs timbres ! Il y a une chose que Bertrand n'a pas emportée, c'est le filet à papillons. Alors il utilise sa casquette bleue américaine, aérée par des trous, pour attraper les papillons. C'est assez cocasse.

On marche Nous repartons. Le re-démarrage est toujours très difficile. On emprunte des chemins envahis par les lianes. On marche à nouveau deux heures. Claude peine. cela fait trois jours qu'il ne dort pas à cause des ronflements de François, avec qui il partage la tente. Vers 15 hres, on s'arrête en pleine forêt dans une clairière qui a du être autrefois un campement pygmée, puisqu'il reste deux abris faits de rondins de bois, sous lesquels nous nous écroulons. C'est là que nous allons bivouaquer. Nous sommes actuellement en train de nous déplacer en direction de la frontière avec le Congo, perpendiculairement, donc, avec la Lobaye. Pour atteindre les villages pygmées, il faudra deux jours de marche. Il faut donc faire un bivouac en plein milieu de la forêt, pour couper l'étape en deux. Là où nous sommes, maintenant, il n'y a pas de Pygmées dans les environs, ils sont beaucoup plus bas.

Le campement Nous montons les tentes. Maintenant nous avons pri l'habitude d'installer notre tente à côté de celle de Josette et Marie-Hélène, car on commence à perdre des "sardines" et on fait "sardines communes avec elles au milieu des deux tentes.


Il y a un petit marigot près du camp et certains y vont faire une toilette. Nous faisons sécher nos vêtements sur les abris de branchages. le spectacle des vêtements pendus partout est toujours surprenant à chaque camp. Nous faisons encore sécher nos chaussures auprès du feu de bois. Chaque soir ce sera la même chose. Et jamais elles ne sèchent complètement. les chaussettes, n'en parlons pas, elles puent l'odeur des marigots, et la couleur des chaussettes de tennis en éponge blanche a tourné à la couleur rouille.

Un dîner de gazelles Nos pisteurs ont chassé trois gazelles pour le dîner. Il paraît que pour les attraper, ils marchent sans faire de bruit et quand ils voient deux points brillants, ils tirent au milieu, c'est à dire au milieu des deux yeux. Et ce soir on a mangé de la gazelle. Ils la font d'abord boucaner, c'est à dire qu'ils la jettent dans le feu pour la faire carboniser. Ce qui permet de la conserver et de la transporter quelques jours. C'est un moyen de conservation très pratiqué en Afrique, pour le singe aussi. Je goûte à la gazelle, que l'on mange avec du couscous. mais je n'ai qu'un gros morceau avec beaucoup d'os et peu de viande. Enfin, c'est mangeable, c'est un peu filandreux comme du boeuf bourguignon, mais plus dur, et non cuisiné avec du vin…


Nous sommes tous assis sur un grand tronc d'arbre, à l'orée des feuillages, et tout à coup, un grand bruit se fait entendre derrière nous. Il fallait voir à quelle rapidité, on s'est levé en poussant des cris. Nous, on a cru que c'était un animal, tellement le bruissement des feuilles était fort. Pour Honoré ce n'a été qu'un arbre qui venait de tomber.

Une nuit bouleversée par la pluie Bouleversement dans la répartition dans les tentes. Claude, ne pouvant plus dormir à cause des ronflements de François, a décidé de partager la tente de Didier et de Bernadette, qui était une tente pour trois en fait. Mais Didier, lui, alors, décide de quitter la tente pour aller partager avec les jumelles de Lyon, une autre tente de trois, jusqu'alors occupée par elles-deux seulement. Mais la nuit fut plutôt bouleversée. Après les plaisanteries d'usage, on est rapidement rentré sous nos tentes après le dîner, en ayant soin d'enlever les vêtements qui séchaient, et qui commençaient à se re-mouiller avec l'humidité de la nuit. La pluie semblait menacer, une chaleur très lourde, qui nous inquiétait, et pourtant le ciel était rempli d'étoiles. On la sent venir cette pluie. La tornade se lève. Et à peine couchés (je venais de prendre un somnifère et je commençais à me calmer) ... l'énorme bruit de la pluie a retenti. Des trombes d'eau s'abattent sur notre tente. Ce soir-là, ce fut la panique. On ne savait pas quoi faire. On a commencé par vite ranger les duvets dans nos sacs à dos, ainsi que le maximum des affaires qu'on avait sorties. Puis on a saisi la cape imperméable et on l'a mise au dessus de nous. On reste stoïque . Mais là, on se rend compte que l'eau qui nous mouillait ne rentrait pas par le haut, mais par les côtés de la tente. C'est là qu'on découvre que les tentes ne sont pas étanches. Non seulement la toile se plie et se mouille sous le poids de l'eau qui tombe, mais voilà qu'au niveau des coutures du tapis de sol, l'eau pénètre aussi, et commence à former des rigoles à l'intérieur. Mon matelas Korrimat commence à se mouiller ! On se demande ce que font les autres à l'intérieur de leurs tentes, car on ne les entend pas. Alors on prend une décision. On plie au plus vite les affaires, on défait avec aps mal de difficulté le morceau de moustiquaire épinglé à l'entrée, bien accroché avec les épingles à nourrice, j'enfile ma veste de pyjama, et mes


plastiques en plastique, et on décide d'aller se réfugier sous l'abri en bois. On sort avec toutes nos affaires : le sac, les pataugas, à la main, en vrac, n'importe comment … Et voilà qu'on retrouve dehors, Claude et Bernadette... eux aussi sortis de leur tente. .... Encore une nuit sans sommeil !` Claude avait emporté avec lui une grande bâche en ciré, imperméable, et c'était une très bonne idée. Peu de temps après, François sort de sa tente en maillot de bain, un énorme sac poubelle à la main, où il avait mis toutes ses affaires. ça aussi une bonne idée. Nous avons appris, ainsi, à nos dépends, qu'il ne suffisait pas de rentrer nos affaires dans les sacs à dos, mais qu'il fallait tout envelopper dans des sacs poubelles, car tout fut trempé, à l'exception de mon duvet qui lui se rangeait à l'intérieur d'un sac coulissant imperméable à l'intérieur de mon sac à dos. François, en slip de bain, grelotte. Moi aussi je grelotte, en veste de pyjama, car elle est complètement trempée. Une seule solution, la retirer, et enfiler un pull-over. (D'où la nécessité d'avoir un pull-over sous l'équateur ..). Sortir le pull du sac, sous une pluie battante, n'est pas aisé. Le pull est sec et chaud. Je m'emmitoufle dans ma cape imperméable, mais la pluie me mouille quand même, surtout sur le visage. On essaye de dormir, là, sous l'abri. C'est impossible. Alors, dès que les trombes d'eau se calment un petit peu, je décide de les planter tous là, et de retourner sous ma tente. J'arrive à récupérer mon duvet non mouillé, et comme Micheline, ma compagne de tente, elle, est restée sous l'abri de bois, je peux me coucher au milieu de la tente, sans toucher les rigoles d'eau qui subsistent sur les côtés. Dans la chaleur de mon duvet, j'ai au bout du compte bien dormi.


Dimanche 28 Octobre 1984

Ce matin il pleut toujours C'est très désagréable, nous sommes trempés, les pataugas sont trempées, il faut les enfiler toutes mouillées. On prend notre petit déjeuner emmitouflés dans les capes imperméables, sous la pluie battante, et on démonte les tentes, couvertes de terre boueuse, sous la pluie. Si bien que les tentes trempées augmenteront la charge à porter ! On a appris ce qu'étaient devenus les autres qu'on pas vus sortir au milieu de la nuit : ils sont restés sous leurs tentes. Christine et Richard, qui ont des matelas pneumatiques, ont fait "du bateau". Les tentes de trois, plus grandes, avaient un autre problème : elles avaient des espèces de rectangles de moustiquaires sur les côtés, des petits grillages d'aération, et c'est par là que pénétrait l'eau de la pluie. Cette mésaventure nous a aussi appris à ne plus monter le tente sur une pente, comme on l'avait fait, et surtout pas dans la partie basse de la pente, car nos voisines, les soeurs jumelles, qui se trouvaient plus en haut que nous, ont reçu moins d'eau. C'est nous qui avons tout recueilli ! Nous partons sous la pluie, la cape imperméable recouvrant le sac à dos. Cette cape était très utile parce que même s'il ne pleuvait pas, elle me protégeait des lianes et des arbres qui m'accrochaient les cheveux, et quand il fallait passer la tête baissée et se frayer un passage au milieu d'une barrière de végétation. La marche est très difficile. On a passé une mauvaise nuit. Il pleut. Et c'est la marche la plus longue de tout le trek ! 7 heures en perspective ! Et voilà encore un marigot ! Au point où on en est ! Il est très long, c'est comme une rivière, il serpente entre les arbres. On patauge !!! Il faut escalader des tas d'arbres couchés à terre. parfois je me retrouve à l'arrière de la file, et parfois, par un retour de situation, je me retrouve à l'avant, et alors j'ai quelques problèmes pour guider la file, car le guide, lui,


marche bien loin devant. Et quand mes yeux se perdent et que je demande "Mais où est le chemin Honoré ?" il me réponds "Tu suis la piste" ... comme si c'était évident ! A un moment, on emprunte une piste d'éléphants, c'est à dire un enchevêtrement de lianes pas possible, un chemin ouvert par un passage des éléphants, en pleine broussaille, mais pas suffisamment dégagé pour nous. La fin de la journée est très dure. Le sac tire sur les épaules, et je suis sans cesse en train de relâcher ou de resserrer mes bretelles pour faire passer le poids d'une épaule à l'autre. D'autre part, la sangle abdominale du sac, qui est très nécessaire pour escamoter le poids, m'a blessée par le frottement et la transpiration, et je sens que mon dos est presque à vif. Nous ne parlons plus autant entre nous, car l'effort nous absorbe complètement. Mais combien d'heures reste-t-il encore à marcher ! Honoré ne peut pas répondre. Tout ce qu'il peut nous dire, c'est qu'il faut encore passer un deuxième marigot avant d'arriver au village pygmée. Et le marigot se fait attendre ... Enfin, on l'aperçoit. La nuit va bientôt, il faut accélérer la marche. On débouche enfin sur une grande clairière où se trouvent des huttes pygmées. On serre la main à tout le monde. C'est bien là qu'on campe. Enfin, légèrement plus loin. Honoré demande l'autorisation au Chef…. Il faut encore marcher un peu. La nuit est tombée quand on arrive dans une autre clairière, où l'on va pouvoir bivouaquer.

LE CAMPEMENT Attaqués par les fourmis On arrive par petits groupes, espacés les uns des autres. Et, quand moi, j'arrive sur cette clairière, je vois que tout le monde est en train de baisser les pantalons, et je me demande ce qui se passe ! Je comprends rapidement, car, je suis à mon tour, assaillie, dévorée, par des fourmis. Elles grimpent à l'intérieur du pantalon à une telle vitesse, qu'on en a


plein les cuisses. Elles ont une piqûre douloureuse et cuisante, et le seul moyen, en effet, de s'en débarrasser, est de baisser le pantalon, car on les attrape mieux par le haut, et on les écrase avec les doigts. Dès qu'on aura allumé le feu de bois, les fourmis disparaîtront du camp. J'ai appris aussi que pour s'en débarrasser, il faut les brûler avec des tisons brûlants.

Faire sécher le linge On sort le linge mouillé des sacs à dos, on installe des cordes entre les arbres, et on essaye de faire sécher tout cela, y compris les sacs de couchage qui en ont pris un sacré coup. Tout est trempé.

Les pygmées viennent nous observer Les pygmées viennent nous voir pendant notre installation, et nous observent quand nous préparons le repas. Marie Hélène nous découvre ses dons de masseuse exceptionnelle, car nos épaules sont terriblement écrabouillées par les sangles des sacs à dos, et, après une crème qui nous a chauffés et la position des mains exactement là où il le faut, sur le point de la douleur, cela nous a bien soulagés.


On dîne. il y a encore, ce soir, des chants qui retentissent venant du village pygmée, mais nous sommes trop crevés.


