VENTE AU NUMÉRO FR. 4.90 ABONNEMENT ANNUEL (12 NUMÉROS) FR. 39.–
Mars 2013 • www.saison.ch
Le magazine culinaire de bon goût
Elizabeth Gilbert Chez la célèbre auteure américaine, c’est l’homme qui est aux fourneaux
Bouilli de bœuf
Lángos hongrois, bannock écossais ou chapati indien, les pains du monde s’invitent dans votre cuisine.
à
Croustillants
l’A 2 × À G u 1 de be dé A G B a rg e g u N E n g Z s ta R : er um tio te L n n öw BE e n
Le grand classique flirte avec les saveurs d’ailleurs
ÉDITORIAL |
Histoires et petits plats d’une aïeule PHOTO: CLAUDIA LINSI
Chère lectrice, cher lecteur,
L
a place de la femme «est à la cuisine, les pieds en éventail et un verre de vin à la main». Non, ce n’est pas une femme frivole qui l’affirme, mais l’époux d’Elizabeth Gilbert. Cette auteure américaine publia en 2006 un premier roman autobiographique intitulé Mange,
prie, aime. Son succès fut phénoménal. Des millions d’exemplaires vendus de
par le monde – le livre a été traduit en plus de 30 langues – et, en 2010, une adaptation sur grand écran avec Julia Roberts et Javier Bardem dans les rôles
principaux. L’automne dernier, l’écrivaine de 43 ans sortait un ouvrage d’une tout autre dimension: avec des recettes de son arrière-grand-mère ponctuées d’anecdotes. Ma collègue Sacha Verna a eu la chance de s’entretenir avec Christine Kunovits, rédactrice en chef
Elizabeth Gilbert sur l’amour qui la lie à son mari José et celui qu’elle ressent pour son arrière-grand-mère Gima. Elles ont également évoqué le sujet de l’écriture et de la gastronomie. L’auteure nous révèle ainsi ce qui l’a motivée à publier ce livre (en la lisant, je découvre une véritable âme sœur), pourquoi elle vit dans une petite ville provinciale du New Jersey (j’ai grandi dans un endroit similaire) et que chez elle, les petits plats, c’est son homme qui les mijote. Parmi les rubriques de ce numéro, l’une vous invite à mettre la main à la pâte et à confectionner des galettes du monde entier: chapati indien, bannock écossais et lángos hongrois – ce dernier selon une recette de ma mère. Comme d’habitude, Ralph Schelling est également au rendez-vous avec de délicieuses créations. Vous trouverez aussi au fil des pages des suggestions pour un exquis menu de Pâques, des idées surprenantes pour donner un brin d’originalité à votre bouilli de bœuf ainsi qu’un reportage passionnant sur Marseille, la Capitale européenne de la culture 2013. Cordialement
Christine Kunovits
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| SOMMAIRE
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Métissé: le bouilli de bœuf se marie très bien avec le chimichurri, comme avec d'autres ingrédients exotiques.
10 PAINS DU MONDE Galettes et autres savoureuses spécialités à faire chez soi.
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26 PÂQUES Des mets au cœur tendre pour la fête pascale.
Dissimulés: les muffins aux amandes ont le cœur tendre, comme tous nos mets pascals.
36 Convoité: ce coquetier chic vous est présenté dans notre rubrique Sur le feu.
52 HORIZONS Marseille, ville du sud de la France, est la patrie de la bouillabaisse. 58 DÉLICE DORÉ A Bangerten, l'Auberge Zum Löwen sert des frites tout simplement parfaites.
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Enjouée: Annick Jeanmairet invite le printemps à table.
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44 AU QUOTIDIEN Comment Ralph Schelling prépare des mets savoureux en un clin d'œil.
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Panachée: mosaïque de cultures, Marseille est aussi diverse que sa bouillabaisse.
