54 ETATS, LE MAGAZINE DE L'AFRIQUE

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LE MAGAZINE DE L’AFRIQUE

LE MAGAZINE DE L’AFRIQUE

THE AFRICA MAGAZINE www.54etats.fr N°16 Sept / Oct 2014 ÉDITION INTERNATIONALE

DOSSIER SPÉCIAL

AGRICULTURE SPECIAL REPORT

met l’Afrique à l’honneur !

© Raymond Dakoua. Teodoro Obiang Nguema Mbasogo, président de la Guinée équatoriale.

OBIANG NGUEMA

LES 7 DOSSIERS CAPITAUX

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Teodoro Obiang Nguema Mbasogo

SARKOZY

M 01939 - 16 - F: 3,80 E - RD

« La marche de l’Afrique vers la prospérité est irréversible »

ÉDITION INTERNATIONALE ET AFRIQUE SUBSAHARIENNE : FRANCE 3,80 € - DOM 4,80 € - RÉUNION 4,80 € - GUYANE 4,80 € - BEL 4,00 € - MAROC 40 DH - ALGÉRIE : 394,3 DZA - TUN 6,8 DT - ZONE CFA 3100 - NIGER 3100 XAF - CAMEROUN 2700 XAF - SÉNÉGAL 2700 XAF - GAB 2700 XAF - CÔTE D’IVOIRE 2700 XAF - ISSN 2258 - 0131

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LE MAGAZINE DE L’AFRIQUE

COVER

Dossier spécial : Agriculture ..................................................................... 6 à 21

SPECIAL REPORT

Theme : Agriculture ........................................................................................ 72

POUVOIR

Sogea-Satom : partenaire local ..................................................................... 23 Mauritanie : Que fera Mohamed Ould Abdel Aziz de sa victoire ? ................. 24 Islam radical : Autopsie du phénomène africain par Amzat Boukari Yabara .. 26 Centrafrique : Table ronde sur la crise centrafricaine ..................................... 29 Jean-Jacques Konadje : Allô docteur, comment va l’Afrique ? ....................... 32 Guinée équatoriale : L’Union africaine fait la force ......................................... 34

MONDE

Nicolas Sarkozy : un retour en pointillé .......................................................... 36 Retour de Sarkozy : une stratégie risquée ..................................................... 40 Dai Zhikang : « La vie est une chance d’oser » .......................................... 42 Kazakhstan Inside : Horizon 2050 .................................................................. 44 Erlan Idrissov : « l’Afrique est une priorité pour notre diplomatie » ......... 47 Sommet USA-Afrique ..................................................................................... 49 Turquie-Afrique : une relation prometteuse .................................................... 50 Alexandrie : porte d’entrée des Syriens vers l’Europe.................................... 51

SOCIÉTÉ

Quand les « first ladies » traquent le VIH ..................................................... 53 À l’écoute du chant des lémuriens.................................................................. 54 À la découverte de Madagascar ..................................................................... 56

TENDANCE

Shine Bright Like a Diamond .......................................................................... 58 SOS Beauté post-été...................................................................................... 60 Joseph Ayissi : « audace, respect et création » .......................................... 62 Mario Canonge : jazzman protéiforme ........................................................... 64 Ibrahim Maalouf : le trait d’union entre l’Orient et l’Occident .......................... 66 Meta and the Cornerstones : Meta, le messager de la paix ........................... 68 Jacob Desvarieux ........................................................................................... 70 Données sur l’Afrique ..................................................................................... 82 Abonnement ................................................................................................... 84

www.54etats.fr

SOMMAIRE

© Getty image

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Directrice de la publication : Priscilla Wolmer pwolmer@wolmercommunication.fr Directrice de la rédaction : Sandra Wolmer swolmer@wolmercommunication.fr Directrice Artistique : Magéna Aubert Direction marketing et diffusion : Mercuri Presse Directeur de la publicité Europe et Afrique : Alexandre Evuna +44 7961 043014 aevuna@wolmercommunication.fr Rédacteur en chef : Claude Wolmer Secrétaire de rédaction : Jessica Cohen Chef rubrique Moyen-Orient : Mohamed Gontara Chef rubrique Tendance : Gaëlle Ngako Journalistes : Alexandre Blot Luca / Julia Buquet Jessica Cohen / Mohamed Gontara / Baillor Jalloh / Gaëlle Ngako / Hervé Pugi / Agnès Richieri / Priscilla Wolmer / Sandra Wolmer Crédits photographiques : Julia Buquet / Raymond Dakoua / Gaëlle Ngako Embassy of Equatorial Guinea / Facebook / Flickr / Getty Images / International Labour / Organization – ILO Photos / site Internet de l’Union africaine / mega construcciones Pour les pages Shine Bright Like a Diamond et S.O.S Beauté : visuels fournis par : Cartier / Chanel / Clinique / Diouda / Iconopress / site Internet Jimmy Choo / Rolex / Salon Niwel Abonnement au magazine papier : par email en mentionnant votre contact complet : contact@wolmercommunication.fr ou par courrier à l’adresse de la rédaction : Wolmer Communication SAS 5, rue du Capitaine Tarron 75020 Paris Imprimeur : Léonce Deprez ZI-62 620 Ruitz RC Bethune 54B43 www.leonce-deprez.fr Copyright (textes et photos) Tous droits réservés à Wolmer Communication SAS La rédaction n’est pas responsable des textes, illustrations, photos et dessins publiés qui engagent la seule responsabilité de leurs auteurs. Les documents reçus ne sont pas rendus et leur envoi implique l’accord de l’auteur pour leur libre publication. Les textes des publicités et publi-reportages sont rédigés sous la responsabilité des annonceurs. Ils n’engagent pas Wolmer Communication SAS. Afin de garantir son indépendance, Wolmer Communication SAS se réserve le droit de refuser toute insertion publicitaire sans avoir à justifier sa décision.

LIBYE : GATEWAY TO AFRICA

S

eptembre vient de pointer le bout de son nez. L’été n’aura pas été franchement gai pour l’Afrique et le reste du monde. Au risque de répéter la litanie, Kadhafi vivant, l’avenir de nos 54 États et pays voisins seraient plus sereins. Oui, le Guide n’aura pas toujours été parfait, nul ne l’affirme, mais tous ces conflits et guerres civiles que subit notre continent, découlent en partie de son assassinat. La Libye est morte avec son leader. Qui s’étonne alors de la résultante ? Aujourd’hui, l’État libyen est en proie au chaos, sans gouvernement, sans parlement, laissant s’éteindre avec chagrin, sous une tempête de balles, les corps inertes de ses concitoyens. Ici et là, les anciens colons, néocolons et néocons tentent de neutraliser Boko Haram, cette secte barbare qui après avoir kidnappé des lycéennes, frappe les officiels du Cameroun. Est-ce que « Barkhane », la nouvelle force anti-terroriste française, qui succède au plan Serval depuis le 1er août pourra, avec ses 3000 hommes nettoyer la zone sahélienne ? Une autre question nous taraude : pourquoi la France s’investit autant ? L’Afrique n’at-elle pas un maillon fort membre de la BRICS capable de neutraliser ces petites katibas mobiles et sans frontières ?

Autour du champ lexical de l’incompréhension, apparaît la Maison Blanche. L’opération séduction, organisée du 4 au 6 août à Washington et réunissant plus de 40 chefs d’États africains autour des thématiques économiques, sécuritaires et de la sempiternelle bonne gouvernance démocratique, sonne faux. Nos présidents africains n’ont-ils pas intérêt à lever la tête, bomber le torse et aider la Libye à résoudre cette guerre civile sans fin ? Une Libye forte présage d’une Afrique unie, puissante et nettoyée de la vague terroriste. Une autre guerre civile sévit aussi entre la Russie et l’Ukraine. D’un côté, le nouveau gouvernement de Kiev est soutenu par l’Occident et, de l’autre, les séparatistes pro-russes à l’Est du pays sont soutenus par Moscou.

Directrice de la publication

Société éditrice: Wolmer Communication SAS 5, rue du Capitaine Tarron 75020 Paris Tél. : 01. 40.31.30.82 Siren : 751 081 159 R.C.S Bobigny Code APE : 58147

BILLET D’HUMEUR

Priscilla WOLMER

Mail : contact@54etats.fr Site : 54etats.fr N° commission paritaire : 0714191439 N° ISSN : 2258-0131 Tirage : 20 000 exemplaires

Puis, au Moyen-Orient, il y a la Syrie et le conflit israëlo-palestinien. Comment un jour faire cohabiter ces deux États ? En accord avec Elbert Hubbard, nous affirmerons qu’« il n’y a pas d’échecs, sauf à ne plus essayer » et la paix des peuples vaut bien cela. Ailleurs dans le monde, l’espace d’un été, Satan a déployé ses ailes laissant s’échoir dans le ciel trois avions et des milliers de morts… Pour autant, chers lecteurs, bonne rentrée, Directrice de la publication

ATTENTION : toute l’équipe du magazine 54 ÉTATS figure ci-dessus. Nous avons été avertis que certaines personnes utilisent le nom de notre support pour démarcher vos entreprises d’Europe et d’Afrique.

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ÉDITO LA RENTRÉE A SONNÉ…

Prospérité, paix et sécurité, un tronc commun pour une Afrique souhaitant parler d’une seule voix, laquelle semble parfois tressaillir face à une réalité façonnée par les conflits protéiformes qui l’émaillent. Un tronc solide dans lequel les chefs d’État africains éprouvent le désir impérieux d’y décocher leurs flèches de paix, de sécurité, de lutte contre les inégalités… L’ordre du monde change et le continent, en dépit des challenges posés, y pèsera de tout son poids. Dans leur « starting-block », l’Europe, la Chine, les États-Unis et la Turquie, sont prêts à courir tous les risques et à remporter la course aux potentialités de l’Afrique. C’est à qui mieux mieux dans le jeu de l’offre et de la demande ; mais, Teodoro Obiang Nguema Mbasogo est l’un des leaders africains à l’avoir compris : « La marche de l’Afrique vers la prospérité est irréversible. C’est une évolution qui doit être adaptée à la réalité de l’idiosyncrasie africaine, qui ne doit pas admettre les contraintes étrangères ! »

Pour l’heure, chers lecteurs, la rentrée a sonné. Pour ceux qui n’auraient pas encore goûté aux joies de l’oisiveté, partez à la découverte de Madagascar et de ses trésors de beauté. Pour ceux qui resteraient emprisonnés dans les tourments de la rentrée, évadez-vous au Zénith de Paris, grâce aux sonorités épicées du « Grand Méchant Zouk ».

Directrice de la rédaction

L’opération Barkhane, en partenariat avec les cinq pays de la zone (Mauritanie, Mali, Burkina Faso, Niger et Tchad), a officiellement démarré le 1er août 2014, traduisant par là-même, la volonté d’élargir et de redéployer la lutte contre l’islamisme radical dans la région sahélo-saharienne.

Très lucide, le président Obiang met l’Afrique à l’honneur en invitant à repenser intelligemment l’agriculture, laquelle revêt une importance cruciale pour le développement économique et social du continent. Ainsi, tandis que le royaume chérifien s’est distingué grâce au Plan Maroc Vert, l’Ouganda et la Tunisie s’imposent comme les leaders du bio sur le continent, lorsque le Zimbabwe poursuit sa controversée réforme agraire… À chacun sa méthode pour faire de la terre un levier de croissance.

Sandra WOLMER

C

e qui compte dans une guerre, ce n’est pas comme on l’entend naïvement de gagner la guerre. Ce qui importe, c’est de gagner la paix » (Amzat Boukari Yabara). En Centrafrique, sur fond de crise humanitaire, les exactions ont sonné le glas du cessez-le-feu signé à l’arraché, fin juillet, à Brazzaville, entre les représentants de l’ex-séléka et les milices anti-balaka. Le processus de transition démocratique patine. Les tensions restent vives, appelant à une intervention des forces africaines et internationales.

Et comme le préconisait Saint-Augustin, « Avance sur ta route, car elle n’existe que par ta marche ». Chers lecteurs, toute l’équipe du magazine 54 ÉTATS est heureuse de vous retrouver et vous souhaite à tous une bonne rentrée.

Directrice de la rédaction

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DOSSIER

SPÉCIAL

AMBASSADEURS EN FRANCE

AGRICULTURE

Miguel Oyono Ndong Mifumu, ambassadeur en poste en France

Julian ESONO ABAGA ADA : 1979 - 1983 Jesus ELA ABEME : 1983 - 1986 Faustino NGUEMA ESONO AFANG : 1987 - 1989 Pedro EDJANG MBA MEDJA : 1990 - 1995 Lino-Sima EKUA AVOMO : 1995 - 2000 Narciso NTUGU ABESO OYANA : 2000 - 2002 Eduardo NDONG ELO NZANG : 2002 - 2005 Federico EDJO OVONO : 2006 - 2011 Mariola BINDANG OBIANG EYANG : 2012 - 2014

UNE ÉCONOMIE

EN MOUVEMENT SERVICES PÉTRO FINANCIERS CHIMIE

AGRICULTURE TOURISME MINES ÉLEVAGE

La découverte de réserves pétrolières et gazières abondantes dans les années 1990 a propulsé la Guinée équatoriale en haut du classement des pays africains en termes de PIB par habitant. Depuis lors, le pays utilise ses revenus pétroliers et gaziers pour financer des projets majeurs d’infrastructures de pointe dans tout le pays. Aujourd’hui, la priorité est à la diversification de l’économie au-delà du secteur pétrolier et gazier.

Porté par le désir de comprendre le rôle du secteur privé en tant que principal moteur de la croissance et de la création d’emplois, le gouvernement de la République de Guinée équatoriale a invité, en février dernier lors d’un symposium économique, les investisseurs internationaux à profiter des occasions offertes via son plan de diversification économique et d’industrialisation défini dans le Plan d’industrialisation de la Guinée équatoriale (PEGI 2020) pour la période 20122020.

Pour ce qui concerne la pêche, le potentiel du domaine maritime équato-guinéen est dix fois supérieur à sa surface terrestre et encore largement inexploité. La Guinée équatoriale possède la zone maritime la plus importante du continent africain avec des fonds sous-marins d’une très grande richesse en faune et en flore. Les eaux de la Guinée équatoriale qui représentent environ 300 000 km2 sont très riches en poissons. Un autre secteur présente un fort potentiel, celui de la sylviculture, qui tout en s’inscrivant dans la perspective d’une gestion durable et responsable, dispose d’importantes marges de progression. En effet, seul un cinquième de la forêt tropicale est en exploitation sur 2,2 millions d’hectares. La forêt recouvre plus de 70% de la superficie de la Guinée équatoriale soit 17 735 Km². C’est la deuxième source de recettes après le pétrole. L’essence la plus recherchée, l’okoumé, mais d’autres essences ont aussi un impact commercial comme l’ilomba, l’andouk, le tali, le padouk…

Jessica COHEN

Miguel OYONO NDONG MIFUMU : ambassadeur en poste 6


Salomón NFA NDONG

MINISTRE DÉLÉGUÉ DE L’AGRICULTURE ET DES FORÊTS EN GUINÉE ÉQUATORIALE

INTERVIEW

« LA SÉCURITÉ ALIMENTAIRE EST NOTRE PRIORITÉ » Il n’aura fallu à l’humanité qu’un peu moins de huit mois, 232 jours exactement, pour consommer toutes les ressources naturelles que la planète peut produire en un an. La faute à qui ? Au rejet massif de CO2 et à la surexploitation des milieux naturels. Pendant ce temps, en Afrique, seul continent qui détient toutes les ressources permettant d’atteindre l’auto-suffisance planétaire d’ici 2050, on se prépare. Rencontre et analyse avec Salomón NFA NDONG, Ministre délégué de l’Agriculture et des Forêts en Guinée équatoriale.

54 ÉTATS : Quelle est la politique agricole mise en place par la Guinée équatoriale pour atteindre l’auto-suffisance alimentaire ? SEM Salomón NFA NDONG (S. N. N.) : Le secteur agricole apparaît comme l’un des piliers du développement économique du continent, mieux encore, le seul capable de révolutionner le monde rural, tout en assurant la sécurité alimentaire et le bien-être des populations. C’est pourquoi la Guinée équatoriale en fait une de ses priorités car il n’y a aucune justification sérieuse à répondre à un enfant qui vous dit qu’il a faim. Notre pays fait face à une croissance démographique passant de 736 300 habitants en 2012 à 1114 000 aujourd’hui, pour un territoire de 28 051 km2. 77,8% de la population vit au Rio Muni (partie continentale), 21,6% vit sur l’île de Bioko et 0,6% à Annobón. Nous mettons tout en œuvre pour booster notre secteur agricole ! Actuellement, l’agriculture représente 1,1 % du PIB.

Pour obtenir des résultats immédiats, le gouvernement a créé des fermes-modèles, à gestion privée, pour produire tout ce que nous importions de l’extérieur jusqu’ alors. La plupart des cultures de rente diminue, notamment les cultures de café, de bois d’œuvre et de cacao qui ont culminé à 859 tonnes en 2011, contre 3 000 tonnes produites en 2008. Le gouvernement a fait des efforts pour ramener la production de ces matières premières à leurs niveaux d’avant l’indépendance. Les autres produits agricoles locaux sont le riz, l’igname, le manioc, les bananes et l’huile de palme.

54 ÉTATS : Votre richesse est incontestable, pour autant, avezvous déjà bénéficié d’aides extérieures ?

Dans le cadre du plan de développement économique et social «Horizon 2020», nous organisons régulièrement des Conférences sur le développement agricole et la sécurité alimentaire (CONADERSA), en compagnie de grands acteurs du secteur agricole, la société civile, les ONG afin de diagnostiquer les problèmes de notre secteur.

54 ÉTATS : Que vous apporte l’adhésion à la Communauté des États d’Afrique Centrale (CEMAC) ?

(S. N. N.) : Le pays a récemment bénéficié de 9 millions USD d’aide dans le cadre du Programme de productivité agricole en Afrique de l’Ouest (PPAAO) mis en place sous l’égide de la CEDEAO pour augmenter la productivité rizicole. Avec cet appui, la Guinée équatoriale devrait subvenir totalement à ses besoins de riz et remplacer les 300 millions USD dépensés actuellement en importations de riz asiatique.

(S. N. N.) : D’une économie pauvre, principalement agricole, notre pays est devenu le premier producteur pétrolier de la Communauté Économique et Monétaire d’Afrique Centrale (CEMAC) et le troisième producteur pétrolier d’Afrique subsaharienne, avec 340 000 b/j, après l’Angola et le Nigeria. Son PIB a été multiplié par dix en dix ans (1999-2009). Les revenus pétroliers ont contribué à améliorer les infrastructures de base telles que les routes, écoles, hôpitaux et logements sociaux, ce qui a fait de la construction le deuxième secteur en termes de contribution au PIB (6% du PIB). Dans le même temps, le poids des autres activités (agriculture, pêche, foresterie) a fortement baissé, mais demeure essentiel dans les efforts actuels et les plans d’avenir du gouvernement. L’adhésion à la CEMAC, sur le plan agricole nous permet d’effectuer de libres échanges de marchandises et de main-d’œuvre, notamment avec nos voisins camerounais et gabonais. 7


54 ÉTATS : Quelle est la valeur ajoutée de votre stratégie agricole ? S. N. N. : Elle concerne nos fermiers qui perçoivent un salaire et apprennent des techniques modernes qu’ils appliqueront dans leurs plantations familiales. Ces cultivateurs vont recevoir des graines, des fertilisants, des produits phytosanitaires, des tracteurs, des outils, un appui technique et logistique, etc. Que demander de plus ? 54 ÉTATS : Quelles sont les opportunités existantes dans le secteur agricole ? S. N. N. : Il y en a pléthore. La transformation d’aliments pour le bétail et l’engrais, la transformation du cacao et du café, la fabrication du savon, la transformation de jus et produits dérivés, la fabrication de moulin à manioc, la transformation d’huile de palme et d’huile de coco, la mise en conserve et j’en passe. 54 ÉTATS : Qui sont vos partenaires extérieurs ? S. N. N. : Les États-Unis sont les premiers partenaires d’affaires du pays, suivis par la Chine, l’Espagne, l’Italie et la France. Les principales exportations sont le pétrole, le méthanol, le bois d’œuvre et le cacao. Les principales importations sont les équipements pétroliers et autres machines, les denrées alimentaires et les boissons. Tous nos partenaires sont importants. Exposons le cas de la Chine par exemple. Dans le cadre d’une approche plus pragmatique de la coopération sud-sud, la Chine et l’Afrique se lancent désormais dans le partage d’expérience dans le secteur agricole. La Chine est prête à partager ses 30 ans d’expérience en cette matière, c’est le pays le plus peuplé de la planète. Nous avons la possibilité d’adapter leur technique aux réalités agricoles africaines. Nous aurions tort de nous en priver !

C’EST DE L’AFRIQUE QUE PARTIRA LA RÉVOLUTION AGRICOLE.

54 ÉTATS : La Guinée équatoriale prépare donc sérieusement l’après-pétrole ? S. N. N. : L’Europe et les États-Unis ont lancé la révolution industrielle. C’est de l’Afrique que partira la révolution agricole. La vision et la stratégie sont là. La volonté politique aussi. Pour reprendre les pensées du président Teodoro Obiang Nguema Mbasogo, je dirais « Semons et cultivons le pétrole ». Notre plan d’industrialisation réserve une place prioritaire aux industries alimentaires et à ses dérivés. Il n’y a pas de développement agricole qui vaille la peine sans transformation. Le président est déterminé à renforcer le rôle régional de la Guinée équatoriale et à exercer une gouvernance économique proactive pour rendre notre État plus attrayant.

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54 ÉTATS : Quels sont vos objectifs majeurs ? S. N. N. : Ils visent à diversifier notre économie, à améliorer les conditions de vie des équato-guinéens et la compétitivité de la Guinée équatoriale au niveau mondial. 54 ÉTATS : Les problèmes causés par la déforestation menacent directement l’équilibre environnemental de vos régions, comment comptez-vous sauvegarder durablement l’environnement ? S. N. N. : Depuis juin 1997, nous avons des lois forestières comportant des modalités et normes extrêmement rigoureuses. Seulement huit entreprises disposent d’une licence d’exploitation. Par ailleurs, au retour des conférences internationales de Rio+20, en 2011, et récemment à Johannesbourg, en Afrique du Sud, nous avons promulgué une loi interdisant la désertification. Nous avons interdit la destruction systématique des forêts grâce à un système de signalisation indiquant les espèces qu’il est possible de couper. En plus de cela, chaque arbre coupé exige un reboisement immédiat de ce dernier. Nous avons élargi la surface de zones protégées, dans lesquelles aucune entreprise ne peut exercer une activité forestière d’exploitation. Cette zone représente aujourd’hui plus de 18,5% de la couverture forestière nationale. Par ailleurs, notre pays jouit d’un climat humide et tropicale avec des températures oscillant entre 15° et 32°, mais étant tout à fait conscient des problèmes liés au changement climatique, qui entraînent des perturbations dans les systèmes de production, l’environnement et la biodiversité sur laquelle s’appuient les systèmes de production alimentaire, nous sommes extrêmement vigilants. Nous comprenons le lien entre agriculture, énergie et eau et notre pays tire parti des écosystèmes et du capital naturel dont il dispose pour atteindre d’ici 2020, d’après notre programme gouvernemental, l’autosuffisance alimentaire et pour éradiquer la pauvreté.

INFO +

http://www.unccd.int/ActionProgrammes/equatorial_guinea-spa2006.pdf ftp://ftp.fao.org/TC/CPF/Countries/Equitorial%20Guinea/CPFConceptNoteEG.pdf 9


GUINÉE ÉQUATORIALE HÔTE DU 23e SOMMET DE L’UNION AFRICAINE

ADIEU PELLES ET RÂTEAUX… BONJOUR MÉCANISATION ! © African Union Commission. Mme Dlamini-Zuma, présidente de la commission de l’Ua et M. Mohamed Ould Abdel Aziz, président en exercice de l’Ua pour l’année 2014, lors du 23e Sommet de l’Union africaine (Sipopo, Guinée équatoriale).

Du 20 au 27 juin 2014, le 23e sommet des chefs d’État et de gouvernement de l’Union africaine s’est tenu en Guinée équatoriale, dans la ville côtière de Sipopo. Placé sous le signe de l’agriculture et de la sécurité alimentaire, cet événement a notamment été l’occasion de traiter de nombreux autres sujets. Retour sur ce rendez-vous majeur qui rythme l’agenda de cette institution.

« Transformer l’Agriculture Africaine pour la Prospérité et l’Amélioration des Conditions de Vie pour Tous en Exploitant les Opportunités pour une Croissance Inclusive et un Développement Durable » : tel est le thème qui a mobilisé l’attention de la quarantaine de chefs d’État et de gouvernement africains réunis au Palais de conférence de Sipopo et tel est le défi majeur que ces derniers doivent relever. Et pour cause ! Alors que l’Afrique dispose d’un fort potentiel agricole, affiche des taux de croissance se situant parmi les plus élevés du monde (dépassant 5% en moyenne), le continent n’a toujours pas éradiqué la faim et n’a toujours pas résolu la question de la sécurité alimentaire : un quart de sa population (soit plus de 200 millions de personnes) continue de souffrir de la sous-alimentation. Grand pourvoyeur d’emplois sur le continent (près de 60%), le secteur agricole africain se compose majoritairement de petites exploitations traditionnelles et ne sert principalement qu’à répondre aux besoins locaux. Tandis que la production diminue, la population ne cesse de croître. Viennent se greffer à cela des contraintes naturelles telles que les aléas climatiques, la sécheresse, l’épuisement des éléments nutritifs des sols. Les problèmes étant connus et posés, il est impératif, comme l’a souligné l’hôte de ce sommet, M. Teodoro Obiang Nguema Mbasogo, de restructurer profondément et judicieusement l’agriculture de façon à en faire un puissant levier de développement économique « Il est urgent d’agir pour sauver nos États. Nous ne pouvons pas parler de développement de l’Afrique s’il n’existe pas un développement agricole qui évite la dépendance permanente des importations des articles de consommation. L’Afrique doit investir massivement dans le développement agricole pour sa propre transformation, afin d’accélérer la croissance et d’augmenter la productivité .» Reste à engager une transformation profonde par le biais de réformes concrètes privilégiant notamment la mise en place de technologies et d’infrastructures adaptées, la préservation des ressources naturelles, l’instauration d’un environnement institutionnel et économique incitatif, l’organisation des marchés. Condition sine qua non pour que l’Afrique puisse atteindre ses objectifs de développement.

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LA RÉVOLUTION VERTE AFRICAINE… EN MARCHE ? DANS LE SILLAGE DE MAPUTO Déjà en 2003, la question agricole se situe au cœur des préoccupations. Ainsi, lors d’une réunion à Maputo (Mozambique) les chefs d’État africains créent le Programme Détaillé de Développement de l’Agriculture Africaine (PDDAA) dans le cadre du Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD) aux fins de l’amélioration et de la promotion du secteur agricole africain. En adhérant au PDDAA, ces derniers s’engagent à atteindre un taux de croissance annuelle d’au moins 6% dans ce secteur et à consacrer au moins 10% de leur budget national à l’agriculture.

La symbolique est forte, le président Obiang et le Secrétaire général des Nations Unies, sur les traces de Feu Wangari Maathai plantent ensemble, un arbre.

© Raymond Dakoua.

Le sommet de Malabo se présente donc comme une opportunité de réaffirmer les engagements jadis donnés et de relancer la question de la modernisation agricole. Dans son discours d’ouverture, le chef d’État mauritanien, Mohamed Ould Abdel Aziz, aussi président en exercice de l’Ua pour l’année 2014, a appelé à l’adoption d’une déclaration pour le développement de l’agriculture pour la prospérité commune. Et Mme Dlamini-Zuma, présidente de la commission de l’Ua, d’affirmer dans son allocution que la résolution des problématiques liées à la faim, à la sécurité alimentaire et à la pauvreté en milieu rural passera notamment par le développement des marchés agricoles, l’accroissement de la production et de la productivité agricoles, la commercialisation de produits à valeur ajoutée, la recherche ainsi que par un meilleur accès des femmes et des jeunes à la terre et au capital : « Nous nous engageons à augmenter les investissements dans l’agriculture, de même que dans la productivité. Nous avons une liste d’initiatives au niveau continental, mais nous avons besoin de travailler davantage et plus vite, ce qui signifie travailler sur des projets plus concrets comme le financement pour les femmes rurales, mais aussi pour l’énergie, les transports, etc. L’âge moyen de nos paysans est très élevé et les jeunes ne s’intéressent pas à ce secteur. Cela montre que l’agriculture africaine est toujours traditionnelle et non pas moderne. Nous devons la mécaniser et utiliser les technologies une fois pour toutes .»