REPOS PRÈS UN VILLAGE DE PYGMÉES Lundi 29 Octobre 1984

Il faut tout faire sécher Heureusement, il n'a pas plu cette nuit ! Nous avions rentrés les vêtements à la tombée de la nuit, et ce matin, après le petit déjeuner, on sort absolument tout : papiers, passeport, argent, objets de toilette... pour les faire sécher. On découvre l'utilisation des feuilles de bananiers comme porte-manteaux. Dans le chemin qui longeait le camp, le spectacle des bananiers était surprenant : chemises, chaussettes, chaussures, les sacs à dos, les trousses de toilette, que d'objets qui devaient être hétéroclites aux yeux des Pygmées ! Ce chemin était le lieu de rencontres. Notamment il y avait un Pygmée qui passait souvent par là, avec un arc musical, un instrument typique, une sorte de petite harpe à quatre cordes.

A "l'hôpital du camp" Nous soignons nos petites blessures, ou plutôt nous nous faisons soigner par les infirmières du groupe. Car, pour ç, elles travaillent plus que "nos" médecins. Ampoules, désinfection des piqûres des moustiques grattées à sang, et épines dans les doigts… Le gros problème, ici, c'est l'infection des plaies, qui se produit à une vitesse monstre. Nous, nous avions les produits nécessaires pour nettoyer et faire cicatriser, mais les Pygmées, et même les Africains, eux, n'ont pas tout cela. Et, c'est ainsi que de petites blessures deviennent des catastrophes. La sangle abdominale de mon sac à dos m'a blessée durant la marche. je suis presque à vif. On me désinfecte et on me badigeonne de Mercurochrome. Et les copains trouvent une bonne idée de rigolade : ils me dessinent un bonhomme au Mercurochrome en haut des fesses, et ensuite me demandent de poser pour prendre la photo !


Heureusement, pendant le trek, nous n'avons pas eu de gros incidents, pas de diarrhées (on mangeait tellement de la nourriture européenne faite de féculents !) pas d'entorses, de chevilles foulées ou tordues, et pas de crises nerveuses, ce qui aurait bien pu arriver à l'un ou à l'autre, étant données les difficultés de l’effort. Pendant que je range ou sors mes affaires à sécher, Achille, l'un des porteurs me demande si je pouvais lui donner de la Nivaquine. J'ai été très surprise car la Nivaquine, soit on la prend pendant très longtemps, le temps du voyage et quatre semaines après, soit on ne la prend pas du tout ! Je lui ai demandé combien de cachets, il m'a répondu "pour deux ou trois jours". Je lui ai donné une plaquette de dix. Par la suite, on m'a expliqué que les Africains, pour beaucoup atteints de paludisme, ne prennent pas de Nivaquine comme nous, régulièrement, mais seulement quand ils sentent venir une crise, alors ils en prennent une grande dose pendant quelques jours.

Petite balade en foêt autour du camp Ce matin, il fait beau. cela fait du bien de laisser là l'équipement de marcheur et de pouvoir mettre bermudas et ballerines plastiques, de pouvoir aller se balader en forêt avec Honoré, ainsi vêtus et sans sac à dos. Comme on marche bien plus facilement sans sac à dos ! Même pour escalader les troncs d'arbres, ce n'est plus pareil. Honoré nous montre quelques espèces végétales de la forêt, et ce qu'il ne connaît pas, "de toute façon" n'est pas intéressant, car "seul ce qui est comestible est intéressant", les fleurs c'est sans intérêt !


Un village pygmée Au cours de cette balade, nous débouchons dans un village pygmée. Il y a un mélange de huttes traditionnelles et de maisons recouvertes de branchages, au milieu des bananiers. Il n'y a pas grand monde... un vieil homme barbu (c'est un signe caractéristiques des Pygmées, ils ont une pilosité beaucoup plus importante que les Africains), et cet homme avait une sacrée barbe, et il paraissait bien vieux. A côté de lui, une femme aussi très âgée, qui était peut-être sa femme, et une jeune femme portant son enfant dans un pagne.

Les autres Pygmées devaient être partis à la recherche de nourriture. C'est pour cela, sans doute, qu'il y avait, ce matin, autant de va et vient sur le chemin qui borde notre camp, les Pygmées devaient se déplacer vers la forêt pour chasser et cueillir.

Les pygmées viennent nous voir au camp Nous revenons au camp. L'après-midi se passe à traîner et à bronzer en maillot de bain, sur nos matelas Korrimat, installés dehors. Il fait très beau.


Après ce repos, je m'étonne qu'Honoré ne nous ait pas proposé encore de nous conduire au village pygmée. Moi, j'avais lu dans les livres, qu'il fallait respecter toute une tradition pour se faire accepter dans un village pygmée : laisser un cadeau, voir si le cadeau était accepté, ce qui signifiait que les Pygmées voulaient bien vous rencontrer … A ma question, Honoré répond "Tu peux y aller comme tu veux, c'est à côté !". Un ton de mépris, il tourne aussitôt la tête. Et je ressens à ce moment là tout le mépris que les Africains doivent avoir pour les Pygmées, ce peuple "en retrait de la Civilisation", ce peuple d'"intouchables", et comme ils doivent ressentir "comme honteuse l'existence des Pygmées".

Ce que j'apprends sur nos voisins pygmées Honoré m'apprend quelque chose : je faisais une erreur car je croyais que Baminga était le nom des Pygmées de cette région. Je disais "les Pygmées Baminga". Alors que le mot "Baminga" est seulement la traduction du mot "Pygmées" dans la langue d'ici. En Afrique on parle de "Bamingas" et non de "Pygmées". Honoré m'explique que les pygmées dansent tous les samedis et dimanches, et que ce soir, ils vont encore faire la fête, et que nous pourrons y aller? Ce qui est idiot puisque ce soir, on n'est pas Dimanche. Et quand je lui dis que je suis bien étonnée que les Pygmées puissent connaître le jour de la semaine,


Honoré semble choqué, alors que moi-même, partie dans cette aventure, je ne sais plus comment je vis et quel jour on est ! C'est vrai, toute la journée nous avons entendu de notre camp les tam-tams et les chants des femmes, venant du village pygmée. Je crois simplement qu'on n'a pas besoin de provoquer les Pygmées pour assister à leurs chants, car ils chantent tout le temps, cela fait partie de leur vie, cela les aide à faire face aux durs conditions de leur vie en pleine forêt.

Je vais rendre visite à nos voisins pygmées Alors, je me décide d'aller seule jusqu'au village pygmée. La nuit tombe. On m'a simplement dit qu'il valait mieux que je laisse mon appareil photo, qu'ils n'aimaient pas tellement ça… Le village est en effet pas loin une minute à pied. Quand je débouche du sentier sur la place du village, tous me regardent. Le Pygmée qui jouait du tambour s'arrête de jouer et tous les yeux se tournent vers moi. Je me sens assez mal à l'aise, ne sachant pas quoi leur dire (en quelle langue !) et que faire. Pas un sourire, pas un signe d’hostilité. Puis ils m'ignorent complètement, ils retournent à ce qui les occupait avant mon arrivée. Un homme était en train de balayer la place du village avec un balai fait de branchages. Les places des villages, au milieu des huttes, sont toujours très nettes. Une femme préparait le repas devant une hutte. Mais le joueur de tambour n'a pas repris sa musique. Alors je repars, déçue de ce premier contact. Un peu plus tard, la nuit tombée, Claude me propose de retourner au village avec lui et Bernadette. Nous avons appris qu'au village, là où j'étais allée, il y avait une femme pygmée qui parlait le français. Elle est facilement reconnaissable, car c'est la seule qui porte des vêtements, les autres n'ayant qu'un cache-sexe, avec un drôle de noeud, énorme, derrière au dessus des fesses. Elle a l'air très intimidée quand nous lui adressons la parole, et quand nous lui demandons si elle peut nous indiquer le chemin qui conduit au petit village, un autre village pygmée dont on nous a signalé l'existence, et qui se trouve un peu plus loin.


Nous empruntons le sentier, ce village n'est pas très éloigné, mais la nuit est noire, et nous devons nous guider avec une petite lampe électrique, ce qui pour nous, en forêt, n'est pas facile. On tombe même entre les deux villages un tronc d'arbre couché au travers du chemin... dont on se souviendra… Quand nous débouchons sur la place de ce village (toujours très nette), il y a au beau milieu un tronc d'arbre couché, où sont assis, déjà, une grande partie de notre groupe. les Pygmées sont complètement indifférents à notre présence, ne nous prêtent aucune attention, reprennent leurs bavardages, leurs occupations, on ne les gêne pas le moins du monde. Ce serait plutôt nous qui nous serions gênés, plutôt frustrés, d'être invisibles aux yeux des autres. Evidemment, nous sommes trop nombreux. Le gros de la troupe s'en retourne, et nous, nous restons seulement à trois, à méditer, là, sur l'indifférence des ces gens vis à vis de nous... Nous sommes assis au milieu d'eux et ils ne nous regardent pas. Ils continuent leurs occupations comme si nous n'existions pas. Mépris, indifférence, ou respect de la liberté de chacun, de notre liberté d'être là, aussi ? Nous restons un bon moment, dans la nuit, à saisir le charme de cet instant, les sons, la faible lueur des braises devant la case de chaque famille, les discussions murmurées et impénétrables, le silence seulement rompu par des cris d'enfants qui appellent leurs parents. Nous avons le sentiment d'un parfait équilibre entre ces hommes et la nature qui les entoure, la forêt, qui est leur domaine et complète leur harmonie. Nous pensons à notre retour en France, et au souvenir que nous garderons de ce moment. Nous retournons au grand village, car nous pensons que les autres sont peutêtre en train de dîner, et pourraient se demander ce que nous devenons. Nous re-franchissons à la lampe électrique le gros tronc couché sur le chemin, et quand je me retourne, je vois un Pygmée qui nous a rattrapés à la marche, qui, lui, saute au-dessus de l'arbre, en pleine nuit ! comme un sauteur de courses à obstacles ! Nous retrouvons au grand village les autres qui s'y étaient arrêtés, et nous rentrons à notre camp tous ensemble.


Dîner au camp Le soir, pour dîner ... du manioc, que les Pygmées nous ont apporté dans la journée. Cadeau des Pygmées ... signifie que nous sommes acceptés ! il est vrai que nous leur avions donné en cadeau du sel, des allumettes et des cigarettes. Le manioc est une racine blanche, filandreuse au centre, longue, et cuite à l'eau. Et pour nous, ce soir, ce sera accompagné de ... corned beef. le manioc a un goût de pomme de terre, et est très bourratif. Le corned beef africain n'est pas comme le nôtre, mais se présente comme une purée, il nous fait plus penser à de la pâtée pour chiens. Je ne peux pas, avec la meilleure volonté possible, terminer mon assiette, tant mon estomac refuse le surplus.

Une fête au village pygmée Après la vaisselle, nous retournons tous au grand village, pour assister à la fête. Même Honoré est venu. La musique et les danses sont déjà en train. Nous nous glissons discrètement et nous asseyons au milieu des villageois autour de la place. La musique est produite par un seul long tambour horizontal qu'un homme frappe sur les côtés, et qui assure le soutient rythmique, sur lequel se placent les chants très caractéristiques, basés sur le yodel, c'est à dire une alternance de la voix de poitrine et de la voix de tête. Ce sont principalement des choeurs d'enfants, d'abord réunis en un seul groupe, au milieu duquel, dans un ordre, absolument aléatoire, se distingue de temps à autre, un soliste qui pousse la voix plus haut que l'ensemble du choeur, et qui s'efface par la suite. Puis le groupe se scinde en deux groupes qui se placent aux deux bouts de la place, et qui se répondent. Les femmes dansent en cercle au milieu de la place, se tortillant les fesses, se trémoussant, se déhanchant, et en glissant sur le sol les pieds joints. Le trémoussement des gros noeuds des cache-sexes au dessus des fesses est assez drôle. Elles simulent la danse de l'éléphant : au milieu du cercle, un personnage complètement recouvert de paille est l'éléphant, et elles, sont les chasseurs qui essayent de le capturer en l'encerclant.