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ET AUSSI… 6 9 18 24 42 62 64 65 66
Sur le feu Offre aux lecteurs: fer à bricelets Migros MSC: morue de la Baltique Chez Annick: tarte aux oignons nouveaux aha!: des crostini sans gluten et sans lactose Voyage en Ecosse Concours / Solution et gagnantes du mois de janvier Impressum / Avant-goût A dévorer des yeux: Les noces paysannes de Pieter Bruegel
65 Service lecteurs et abonnés
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PHOTOS: ANDREAS THUMM, CLAUDIA LINSI, BALL & ALBANESE, YOHANNE LAMOULÈRE, PIA GRIMBÜHLER, LEE JAKOB; COUVERTURE: RUTH KÜNG
36 BOUILLI DE BŒUF Le grand classique joue les accords internationaux.
Dévoilés: l'auteure de best-sellers Elizabeth Gilbert révèle les secrets culinaires de son arrièregrand-mère.
20 CONFIDENCES Chez Madame Gilbert, l'auteure de Mange, prie, aime, c'est Monsieur qui cuisine.
QUESTION DE STYLE AVEC OU SANS LES BAGUETTES? La question en ligne de janvier/ février: préférez-vous les œufs à la coque ou les œufs durs?
Dans de nombreux restaurants asiatiques, le couvert est mis uniquement avec des baguettes. Bien que je sache m’en servir, je préfère manger avec un couteau et une fourchette. Est-ce que je me rends ridicule, si j’en exige? Anna Kriston, Zurich Le client est roi. Donc, si vous préférez savourer votre canard laqué fourchette à la main, allez-y, ne vous gênez pas. Vous ferez en plus un geste
35%
des participants ont voté pour LES ŒUFS CUITS DUR.
65%
usage unique. Mais pourquoi se rend-on dans un restaurant asiatique? Aussi pour s’immerger dans la culture d’un autre monde. Et cela réussit d’autant mieux si le décor s’y prête. D’où les baguettes. A
des participants préfèrent L’ŒUF À LA COQUE.
propos, saviez-vous que leur maniement stimule le centre de coordination cérébrale? Avez-vous une question sur la bienséance à table? Adressezla à Cuisine de Saison, mot
saison.ch
clé «Question de style», boîte
Participez à notre prochain sondage de mars: préférez-vous
les beignets ou les bâtonnets de poisson? www.saison.ch
postale 1766, 8031 Zurich, ou rédaction@saison.ch
VINS DU MOIS
GARANOIR 2011 CHRISTIAN DUGON, BOFFLENS Né d’un croisement entre le gamay et le reichensteiner, le garanoir a inspiré le Vaudois Christian Dugon. Et c’est avec talent qu’il a su exploiter le potentiel de ce cépage rouge. Résultat: un vin gouleyant et bien structuré. Une saucisse au chou? Un fromage de L’Etivaz avec du pain complet? Ou un rôti de chevreau avec purée de pommes de terre? Tout lui convient. Santé! Fr. 16.–, chez le producteur, tél. 024 441 35 01
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HUMAGNE BLANCHE 2011 CAVE DAVID ROSSIER, LEYTRON Aussi rare que précieuse, l’humagne blanche est l’un des trésors du Valais vinicole. Ce cépage permet la vinification de vins blancs aux tonalités douces et minérales. David Rossier en a créé un excellent cru: aéré, floral, avec une note délicate de pêche au nez et qui se conclut sur une finale légèrement saline. Idéal avec la féra pochée ou un jeune fromage de chèvre. Fr. 18.–, chez le producteur, www.david-rossier-vins.ch
TEXTES: ANETTE THIELERT, GÉRALDINE PASTEUR; PHOTOS: LEE JAKOB, HANS-ULRICH LISCHER (2), DR (6), ISTOCKPHOTO; ILLUSTRATIONS: FELICE BRUNO
pour l’environnement car les baguettes sont destinées à un
Ils ont osé, ils ont testé Nos lecteurs ont testé
PEZ TICI ! PAR NEZ G A ET G
pour vous, en avant-première, des recettes de ce numéro.