© Raymond Dakoua. M. Ban Ki-Moon, Secrétaire général des Nations Unies lors du 23e Sommet de l’Union africaine (Sipopo, Guinée équatoriale).

Or, il apparaît à ce jour que les promesses jadis prises n’ont été tenues que par une petite dizaine d’États signataires du protocole. L’Union africaine, quant à elle, n’a pas été en mesure de véritablement mettre en marche sa révolution verte faute d’avoir su mobiliser et déployer les ressources et moyens nécessaires au sein de ses États membres, obligeant ainsi le continent à continuellement s’adresser à ses partenaires mondiaux. Cette 23e édition s’est clôturée sur la Déclaration de Malabo avec pour engagements : « le Renouvellement de l’engagement en faveur des principes et des valeurs du PDDAA, Engagement à renforcer le financement des investissements dans l’agriculture, Engagement à éliminer la faim d’ici à 2025, Engagement à réduire de moitié la pauvreté d'ici à 2025, grâce à une croissance et à une transformation inclusives de l’agriculture ». Verbiage pour les uns, perspective d’avancées majeures pour les autres. À l’heure où l’Agenda 2063 jette les fondements d’une « Afrique intégrée, prospère et en paix, dirigée par ses citoyens et constituant une force dynamique sur la scène mondiale », ce som-

met marquera peut-être le point de départ de la révolution verte sur le continent faisant du secteur agricole africain la pierre angulaire de cette édification. Sandra WOLMER

INFO + LA VOLONTÉ DE BAN KI-MOON

Saluant l’initiative d’une conférence internationale sur le développement prévue en juillet 2015 à Addis-Abeba, (siège de l’Ua en Éthiopie), le Secrétaire général des Nations Unies, M. Ban Ki-moon, à l’instar de Mme Dlamini-Zuma, s’est prononcé en faveur du développement des marchés agricoles, de l’augmentation de la production et de la productivité agricoles et d’une commercialisation accrue des produits à valeur ajoutée. Ce dernier a également souligné la nécessité de poursuivre les actions conduites aux fins de l’élimination des flux illicites de fonds, de la lutte contre les inégalités, d’un meilleur accès à une protection sociale, etc… M. Ban Ki-moon, a également rappelé que le développement économique et social durable passe par une bonne gestion de l’environnement. La question du changement climatique, qui revêt une importance particulière pour le développement de l’Afrique, ne lui a donc pas non plus échappé. Et, d’insister notamment sur le fait d’« être solidaires pour faire face au défi du changement climatique » et sur l’urgence d’une limitation des augmentations de températures à moins de 10°C. 11


COVER

MAROC

FOCUS SUR « LE PLAN MAROC VERT » Lancé en 2008, le « Plan Maroc Vert » (PMV) – visant à lutter contre la faim et la malnutrition- semble tenir toutes ses promesses. Un succès en tout cas salué par l’Organisation des Nations unies (ONU). Il faut dire que les objectifs fixés auraient été atteints avec deux années d’avance ! De quoi s’attirer les louanges du directeur général de l’ONU pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), José Graziano da Silva, qui cite le royaume chérifien en exemple. Du côté de Rabat, pas question de s’endormir sur ses lauriers. On compte bien poursuivre les efforts entrepris en matière de développement durable…

EMPLOIS

CRÉÉS AU MAROC

Loin de se contenter d’ouvrir l’accès à la terre au plus grand nombre, le plan élaboré par le Maroc aurait également permis d’accroître le niveau de mécanisation, notamment en développant les mécanismes d’irrigation. Alors que le recours aux tracteurs aurait triplé et l’utilisation de semences aurait bondi de 50% dans la même période, une attention spécifique aurait été accordée à la question de l’irrigation. Ce que confirme le ministre lui-même : « ce programme est une réponse aux défis de la raréfaction des ressources en eau et de la valorisation de ces ressources de plus en plus rares. » Concrètement, une politique d’économie d’eau a été érigée en priorité. L’idée étant de passer d’un système d’irrigation dispendieux vers un goutte-à-goutte des plus économes. Pour Aziz Akhannouch, aucun doute, le Maroc a déjà « changé la face de son agriculture et posé les fondements d’un nouvel ordre agraire ».

© MarocStoun

En l’espace de tout juste cinq ans, le PMV a bénéficié de quelques 55 milliards de dirhams (soit près de 4,9 milliards d’euros) issus d’un double financement public/privé. Une somme qui devrait atteindre 66 milliards à l’horizon 2015. Il résulterait de cet investissement massif, selon les informations communiquées par le ministère de l’Agriculture, une multiplication des exploitations. De 200 000 en 2008, leur nombre serait passé à 1,7 million en 2013 avec pour effet principal une hausse de 43% de la production agricole. Du coup, les exportations auraient progressé de manière exponentielle -+55% en 5 anspour atteindre 26 milliards de DH contre 14 précédemment. Dans le même temps, la superficie totale des terres cultivables serait passée de 450 000 hectares à 8 millions.

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© AFDB Group

C’est à Rome, le lundi 16 juin, que le ministre de l’Agriculture et de la Pêche maritime, Aziz Akhannouch, a reçu un prix décerné par les Nations Unies pour féliciter le Maroc de ses « progrès remarquables » dans le domaine de la lutte contre la faim. Un thème important pour l'institution européenne qui avait fait de cet enjeu le premier de ses huit objectifs du Millénaire pour le développement (OMD).

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© sebtvision

Bien évidemment, les retombées annoncées - d’un point de vue socio-économique - sont des plus encourageantes. Tandis que le Produit intérieur brut (PIB) agricole aurait connu une nette embellie (+32%), c’est surtout dans le domaine de l’emploi que les avancées seraient les plus probantes : +23% pour quelques 77 000 emplois permanents sécurisés. Autre conséquence non négligeable, la disponibilité alimentaire par habitant aurait augmenté de quelques 14% durant ces cinq années. Une amélioration qui attend confirmation dans les prochaines années. Du côté marocain, on ne doute en tout cas pas du bien-fondé de la stratégie « solide, intersectorielle et intégrée (qui) repose sur le long terme et ambitionne une agriculture durable et innovante pour être compétitive et socialement intégrée », dixit le ministre.

SATISFECIT DE LA PART DE L’ONU

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Un optimisme forcené auquel n’adhère toutefois pas tout le monde. À l’image de l’économiste Najib Akesbi. Pour le chercheur de l’Institut agronomique et vétérinaire Hassan II de Rabat, tout ceci ne serait qu’une « grosse manipulation de chiffres pour une énorme opération de communication ». L’enseignant est formel, le Plan Maroc Vert fait fausse route en prônant « une agriculture à deux vitesses qui s’inscrit dans un modèle productiviste digne des années 50 ». Celui-là même qui avait montré ses limites dans les contrées européennes. Et Najib Akesbi d’enfoncer le clou : « le PMV ne présente aucune notion de sécurité alimentaire, il programme surtout l’insécurité alimentaire ! » © MAP. M. Najib Akesbi, économiste.

« La mise en œuvre de ce plan explique pour une grande part la réussite du Maroc dans sa lutte pour la réduction de la sous-alimentation, en renforçant le rôle de l’agriculture dans le développement durable du pays », a commenté José Graziano da Silva. Et le directeur général de la FAO de préciser que « la réalisation d’un tel objectif revêt une importance majeure dans la mesure où il a été atteint deux ans avant la date fixée ». Un satisfecit qui fait du Royaume chérifien un véritable exemple aux yeux des institutions internationales. José Graziano da Silva est d’ailleurs formel : « Il n’y a aucun doute que le Maroc pourra offrir une contribution significative à d’autres pays de l’Afrique en matière de développement de l’agriculture. Partager les expériences et expertises présente un intérêt considérable et des opportunités réelles pour les pays qui pourraient ou voudraient s’en inspirer. »

Des critiques qui laissent de marbre dans les couloirs ministériels. Le discours y est clair : le moment est maintenant venu pour le Maroc de consolider cette dynamique en travaillant sur différents projets. Les secteurs de la Recherche & Développement mais aussi de la formation agricole apparaissent ainsi comme des axes prioritaires. Et ce, afin de garantir l’essor d’une agriculture modernisée. Une évolution qui passe aussi par un désengagement progressif de l’État et une responsabilisation accrue des différents acteurs du monde agricole, qu’il s’agisse de petits producteurs comme de géants de l’agro-industrie. En ce sens, pas moins de six agropoles devraient voir le jour dans différentes régions alors qu’une nouvelle tranche, la quatrième, de 20 000 hectares va être dédiée à des projets d’envergure limitée.

Hervé PUGI 13


COVER

BIO EN TUNISIE : COULEURS ET SAVEURS LOCALES !

© Luis Carlos Jiménez

Dans un pays où le secteur agroalimentaire représente 3% du PIB national, l’agriculture biologique apparaît comme un débouché prometteur. La Tunisie l’a bien compris et occupe dorénavant une fort enviable 2e place au palmarès des pays exportateurs de produits bio du continent africain. Ce qui place le pays au 24e rang mondial en terme de valeur. Son fer de lance n’est autre que l’huile d’olive, seules l’Espagne et l’Italie peuvent se prévaloir d’une plus grande capacité de production.

© benjetpascal01

L’OLIVE MAIS PAS SEULEMENT…

Estimée à 400 000 hectares actuellement, dont 90 000 sont occupés par les seuls oliviers, la superficie des terres consacrées à l’agriculture biologique devrait théoriquement atteindre 500 000 hectares en 2016. De quoi accroître un volume, déjà fleurissant, atteignant actuellement 250 000 tonnes par an.

Des produits « bio » qui commencent à peser de tout leur poids dans les exportations. De fait, 80% des produits « bio » partent vers l’étranger. Pour la seule année 2014, ceux-ci ont tout de même rapporté la bagatelle de 120 millions de dinars tunisiens (soit près de 52 millions d’euros).

© stephanelhote

Outre les olives (et leurs dérivés), les dattes biologiques tunisiennes se sont imposées sur les étales mondiaux puisque pas moins de 68% des quelques 6 000 tonnes récoltées ont quitté le pays. Un exemple de diversification d’un produit purement local qui devrait être suivi très prochainement par la mise en valeur de la figue de barbarie.

Hervé PUGI

14 © Tunisie


OUGANDA : LE MODÈLE BIO FAIT RECETTE

Avec près de 300 000 hectares agricoles exploités sous certification biologique, l’Ouganda fait figure de précurseur sur le continent africain en matière de développement durable. Un choix mais surtout une réussite particulièrement intrigante alors que de nombreux observateurs et spécialistes en tout genre prévoient pour l’Afrique un destin passant inexorablement par la culture des très discutés Organismes génétiquement modifiés (OGM). Du coup, l’excellence ougandaise est scrutée de très près, même si des menaces planent désormais sur ce modèle de développement…

Loin d’être une nouveauté en Ouganda, l’agriculture biologique s’inscrit dans une logique économique à part entière. De fait, si certaines entreprises commerciales se sont pleinement lancées dans l’aventure du bio dès 1994, la grande majorité des petits agriculteurs ougandais n’ont eu d’autre choix que de transformer une contrainte en un avantage comparatif. Et pour cause, le faible accès aux intrants chimiques (engrais, produits phytosanitaires, activateurs ou retardateurs etc.) n’a laissé d’autre opportunité à l’État ougandais que de donner une orientation spécifique à sa politique agricole. De fait, nombre de mesures ont été prises afin d’effectuer la grande transition d’une production conventionnelle à une agriculture biologique. Avec l’objectif premier, assumé, de subvenir aux besoins de la population sur la durée.

Une réussite au final puisque le pays se classait dès 2003 au 13e rang mondial et se retrouvait même leader en Afrique au regard des superficies cultivées (+60% en dix ans). De quoi surtout permettre à l’Ouganda de se lancer dans l’exportation (ananas, gingembre, vanille etc.). Pour une récolte qui avoisinerait les 23 milliards de dollars ! Un profit nettement supérieur à celui qu’aurait pu espérer retirer le pays en cas de production conventionnelle. Au final, l’Ouganda pèserait 21% dans le total des exportations africaines dans le monde en matière de bio.

21% BIO

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DES EXPORTATIONS

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AFRICAINES

© Jan Dunzweiler

Échapper au diktat des marchés agricoles mondiaux et ses soudaines fluctuations, tel est l’un des avantages (actuels) de la production biologique. À défaut de vendre de la quantité à un moindre prix, on écoule de la qualité en nombre limité mais pour des tarifs pouvant être de 150 à 300% supérieurs au cours des marchés des produits conventionnels. Un profit important. Productivité accrue, croissance autoentretenue et développement du marché, agriculteurs et industriels du bio ont pu compter sur le soutien de l’État ougandais et de certains de ses voisins qui ont su encadrer le développement de cette activité par une réglementation en bonne et due forme. Des normes ont ainsi été clairement définies et retravaillées au fil des ans pour offrir aux acteurs de ce secteur agricole toutes les chances de se développer et de s’imposer sur ce nouveau marché. Le tout sans perdre de vue l’objectif initial, se conformer au plan d’action pour l’élimination de la pauvreté (PAEP) mis en place par la Banque mondiale.

UNE BANANE OGM EN 2020 ? UNE CRAINTE RÉELLE… Si le compte est bon, financièrement parlant, la démarche se veut également des plus vertueuses. La méthode de travail, proche des us traditionnels, permet effectivement de limiter l’érosion des sols mais aussi de réduire les émissions de gaz à effet de serre dans l’atmosphère (-64% par hectare). Toutefois, tout ne tourne pas si rond dans le petit monde du bio en Ouganda. Les assauts du géant américain des OGM, Monsanto, et de ses alliés semblent avoir créé une véritable brèche dans la bonne volonté affichée par les pouvoirs publics. Certains essais actuellement menés pourraient ainsi conduire, à l’horizon 2020, à la production de bananes dopées en Vitamine A, dont la carence provoquerait chaque année entre 650 000 et 700 000 décès dans le monde. Une avancée pour les uns mais une vraie marche arrière pour les autres. D’autant plus qu’un avant-projet de loi sur la sûreté et la sécurité biologique -qui légaliserait l’importation et l’usage des OGM- serait à l’étude du côté de Kampala. De quoi provoquer la colère des nombreux experts locaux, à l’image de Patrick Rubaihayo, chercheur à l’Université Makerere, pour qui « nous ne devrions même pas parler d’introduire des OGM dans le pays. Nos sols sont assez fertiles pour produire de la nourriture en quantités suffisantes pour la population et avoir des excédents à exporter dans le monde. » Le débat ne fait que commencer… Hervé PUGI

© CC BY-SA 2.5

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COVER

ZIMBABWE LA RÉFORME AGRAIRE EN QUESTION… En lançant sa réforme agraire en 2000, nul ne contestait au président Mugabe le droit de rétablir une injustice issue du passé colonial : à une minorité blanche les terres fertiles, à la majorité noire les terrains les moins productifs. Toutefois, la violence qui a émaillé le processus et la radicalisation du pouvoir sur le dossier ont considérablement écorné l’image du projet. Pourtant, il en va de l’avenir du Zimbabwe.

© Abayomi Azikiwe / Pan-African News Wire File Photos

« Nous sommes contre l'appropriation de nos terres par des Blancs, qu'ils s'en aillent ! » Les propos de Robert Mugabe, tenus lors d’un rassemblement de l’Union nationale africaine du Zimbabwe (ZANU-FP) en juillet dernier, ont le mérite d’être clairs. Cette déclaration choc n’est en fin de compte que le prolongement du climat nauséabond ayant accompagné une réforme agraire, plus que nécessaire, lancée au début des années 2000. Et le président zimbabwéen d’ajouter avec une certaine fureur : « Ne soyez pas trop gentils envers les fermiers blancs. C'est notre terre, pas la leur ! »

Une sortie virulente qui n’étonne guère de la part d’un homme coutumier de telles polémiques. En revanche, cette nouvelle salve contre les « fermiers blancs » a surpris nombre d’observateurs alors même que la réforme agraire a officiellement pris fin en 2012. Une redistribution –forcée– des terres qui n’a pas été sans heurts. Sur les quelques 4 000 propriétaires terriens, possédant pas moins de 70% des terres arables du pays, il n’en resterait aujourd’hui que 100 à 150 à en croire le syndicat national des cultivateurs.

Les autres ? Expropriés et terrorisés par des milices à la solde du président nonagénaire, ils ont tout abandonné pour fuir à l’étranger. Un moindre mal lorsque l’on sait qu’une dizaine de fermiers ont été purement et simplement assassinés. Pas franchement le scénario envisagé par la Grande-Bretagne, partenaire censé financer les compensations d’un plan d’expropriation initialement limité à quelques milliers d’hectares. Une démarche qui se voulait par ailleurs concertée et pacifique.

LES DÉRIVES D’UNE RÉFORME ESSENTIELLE La violence et les différents débordements ayant émaillé l’application de ladite réforme ne doivent pas pour autant faire perdre de vue qu’ouvrir l’accès à la terre au plus grand nombre était devenu une impérieuse nécessité du côté du Zimbabwe. C’était même une revendication à part entière depuis l’indépendance du pays en 1980. Une attente pour les uns, une crainte pour les autres –légitimes dans les deux cas– que les Accords de Lancaster House, signés en 1979 entre le gouvernement britannique et les représentants des différentes communautés de l’ancienne Rhodésie du Sud, allaient geler jusqu’en 1990. Le Zimbabwe Act excluait effectivement toute expropriation ou nationalisation de la part de l’État zimbabwéen dans une période de dix ans. Ce délai passé, la marche vers une redistribution des terres agricoles s’avérait inéluctable.

© Raymond Dakoua. M. Robert Mugabe, président du Zimbabwe, lors du 23e sommet de l'Union africaine en Guinée équatoriale.

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DES RAISONS D’ESPÉRER EN L’AVENIR

© Exe Dave

© Robin Hammond

Aujourd’hui, les avis restent partagés sur les effets réels d’une réforme agraire engagée voilà guère plus de 14 ans. Le climat délétère ayant accompagné le mouvement et les frasques d’un Robert Mugabe devenu infréquentable y sont pour beaucoup : ce qui apparaissait nécessaire est ainsi devenu intolérable au regard de certains. Très vite, des voix se sont élevées pour dénoncer la captation des meilleures terres au profit exclusif des proches du pouvoir et de ses partisans. La réforme exclurait de fait tout ceux qui s’aligneraient derrière l’opposition, menée par le Mouvement pour le changement démocratique (MDC). Les mêmes iront jusqu’à évoquer un total fiasco en pointant du doigt l’effondrement –bien réel– de la production agricole, l’impossibilité de financer de quelconques investissements et la mise au chômage de travailleurs autrefois employés sur les champs de tabac, d’arachides, de blé ou de coton. Le grenier agricole de l’Afrique Australe devait même se résoudre à faire appel à l’aide internationale en 2008 à la suite de multiples récoltes catastrophiques (sécheresse extrême, pluies torrentielles).

Un tableau bien sombre mais qui a le mérite de soulever nombre de manquements et de problématiques. Il convient toutefois d’apporter quelques nuances. C’est en tout cas ce qu’avance Ian Scoones, professeur à l’Institut d’étude sur le développement à l’Université de Sussex. Dans son article, intitulé « A new start for Zimbabwe », le chercheur anglais dénonce la « sagesse conventionnelle qui domine le discours de médias et des universitaires » quant à la réforme agraire et ses effets. Sans nier les perversions énoncées précédemment, le chercheur affirme que celles-ci ont été élevées au rang de « mythes ». Se basant sur des travaux effectués dans la province de Masvingo, celui-ci avance ainsi que 60% des bénéficiaires de la redistribution des terres sont des « fermiers ordinaires. Il ne s’agit pas d’une élite riche et bien introduite dans les sphères politiques, mais de populations rurales pauvres, qui avaient besoin de terres et souhaitaient récolter, enfin, les fruits de l’indépendance. » Et Scoones est formel, ces fermiers déshérités s’en sont « relativement bien tirés. Les ménages ont déblayé les terres, planté et investi dans un nouveau matériel.

Certains ont même embauché de la main d’œuvre dans les terres communautaires environnantes. » Quant à l’effondrement de l’économie liée à l’agriculture, l’universitaire fait remarquer que certaines entreprises nouvellement créées ont réussi à percer « contre toute attente ». Celui-ci prédit même que la relance de l’industrie agricole n’est qu’une question de temps et… de « packaging » !

Entre les occupations violentes des fermes et les déclarations virulentes du président Mugabe, les nombreux enjeux de l’indispensable réforme agraire ont été quelque peu perdus de vue. C’est pourtant de la réussite de ce plan que dépend grandement l’avenir d’un pays dont 55% de la population vivaient encore sous le seuil de pauvreté alimentaire en 2009. Hervé PUGI 17


POUVOIR

GUINÉE ÉQUATORIALE

UN BOOM ÉCONOMIQUE

SPECTACULAIRE DANS LE CADRE DU PLAN DE DÉVELOPPEMENT « HORIZON 2020 », LA GUINÉE ÉQUATORIALE PRÉPARE ACTIVEMENT « L’APRÈS-PÉTROLE », EN RÉALISANT PLUS DE 800 PROJETS DE CONSTRUCTION QUI PERMETTRONT, ENTRE AUTRES, DE DÉVELOPPER LE SECTEUR TOURISTIQUE. LA CRÉATION DE ROUTES, D’AÉROPORTS, DE PORTS MARITIMES, L’AMÉNAGEMENT DE PUITS ET DE RÉSEAUX ÉLECTRIQUES SONT ESSENTIELS ET PERMETTENT D’AMÉLIORER LA VIE DES 1 014 000 HABITANTS. ZOOM SUR CE PETIT PAYS PUISSANT QUI EMPLIT DE FIERTÉ TOUTE LA SOUS-RÉGION.

Le palais présidentiel à Malabo Photographie provenant du site en.wikipedia.org

DES INFRASTRUCTURES À FOISON La Guinée équatoriale brille par son boom économique spectaculaire découlant de l’exploitation de ses ressources. Le ministre des Mines et des Énergies, Gabriel Mbaga Obiang Lima, informait qu’en 2013, le pays produisait environ 270 000 barils de pétrole par jour. L’utilisation adéquate des rendements issus de la manne pétrolière a permis de faire de ce pays un joyau. En effet, c’est l’un des rares États d’Afrique à bénéficier d’excellentes infrastructures tout domaine confondu. Les nouvelles voies routières permettent de relier entre elles les plus Photographie provenant du site grandes villes de l’État (Bata, Malabo, Mongomo, Oyala) et d’atuneautoroutedanslajungle.blogspot.com Ville nouvelle - Malabo II teindre les villages les plus retirés. Dans le même ordre d’idées, l’agrandissement des aéroports de Malabo et de Bata et la construction de l’aéroport de Mongomeyen ont permis de réduire le temps de trajet pour les populations situées plus à l’intérieur du pays. Aussi, des ponts gigantesques ont été construits, comme celui de la route Éla Nguema-Riaba dans la partie Est de l’île de Bioko ou celui de la rivière Timbabe. La population utilise déjà les autoroutes Bata-Rio Mbini ou Bata-Mongomo. Ceux qui empruntent l’autoroute pourront apercevoir le pont le plus long et le plus élevé de toute l’Afrique subsaharienne. Côté maritime, les ports du pays ne sont pas en reste. Le transport du pétrole, de l’ensemble des grosses machines et des autres marchandises requiert une superficie beaucoup plus importante. Le port de Malabo, en voie d’achèvement, sera le premier grand port en eaux profondes de cette zone. Ainsi, Malabo deviendra l’une des plaques tournantes du commerce entre l’Afrique, l’Amérique du Sud, le © Embassy of Equatorial Guinea Maghreb et l’Europe. Port de Malabo

Port de Malabo

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Photographie provenant du site mapa.nocowanie.pl La cathédrale de Mongomo

Photographie provenant du site apanews.net Malabo II - Siège de la radio nationale

DES VILLES MÉTAMORPHOSÉES De jour en jour, le paysage citadin se transforme. Parmi les projets urbains les plus remarquables, on distingue Malabo II, la nouvelle ville, qui accueille déjà de nombreux bâtiments administratifs à l’architecture futuriste, ainsi qu’une multitude de logements sociaux destinés aux personnes dont les revenus n’excèdent pas certaines limites au sein des couches populaires et de la classe moyenne. La zone de Buena Esperanza est aussi formée par des douzaines de maisons individuelles, un peu identiques à celles de Bussy St-George, en Ile-de-France. Il est actuellement prévu de construire des écoles, des centres médicaux et des centres commerciaux. En ce qui concerne les services, la ville prévoit de faciliter l’accès au transport des habitants.

© Embassy of Equatorial Guinea Malabo II - siège de GEpetrol

Malabo II - pôle administratif

À Bata, sur la partie continentale, à côté du quartier accueillant les logements sociaux ou du sublime bord de mer, similaire à la célèbre Croisette, se dresse l’Hôpital La Paz qui, aujourd’hui, est l’un des centres cliniques les plus avancés de toute l’Afrique. La grand-mère du président Obama y a d’ailleurs été soignée. Idem pour la ville d’Evinayong. Côté religion, les 90 % de catholiques du pays ne sont pas en reste, grâce à la sublime cathédrale Notre Dame de l’Immaculée Conception, située à Mongomo, le village natal du président de la République. À Malabo centre, le charme de l’architecture hispanisante léguée par les Espagnols laisse rêveur. À Sipopo, la station balnéaire située à 18km du centre ville, accueillera prochainement un centre commercial de 5000 m2 où logeront de grandes enseignes et des marques de luxe.

© Embassy of Equatorial Guinea Malabo II - siège de Sonagas

Quartier résidentiel - Buena Esperenza

© Priscilla Wolmer

©Priscilla Wolmer Logements sociaux à Malabo

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EAU ET ÉLECTRICITÉ POUR TOUS

Photographie provenant du site afriqueinside

L’un des plus gros projets réalisés par l’État équatoguinéen se situe près de la ville d’Añisok. Il s’agit de la construction de la grande centrale hydraulique de Djibloho. D’une puissance de 120 mégawatts, elle permet d’approvisionner tout le territoire national en électricité. À la distribution d’électricité, s’ajouteront celle de l’eau courante pour toute la population, une fois achevées les grandes constructions réalisées à Malabo et à Bata, ainsi que les installations de purification comme celles qui fonctionnent déjà à Mongomo.

N°1 DANS L’ORGANISATION DES « BIG EVENTS » LA RÉFÉRENCE INCONTOURNABLE POUR L’ORGANISATION DES « BIG EVENTS » Hôte incontesté des Sommets de l’Union africaine, Afrique-Caraïbes-Pacifique (ACP), Amérique Latine–Afrique (ASA), Turquie-Afrique, de la Coupe d’Afrique des Nations (CAN), et autres événements internationaux, la Guinée équatoriale brille dans l’organisation des évènements d’envergure. Dans le domaine du sport, Malabo et Bata comptent déjà deux stades de football ultra-modernes ! Mais également d’autres bâtiments et complexes hôteliers. Entre modernité, industrialisation, forêt et îles paradisiaques, la Guinée équatoriale ne devrait pas tarder à accueillir des touristes, d’autant plus que la compagnie aérienne locale, Ceiba intercontinental, a accueilli dans sa flotte de six avions, deux Boeing 737-800. Conclusion : vamos a Guinea ecuatorial !

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Corisco, l’île au sable blanc située à 29km au Sud-Ouest de la région continentale qui marque la frontière avec le Gabon, Corisco est la perle de l’Atlantique. Son nom évoque l’éclat (du portugais Coruscao, étincelant).

RESPECT DE L’ENVIRONNEMENT La préservation des grandes forêts, qui constituent le plus grand trésor de la Guinée équatoriale, a été l’une des grandes préoccupations institutionnelles. Pour cela, le Gouvernement de Guinée équatoriale, aux côtés du PNUD et du Fonds pour l’environnement mondial, ont signé récemment un projet pour la gestion et la protection des sols et des forêts du pays. Plus de 90 000 dollars américains seront investis dans l’exécution du projet de Gestion durable des sols et des forêts. Jessica COHEN

Flore de Malabo

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SOGEA-SATOM ©Frank Casteleyn / Linkedin

PARTENAIRE LOCAL

Directeur d'agence SOGEA SATOM Postes précédents : Directeur d'exploitation SOGEA SATOM Tchad chez Sogea-Satom Gérant - SEP Razel/Sogea Satom "Aménagement des 3 frontières" chez Razel Chef d'agence RAZEL Mali chez Razel

Directeur d'agence SOGEA SATOM

L'image de la Guinée équatoriale est démodée. Les choses ont énormement évolué depuis une décennie. Le pays se développe très rapidement en termes d'infrastructures, de culture et de liberté.

