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Et le SCI en finnois, ça donne quoi ?

Lors de l’EPM1, nous avons eu l’occasion de parler de volontariat et d’inclusion au sein du mouvement SCI. Dans les lignes qui suivent, nous partons à la rencontre de Virpi, membre du comité d’administration de KVT Finlande. Elle nous présente l'organisation de l'intérieur, son fonctionnement et ses volontaires ô combien précieux·ses, ainsi que des leviers pour favoriser l'inclusion dans leurs activités.

Bonjour Virpi, comment vas-tu? Peux-tu nous parler de KVT Finland ?

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Bonjour ! Je vais très bien, merci ! Alors, commençons par un peu de traduction ! KVT est l’acronyme de Kansainvälinen Vapaaehtoistyöry, qui signifie « Association Internationale des Volontaires », et c’est une branche du SCI international. Un peu comme au SCI Belgique, le volontariat est au cœur de nos activités. Pendant l’été, on accueille des volontaires venu·es des quatre coins du monde pour des projets à court terme et on envoie des volontaires finnois·es sur des projets de nos branches partenaires. Par contre, nous sommes une plus petite équipe qu’en Belgique et pour faire vivre l’association, on peut compter sur les volontaires qui portent les activités de KVT tout au long de l’année : ce sont eux et elles qui prennent contact avec les partenaires locaux, s’occupent du placement, etc… KVT ne serait rien sans ses volontaires !

Et toi, quel est ton rôle au sein de KVT ?

Je fais partie du comité d’administration et je prends part aux réflexions stratégiques et financières de l’association. Je suis aussi volontaire, puisque je suis investie dans un groupe de travail qui s’occupe de l’envoi de volontaires pour des projets long terme à l’étranger. Et ce n’est pas un hasard, car je suis moi-même partie en projet long terme il y a 3 ans !

Pour moi, l’inclusion est au cœur du mouvement pacifiste et de la citoyenneté mondiale. L’inclusion doit être le reflet de toutes les valeurs que le SCI promeut. Sinon, il n’y a pas d’intérêt à rassembler autant de personnes avec des backgrounds différents. Ce qu’on souhaite, c’est créer des espaces où les volontaires peuvent venir et travailler ensemble à la réalisation d’un but commun ou d’une cause commune. L’idée, c’est justement de pouvoir briser les stéréotypes et développer de la compréhension mutuelle dans des espaces safes. En cela, la mission du SCI n’a pas de sens sans ce concept d’inclusion.

Comment implémentez-vous cette inclusion dans votre réalité chez KVT ?

Au travers de notre expérience, nous avons réalisé que, pour avoir des groupes réellement inclusifs et hétérogènes, il faut du temps afin d’aller vers des publics qui se sentent peut-être moins concernés par nos activités. Et cela nécessite des ressources humaines. Dans le cadre du projet européen « Green Diversity », un projet qui a pour objectif de favoriser les échanges et la réflexion sur les enjeux climatiques, nous avons pu recruter une personne spécialement en charge de la coordination dont une des tâches à part entière était de faire en sorte que le groupe soit divers et inclusif.

Le temps et l’effort consacrés à cette tâche ont porté leurs fruits et on a pu constater une réelle diversité dans le groupe de participant·es ! Nous avons aussi un programme d’inclusion pour les personnes résidant dans des centres de demande de protection internationale. Ce programme permet de rendre les projets d’été plus accessibles financièrement, notamment en prenant en charge les couts de transport et les couts d’inscription. Le programme comprend aussi un accompagnement des participant·es, pour leur permettre de continuer à s’investir tout au long de l’année.

Si tu avais un rêve pour ton association, ce serait quoi ?

Pour le moment, on pense l’inclusion au fil des besoins des participant·es. Par exemple, l’an dernier une personne porteuse d'un handicap a souhaité participer à un projet d’été. Nous avons fait en sorte de le rendre accessible, mais je crois qu’on pourrait aller encore plus loin. Idéalement, j’aimerais qu’il y ait de l’inclusion à tous les niveaux d’action de KVT. Par exemple, j’aimerais qu’il y ait un maximum de diversité sur les projets, tant dans leur accessibilité que dans leurs thématiques, et bien sûr au sein même des groupes de participant·es. J’aimerais aussi que cette diversité se reflète au sein du comité d’administration, mais c’est encore difficile. On pourrait trouver des activités autour des thèmes de la paix et de l’environnement. On pourrait même travailler ensemble, de manière à ce que les différentes voix et perspectives soient aussi entendues, reconnues et portées.

Propos recueillis par Clémentine Tasiaux Permanente au SCI

Philip Adiroju et Femi Aganran font tous les deux partie de VWAN – Voluntary Workcamps Association of Nigeria, une branche du mouvement SCI qui existe depuis 1963. Ils étaient en Belgique pour quelques jours cet été, l’un pour rendre visite, l’autre pour participer au projet « Grassroots ». Nous les recevons dans nos bureaux et profitons de ces instants pour leur poser quelques questions sur le volontariat au Nigéria et leur expérience en Europe.

L’objet de l’association dans laquelle ils s’engagent est assez similaire à celui du SCI, à savoir organiser des projets de volontariat qui réunissent des personnes de milieux, d’âge et de cultures différentes, dans un but de promotion de la paix et du développement durable. Chez eux, ça se matérialise entre autres par l’organisation de workshops de renforcement de compétences à destination des jeunes. VWAN organise aussi des projets internationaux, un peu partout au Nigeria, sur des thématiques qui vont de l’agriculture dans des communautés rurales à la restauration de biens culturels nationaux.