ANDREA MANCINO (23 ans) de Brittnau, AG
Salade de mangues vertes avec bouilli de bœuf (p. 38) «J’ai préparé cette salade pour mes invités le jour de mon anniversaire. Ils en ont raffolé! La douceur des fruits, le craquant des concombres et l’exotisme de la sauce asiatique s’accordent à merveille au bouilli de bœuf. Une expérience alléchante, même sans coriandre.»
NOMIE L’ÉTU DIA NT E EN ÉCO ROU VER SES D’ENTREPRISE AIME RET TABLE. AM IS AU TOUR D’U NE
GILBERTE MAILLARD (58 ans) de Domdidier, FR
Chapati avec dhal (p. 17) «Il est écrit dans la recette que l’on doit abaisser la pâte à env. 2 mm. Cela n’a pas très bien fonctionné avec le rouleau à pâtisserie. J’ai donc étiré encore un peu les galettes sur le revers de la main jusqu’à ce qu’elles soient assez fines. Les amateurs de cuisine indienne vont adorer.»
LECTURE
Pas de grands chefs sans petites mains
Chacun cherche son œuf
Agilité, logique et culture générale seront nécessaires pour arriver au bout de cette grande chasse à l’œuf pascale organisée samedi 30 mars à 14 h à Morgins (VS). Pas de perdant: chacun repartira avec un lapin en chocolat. Tarif: Fr. 5.- par personne.
de Cuisine de Saison? Alors inscrivez-vous sur www.saison. ch/fr/avant-premiere. Parmi les trois personnes choisies, nous tirerons au sort un ensemble de casseroles Migros, cette fois-ci des poêles Titan d’une valeur de Fr. 151.70. Les personnes choisies participeront toutes à notre tirage au sort annuel pour un shooting photo chez Cuisine de Saison suivi d’un déjeuner avec la rédactrice en chef Christine Kunovits.
saison.ch
TROIS ANS, CET TE À LA RET RA ITE DEPUIS RCE S ICE PLE INE DE RESSOU CU ISIN IÈR E AM ATR ET – VIE LA DE CÔTÉS APPRÉCIE LES BONS PET ITS-EN FAN TS. CHOIE SES QUATR E
Avec ses «Portraits intimistes de chefs» (Editions Alpaga), Sébastien Ladermann nous emmène dans les coulisses de la gastronomie lémanique. Aux côtés des grands cuisiniers, on découvre leurs fournisseurs. Autant de petites mains qui travaillent au service du bien manger, dans l’ombre des chefs étoilés. Ils méritent leur reconnaissance, la nôtre également. Bilingue français-anglais. Fr. 94.10 chez Ex Libris.
Désirez-vous tester une recette
Rolf Beeler est aux petits soins pour ses meules: il veille chaque jour à leur bonne maturation.
UN AFFINEUR?
Rolf Beeler, 58 ans, Nesselnbach Mon métier est de superviser la maturation des fromages. J’entrepose quelques meules chez moi, j’en laisse d’autres mûrir chez les fromagers. Le produit doit conserver une humidité de base, il ne doit pas perdre trop d’eau. Je contrôle les meules chaque jour et adapte la température de la pièce selon le temps qu’il fait. Je vends des fromages de vaches se nourrissant uniquement d’herbes ou de foin et vivant si possible en altitude. En montagne, la variété florale est plus grande. Les plantes que mangent les animaux donnent leur caractère particulier aux fromages. Autre rituel important: le lavage. Au début, je traite mes fromages à la saumure, mais plus après, sinon ils deviennent trop salés. Soit je les frotte simplement avec de l’eau ou je tente quelque chose de nouveau, comme de les humecter avec de l’eau-de-vie. www.rolfbeeler.ch
PERLE RARE
Inscriptions auprès de Morgins Tourisme la
Pour changer des œufs d’esturgeon, goûtez une boîte de caviar d’escargot issu d’une ferme drômoise bio, dans le sud de la France. Ces petites perles blanches exhalent le parfum des sous-bois après la pluie.