© Priscilla Wolmer

ANCRAGE HISTORIQUE DANS LES TERRITOIRES, CULTURE D’ENTREPRISE PRIVILÉGIANT LA QUALITÉ ET L’ESPRIT D’ÉQUIPE, SOGEA-SATOM (FILIALE AFRICAINE DE VINCI), À TRAVERS SON RÉSEAU DE FILIALES IMPLANTÉES DANS UNE VINGTAINE DE PAYS, FAIT PARTIE INTÉGRANTE DU TISSU ÉCONOMIQUE ET SOCIAL DU CONTINENT AFRICAIN. SON ACTIVITÉ EST CONSACRÉE À 50% AUX TRAVAUX ROUTIERS ET AU TERRASSEMENT, À 30% AU GÉNIE CIVIL, À 10% À L’HYDRAULIQUE ET 10% AU BÂTIMENT. DE LA ROUTE À L’HYDRAULIQUE, DU GÉNIE CIVIL AU BÂTIMENT, SOGEA-SATOM ADAPTE EN PERMANENCE SES RESSOURCES – MOYENS HUMAINS ET MATÉRIELS – POUR RÉPONDRE AU PLUS PRÈS AUX ATTENTES DE SES CLIENTS. RETOUR EN IMAGE SUR L' UNE DES RÉCENTES RÉALISATIONS DU GROUPE, LA CONSTRUCTION DU PONT MIXTE DE DIMBALA, EN GUINÉE ÉQUATORIALE SOUS LA DIRECTION DU RESPONSABLE D'AGENCE SOGEA-SATOM, M. FRANK CASTELEYN.

Frank CASTELEYN

CONSTRUCTION DU PONT MIXTE DE DIMBALA

© Priscilla Wolmer

© Priscilla Wolmer © Priscilla Wolmer

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POUVOIR

MAURITANIE

QUE FERA MOHAMED OULD ABDEL AZIZ DE SA VICTOIRE ?

Il a gagné la présidentielle de juin 2014 et son parti – l’UPR – est sorti vainqueur des législatives de novembre-décembre 2013. Mohamed Ould Abdel Aziz règne en maître absolu sur la Mauritanie. Saura-t-il profiter de ces réussites pour calmer les ardeurs d’une opposition radicale et pour relever les défis d’une pauvreté réellement ancrée ?

« UN PUTSCH ÉLECTORAL APPARENT », « UN BOURRAGE DES URNES », « UN SCORE DIGNE DES RÉGIMES TOTALITAIRES » : les réactions du (Forum National pour la Démocratie et l’Unité) FNDU, qui regroupe onze partis politiques de l’opposition dite « radicale », des organisations de la société civile et des personnalités indépendantes, à l’élection, le 21 juin 2014, du président Mohamed Ould Abdel Aziz, n’ont pas été tendres. Autre réaction du même registre, celle de l’ancien président Ely Ould Mohamed Vall, l’homme qui a géré la période de transition démocratique entre 2005 et 2007. Ce dernier a estimé, du fait de cette élection assimilée à une « mascarade », que « toutes les solutions sont ouvertes, le coup d’État, la rue ou un vide politique qui demain, ou après demain, peut être dangereux pour le pays ».

Des réactions qui n’ont strictement rien à voir avec celle du Département d’État américain qui a qualifié la présidentielle mauritanienne du 21 juin 2014 de « réussite ». Qui croire ? En fait, la situation est complexe en Mauritanie qui traverse une crise politique importante depuis l’avènement du président Ould Abdelaziz en 2008 à la faveur d’un coup d’État contre un président élu, Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdallahi. Certains estiment que cette crise est plus ancienne puisque le pays a connu depuis son accession à l’indépendance, en 1960, quatre putschs (1978, 1984, 2005 et 2008).

« DES BÂTONS DANS LES ROUES » En fait, une partie de l’opposition dite « radicale », formée au départ autour de la (Coordination de l’Opposition Démocratique) COD, a toujours refusé de dialoguer avec le président Mohamed Ould Abdel Aziz. Celle-ci, qui constitue l’ossature du FNDU, n’a cessé de mettre « des bâtons dans les roues », comme se plaignent des militants de l’UPR (Union Pour la République). En témoignent, selon eux, les tentatives de l’opposition dite « radicale » de ne pas tenir des élections afin de retarder ou encore d’« empêcher » une stabilisation de la vie politique en Mauritanie. L’opposition fait entendre un autre son de cloche en estimant que les conditions ne sont pas réunies pour que des élections vraiment

libres et démocratiques aient lieu dans le pays. D’où le retard observé en ce qui concerne les législatives et les municipales du 23 novembre et du 7 décembre 2013 qui devaient initialement se dérouler en 2010. Pour de nombreux observateurs, le président mauritanien a fini par les tenir à ces dates comprenant, au train où allaient les choses, qu’elles pourraient ne jamais avoir lieu. Le dialogue engagé avec la COD n’a jamais abouti et ce malgré son respect des exigences posées par cette Coordination, dont notamment la mise en place d’une CENI (Commission Électorale Nationale Indépendante).

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42%

© mmeida

DE LA POPULATION SOUS LE SEUIL DE PAUVRETÉ

L’élection présidentielle du 21 juin 2014 n’a été qu’un remake des législatives et des municipales de 2013 : l’opposition « radicale », constituée au sein du FNDU, aurait joué la montre en vue de ne pas permettre la tenue de l’élection. Une élection au boycott de laquelle elle avait appelé. Le boycott a vu, cette fois, la participation du parti islamiste « Tawassoul », qui a fait pourtant bande à part pour les législatives et les municipales en gagnant 16 sièges au parlement et en se plaçant derrière l’UPR (74 sur les 147).

Autre promesse faite par le président Mohamed Ould Abdel Aziz : « garantir les droits de tous les citoyens, leur égalité devant la loi et devant les services de l’État ». Des promesses qui, bien que revêtant de l’importance, ne semblent pas plus urgentes que d’autres. En effet, les Mauritaniens sont autant préoccupés par l’insécurité qui règne à leurs frontières, avec un Mali qui est un des fiefs du djihadisme, que par « la gabegie, les inégalités sociales, la réduction de la pauvreté et une meilleure redistribution de la richesse nationale ». Des aspects que le président mauritanien n’a pas éludé dans une déclaration faite au lendemain de son élection. D’autant plus que le pays, qui a été en 2013 le champion maghrébin de la croissance économique avec un taux de 6%, continue de présenter un retard notamment avec un IDH (Indice de Développement Humain) se situant parmi les plus faibles au monde (154ème rang sur 182 pays) et continue de voir 42% de sa population vivre sous le seuil de pauvreté.

Quelle que soit la réalité, le président devra désormais savoir gérer l’avenir d’autant plus que l’opposition radicale semble monter en épingle après un score (81%) jugé « à la Papa Doc » par l’ancien président Ely Ould Mohamed Vall.

Mohamed GONTARA

« UNITÉ

NATIONALE »

© magharebia M. Mohamed Ould Abdel Aziz, président de la République de la Mauritanie

Et, il est à se demander ce que le président Ould Abdelaziz devra faire de sa victoire. L’homme en est conscient puisqu’il a assuré vouloir agir en vue de réussir l’« unité nationale ». Il s’est en effet engagé « à être le président de tous les Mauritaniens ».

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INTERVIEW

ISLAM RADICAL

© farafinet

Autopsie du phénomène africain par Amzat Boukari Yabara

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Un maximum d’informations en un minimum de temps, tel est l’objectif du livre Mali qui doit être lu comme un ouvrage synthétique de référence. L’auteur traite de tous les aspects du pays aussi bien historiques, politiques que culturels. Dans le souci de comprendre les problématiques conflictuelles du Mali, 54 États et le spécialiste Amzat Boukari Yabara reviennent sur le chapitre du terrorisme et de la montée de l’islam radical en Afrique. Focus.

54 ÉTATS : Vous parlez de la ligue populaire et sociale de la tribu du grand Sahara créée par Kadhafi en 2006. Pensez-vous que c’est l'une des raisons de l’augmentation du terrorisme en Afrique ?

Amzat Boukari Yabara (A.B.Y.) : D’une certaine manière. La chute de Kadhafi, qui chapotait plusieurs mouvements rebelles au Sahel, a sans doute favorisé l’éclatement de plusieurs mouvements dont la direction a été laissée à des personnalités moins politiquement aguerries que Kadhafi, grande figure politique à la fois du monde arabe mais aussi du monde africain, qu’on le veuille ou non. Sa disparition a créé un vide pour eux, ce qui a accéléré et favorisé la dégradation de plusieurs situations.

54 ÉTATS : Pourquoi il y a eu une montée des groupes terroristes revendiquant la charia dans un pays africain qu’on pensait prêt au développement et surtout qui était un pays relativement stable en Afrique de l’ouest ?

© farafinet

A.B.Y. : Dans cette partie du Mali, déjà relativement délaissée par l’État malien, l’arrivée de plusieurs groupes étrangers a favorisé un endoctrinement de la population. Ce n’est pas nécessairement un endoctrinement par adhésion mais plutôt par insatisfaction ou par défi vis-à-vis de la politique de l’État malien. Ceci a cristallisé les anciennes conflictualités liées notamment à la rébellion touareg. Par ailleurs, les nombreux trafics anciennement ancrés et inhérents à cette partie du Sahel ainsi que la déstabilisation de la Lybie ont aussi contribué à la montée de cet islamisme radical.

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A.B.Y. : La « Talibanisation » renvoie à l’idée que le Mali deviendrait le nouveau terrain d’entraînement du djihadisme international. En effet, le Nord-Mali est un territoire extrêmement vaste, désertique, très peu peuplé ou sous peuplé, c’est le désert ! Il comporte néanmoins un certain nombre de richesses stratégiques. Le fait que le pays soit situé au cœur de l’Afrique et à proximité de l’Europe constitue un atout majeur. Donc cette zone devient réellement une base pour plusieurs groupes qui peuvent se délocaliser depuis la corne de l’Afrique vers le Nord-Mali. Cette question de la « talibanisation » est liée à l’éclatement de toute cette région, à la balkanisation du Mali et à l’apparition de différentes factions qui vont revendiquer des visions politiques et idéologiques de l’islam de plus en plus radicales. Il y a une concurrence, une rivalité perceptible derrière les différents mouvements qui opèrent dans cette région que ce soit le Mujao, Aqmi ou le MNLA.

54 ÉTATS : Où ces groupuscules implantés en Afrique prennent-ils leur argent ? Pensez-vous qu’ils seraient financés par d’autres pays arabes comme le Qatar par exemple ? A.B.Y. : Des groupuscules se procurent certainement de l’argent grâce aux rançons versées soit directement soit par des services occidentaux ou par l’intermédiaire d’états africains. Il y a également dans chacun de ces mouvements une petite partie des élites locales qui détenaient déjà un certain pouvoir financier et qui ont pu financer ces mouvements. Puis, des fonds sont injectés, en provenance des pays du Golfe, comme le Qatar, dans la formation idéologique des imams par exemple. Enfin, il y a bien évidemment l’argent lié aux butins de guerre. Le Sahel, perçu comme pauvre, est en réalité, une zone commerciale caractérisée par de multiples trafics : drogue, armes, stupéfiants en provenance d’Amérique du sud et à destination de l’Europe qui transitent dans cette région-là. Des trafics de cigarettes qui sont également très anciens, des trafics humains… Concernant les liens directs avec les pays arabes, je ne pense pas qu’ils existent. En revanche, les pays comme le Qatar ont des intérêts stratégiques au Sahel, que ce soit des intérêts liés aux questions de terre, aux ressources stratégiques ou à la diffusion d’un certain islam. Donc, ils sont très présents dans les structures qui se mettent en place dans cette région. Je ne pense pas qu’ils soient réellement en train de tout « téléguider ». C’est un peu plus compliqué car il y a un certain nombre d’intérêts convergents et aussi divergents dans cette région.

© acheemete

54 ÉTATS : Vous avez parlé du Nord-Mali comme d’un « nouvel Afghanistan en puissance » et vous avez aussi employé le mot « talibanisation » dans votre livre. Pourquoi utilisez-vous ces deux qualifications ?

54 ÉTATS : En ce qui concerne les groupuscules islamiques qui sont en Afrique, pensez-vous qu’il y ait une mutation ? Les revendications ont-elles changé ? A.B.Y. : Les mouvements se sont à chaque fois reconvertis et recyclés en fonction des situations stratégiques. Aqmi par exemple, est un héritage du djihadisme algérien. Il est composé principalement d’Algériens qui ont ensuite eu le soutien des anciens combattants de la guerre d’Afghanistan, des anciens rebelles libyens, touaregs etc. Au fur et à mesure de l’évolution des situations, les groupes se régénèrent car ce ne sont plus nécessairement les mêmes types de situation auxquels ils doivent faire face et ce ne sont plus non plus les mêmes objectifs. Il y a une internationalisation de tous ces mouvements. On peut voir une vaste zone de déstabilisation qui va globalement du Sahara occidental jusqu’à la corne de l’Afrique. Cette zone rejoint bien évidement la partie moyen-oriental de la Syrie et de l’Irak. Toute la région du Sahel est en train de se mailler de groupes islamistes qui ont tendance non pas à se répondre les uns aux autres à travers des opérations, des attaques ou des déclarations publiques mais à faire une sorte d’échange de formations. Par exemple, des combattants de Boko Haram ont été formés au Nord-Mali dans les combats avec Aqmi. Le Mujao peut pivoter avec d’autres mouvements qui opèrent dans le Sahel. Ces groupes n’ont pas nécessairement la même visibilité auprès des médias. On sent que tout cela est en train de se mailler d’une manière inquiétante.

CE QUI IMPORTE C’EST DE GAGNER LA PAIX. 54 ÉTATS : Vous avez parlé dans votre livre d’une guerre ingagnable et d’une occasion d’offrir un terrain d’affrontement central aux terroristes contre les occidentaux. Mais que voulez-vous dire par là ?

© sybarts

A.B.Y. : C’est une guerre ingagnable car ce qui compte dans une guerre ce n’est pas, comme on l’entend naïvement, de gagner la guerre. Et gagner la paix me paraît difficile dans les conditions actuelles. Il faut qu’il y ait réellement une politique et une vision à longue durée, à moyenne durée et à courte durée. Il faut qu’il y ait des échelons concernant la résolution de toute la crise au Nord-Mali et cela passe par une remise en cause totale des structures et des fondements même de l’État malien. On voit avec le nouveau gouvernement que ce n’est pas cette optique-là qui est choisie. La présence de tous ces groupes dans le Nord-Mali est un appel à la remilitarisation de cet espace par l’État malien mais également par les Institutions internationales qui soutiennent l’état malien. Actuellement on ne peut absolument pas déboucher sur une résolution qui permettrait de gagner la paix. Julia Buquet

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CENTRAFRIQUE

POUVOIR

© Kalyan3

TABLE RONDE SUR LA CRISE CENTRAFRICAINE

ATTAQUES INTERETHNIQUES, CONFRONTATIONS RELIGIEUSES, EXACTIONS VISANT LES CIVILS… BREF, LA CRISE EN CENTRAFRIQUE NE SEMBLE PAS EMPRUNTER LA VOIE DE L’APAISEMENT. C’EST DANS UNE VOLONTÉ DE COMPRENDRE LES FAITS ET LE RESSENTI SUR PLACE QUE 54 ÉTATS A PENSÉ SON ANALYSE. UNE RENCONTRE AVEC L’IMAM YOUNGRO DE CENTRAFRIQUE, L’IMAM CHALGHOUMI DE DRANCY ET ATAHIRO BALADODO, LE MAIRE DU 3e ARRONDISSEMENT DE BANGUI, OFFRE L’OCCASION D’ÉCLAIRCIR CETTE SITUATION. ENQUÊTE.

Depuis l’indépendance du pays en 1958, la Centrafrique enchaîne les coups d’État. Ne parvenant pas à asseoir leur pouvoir ni même à enrailler l’insécurité constante, les chefs d’État sont destitués tour à tour. L’instabilité politique s’enracine. Preuve en est, l’armée française est implantée dans le pays depuis 2002.

L’EFFET BOZIZÉ Bozizé a réussi à se maintenir au pouvoir 10 ans manu militari. Mais son incapacité à redresser le pays et sa réélection, le 23 janvier 2012, ont nourri une vive contestation. Une association de cinq groupes rebelles se sont unis autour d’une volonté commune : faire tomber Bozizé. Créée le 12 décembre 2012, la Séléka est un « mouvement politico-militaire », précise l’imam Youngro. Mais ce groupe d’opposition devient de plus en plus virulent et prend le contrôle de plusieurs villes. Malgré les accords de paix, comme ceux signés à Libreville, en janvier 2013, les tensions entre la Séléka et le gouvernement s’amplifient. Le 24 mars 2013, les rebelles de la Séléka prennent le contrôle de Bangui, la capitale. Le président Bozizé est contraint de se réfugier au Cameroun. Le pays assiste à un énième coup d’état. Michel Djotodia prend ainsi le pouvoir, dans le but de ramener la sécurité dans le pays. À la suite de quoi la Séléka est dissoute en septembre 2013 mais continue de mener des exactions dans le pays. De plus, le nouveau chef d’État n’a aucune autorité sur ces ex-Séléka, groupe à majorité musulmane ayant dans ses rangs des mercenaires qui répandent la terreur. À la suite de quoi la Séléka est dissoute en septembre 2013 mais continue de mener des exactions dans le pays. De plus, le nouveau chef d’État n’a aucune autorité sur ces ex-Séléka, groupe à majorité musulmane ayant dans ses rangs des mercenaires qui répandent la terreur.

© Julia Buquet

« Beaucoup de gens disent que c’est un conflit religieux, moi je dis que c’est un groupe de bandits qui attaquent les musulmans. »

IMAM DE DRANCY HASSEN CHALGHOUMI

MAIRE DU 3e ARR. DE BANGUI IMAM DE BANGUI ABAKAR YOUNGRO ATAHIRO BALADODO

LES ÉVÉNEMENTS SE PRÉCIPITENT ET LE CONFLIT CHANGE DE FACE Le 5 décembre 2013, la capitale est attaquée par les anti-balaka, milices d’autodéfense chrétiennes formées par Bozizé du temps de son pouvoir. L’imam Youngro déclare que « La situation a dégénéré et les musulmans civils sont devenus la cible des anti-balaka. Ce sont des groupes de bandits, des criminels qui s’attaquent aux musulmans sur l’ensemble du territoire centrafricain. Ils ont commencé à exercer des sévices, à détruire des mosquées de la frontière du Cameroun jusqu’au niveau de Bangui. Actuellement, 417 mosquées ont été détruites et il n’en reste plus que 5. » Les anti-balaka s’en prendraient aux civils musulmans pour se venger des Séléka. Le maire du 3e arrondissement dénonce ces milices chrétiennes. Selon lui « ce sont les gens de Bozizé [les anti-balaka] qui sont à l’origine de tous ces problèmes. Ils veulent prendre leur revanche sur la Séléka, à 80% musulmans. Mais quand Bozizé a démissionné, la Séléka est partie. Alors les anti-balaka se sont mis à tuer les musulmans.»

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MAIS OÙ EST LA COMMUNAUTÉ INTERNATIONALE ? La République centrafricaine ne semblait pas être la priorité de l’agenda international. L’aide internationale a traîné et reste encore aujourd’hui limitée. La crise dans le pays tarde à être enraillée. Pire, ce conflit politique semble s’être transformé en conflit religieux à en croire la presse internationale. On entend parler d’attaques entre musulmans et chrétiens dont les populations sont la première cible. L’imam Youngro parle même d’une « épuration ethnique. » Mais le maire de Bangui se confie : « Beaucoup de gens disent que c’est un conflit religieux, moi je dis que c’est un groupe de bandits qui attaquent les musulmans. Par exemple, chez moi dans mon arrondissement les chrétiens et les musulmans cohabitent. » De retour de Rome après un entretien avec le pape François 1er, le maire et l’imam de Bangui ont échangé sur la situation en Centrafrique. Preuve d’un possible dialogue entre les confessions. Le 5 décembre aura fait 138 morts et c’est aussi ce jour-là que la résolution de l’ONU autorisant le déploiement de la Mission internationale de soutien à la Centrafrique sous l’égide africaine de la Misca est prise pour une période d’un an. Le lendemain, l’opération militaire française Sangaris est lancée dans le but de ramener la sécurité en Centrafrique. Sur place, la population semble ne plus faire confiance aux Français. La mission Sangaris est perçue d’un mauvais œil par le maire de Bangui. « Pour la sécurité il y a la Misca et Sangaris. Mais Sangaris ce sont des français, nous n’avons pas confiance. Au sein de la Misca, seuls les Burundais nous inspirent confiance car ils font leur travail normalement. Par exemple, s’il y a une attaque, on les appelle et ils viennent nous défendre. Ils sont basés dans le 3e arrondissement. Mais en ce qui concerne le reste des hommes de la Misca et surtout ceux de Sangaris, avant d’avoir l’ordre de leur chef pour quitter leur base et venir, tout est fini. Alors maintenant, on ne les prévient même plus. » Les musulmans ont le sentiment d’être des laissés pour compte dans ce conflit.

UNE CRISE HUMANITAIRE QUI N’ARRANGE PAS LA SITUATION En parallèle, la crise humanitaire, déjà réelle avant le début des conflits, ne cesse de s’intensifier. Les organisations humanitaires internationales sont sur place. Or, les centres médicaux sont abandonnés car inaccessibles. Il y a une pénurie de médicaments. Les ravitaillements de nourriture sont assez rares aussi. « Ils n’ont ni accès à l’hôpital, ni accès à l’éducation, ni accès à l’enterrement des corps, ni même la possibilité d’aller acheter de la nourriture. Depuis plus de sept mois, ils sont dans une prison à ciel ouvert. Dès que quelqu’un sort il est décapité, mutilé. » décrit l’imam Youngro. Ces conflits ont eu pour conséquence le déplacement de la population. Des milliers de déplacés auraient pris la fuite vers le Tchad, le Cameroun et d’autres pays voisins. « Au niveau de Bangui, sur les huit arrondissements existants, le 3e arrondissement est devenu le dernier bastion des musulmans. Ils s’y sont tous regroupés. » Le maire du 3e arrondissement explique ce qu’ils vivent. « Notre problème c’est les moyens, nous n’avons pas de nourriture. Il y a des ONG qui s’occupent de cela mais depuis le début du conflit, on nous a rarement ravitaillés.»

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VERS UNE FIN DU CONFLIT ? Pour l’avenir le maire nous livre sa solution. « Pour que la situation se calme il faudrait arrêter tous les criminels. Il y a des responsables. Je peux vous citer par exemple, Bozizé, Kokaté, Bokassa, Bendounga... Mais l’important c’est Bozizé. Il faut parvenir à le bloquer pour que les criminels partent de Bangui. » Pour l’instant le dialogue ne semble pas la meilleure solution, tant que les deux parties ne le souhaiteront pas à l’unisson. Le maire pense qu’avant de dialoguer, il faudrait une réconciliation. L’imam Youngro renforce l’idée d’un difficile dialogue entre les communautés religieuses qui ne tiennent pas les mêmes discours au même moment. « Le problème c’est le langage. Parfois, il y a des discours ambivalents. Si une partie cherche à retrouver un climat apaisé pendant que l’autre s’attache à une vision sectorielle, on n’y arrivera pas. Nous sommes une minorité musulmane, désireuse de montrer à nos agresseurs qu’on ne cherche pas le conflit. Le climat doit changer. Les chefs des différentes confessions doivent être de bonne foi et agir en faveur de l’apaisement de cette situation. »

Ce 23 juillet des accords ont été signés pour engager non pas la paix encore trop lointaine mais du moins une cessation des hostilités. Dans cette optique, les anti-balaka sembleraient être en plein désarmement. Une volonté s’inscrivant sur le long terme ? Pour l’heure, des manifestations ont eu lieu, prônant une partition de la Centrafrique. Mais selon l’ancien ministre du Sénégal chargé des questions et des affaires africaines, Falilou Diallo, cela ne semble pas constituer la meilleure solution. La division du pays en deux ne résoudrait rien comme le démontre le cas du Soudan encore en enclin au conflit. Il faudrait un partage du pouvoir entre les confessions suggère-t-il. La parole et les décisions devraient être réparties de façon équitable pour un possible « vivre ensemble ».

UN RISQUE À PRENDRE EN COMPTE

© eu humanitarian aid and civil protection

Ce foyer de confrontations est à surveiller de près. En effet, comme l’explique l’imam Chalghoumi, « c’est une véritable aubaine pour les terroristes islamistes ». Ces derniers s’immiscent dans des conflits, initialement non religieux, et leur font prendre une ampleur démesurée. Aujourd’hui, ce n’est pas encore le cas pour la Centrafrique. Si le pouvoir en place, en coopération avec l’aide internationale, tarde à prendre des mesures appropriées, cette situation pourrait devenir le théâtre d’affrontements terroristes.

Julia BUQUET

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POUVOIR

ALLÔ DOCTEUR COMMENT VA L’AFRIQUE ?

Dr JEAN-JACQUES KONADJE

Photographie fournie par M. Jean-Jacques Konadje

Faisant sans doute partie des Ivoiriens les plus diplômés, Jean-Jacques Konadje est chercheur au Laboratoire (Équipe de recherche interdisciplinaire sur les aires culturelles) ERIAC et enseignant dans plusieurs universités françaises. Docteur en science politique, consultant en géopolitique et relations internationales, expert en maintien de la paix et spécialiste de la défense, de la sécurité et de la sociologie militaire… Ces titres constituent autant de preuves de son intérêt pour les problématiques africaines actuelles.

Alors que l’Afrique est en proie à des crises protéiformes, 54 États revient sur deux enjeux primordiaux pour ce continent : la défense et la sécurité. Jean-Jacques Konadje en apporte une analyse intéressante dans son dernier article publié dans la revue Géopolitique en ligne, Défense/Sécurité en Afrique : quel couple ? Focus.

Alors que le continent s’enfonce dans des conflits multiformes, Jean-Jacques Konadje oriente son article sur la défense et la sécurité, deux points majeurs. L’auteur résume les enjeux historiques qui ont amené l’Afrique à cette situation d’instabilité en termes de sécurité. « Si plusieurs causes sont avancées pour expliquer les conflits que connaissent bon nombre de pays africains, le développement de l’économie de guerre dans les zones en proie à des conflits armés, nous permet d’affirmer, sans ambages, que la conquête du pouvoir et/ou la lutte pour le contrôle des ressources naturelles, demeurent les principales motivations des guerres civiles en Afrique. »

LA PAIX À VISER Face à ce fléau qu’est la guerre, Konadje insiste sur l’importance donnée à la recherche de la paix sur le continent africain. Il déclare que « Non seulement, elle abrite le plus grand nombre d’opérations de maintien de la paix (OMP), mais aussi et surtout, elle totalise à elle seule, le plus de résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies sur les questions de paix et de sécurité internationales. » Afin de définir les enjeux et les objectifs à viser pour réinstaurer ce climat de paix sur le continent africain, l’auteur structure son article autour de la question « Quel type de sécurité conviendrait-il le mieux aux peuples africains ? Les outils de défense des pays africains sont-ils adaptés aux réalités auxquelles le continent est confronté ? »

LE POUVOIR DE L’INFORMATION ET LA CYBERSÉCURITÉ

LA MONDIALISATION DES MENACES

On l’a vu avec le conflit malien, l’information a été une arme contre l’occident. En diffusant des vidéos et en relayant des messages choquants, les terroristes ont réussi à installer une psychose en Europe. Les conflits deviennent protéiformes, ils ne se limitent plus à des combats directs. L’auteur soulève ce point dans son explication et parle de cybersécurité pour contrer ces menaces. Ce sont des « nouveaux rapports de force internationaux ». Il affirme que « aucun pays, quel que soit sa puissance ou son niveau de développement n’est à l’abri d’une éventuelle guerre de l’information. »

Les conflits, à l’heure de la mondialisation, prennent une ampleur démesurée. Ils ne se cantonnent plus aux frontières. L’auteur le dit clairement « Avec la mondialisation des menaces, aucun pays n’est à l’abri d’une quelconque attaque encore moins de ses conséquences. » Cette idée, clairement confirmée avec le 11 septembre 2001 notamment, va de pair avec la frontière entre sécurité intérieure et extérieure rendue floue. Une crise qui touche une région ou une ville présente des risques non seulement pour la zone touchée mais aussi pour le pays, pour le continent et aussi pour le monde entier. Et l’auteur de citer à titre d’exemple « Le fait que le Nord du Mali devienne le théâtre de jeu des groupes terroristes, constitue une menace pour la paix et la sécurité internationales. »

Après une brève description de la mutation du contexte africain et des crises qui secouent de nombreux pays, plusieurs points intéressants entrant en compte dans les conflits sont soulevés. 32


L’ARMÉE À REPENSER Pour pouvoir se diriger vers la voie de la paix et pouvoir la garantir, les États africains doivent revoir la gestion de leurs outils de sécurité. Aujourd’hui, pour de nombreux pays africains, l’armée doit être réformée. Comme l’auteur l’explique, « Le détournement de la mission des armées africaines au profit des pouvoirs, a fait des outils africains de défense, une source d’insécurité et de violence politique. Il est plus qu’urgent de penser autrement la relation entre les États africains et leurs armées. » Et pour que l’armée devienne un vrai outil au service de la restauration de la paix et de la sécurité dans chaque pays, il faut qu’elle se sente plus concernée par les problèmes intérieurs et qu’elle se reconnaisse en sa patrie. Konadje pense notamment que « La composition des armées africaines doit, donc, être à l’image de la diversité ethnique de chaque pays et, surtout, symboliser l’unité nationale. »

REDÉFINITION DES CONCEPTS

© Mission de l'ONU au Mali

Pour réussir à insérer les pays africains dans la voie du changement en termes de défense et de sécurité, il faut repenser les structures à mettre en place. « L’évolution du contexte géopolitique mondial et africain suppose une redéfinition des concepts de sécurité et de défense afin qu’ils soient davantage adaptés aux réalités des pays africains. » Enfin, l’auteur résume les priorités sine qua non sur lesquelles chaque pays africain doit se concentrer. « L’Afrique doit, donc, s’outiller davantage afin de mieux faire face aux enjeux sécuritaires de la mondialisation. Si, pendant longtemps, les chefs d’États africains ont opté pour des politiques de défense et de sécurité leur permettant d’assurer la longévité de leurs régimes, le moment est venu de tourner la page à ces mécanismes qui exposent les populations africaines à l’insécurité chronique. » La défense et la sécurité sont des problématiques au centre des enjeux de restauration de la paix en Afrique. Pour tenter de progresser dans cette voie, des outils communs sont pensés avec l’Union africaine et ses outils comme l’Architecture africaine de paix et de sécurité (APAS) et le Conseil pour la paix et la sécurité (CPS) mais n’ont pas encore porté leurs fruits.