Il fait complètement nuit, il n'y a aucune lumière, aucun feu, et la magie s'opère, entre le rythme du tam-tam, et les ombres noires de ces femmes. Seulement la fête va être écourtée : la pluie menace. Nos yeux scrutent le ciel de temps à autre avec inquiétude. Nos affaires qui sont maintenant sèches .. tout va recommencer .... une nuit affreuse en préparation…

Il faut rentrer, il va pleuvoir Honoré décide tout à coup "Il faut rentrer, il va pleuvoir". Nous comprenons bien ce qu'il veut dire, et nous nous dépêchons. Sous la tente, cette fois-ci, nous nous organisons. Nous nous préparons pour faire face à la situation imminente. Cette fois-ci, nous resterons sous la tente. Nous mettons la cape imperméable au dessus du tapis de sol, en la remontant bien sûr sur les côtés de la tente. Nous avons fait attention de ne plus monter la tente dans une pente. Les affaires ont toutes été placées dans des sacs poubelle en plastique, y compris la trousse de toilette, et les papiers, le sac de couchage et le Korrimat. Rien n'est déplié. J'utilise aussi un grand sac poubelle pour continuer l'installation imperméable des côtés de la tente, car la cape est trop petite pour tout couvrir. On n'a jamais assez de sacs poubelle sur soi ! En fait, une bâche ferait mieux l'affaire. Et je dors sans rien, à même le sol, pour éviter que les affaires soient mouillées, car si tout est mouillé, on ne peut plus se réchauffer.

Il pleut et l'eau pénètre dans la tente Et ça arrive ! le bruit terrible de la pluie. Les trombes d'eau. Avec cette force inouïe. Nous nous serrons au maximum au centre de la tente. ça y est, l'eau pénètre par les côtés. le tissus plie et tombe, trempé, sur nos visages. je repousse au maximum la cape imperméable vers les côtés car l'eau commence à nous envahir. Il n'est pas question de dormir. La hantise de ces nuits de pluie passées sous la tente ! Enfin, après avoir déversé son lot d'eau, la pluie se calme. C'est toujours comme ça. ça ne s'arrête pas, mais cela tombe moins fort, et cela s'entend nettement au son de la pluie qui se fait plus doux, ce qui nous permet de nous endormir. Alors, là, seulement à ce moment, j'ai sorti mon duvet, et me suis emmitouflée dans sa chaleur, et j'ai dormi.


LA DERNIÈRE MARCHE Mardi 30 Octobre 1984 On s'en est pas mal sorti de cette nuit pluvieuse. Il pleuviote encore un peu au réveil.

Des dizaines d'yeux nous regardent Au petit déjeuner, on dirait que tout le village pygmée est là ! Des dizaines d'yeux nous regardent.


C'est la dernière marche du trek On enfile nos capes imperméables. On charge et on part. La marche devait être de courte durée, trois, quatre heures, pour rejoindre le bord de la rivière Lobaye. C'était la dernière marche du trek. On retourne au camp de base, et on devait y être vers midi. Mais voilà... Le groupe s'est scindé en trois parties, car nos allures étaient différentes. Nous, le groupe le plus faible, le plus lent, conduit par Honoré, eh bien, on s'est perdu ! Si bien qu'on a marché trois heures de plus que les autres… Honoré nous a dit "Ne bougez pas, restez ici". Il nous a plantés au milieu de la forêt. Alors on a engagé une partie de pétanque avec des espèces de fruits tombés au sol. Eh oui, Honoré avait raté la bonne piste, il a fallu revenir sur nos pas. Et cette marche fut vraiment bien longue pour nous. On n'en voyait pas la fin. On était devenu parfaits pour le passage au dessus des colonnes de fourmis. On criait "Attention, fourmis!". Et on allait à ce moment là très très vite. On a croisé deux, trois villages de Pygmées, où les gens venaient vers nous pour nous demander des cigarettes. Mais il fallait toujours marcher, et ne pas s'arrêter, et on l'a bien regretté. Il fallut encore passer un marigot... on croyait que c'était fini les marigots…

C'est fini !!!!! Enfin le soleil, les champs de bananiers. On savait maintenant puisqu'il y avait des bananiers que le village allait venir "après" les bananiers. De plus en plus de bananiers. La forêt formait derrière nous une barrière sombre, maintenant franchie. La forêt, elle, était derrière. C'était fini !


RETOUR AU CAMP DE BASE Arrivée au camp de base, Le camp des caféiers. Tous les autres étaient déjà là. Ils avaient déjà installé leurs tentes, mis à sécher leurs vêtements, déjeuné. Nous, nous ne nous étions même pas arrêtés pour manger, on était si en retard. Il était bien maintenant 15 hres passées. Les autres nous avaient gardé des petits gâteaux et des oranges : tea-time ! Ce fut délicieux. Ils avaient commencé à s'inquiéter de ne pas nous voir arriver, on avait vraiment beaucoup de retard sur eux. Le champ de caféiers, comme on le reconnaissait bien ! Tout est si vert et si ensoleillé. Cette fois-ci, on a carrément attaché le piquet de la tente à un caféier, c'est mieux que la sardine.

Bertrand déchire sa moustiquaire, au grand désespoir de Roselyne, pour se confectionner un filet à papillons, à l'aide d'une branche d’arbre.


Se laver dans la Lobaye Alors cette fois-ci, plus d'hésitation : on a franchi les marigots, on peut bien aller se baigner dans la Lobaye ! Quel délice ! savonnage, lavage des cheveux, en se tenant à un tronc d'arbre pour les rincer.

Honoré, lui, nous lavait nos vêtements dans la Lobaye en échange d'un pantalon ou d'une chemise que nous lui laissions. On a retrouvé le stock de nourriture qu'on avait laissé au village avant de partir en trek. Marie- Hélène nous a préparé une compote de fruits très réussie. Par contre, notre papier WC commence à bien manquer, et nous empruntons les rouleaux des messieurs, qui n'en ont pas utilisé autant que nous. La nuit tombe vite. Nous dînons avec la joie de retrouver les bonbonnes de vin, et nous nous couchons. Nuit paisible.


DANS LA MAISON ABANDONNÉE Mercredi 31 Octobre 1984

Relax au camp de base Le voyage commence à devenir relax. on ne part qu'à 15 hres cet après-midi, pour aller visiter une scierie, un peu plus haut sur le fleuve. Un peu de repos, et un peu de temps à nous. On se lave dans le fleuve. on commence à trouver cela très agréable de se laver dans la Lobaye. Puis on va nager, enfin, on essaye de nager, car le courant du fleuve est tellement fort, qu'on nage et qu'on n'avance pas. On nage tout près du bord car ce n'est pas très sécurisant ce courant. Bertrand a récupéré le filet à papillons d'Achille, un "vrai" filet à papillons, et se promène au milieu des caféiers, la casquette bleue sur le crâne, d'un pas lent, et l'oeil à l’affût. Puis je me fais bronzer sur l'herbe, range un peu mes affaires, et j'attrape mes plus beaux coups de soleil sans m'en rendre compte, tellement il fait beau. Je sympathise avec les enfants du village, et surtout avec un petit garçon qui ne sait dire que "oui" tout le temps. Je m'amuse avec lui à lui montrer comment on peut faire de la musique avec un bout de bois qu'on fait rouler sur un couvercle de marmite. Roselyne, elle, lui donne une bille, qu'elle a emportée de chez elle. Le gamin paraît très intimidé.

De nouveau à bord du bateau A 15 hres nous partons. Nous prenons le bateau pour aller un peu plus loin visiter une scierie, le long du fleuve, sur l'autre rive. C'est là que nous passerons la nuit, et nous reviendrons au camp de base le lendemain matin. Nous emportons donc seulement de quoi manger pour deux repas. Un peu de bateau, très agréable, pas très long, il fait beau. Un petit débarcadère en hauteur.


On y accède en grimpant sur le toit du bateau, et on passe les sacs les uns après les autres, en faisant la chaîne.

Campement dans une maison abandonnée La scierie est là, au bord du fleuve. Nous devons camper sur son terrain, au milieu des hangars. Le générateur d'électricité fait un boucan monstre. (Il paraît qu'il s'arrête à 23 hres…) Nous commençons à monter les tentes, mais le sol est affreusement dur, et pour rentrer les sardines, il faut se servir des bouts de bois qui traînent ça et là comme marteaux. les sardines se tordent. Quel travail ! De plus, le ciel est bien inquiétant, et nos visages s'assombrissent... On nous dit alors que nous pouvons nous installer dans une maison abandonnée qui se trouve à côté de la scierie, au bord du fleuve, face à l’embarcadère. Nous allons voir. C'est une immense maison coloniale qui devait être magnifique autrefois, avec une grande terrasse couverte, une immense pièce qui devait être le salon - salle à manger, qui donne sur la terrasse par des portes-fenêtres tout le long. Nous visitons d'avantage, et nous découvrons une vraie salle de bain, aujourd'hui occupée... par une souris. Quant à la grande pièce elle est, elle, habitée par de sales araignées dans les coins. Enfin, il vaut mieux ça que recevoir la pluie ! Nous démontons nos tentes. Sauf Claude qui pense que la pluie ne va pas tomber, et qui décide de rester, seul, à camper à l’extérieur. La terrasse ou le salon ? Que choisir ? Dans le salon on étouffe de chaleur. Sur la terrasse on craint les moustiques, et peut être la pluie, si elle est vraiment forte. Je transporte mes affaires de la terrasse au salon, bien hésitante, et choisis en fin de compte le salon, car je n'ai jamais tellement aimé, personnellement, dormir à la belle étoile sans la protection de la tente. Cette fois-ci, nous dormirons donc au dortoir !


Un dîner autour d'une table Pour une fois, nous prenons un repas autour d'une table, car il reste quelques rares meubles dans cette maison : une table, un lit, quelques chaises, des tabourets. Nous faisons le feu de bois dans le jardin, en bas de la terrasse, et nous mangeons le repas "habituel" arrosé de bière quand même, et si bien arrosé que ce soir là, Bertrand est bien plus... qu'arrosé. Il valait mieux ne pas lui parler, il était complètement ailleurs. Honoré et Louis Marie, eux, mangent quelque chose qui ne nous dit rien du tout : un morceau de singe boucané, c'est à dire qu'il est devenu tout noir et dur comme de la pierre, complètement carbonisé. Après le repas et la vaisselle, nous allons voir la tente de Claude, toute seule au milieu de la scierie. Un jeu de chat et de souris commence et la tente commence à bien remuer, au bout du compte elle s'écroule sur tout le monde, comme un parachute qui s'abattrait sur nous. Il ne reste plus à Claude qu'à remonter sa tente !

Il pleut ! Mais nous sommes à l'abri Et ce qui devait arriver arriva. Des trombes d'eau s'abattent, les éclairs traversent le ciel, le tonnerre fait rage. Mais cette fois nous sommes à l'abri et heureusement.Comme toute la pièce a de grandes portes-fenêtres, on a une vue impressionnante sur le ciel déchiré d’éclairs.


Evidemment c'est la ruée vers l'intérieur, de ceux qui avaient choisi de dormir sur la terrasse, le toit d ela terrasse en les protégeant plus contre la violence de la pluie, ainsi que de Claude qui avait choisi de dormir sous sa tente dehors. C'est un déménagement ultra rapide, avec sacs à dos et sacs de couchages à la main. Heureusement la pièce est bien assez grande pour accueillir tout le monde sans nous serrer. Après, la nuit ne fut pas mauvaise, emplie de sommeil.


NOTRE BATEAU A DISPARU ! Jeudi 1 er Novembre 1984 Ce matin, Honoré nous réveille avec des beignets tout chauds. Nous n'avons plus de pain, et avec la farine que nous avions, il nous a fait des beignets africains succulents et chauds. Il s'est levé à 2 hres du matin pour faire la pâte, et à 6 hres pour les faire cuire.