veille avant midi, tél. 024 477 23 61.
www.perle-et-saveurs.com 3 | 2013
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E M M O C BON N I A P LE RECETTES: DANIEL TINEMBART | PHOTOS: RUTH KÜNG
Le pain est le symbole par excellence de la nourriture. On en cuit depuis des millénaires, autrefois dans des fours d'argile ou sur la pierre. Dans les cultures rurales, il constituait l'aliment de base de chaque repas. Les premières galettes firent leur apparition aux prémices de l'agriculture et se développèrent au fil de l'évolution. Aujourd'hui, les pains de différentes ethnies se sont répandus à travers le monde et ont acquis une grande popularité. Le chapati indien, le bannock écossais ou l'injera éthiopien, pour n'en citer que quelques-uns, accompagnent volontiers des plats déjà copieux mais sont également délicieux à déguster nature ou garnis.
LES PAINS DU MONDE |
Chapati avec dhal PAGE 17
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| À TABLE!
L’écrivaine Elizabeth Gilbert a ouvert avec son mari une boutique d’artisanat asiatique à Frenchtown.
«Au Laos, j’ai mangé du ragoût aux bouts de bois» L’auteure de best-sellers elizabeth Gilbert écoute sa voix intérieure, savoure la vie en province et rend hommage à son mari qui lui mitonne chaque jour des merveilles. IntervIew: SAchA vernA | PhotoS: BALL & ALBAneSe
ElizabEth GilbErt vit à Frenchtown, new Jersey (USA). en 2006, cette journaliste de 43 ans a publié Mange, prie, aime, aussitôt propulsé au rang de best-seller international et adapté au cinéma. Julia roberts en interprète le rôle principal. Son dernier ouvrage, At home on the range, est paru en 2012. on y découvre les recettes de son arrièregrand-mère, Margaret Yardley Potter.
«Toby, il faut que je te règle le champagne d’hier soir», lance Elizabeth Gilbert au serveur en pénétrant dans le restaurant du National Hotel. Le personnel salue joyeusement l’auteure américaine qui se fait simplement appeler Liz. La veille, le bar de la maison d’hôtes a accueilli le rendez-vous mensuel des femmes de Frenchtown. A l’annonce des fiançailles d’une amie, autour de minuit, Elizabeth Gilbert a offert la tournée de champagne – oubliant qu’elle n’avait pas un dollar en poche. Son rire rappelle le champagne, lui aussi: il éclate à toute occasion, surtout quand elle parle de son arrière-grand-mère Margaret Yardley Potter, dont l’ouvrage consacré à la cuisine et au foyer, ponctué d’anecdotes, est sorti il y a peu sous le titre At home on the range - Au foyer, aux fourneaux. Cuisine de Saison: Qu’est-ce que votre arrièregrand-mère choisirait sur cette carte? Elizabeth Gilbert (étudie la carte): Gima aurait choisi le plat le plus exotique de tous. Le chili kheema aux fruits de lotus avec son panir de noix de cajou me semble intéressant et nouveau. Le propriétaire du restaurant vient de Goa et sa femme est Chilienne. Elle fait les meilleures empanadas de la région. Je prends le chili kheema. En plus, ça rime avec Gima. Comment avez-vous succombé au charme de votre ancêtre? J’avais entendu quelques histoires à son sujet. Tout le monde semblait la vénérer. En rangeant mon grenier, j’ai retrouvé un exemplaire jauni de ce livre de cuisine que Gima avait publié en 1947. Il m’a subjuguée: j’avais trouvé mon âme sœur. Quand je repense au moment où j’ai commencé à le lire, j’en ai la chair de poule. C’est ma propre voix que je reconnaissais dans la sienne! J’ai enfin compris d’où venait ma curiosité et mon amour pour la langue et les histoires. Il fallait que le monde entier connaisse cette femme d’exception.