Julia BUQUET

© Magharebia Konadje

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POUVOIR

GUINÉE ÉQUATORIALE HÔTE DU 23e SOMMET DE L’UNION AFRICAINE

L’UNION AFRICAINE FAIT LA FORCE PAIX ET SÉCURITÉ : UNE VOLONTÉ AFRICAINE, CERTES, MAIS LOIN D’ÊTRE UNE RÉALITÉ ! LA GUINÉE ÉQUATORIALE A ÉTÉ CHOISIE COMME PAYS HÔTE POUR LE 23e SOMMET DE L’UNION AFRICAINE, LEQUEL S’EST ARTICULÉ AUTOUR DES THÈMES DE L’AGRICULTURE ET DE LA SÉCURITÉ ALIMENTAIRE. DANS CE CONTEXTE, S’EST TENUE LA COMMÉMORATION DU 10e ANNIVERSAIRE DU CONSEIL DE PAIX ET DE SÉCURITÉ DE L’UNION AFRICAINE. L’OCCASION DE RÉUNIR LES PAYS AFRICAINS AUTOUR DES THÈMES CRUCIAUX DE LA PAIX ET DE LA SÉCURITÉ EN AFRIQUE. PLUSIEURS CHEFS D’ÉTAT ET MINISTRES ONT PU S’EXPRIMER. TOUS ONT SOULEVÉ LES MÊMES DESIDERATA.

« Que la paix s’enracine profondément en Afrique » « Faire taire les armes d’ici 2020, voilà la priorité. » Dans le cadre de ce sommet sur l’agriculture et la sécurité alimentaire, la présidente de la commission de l’Union africaine (Ua), Nkosazana Dlamini-Zuma s’est exprimée. « Les conflits en Afrique n’ont diminué ni en nombre ni en intensité. Les crises du Darfour, du Soudan du Sud, de la Libye, du Mali, du Nigéria nous le rappellent. L’Afrique fait face depuis peu à un ennemi redoutable et sans visage : le terrorisme. Il faut que l’on s’adapte à ces nouveaux défis de sécurité multiformes. J’invite nos États à se donner les moyens d’y faire face » rappelle le président tchadien, Idriss Déby, lors de son allocution. Comprendre la crise des pays en proie au terrorisme. Voici le début du chemin pour éradiquer ce mal. Les événements dramatiques qui continuent de secouer le continent ont permis d’en prendre conscience et poussent à une meilleure compréhension de l’Afrique.

RESTER UNIS CONTRE L’ADVERSITÉ ! Les États africains ont exprimé leur volonté de prendre en main la sécurité du continent. Les pays membres de l’Ua ont déclaré à l’unisson vouloir tenir une place prépondérante dans la construction de la paix mondiale. Selon Jacob Zuma : « Face à la menace du terrorisme et des trafics illégaux, dont les États ont conscience, les pays africains doivent prendre leur responsabilité ». Ces derniers veulent assumer leur rôle dans un cadre individuel et régional.

© Julia Buquet. Mme Dlamini-Zuma, présidente de la Commission de l'Union africaine lors du 23e Sommet de l'Union africaine, Guinée équatoriale

« Il y a un appui de la part des partenaires occidentaux mais il ne faut pas se complaire dans cette situation » insiste le président du Tchad. Et de souligner l’importance de la « capacité de réponse immédiate aux crises pour favoriser la sécurité individuelle et collective. C’est une mutation nécessaire et indispensable. »

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DES SOLUTIONS EN LIGNE DE MIRE Les participants ont insisté sur le principe d’une responsabilité collective ainsi que sur la nécessité de concentrer les efforts sur la prévention des conflits en établissant une réelle capacité de réponse aux crises afin de pouvoir régler les conflits dans l’immédiat. L’Afrique du sud estime que « le conseil de sécurité doit jouer un rôle plus dynamique pour consolider la paix. Aujourd’hui plus que jamais nous pouvons tracer l’avenir de notre propre continent et jeter les bases de bonnes conditions de vie pour nos populations. »

DES OUTILS À DÉVELOPPER Point nodal de cette séance : le Conseil de paix et de sécurité (CPS), organe panafricain chargé de la prévention des conflits et du maintien de la paix. Rouage essentiel dans l’instauration de la paix en Afrique, le CPS a vu le jour en 2003. Le CPS est né d’une envie urgente de pacifier l’Afrique. Il est l’organe de l’architecture africaine en matière de paix et de sécurité. Cette année marque le 10e anniversaire du CPS, l’occasion de consolider ses efforts. Il a été posé l’idée d’un partenariat stratégique entre le CPS et le Conseil de paix des Nations unies de façon à mieux coordonner la communication internationale. L’Afrique a une responsabilité première pour le maintien de la paix mondiale. L’accent a été mis sur le devoir de parvenir à une paix durable notamment par l’éducation et l’opportunité économique.

© Ahmed Jadallah / Reuters. M. Mohamed Ould Abdel Aziz, président en exercice de l’Ua pour l’année 2014

© Julia Buquet. M. Jacob Zuma, président de l'Afrique du Sud

LE NERF DE LA GUERRE : LE FINANCEMENT Depuis qu’il existe, le CPS a permis d’atténuer un certain nombre de conflits sans néanmoins réussir à les éradiquer car les moyens lui font toujours défaut. Or, sans moyens à la hauteur des ambitions et attentes, aucune amélioration n’est envisageable. Ainsi, le besoin de financement a été réitéré. Il appartient au continent et à chaque pays de se doter de ressources financières. « La paix et la sécurité appellent des ressources financières conséquentes aussi bien au niveau continental qu’au niveau des États », a souligné le chef d’État mauritanien nouvellement réélu et président en exercice de l’Ua, Mohamed Ould Abdel Aziz. Bien que l’aide financière apportée par l’Occident soit appréciée, la nécessité d’acquérir et de jouir d’une indépendance véritable en matière de sécurité a été réaffirmée, comme l’a rappelé le président tchadien « Il faut qu’on assure nous-mêmes notre sécurité. C’est aussi ce que veulent nos collaborateurs ». Comme l’a déclaré le Commissaire en charge de la paix et la sécurité, l’Algérien Smaïl Chergui : « La flamme de la paix vient d’être allumée. Que la paix prévale sur l’ensemble de l’Afrique ».

Julia BUQUET

© Raymond Dakoua. 23e Sommet de l'Union africaine, Guinée équatoriale

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MONDE

NICOLAS SARKOZY Un retour en pointillé

« ON NE GAGNE JAMAIS À CALOMNIER »

© Swiss-image.ch. M. Nicolas Sarkozy, ex-président de la République Française

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IL N’A JAMAIS ÉTÉ AUSSI PROCHE D’UN RETOUR. ET POURTANT, SON NOM EST AU CŒUR DE PLUSIEURS AFFAIRES JUDICIAIRES. LE 1ER JUILLET DERNIER, NICOLAS SARKOZY EST MÊME ENTRÉ DANS LES ANNALES DE LA RÉPUBLIQUE À LA SUITE DE SON PLACEMENT EN GARDE À VUE. UNE PREMIÈRE POUR UN ANCIEN CHEF D’ÉTAT. PERSONNAGE CONTROVERSÉ, ADULÉ OU CRITIQUÉ Y COMPRIS AU SEIN-MÊME DE L’UMP, NICOLAS SARKOZY UNIT AUTANT QU’IL DIVISE. EN RETRAIT DEPUIS SA DÉFAITE À L’ÉLECTION PRÉSIDENTIELLE DE 2012, L’ANCIEN MAIRE DE NEUILLY-SUR-SEINE (92) A TOUJOURS PRIS SOIN D’ENTRETENIR LE DOUTE ET DE MAINTENIR SES FIDÈLES SUR LE CHAMP POLITIQUE. AU RISQUE D’EXASPÉRER CEUX QUI, À L’INSTAR DE FRANÇOIS FILLON OU D’ALAIN JUPPÉ, SE VERRAIENT BIEN CANDIDATS EN 2017. MAIS LES NUAGES MENAÇANTS INSTALLÉS AU-DESSUS DE LA TÊTE DE NICOLAS SARKOZY POURRAIENT BIEN ASSOMBRIR SON HORIZON. DE L’AFFAIRE BYGMALION À CELLE DES ÉCOUTES TÉLÉPHONIQUES EN PASSANT PAR LES SONDAGES DE L’ÉLYSÉE, PAS MOINS DE 7 PROCÉDURES JUDICIAIRES CONCERNENT, DE PRÈS OU DE LOIN, L’ANCIEN MINISTRE DE L’INTÉRIEUR.

SARKOZY PRIS DANS L’ÉTAU JUDICIAIRE 2007 une campagne au financement controversé Le 6 mai 2007, Nicolas Sarkozy est élu président de la République. Sa campagne, faite de meetings géants et réalisée à coup de communication débordante, ne tardera pas à entrer dans l’œil du cyclone. Un homme est en ligne de mire : Éric Woerth. Président de l’Association de financement pour la campagne de Nicolas Sarkozy, le maire de Chantilly (60) est également trésorier de l’UMP. C’est lui qui est en charge, en 2007, de récolter les donations destinées à financer une partie de la campagne du candidat. Nommé ministre du Budget dans le gouvernement Fillon, Éric Woerth prend en mars 2010 la relève de Xavier Darcos au ministère du Travail. Trois mois plus tard, l’affaire Woerth-Bettencourt éclate. Le journal en ligne Médiapart dévoile des enregistrements réalisés clandestinement au domicile de Liliane Bettencourt par Pascal Bonnefoy, le majordome de cette dernière. Très vite, de possibles conflits d’intérêts entre l’héritière de l’Oréal et Éric Woerth sont mis à jour. Le 10 juillet 2010, le parquet de Nanterre annonce que deux enquêtes préliminaires sont ouvertes pour « allégations de versement d’enveloppes d’argent à des hommes politiques » et pour « blanchiment de fraude fiscale ». Interrogée par la direction centrale de la Police judicaire, Claire Thibout, ancienne comptable des époux Bettencourt, affirme qu’elle a remis une somme en liquide à Patrice de Maistre pour Éric Woerth, trésorier de la campagne de Nicolas Sarkozy au moment des faits présumés. Une déclaration sur laquelle elle reviendra ensuite. L’affaire prend des proportions inattendues. La partie financière est délocalisée à Bordeaux. Les agendas de Nicolas Sarkozy sont saisis. Les enquêteurs s’interrogent maintenant sur deux retraits en espèces d’un montant avoisinant les 400 000 euros sur les comptes de Liliane Bettencourt réalisés quelques mois avant le début de la campagne présidentielle. Les juges, eux, en sont convaincus : « une partie de ces sommes était destinée in fine à Nicolas Sarkozy ».

Le 22 novembre 2012, Nicolas Sarkozy est convoqué par le juge Gentil, en charge de l’enquête, à Bordeaux. Il risque une mise en examen pour “recel d’abus de faiblesse.” Auditionné pendant douze heures, l’ancien ministre de l’Intérieur ressort du bureau du palais de justice sous le statut de témoin assisté. Il sera par la suite mis en examen. Le 28 juin 2013, Nicolas Sarkozy bénéficie finalement d’un non-lieu en l’absence présumée de charges. Une victoire que l’intéressé n’a pas tardé à commenter. Cette étape marque la fin de l’affaire Bettencourt pour Nicolas Sarkozy. Mais la campagne de 2007 ne tarde pas à refaire parler d’elle.

Kadhafi, l’homme aux 50 millions ?

« ON NE GAGNE JAMAIS À CALOMNIER. ON NE FAIT QU‘ABAISSER LA DÉMOCRATIE » DIXIT SARKOZY « AUX RESPONSABLES POLITIQUES QUI DURANT CES LONGS MOIS ONT UTILISÉ CETTE AFFAIRE ET PARTICIPÉ À CULTIVER LE SOUPÇON »

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«RECEL

D’ABUS DE FAIBLESSE »

Paul Bismuth mis sur écoute

© Nice Massena. M. Nicolas Sarkozy avec M. Mouammar Kadhafi

En avril 2013, le parquet de Paris ouvre une information judiciaire contre X. Les juges enquêtent sur un possible financement de la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy en 2007 par le guide libyen déchu, Mouammar Kadhafi. Seïf Al-Islam, l’un des fils de Kadhafi annonce publiquement que la campagne a bien été en partie financée par le régime libyen, à hauteur de 50 millions d’euros. Des déclarations que corroborent Ziad Takieddine, présenté comme l’intermédiaire entre la France et le régime de Tripoli. L’homme d’affaires libanais met également en cause Claude Guéant, alors directeur de cabinet du ministre de l’Intérieur pour son rôle présumé d’intermédiaire avec les Libyens. Brice Hortefeux, autre fidèle de Sarkozy, est également cité. Il aurait participé au montage financier des versements libyens. Nicolas Sarkozy et son avocat Thierry Herzog sont mis sur écoute. Très vite, les juges d’instruction font une découverte étonnante : l’ancien chef de l’État s’est équipé d’un second téléphone acheté sous le faux nom de Paul Bismuth, un ancien camarade de classe, pour échanger librement avec son avocat. Les enquêteurs ne sont qu’au début de leurs surprises. C’est la naissance d’une nouvelle affaire, dite des " écoutes téléphoniques ."

« UNE PARTIE DE

CES SOMMES ÉTAIT DESTINÉE IN FINE À NICOLAS SARKOZY »

Initialement destinée à récupérer des indiscrétions dans l’affaire Kadhafi, la mise sur écoute de Nicolas Sarkozy va révéler tout autre chose. Outre le fait que l’ancien chef d' État possède un second téléphone portable, les juges d’instruction découvrent en réalité que Nicolas Sarkozy s’inquiète bien plus de la saisie de ses agendas et de la suite de la procédure concernant l’affaire Bettencourt. Au fil de leurs investigations, les enquêteurs s’intéressent au profil d’un troisième acteur : Gilbert Azibert, avocat général près de la Cour de cassation de Paris. Les policiers le soupçonnent d’informer Nicolas Sarkozy sur le déroulé de plusieurs procédures judiciaires en l' échange d’un poste honorifique à Monaco. Un fait présumé qui viole le secret de l’instruction. C’est dans ce cadre que Nicolas Sarkozy a été placé en garde à vue le 1er juillet dernier, avant d’être mis en examen pour “trafic d’influence”, “corruption active” et “recel de violation du secret professionnel” par les deux juges d’instruction Claire Thépaut et Patricia Simon. L’instruction ne fait que commencer. Mais cet événement tombe au plus mal pour l’intéressé, alors que, dans le même temps, l’UMP est embourbée dans le scandale Bygmalion.

Bygmalion : l’UMP passe à la caisse Une bombe. En février dernier, le magazine Le Point accuse Jean-François Copé, président de l’UMP, d’avoir « sponsorisé avec de l’argent » du parti une agence de communication, appelée Bygmalion. Ces révélations marquent le début du délitement de l’UMP. Bygmalion, fondée en 2008 par Bastien Millot et Guy Alves, deux proches du maire de Meaux (77), a notamment organisé des meetings pour la campagne 2012 de Nicolas Sarkozy par le biais de sa filiale, Event & Cie. Celle-ci aurait surfacturé certaines prestations par le biais de conventions imaginaires. De janvier à juin 2012, l’UMP lui aurait ainsi versé plus de 12 millions d’euros. Le 26 mai, Maître Maisonneuve, avocat de Bygmalion, fait une déclaration fracassante. « Les fausses factures » ont été faites « à la demande de l’UMP » pour couvrir certaines dépenses de la campagne de Nicolas Sarkozy. Le jour-même, Jérome Lavrilleux, ancien directeur adjoint de la campagne du président-candidat, reconnaît les faits. Mais il assure que ni Jean-François Copé, ni Nicolas Sarkozy, n’étaient au courant de cette pratique. L’enquête, lancée par le Parquet de Paris, est chargée de faire la lumière sur ce dossier. Homme de réseau, Nicolas Sarkozy est apprécié des chefs d’entreprises et des hommes d’affaires. À commencer par Bernard Tapie, qui lui a déjà rendu visite de nombreuses fois à l’Élysée. 38


Tapie, un proche encombrant 403 millions après son litige sur la vente d’Adidas avec le Crédit lyonnais. Vieux de quinze années, le contentieux se règle grâce à un arbitrage de l’État. Mais les magistrats ne tardent pas à mettre leur nez dans cette affaire. Ils pointent le manque d’impartialité et soupçonnent plusieurs membres du gouvernement de l’époque d’avoir favorisé Bernard Tapie. Claude Guéant, alors secrétaire général de l’Élysée, et Christine Lagarde, ministre des Finances et désormais patronne du Fonds monétaire international (FMI), sont dans le collimateur. Bernard Tapie, après 96 heures de garde à vue, Stéphane Richard, directeur de cabinet de Mme Lagarde au moment des faits, et deux autres protagonistes de l’affaire sont mis en examen. Christine Lagarde est quant à elle placée sous le statut de témoin assisté après plusieurs jours d’audition. Le nom de Nicolas Sarkozy est également cité. Une question reste en suspens : a-t-il encouragé sa ministre de l’Économie à obtenir un arbitrage ?

« SPONSORISÉ AVEC DE

L’ARGENT »

Du favoritisme dans les sondages Fraîchement installée à l’Élysée, l’équipe de Nicolas Sarkozy commande une liste de sondages par le biais d’une convention à un cabinet d’études, Politifact, fondé par Patrick Buisson, devenu depuis conseiller du chef de l’État. Le tout sans appel d’offres. En juillet 2009, la Cour des comptes publie son rapport sur le budget de l’Élysée et ne tarde pas à mettre en lumière ce procédé irrégulier. Une association, appelée Anticor, porte plainte contre X pour “favoritisme”. Une requête que le parquet de Paris classera sans suite au motif de « l’irresponsabilité pénale du chef de l’État .» Mais alors que l’affaire semble se refermer, Raymond Avrillier, un militant écologiste, saisit le Conseil d’État. Il demande que lui soit remis le détail des sondages commandés entre 2007 et 2009. Son souhait est exaucé. La presse s’empare de l’affaire. Ainsi, l’Élysée a commandé près de 264 sondages en deux ans. C’est le moment choisi par Anticor pour revenir sur le devant de la scène. L’association porte plainte pour “délit de favoritisme”, “recel et complicité de délit de favoritisme”, “détournements de fonds publics”, “recel et complicité de détournements de fonds publics”. En décembre 2012, la Cour de cassation autorise la justice à enquêter sur un contrat passé avec Politifact. L’année suivante, le juge Tournaire se penche sur l’ensemble des sondages réalisés entre 2007 et 2012. Le domicile de Patrick Buisson est perquisitionné. S’il n’a pas été inquiété jusqu’ici, Nicolas Sarkozy est indirectement dans le collimateur de la justice. Une position semblable à celle qu’il occupe dans le volet Karachi.

Photographie fournie par les Éditions du Seuil

La victoire de sa vie. En 2008, Bernard Tapie récupère

L’interview accordée par Seïf el-Islam Kadhafi, le 16 mars 2011, à la chaîne Euronews, a révélé : « Il faut que Sarkozy rende l’argent qu’il a accepté de la Libye pour financer sa campagne, et nous en avons la preuve. Nous sommes prêt à tout révéler. La première chose que l’on demande à ce clown, c’est de rendre l’argent au peuple libyen. Nous lui avons accordé une aide afin qu’il oeuvre pour le peuple libyen, mais il nous a déçus. Rendez-nous notre argent. Nous avons tous les détails, les comptes bancaires, les documents et les opérations de transfert. Nous révélerons tout prochainement.»

Karachi, la mauvaise affaire Le 8 mai 2002, un kamikaze tue quinze personnes, dont onze Français, à Karachi, la capitale économique du Pakistan. Les victimes françaises sont toutes ingénieurs à la Direction des constructions navales, devenue depuis la DCNS. Ils planchaient sur la construction de trois sous-marins vendus par la France au gouvernement d’Islamabad dans le cadre d’un contrat d’armement signé entre les deux pays en 1994. La piste s’oriente rapidement vers un attentat perpétré par une organisation islamiste. Mais en 2008, des perquisitions au siège de la DNCS laissent apparaître le versement de commissions à des intermédiaires dans le cadre de l’opération. Des commissions qui ne seront jamais versées suite au refus de Jacques Chirac lorsque celui-ci accède au pouvoir en 1995. Au fil de leur investigation, les enquêteurs soupçonnent également la mise en place de rétrocommissions présumées d’un montant de 10 millions de francs. Édouard Balladur, premier ministre au moment de la signature du contrat d’armement, est ciblé. C’est lui qui a donné son accord pour la vente. Dès lors, s’est-il servi de ces rétrocommissions présumées pour financer sa campagne de 1995, où des fonds suspects ont été détectés ? C’est à ce moment-là qu’apparaît le nom de Nicolas Sarkozy. L’ancien chef de l’État est à l’époque porte-parole de la campagne de Balladur et ministre du Budget. A-t-il eu connaissance du procédé ? Renaud Van Ruymbeke, juge au Pôle financier du tribunal de grande instance de Paris, est en charge de répondre à ces questions. Mis en examen le 2 juillet en compagnie de son avocat Thierry Herzog et de Gilbert Azibert, Nicolas Sarkozy s’est exprimé le jour même à la radio et à la télévision.

A-t-il fait le bon choix ?

Alexandre BLOT LUCA

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RETOUR DE SARKOZY « Une stratégie risquée »

© Christine Lagarde

« Il avait deux options, notamment de garder le silence, (...) répond JeanLuc Mano, expert en communication politique et fondateur de l’agence Only conseil. Mais la charge judiciaire était trop forte. Il était assez logique de venir devant le public. Il confie sa défense non plus à des avocats mais à l’opinion sur le point politique .»

Offensif comme à son habitude, l’ancien chef de l’État a fait du manque d’impartialité des deux juges d’instruction, Claire Thépaut et Patricia Simon, son principal argument dans l’affaire dite des « écoutes ». Au risque de lasser une partie des Français. Une stratégie qui pourrait entériner ses chances d’élection à la présidentielle si d’aventure il se présentait. Mais la route est encore longue jusqu’en 2017. L’élection en octobre prochain d’un nouveau président à l’UMP suite à la démission de Jean-François Copé et les critiques dont Nicolas Sarkozy fait désormais l’objet au sein de son propre camp ont semble-t-il modifié sa feuille de route. « L’objectif prioritaire de Nicolas Sarkozy n’est pas de conquérir la majorité des Français mais de conforter son socle à l’UMP, (...) [poursuit celui qui a notamment été en charge de la communication de Nathalie Kosciuzko-Morizet pendant les dernières municipales de 2013.] Son plan était de se déclarer à la fin 2015. Mais l’implosion du parti et la crainte d’une UMP qui se structure contre lui l’ont poussé à ce changement d’attitude. Il ne peut pas laisser faire .» Malgré ses démêlés judiciaires, l’ancien maire de Neuilly-sur-Seine (92) s’apprêterait donc à faire son grand retour, plus tôt que prévu. « Une stratégie risquée » pour Jean-Luc Mano : « S’il avait une position de “recours“, Nicolas Sarkozy aura maintenant un rôle d’opposant. Il sera davantage sous le feu des critiques et devra faire des propositions ». LA MINUTE JURIDIQUE DE MAÎTRE MÉLIODON Titulaire d’un DEA de Droit et d’un DESS de Droit public, Régis Méliodon a débuté sa carrière chez maître Jean-Yves Liénard. Il est aujourd’hui avocat en droit pénal au barreau de Paris et a fondé son propre cabinet, RM Avocat. 54 ÉTATS : Sarkozy a été mis en examen pour «corruption active», «trafic d’influence» et «recel de violation du secret professionnel». Combien de temps va encore durer la procédure ? Régis Méliodon (R. M.) : Elle peut prendre des années. L’instruction est ouverte et l’enquête va continuer. Les juges vont instruire soit à charge soit à décharge. Nicolas Sarkozy va être de nouveau entendu. Les avocats des différentes parties disposent également de tout un arsenal juridique. En-

SON PLAN ÉTA IT DE SE DÉCLAR ER À LA FIN 2015 NICOLAS SARKOZY PEUT PARFAITEMENT BRIGUER UN MANDAT

suite, les juges d’instruction transmettent le dossier au procureur de la République en vertu de l’article 175 de la procédure pénale. Une ordonnance de renvoi devant le tribunal peut également être prononcée en vertu de l’article 179 du code de procédure pénale. 54 ÉTATS : Un renvoi de Nicolas Sarkozy devant le tribunal correctionnel l’empêcherait-il de briguer un mandat politique ? R. M. : Absolument pas. Il peut parfaitement briguer un mandat et occuper une fonction politique. Après, cela regarde uniquement Nicolas Sarkozy et son amour propre. À moins que le tribunal correctionnel décide de le sanctionner d’une peine d’inégibilité, ce qu’il est en droit de faire. 54 ÉTATS : S’il est condamné, Nicolas Sarkozy risque-t-il d’aller en prison ? R. M. : Il n’ira vraisemblablement jamais en prison. Les peines de prison ferme peuvent être aménageables. Dans ce type d’affaire, la jurisprudence fait plutôt état de peines de sursis avec une amende. Tout en ayant la possibilité d’y associer une condition d’inégibilité pour les hommes politiques.

Alexandre BLOT LUCA

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PORTRAIT DAI ZHIKANG «LA VIE EST UNE CHANCE D'OSER»

Dai Zhikang n’est pas né avec une cuillère en argent dans la bouche. À l’époque, alors étudiant en Finance, c’est à peine s’il avait de quoi survivre. Les frais engendrés par ses parents pour lui permettre la poursuite de ses études lui ont donné l’envie d’aller plus haut. Après l’obtention de son diplôme, Dai Zhikang aurait pu choisir de devenir fonctionnaire mais ses ambitions, son sens du devoir et de l’honnêteté l’on poussé à l’entreprenariat. Un choix motivé d’une part par l’envie de rembourser les prêts bancaires familiaux et d’autre part, par « the opening-up period », sorte de transition du système communiste chinois vers le système capitaliste.

« IL EST TEMPS POUR LA CHINE DE FOULER LE SOL AFRICAIN »

Photographie provenant du site mediterraneanews.com

Alors, le jeune homme plein d’espoir arrive à Shangaï avec pour premier emploi, un poste de banquier. Puis, sans regret, il quitte le monde de la banque pour intégrer le secteur immobilier. 20 ans plus tard, Dai Zhikang n’est plus à présenter. L’homme a fait ses preuves et est connu des plus grands.

Photographie provenant du site misa.com.vn

Dai Zhikang, 50 ans, homme d’affaires chinois puissant et président de Zendai Group. Rien ne prédestinait cet entrepreneur au visage aussi pure que l'âme à devenir aussi puissant dans le secteur immobilier chinois. Ses parents étaient des agriculteurs, exerçant dans la province de Jiangsu, au Sud-Est de la Chine. Au sein d’une famille de six enfants, c’est sur lui qu’ils ont misé pour la poursuite des études. Aujourd’hui, les preuves sont là : Dai Zhikang est la 336e fortune mondiale. Portrait.