Notre bateau a disparu Mais voilà, il y a une mauvaise nouvelle : il s'est rendu compte ce matin que notre bateau avait disparu. Détaché par l'orage ? ou volé ? Honoré et LouisMarie ont dormi sur la terrasse cette nuit, tant l'orage était fort, et pas à bord du bateau comme ils le font à l'habitude. Et personne n'a rien entendu avec l'orage ! Honoré décide d'envoyer Louis-Marie en pirogue, à la recherche du bateau. Nous découvrons que nous sommes le 1er Novembre parce que nous devions assister aujourd'hui à un abattage de bois dans la forêt, et nous apprenons que personne ne travaille aujourd'hui, et qu'il faudra rester un jour de plus pour aller voir cet abattage. Donc, le contretemps du bateau, pour l'instant n'est pas encore dramatique. Espérons qu'on le retrouvera. Par contre, nous n'avions pas prévu de rester si longtemps, et nous n'avons pas emporté suffisamment de nourriture. Nous allons donc aller au village voir si nous pouvons acheter quelque chose. Ceux qui avaient commencé leur nuit sur la terrasse, avouent avoir été, le peu de temps qu'ils y sont restés, dévorés par les moustiques, beaucoup plus que nous. Pourtant la maison sera l'endroit où nous seront le plus piqués, beaucoup plus que sous la tente dans la forêt, non pas à cause de la proximité du fleuve, mais à cause des marres d'eau qui se trouvent entre la scierie et le village, et qui attirent les moustiques.


Courses au village Nous allons donc au village, et tout de suite sur le chemin, nous faisons face aux résidus des inondations, que nous traversons à pied en pataugeant. Mais maintenant, après l'expérience des marigots, cela ne nous fait plus rien. C'est la première fois que nous voyons la Centrafrique à l'intérieur des terres. Quelle différence de paysage avec la forêt et les rives du fleuve. Le paysage est rouge et vert, la terre ocre, et les essences tropicales d'un vert éclatant, tranchant sur ce rouge. C'est un grand village, fait de maisons uniquement, aucune case. les gens circulent beaucoup. C'est un complet dépaysement pour nous par rapport à l'environnement solitaire de la forêt. Nous apprenons le nom de ce village : BATA LIMO. Nous achetons du pain chez un boulanger ambulant, des tas de baguettes, nous l'avons dévalisé de tout ce qu'il avait. Nous allons jusqu'au marché, au centre du village, mais là, que du manioc, sous toutes ses formes. Sur le retour nous tentons d'acheter des brochettes de viande, pourquoi pas ? La pluie menace. C'est moi qui suis chargée de porter les baguettes de pain, car j'ai ma cape imperméable, et on m'emmitoufle avec les pains dans les bras en dessous. Nous pensons au manque de bière, et nous finissons par trouver un endroit où on en vend, mais nous devons laisser une consigne en monnaie pour la caisse que nous emportons pour porter les bières, et que nous devrons restituer. Les gars portent le cageot de bières à bout de bras tout au long du chemin. Au passage des mares d'eau, catastrophe, ma ballerine en plastique s'enfonce dans la vase, et je la perds, et par le déséquilibre, les baguettes qui sont dans mes bras sont en mauvaise posture. On me débarrasse et j'y vais à pleines mains dans la vase à la recherche de ma chaussure. j'ai bien cru la perdre, et je suis arrivée à la récupérer !


Nous rentrons à la maison. Le déjeuner est constitué de sandwiches au pâté. L'après-midi s'est passée à traîner, à sommeiller, à bronzer, à se laver dans la Lobaye.

Rencontre avec des Portugais expatriés Par contre, un événement va se produire qui va transformer notre séjour à la scierie. Bernadette vient de retrouver par hasard une fille qui a voyagé à ses côtés dans l'avion vers Bangui, et avec qui elle avait sympathisé. Cette fille est une Portugaise, parlant très bien le français, et qui venait rejoindre son mari qui travaille dans une scierie. Et voilà, c'est justement cette scierie-ci ! Il y a en effet tout un groupe de coopérants portugais et français qui dirigent cette scierie, et dont les maisons, sont voisines de la nôtre, mais entourées de grands jardins, nous n'y avions pas prêté attention. Quand on leur a raconté l'histoire du bateau qu'on a perdu, ils nous ont dit "Votre bateau ... il est déjà au Zaïre !". En effet il y a beaucoup de Zaïrois qui travaillent dan ce village, le Zaïre est tout proche, et il y a beaucoup de vols, c'est très fréquent. Que notre bateau ait été volé, c'était une chose évidente pour eux. les voleurs l'auraient détaché, profitant du bruit de l'orage, sans que personne n'entende. la Lobaye .. l'Oubangui... on arrive vite au Zaïre ! Honoré se fait beaucoup de soucis et se culpabilise. Nous lui disons que de toute façon, valait mieux que lui et Louis-Marie dorment à terre, parce que s'ils s'étaient trouvés à bord du bateau, et que des voleurs aient essayé de d'en emparer, ce n'est pas eux qui auraient pu les empêcher, et ils auraient peutêtre tout simplement été massacrés et jetés à l'eau ... Ils étaient vivants, c'était plus important que le bateau. De toute façon, la situation n'est quand même pas catastrophique. On n'est plus en forêt vierge. En plus on n'est pas isolé, il y a tout un groupe de coopérants avec nous, ils ont la radio, et Bangui, en fait, n'est pas si loin, on est à 80 km d'une route potable, beaucoup plus rapide que la voie par le fleuve. Les coopérants, eux-mêmes, ont l'habitude d'aller se ravitailler dans les supermarchés de Bangui une fois par semaine. Bernadette, Bertrand, Roselyne et Claude sont restés toute l'après-midi chez les coopérants. Le soir, comme ils n'étaient pas rentrés, on a dîné sans eux.


Dîner Cousous et brochettes piquantes, car les brochettes achetées ce matin au marché, sont plus que pimentées ! Moi je les avale plutôt bien, et m'en ressers trois fois, avec le couscous, ça se marie très bien. Les copains reviennent de chez les coopérants, et y retournent aussitôt, car ils y sont invités à dîner.

Chasse aux bestioles Nous installons le bivouac dans la maison, et nous faisons la chasse aux insectes : nous faisons brûler des tortillons anti-moustiques au milieu de la pièce, et nous essayons de tuer une araignée velue en la vaporisant de bombe insecticide. Nous l'écrasons avec beaucoup de mal.


AVEC LES BUCHERONS Vendredi 2 Novembre 1984 Réveil à 5 hres du matin pour pouvoir prendre le camion qui emmène les bûcherons en forêt. Honoré est inquiet de ne pas voir revenir Louis-Marie, parti en pirogue, et décide de partir à sa recherche, à pied, par les terres. Nous, nous grimpons à bord du camion, en se servant des énormes roues comme marche-pieds. Nous nous installons tant bien que mal sur les côtés avec les bûcherons debout, accrochés à l'avant, avec au milieu de nous, une énorme tronçonneuse, comme dans les films d’horreur... La piste est de terre rouge, et nous nous enfonçons dans la forêt. le camion cahote beaucoup, surtout qu'avec la pluie, la piste est devenue boueuse. Nous arrivons dans un village, enfin, un groupement de maisons. C'est de là que partent les bûcherons pour abattre les arbres en forêt. Nous suivons par groupes de trois, quatre, un bûcheron. On retrouve nos sentiers envahis par les herbes !

Un abattage de bois dans la forêt Un homme est déjà à pied d'oeuvre près d'un énorme arbre, dont je n'ai jamais su l'essence. Ils sont deux. l'autre doit être un contremaître. le bûcheron porte un casque rouge et attaque l'arbre avec la tronçonneuse électrique. Nous pouvons rester tout près. La sciure de bois gicle comme une pluie. L'homme n'attrape ainsi qu'une moitié de la circonférence de l'arbre. Nous nous demandons de quel côté va tomber l'arbre, et quand il faudra nous sauver. L'oeil du contremaître décide. Il nous fait alors signe de nous éloigner, et nous montre vers où.


En effet, en quelques secondes, l'arbre bascule, le bûcheron court à toute allure loin de l'arbre. le plus impressionnant c'est le bruit, le fracas qui retentit quand l'arbre se casse et tombe en basculant. La coupe est une énorme déchirure irrégulière. le bûcheron regarde son arbre avec la fierté dans les yeux… Nous assistons à la mort d'un deuxième arbre. Puis nous en avons assez, et reprenons le chemin qui mène au village, là où le camion attend. Nous attendons quelques instants les bûcherons qui reviennent, et nous repartons en camion. Sur le chemin, maintenant, plein de gens circulent : des femmes qui portent sur la tête des planches de bois, des enfants, des zébus. Au passage dans le village de Bata Lima, nous re-marchandons une caisse de bières, autant en profiter, puisqu'on peut la transporter dans le camion.

On retrouve le bateau volé Et quelle est notre surprise en arrivant dans notre maison ! Le bateau est là ! Et Louis-Marie aussi. Nous avons l'explication : le bateau a été détaché, volé, pendant que l'orage faisait rage, et personne ne l'a entendu. Les voleurs s'intéressaient à son moteur. Une fois sur le fleuve, ils ont essayé de le détacher, mais c'est un moteur un peu spécial, et ils n'y sont pas arrivés. Alors, ils ont abandonné le bateau. Louis-Marie l'a retrouvé, le moteur à moitié couché dans l'eau, à proximité du village aux caféiers. Il a passé la nuit là-bas, a rattaché le moteur, et le voilà ! Il doit encore passer la journée à le réparer. Seulement voilà, Honoré, lui, est parti à pied à la recherche de Louis-Marie. A quelques heures près, ils se croisaient. Quel contretemps à l'Africaine ! Il n'y a plus qu'à attendre le retour d'Honoré, en espérant qu'on lui dira au village des caféiers que Louis-Marie a retrouvé le bateau, et qu'il est reparti sur Bata Limo.


Se laver ! Pour l'instant le moral est remonté, et nous essayons d'aller nous doucher dans une vraie salle de bain, celle d'André, l'un des coopérants,.Il est tout à fait d'accord et il a dit à son boy de nous montrer le chemin. Nous occupons la salle de bain à plusieurs, et Micheline, la première à être déjà prête sous la douche ! Mais là, déception... il n'y a pas d'eau ! Nous appelons le boy. Micheline est bonne pour se rhabiller à toute vitesse. Malheureusement, il n'y a plus d'eau, et cela ne peut être réparé immédiatement. Eh bien, direction la Lobaye… Après la toilette, nous nous faisons des sandwiches sous le regard des enfants du village.

On commence à s'ennuyer L'après-midi a été longue. une journée sans rien faire, c'était bien, mais deux, c'est trop. Richard, pris d'une excellente initiative, entreprend de balayer la pièce. Il nous fait déplacer tous nos sacs et nos couchages, et y met beaucoup d'ardeur, sous le regard ahuri de Louis-Marie. Tout le monde tourne en rond. Bernadette, Bertrand, et d'autres, sont partis chez André. D'autres sont allés au village à la recherche de nourriture éventuelle. Moi et quelques autres, nous essayons de dormir dans la pièce, mais en vain. Je tente de me mettre à écrire, quelques notes, mais cela ne vient pas du tout, mon esprit est complètement vide, même de souvenirs, et encore plus de réflexion. Je bronze un instant, puis je pars vers le ponton m'installer avec quelques autres.

Pêcher Claude et Roselyne nous rejoignent. Claude a apporté son matériel de pêche : un rouleau de fil, quelques plombs, et un hameçon. Et il s'essaye. Roselyne et


moi, nous nous amusons beaucoup à voir les gamins baisser leurs culottes et faire leurs besoins dans la Lobaye, au travers de planches de bois du ponton.C'est le tout à l'égout derrière ! Claude ne réussit à pêcher quoi que ce soit. Roselyne s'y essaye, mais c'est un autre fiasco. Et moi, de même.Et puis, c'est très énervant de tenir un fil à bout de bras et d'attendre, et que rien ne se passe.Même le pêcheur qui est à deux pas de nous, est aussi bredouille. Alors ras le bol la pêche ! D'ailleurs il se fait plus frais, nous retournons à la maison. La maison s'est repeuplée. Il paraît que c'était l'une des plus belles maisons de toutes, du temps où elle était habitée. On peut imaginer les soirées qu'il devait y avoir dans l'immense salon donnant sur la terrasse.