Lors de leurs séminaires, ils et elles utilisent des techniques de l’éducation non-formelle, comme des mises en situation, des jeux ou du théâtre, pour permettre aux jeunes de développer leurs compétences en passant par l’expérience, et non par de la théorie uniquement. Les projets de VWAN étaient à l’origine principalement destinés aux jeunes, mais il y a de plus en plus de diversité dans les profils de volontaires avec le temps, notamment en termes d’âge. Leur envie est d’ouvrir la porte à une plus large démographie de volontaires, qui correspondrait davantage à la population, assez jeune, du Nigeria (plus de diversité en termes de genre, inclusion de volontaires venant de zones plus reculées, etc.).

Avant le Covid, la base de volontaires comptait beaucoup de volontaires internationaux·ales, mais les arrivées au Nigeria sont restées moins importantes depuis la réouverture des frontières.

C’est donc devenu un défi que de se baser davantage sur les volontaires locaux·ales et sur des échanges « Sud-Sud ». VWAN accueille de plus en plus de volontaires du Togo, du Ghana, d’Afrique du Sud ou du Cameroun. En termes de sécurité également, le Nigeria n’est pas le même qu’il y a 15 ans, il faut tenir compte de nouveaux challenges. La situation sécuritaire s’améliore, mais les projets restent difficiles à promouvoir dans les pays du Nord global.

Une association basée sur ses volontaires

Femi fait partie du steering comittee et a toujours été un volontaire actif chez VWAN (il n’y a pas de staff, tout le monde est volontaire). Philip, quant à lui, est volontaire depuis 2020 et assistant coordinateur d’une branche locale. Il est aussi coordinateur de projets.

Philip est venu en Belgique dans le cadre du projet « Grassroots », un projet Erasmus+ qui a pour objectif le renforcement de la collaboration entre des associations européennes et africaines. Des coordinateur·ices de projet du Nord et du Sud globaux participent ensemble à des activités en Europe et en Afrique afin de partager des bonnes pratiques et réfléchir ensemble à des thématiques telles que le genre, la justice climatique ou la décolonisation.

Ici, Philip a co-coordonné « Na Fir Bolg », un projet de volontariat dans un festival de musique folk pas très loin d’Anvers. Il raconte que cette première expérience en Europe lui a beaucoup plu. Selon lui, il n’y a pas beaucoup de différences fondamentales entre les projets en Belgique et au Nigeria, hormis un plus petit nombre de volontaires, ce qui a rendu son rôle de coordinateur plus facile pour tenir compte de tout le monde. Ce qu’il voudrait emporter avec lui, c’est un peu de l’esprit et du travail d’équipe qui l’ont impressionné pendant son projet : malgré un travail parfois très physique, les volontaires restaient motivé·es et gardaient une attitude positive.

Pour Femi, la grande différence entre les projets en Europe et en Afrique est qu’ici le travail est clair et les ressources accessibles pour y arriver. Au Nigeria, le travail est clair, mais il n’y a pas assez de ressources. Souvent, il faut trouver des solutions pendant les projets, il y a beaucoup plus d’improvisation. Les projets sont faits avec les communautés locales mais sans financements. Les ressources sont donc trouvées au sein même des communautés. VWAN aimerait être plus structuré dans son organisation, plus efficace, et cela a aussi à voir avec le financement. Il y a un apprentissage à tirer de l’expérience européenne : comprendre comment se saisir des opportunités pour recevoir des fonds localement. C’est une étape importante qui pourrait leur permettre d’employer du staff et de ne pas compter uniquement sur des volontaires.

À la question inverse, « qu’est-ce que nous pourrions apprendre, en tant qu’association de volontariat, de la manière de faire au Nigeria », Philip mentionne le lien avec les communautés locales. Chez eux, les projets ne sont jamais isolés, les communautés font intégralement partie du processus. Il n’y a pas de « eux » et « nous ». Cela crée beaucoup d’opportunités pour échanger, pour en apprendre davantage sur les communautés. Des membres des communautés avec lesquelles ils travaillent sont parfois même intéressé·es par le volontariat à leur tour. Un dernier apprentissage significatif de la manière de faire nigériane est l’idée de toujours s’amuser en travaillant. Au Nigeria, même lorsque le travail est dur, on chante. Tout est question d’amusement.

Plus d’égalité des genres, plus de travail communautaire

À la question « qu’est-ce que vous avez appris en Europe que vous pourriez mettre en place chez vous ? », Femi et Philip me répondent par la conviction qu’il y a encore beaucoup de travail à faire en termes d’égalité de genres. Il faut créer des environnements positifs pour les femmes, dans les projets de volontariat comme au sein de leur organisation. Pour le moment, il y a 80% d’hommes. Cela relève, entre autres, de la tradition. Mais ils disent avoir besoin d’être plus affirmés, de reconnaître que ce n’est pas naturellement facile pour les femmes d’être audibles et visibles dans les espaces sociaux. Et il faut travailler, de manière plus générale, à l’étendue des possibilités de voyager, au-delà des barrières socialement construites. Ce sont des défis qui nécessitent des stratégies claires.

Le volontariat évolue, et il y a aujourd’hui beaucoup d’opportunités d’échanges, qu’ils soient professionnels ou non. Le volontariat a un peu perdu de sa poigne sur les jeunes. Beaucoup de questions se posent sur les intentions, afin de ne pas rentrer dans certains stéréotypes. Il faut réfléchir à la manière dont le volontariat s’adapte à la société actuelle. Il ne faut pas en changer la substance, l’idée de faire se rencontrer des cultures différentes, de travailler pour la paix et la solidarité, mais il faut par contre réfléchir à comment incorporer les nouveaux défis sociétaux dans ce que l’on fait déjà. Il faut sortir des propositions habituelles, des échanges principalement Nord-Sud, trouver de nouvelles manières de faire : évoluer avec la société pour continuer à donner du sens à notre travail.

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