Le 20 mars 2014, le groupe sud-africain African Explosives and Industries (AECI) a finalisé la cession de 1600 hectares situés à Modderfontein, dans la banlieue Est de Johannesburg, au conglomérat chinois qu’il dirige, Shanghaï Zendai. Un conglomérat qui projette de construire un méga-projet immobilier dans cette zone. AECI a précisé avoir reçu 1 milliard de rands (91,3 millions de dollars) de la part du groupe chinois, indiquant qu’aucune condition suspensive ne pèse désormais sur la transaction. Le milliardaire est à l’aise avec le risque, en raison de la force du marché et surtout, parce qu’il n’est pas homme à agir sous la contrainte. Tout ce qu’il fait, c’est avec raison, certes, mais surtout avec le cœur.

Shanghaï Zendai avait annoncé en novembre 2013 qu’il comptait transformer Modderfontein en un «New York africain» pour un investissement de 80 milliards de rands (7,8 milliards de dollars) sur 15 ans et de surenchérir « il est temps pour la Chine de fouler le sol africain.» Le groupe projette notamment de construire dans la banlieue de Johannesburg un centre financier de classe internationale, 35 000 logements, un grand stade sportif, un complexe éducatif et un important centre commercial. Selon ses promoteurs, ce projet permettra aussi aux entreprises chinoises de disposer d’une base industrielle et logistique pour leur expansion panafricaine. Shanghaï Zendai prévoit qu’environ 100 000 personnes pourraient habiter dans ce nouveau complexe immobilier et que 100 000 pourraient également y travailler. Shanghaï Zendai est un conglomérat privé coté à Hong Kong actif dans le capital-investissement, la gestion d’actifs et l’immobilier. En 1927, George Clemenceau, dans son œuvre, Au soir de la pensée, l’avait écrit : « la vie est une chance d’oser.»

Jessica COHEN 42


PROFILE Photographie et légende provenant du site garethsfirstlaw.com

DAI ZHIKANG

The latest development of a university called the University of Africa to come out of the Modderfontein project by property developer Shanghai Zendai

“LIFE GIVES US AN OPPORTUNITY TO DARE” DAI ZHIKANG IS A POWERFUL CHINESE BUSINESSMAN SERVING AS PRESIDENT OF ZENDAI GROUP. NOTHING PREDESTINED THIS 50-YEAR-OLD ENTREPRENEUR TO BECOME A KEY FIGURE IN THE CHINESE REAL ESTATE SECTOR. HIS PARENTS, WHO SETTLED IN THE PROVINCE OF JIANGSU (SOUTHEASTERN CHINA), WERE FARMERS. COMING FROM A FAMILY OF SIX CHILDREN, AS A VERY BRIGHT CHILD, HE IS THE ONE HIS PARENTS DECIDED TO HELP GRANTING HIM ACCESS TO POSTSECONDARY EDUCATION. TODAY, RESULTS ARE SELF-EVIDENT: DAI ZHIKANG RANKS AS THE 336TH AMONG THE RICHEST MEN IN THE WORLD. PROFILE.

Agreements were signed between companies, largely construction firms, which have partnered in the development of Modderfontein. The companies include China Exim Bank, Longxin Group, PCCW

Photographie et légende provenant du site garethsfirstlaw.com

Dai Zhikang was not born with a silver spoon in his mouth. When he was a student in Finance, he was barely surviving. The costs his parents incurred to allow him to study gave him the desire to excel. After graduation, Dai Zhikang might have chosen to become a public servant but his personal ambitions, his sense of duty and honesty have led him to entrepreneurship. This choice was motivated, on the one hand, by the desire to repay the loans taken out by his family, and on the other hand, by “the opening-up period”: a kind of transition from the Chinese communist system to the capitalist one. Then, the young man full of hope arrived in Shanghai to get his first job as banker. Without regret, he decided to leave the world of banking to integrate the real estate sector. An opportunity to dare ! This man of action and conviction came up with the idea to move things along. Twenty years later, Dai Zhikang has become a key figure of the real estate sector. The man has won his spurs and enjoys a well-deserved reputation.

©P risc illa

Wo lme r

On March 20th 2014, the African Explosives and Industries (AECI) South African group completed the sale of 1,600 hectares located in Modderfontein (the eastern suburb of Johannesburg) to Shanghai Zendai, the Chinese conglomerate he heads. A conglomerate that plans to build a mega real estate project in this area. AECI asserts it has received 1 billion rand ($ 91.3 million) from the Chinese group, indicating that there is no condition precedent relating to the transaction. The billionnaire feels comfortable with risk due to the strength of the market and especially because he is not a man who acts under coercion. His decisions are taken logically, but above all, heartily. Shanghai Zendai announced in November 2013 that it planned to turn Modderfontein into an African “New York” in consideration of an investment of 80 billion rand ($ 7.8 billion) over the next 15 years and stated “it is high time for China to set foot in Africa”. In particular, the group considers building in the suburb of Johannesburg a world-class financial center, 35,000 dwelling units, a huge sport stadium, an educational complex and an important commercial center. According to its proponents, this project will also allow Chinese companies to have an industrial and logistical base for their pan-African expansion. According to Shanghai Zendai, 100,000 people might have the possibility to live in this new building complex and 100,000 people might have the possibility to work in this place. Shanghai Zendai is a Hong Kong-listed conglomerate, quite active in private equity, in asset management and in real estate. In 1927, George Clemenceau, in his work, Au soir de la pensée, recalled that life gives us an opportunity to dare. For sure, as a self-made man, Dai Zhikang will not contradict him.

Jessica COHEN 43


MONDE

KAZAKHSTAN INSIDE ! HORIZON 2050 Pour ceux qui pensent que Kazakh rime avec « Borat », que nenni ! Le Kazakhstan, avec ses 60% de musulmans sunnites, est tout sauf un État pauvre, de terroristes, à la croissance en berne. En 2050, ce pays d’Asie centrale pourrait bien devenir un petit « Dubaï » et cela, grâce à la vision d’un homme, Noursoultan Nazarbaïev, président du Kazakhstan depuis 1991, date de l’indépendance de la nation. Analyse.

FOCUS

Le 17 janvier 2014, le président Nazarbaïev revient, lors de son discours annuel de la nation, sur les objectifs de sa stratégie « Kazakhstan-2050 », établie depuis 1 an.

"HORIZON 2050" Jusqu’à 2020 : les efforts seront concentrés sur les processus d’industrialisation et de modernisation pour établir une forte industrie de transformation. 2030 à 2050

“ La Stratégie «Kazakhstan-2050», couvrant tous les domaines, est une voie vers la croissance continue assurée”, ce sont les mots du président kazakhstanais. Politique intérieure et extérieure, économie, société, industrialisation, environnement : tout passe au crible de ce plan de développement. Avec ces objectifs, le président souhaite moderniser le pays dans un but précis : faire partie en 2050 des 30 pays les plus développés du monde !

: Développement durable, économie de pointe, service d’ingénierie de qualité et transition vers la production de haute transformation : voici la recette magique pour devenir l' un des pays les plus développés.

10 objectifs

: le président charge des institutions compétentes de régler un certain nombre de problèmes et de mettre en place des projets de lois à court terme permettant ces développements dans tous les domaines. Cette stratégie 2050 s’appuie sur des principes :

pragmatisme

transparence

prospérité

soutien national

Ce discours a permis aussi au président de revenir sur la création de l’Acte Patriotique “Pays éternel”, qui définira les valeurs de la société kazakhstanaise. Jusqu’à 2050, 7 quinquennats sont prévus pour atteindre chacun des objectifs.

UN ÉTAT MODERNE Premier objectif défendu par Noursoultan Nazarbaïev lors de son discours.

R

endre plus efficace le domaine extractif, déjà présent dans le pays avec le secteur minier, les hydrocarbures ou encore le pétrole et le gaz.

R

epenser « sa gestion, sa production et sa transformation » pour le rendre plus compétitif au niveau mondial. Les gisements pétroliers sont importants au Kazakhstan et notamment à Kashagan*, dans la mer Caspienne. Il est nécessaire d’étendre l’influence du pays dans ce pan du marché mondial.

F

avoriser les terres rares et élaborer un projet de prospection géologique. Pour la question de l’uranium, le pays est déjà très bien placé.

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QUAND LE KAZAKHSTAN SURFE SUR LA VAGUE VERTE ! Un secteur agro-alimentaire doit se refaire une beauté pour être plus moderne. Une plus grande facilité à se lancer dans ce secteur en améliorant l’accès aux crédits, aux financements et aux terres est attendue. Le président pense que «Le Kazakhstan devrait devenir un des grands exportateurs régionaux de viande, de produits laitiers et d’autres produits de l’agriculture.» À court terme, il veut mettre en place des techniques plus innovantes comme les produits agrochimiques, le labour zéro… pour une agriculture plus rentable et plus productive. La science et les pôles expérimentaux permettront d’élaborer des techniques agro-innovantes pour des cultures génétiquement modifiées tolérantes à la sécheresse que connaît le pays. Tout ceci doit s’inscrire dans la transition « verte » attendue d’ici 2030. Au-delà du secteur agro-alimentaire, tous les efforts faits par le pays doivent être accompagnés par des techniques qui relèvent de la science. «Il ne faut pas importer l’équipement de l’étranger alors qu’il pourrait être fabriqué dans notre pays.» Le président laisse au gouvernement jusqu’au 1er septembre pour établir des projets de lois facilitant notamment le financement à risque des entreprises, soutenant mieux la recherche et l’innovation et protégeant plus strictement la propriété intellectuelle. Des partenariats avec les pays étrangers ainsi que l’ouverture de plusieurs centres d’études et de formations dans l’ingénierie sont un moyen de dynamiser ce secteur.

ZOOM SUR LES GRANDES ZONES URBAINES Les grandes zones urbaines sont les premières visées comme Astana, la capitale qui comporte déjà le premier pôle d’innovation fonctionnant sur la base de l’Université Nazarbaïev. Les grandes villes sont aussi au cœur du développement des structures de transport dans une logique de «triade agglomération-transport-énergie». “Les agglomérations servent de structure à l’économie de pointe du Kazakhstan” dixit le président.

© Rafael_Wiedenmeier

Astana et Almaty, seront les premières concernées par la stratégie du Kazakhstan d’en faire des hauts lieux de modernité et de service de qualité pour les domaines de la santé, de la culture et de l’éducation. Les villes de Chymkent et Aktobé suivront. Les infrastructures de transport seront réaménagées pour faire du pays un point nodal à l’échelle nationale mais aussi internationale. 45


"POUR LE KAZAKHSTAN LES VOIES DE COMMUNICATION ONT UNE IMPORTANCE PARTICULIÈRE EN MATIÈRE DE POSITIONNEMENT ENTRE L’EUROPE ET L’ASIE, LE NORD ET LE SUD." Trois autoroutes ont été construites à l’intérieur du pays. De surcroît, “la construction du couloir autoroutier Europe Occidentale – Chine Occidentale sera bientôt achevée. Le chemin de fer vers le Turkménistan et l’Iran avec accès au golfe Persique a été construit (…)” explique Noursoultan Nazarbaïev. Un chemin de fer de 1200 km faisant Jezkazgan-Chalkar-Beynéou est prévu en 2015 et permettra de relier le pays à l’Europe par la mer Caspienne et le Caucase à l’ouest, et le port de Lianyungang qui ouvre sur l’océan pacifique, et donc la Chine, à l’est.

LES PME, TOUJOURS DANS LA PLACE

Dans le domaine de la culture, la langue kazakh comme langue d’ État tient à cœur au président et se veut être « la langue de la science, de la connaissance et de l’Internet.” Aussi, l’ État «doit assurer la hausse des salaires aux professionnels de santé jusqu’à 28%, d’éducation – jusqu’à 29% et de protection sociale – jusqu’à 40%. » L’accès à l’emploi dans les entreprises pour tous fait partie de la Stratégie 2050. “Je charge le Gouvernement d’augmenter à 25%, à compter du 1er juillet 2015, les prestations d’invalidité et les allocations de survivant” affirme le président. L’aide dans la recherche d’un emploi prévue par cette politique vise à endiguer le chômage et la pauvreté qui est un frein à la croissance du Kazakhstan.

ET LES INSTITUTIONS PUBLIQUES ?

«Plus la part des PME dans notre économie sera importante, plus stable sera le développement du Kazakhstan ! Plus de 800 000 PME fonctionnent dans notre pays et elles emploient 2,4 millions de Kazakhstanais.», déclare le président. Dans le domaine de l’éducation, l’État veut s’impliquer à tous les niveaux de la scolarité. Il met un point d’orgue sur la maîtrise des langues kazakh, russe et anglaise à la sortie des écoles. Les bourses dédiées aux étudiants seront augmentées de 25% dans l’année. Dans le domaine de la santé publique, les efforts doivent se concentrer sur le développement des soins, la mise en place d’un système de prévention et la promotion d’une bonne qualité de vie.

Le système judiciaire doit être transparent et accessible, les lois doivent être égalitaires, et un professionnalisme de haut niveau pour le secteur juridique est prôné. Il s’agit aussi de réformer l’administration mais pas de tomber dans un processus de “paperasserie”. Une plus grande autonomie est donnée aux administrations au niveau local. In fine, tous les secteurs sont concernés par la volonté de développement et de modernisation du président Nazarbaïev. Ce septuagénaire modernisateur a établit une politique à long terme dans un soucis de sortir le Kazakhstan de l’ombre ! Il souhaite développer les atouts de son pays par une innovation des secteurs, s’appuyant pour cela sur les investissements étrangers et la participation de son peuple. Affaire à suivre ! *Kashagan : Ce projet, lancé en 2004, est le plus important et le plus complexe réalisé par l’industrie pétrolière. Situé en mer caspienne, en milieu extrême, une véritable plateforme pétrolière s’est élevé, mobilisant des moyens hors-normes et innovants. Julia BUQUET

XXI e SIÈCLE, CE DOIT ÊTRE UNE SOCIÉTÉ DE CITOYENS ACTIFS, ÉCLAIRÉS ET EN BONNE SANTÉ »

Photographie provenant du site rtbf.be

« UN PAYS DÉVELOPPÉ AU

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ENTRETIEN

« L’AFRIQUE EST UNE PRIORITÉ POUR NOTRE DIPLOMATIE »

54 ÉTATS : Le 7e forum économique d’Astana, ce n’est pas moins de 10 000 participants, qu’est-ce que cela apporte au pays concrètement ? Erlan Idrissov (E. I.) : Ce forum est une plateforme qui encourage le développement d’un monde libre, démocratique et tolérant. Il favorise les dialogues, les échanges et le rassemblement entre des personnalités politiques, économiques ... Cette année, nous avons accueilli les anciens premiers ministres italien et britannique, Romano Prodi et Tony Blair.

54 ÉTATS : Ce forum est-il également ouvert aux propositions « in & out » ? E. I. : Oui, notre pays est tourné vers l’avenir et a la volonté d’ouvrir ses portes aux investisseurs. Il y a une quinzaine d’année, rares étaient ceux à pouvoir situer le Kazakhstan sur une carte. Aujourd’hui, qui peut affirmer ne pas avoir entendu parler au moins une fois d’Astana ? Nous ne sommes plus à l’ère soviétique et la mentalité des Kazakhs n’est plus celle d’hier. Depuis 1991, nous sommes en quête de meilleures opportunités d’avenir pour notre État et surtout pour notre peuple.

© Priscilla Wolmerr

Connu des investisseurs du monde mais encore méconnu des touristes, le Kazakhstan projette de devenir aussi futuriste que Dubaï. Dans cette ex-république soviétique d’Asie centrale, grande comme cinq fois la France, le pouvoir gagne peu à peu la confiance des seize millions de kazakhstanais. Les programmes socio-économiques lancés ces dernières années, les évènements organisés dans la capitale d’Astana et une diplomatie active participent au rayonnement de ce pays. En parallèle du 7e forum économique d’Astana, 54 ÉTATS, Le magazine de l’Afrique, est parti à la rencontre d’un des maillons forts du gouvernement, Erlan Idrissov, ministre des Affaires étrangères.

ERLAN IDRISSOV

MINISTRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES DU KAZAKHSTAN

54 ÉTATS : Comment se portent vos relations avec l’Afrique ? E. I. : L’Afrique est un continent d’avenir avec lequel nous souhaitons renforcer nos relations. C’est un partenaire que nous apprenons à découvrir, et pour lequel nous avons beaucoup d’intérêts. Nos relations diplomatiques avec l’Ethiopie, l’Egypte, la Libye, l’Afrique du Sud sont excellentes et la présence de nos ambassades dans ces pays le prouve. Depuis 2013, nous sommes observateurs non-permanents à l’Union africaine. J’ai moi-même été à Addis-Abeba où j’ai pu rencontrer le vice-président de la Commission de l’Union africaine, Erastus Mwencha, et j’y retourne en janvier 2015. J’ai également rencontré le président Alpha Condé, en Guinée Conakry, dans le cadre d’une réunion de l’Organisation de la conférence islamique (OCI), dont nous sommes également membre. En clair, nous estimons, que le rapprochement avec l’Afrique est prioritaire pour notre diplomatie. Nous pourrions échanger formidablement dans les domaines de l’Éducation, de la Santé, mais aussi des Affaires. Aujourd’hui, beaucoup d’étudiants africains détournent leur regard de l’Occident pour étudier chez nous. Notre point d’entrée, géographiquement parlant est Djibouti. La fluidité des trafics routiers est une clef de démarrage pour nos coopérations futures. En effet, l’État Kazakh s’est calqué sur la nouvelle route de la soie, inventée par les chinois. Notre route irait donc du Kazakhstan vers le golfe persique pour rejoindre l’Afrique via l’Iran. Les distances entre le Kazakhstan et l’Afrique seraient donc incroyablement réduites, ce qui faciliterait le commerce entre nos nations.

54 ÉTATS : Quel regard portez-vous sur l’Afrique ? E. I. : L’Afrique est remplie d’espoir et d’avenir. C’est un continent au sous-sol extrêmement riche. Le PIB va crescendo, et ce, malgré la crise économique mondiale. Bientôt, l’Afrique représentera le quart de la population mondiale. Nul n’est sans ignorer que les 54 États qui composent ce continent doivent faire face à de nombreux défis. Lutte anti-corruption, réduction de la pauvreté, lutte contre la sécurité alimentaire, accès à l’Éducation, etc. C’est pourquoi, le Kazakhstan souhaite offrir son expertise et sa richesse à l’Afrique. Ensemble, nous pouvons capitaliser nos savoirs pour être meilleurs. L’ordre du monde change et d’ici 30 ans, l’Afrique pourrait bien devenir l’un des principaux chefs d’orchestre. 47


© European Bank for Reconstruction and Development M. Noursoultan Nazarbaïev, président de la République du Kazakhstan

POPULATION : 17 MILLIONS

PRODUIT INTÉRIEUR BRUT (PIB) PAR HABITANT : 12 933 USD

CROISSANCE DU PIB : + 6%

ESPÉRANCE DE VIE : 69,6 ANS

INDICE DE FÉCONDITÉ : 2,59 ENFANTS PAR FEMME

CHIFFRES

Sources : Banque mondiale et www.diplomatie.gouv.fr

54 ÉTATS : Pensez-vous que le Kazakhstan, dont la population est à 60% musulmane, pourrait aider à combattre des organisations terroristes comme Boko Haram ? E. I. : La question de la lutte contre le terrorisme concerne tous les États du Nord au Sud, de l’Ouest à l’Est, riches comme pauvres, musulmans ou pas. Ce terrorisme est protéiforme, absurde et sans limites. Ces fanatiques religieux, passent, sans fondements légitimes, d’une cible à une autre. Nous devons nous attaquer, ensemble, aux racines et aux causes de l’extrêmisme. Offrir une meilleure éducation et une vie plus confortable à la jeunesse mondiale est l’une des clefs du problème.

54 ÉTATS : Que pensez-vous des 200 lycéennes nigérianes enlevées en avril dernier par Boko Haram ? E. I. : Le Kazakhstan est solidaire de l’ État nigérian et condamne fermement les actes barbares de Boko Haram. Cependant, la meilleure réponse à la violence n’est pas la violence mais la résolution des questions liées au développement et au bienêtre de nos concitoyens.

54 ÉTATS : Le Kazakhstan souhaite être élu membre non permanent du Conseil de sécurité des Nations unies en 2017. Avez-vous les moyens d’y parvenir ? E. I. : En 2017, le Kazakhstan fêtera ses 25 ans comme membre des Nations Unies. Sans prétention aucune, nous estimons avoir montré au reste du monde que nous sommes un État responsable, qui respecte ses engagements et entend garantir la paix et la sécurité internationale. Notamment sur la question de la non-prolifération des armes nucléaires. Nous sommes au service de l’humanité grâce à notre expertise, notre maturité, et notre présence active au sein de plusieurs organisations internationales tels que l’OCI ou l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE). Le Kazakhstan aspire à être un pays moderne, séculaire, libéral, ouvert et équilibré. En 2050, nous serons un État fort grâce à notre stratégie ambitieuse de développement. Un plan de développement orchestré par le président Noursoultan Nazarbaïev et qui aboutira grâce à la multiplication des partenariats avec nos voisins.

54 ÉTATS : Que pensez-vous du développement de vos voisins Russes et Chinois ? E. I. : Leur développement nous est tout à fait profitable. Nous sommes partenaires.

54 ÉTATS : Avez-vous d’autres partenaires solides ? E. I. : L’Europe, le Japon, l’Inde, l’Afrique du Sud, les ÉtatsUnis, et le Pakistan, sont des partenaires économiques concrets pour nous.

Jessica COHEN

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SOMMET WASHINGTON

Le sommet USA-Afrique s’est déroulé à Washington du 4 au 6 août. Les raisons d’un tel sommet sont restées peu définies. Du reste, personne n’a eu l’air étonné de ne pas voir figurer dans la liste des invités quatre pays d’Afrique. © Kilo66

La République centrafricaine, exclue de l’Ua ; le président du Zimbabwe, Robert Mugabe, jugé anti-occidental ; le président Erythréen Issayas Afewerki, dont le régime est dit autoritaire ; et le président soudanais Omar el-Béchir, sous le coup d’un mandat d’arrêt de la Cour pénale internationale (CPI), ont été considérés comme « personae non gratae » et, de fait, mis à l’écart.

OPÉRATION BARKHANE : Contre un mal pandémique au Sahel L’opération Serval, jugée de mal en pis par l’opinion internationale, dépose les armes et laisse simultanément place à l’opération Barkhane.

SOMMET À WASHINGTON : tous accourent pour Obama

Date retenue et annoncée pour le début de l’opération Barkhane : le 1e août 2014 selon une déclaration du ministre de la Défense, M. Le Drian.

Du jamais vu. Une cinquantaine de chefs d’État et de gouvernement africains se sont déplacés à Washington pour le président américain Obama. Et ce, pour des motifs peu ou prou définis.

En réponse au changement de face du terrorisme sévissant dans toute la région du Sahel, ce nouveau plan militaire a pour mission de traquer ce mal sans visage et protéiforme au moyen d’une stratégie davantage régionalisée permettant une mobilité et une meilleure flexibilité.

Une mobilisation de plus de 30 milliards de dollars prévue pour créer un environnement propice aux affaires en Afrique ainsi que la relance du Power Africa qui aurait pour objectif de doubler les installations électriques sur le continent, ont été évoquées.

Le ministre de la Défense a déclaré que 3 000 militaires, s’alliant aux forces africaines, seront déployés.

La mise en place de l’opération

Une volonté de renouer avec l’Afrique a aussi été exprimée. « Sur l’ensemble des produits que nous exportons à travers le monde, seuls 1% vont vers l’Afrique sub-saharienne » a affirmé Obama. Ce sommet est une façon de « rattraper le temps perdu en Afrique face aux économies émergentes. »

Les opérations Épervier, Sabre et Licorne, déployées dans les pays d’Afrique de l’Ouest (Tchad, Burkina Faso, Côte d’Ivoire), seront fusionnées sous le plan Barkhane. Le contingent français mobilisé au Sahel intégrera quatre bases dans la région. Il s’agit de créer un partenariat avec les cinq pays de la zone (Mauritanie, Mali, Burkina Faso, Niger et Tchad). L’état-major de cette opération sera implanté à N’Djamena, la capitale du Tchad.

Le président se présentant comme « un fier Américain » mais aussi et surtout comme le « fils d’un homme d’Afrique » semble tout de même plus s’intéresser au développement de son pays qu’à celui de son continent d’origine. « On ne peut pas avoir de trop grandes attentes pour ce sommet sous prétexte des origines africaines d’Obama, il est avant tout sous un mandant américain » soutient le quotidien nigérian Leadership.

L’opération Barkhane traduit la volonté d’élargir à toute la zone du Sahel les combats menés contre les mouvements terroristes et constitue une tentative d’endiguement du trafic d’armes provenant de Libye.

Ce sommet n’a pas eu bonne presse. Rares apparitions du président Obama, aucun accueil à la Maison Blanche, séance inaugurale aux airs de leçon de morale, condescendance envers les chefs d’État africains,… tout ceci se terminant par le boycott de la fin du sommet par plusieurs chefs d’État africains. Bref, les retours négatifs ont été nombreux.

Julia BUQUET

ÉVÈNEMENT À L’INITIATIVE DE L’INSTITUT PANAFRICAIN DE STRATÉGIES, UN ÉNIÈME FORUM SUR LA SÉCURITÉ ET LA PAIX EN AFRIQUE SE TIENT EN DÉCEMBRE AU SÉNÉGAL.

Cet événement s’inscrit dans une lignée de sommets qui se suivent et ont tout l’air de se ressembler. Un acte réellement bienveillant et désintéressé de la part des protagonistes internationaux ? Ou bien, une volonté de tisser des liens avec un continent émergent et détenant des atouts économiques stratégiques ? Des questions soulevées qui méritent réflexion.

LA CAPITALE SÉNÉGALAISE, DAKAR, SERA LES 15 ET 16 DÉCEMBRE PROCHAINS LE THÉÂTRE D’UN FORUM SUR LA PAIX ET LA SÉCURITÉ EN AFRIQUE. CE FORUM EST L’INITIATIVE DE L’INSTITUT PANAFRICAIN DE STRATÉGIES DIRIGÉ PAR CHEIKH TIDIANE GADIO, L’ANCIEN MINISTRE SÉNÉGALAIS DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES.

© carte provenant du site usa-info-afrique.com

© United States Government Work

© Guillaume Besnard Aviation Photography

CES RENCONTRES DE CE TYPE SE SONT MULTIPLIÉES CES DERNIERS MOIS, À PARIS NOTAMMENT, LES 3 ET 4 DÉCEMBRE DERNIERS, AVEC L’ORGANISATION DU SOMMET PAIX ET SÉCURITÉ À L’ÉLYSÉE. L’IDÉE ÉTANT DE TROUVER DES VOIES ET MOYENS DE BARRER LA ROUTE AUX MILICES ARMÉES ET TERRORISTES QUI SÈMENT LA TERREUR DANS LE SAHEL, AU NIGÉRIA OU ENCORE EN CENTRAFRIQUE. POUR ORGANISER CE FORUM, CHEIKH TIDIANE GADIO A SANS DOUTE ÉTÉ INSPIRÉ PAR LA SITUATION EN CENTRAFRIQUE, À LAQUELLE IL ESSAYE DE TROUVER UNE SOLUTION, EN SA QUALITÉ D’ENVOYÉ SPÉCIAL DE L’ORGANISATION DE LA CONFÉRENCE ISLAMIQUE DANS LA CRISE CENTRAFRICAINE (OCI). 49


TURQUIE/AFRIQUE UNE RELATION PROMETTEUSE

© African Union Commission

MONDE

LE MINISTRE TURC MEHDI EKER A DÉCLARÉ « NOUS SOUHAITONS ORGANISER UN SOMMET AFRIQUE-TURQUIE DURANT LE MOIS DE NOVEMBRE PROCHAIN ET C’EST LÀ UN AUTRE OBJECTIF DE MA VENUE ».