Dîner : un cochon ! Ceux qui sont allés au village, sont revenus avec... un cochon ! que LouisMarie ce soir va nous préparer au feu de bois, en méchoui. Mais ils n'ont pas trouvé de papier WC. Il y avait bien quelques "épiceries" mais jamais cette denrée là.La situation devient grave. Bientôt il faudra utiliser les feuilles des bananiers. Ce n'est pas bien grave comme problème, mais qu'est ce que ça peut être important ! Et voilà que l'idée germe d'inviter à dîner les coopérants ce soir. Je ne sais pas qui a eu cette idée, mais elle s'est vite réalisée, et transmise. Ceux-ci ayant accepté, on s'est retrouvé avec ce dîner… à organiser. Car, nous n'avions qu'un cochon, pas tellement gros, et rien d'autre ! Même plus du riz, ni de couscous. Quelques oranges… Marie-Hélène et moi, nous avions repéré des papayers dans le jardin, bien chargés de papayes. Evidemment, ils ne nous appartiennent pas, et nous nous sentons un peu gênés, mais, vues les circonstances ... Nous nous dirigeons discrètement vers les papayers, et pouffant de rire, nous essayons de les goaler avec une branche de bois. Deux grosses papayes tombent sur le sol. Nous retournons à la maison pour les ouvrir. Déception : elles ne sont pas mures, elles sont toute blanches ! Le va et vient, pendant ce temps là, se fait entre la maison d'André et la nôtre, pendant que le cochon tourne sur sa broche. Nous allons les voir, ils viennent


nous voir. L'un d'entre eux, un jeune de 17 ans venant de Lyon, et qui apprend ici le métier, a une mascotte : il s'occupe d'un petit singe aux yeux auréolés. Nous nous amusons et photographions le petit singe. Nous leur expliquons notre manque de matériel pour faire la cuisine, et notre manque de denrées. Peu de temps après, un boy nous apporte un sac de riz et un flacon... d'herbes de Provence ! Le cochon continue de cuire. Nous pensons qu'il est temps d'aller chercher nos amis coopérants. Ils nous invitent à prendre l'apéritif, et nous proposent alors de venir chez eux avec notre cochon, car il y a une tonnelle aménagée très chouette. Nous déclinons l'offre en leur disant que c'est nous qui les avons invités. Seulement, nous n'avons pas de vaisselle suffisante, et c'est eux qui apportent la douzaine d'assiettes en faïence, des verres et des couverts ! Avec nos assiettes et verres en plastique, nous avons bonne mine ! Ce sont les invités qui viennent avec leurs assiettes. Nous avons décidé de leur servir les meilleurs morceaux, et beaucoup de riz. Le riz est... infecte, on dirait de la brisure de riz, encore de la "pâtée pour chiens" ! Mais qu'est ce que c'est que ce sac de riz qu'ils nous ont donné ! Quant au cochon, il y a tellement peu de chair, et tellement d'os ! Eux, sont très contents de leur repas, c'est le principal. Mais comment ont-ils pu trouver ce dîner bon ? c'était le plus infecte que j'avais jamais eu.

On a fait la fête Ensuite, ils ont insisté pour que nous finissions la soirée chez eux, sous la tonnelle. Ils ont des cassettes de musique, et ils voudraient que nous dansions avec eux. C'est vraiment la fête. On est accueilli à bras ouverts. Alors nous acceptons. Nous prenons avec nous nos affaires "précieuses" papier, argent, et appareils photo, et toute la troupe se rend dans la maison voisine. Ils ont un super transistor stéréo, à très forte puissance, et pas mal de cassettes très chouettes pour danser. L'alcool coule à flots : pastis, whisky, vodka. Ce la m'a toujours frappée à quel point les coopérants en Centrafrique


peuvent boire et manger. Ce soir, le nombre des bouteilles qui se vidaient était incalculable. La danse bat son plein. Tous les succès que j'ai pu danser l'été passé.A 23 hres, le générateur coupe tout. Nous plaçons alors de petites bougies par terre pour y voir plus clair. Louis-Marie est venu jeter un coup d'oeil, mais il n'ose pas s'approcher. Nous allons le chercher et l'entraînons à danser. mais il ne se sent pas à l'aise. Il esquisse quand même quelques pas, et se révèle être un super danseur, comme tous les Africains le sont... Puis il s'en retourne. Minuit approchant, et la danse commençant à nous lasser, nous sommes quelques uns à prendre congé de nos hôtes, à leur grand désespoir.

François le ronfleur Une fois couchés, c'est la ruée sur François (le ronfleur). "Tu ne t'endors pas avant nous, hein !" "Tu ne ronfles pas avant qu'on soit endormi". Les autres sont rentrés assez vite après nous, et tout le monde s'est endormi. Je pensais avoir dormi déjà depuis un bon moment, quand j'ai été réveillée par un concert de sifflets. François ronflait à tue-tête, et toute la chambrée s'était mise à siffler pour tenter de le faire taire. C'était hilarant.


SUR LA ROUTE VERS BANGUI Samedi 3 Novembre 1984

Départ de la maison de la scierie Ce matin il pleut. pas besoin de faire chauffer l'eau pour la vaisselle, on fait la vaisselle sous la pluie. certaines prennent même leur douche et leur toilette grâce à la pluie qui tombe. Personnellement je trouve qu'il fait un peu froid pour cela. Notre problème actuel c'est le manque de papier de toilette. On vit sur le rouleau de François et de quelques Kleenex séparés en trois. Honoré n'est toujours pas rentré. On n'est pas d'accord avec Louis-Marie qui veut partir maintenant. Nous, nous voulons attendre jusqu'à midi, pensant qu'Honoré a du arriver au village des caféiers, et que là, on a du lui dire que le bateau était retrouvé, qu'il a du dormir là bas, et il reviendra ce matin. Quand la pluie s'est arrêtée, il fait de nouveau bon, et nous pouvons aller faire notre toilette dans la Lobaye, en bas du ponton. Puis je vais laver ma chemise sur le bateau, à la manière africaine, en la frappant à coups répétés sur la coque, et en la trempant dans la Lobaye pour la rincer. Puis, un peu de bronzage. Les heures avancent. Nous nous apprêtons, nous chargeons les sacs à dos sur le bateau, et allons faire nos adieux aux coopérants, nos voisins. Chez eux, nous sommes invités à boire de l'eau bien fraîche qui sort du réfrigérateur. Il n'y a que les femmes, car les hommes sont partis au travail. On a l'impression qu'elles restent toute la journée à l'ombre de leur maison, à bavarder, ne se levant pas pour le moindre déplacement, étant donné qu'elles appellent le boy pour un rien.


François a demandé à notre hôtesse s'il pouvait aller laver sa chemise (qui était noire comme de la terre) dans la salle de bain. Eh bien notre hôtesse portugaise s'empressa de lui dire "Ne bougez pas, je vais dire au boy de le faire". Sur ce, elle appelle le boy, et lui dit d'un ton très sec "Va laver la chemise !". J'ai toujours été frappée du ton que les coopérants avaient quand ils parlaient à leur boy, très sec et très autoritaire. Même Claudine, notre copine de Bangui, il n'y avait pas plus gentille qu'elle, parlait aussi très durement à son boy. Les coopérants nous ont expliqué par la suite, qu'ils n'avaient pas d'autre moyen pour se faire obéir, car autrement leurs boys ne faisaient absolument rien, et ils ne pouvaient "plus rien en tirer". De toute façon tous les coopérants sont obligés d'avoir un boy à leur service, s'ils ne veulent pas être ennuyés par les Africains, nous disent-ils. C'est de tradition. Sur ce, un moment plus tard, le boy est revenu avec la chemise de François, bleue comme le ciel. Nous faisons nos adieux. Il est midi. Honoré n'est toujours pas revenu. Alors, nous partons. Direction le camp des caféiers, sur l'autre rive de la Lobaye.

AU CAMP DES CAFÉIERS A l'arrivée au village, la première chose que nous voyons... c'est la tente d'Honoré, plantée au bord de la rive. Nous débarquons. Il n'est pas là, mais les vieux du village qui se reposent sur leurs chaises au bord de l'eau, disent qu'il a laissé un message, qu'il faut que nous l'attendions ici. Du coup, nous avons tout le temps, et nous décidons qu'au lieu de faire des sandwiches pour le déjeuner, nous pouvons bien faire un repas chaud. Nous avons retrouvé le reste de la nourriture que nous avions laissée dans les maisons des villageois. Nous préparons des pâtes à la tomate, puis de la Vache qui rit, et nous visons un pot de confiture en dessert, car nous avons un surplus de pots de confiture ! On attend, assis sur un tronc d'arbre. Il commence à faire chaud, et nous transpirons. Nous décidons d'aller nager dans la Lobaye. Et on sèche si vite ! Ensuite une grosse discussion a lieu, le conseil de guerre... Comme on n'est pas tous d'accord, et qu'on commence à s'inquiéter sur l'attente qui se prolonge, et le temps qu'il va nous falloir pour rejoindre Bangui, et re-confirmer


notre vol dans les délais, nous effectuons un vote au sein du groupe. Deux d'entre nous sont d'avis d'attendre encore Honoré, les autres choisissent de partir. Mais le plus difficile maintenant, c'est de pousser Louis-Marie à partir. LouisMarie boude. Résistance à l'Africaine. On a beau essayer toutes les convictions logiques dans notre esprit européen... Quand il ne sait plus quoi répondre, Louis-Marie tourne le regard, ou fuit dans un autre coin. Il a même trouvé comme excuse qu'il allait aux toilettes. On charge les sacs à dos et on l'attend sur le bateau, en espérant que cela le décidera. On aurait pu y rester des heures, ça n'a rien changé. Alors, on tourne casaque et on lui demande seulement de venir avec nous pour aller chercher de la bière au village d'en face, sur quoi il s'exécute aussitôt. L'atmosphère est quelque peu tendue. Nous traversons le fleuve, et nous débarquons dans un grand village verdoyant. Je n'y étais jamais allée, mais Bertrand, si, le jour où il est allé chercher les bières en pirogue la première fois.Mais, là, impossible de prendre des photos. Nous allons au café du village. Ce village a l'air très grand et très moderne, par rapport aux quelques maisons qui se trouvent à notre camp des caféiers où nous avions campé. Ce doit être le lieu de ravitaillement ici. Au café, il n'y a ni bière, ni soda, mais du vin en bouteilles ! Nous en achetons trois, quatre, pour emporter, et nous ouvrons une bouteille pour y goûter... eh bien il n'est pas terrible.

On retrouve Honoré Quand, qui voit-on alors arriver ? Honoré ! les yeux cernés de fatigue, un sac à la main, effondré... On est tous sidérés. Il nous explique qu'il a marché de Bata Lima jusqu'à ce village, où personne n'avait vu Louis-Marie, donc il ne savait pas que le bateau était retrouvé. Il craignait qu'on manque de nourriture, et il avait acheté des bananes qu'il sort de son sac... complètement écrasées. Puis il a demandé qu'on le fasse traverser en pirogue jusqu'au camp des caféiers, et là, on lui avait dit qu'on était parti pour ce grand village. En fait dans cette histoire, tout le monde n'a fait que se manquer à quelques instants près.


On rejoint tous le bateau. Au bord du fleuve, les femmes africaines sont en train de faire leur toilette, enroulées dans leurs pagnes. Nous pensons à ce moment là que nous les avons peut-être choquées en nous baignant sans nos vêtements ! On repart direction le camp des caféiers, où nous passerons une nuit de plus, car maintenant il est bien trop tard pour naviguer, on partira très tôt demain. L'incident, l'attente, a ébranlé le groupe. Une décision a été prise : on a déclaré que tout ça c'était fini, qu'on était tous à nouveau ensemble et sain et sauf, et qu'on n'en parlait plus. Nous faisons notre dernier repas près des caféiers, autour du feu, soupe et couscous, et... vin. Et nous repensons à ce qui a été notre première nuit ici, quand nous transpirions tant pour nous installer à l'intérieur de la tente. Aujourd'hui, tout se fait calmement et bien organisé.