Etiez-vous heureuse de déplacer les projecteurs vers quelqu’un d’autre? Et comment! Le succès de Mange, prie, aime m’a prise au dépourvu. Tout d’un coup, de parfaits étrangers croyaient me connaître. Ils n’avaient pas tort, d’ailleurs, car j’ai mis beaucoup de moi-même dans ces Mémoires. Après le film, des tas de femmes ont fait exprès le voyage jusqu’à Frenchtown, voulant à tout prix me révéler leurs secrets. Frenchtown est une petite ville de contes de fées. Un vent alternatif souffle ici: studios de yoga, boulangeries bio, ateliers de poterie, sans parler de Two Buttons, une boutique d’artisanat asiatique qu’Elizabeth Gilbert et son second mari José Nunes ont fondée en 2007. José est le «Brésilien» de «Mange, prie, aime». Après le buzz autour du bestseller, vendu à plus de 7 millions d’exemplaires et traduit en plus de 30 langues, l’auteure a retrouvé son équilibre en collant des prix sur des porteencens venus du Bangladesh. Au lieu de répondre à des questions sur Dieu, elle a adoré conseiller les clientes sur la manière dont telle ou telle écharpe s’accordait au mieux à leur teint. Comment se fait-il que vous vous soyez retrouvée précisément dans le New Jersey? Vous voulez dire: plutôt que dans une villa en Toscane? (elle rit) Mon mari, José, répète toujours que même les voyageurs ont besoin d’une adresse. Nous adorons voyager. Si nous ne nous savions pas capables de tout laisser en plan pour recommencer à zéro n’importe où, nous serions peut-être moins heureux ici. J’ai grandi dans une ville comme celle-ci. Pour moi, être chez soi, c’est connaître le prénom des gens dans la rue et entretenir ensemble les jardins de la commune. Et puis nous n’habitons qu’à 40 minutes de l’aéroport: en quelques heures à peine, nous sommes à l’autre bout de la planète.
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Recettes: AnninA ciocco | photos: clAudiA linsi
Cœur tendre Un menu pascal raffiné et riche en saveurs. Des mets qui se dévoilent peu à peu, tantôt enrobés, tantôt farcis, en croûte ou panés.
Pleurotes en manteau de graines avec doucette pAge 34
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P창ques Migros |
Omble chevalier en papillote Page 34
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RECETTES: MaRgaRETha JunkER | PhoToS: andREaS ThuMM
bouilli de bœuf |
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Ralph Schelling a déjà travaillé au Kunststuben de Horst Petermann, mais a aussi fait partie des brigades du Bulli de Ferran Adrià et du Schloss Schauenstein d’Andreas Caminada. Pour en savoir plus, vous pouvez lire son interview sur www.saison. ch/fr/cuisiner-au-quotidien
h p l a R c e v a n i l a Cuisiner m RECETTES: RALPH SCH
ELLA CAC ELLING | PHOTOS: ORN
ACE (PORTRAIT), PIA GRI
MBÜHLER (FOOD)
te cettes sont dans l’air du re s se , es né ffi ra s ai m Simples de la cuisine moderne.
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mps
CUISINER AU QUOTIDIEN |
Galettes de pommes de terre et de radis long Page 49 3 | 2013
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| MarSeiLLe
Tout en couleurs,
comme la bouillabaisse TexTe: STefan SiMonS | PhoToS: Yohanne LaMouLère
La légendaire soupe de poissons marseillaise concentre les arômes du sud. Mais cette ville, Capitale européenne de la culture 2013, a bien davantage à proposer: en matières culturelle et culinaire.
Métropole sur la Méditer ranée Avec un peu moins d’un million d’habitants, Marseille est la deuxième ville de France.