LES PROJETS DE COOPÉRATION

Lors de ce 23e sommet de l’Union africaine à Malabo, plusieurs projets de coopération ont été fixés. Le consul turc Atalay Dik a déclaré à Anadolu, interrogé le 26 juin 2014 sur l’audience tenue entre Obiang et Eker, en marge du 23e sommet de l’Ua, qu’au mois de novembre prochain « Le chef d’état équato-guinéen Teodoro Obiang Nguema Mbasogo et le ministre turc de l’agriculture, de l’alimentation et de l’élevage, Mehdi Eker, ont décidé de signer plusieurs accords de coopération dans le secteur agricole. Les contrats seront prêts dès le mois de novembre. »

LES RELATIONS TURCO-AFRICAINES

Le 1er Sommet de partenariat Turquie-Afrique s’est déroulé en août 2008 à Istanbul en présence de 49 chefs d’État africains. Les relations entre la Turquie et le continent africain sont récentes puisqu’elles existent seulement depuis les années 2000. La Turquie met un point d'honneur à participer aux réunions des sommets de l’Ua afin de se tenir au courant des avancées de l’Afrique et afin de pouvoir nouer des relations bilatérales avec les dirigeants du continent. Afin de préparer ce 2e sommet Partenariat Turquie-Afrique, une réunion s’est tenue le 6 juin 2014 à Ankara, accueillie par le ministère des Affaires étrangères. Elle a été l’occasion de présenter et de revenir sur les projets de la Turquie mis en place en Afrique depuis le 1er sommet en 2008. Les représentants des pays africains, présents lors de cette réunion, ont insisté sur les actions entreprises par la Turquie dans le domaine du développement et de l’aide humanitaire en Afrique qui ont été largement saluées. La coopération turco-africaine est souhaitée par la suite. Le 2e sommet du partenariat Turquie – Afrique se place dans cette volonté. La volonté d’un 2e sommet succède au refus de l’entrée dans l’Union européenne qu’essuie constamment la Turquie. Cette relation turco-africaine s’inscrit dans un changement de priorité de la politique étrangère du pays. Après l’échec de l’UE, la réussite de l’Ua ? Julia BUQUET

Photographie provenant du site ekonomi.haber7.com M. Mehdi Eker, ministre turc de l’Agriculture, de l’Alimentation et de l’Élevage

« La Turquie dispose d’une grande économie et son industrie est bien installée pour envisager des collaborations planifiées avec l’Afrique. Nous avons des projets pour la sécurité alimentaire et pour le développement des produits alimentaires mais nous voulons tout d’abord consulter nos partenaires africains pour identifier les thèmes que l’on choisira pour ces projets » explique Mehdi Eker. Et il conclut par « notre objectif est d’aider les Africains dans plusieurs secteurs, nous ne sommes pas là pour concurrencer d’autres pays ». Il est bon de rappeler qu’en 2012, un tiers de l’aide publique au développement de la Turquie, soit 772 millions de dollars, a été consacré à l’Afrique.

© African Union Commission

2e SOMMET DE PARTENARIAT TURQUIE-AFRIQUE

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ALEXANDRIE

En tant que pays non-frontalier de la Syrie, l’Egypte a été frappée moins violemment par l’arrivée de réfugiés que les autres pays de la région. 140 000 réfugiés sont enregistrés aujourd’hui auprès du Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR)soit la moitié de ceux présents sur le territoire selon les autorités égyptiennes. Une goutte d’eau presque insignifiante pour les 2,5

millions de Syriens réfugiés principalement en Turquie, au Liban et en Jordanie. Seulement voilà : depuis un an, cette goutte d’eau rejoint la mer pour atteindre l’Europe via l’Italie. Plusieurs milliers de Syriens auraient déjà réussi la traversée depuis Alexandrie, entrant illégalement dans l’espace Schengen. Ceux qui restent en Egypte veulent tous, sans exception, suivre leur voie.

EGYPTE, SECOND PAYS DE MIGRATION « Les Syriens présents en Egypte sont dans la majorité des cas des seconds migrants venus des camps de Turquie et du Liban » explique Carmen Sakhr, en charge de la protection internationale au HCR en Egypte. L’installation en Egypte leur permet de fuir les camps espérant trouver une vie normale dans un pays qui leur est culturellement proche (l’Egypte et la Syrie ont formé dans les années 50 un même pays appelé République arabe unie), à large majorité sunnite (comme la plupart des réfugiés qui craignent la présence de chiites dans les autres pays d’accueil) et où le coût de la vie est moins cher. Sous la présidence de Mohammed Morsi, membre des Frères musulmans, l’Egypte ouvrait même volontiers ses portes aux Syriens, restant l’un des rares pays n’exigeant aucun visa de leur part. Le renversement de ce dernier en juillet 2013 par l’armée égyptienne a signifié la fin de cette politique d’accueil. Les Syriens doivent désormais obtenir un visa et une lettre d’approbation de la sécurité d’État égyptienne.

© Reportages ici et ailleurs

PORTE D’ENTRÉE DES SYRIENS VERS L’EUROPE

DÉSILLUSION AU PAYS DES PHARAONS Au cas où le message ne serait pas suffisamment clair, la propagande anti-syrienne diffusée depuis sur la télévision d’État égyptienne ne laisse aucun doute. De 15 178 enregistrements au HCR en juin 2013, seulement 3 529 sont comptés en juillet 2013 pour finalement atteindre 94 en mai 2014. Au delà de la discrimination exercée par les Egyptiens, Ahmad Hawamda, réfugié de 35 ans, témoigne de difficultés économiques croissantes. « Je vis à Alexandrie avec ma femme et mes cinq enfants depuis mai 2013. En un an, nous avons dépensé toutes nos réserves et depuis deux mois, nous n’avons plus droit à l’aide financière du HCR -soit 20 euros par personne et par mois-, raconte-t-il. Sans mes embauches occasionnelles comme maçon, je ne sais pas comment nous survivrions. » Arrivés dans un pays en ébullition depuis 3 ans, les Syriens s’attendaient à retrouver la stabilité de leur pays avant la guerre. Contraints de travailler et parfois d’habiter dans le secteur informel qui a explosé depuis la révolution de 2011, les réfugiés subissent en fait une nouvelle forme d’insécurité. « Mais on ne parle plus de migration d’urgence, précise Carmen Sakhr. Ils sont venus en Egypte pour avoir une vie meilleure qu’ils ne trouvent pas. Malgré les efforts du HCR pour leur donner accès à l’éducation et à la santé, les institutions égyptiennes sont défaillantes. Ils continuent donc leur chemin vers l’Europe. » 51


ALEXANDRIE, PORTE D’ENTRÉE VERS L’EUROPE

La faible répression exercée par les autorités égyptiennes tout comme les nombreuses « success stories » de réfugiés ayant obtenu l’asile une fois arrivés illégalement en Suède -la destination rêvée des Syriens-, alimentent l’espoir des familles et un juteux trafic d’immigration clandestine. En septembre 2013, Ahmad a négocié 3400 dollars sa traversée, pour ensuite se faire arrêter par les garde-côtes égyptiens avant même d’atteindre les eaux internationales.

© Antoine Krempf

UN TRAFIC LUCRATIF

« En septembre dernier, des familles entières pouvaient rester emprisonnées des semaines durant sans aucune charge contre eux, explique Mohammed El Kashef de l’Initiative égyptienne pour les droits de la personne, chargée d’assistance juridique aux Syriens d’Alexandrie. Aujourd’hui, les réfugiés sont relâchés en quelques jours s’ils ont de la famille proche en Egypte. Seuls les hommes de 16 à 65 ans font l’objet d’une enquête systématique de la sécurité d’État, qui mène dans 13% des cas à une déportation dans un pays tiers. »

« Les pratiques ont évolué depuis, explique el-Kashef. Les prix tournent autour de 2500 dollars et surtout le paiement se fait intégralement à l’arrivée en Europe via une personne de confiance restée en Egypte. »

Des évolutions destinées à ouvrir le marché au plus grand nombre sachant que tous, sans exception, ont en tête un départ vers l’Europe. À tel point que certains Syriens participent eux aussi au trafic. « Je n’ai plus d’argent aujourd’hui, raconte Issam. Pour payer la traversée de ma famille, je rabats d’autres Syriens et avec dix personnes, je peux faire voyager ma femme gratuitement.» Cet ancrage dans la communauté syrienne risque, par le bouche-à-oreille, d’intensifier le flux de Syriens venant en Egypte pour aller en Europe. « Depuis deux semaines, aucun bateau quittant l’Egypte n’a été arrêté, ajoute Gheida Shafiq, une syro-égyptienne investie auprès des réfugiés. Ce qui laisse supposer une complicité au plus haut niveau des garde-côtes.» Peu importe à qui profite le réseau, Issam garde donc espoir. Après ses sept tentatives ratées, il envoie maintenant sa famille seule traverser la mer. Le temps pour lui de renflouer les caisses et d’obtenir, une fois sa famille en Europe, un asile en bonne et due forme pour aller les rejoindre. Agnès RICHIERI

© Muhammad Hamed / Reuters

© Reportages ici et ailleurs

Avec seulement 55 cas de réinstallation légale en Europe (dont 26 en France) depuis janvier dernier, de plus en plus de Syriens envisagent la traversée clandestine de la Méditerranée comme la seule issue possible. Le nombre de départs est difficile à comptabiliser mais plusieurs milliers de Syriens auraient déjà rejoint l’Europe illégalement depuis juin 2013 selon l’Observatoire arabe pour les droits de l’Homme. 1500 Syriens ont été arrêtés lors de leur tentative durant l’année 2013 et plus de 600 depuis le début de l’année 2014. Issam Mamdouh Aboud, originaire de Damas, a tenté sept fois la traversée depuis son arrivée en Egypte en mars 2013. À deux reprises, accompagné de sa femme et de ses cinq enfants, il s’est fait voler par les passeurs, avant même d’embarquer sur le bateau de pêche qui devait les emmener dans les eaux internationales. En cas d’échec, l’arrestation par les autorités égyptiennes est presque inévitable.

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QUAND LES « FIRST LADIES » TRAQUENT

SOCIÉTÉ

LE VIH…

LA SÉCURITÉ A ÉTÉ AU CŒUR DE TOUTES LES PRÉOCCUPATIONS LORS DU 23e SOMMET À MALABO. LA QUESTION SANITAIRE N’Y A DONC PAS ÉCHAPPÉ. UNE AFRIQUE EN BONNE SANTÉ : UNE AMBITION QUE PREND À CŒUR L’ORGANISATION DES PREMIÈRES DAMES D’AFRIQUE CONTRE LE VIH/SIDA (OPDAS). FOCUS SUR CETTE INITIATIVE FÉMININE MENÉE AVEC POIGNE. L’Afrique première de la classe dans une catégorie peu réjouissante… Avec près d’un adulte sur 20 vivant avec le VIH, l’Afrique subsaharienne est la région la plus touchée par ce virus. Elle concentre 69% des personnes vivant avec le sida dans le monde. Ces chiffres reccueillis par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) expriment la nécessité urgente de prendre en main ce fléau qui touche durement les populations, dénombrant aujourd’hui plus de 36 millions de victimes. Dans le cadre d’une conférence pour le 23e sommet de l’Union africaine (Ua), les premières dames se sont réunies autour de l’organisation des premières dames contre le VIH/SIDA (OPDAS).

© Julia Buquet. Hinda Deby Itno, première dame de la République du Tchad et présidente de l'OPDAS

l’OPDAS. Un Secrétariat permanent de l’OPDAS a été mis en place à Addis-Abeba en 2012, restant ainsi engagé auprès des plateformes décisionnelles avec le sommet annuel de l’Ua dans la capitale éthiopienne notamment. Ce siège permet aussi de se tenir près des acteurs clefs comme ONUSIDA (dont le directeur exécutif, M. Michel Sidibé, collabore avec OPDAS) et d’autres organismes engagés dans ce combat. Une aubaine pour l’OPDAS qui souhaite s’élever comme une plateforme multi-travaux dans le but d’influencer les changements.

« Chaque première dame, sur la

base des priorités nationales dispose d’un plan d’action notamment dans les domaines du VIH et du SIDA, de l’autonomisation des femmes et des enfants, préoccupations clairement relatées dans le plan stratégique. »

explique SE Mme Hinda Déby Itno, épouse du président tchadien et présidente de

L’objectif principal de cette initiative est de prévenir et réduire la transmission du VIH de la mère à l’enfant. Une meilleure prise en charge avec un élargissement de l’accès aux services de santé, de meilleures infrastructures pour l’accueil et les soins et une sensibilisation au VIH. Voici les principaux combats de l’OPDAS. L’enjeu majeur étant la prise en charge des mères et enfants atteints de VIH pour mieux contrôler et réduire les risques de transmission. Toujours selon Mme Hinda Deby Itno « Le

plan stratégique 2014-2018 de l’OPDAS va au delà du VIH/SIDA et intègre désormais la santé maternelle, néonatale et infantile, le cancer du col de l’utérus et l’autonomisation des femmes, des filles et des enfants. » UN BILAN PLUTÔT POSITIF

L’OPDAS, UNE STRUCTURE FÉMININE Créée en 2002 par 37 premières dames d’Afrique, réunies pour représenter la voie des personnes les plus vulnérables du continent, l’OPDAS compte aujourd’hui 40 membres actifs.

© Julia Buquet. Constancia Obiang De Mangue, première dame de la République de la Guinée équatoriale

© Julia Buquet. Antoinette Sassou Nguesso, première dame de la République du Congo Brazaville

OPDAS : UN BRAS DE FER CONTRE LE VIH « Les premières dames ont apporté une énorme contribution à l’élimination du VIH /SIDA, tout particulièrement en ce qui concerne la Prévention de la Transmission du VIH de la mère à l’enfant. Elles se sont lancées dans des campagnes de sensibilisation agressives et des projets de plaidoyer dans leur pays respectif. » déclare la présidente de l’OPDAS.

Ces dernières années des efforts considérables ont permis des améliorations significatives. Entre 2009 et 2012, les nouvelles infections VIH parmi les enfants ont été réduites de 50% voir plus dans 7 pays - Botswana, Ethiopie, Ghana, Malawi, Namibie, Zambie et Zimbabwe. Le Ghana arrive en tête avec une réduction exemplaire de 76%. Mais le chemin est encore long. Certains pays sont dans une situation préoccupante comme l’Angola, le Tchad ou encore le Nigéria. La plupart des mères ne recevant pas de traitements antirétroviraux afin de prévenir la transmission avant et après l’accouchement. Une politique à mettre en exergue : un meilleur accès en continu aux traitements du VIH ainsi qu’aux services de santé sexuelle et reproductive pour les mères et leurs partenaires. Deux points qui doivent être une priorité au niveau des programmes de chaque pays. JULIA BUQUET 53


À L’ÉCOUTE DU CHANT DES LÉMURIENS

© R. A. Mittermeier. Propithecus verreauxi 1

INTERVIEW

Pourquoi les lémuriens ont-ils d’aussi grands yeux ? Peut-être pour mieux voir dans l’obscurité, peut-être pour mieux apprécier les distances et les reliefs mais peut-être aussi pour mieux attirer notre attention sur leur situation : « en danger critique d'extinction », « en voie de disparition » ou « vulnérable », tels sont les indicateurs utilisés pour dresser l’état des principales menaces qui pèsent sur l’avenir de cette espèce. Ce joyau de la faune malgache constitue le sujet de l’ouvrage de référence Lémuriens de Madagascar. Ce guide s’inscrit dans une démarche de responsabilisation des lecteurs et souligne notamment l’importance de concilier besoins économiques et conservation du patrimoine naturel. À l’occasion de cette parution, l’équipe de 54 États a eu l’honneur de s’entretenir avec l’un des coauteurs, M. Olivier Langrand.

O.L. : En tant que biologiste qui s’intéresse à la conservation, Madagascar constitue une véritable mine d’or. Ce petit territoire se caractérise par un niveau de biodiversité absolument incomparable. Ce pays abrite 2% de la biodiversité mondiale, 3% de la flore de la planète, 100% des lémuriens, espèce endémique. Ce trésor de biodiversité ne peut que vous intriguer. À Madagascar, vous gardez les yeux grand ouverts. Tout ce que vous voyez sont des choses uniques à cette partie du monde.

© R. A. Mittermeier. Varecia variegata

Olivier Langrand (O.L.) : Un peu plus grande que la France et le Benelux réunis, l’île de Madagascar est un véritable trésor de biodiversité. Les lémuriens en sont un symbole incontournable. À l’heure où le monde entier ignore cette richesse, soulignons que sur 130 espèces vivantes, 17 sont déjà éteintes. Celles-ci envoient un message très fort : celui de la nécessité de conserver une biodiversité absolument extraordinaire.

54 ÉTATS : Vous avez passé une dizaine d’années à Madagascar : pourquoi avoir choisi cette île plutôt qu’une autre partie du monde ?

© Karim Nari / Office National du Tourisme de Madagascar

54 ÉTATS : Quelle idée phare souhaiteriez-vous que vos lecteurs retiennent ?

54 ÉTATS : Le secteur de l’écotourisme malgache a-t-il un rôle à jouer dans la préservation de l’espèce ? O.L. : Oui absolument. Dans un pays pauvre comme Madagascar, on ne peut pas envisager la question de la conservation de la biodiversité sans la relier au développement économique. Il convient alors de déterminer la façon dont les ressources issues de la biodiversité et, en particulier, les lémuriens peuvent engendrer un bénéfice économique. Le développement de l’écotourisme y apporte une première réponse. L’écotourisme permet de favoriser la découverte de cet animal et d’assurer une ressource économique aux communautés qui demeurent à la périphérie de ces zones forestières où vivent les lémuriens. Il s’agit donc de réconcilier besoins économiques et conservation de la nature.

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O.L. : La disparition de leur habitat naturel, la déforestation étant le souci principal.Les lémuriens ne peuvent pas traverser les grands espaces ouverts car ce sont des animaux forestiers. La fragmentation de la forêt a pour effet d’emprisonner les populations de lémuriens à l’intérieur de boucles forestières. Ainsi enclavés, ils ne sont plus en mesure de satisfaire leurs besoins vitaux. En outre, certaines populations rurales chassent les lémuriens pour leurs apports en protéines. Le problème découle directement de la situation économique de Madagascar. Aujourd’hui, on peut espérer une amélioration du fait de l’avènement d’un nouveau gouvernement.

54 ÉTATS : Comment percevez-vous l’avenir des lémuriens ?

O.L. : Chaque pays peut se nourrir de ce qui se passe ailleurs. En ce qui concerne Madagascar plus particulièrement, on peut tirer un enseignement utile à d’autres pays d’Afrique continentale : un organe paraétatique a été instauré pour la conservation de la biodiversité, pour la création de parcs et pour le partage des ressources financières. En outre, la communauté internationale a placé de l’argent dans un fonds fiduciaire qui génère un retour sur investissement affecté à la gestion des parcs nationaux. Par ailleurs, Madagascar s’est positionnée en tant que pionnière en ce qui concerne l’échange de dettes pour la nature : l’argent qui en découle est réinvesti dans la conservation de la nature. Ces initiatives malgaches assez novatrices présentent un intérêt véritable et sont porteuses d’un message pour la communauté de la conservation active dans d’autres pays africains.

54 ÉTATS : La formulation, l’adoption et la mise en œuvre de politiques en matière de préservation sont-elles plus compliquée à Madagascar qu’ailleurs ? O.L. : Non pas plus qu’ailleurs dans la mesure où l’obtention des financements de la communauté internationale dépend du sérieux des idées et des projets soumis. Lorsque Madagascar a emprunté la voie de la bonne gouvernance, les bailleurs de fonds se sont logiquement associés aux efforts déployés par le pays. C’est quelque chose qui fonctionnait très bien jusqu’au coup d’État de 2009. Dès que la gouvernance a dérapé, l’aide internationale n’a plus octroyé aucun subside. Maintenant, depuis le mois d’octobre, on a un gouvernement élu démocratiquement, on va revenir sur une voie qui semble être la bonne. La conservation de l’environnement passe par une politique saine ainsi que par une gouvernance forte et transparente. Sandra WOLMER

L’ouvrage est en vente à la librairie du Parc zoologique de Paris et auprès du service des Publications scientifiques du Muséum. Il sera également diffusé gratuitement sur Madagascar par le réseau des ONG locales présentes sur l’île. Sa distribution locale est coordonnée par Fanamby, ONG nationale malgache.

© R. A. Mittermeier. Lemur cotta

Photographie provenant du site mnhn.fr

O.L. : Lorsque vous travaillez dans le domaine de la conservation de la nature, il faut s’armer d’un tempérament optimiste. Les problèmes malgaches de déforestation, de dégradation de l’environnement, de disparition de l’espèce découlent directement de la misère. Il est impératif de résoudre le problème de la pauvreté à Madagascar, par Madagascar, avec l’aide de la communauté internationale. La préservation des lémuriens passe par une amélioration de la situation économique du pays et contribue à son développement. Il s’agit d’une problématique à prendre à bras le corps. Je ne pense pas que les espèces vont s’éteindre dans un avenir proche. Il existe une certaine latitude permettant de mettre en place des actions de conservation. Mais, la vigilance reste de mise ! Ce n’est pas parce qu’il n’existe pas un risque imminent d’extinction de l’espèce qu’il ne faut pas travailler dur pour assurer une meilleure conservation.

54 ÉTATS : En tant que « hot spot » de la biodiversité, Madagascar peut-elle être un moteur pour l’Afrique en ce qui concerne les activités de conservation ? © Karim Nari / Office National du Tourisme de Madagascar

54 ÉTATS : Quels sont les problèmes environnementaux auxquels se trouvent confrontées les familles de lémuriens ?

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SOCIÉTÉ

© Karim Nari / Office National du Tourisme de Madagascar

À LA DÉCOUVERTE DE MADAGASCAR NE S’INTITULE PAS VOYAGEUR COMBLÉ QUI VEUT ! EN TOUT CAS, CELUI QUI PARCOURT LE MONDE SANS ENVISAGER DE SÉJOURNER À MADAGASCAR, NE L’EST ASSURÉMENT PAS ! CELLE QUE L’ON NOMME TANTÔT LA GRANDE ÎLE, TANTÔT L’ÎLE CONTINENT, TANTÔT L’ÎLE ROUGE (EN RÉFÉRENCE À LA LATÉRITE QUI COLORE SES TERRES) SE DISTINGUE PAR SA SINGULARITÉ. SINGULARITÉ DE SON PEUPLE, SINGULARITÉ DE SES LIEUX. ÉMERVEILLEMENT GARANTI !

UNE DESTINATION FRANCOPHONE À 9 000 km de Paris, Madagascar vous lance une invitation au voyage sans pour autant vous imposer les désagréments du décalage horaire (1 à 2 heures seulement). Parallèlement au malgache et à l’anglais, le français, vestige de l’époque coloniale, constitue l’autre langue officielle du pays.

UNE ÎLE NICHÉE DANS L’OCÉAN INDIEN Séparée de l’Afrique par le canal du Mozambique, Madagascar déploie dans l’océan Indien ses 5 000 kilomètres de côtes, le long desquelles s’étirent plages de sable blanc et eaux turquoises. Rizières évocatrices de l’Asie, Tsingy Rouges, végétation tropicale intacte et luxuriante, ambiance africaine des savanes, maisons traditionnelles en pisé, etc … Madagascar exhibe inlassablement ses trésors de beauté. Le pays se décline en une extraordinaire variété de sites et de paysages à laquelle le plus blasé des voyageurs ne pourra rester insensible.

UNE ÎLE À LA FAUNE ET À LA FLORE EXCEPTIONNELLES Madagascar s’est séparée du continent africain il y a des millions d’années. Allié à une grande diversité de microclimats, cet isolement géographique précoce a engendré ces écosystèmes extraordinaires. Le territoire affiche des taux élevés d’endémicité estimés à 80% pour la faune et 90% pour la flore. Ainsi, est-il possible d’y rencontrer des espèces animales et végétales originales qui ne se trouvent nulle part ailleurs : lémuriens, caméléons, geckos, baobabs, orchidées pour ne citer qu’eux.

UNE ÎLE DITE « AFRO-ASIATIQUE » La culture malgache tire sa richesse des métissages qui se sont produits sur l’île et des apports successifs des peuples qui s’y sont installés au fil des siècles. Ce brassage est perceptible dans la langue malgache dont de nombreux éléments sont issus de la même famille que les langues parlées en Malaisie, Indonésie, aux Philippines mais enrichies de nouveaux éléments africains. Aujourd’hui, le peuple malgache compte quelques 20 millions d’habitants, répartis en 18 groupes ethniques. Bordé par deux continents auxquels il n’appartient pas véritablement, le pays a acquis une culture propre s’articulant notamment autour du culte des ancêtres (Razana) et des tabous locaux (fady).

UNE DESTINATION ÉCOTOURISTIQUE Madagascar fait partie de ces pays où l’écotourisme est voué à jouer un rôle en tant que facteur de développement économique, en tant que modèle durable, afin de valoriser et conserver la riche biodiversité naturelle et lutter contre la pauvreté. Il se murmure qu’un voyage sur cette île ne laisse jamais indifférent. On y va en étant soi-même, on en revient… autre…

© Karim Nari / Office National du Tourisme de Madagascar

Sandra WOLMER

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LE TERRITOIRE OFFRE DE NOMBREUSES POSSIBILITÉS TOURISTIQUES. VOICI QUELQUES SUGGESTIONS, NON EXHAUSTIVES, BIEN ÉVIDEMMENT ! À LA RENCONTRE DE LA POPULATION Escapades dans les villes et villages : un bon moyen d’aller à la rencontre de la population et d’en apprendre davantage sur ses modes de vie.

À LA DÉCOUVERTE D’UNE BIODIVERSITÉ EXCEPTIONNELLE - visite du parc national d’Andasibe : c’est l’une des réserves les plus visitées de Madagascar. Au cœur du parc, une île est réservée au plus grand et au plus gracieux des lémuriens : l’indri ; - visite de la réserve naturelle intégrale des Tsingy de Bemaraha, site inscrit au Patrimoine mondial de l’Unesco.

POUR LES PLUS SPORTIFS - plongée sous-marine à Nosy Be et son archipel d’îles : l’occasion d’y rencontrer une très large variété d’espèces dont la raie manta, les poissons demoiselles et le requin baleine ;

© Karim Nari / Office National du Tourisme de Madagascar

- spéléologie : découverte des 11 grottes des Tsingy de l’Ankarana, dont certaines sont sacrées ; - événement : au rythme des encouragements des malgaches, courez les épreuves du Marathon et du Semi Marathon de Diégo Suarez, en septembre ! Avec en toile de fond, la deuxième plus belle baie du monde et son pain de sucre, la montagne des Français, le village de Ramena.

Pour plus d’informations : Agence de Représentation TQC 15, Rue Monsigny 75002 Paris Tél./Fax : +33 (0)1 58 01 01 30/31 Courriel : madagascar@tqc.fr Office National du Tourisme de Madagascar IBG 29 C - Antsahavola - 101-Antananarivo MADAGASCAR Tél. + 261 20 22 661 15 | Fax : + 261 20 22 660 98 Mob. + 261 34 02 661 15 / + 261 34 20 661 15 | Courriel : accueil@ontm.mg | ontm@ moov.mg | Site web: www.madagascar-tourisme.com © Karim Nari / Office National duTourisme de Madagascar. Pain de Sucre - Baie de Diego Suarez.

© Karim Nari / Office National du Tourisme de Madagascar

© Karim Nari / Office National du tourisme de Madagascar. Nosy Be.

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TENDANCE

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SHINE BRIGHT LIKE A DIAMOND Voici notre sélection d’accessoires pour briller de mille feux.

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pour MADAME 1. Collier Panthère 18 carats en or gris, diamants, émeraude, onyxprix – prix sur demande – CARTIER 2. Rouge COCO SHINE N°95 – 31€ – CHANEL 3. Montre Oyster Perpetual Lady-Datejust en or jaune de 18 carats et diamants – prix sur demande – ROLEX 4. Eau de parfum FLASH – 100ml – 92 € – JIMMY CHOO 5. Montre THE SMALL KENSINGTON – 200 € – NIXON

pour MONSIEUR

6. Boutons de manchette PAVÉS DÉCOR « CLOU DE PARIS » en or jaune, diamants – 12 600 € – CARTIER 7. Stylo DIABOLO JAZZ CONNECTION – 460€ – CARTIER 8. Montre Oyster Perpetual Sky-Dweller en or gris 18 carats – prix sur demande – ROLEX 9. BLEU DE CHANEL, Eau de Parfum, 100 ml – 100ml – 85 € – CHANEL

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TENDANCE DURANT LA PÉRIODE ESTIVALE NOTRE CORPS EST MIS À RUDE ÉPREUVE. ENTRE LES SÉANCES DE BRONZAGE ET LES BAIGNADES DANS L’EAU SALÉE OU À LA PISCINE, ON NE PENSE PAS TOUJOURS À S’OCCUPER DE SON BIENÊTRE CORPOREL. RÉSULTAT : PEAU QUI PELLE, TIRAILLEMENTS, CHEVEUX SECS ET POINTES FOURCHUES. MESDAMES, NE PANIQUEZ PAS IL N’EST PAS TROP TARD POUR AGIR ! 54 ÉTATS VOUS DÉVOILE SES SOLUTIONS BEAUTÉ POUR QUE VOUS SOYEZ RAYONNANTES DÈS VOTRE RETOUR AU BUREAU.