EN BATEAU Dimanche 4 Novembre 1984 On se lève très tôt : 5 hres ! Honoré a préparé des beignets. J'en mange quatre ! Le record, complètement bourrée ! Longue journée de bateau. Un soleil magnifique, bronzage très cuisant. On y met le paquet, on va bientôt rentrer ... On se relaye aux places de devant, ou couchés sur les sacs à dos, ce qui est plus qu'inconfortable, et on transpire sur nos serviettes. Certaines montent même s'allonger sur le toit du bateau.

Le repas se fait à bord : sandwiches au pâté. Et on ne s'arrête jamais, si bien qu''au bout d'un moment les discussions s'animent au sujet d'une demande d'un arrêt pipi imminent. Bernadette se décide à aller poser la question à Honoré qui lui répond : "Vous n'avez qu'à faire à l'arrière du bateau !" Sur ce, c'est la révolution générale de toutes les femmes à bord. On finit par obtenir satisfaction. Honoré stoppe le bateau au bord du rivage. mais la descente est épineuse. C'était loin d'être l'endroit idéal pour débarquer. On doit être maintenant sur l'Oubangui. Christine en profite pour se baigner, et Bertrand, lui, plonge carrément du bateau. tant pis pour les crocodiles ! Et puis, vers 15 hres, le ciel se couvre, l'orage menace. On exécute aussitôt une organisation rapide et méthodique : tous les sacs, même les sacs à appareils photo, sont placés sous le toit, à l'arrière du bateau, et recouvert par


la grande bâche plastique, bien attachée. Nous, nous installons le plus près du milieu possible, en nous serrant. On se couvre : chemise, pull, cape imperméable. Du maillot de bain, on est passé au climat septentrional ! Le ciel prend des couleurs extraordinaires, l'eau aussi, des bleus foncés, moitié vert, moitié noir ... et la pluie tombe, cinglante. Le bateau remue. On doit s'arrêter le long de la rive et attendre que cela se calme. Par les côtés du bateau, la pluie nous mouille quand même. La pluie cesse. Honoré veut que nous bivouaquions là. Nous, nous trouvons qu'il est encore bien tôt pour s'arrêter, et nous souhaiterions naviguer jusqu'à Bangui, y arriver ce soir, car on a des choses à y faire et nous voudrions y arriver le plus tôt possible. Honoré accepte de naviguer encore un peu.

Installation dans un village On arrive à la hauteur d'un village. Mais, on veut encore continuer, il ne fait pas encore nuit. mais Honoré, lui, veut qu'on s'arrête là. La discussion s'engage sur le nombre d'heures de navigation qu'il nous reste à faire pour atteindre Bangui. La notion de temps n'est pas très claire chez les Africains car si on continuait ce soir jusqu'à Bangui, on ne mettrait pas le même nombre d'heures que si on continuait demain matin ! On ne comprendra jamais rien à cela ! Bref, c'est Honoré qui décide : on partira tôt demain matin, on arrivera tôt à la douane de de Zingha, personne ne descendra, ce sera Louis-Marie qui se chargera de faire apposer les tampons sur les passeports, et ainsi, on arrivera demain, tôt à Bangui. Demain, on est Lundi, et on prend l'avion Mercredi. Ce village où nous descendons doit être plus éloigné de Bangui que le premier où nous avions dormi la première nuit, et d'où on voyait les lumières de Bangui. Là, on ne les voit pas. Et au premier bivouac, on n'avait pas dépassé Zingha encore. Dans le village on nous propose de nous installer dans une maison en construction (la pluie va t elle re-tomber cette nuit ?). Certains monteront quand même leur tente dehors, mais nous, nous dressons notre tente à


l'intérieur de la maison, qui en fait, n'est constituée que d'un toit de feuilles, soutenu par une carcasse et des piliers. On dresse ainsi quatre tentes dans cette maison, et on fera le milieu au milieu des tentes. On est en plein milieu du village, des maisons des villageois, et il y a soucis pour trouver un lieu d'isolement pour aller aux toilettes. Les tentes dressées, et même solidement attachées, non par les sardines, mais aux poteaux même de la maison., nous préparons le dîner. Nous sommes bien à l'abri de la pluie, mais nous ressentons une sale impression d'être en cage ... ces piliers de bois tout autour sont comme des barreaux de cage ... surtout que collés contre ces poteaux, se sont agglutinés tous les enfants du village qui nous observent, ne nous quittent pas des yeux. On a l'impression d'être des singes de zoo que l'on regarde comme des bêtes curieuses. L'atmosphère enfumée (le feu de bois) et les enfants qui forment un mur autour de nous, nous créent une impression d'étouffement. Curieuse sensation. Le feu pique les yeux. On dîne de soupe, de poissons, des tout petits poissons qu'on a achetés à un piroguier sur le fleuve, et qui sont pleins d'arêtes, immangeables. Du riz etc Une très bonne nuit.


RETOUR À BANGUI Lundi 5 Novembre 1984 On se lève tôt. Il n'y a plus de café en poudre. Il faut boire du chocolat et du lait en poudre, et manger ce qu'il reste : de la Vache qui rit. Dernière étape de navigation sur l'Oubangui. On s'arrête à Zingha pour les formalités de douane, qui furent plutôt rAapides, et une visite aux WC publics derrière les paravents de la place du village. On repart. Cette étape fut bien courte : à 9 hres on arrivait à Bangui. Re-formalités de douanes au port, après avoir déchargé les sacs à dos sur le quai. On dit aurevoir à notre bateau. On marche à pied jusqu'à l'hôtel. Et voilà que juste à l'arrivée, l'anse de mon sac à main craque. Il était juste temps d'arriver à destination, il aura tenu jusqu'au bout !

A Bangui A l'hôtel, ça barde, car nos chambres ne sont pas réservées. le responsable français du Point à Bangui, est rentré de vacances. C'est lui qui se dispute avec les hôteliers maintenant ! ça suffit les soucis pour nous. Pendant ce temps, on se précipite dans le jardin vers un super petit déjeuner du rock Hôtel, dont on a rêvé pendant toute la matinée. papaye, café au lait, croissant, baguette, beurre, confiture, comme c'est bon ! Un message de Claudine nous attendait. Elle est passée à l'hôtel voir si on était rentré. On était censés rentrer Dimanche, hier, et elle avait du réservé un restaurant pour nous hier soir ! Les vendeurs de cartes postales nous assaillent. Ils connaissent par coeur les arrivées et les départs des avions du "Point", et ils savent que c'est le dernier moment pour expédier nos cartes postales. Les cireurs de chaussures aussi accourent. Certains se font nettoyer leurs gros godillots de marche, qui ont


tous un air répugnant de saleté et de puanteur, et les chaussures reviennent comme neuves, mais ce n'est pas bon marché. Nous récupérons nos chambres. Chacun se débrouille avec la réception pour avoir une chambre avec vue sur l'Oubangui. Puisque cette fois-ci, c'est nous qui payons nos chambres, on peut bien choisir ! Mais ce n'est pas donné non plus. Notre chambre coûte 170 F CFA, c'est à dire 340 FF pour deux. A Bangui, on a dépensé un argent fou en deux jours, entre l'hôtel, les restaurants, et les taxis. Nous avons des chambres superbes. Roselyne et Bertrand ont une immense chambre (la 309) qui donne au dessus de la piscine (et de la boîte de nuit ...). Nous, nous avons la 417, nous sommes un peu en retrait de la piscine, que l'on voit dans le coin, mais nous donnons sur le rocher (le seuil rocheux que l'on nomme les rapides de Zingha) et nous avons une vue superbe sur l'Oubangui et les pirogues qui passent sans cesse. C'est très romantique, avec des tons de couleurs rose.


A BANGUI Lundi 5 Novembre 1984

Pas d'eau à l'hôtel. Se laver !!!! Nous sommes arrivés au Rock Hôtel. Mais une ombre au tableau se dévoile dans un hôtel si cher ... il n'y a pas d'eau ! Même les WC sont fermés à clé dans le grand hall d'entrée. Et on est si sales ! Alors, on monte les sacs à dos dans les chambres, et on va filer vers la maison de Claudine. On passe d'abord par la banque, où l'on regroupe nos paquets d'argent à changer en une seule fois pour aller plus vite, et Eric qui effectue le change pour tout le monde se retrouve avec une fortune en mains. Puis on va confirmer nos billets de retour à l'agence du "Point", où il faut payer la taxe d'aéroport de 4000 F CFA (80 FF). Mais on était prévenu dès le départ de cette taxe. On récupère aussi nos sacs laissés là à l’agence. On prend un taxi. Roselyne, Bertrand et moi, on file chez Claudine. les autres François, Claude, Micheline, vont rendre visite au professeur de médecine, (le professeur Boïto). On leur donne rendez-vous chez Claudine, en expliquant le mieux possible où elle habite (il n'y a pas de numéro ..) puisqu'ils n'y sont jamais allés, eux. Quand on arrive, Claudine n'est pas là. Mais le boy nous fait entrer et nous laisse nous installer. dans le salon, la table est dressée ... au moins pour quinze personnes ! Le grand repas ! Deux verres pour chacun, service de table, serviettes, on n'en croit pas nos yeux. Comme elle a dû nous attendre ! Alors Roselyne et moi, on décide de se lancer, et on espère qu'elle comprendra : on envahit la salle de bain. Lavage, champoing, mais il y a les ongles des pieds, si noirs qu'on n'en vient pas à bout. Dans le sac retrouvé à l'agence du Point, j'avais laissé la moitié de mes produits de beauté, de la rechange, une robe d'été. Je me sens transformée, robe à bretelles, cheveux propres et non nattés, enfin, et toute propre ! On laisse ensuite la salle de bain à Bertrand. On retourne au salon. Le boy nous propose des rafraîchissements, du sirop de cassis.


Retrouvailes avec Claudine Claudine arrive. On est accueilli à bras ouverts. Elle nous raconte qu'elle nous avait réservé une table au restaurant hier soir, mis que malgré notre absence, ils y sont allés avec ses amis et ils ont tout dévoré ! Nous discutons autour de la table du salon autour de rafraîchissements. les amis de Claudine, eux aussi travaillent à Bangui, et leurs amis de France qui se trouvaient en vacances chez eux, viennent nous rejoindre pour déjeuner ensemble. Quand Claude, Micheline et François débarquent. Ils ont trouvé la maison. Seulement, nous voyant si propres et si bien habillés, et eux si sales, barbus, ils n'osent pas rester. Nous devons insister pour qu'ils acceptent de rester déjeuner.

Un déjeuner de rois Et ça en valait la peine ! Claudine nous a préparé le plus beau des cadeaux : une grande bouffe ! Quel repas après 12 jours de jungle, de boîtes de conserves, de riz, de pâtes et de couscous .. et de Vache qui rit ! Un repas mi-chinois, mi-français, qu'elle a cuisiné complètement elle-même (son boy fait tout sauf la cuisine, ça, elle n'accepterait pas !). Elle nous dit avoir traversé Bangui de fond en comble, pour trouver tous les ingrédients, et elle y est arrivée. Nous commençons par la soupe chinoise, que nous prenons sur la table du salon, puis nous passons à la grande table. - pâtés impériaux , deux chacun, accompagnés de feuilles d ementhe et de deux sauces, une chaude, une froide. - du riz cantonais - du riz blanc - un plat de lamelles de boeuf - un plat de légumes mélangés - du canard à l'ananas - un plateau de fromages (du Saint Albray, du roquefort, du boursault, du gruyère).