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Quelle frite! Avec les pommes de terre du jardin, Julia Pfäffli prépare des frites si dorées et si croustillantes que tout le monde en redemande. TexTe: AneTTe ThielerT | PhoTos: Corinne KrAmer | AdAPTATion de lA reCeTTe: mArgAreThA JunKer
L
a «plus grande crainte des habi tués était que je retire les frites de la carte», confie Julia Pfäffli. Une idée qui ne lui a même pas traversé l’esprit lorsque, il y a un an, elle reprit le Löwen, l’auberge de ses parents à Bangerten dans le canton de Berne. Julia Pfäffli a fait son apprentissage à la Moospinte d’Oskar Marti à München buchsee (BE), puis s’est perfectionnée en officiant derrière les fourneaux du Fischerzunft à Schaffhouse, puis du Suv retta Haus à St. Moritz. Le raffinement de la haute gastronomie, elle connaît. «Mais au fond, toute cette sophistication, ce n’est pas moi. Je préfère les cuisines plus terre à terre», avouetelle. Ainsi, les choses ont peu changé au Löwen, une ferme de 300 ans qui est dans la famille depuis bientôt 110 ans. Maman Ruth continue à cuire son pain chaque jour, les gens du coin se retrou vent comme d’habitude dans le salon de l’auberge pour la pause café et les tables sont habillées de blanc dans la salle d’à côté où les affamés se régalent de petits plats paysans. Bien entendu, les fameuses frites sont toujours au menu. TubercuLes riches en amidon Les pommes de terre nécessaires à leur confection, c’est papa Hans qui les cultive dans la ferme attenante, comme de nom breux légumes dont sa fille a besoin. «S’occuper des produits tirés de la terre est un travail exhaustif», assure Julia. Pour les frites, le choix de la pomme
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Les ingrédienTs Pommes de terre, sel, huile: pas besoin de plus pour les frites de Julia.
de terre est décisif: l’espèce doit être riche en amidon, comme l’agria de leurs jardins. «On ne doit jamais stocker les tubercules endessous de huit degrés, sinon leur amidon se transforme en sucre, et leur chair devient douce», explique la spécialiste. 50 kiLos par semaine Les pommes de terre épluchées, la cuisi nière les taille en bâtonnets à l’aide d’un coupefrites. «Trop épaisses, elles sont pâteuses à l’intérieur. Trop fines, comme les pommes allumettes, je ne les aime pas non plus. Elles se dérobent sans arrêt quand on les pique avec la fourchette.» Pour éliminer l’amidon, tâche indispen sable afin de garantir le côté croustillant de la frite, Julia trempe les bâtonnets dans une jatte d’eau tiède. Cela fait, elle les blanchit une minute à 160 degrés dans une friteuse, puis les étale sur une plaque à pâtisserie et les laisse refroidir. «Cela leur permet de prendre encore un peu.» Puis vient le deuxième bain d’huile, deux à trois minutes dans une graisse végétale chauffée à 180 degrés qui leur confère une qualité particulière. Ce ne sont pas moins de 50 kilos de pommes de terre qui lui passent ainsi chaque semaine entre les mains. Ses frites, elle les sert le plus souvent avec une saucisse paysanne rôtie, un cordon bleu de porc, un steak de bœuf ou des filets de perche. Ou même en solo pour les petites faims – avec son non moins célèbre beurre aux herbes maison…
La famiLLe Julia Pfäffli (à dr.) dirige l’Auberge Zum Löwen à Bangerten (BE) depuis un année. Celle-ci était gérée auparavant par ses parents, Ruth et Hans (au milieu). Ceux-ci prêtent toujours main-forte au restaurant, comme Anja (à g.), la sœur de Julia, qui est agricultrice. L’auberge a 40 places en salle et une grande terrasse estivale.
ÉTAPE GOURMANDE |
Nous vous avons mis l’eau à la bouche? Plus d’idées gourmandes dans le nouveau ABONNEZ-VOUS: http://www.saison.ch/fr/shop-abonnement
La cuisinière Julia Pfäffli utilise les produits de la ferme parentale pour ses petits plats.