S.O.S Beauté POST-ÉTÉ

UNE PEAU SAINE SANS IMPURETÉS

Afin de se protéger contre les UV, l’eau salée et chlorée, l’épiderme s’épaissit et enferme des bactéries. Cela peut, d’une part, provoquer un excès de sébum qui se traduit par une peau brillante ou une poussée d’acné ou, d’autre part, un assèchement cutané qui lui se traduit par des tiraillements ou un teint pâle. Pour éviter ce drame, voici quelques étapes utiles à la réparation de la peau.

ÉTAPE 1 : FAIRE UN DIAGNOSTIC DE LA PEAU L’hydratation concerne toutes les peaux, même les plus grasses. Il faut donc avant toute tentative de soin, cibler le problème afin d’adapter au mieux sa routine beauté.

ÉTAPE 2 : HY-DRA-TER

Tout épiderme nécessite d’être hydraté même les peaux grasses. Ayant été exposé pendant plusieurs mois à la chaleur et aux rayons du soleil notre corps a évacué une grande quantité d’eau. Il faut donc rééquilibrer le niveau d’eau en utilisant des crèmes hydratantes adaptées mais surtout en buvant beaucoup car une bonne alimentation contribue fortement à la santé de notre peau.

ÉTAPE 3 : ENLEVER LES IMPURETÉS

Pour se débarrasser des boutons, des points noirs et des pores apparents rien de mieux qu’un gommage. Vous pouvez l’appliquer aussi bien sur le visage que sur l’intégralité du corps. Mettez une noix de votre gommage sur votre doigt, étalez-la sur la zone choisie puis massez d’un geste circulaire pendant 2 à 3 minutes, enfin rincez à l’eau claire. Effectuez ce rituel une à deux fois par semaine. Au delà, cela pourrait provoquer l’effet inverse avec l’apparition de boutons.

ÉTAPE 4 : CHOISIR SA CRÈME QUOTIDIENNE

La crème de jour que nous appliquons chaque matin sur notre corps joue un rôle clé. Il est donc essentiel d’en choisir une qui est adaptée à votre type de peau. Si vous avez une peau sèche optez pour une crème nourrissante, elle va agir en profondeur. Si votre peau est plutôt mixte à grasse, favorisez une crème fluide qui va hydrater, matifier et donc éviter à la peau de briller notamment sur « la zone T ». 60


DES CHEVEUX ÉCLATANTS, SOYEUX ET VOLUMINEUX Les cheveux aussi n’auront pas été épargnés cet été. Qu’ils soient défrisés, bouclés ou crépus le constat est le même et sans appel, ils ont perdu de leur beauté. Il va donc falloir davantage les soigner et les chouchouter afin d’éviter de passer par la case « ciseaux ». Voici quelques astuces.

FAIRE UN BAIN D’HUILE AVANT LE SHAMPOING

Coco, amande douce ou encore ricin : la palette est large. Autant d’huiles qui apporteront à vos cheveux les bienfaits nécessaires à leur éclat. En cas de dommages profonds, favorisez l’huile de coco qui est une des rares à pénétrer la fibre capillaire et à réparer les dégâts provoqués par le démêlage. Elle assure au cheveu le maintien des protéines dont il a besoin. Pour les cheveux crépus, frisés ou bouclés, l’huile d’amande douce comme son nom l’indique vous apportera plus de douceur et de flexibilité.

Comment faire ?

Rien de plus simple. Versez dans un vaporisateur l’équivalent d’une cuillère à soupe de chacune des huiles que vous souhaitez utiliser, ajoutez-y un peu d’eau, mélangez le tout puis vaporisez sur l’intégralité de la chevelure. Vous pouvez aussi utiliser les huiles pures sans y mettre d’eau. Laissez agir plusieurs heures avant le shampoing pour une meilleure efficacité.

UTILISER UN SHAMPOING NOURRISSANT

Avec les préjudices déjà engendrés par le soleil, le chlore et l’eau salée, vos cheveux peuvent se dispenser d’un shampoing trop agressif. Optez plutôt pour un shampoing nourrissant qui permettra de conserver les bienfaits du bain d’huile et de faciliter le démêlage. Appliquez ensuite un après-shampoing que vous laisserez agir pendant 2 à 3 minutes avant de rincer.

Quelle fréquence ?

Il est préférable de laver ses cheveux une à deux fois par semaine car au delà cela pourrait dessécher le cuir chevelu.

FAIRE UN MASQUE HYDRATANT ET RÉPARATEUR

C’est l’étape indispensable pour réparer la fibre qui a pu être endommagée et hydrater le cheveu en profondeur. Ceci est d’autant plus vrai pour les cheveux qui ont été fragilisés par le défrisage. Favorisez les masques au beurre de karité réputé pour leurs vertus nourrissantes. La durée de pose est variable. Certaines le laissent pendant une heure tandis que d’autres le laissent toute une nuit. Mais, plus vous gardez le masque plus il fera son effet.

Comment faire ? Appliquez le masque sur toute la tête et peignez les cheveux de la racine jusqu’aux pointes à l’aide d’un peigne à grosses dents. Ceci va permettre d’une part, de démêler plus facilement et d’autre part, de bien faire pénétrer le masque.

Quelle fréquence ? Il s’applique après chaque shampoing soit une à deux fois par semaine. Cependant vous pouvez en faire ponctuellement sans shampoing préalable.

L’ENTRETIEN AU QUOTIDIEN

Utilisez une crème de jour nourrissante que vous appliquerez une fois tous les deux ou trois jours pour éviter l’effet « cheveux gras ». Pensez à hydrater votre chevelure en la vaporisant d’eau de temps en temps. Pour dormir, faites une coiffure protectrice telle que des grosses nattes ou des vanilles, afin d’éviter les noeux indémêlables le lendemain. Gaëlle NGAKO 61


PORTRAIT

TENDANCE

Joseph

AYISSI

Donnez-lui une aiguille et du tissu rehaussé de son originalité et de sa touche personnelle et vous obtenez la marque WAZAL. Le jeune couturier franco-camerounais Joseph AYISSI ne manque pas d’entrain et est toujours à l’affût des dernières tendances afin de repousser les limites de la mode. Séquence portrait. LA MODE DANS LA PEAU C’est en observant depuis son plus jeune âge, son père couturier, que Joseph AYISSI s’est pris de passion pour ce métier. Simple hasard ou chemin déjà tracé ? Peu importe puisque c’est bel et bien cette voie qu’il a choisie d’emprunter. Le jeune styliste s’installe à Paris dans les années 2000 où des idées de projet lui viennent petit à petit. Mais c’est à l’âge de 21 ans, en 2005, que tout se concrétise et que naît la marque WAZAL. Il sort une première collection de t-shirts floqués portés par de nombreux artistes hip-hop. Passionné et toujours en quête de nouveautés, Joseph décide de donner à sa marque, plutôt axée jusque-là sur le style sportwear, une tout autre dimension. En effet, en 2013, il suit une formation au sein de l’école de mode Vanessa RUIZ afin d’apporter une touche plus « mode » à ses créations. Résultat : il est convié la même année par l’ambassadeur du Cameroun à une exposition et a l’honneur de présenter ses dernières collections lors de la FASHION NIGHT à l’Élysée Lounge de Paris.

Photographie fournie par M. Joseph Ayissi

ENTRE TRADITIONNEL, STREETWEAR ET ÉLÉGANCE Au vu de ses différentes collections, Joseph a su allier l’univers africain dans lequel il a grandi à celui de la tendance streetwear, le tout parsemé d’une touche d’élégance. Ses trois concepts : Wazal Rock, Africafutur et Braguette Tété les illustrent parfaitement. On retrouve particulièrement cette référence au continent africain dans l’utilisation du « Wax », tissu traditionnel de plus en plus convoité dans le milieu de la mode notamment par les grands couturiers occidentaux. C’est un tissu à imprimés colorés et très ethniques qu’il a intégré à des modèles à la coupe assez moderne et contemporaine. Par ailleurs c’est son pays natal, le Cameroun, qui lui a inspiré le nom de sa marque : « Waza » en référence au grand parc naturel camerounais et la lettre « L » du Lion, félin symbole du pays. Toujours armé de sa vision originale et futuriste, Joseph AYISSI développe de nouveaux concepts avec, d’une part, les robes Wazalionne. Loin des traditionnels diktats imposés par le milieu de la mode, ces robes sont conçues pour toutes les femmes. Le créateur propose, d’autre part, les vestes issues de la collection Braguette Tété. Ce sont des vestes de smoking avec des coutures apparentes rappelant la forme d’une braguette. Joseph n’hésite pas à jouer avec les matières en utilisant le coton pur, le molleton, le jean, le wax, le milano, le cuir ainsi que la fourrure synthétique. « La marque Wazal évolue avec des concepts s’appuyant sur des critères qui ont depuis le début symbolisé notre parcours : Audace, Respect et Création ». Une phrase prononcée par Joseph AYISSI lui-même qui résonne presque comme l’hymne d’une marque en ascension constante, pour le plus grand plaisir des passionnés de mode. Gaëlle NGAKO 62

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AUDACE, RESPECT ET CRÉATION

INFO + Site Internet : http://www.wazalshop.com Facebook : Wazal Couture Twitter : WAZALCOUTURE Photographies fournies par M. Joseph Ayissi

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INTERVIEW

MARIO

CANONGE Jazzman protéiforme

Artiste martiniquais, très tôt destiné au piano, Mario Canonge est souvent vu aux côtés de grands musiciens. Il allie à merveille le jazz aux saveurs caraïbes. Ainsi, en écoutant cet artiste, un entrelacement d’univers musicaux différents se fait sentir. Lorsque ses doigts caressent les sonorités suaves de son piano, le public en redemande.

Je suis au fond de moi un jazzman

54 ÉTATS : Quand on entend Martinique, puisque c’est vos origines, on ne pense pas immédiatement à un instrument aussi classique que le piano, alors pourquoi vous avez choisi de pratiquer cet instrument ? Mario Canonge (M.C.) : Il y a depuis très longtemps, une grande tradition de piano à la Martinique. Il y a énormément de pianistes martiniquais, je ne suis pas le seul, j’ai beaucoup d’illustres ainés et la relève est assurée puisqu’il y a énormément de jeunes dotés d’un talent incroyable. Et puis, en dehors du piano, toutes les Caraïbes sont des terres de culture, que ce soit pour la peinture, l’art plastique, la littérature ou la musique. 54 ÉTATS : Vous avez plus de 30 ans de carrière, nourris par les studios, la scène, les duos, les compilations, etc. Quelle forme musicale préférez-vous particulièrement ? M.C.: Pour moi, toutes les formes musicales sont intéressantes et différentes. C’est vrai que le trio, très courant en jazz est une forme qui me convient très bien, notamment pour la complicité qui s’en dégage. Quand je parle de trio en général je parle de piano, basse et batterie, ou alors piano, contrebasse, batterie. C’est une formule qui est assez complète puisque le piano peut s’apparenter à un orchestre grâce aux harmonies. Je l’utilise également dans ma musique teintée « caraïbes ». Je joue aussi en solo, en duo avec un contrebassiste ou avec un chanteur, et même dans des orchestres où on est plus nombreux.

© Marc Chesneau. Mario Canonge

54 ÉTATS : Vous allez bientôt aller au festival d’Essaouira. Avez-vous d’autres dates, d’autres événements prévus en Afrique ? M.C. : De mi-septembre jusqu’à fin novembre, je serai dans une grande tournée qui va durer deux mois et demi. Je vais jouer dans 24 pays d’Afrique avec un trio. C’est un nouveau projet qui s’appelle CAB. CAB comme Caraïbes, Afrique, Brésil ; CAB comme le taxi qui incite au voyage ou encore CAB, les initiales de nos noms, Marion Canonge, Blick Bassy et Adriano Tenorio. 54 ÉTATS : Tout artiste à des sources d’inspiration, et vous dans quoi vous puisez cette énergie et cette sensibilité qu’on peut entendre dans vos chansons ? M.C. : D’abord, je suis au fond de moi un jazzman. Mais en même temps je ne suis pas américain. Donc j’ai grandi avec des airs caribéens, avec des airs latins, avec du jazz et aussi avec des airs qui venaient de la variété française. Je me suis construit avec tout cela quand j’habitais en Martinique. J’adore également la musique classique. Mon inspiration c’est un mélange de tout cela. Mais pour moi ce qui est important c’est le goût musical. 64


54 ÉTATS : Vous avez donc un réel univers ! M.C. : Oui et je suis un musicien de la rue. Je n’ai pas appris le piano dans les conservatoires et autre formation classique. 54 ÉTATS : Qu’est-ce qui fait votre originalité ? M.C. : Mon truc, c’est de créer des mélodies que l’on peut siffler ou fredonner en faisant son jardin. Des airs que l’on retient facilement. Cet exercice n’est pas aisé contrairement à ce que l’on pourrait penser. C’est justement tout l’art de feinter. 54 ÉTATS : C’est le talent. 54 ÉTATS : Quel est votre morceau préféré dans votre dernier album Mitan ? Et pourquoi ? M.C. : Mon opus préféré n’est pas celui que les autres préfèrent. C’est le morceau qui s’appelle « la fleur de terre ». Il me donne l’impression d’être justement à fleur de terre, d’être toujours en suspens, sans arrêt. C’est comme si j’allais ouvrir une porte, je l’entrouvre mais je ne l’ouvre pas. Et je change de porte, je fais pareil, je l’entrouvre mais je ne rentre pas. Voilà, et jusqu’au bout. C’est comme si j’allais respirer des senteurs, juste une fois. Je les hume, je m’en vais. 54 ÉTATS : Mais comment faites-vous pour toujours passionner votre public, pour l’étonner en permanence ? M.C. : Je me remets en question sans arrêt. C’est à dire qu’une fois que j’ai terminé un disque, je passe à autre chose. Je vais de l’avant. J’essaye de proposer des choses innovantes.

© Marc Chesneau. Mario Canonge

Julia BUQUET

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IBRAHIM MAALOUF

LE TRAIT D’UNION ENTRE L’ORIENT ET L’OCCIDENT De la scène musicale à la réalité journalistique, il n’y a parfois qu’un pas… Et, Ibrahim Maalouf, l’a franchi ! Non sans humour, non sans générosité, non sans humilité. À l’image d’un transformiste, il a troqué son habit d’artiste contre celui d’interviewé. Finissant à peine de nous envoûter avec ses sonorités métissées, le trompettiste s’est livré aux jeux des questions-réponses, sous un chapiteau dressé pour l’occasion, sans que la nuée de micros frénétiquement tendus n’entament sa bonne humeur. Le public d’Essaouira a été littéralement et définitivement conquis… la rédaction du magazine 54 ÉTATS aussi !

QUAND JE LIS LE TITRE DE VOTRE ALBUM « ILLUSIONS », JE PENSE DÉCÉPTION. L’AVEZ-VOUS IMAGINÉ DANS CETTE VEINE ? Le titre « Illusions » évoque les déceptions que l’on peut éprouver mais également la magie présente dans notre monde. Mon album aborde précisément ces deux aspects. D’ailleurs, les textes y figurant donnent les clés de compréhension. La musique commence par un état des lieux très cynique. Le début du concert s’apparente à une cérémonie funèbre. Progressivement, la musique se met à rayonner, devient positive et s’achève dans une ambiance festive. Je désirais dresser un constat triste et cynique de ce monde tout en laissant une place aux illusions et au bonheur. Au moins, si on fait semblant d’être heureux, on l’est pendant ce moment-là. C’est déjà ça !

QUAND J’ÉCOUTE VOTRE MUSIQUE, UNE MULTITUDE D’IMAGES ME VIENT À L’ESPRIT. À CONTRARIO, LES IMAGES L’INSPIRENT-ELLES ? Ah oui, complètement ! D’ailleurs, je pense que ma manière de composer est très cinématographique. Toutes mes musiques sont liées à des récits. Certains membres de ma famille écrivent très bien ; mais moi non. Alors, j’essaie de faire parler ma musique en puisant dans les références historiques, à la manière d’un roman d’anticipation. J’essaie de garder une longueur d’avance et de ne pas reproduire ce qui a déjà été fait. C’est mon mode de fonctionnement. Comme dans un laboratoire et tout en respectant l’histoire de la musique j’imagine ce que la musique pourrait être un jour. 66


VOUS DÉCRIVEZ LA MUSIQUE COMME UNE BOUÉE DE SAUVETAGE. POUVEZ-VOUS NOUS EN DIRE DAVANTAGE ? Enfant, la musique constituait mon seul lieu d’évasion. En grandissant, je me suis rendu compte qu’il était possible de faire de ce petit espace de liberté ma raison de vivre. La musique est devenue mon métier par nécessité, peut-être même par désarroi, et non pas uniquement par passion.

LE FESTIVAL D’ESSAOUIRA RÉSONNE-T-IL D’UNE FAÇON PARTICULIÈRE POUR VOUS ? Quand je suis venu en 2006, personne ne me connaissait. J’étais invité parmi d’autres à partager la scène, à découvrir la musique gnaoua. Aujourd’hui, je suis ravi de voir qu’au Maroc des gens connaissent ma musique. La réaction du public me touche énormément et j’espère que l’on reviendra avec le groupe un jour pour collaborer avec les Maâlems.

Ce que je trouve assez extraordinaire ici, c’est la diversité : le public se compose de personnes de tout âge, originaires d’horizons culturellement différents. Peu importe leur préférence musicale, tous viennent par plaisir pour partager ce moment de fête gnaoua, empreint de magie. Par delà la musique, par delà la culture, il existe ici un métissage extraordinaire.

DÉFINISSEZ-VOUS VOTRE INSTRUMENT DE MUSIQUE COMME UN CATALYSEUR DE CULTURES ? Oui ! Ne serait-ce que par ma trompette, inventée par mon père, qui me permet de jouer de la musique arabe et de garder en permanence un pied dans ma culture d’origine. Grâce à cet instrument, que je qualifie de métisse, je me sens tout autant arabe que français. Je m’ancre simultanément dans ces deux mondes.

Photographies provenant du site Internet de l'artiste Ibrahim Maalouf

Sandra WOLMER 67


INTERVIEW

META, LE MESSAGER DE LA PAIX « PEACE, LOVE AND HARMONY » À Essouira, Meta et ses musiciens venus des 4 coins du monde ont délivré une véritable invitation au voyage et un hymne à l’amour entre les peuples rythmés par leurs musiques chargées d’humanité. Touchant de simplicité, de pureté et de sensibilité, il a su transporter son public pour une échappée belle teintée d’émotions et de rêves. Focus sur cet artiste en plein envol. Comment vous êtes-vous créé votre univers musical ? Quand j’étais petit, ma mère chantait beaucoup à la maison. Elle mettait les cassettes de Youssou Ndour, de Bambouman, de Charles Aznavour, d’Edith Piaf. Elle chantait des airs indiens, de salsa, de baobab et elle écoutait Gregory Isaac, du reggae, … tous les genres de musique. À l’école aussi on chantait, on tapait sur les tables. Je sais que ça vient de là. J’ai toujours baigné dans une atmosphère musicale.

Vous avez quitté votre Sénégal natal pour aller aux ÉtatsUnis et percer dans le milieu de la musique, vous pensiez ne pas avoir les mêmes chances au Sénégal ?

META AND THE CORNERSTONES

Au Sénégal, je faisais du Rap mais il y avait déjà beaucoup de groupes et certaines personnes ne nous prenaient pas au sérieux, c’était nouveau. On portait les pantalons « check down », on arborait des bijoux clinquants, des chapeaux de côté. On se cherchait. Certains ont poursuivi là-bas. Mais moi quand j’étais petit, je rêvais d’apprendre l’anglais. Mon père vivait aux ÉtatsUnis, j’y suis allé pour faire sa rencontre et continuer de rapper. Mais je ne me suis pas senti connecté à la réalité du Hip-Hop américain. J’ai commencé à écouter du reggae et je m’y suis reconnu. Les messages que cette musique transmet me correspondaient totalement.

Photographie provenant du site archive.rockpaperscissors.biz. Le chanteur Meta Dia.

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Pensez-vous que le reggae est le vecteur le plus adapté pour faire passer les messages qui vous tiennent à cœur ? Quels sont–ils ?

© Julia Buquet

Oui, ce genre musical constitue le meilleur moyen d’exprimer mes idées. Et je dirais même, le reggae avec quelque chose en plus. C’est important d’écouter les autres musiques car toutes sont extraordinaires et intéressantes. J’aime ce que je fais : la fusion musicale des artistes et des pays. Il ne faut pas se cloisonner et s’enfermer dans une « petite boîte ». J’ai à cœur de mixer toutes les cultures car pour moi la musique dépeint l’humanité et exprime la paix, l’amour, l’harmonie. Je n’aime pas mettre en avant la tristesse, je veux amener les gens à regarder de l’autre côté, là où se trouve la beauté. Le soleil, la lune, la pluie, les arbres, les fruits, tout cela, c’est la beauté. N’importe où l' on regarde il y a de la beauté, nous devons êtes reconnaissants. Dans notre société, c’est l’argent qui dirige. Certaines personnes possèdent de l’argent mais ont besoin d’amis, de conseils ; les conseils n’ont pas de prix. L’argent ça va, ça vient. Mais pour ceux qui pensent avec le cœur, ce n’est pas l’essentiel. Tu as du riz pour manger, j’ai l’arachide, on échange ! #RIRES

Photographie provenant du site corsenetinfos.fr

C’est votre première fois à Essaouira. Cela représente quoi pour vous ? « Full vibes » ! Ça me fait vraiment plaisir de venir au Maroc et de jouer en Afrique, et puis, c’est la première fois que ma mère me voit sur scène pendant un live. Je suis très content de participer à un festival qui ne s’arrête pas à un genre musical particulier mais qui s’ouvre aux musiques du monde avec des artistes de styles différents. C’est fantastique de voir réunies ici toutes ces personnes venues de France, d’Afrique, d’horizons variés.

Dans votre chanson Silence of the moon, vous dites que « écrire une chanson c’est comme donner naissance à la vie », c’est ce que vous ressentez quand vous écrivez une chanson? Comment vous viennent vos textes ? Oui, c’est ce que je ressens. Les textes souvent me viennent comme ça, naturellement. Je voyage et j’essaye de discuter avec les gens. Par exemple, je suis allé en Espagne. J’ai parlé avec une dame qui m’a raconté l’histoire de l’Espagne devant un tableau représentant un homme jouant du flamenco. Ce moment m’a inspiré des images, des rêves et j’en ai ressorti des textes. De la même façon, je suis allé au Mexique, j’ai bavardé avec des personnes qui m’ont parlé des Mayas. L’inspiration me vient dans ces moments-là. Pour moi, il y a de la beauté partout dans le monde. Si j’arrivais à passer ce message à tous mes frères d’Afrique et d’ailleurs, ça me comblerait. Mes amis me disent: « I would go anywhere for love ». Je fais de la musique avec les sentiments et les harmonies.

Le mot de la fin : © Julia Buquet

Merci à vous et « peace, love and harmony ».

Julia BUQUET 69


B X O U C JA VARIE S E D N FO

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K!

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L’HOMME À LA VOIX ROCK QUI NOUS A FAIT DÉCOUVRIR LE « ZOUK » AUX RYTHMES DE SA GUITARE, IL Y A PRÈS DE 30 ANS, N’EST PLUS À PRÉSENTER. C’EST LE LEADER INCONTESTÉ ET COFONDATEUR DU GROUPE EMBLÉMATIQUE CARIBÉEN KASSAV’. NOUS LE RETROUVERONS AUX CÔTÉS DE SES ACOLYTES, LE 4 OCTOBRE PROCHAIN SUR LA SCÈNE DU ZÉNITH DE PARIS LORS DU « GRAND MÉCHANT ZOUK ». DANS L’ATTENTE, SÉQUENCE TÊTE-À-TÊTE AVEC L’HOMME !

54 ÉTATS : Vous êtes l’un des fondateurs du « ZOUK ». Ce phénomène musical est apparu à une période où des conflits socioculturels ont vu le jour aux Antilles. Notamment lorsqu’un énorme flux migratoire partant des Antilles vers la métropole a été organisé sous la loi Bumidom. La création de cette musique a-t-elle été une manière de revendiquer la culture antillaise et d’en faire une identité propre ? Jacob Desvarieux (J. D.) : Kassav’ plus qu’un groupe musical est l’empreinte d’un mouvement identitaire. PierreÉdouard Décimus, le fondateur du band, qui initialement faisait partie des Vikings s’est interrogé : « comment vaisje expliquer à mes enfants que papa faisait partie d’un groupe composé de musiciens noirs et dont l’appellation avait une connotation blanche ? ». La musique est en quelque sorte la photographie de celui qui l’a créée. Du coup, Vikings a laissé place à Kassav’. En plus d’être un nom local, il est prononçable dans toutes les langues, sans avoir besoin d’y mettre un accent particulier. Kassav’ reflétant l’identité profonde et les couleurs des Caraïbes. On y retrouve les parfums de l’Afrique, l’essence de l’Europe, et toutes les sonorités qui s’en accompagnent : soca, salsa, reggae, konpa, etc. 54 ÉTATS : Était-ce aussi pour garder cette identité que vous avez choisi de ne chanter qu’en créole ? J. D : Sur ce point on a été un peu extrêmes (rires). On s’est dit que si on apporte une musique de chez nous à des gens qui n’ont pas la même culture, autant la leur apporter brute. Le créole n’est pas plus un obstacle qu’une autre langue, car on écoute aussi des chansons anglo-saxonnes sans pour autant être anglophone ! De la Russie, au Japon, en passant par l’Afrique jusqu’en Europe, notre public a été et reste tout aussi réceptif qu’un public antillais. 70


54 ÉTATS : Avec une carrière comme la vôtre, que peut-on espérer de plus ? J. D : J’espère faire encore plus pour un jour réussir à toucher la planète entière et, de notre vivant, obtenir la consécration.

54 ÉTATS : Les Antilles sont françaises, par conséquent, le Zouk devrait être considéré comme une musique française. Pourtant elle est constamment classée dans la catégorie « musique du monde ». Selon vous, le zouk est-il une musique française ou une musique du monde ? J. D : C’est tout simplement une musique. Étant donné que nous chantons en créole, les médias ne nous considèrent pas comme un groupe français. Mais nous classer « musique du monde » est une façon de penser « musique du tiers-monde ». Celle-ci désigne le fait de prendre une musique anglo-saxonne pure et d’y faire chanter dessus, dans sa langue, un ressortissant du tiers-monde. Par la suite, le qualificatif « musique du monde » a été utilisé. On peut dire que la musique française est basée sur le même schéma, mais la France n’étant pas un pays du Tiers-Monde, on définira cela comme de la musique française. Allez comprendre !

54 ÉTATS : Avec le zouk, vous avez ouvert la voie et aujourd’hui d’autres l’ont suivie. Vous n’hésitez pas à collaborer avec les artistes de la nouvelle génération ainsi qu’avec des artistes aux antipodes de votre style musical. C’est le cas avec votre dernier tube qui n’est autre que le remix du légendaire « zouk la sé sel médikaman nou ni » par le DJ Bob Sinclar. Comment vous est venue l’idée de cette dernière collaboration avec le DJ ? J. D : C’est le DJ Bob Sinclar qui a écouté la chanson et a eu envie de la remixer. Il m’a simplement demandé de réenregistrer la voix autrement. Nous n’avons pas eu à intervenir artistiquement. On l’a laissé faire et on a écouté le morceau une fois fini. LES NUITS TROPICALES & AIR CARAÏBES PRÉSENTENT

54 ÉTATS : En parlant de musique du monde, vous avez vécu deux ans au Sénégal. Cela vous a t’il influencé musicalement ?

SAMEDI 4 OCTOBRE - 20H

PARIS-ZENITH

JEAN-MARC FERDINAND | JEAN-LUC ALGER | DALY | RALPH THAMAR FRED DESHAYES | LUC LEANDRY | MARVIN | JEAN-PHILIPPE MARTHELY JACOB DESVARIEUX | JOCELYNE BEROARD | KATHRYN THELAMON ZOUK MACHINE | FANNY J | PRINCESS LOVER | RIDDLA... Imp. : RL-Com • Licences 2-1000799 & 3-1000800

J. D : Oui, car tout ce que l’on vit nous influence. C’est là-bas que j’ai appris à jouer de la guitare. J’ai entendu des musiques que je n’avais jamais entendues auparavant et j’ai côtoyé des gens qui avaient une autre culture et une autre façon de penser. Par exemple, c’est assez anecdotique, au Sénégal, on m’appelait « le blanc » bien que je sois noir. Tout cela est dû aux stigmates de la colonisation européenne. L’antillais, a gardé en mémoire l’histoire de France et a oublié ses racines africaines.