Il paraît que le morceau de gruyère coûte à Bangui 80 FF. Il parait, nous disent les amis de Claudine, que lorsqu'on travaille à deux ici à Bangui, un salaire sur deux sert à payer la nourriture, tellement c'est cher. Et tout cela arrosé d'un rosé glacé et savoureux. Passons aux desserts : - salade de vrais fruits frais exotiques, préparée par Claudine. - crème caramel - gâteau au chocolat - il y avait aussi un reste de crème glacée à laquelle nous n'avons même pas touché. Et... du café... de France. Il faut bien une page entière pour décrire ce repas pantagruélique, que tous ceux qui sont allés un jour vivre dans la jungle pourront comprendre être le plus grand des bonheurs. La discussion aussi était intéressante.Les coopérants nous expliquent toujours beaucoup de choses. Ainsi, que pour les Pygmées, le plus beau des cadeaux, c'est un fer de hache. A Bangui ça ne coûte pas cher, mais il fallait le savoir, et pour eux qui ne savent pas travailler le fer, c'est un cadeau de roi. Autre sujet : ce que devient l'aide des pays industrialisés vers le Tiers Monde. Lorsque la France ou la Chine envoient des sacs de riz en Afrique, eh bien on donne bien à chaque citoyen un sac de riz pour équilibrer sa nourriture, mais l'Africain, lui, au lieu de le consommer, préfère le revendre, car avec l'argent ainsi obtenu il peut nourrir sa famille pendant un mois... au manioc ! Nous discutons de nos projets pour le lendemain, une journée que nous avons complètement libre à Bangui. Certains d'entre nous avaient envisagé de se rendre aux chutes de BOUALI, des chutes d'eau très connues et touristiques, à 90 km à l'est de Bangui. Claudine, elle, nous fait une proposition : elle se rend demain chez un collègue professeur, qui fait une thèse, et qui doit aller dans un quartier africain. Normalement les Blancs ne peuvent aller dans les quartiers africains, mais là c'est une visite "officielle", reçus par le chef du quartier...


Et nous pouvons les accompagner si nous le souhaitons. En fait, cela semble très intéressant et nous acceptons. En attendant, le programme de cet après-midi, il est : balade dans la suzuki de Claudine à travers la ville.

Le marché aux voleurs Là, il faut y aller "sans rien". Mais rien du tout, à part un minimum d'argent nécessaire à acheter ce qu'on veut acheter, le porte-monnaie dans la main, bien serré, ou à l'intérieur des vêtements. Pas d'appareil photo, pas de sac, pas de papiers. Il n'y a en fait rien à acheter : c'est du bric à brac, des vêtements, de la droguerie, mais aussi des choses curieuses à voir : des produits miracle "à faire pousser le poil", des colorants blancs pour les cheveux (de la soude), des morceaux de Tricostéril vendus au centimètre, et du sucre en morceaux vendu non en boîte, mais en monticules de quatre, cinq morceaux de sucres, qui forment des petites pyramides alignées sur une planche.

La mission catholique Nous sommes repassés chez Claudine pour reprendre de l'argent, car là, à la Mission catholique, c'est au contraire très cher. La Mission catholique elle est connue pour vendre des inclusions d'insectes. ce fut l'idée d'un missionnaire. La Centrafrique est un pays réputé pour le nombre de ses insectes. Il eut l'idée de les présenter, incrustés à l'intérieur de blocs de verre, c'est ce qu'on appelle une inclusion. Alors, il y a là du plus beau au plus horrible : du beau papillon ou de la libellule écartelée, au coléoptère, en passant par la mygale, le scorpion, le serpent... Bertrand en achète toute une série, de grosses bêtes à pattes noires, et j'avoue que j'aurais du mal à acheter ces horribles choses là. Au point que Roselyne dit "Il les mettra dans son cabinet s'il le veut…" Il y a aussi des tableaux en ailes de papillons, objet que je n'ai non plus jamais pu acheter, l'idée d'avoir sous les yeux ce qui reste de ces magnifiques créatures inoffensives me répugne. Une autre chose m'a intriguée : on y vendait des pierres noires. Ce sont des pierres qui, paraît il, guérissaient des morsures de serpents. Il y avait d'inscrit


toute une explication dont je n'ai seulement retenu que l'application de ces pierres sur les morsures, pouvaient être au début "assez douloureuses". Il paraît que ce remède est très connu. Claude en a acheté une.

Le marché artisanal C'est le coin pour touristes par excellence. Une grande place autour de laquelle sont installées des échoppes d'artisans. mais attention, l'artisanat centrafricain est inexistant, tout est importé des pays environnants, surtout du Zaïre. j'y ai retrouvé ces toiles peintes en noir et blanc de la Côte d'Ivoire et les colliers en vertèbres de poisson que j'avais achetés au Sénégal 2 FF et qui se vendaient ici 30 FF.Car tout est ici d'un prix exorbitant. Les statuettes sur bois démarrent à un prix équivalent à 250 FF ou 500 FF. Bangui est envahi par les militaires. Ce sont les militaires français du Tchad. C'est que nous sommes ici juste au moment où le gouvernement français vient de retirer ses Forces du Tchad, et ces militaires ont été provisoirement installés à Bangui, en attendant une nouvelle affectation, la Centrafrique étant limitrophe au sud du Tchad. Notre hôtel, le Rock Hôtel est envahi par les officiers qui y logent. Ainsi, provisoirement en repos, ils font comme nous : shopping, tourisme et distractions. Nous les avons quelque peu cotoyés, à l'hôtel, ou dans nos visites, et j'ai bien été surprise de rencontrer des gens très courtois alors que je pensais que tous les militaires étaient des rustauds mal élevés. Là, au marché artisanal, ils n'achètent pas, ils regardent seulement. je fais d'ailleurs la même chose. la nuit est tombée, le marché va fermer, je n'aime pas marchander sans avoir le temps. Je passe dans toutes les boutiques à cent à l'heure : sculptures sur bois, bijoux, colliers en ébène, en malachite du Zaïre, boîtes en laque ou en malachite, masques de bois et de cuivre du Zaïre, ivoire, tableaux en ailes de papillons…

Apéro On retourne à l'hôtel. Des vendeurs de l'hôtel essayent de nous vendre des tableaux sur écorce d'arbre vernie. C'est assez joli, un peu stylisé, mais j'en ai une indigestion de l'artisanat vu ici.


Nous avons rendez-vous avec tout le groupe dans le salon de l'hôtel pour l'apéritif. Claudine est venue avec nous. Christine qui avait toujours géré la caisse commune, a acheté avec ce qui restait une bouteille de pastis, et une bouteille de Cinzano, rien que pour moi qui n'aime pas le pastis. Elle a donné le restant de la caisse commune à Honoré et à Louis-Marie en pourboire.Honoré devait nous rejoindre à l'hôtel mais on ne l'a jamais revu. On est tous là autour de la table basse, avec nos bouteilles dans un sac, qu'on n'ose pas sortir, ça ne se fait pas d'emmener et de consommer son alcool dans un grand hôtel !!

Un dîner de rois !!! On va tous dîner dans un restaurant ensemble. Claudine nous suggère le restaurant de Mama... qui se trouve justement au village artisanal où nous étions tout à l'heure. Seulement Claudine a des craintes : nous sommes très nombreux, et nous n'avons pas réservé. Et cette brave dame a ses humeurs. tout dépendra de son humeur du moment. Nous faisons une première tournée dans la suzuki. Mama est une grosse Africaine, la mama telle qu'on peut se l'imaginer. Claudine lui explique combien nous sommes. Elle commence par lui dire qu'il aurait fallu la prévenir et qu'elle n'a palus qu'un plat d e poisson, et un e poulet etc... Enfin, elle devait être de bonne humeur ce soir là, car elle accepte de nous recevoir. Deuxième tournée de suzuki... et le groupe se retrouve au complet. Une immense table et un repas grandiose. La meilleure cuisine qu'on ait jamais mangée en Centrafrique. - un poisson accompagné d'une sauce escargot (beurre ail et persil) - du poisson grillé (celui destiné au chef du village, encore mieux que le capitaine) - du poulet sauce cacahuète - et en dessert : crème au corossol, succulent - en infusion de la citronnelle Et le tout arrosé de vin rouge.


On s'est partagé tous les plats, et on a goûté à tout. Un poisson et deux poulets annoncés, c'était très copieux. Et pas cher par rapport aux autres restaurants où nous étions allés : environ 80 FF, mais en plus, c'était bon. En digestif, on a sorti les bouteilles d'apéritif, et j'ai avalé deux verres de Cinzano au dessert ! Nous rentrons à l'hôtel. Claudine nous quitte car elle travaille le lendemain matin, et elle nous donne rendez-vous pour la visite du quartier africain (nous allons encore devoir nous lever tôt !)

Fin de soirée en boite Mais pour nous la soirée, ce n'est pas finie. On a envie de terminer la soirée dans la boîte de l'hôtel. L'entrée coûte le prix d'une consommation, 2000 F CFA. La boîte n'est pas mal du tout. La musique est très bonne, la sono OK, il y a tous les bons succès que j'ai dansés cet été, de "Self Control" à Irène Cara, du rock à la biguine, et jusqu'à ce vieux slow chanté par Joe Dassin. Il y a là, bien sûr, beaucoup de militaires, non plus en short colonial comme en ville, mais qu'on reconnaît à leur coupe de cheveux. A 1 hre, on décide d'aller se coucher (le réveil matinal demain matin !). Le couloir de l'hôtel est envahi par des prostituées de luxe, comme dans tous les grands hôtels de toutes les capitales d’Afrique.

Difficile de dormir... dans un lit... Nous demandons à la réception de nous réveiller le lendemain matin, enfin, plutôt tout à l'heure, car cela ne nous laisse que cinq heures à dormir. Mais voilà qu'une fois couchée, impossible de m'endormir. La climatisation fait un bruit terrible. Et le lendemain, tout le monde se racontera la même histoire : on n'a plus l'habitude de dormir dans un lit... c'était trop mou... on ne pouvait trouver le sommeil...


A BANGUI Mardi 6 Novembre 1984 - Bangui Levés tôt : 6 hres ! Dormi ... peu ! Nous prenons notre petit déjeuner. Certains attendent la voiture qui doit les emmener à BOALI, et qui n'arrive pas.

Rencontre avec le Chef du quartier africain de Bangui Nous, nous prenons un taxi pour nous rendre au Lycée Français, où nous avons rendez-vous avec le collègue de Claudine qui doit nous emmener au quartier africain. Claudine, elle, nous rejoindra plus tard dans la matinée. Le collègue professeur de Claudine est très sympa. Nous gardons le taxi pour aller prendre à l'université, l'étudiant africain qui nous sert d'intermédiaire avec le Chef du quartier où nous allons. La route paraît assez longue, et emprunte des allées bourbeuses. Nous arrivons à destination. Le taxi nous fait payer assez cher parce que la course a été très longue. Nous sommes accueillis par le Chef du quartier, qui fait sortir des chaises devant sa maison, et nous prie de nous installer.Nous sommes là en demi cercle, lui assis face à nous à côté de l'étudiant, et l'épouse du chef accoudée à la fenêtre, nous regardant. Nous pensions être très loin de Bangui, mais, en fait, nous sommes en plein centre, c'est notre quartier "européen" qui, lui, est excentré du centre de la ville. La conférence commence. Le professeur pose des questions. heureusement qu'il en avait des questions, lui, parce que l'on nous avait dit de préparer une ou deux question pour justifier notre présence. Le professeur demande le nombre d'habitant dans le quartier, quels sont les problèmes sanitaires... Et là, nos copains médecins interviennent : "ne pourrait-on pas faire bouillir l'eau puisque c'est le principal problème sanitaire ? La réponse du chef est que le bois est tellement cher que ... les familles n'achètent que le strict minimum de bois pour cuire la nourriture. Il y a bien, dans le quartier, une fontaine qui est raccordée au système d'eau javellisée de la ville, mais le quartier est tellement vaste que seules les familles qui en sont proches en profitent.


