/ DEUXIEME FOI
SACRÉES
RECONVERSIONS !
A Catillon-Fumeton, dans l’Oise, l’église est devenue mairie : Don Camillo se retournerait dans sa tombe ! Partout en France, des lieux de culte, désertés, changent d’affectation et, à défaut de révélation, doivent trouver une nouvelle vocation… Si Dieu le veut.
©Geronimo Architectes
PAR MÉLANIE MARULLAZ
Chapelle et couvent des Capucins à Annecy
U
n restaurant et une galerie dans une chapelle… Un hôtel dans le couvent. La reconversion des Capucins, à Annecy, fait grand bruit. Désacralisé en 2013, l’édifice était pourtant déserté depuis longtemps. Mais une église n’est pas qu’un lieu de culte, dans un quartier ou un village, c’est également un repère. “Elle a une valeur patrimoniale”, résume Arnaud Dutheil, directeur du CAUE 74, “ce n’est pas qu’un bâtiment isolé, elle appartient à un ensemble qui forme une identité historique. Et plus la transformation est radicale, plus c’est difficile. Il est compliqué de toucher au sacré.” La tendance n’est pourtant pas récente. Pendant la Révolution Française,
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de nombreux lieux de culte ont été transformés en greniers à pain, prisons, hôpitaux ou caves viticoles. Beaucoup ont également « travaillé » pour l’industrie textile, comme ce fut le cas de l’Eglise des Italiens, au cœur de la capitale haut-savoyarde, transformée au XVIIIe siècle en fabrique d’indiennes, tissus de coton peints ou imprimés, qui employa jusqu’à 360 personnes. Elle abrita ensuite un dépôt de charbon, une boulangerie et même des logements.
TOMBÉES DU CIEL Aujourd’hui en France, une trentaine d’édifices sont transformés chaque année. Pour l’être, ils doivent d’abord passer par la case « désacralisation »,
soit une messe, donnée après approbation de la désaffection par le diocèse, quand le bâtiment répond à trois conditions : la non-célébration du culte pendant plus de six mois consécutifs ; l’insuffisance d’entretien mettant en péril la conservation de l’édifice et la sécurité du public ; le détournement de l’édifice de sa destination cultuelle. Depuis 1905, 277 édifices religieux auraient été désacralisés, ne représentant finalement que 0,6% des plus de 40 000 églises et chapelles françaises. Se pose ensuite la question de leur destruction ou réaffectation. Plus un territoire a été préservé des guerres, mais aussi de la croissance démographique ou financière, plus ses églises sont anciennes. Autant dire,