Réservations : points de vente habituels

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54 ÉTATS : On dit souvent que les Antillais et les Africains ne forment qu’un seul et même peuple puisqu’ ils sont liés par l’Histoire. Cependant, tous les deux ne le reconnaissent pas forcément. Le fait d’avoir vécu et grandi aux Antilles et en Afrique, vous a-t-il permis d’avoir un regard différent face aux préjugés qu’ont les uns envers les autres ? J. D : L’Antillais a une tendance fâcheuse à renier ses origines africaines. Pour moi, tous les noirs du monde viennent d’Afrique et tous les blancs viennent d’Europe. Après, s’ils ont été élevés en Chine, ils penseront qu’ils sont chinois. Aujourd’hui, la majorité des îles situées aux caraïbes sont indépendantes donc la façon de voir les choses a changé. Mais les Antilles sont restées françaises, par conséquent ses habitants sont sencés être français. Cependant, on ne connaît pas notre propre histoire, du moins pas assez. On en prend conscience le jour où on arrive en métropole et que l’on se trouve confronté à la police des frontières qui vérifie notre identité. Ils ont du mal à concevoir qu’un noir puisse avoir un passeport français ! À ce moment-là, on constate qu’on ne nous considère pas complètement comme des Français.

04/08/14 11:20

54 ÉTATS : Vous êtes en pleine préparation de la 6e édition du « Grand Méchant Zouk » (GMZ), un festival que vous avez créé en 1988. Comment appréhendez-vous cette nouvelle édition ? J. D : Au départ, j’ai créé ce festival pour offrir une vitrine à la musique antillaise. On voulait faire savoir que l’on existe et que nous avons notre propre identité musicale. Depuis, on continue à le faire en introduisant quelques jeunes artistes du moment mais aussi des talents plus confirmés. 54 ÉTATS : Avez-vous des « actus » ? J. D : Depuis notre dernier album SONJE, sorti en 2013 et réalisé en la mémoire de Patrick St-Éloi, nous sommes toujours en tournée. Nous vous donnons d’ailleurs rendez-vous au Zénith de Paris le 4 Octobre prochain !

Gaëlle NGAKO 71


SPECIAL REPORT

EQUATORIAL GUINEA HOST OF THE 23rd AFRICAN UNION SUMMIT OUT : SHOVELS AND RAKES! IN: MECHANIZATION! The 23rd Ordinary Session of the Assembly of the Union was held in the coastal city of Sipopo, in Equatorial Guinea, from 20th to 27th June 2014, under the theme of “Agriculture and Food Security”. Let’s go back to this major rendez-vous which sets the pace for the African Union agenda.

“Transforming Africa’s Agriculture for Shared Prosperity and Improved Livelihoods through Harnessing Opportunities for Inclusive Growth and Sustainable Development”: This was the issue on which some 40 African Heads of State and Government focused their attention in the Sipopo Conference Center. And this is the challenge they still need to meet! And quite rightly! Although Africa has great agricultural potential and presents one of the highest growth rates in the world (exceeding five per cent on average), it has still not yet solved the hunger and food security problems: one quarter of the African population (either more than two hundred million people) continue to suffer from undernourishment. Agriculture is a major provider of employment (almost 60 % on the continent). The African agricultural sector consists mainly of small traditional farms and only serves to meet local needs. While production is decreasing, population is growing constantly. In addition, the continent has to face natural constraints such as climatic vagaries, drought and soil nutrient depletion. Issues are known and raised. Hence the necessity, as Mr Teodoro Obiang Nguema Mbasogo underlined, to deeply and properly restructure agriculture to turn it into a powerful tool for economic development. “We cannot talk of development in Africa if there is no agricultural development to avoid the permanent dependence on imports of consumer goods. Africa must invest massively in agricultural development for its transformation, in order to accelerate growth and increase productivity”. This calls for a substantial transformation through genuine reforms focused in particular on the setting up of adequate technology and infrastructure, the conservation of natural resources, the creation of an encouraging institutional and economic environment and the market organization. This is a sine qua non condition so that Africa can achieve its ambitious development goals.

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IS THE AFRICAN GREEN REVOLUTION UNDERWAY? IN THE WAKE OF MAPUTO In July 2003, in Maputo (Mozambique), African Heads of State and Government, recognising the importance of agriculture, created the Comprehensive Africa Agriculture Development Programme (CAADP) as part of NEPAD. They decided to improve and promote agriculture across Africa. Adhering to the Comprehensive African Agricultural Development Programme (CAADP), African Heads of State committed to achieve at least 6% annual agricultural growth and to allocate at least 10% of national budgets to agriculture. The Malabo Summit provides consequently an opportunity to reaffirm commitments and to reopen the issue of agriculture modernization. In his opening speech, Mauritania’s President, Mohamed Ould Abdel Aziz, the chairperson in office of the AU, called for the adoption of a declaration laying down the development of agriculture for shared prosperity. H.E. Ms Nkosazana Dlamini-Zuma, the chairperson of the African Union Commission stated that the problems relating to hunger, food security and poverty in rural areas could only be resolved through development of agricultural markets, growth in agricultural production and productivity, marketing of value-added products, research and a better access for women and young people to land and capital: ”We pledge to increase investment in agriculture as well as productivity. We have a list of initiatives at the continental level, but we need to do more and do it faster, which includes working on more specific projects, such as funding for rural women, but also for issues of energy, transportation, etc. The average age of our farmers is very high, and young people are not interested in the sector. This is a sign that African agriculture is still traditional and not modern. We need to use machinery and technology once and for all”.

© Julia Buquet. 23e Sommet de l'Union africaine.

Nevertheless, to date, only a small minority of the signatories to the Protocol have honoured the pledges made in the past. The African Union, for its part, has not been able to truly implement its green revolution having failed to mobilize and deploy all the necessary means and resources in its Member States. Africa is then constantly obliged to refer to its partners worldwide. This 23rd Summit ended with the adoption of the Malabo Declaration under which African Heads of State and Government expressed their « Recommitment to the Principles and Values of the CAADP Process, Commitment to Enhancing Investment Finance in Agriculture, Commitment to Ending Hunger in Africa by 2025, Commitment to Halving Poverty by the year 2025, through Inclusive Agricultural Growth and Transformation » Some will consider this declaration as verbiage, other as prospects of great advances. At a time when Agenda 2063 is laying down the foundation for “an integrated, prosperous and peaceful Africa, an Africa driven and managed by its own citizen and representing a dynamic force in the international arena”, this Summit might mark the start of the African Green Revolution making the agricultural sector the cornerstone of this ambitious project.

Sandra WOLMER

INFO + BAN KI-MOON’S WILL

© Gates Foundation

Welcoming the initiative of an international conference on Development scheduled to take place in July 2015 in Addis-Abeba (the AU headquarters in Ethiopia), UN Secretary-General Ban Ki-moon, as underligned by H.E. Ms Dlamini-Zuma, spoke in favour of the development of agricultural markets, the growth in agricultural production and productivity and the increased marketing of value-added products. Moreover, he stressed the necessity to pursue actions in order to eliminate illicit flows, to fight against inequalities, to enhance access to social protection, etc… Mr Ban Ki-Moon, recalled that good environmental management will help to achieve economic and social development. Unsurprisingly, he didn’t forget to evoke the climate change issue, which is vitally important for Africa’s development and called for renewed global solidarity to tackle the challenge of climate change, calling for keeping the global average temperature increase below 10°C. 73


SPECIAL REPORT

MOROCCO THE GOOD PLAN

In Rome, on Monday June 16th, during the FAO Fighting Hunger Awards Ceremony, Mr. Aziz Akhannouch, Morocco’s Minister of Agriculture and Marine Fisheries, received a prize in recognition for its “remarkable progress” in fighting hunger. A way to credit Morocco with reducing undernourishment among its population to under 5 percent, in line with specific targets set by UN Millennium Development Goal 1 to reduce hunger and poverty by the year 2015.

Within five years, 55 billion dirhams (4.9 billion euros) have been made available for the Green Morocco Plan by means of public/private financing. This amount is forecast to reach 66 billion by 2015 and is supposed to lead, according to the information communicated by the Agriculture Ministry, to an increase in the number of farms. Their number is predicted to grow from 200,000 in 2008 to 1.7 million in 2013. This upward trend should result in turn in a 43% increase in the agricultural production. Exports would have risen exponentially -+55% over the past five years - to 26 billion dirhams as compared to 14 previously. In the meantime, the total area of cultivable land is expected to have jumped from 450,000 to 8,000,000,000 hectares.

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JOBS

© Cédric Meurens / CEDREAMS

THE UNITED NATIONS HAS RECOGNIZED THE POSITIVE ACHIEVEMENTS OF THE GREEN MOROCCO PLAN. LAUNCHED IN 2008, THIS PLAN AIMS TO FIGHT AGAINST HUNGER AND MALNUTRITION. UNSURPRISINGLY, FAO DIRECTOR-GENERAL JOSE GRAZIANO DA SILVA PUTS FORWARD THE CHERIFIAN KINGDOM AS AN EXAMPLE. HOWEVER, THERE IS NO ROOM FOR COMPLACENCY IF RABAT WANTS TO KEEP UP THE PACE IN SUSTAINABLE DEVELOPMENT EFFORTS.

CREATED Rather simply ensuring that land can be accessible to the largest number of people, the plan elaborated by Morocco is said to have contributed to the rise of the level of mechanization, in particular by developing irrigation mechanisms. Whereas the use of tractors is said to have tripled and the use of seeds to have jumped by 50% over the same period, special emphasis would have been given to the issue of irrigation. The Moroccan Minister confirms these assertions stating that: « this program provides an answer to the challenges posed by the scarcity of water resources and the valorisation of these increasingly scarce resources. » More specifically, a water saving policy has been identified as a priority: the underlying idea is to allow the shift from expensive irrigation to more sparing drip systems. According to Mr Aziz Akhannouch, Morrocco «has already changed the shape of its agriculture and has laid down the foundations of a new agrarian order».

Obviously, the expected effects –from a socioeconomic point of view– are most encouraging. Whereas the gross domestic product is estimated to have recorded solid growth (+32%), significant strides would have been made in the field of employment: +23% for 77,000 safe permanent jobs. Moreover, the per capita food availability would have risen by 14% over these five years. A confirmation of this trend is expected in the next coming years. Morocco remains convinced of the appropriateness of this strategy defined in the following terms by the Minister: “strong, intersectoral and integrated (which) ensures a long term view and aims at promoting sustainable and innovating agriculture in order to be competitive and socially integrated”

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© mikl.b

SATISFECIT As Jose Graziano da Silva underlines it “The Green Morocco Plan” that promotes the sustainable growth in agricultural production has played a major role in achieving this goal” (that is: the decrease in the number of undernourished people). According to the FAO Chief, this achievement takes on even greater significance given that it takes place two years ahead of the deadline initially set. Besides, he considers that Morocco can make a meaningful contribution to other African countries towards agricultural development. Sharing experiences and expertises is considerable and provides genuine opportunities for countries able or willing to draw inspiration from them. This satisfecit puts forward the Cherifian Kingdom as a true example for the International Institutions.

However this extreme optimism is not shared unanimously. This is the case of Najib Akesbi, an economist teaching at the Institute of Agronomy in Rabat, who is speaking about « an important manipulation of figures serving the purpose of backing up a broad communication campaign ». From his point of view, Morocco government heads in the wrong direction promoting « a two tier agricultural model which falls under a productivist model dating back to the fifties »; this model precisely proved to have limitations in European countries. According to Mr Akesbi « the PMV does not focus on food safety. On the contrary, it aims at scheduling food insecurity! »

Ministerial authorities remain indifferent to this criticism, the target being clearly defined: it’s high time for Morocco to strengthen this dynamics focusing on different projects. Research and Development sectors but agricultural training as well appear to be priority areas in order to guarantee the growth of modernised agriculture. This will require gradual dismantling of State involvement and greater accountability from all agricultural stakeholders, from small producers to agri-industry giants. In that sense, at least six agropoli are to be created in different regions, whereas a new parcel (the fourth one) of 20,000 hectares should be dedicated to small scale projects.

© salmidz

Traduction en anglais par Sandra WOLMER

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WHITE FARMERS CAN’T OWN LAND IN ZIMBABWE

© james.harris.anderson

SPECIAL REPORT

President Robert Mugabe has launched a fresh attack on the remaining white farmers in his country to cede lands to black Zimbabweans. Speaking to farmers in Mhangura a small town that is 120 miles away from the Capital Harare, Mr Mugabe said to his supporters, “We say no to whites owning our land and they should go.”

© Harar Wanag. President Robert Mugabe.

Mr Mugabe, who is Africa’s oldest leader and among the continent’s longest serving presidents, also vented his anger at some of his cabinet ministers after discovering some of them have been sub-leasing land that was revoked back in 2000. He told the crowd, many of whom were his Zimbabwe African National Union Patriotic Front (ZANU PF) supporters, “We fought these people. We can’t be soft on them when it comes to land.” The white Farmers Commercial Union director Hendricks Oliver, told the BBC focus on Africa it was regrettable that racial tensions is starting to flare up again. He said “There are between 100 and 150 farmers,” left in the country. He added those farmers are ready to move forward and work with Mugabe’s government.

“They can own companies and apartments but not the soil. “It is ours and that message should ring loud and clear in Britain and the United States.” The 90 year-old dictator, who has ruled the country since independence from Britain in the 1980s, wants all the white farmers to leave their farms and indigenous black Zimbabweans should stop renting their farms to the whites. BRIEF HISTORICAL CONTEXT The minority Zimbabwean white population originated from Europe (mainly the United Kingdom) and some from South Africa who also trace their origin from Europe. They first arrived in Zimbabwe formerly Southern Rhodesia in the 1890s. In 1918, the judicial committee of the Privy Council in London ruled that the land was owned by the Crown. The white minority self government was granted in 1923, therefore the Southern Rhodesia House of Assembly as it was then known introduced a framework for the allocation of land, which was known as the Land Appointment Act of 1930. The 1930 Act removed many indigenous black Zimbabweans from lands they had held for generations and those laws subsequently continued until independence. After Zimbabwe gained its independence in 1980, the need for land reform started emerging as this was a long standing issue. The whites representatives of the commercial farming sector also acknowledged it. Old policies which gave ownership of huge tracts of arable land to the minority white famers needed to change. Before, the introduction of the fast-track land reform in mid 2000, government figures in Zimbabwe, revealed about 4,500 white farmers, owned 32% of the country’s agricultural land which is around 10 million hectares. However, more than one million black families were struggling to survive on land that was allocated to them by the colonial government. And during the 1990s land was seen as an alternative source of income and food security to those in big towns and cities who were struggling with the growing unemployment and high cost of living.

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THE FAST TRACK LAND REFORM PROGRAM In February 2000, the Mugabe government organised a referendum to change the constitution which will empower his government to amend any laws it wished. However the new constitution was defeated by 55% to 45% despite having large majority in parliament. The new constitution would have automatically given power to the government to compulsorily take back land from white farmers without any compensation. Few days after the referendum defeat, pro-governments youths and some War veterans organised several people to march with drums, sing songs and dance on farms that were harvested by white farmers. In July 2000, the Mugabe government formally announced the introduction of the land reform, declaring it would seize more than 3,000 farms which will be redistributed to indigenous black Zimbabweans. The white farmers were forced to leave the farms. According to Human Rights many black Zimbabweans didn’t benefit from the land seizure. Many were left without land or employment. And the organisation accused some war veterans of killing white farmers and several tens of black farm workers. Many farms were taken up by squatters and some top officials in the government. The commercial Farmers Union (CFU) which represented large scale of commercial farming in Zimbabwe challenged the new land reform in courts but their efforts was fruitless.

© Zim Guardian in Pictures Zimbabwean white farmers standing outside the farms which have been seized

© Zim Guardian in Pictures Zimbabwean white farmer standing outside the farms which have been seized

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POLITICAL AND ECONOMIC CONSEQUENCES Before the introduction of the socalled fast-track land reform in 2000, Zimbabwe had one of the strongest economies in Africa. The country was very rich in agricultural produce and was described as the “Bread basket” of the Southern African region. However, the land seizure in 2000, alienated the country from the international community. As a reaction to the fast-track land reform, the country was put on an economic embargo by the West. Mugabe and his top cabinet ministers were banned from travelling into the UK, the USA and the EU. The USA government placed the Mugabe government on a credit freeze in 2001 through the Zimbabwe Democracy and Economic Recovery Act of 2001. This restricted the country from Multilateral finance and it subsequently collapsed the trade surplus from $322 million trade surplus in 2001 to a trade deficit of $18 million in 2002 and much more as years went by. Since the land reform began in 2000, crops such as maize, coffee and tobacco production has declined significantly. As a result the country now struggles to feed its own people, 45% of the population is considered to be malnourished. The production of Maize which is the staple food for most Zimbabweans has reduced by 31%.

BACK TO RECOVERY

Many critics in Zimbabwe and Western nations such as the UK, the USA and the EU blame the Mugabe regime for the country’s economic meltdown. According to a Bloomberg report, in 2000, Zimbabwe was the second largest tobacco exporter in the world but seven years later, the country slipped to sixth place. Between 2000-2008 the International Monetary Fund (IMF) reported the economy shrunk by 40 percent and in 2008, the organisation estimated inflation had reached its highest in the country’s history by 500 billion percent. This led to the shortage of fuel, electricity and empty shelves in supermarkets. In February 2009, the Harare government approved to abandon the Zimbabwe dollar and use mainly foreign currencies such as the South African rand and the US dollar, a move which helped to halt the hyperinflation in the country.

Even though, unemployment rate is still high in Zimbabwe, the years of economic meltdown seems to be over. The ravaged tobacco production has finally recovered. According to the country’s Tobacco industry and Marketing board, this year’s production has equalled 2001 levels. Agricultural Minister Joseph Made has told Bloomberg, his country’s biggest Tobacco sale in 13 years “Vindicates the land transfer campaign pursued by President Mugabe and his government.” Some people in Zimbabwe sees the President’s comments as surprising and have argued Mr Mugabe is trying to divert attention from the worsening unemployment and the closure of some firms in the country. Mugabe’s arch rival Morgan Tsvangirai, recently told the president to deliver his false promises of creating jobs, which he promised the people during the election campaign last year. President Mugabe was re-elected president last year with 61% of the vote, defeating Morgan Tsvangirai, his long time standing rival. The president’s ZANU-PF party also won majority of the parliamentary seats. Baillor JALLOH

© Pan-African News Wire File

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ORGANIC AGRICULTURE IN UGANDA © syaolyao cska

The World Bank has predicted Uganda’s economy will grow by 6.2 percent in the 2014/15 financial year. The country owes this continued economic growth mostly to its agricultural sector which remains the backbone of the country’s economy.

With the country’s economy depending mostly on agriculture, Uganda led the way in making a bold decision of transforming conventional agriculture into an organic farming system in the early 90s. The country’s farmers use one of the lowest amount of artificial fertilizers in the world. In Africa Uganda is ranked as the country that uses the least amount of artificial fertilizer to grow crops in their farms. The low amount of chemical inputs, which at the beginning was due to financial constraints to access, has been transformed into an economic advantage which is now beneficial to society and the environment as a whole.

WHAT IS ORGANIC AGRICULTURE? According to the USA National Organic Board (NOB), Organic production is a «Production system that is managed in accordance with the Act and regulations in this part to respond to site-specific conditions by integrating cultural, biological, and mechanical practices that foster cycling of resources, promote ecological balance, and conserve biodiversity.” It excludes the use of synthetic inputs such as fertilizers, pesticides and drugs. © syaolyao cska

BIRTH OF ORGANIC AGRICULTURE IN UGANDA Two decades ago, few commercial companies and NGOs began to invest in organic agriculture, and at the same time the Ugandan government invested lots of capita on training and developing a sustainable agriculture as the means of improving people’s livelihood and reducing the country’s dependency on international aid. Therefore, Uganda’s private sector promoted the practice until 2001, then an idea came up to form the National Organic Agricultural movement of Uganda (NOGAMU), an organisation that unites and protects the interest of organic farmers, processors and exporters to develop the organic sector. NOGAMU was founded in 2001. The country also adopted the Uganda Organic Standard in 2004 and in 2007 joined in the regional standard (the East African Organic Products Standard), which includes

Rwanda, Kenya, Burundi and Tanzania. According to the United Nations Environmental Programme (UNEP), ten years after the beginning of Organic farming in Uganda, the country was ranked the biggest land area under agricultural production in Africa and the 13th largest in the world. At the end of 2004, the country had around 185,000 hectares of land under Organic farming, which consisted nearly three percent of agricultural land, with 45,000 approved farmers. By 2007, the land under organic agricultural production had increased to 296,203 hectares and the number of farmers to 206,803 certified farmers. This was a 60 percent increase in terms of acreage from 2002-2007.

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ECONOMICAL, SOCIAL AND ENVIRONMENTAL BENEFITS OF ORGANIC FARMING IN UGANDA. According to a survey by UNEP in 2012, four out of five Ugandans is now a small farmer. They use traditional method to grow their crops, with limited help from synthetic fertilizers or pesticides. In the world that we live in today, the demand for organic products is increasing as quickly as non organic crops and the traditional practices, common mostly in third world countries such as Uganda has created lots of opportunities for farmers. Since Uganda became a significant organic producer in early 2000, the country has benefited from an important source of export revenues and earnings for farmers. A study commissioned by UNEP in 2006 indicates Ugandan certified organic exports increased from US 3.7 million dollars in 2003-2004 to 6.2 US million dollars in 2004-2005 and then jumping to 22.8 million dollars in 2007-2008 respectively.

© Retlaw Snellac Photography

© Gates Foundation

The organisation concluded that in terms of farmers income and price premiums, in 2006 the farm gate prices of organic pineapple were 300 percent, ginger 185 and vanilla 150 percent higher than conventional products. In June 2012, representative of the Ugandan government and its private trade association went to Rio to tout their nation’s place as a major producer and exporter of organic products, including coffee, cotton, fresh and dried fruits. The green economy has become very important to the people of Uganda. It has created lots of opportunities and has lifted lots of people from poverty including farmers and traders in a way that is more sustainable and a method that can protect the environment.

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However, a UNEP report also revealed that an average pineapple in 2011 was around 200 Ugandan shillings (about 8 cents US) and in a local market it will cost 600 to an exporter who will package and send it to Europe. Exporters like Biofresh has produced stable jobs for many Ugandans, they also promote education and further development of organic farming. In 2011, at a United Nations conference on least developed countries in Istanbul Turkey, Musa Muwang, the CEO of NOGAMU said, “The main benefit I’ve had from organic agriculture is an income. “I’ve been able to educate my children, and I’ve also been able to harvest enough food to feed my family.” Mr Muwang’s testimony also proves how this environmental friendly method of farming has lifted many people in Uganda out of poverty. As the country enjoys huge export boom, it is worth mentioning that it is not all of Uganda’s organic products that are exported out of the country. NOGAMU has a shop which offers a delivery service in the capital city to supply a modest but a very high demand from local homes and hotels. The local’s organic favourites include staple foods such as millets, local vegetables, matooke (steamed

bananas), cassava, fruits and juices and other livestock products including eggs. However, the greener method of farming is not only benefiting the poor farmers or traders economically but also the farmers health and the country’s environment as whole. A research published in Environmental Health Perspectives in 2003, by the School of Public Health and Community Medicine in Washington, showed that consuming organic products may lower children’s exposure to potentially damaging pesticides. According to the research the “Consumption of organic produce appears to provide a relatively simple way for parents to reduce their children’s exposure to Organophosphate poisoning (OP) pesticides.” Scientific research has also proved Conventional farming emits an additional two-thirds as much green house gas, spray pesticides that can be dangerous to farmers and their families and the use of synthetic fertilizers that can destroy the aquatic ecosystem. Research at the Rodale Institute has also shown that organic practices can remove about 7,000 pounds of carbon dioxide from the air and sequester it in an acre of farmland per year.

CHALLENGES FACING ORGANIC FARMING While past and present success is visible, Uganda’s organic farming also faces challenges. Producing certified organic crops needs patience and advanced training in the effective of organic technique to battle familiar farming challenges such as pests and soil degradation. Farmers also need to be educated in the ultimate economic benefits of adopting a more cost effective method of agriculture. There are some schools and other training opportunities that promote organic farming practises in the country, however, more are needed to continue economic growth. In the main time, future growth is still possible because of organic rewards and incentives which is in the form of large quantity of export. According to the International federation of Organic Agriculture Movement (IFOAM), global sale of organic food and drink was around 59 billion US dollars in 2010. The organisation concluded growth did slow down when the financial crisis started in 2008, but sales have continued to increase at a healthy pace since the economic recovery began. Baillor JALLOH

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UN CONTINENT, 54 ÉTATS Plus d’1 milliard d’habitants très inégalement répartis sur 30 415 873 km2 soit 20% des terres émergés ou 55 fois la France.

SOUTH SUDAN

REPÈRES PAYS PAR PAYS : POP : population (en millions d’habitants, 2012) IDH : classement des pays en fonction de l’indice de développement humain établi par le Programme des Nations unies pour le développement (2011) du 1e au 47e : très élevé – du 48e au 94e : élevé – du 95e au 141e : moyen – du 142e au 187e : faible PIB/HAB. : produit intérieur brut par habitant en parité de pouvoir d’achat (en dollars, 2012) IIGA : indice Ibrahim de la gouvernance africaine (2012) Élaboré par la fonction Mo Ibrahim à partir de 88 indicateurs, il mesure la qualité de la gouvernance dans chacun des pays d’Afrique : plus il tend vers 100, meilleur est la situation. NOTES : a République centrafricaine, b République démocratique du Congo, c Sao Tomé-et-Principe, d La moitié sud de l’État du Soudan a fait sécession en 2011, devenant l’État du Soudan du sud, e Guinée équatoriale.

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AFRIQUE AUSTRALE

AFRIQUE DU SUD

ANGOLA

51,77 POP : 123e IDH : 7508 PIB/HAB : 1 221 037 SUP :

BOTSWANA

20,8 148e 5700 1 246 700

LESOTHO

MALAWI

2,2 160 1 193 30 355

2 119e 14040 581 730

MOZAMBIQUE

NAMIBIE

25,8 184 590 799 380

15,9 170 1051 118 484

2,3 128 5666 824 270

SWAZILAND

1,2 141 3831 17 364

ZAMBIE

ZIMBABWE

13,9 163 2006 752 612

12,9 173 776 390 757

AFRIQUE CENTRALE

BURUNDI

POP : IDH : PIB/HAB : SUP :

CAMEROUN

8,3 178 255 27 834

CENTRAFRIQUE

21,7 150 1268 475 442

CONGO

4,7 180 446 623 000

GABON

1,5 106 8 850 267 667

4,3 142 3 408 342 000

GUINÉE ÉQUATORIALE

RDC

SOMALIE

SOUDAN

1 114 136 15 500 28 051

RWANDA

11,4 167 730 26 338

70 186 272 2 345 409

SAO-TOMÉ ET PRINCIPE

0,2 144 1402 1 001

TCHAD

12,2 184 1091 1 284 000

AFRIQUE DE L'EST

DJIBOUTI

POP : IDH : PIB/HAB : SUP :

ERYTHRÉE

0,9 165 2700 23 200

ÉTHIOPIE

6,2 181 498,7 117 600

KÉNYA

93,8 173 437,1 1 104 300

OUGANDA

44 145 950,9 580 367

34,9 161 586 236 860

10,2 600 637 657

34,8 2600 1 790 000

SOUDAN DU SUD

11,56 15 644 329

TANZANIE

48 152 588 947 300

AFRIQUE DE L'OUEST

BÉNIN

POP : IDH : PIB/HAB : SUP :

BURKINA FASO

10,3 166 810 112 622

NIGER

NIGÉRIA

POP : 16,6 IDH : 186 PIB/HAB : 374 SUP : 1 264 000

CAP-VERT

16,8 183 729 275 500

COTE D'IVOIRE

SÉNÉGAL

166 153 2688 923 773

GAMBIE

24,1 168 1175 322 463

0,5 132 3 908 4 033

SIERRA LEONE

13,7 154 1402 196 007

GHANA

1,8 168 1600 11 295

25,5 135 1 730 238 537

GUINÉE BISSAU

1,6 176 1149 36 125

GUINÉE

11,5 178 588 245 857

LIBÉRIA

4,1 174 485 111 370

MALI

14,8 182 1341 1 241 231

TOGO

6,3 177 729 71 740

6,4 159 670 56 785

MAGHREB ET MOYEN-ORIENT

ALGÉRIE

EGYPTE

POP : 38 IDH : 93 PIB/HAB : 7 180 SUP : 2 381 741

LYBIE

85,3 113 3 111 1 002 000

MAROC

6,1 64 9 800 1 759 500

MAURITANIE

33 130 1 126 446 550

3,72 155 1 126 1 030 700

TUNISIE

10,7 94 3090 162 155

OCÉAN INDIEN

COMORES

POP : IDH : PIB/HAB : SUP :

0,8 169 920 1 862

ÎLES MAURICE

1,3 80 8 120 1 865

MADAGASCAR

22,9 151 447,5 592 000

SEYCHELLES

88 46 13 000 455 83


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