Et la pilule contraceptive ? Ah, la pilule ! dit le chef, pas de problème, il y a l'hôpital de Bangui où l'on peut se la procurer gratuitement. Mais, par contre, au fil de la conversation, il nous explique qu'ici, une femme qui n'est pas mariée et qui prend la pilule est considérée comme une prostituée. Et qu'une femme mariée qui prend la pilule, est aussi considérée comme une prostituée, puisque cela sous-entend qu'elle désire des relations extra-conjugales. Il n'y a rien à faire, les femmes africaines sont destinées à faire des enfants, c'est leur travail ! Puis le Chef nous propose de nous montrer le quartier. Claudine nous retrouve. La discussion se fait moins guindée, moins officielle, en se promenant. Du fait que nous sommes guidés par le Chef, nous sommes, bien sûr, bien accueillis. Il nous dit connaître personnellement chacun de ses administrés. Il est un peu comme un maire, mais comme le quartier est plus petit qu'une ville, il connaît tout le monde. Bangui est divisé en quartiers, et chaque quartier est dirigé par un Chef, qui s'occupe des problèmes administratifs, sanitaires, judiciaires. Il ne rend pas la justice, mais remet les accusés aux mains des autorités locales. Nous notons quand même qu'il y a, au sein du quartier, un contraste entre des maisons riches et des maisons pauvres. Nous passons devant la fameuse fontaine publique, où chaque femme branche un tuyau d'arrosage au robinet pour récolter de l'eau dans sa bassine. Nous sommes autorisés à prendre des photos : la fontaine, le bain d'un bébé, les lits devant les maisons. Puis nous visitons les hangars à poules. Incroyable le nombre de poules ! Et le nombre de hangars aussi. La visite passe par... les WC publics... un trou entouré de grands paravents de paille au milieu d'une place. Puis on termine par le lieu du bal du samedi soir, avec une scène, une piste de danse et sa boule tournante à petits miroirs. Nous offrons une tournée au Chef qui boit facilement "la mousse", et au bout de quelques bouteilles, commence à se dérider. Voila, notre visite est terminée.


La taillerie de diamants Nous rentrons et nous avons un plan pour l'après-midi. On est mardi, et c'est le seul jour de la semaine où est ouverte à la visite la taillerie officielle de diamants du gouvernement. On est à l'époque où les diamants de Bokassa .. et de Giscard, sont encore bien dans les mémoires. Bertrand y était passé déjà le matin, avec nos passeports pour nous inscrire à la visite, parce que ce n'est pas simple, et ce sont les premiers inscrits qui peuvent entrer, c'est limité. Nous y retournons donc à 14 hres. Il y a un monde fou, surtout des militaires français. Ils font comme nous, ils visitent. Nous devons inscrire nos noms dans un registre de visiteurs, nationalité, profession, numéro de passeport. L'attente est longue. Enfin un officiel se montre et déclare que vu le nombre de personnes présentes, il y aura une autre visite demain mercredi, et que ceux qui seront encore là demain, se retirent de la queue. Mais personne ne se retire. En fin de compte, tout le monde rentre, et ce fut très bien organisé, malgré le nombre de visiteurs. On est prié de s'installer tous autour d'une grande table. Un monsieur obèse nous tient une conférence. Il nous montre des présentoirs avec toute une collection d'échantillons. Il nous explique comment un "caillou", mais déjà "diamant" passe par les diverses étapes de la taille, et se transforme de moitié en moitié, si bien qu'une pierre de 32 carats au démarrage aboutira à un diamant final de 7 carats. Le diamant est la pierre la plus dure qui existe, et rien ne peut arriver à le couper, à l'exception d'un autre diamant. C'est pourquoi on utilise de la poudre de diamant posée sur une mollette qui tourne pour couper et tailler les diamants. La taille est très réglementée. Il faut 32 facettes, et les dimensions de chaque facette est au millimètre près.Pour cela il existe des instruments très précis qui servent à tailler les diamants. On nous fait défiler sous les yeux ces divers échantillons, et nous pouvons même les toucher, ou les regarder à la loupe. Puis, on nous emmène dans les ateliers, où l'on voit s'exécuter toutes les étapes qui nous été exposées. On peut regarder à la loupe comment la poussière de diamant posée sur la machine, taille l'autre le diamant.


On nous montre un diamant de 32 carats, gros comme... l'ongle du pouce ! C'est impressionnant. Il est bien 15 hres quand nous quittons la taillerie. Et nous attendons les autres qui sont restés dans la salle... de vente. Il se met à pleuvoir. Josette a acheté deux diamants de 1/50 ème de carat pour 7000 FF qu'elle veut faire monter en boucles d'oreilles, et Bernadette a acheté un petit diamant de 1/20 ème de carat pour 2200 FF qu'elle veut faire monter en bague. Et elles ont payé... en chèque bancaire français barré, sans problèmes. Evidemment elles n'avaient pas emporté autant d'argent pour le voyage ! maintenant à voir comment elles vont faire passer ça à la douane…

Retour à l'hôtel Nous prenons un taxi pour retourner à l'hôtel. Nous mourrons de faim, il est près de 16 hres. On se fait un encas dans le jardin de l'hôtel : des oeufs au jambon et du Périer. ça nous semble très bon de manger des oeufs qu'on n'avait pas mangé depuis si longtemps. Et on traîne là.


En bas du jardin, au bord du fleuve, des hommes pêchent au filet. Ils tirent un grand filet de l'eau, et en sortent les poissons. Et à plusieurs reprises. On aurait voulu aller à la piscine (à côté de l'hôtel, au Rock Club, car la piscine de l'hôtel, elle, est bien trop sale, et personne ne s'y baigne. Mais les heures passent et c'est raté. Je remonte dans ma chambre et j'entends par le poste de radio :"Monsieur X est prié de se présenter aux autorités sans quoi il sera considéré comme déserteur", prononcé avec l'accent africain, et déclaré comme la lecture faite au niveau scolaire de la maternelle. Je suis pliée en deux de rire. Nous allons au village artisanal acheter nos cadeaux et souvenirs. la nuit tombe. On a un peu de mal à trouver un taxi. Au village artisanal, tout est très cher. Roselyne achète deux colliers en ébène. Dans une autre boutique nous essayons de marchander à deux deux colliers en malachite, cette pierre verte, assez jolie de couleur, qui vient du Zaïre. La négociation est très difficile. On arrive à les négocier à 2000 F CFA le collier. Cela fait un joli collier pour 40 FF. Mais là s'arrêtent mes achats. Rien d'original, rien qui vient de Centrafrique, et tout est hors de prix. On retourne à l'hôtel. Nous retrouvons Micheline à qui il est arrivé une sale histoire. Un type lui a arraché sa fine chaîne en or qu'elle portait au cou, mais elle a retenu sa chaîne par le devant, et le type a tellement tiré dessus qu'elle en a la marque rouge sur la peau. la chaîne s'est cassée, non au fermoir, mais en plein milieu, mais elle est restée dans les mains de Micheline. le type s'est sauvé.


Micheline n'a pas le moral. Elle ne prend pas l'avion avec nous demain, car elle avait décidé de rester quinze jours de plus après le trek pour visiter un peu la Centrafrique, et elle a passé une partie de la journée à chercher un hôtel à Bangui, et les hôtels sont terriblement chers. Elle se demande comment elle va tenir financièrement quinze jours. Ceux qui sont allés à Baali rentrent, très tard. Ils ont attendu leur voiture jusqu'à 11 hres ce matin ! Ils sont enchantés de leur visite, mais tout couverts de poussière rouge, et ils ont crevé de froid sur la camionnette ouverte à tous vents. On prend l'apéritif, à l'intérieur de l'hôtel.

Une dernière soirée... un peu ratée Claude, François, et Micheline, sont invités ce soir à dîner chez le Professeur Boito, nous ne passerons donc pas la dernière soirée tous ensemble. Le reste du groupe, toujours accompagnés par Claudine, nous allons dans un restaurant au site agréable, tenu par une Camerounaise, qui nous propose du riz au poisson sénégalais... qui fut dégueulasse (surtout le manioc et les herbes) et une banane flambée. Et tout cela bien cher. Une dernière soirée... un peu ratée.


RETOUR EN FRANCE Mercredi 7 Novembre 1984

Départ de Bangui C'est le jour du départ. L'avion est à 9 hres du matin. On a fait les bagages et le tri des affaires, jeté les chaussettes puantes, les produits de toilette, les produits anti-moustiques. Le garçon d'hôtel était encore là à me proposer d'acheter mes pataugas, toutes déchirées par les séchages au feu de bois. Mais je n'ai plus que ces chaussures là pour rentrer sur Paris ! Mes escarpins en plastique ont lâché, et même, ce serait un peu juste vu la température qui nous attend à l'arrivée en France, surtout qu'on arrive à Lyon, et qu'il faut faire un Lyon-Paris. Je pars tout de même habillée en vêtements d'été, et prends le nécessaire pour me changer dans l'avion. Comme mon sac à dos me paraaaît léger maintenant !! Notre petit déjeuner a été express. le bus qui devait nous conduire à l'aéroport était là, et le chauffeur s'impatientait : nous n'arrivions pas à nous faire servir les petits déjeuners. Alors, du jardin, et du plateau de papayes et de croissant, je suis passée au bar et j'ai commandé un petit déjeuner continental, une tasse de café au lait et un croissant. Après, ça a traîné pour être encaissé… Enfin on est prêt et on part. L'équipage de l'avion du "Point" est dans le même bus, et les conversations battent leur plein entre nous. A l'aéroport, j'enregistre la dernière, car je voulais absolument acheter des timbres de collection que j'avais promis à des amis de France. Et nous ne sommes pas tellement en avance pour l’avion. On retrouve les amis de Claudine, qui sont venus accompagner leurs amis qui prennent le même avion que nous pour rentrer en France. On a l'impression du coup d'avoir nous aussi des amis qu'on laisse en Centrafrique. Quand on


monte sur la passerelle, on les aperçoit en haut de la terrasse en train de faire des signes d’au-revoir. L'avion décolle .. à l’heure.

Le vol On a eu un repas à midi, heureusement, car on commençait à crever de faim, mais il n'était pas terrible. j'ai mangé trois ou quatre compotes de pommes ! 6 hres de vol, mais cela ne m'a pas paru long.

A Lyon On atterrit à l'aéroport de Lyon à 15 hres piles. Les diamants achetées par les copines sont passés ni vus ni connus. J'avais l'intention de prendre le bus du "Point" comme à l'aller, qui devait me conduire à la Porte d'Orléans, mais j'apprends qu'il n'arrive à Paris qu'à minuit et demi, et à la Gare de Lyon. Ce qui ne m'arrange pas du tout. Alors je suis les autres et je vais prendre un TGV qui en deux heures et demie me conduira chez moi. A la sortie de l'aéroport, c'est la folie. Tout le monde se quitte à la va vite pour sauter dans un taxi, ou retrouver famille ou amis. Dans cette effervescence, je n'ai même pas pu dire au revoir à mes amis strasbourgeois qui s'étaient envolés dans un taxi. On pensait se retrouver à la gare de la Paredieu, mais comme j'ai perdu du temps à hésiter entre prendre le taxi ou le bus de l'aéroport, moi, Josette et François, on a fini par prendre le bus, et il allait à la gare de... Perrache ! Eh oui il y a deux gares de trains à Lyon. Encore une histoire à l'africaine !

Dans le train pour Paris A Perrache, on voit affiché un train partant à 16h 50. Il est 16h 30. Et à toute allure, on a réussi, billet, réservation, un au-revoir à François qui lui restait à Lyon, et Josette et moi nous avons sauté dans le train pour Paris, à une minute près. On a débarqué, tout excitées dans le wagon, avec nos sacs à


dos, jean, anorak et... pataugas trouées, au milieu de messieurs en costume et cravate. Fou rire ! Quand le train fait un arrêt à la gare de la Paredieu, on tente d'apercevoir nos amis, mais on ne les aperçut pas. Là aussi, le voyage a semblé très rapide.

A Paris A 19h 15, on était à Paris. Ce fut de faire la queue pour avoir un taxi qui fut le plus long. Le taxi m'emmène à toute allure par les larges rues de Paris. Que de voitures, c'est affolant ! 9 hres ce matin j'étais à Bangui... 20 hres... Je suis à Paris. A peine plus loin, dans ma tête, la forêt vierge... et les Pygmées... On longe la Seine... Comme la Seine est petite !

Ce récit a été rédigé entre mon retour de voyage entre le 8 Novembre 1984 et le 28 Décembre 1984


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