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Le travail à terre

Mais comme le rappelle le Journal de la Navigation « De graves sanctions sont prises contre certains mariniers pour vols de cargaisons avec le tableau des noms et des peines. » 133

Le travail à terre

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La contrainte fait nécessitée. Il y a de longues périodes d'immobilisation des mariniers. Ceci soit à cause des dégâts aux infrastructures qui empêchent la circulation. Mais également quand les bateliers décident de se mettent en retrait de disponibilité pour tenter d'échapper aux voyages requis. De ce fait il faut trouver des revenus afin de vivre ou survivre pendant ces années sombres. Ils vont accepter tout et n'importe quoi en espérant pouvoir reprendre leur métier le plus tôt possible. « En juin 40, mon frère est bloqué à Langres sur le canal de la Marne à la Saône, me demande si je veux bien reprendre mon emploi de matelot lors de la reprise de la navigation. Mais j'ai vite trouvé un emploi de bûcheron à la scierie Couturier de Langres qui exploitait un bateau plat en bois, équipé d'une grue manuelle. Nous faisions du débardage en forêt avec les chevaux de la scierie, nous rapprochions les grimes du bord du canal avant de les embarquer à l'aide de la grue. » 134

Toujours dans le Sud, ils sont sans travail mais les remboursements de leurs emprunts sont insuffisants aux dires de Carbenzol qui ne cesse de les rappeler à Paris. Ils font de petits travaux qui rapportent surtout une compensation alimentaire. Travail dans les vignes, faire des réparations jusqu'en Lozère pour une entreprise d’électricité.135 Ils vont faire une longue attente là où ils sont. L'herbe est abondante et verte pour les poules et les lapins. Charles trouve un travail dans une tuilerie et Xavier est employé pour garder les ponts. Ils logent sur le bateau mais la journée ils font du « camping » en face du bateau jusqu’à l'automne.136 Au début 1943, emploi dans une menuiserie jusqu'à la libération. D'autres bateaux restent très longtemps à l'abri avec eux, le Celtic et le Forézien.

137 « Nous sommes moins malheureux que ceux qui ont perdu leur bateau et qui travaillent à terre. Pour beaucoup qui ne rembarqueront qu'en 1950 ou 1955, souvent loin de leur région où leurs enfants se seront mariés. » 138 « En 1940, nous y restons cinq mois, le temps de remettre les canaux démolis par les bombardements en état de navigation. Les hommes travaillent aux ponts et chaussées, au déblayage des canaux mis à

132 Jacques Monier - Un batelier au service des ciments d'Origny - n°81 -2019 133 Journal de la navigation - 01/1/43 134 F. Berenwanger - Halage et traction, souvenirs d'un batelier - n° 30 - 1993 135 Lydia Carnec-Branchet - Une saga batelière de 1850 à 1980 - n° 64 –2010

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Lydia Carnec-Branchet - Une saga batelière de 1850 à 1980 - n° 64 - 2010 137 Lydia Carnec-Branchet - Une saga batelière de 1850 à 1980 - n° 64 - 2010 138 Martial Chantre - La péniche, ma vie batelier de père en fils - n° 48 – 2002

« Du 12 décembre 1941 au 9 mars 1942 nous étions à Strasbourg bloqués par un terrible hiver. Mon père avec mon parrain a travaillé à terre. D'abord pour un marchand de charbon, ils descendaient les sacs de charbon sur leur dos dans les caves. Ensuite ils ont travaillé pour la brasserie Kronenbourg. » 140 Le père travaille au carreau de la mine à Béthune et sa mère cherche un bateau pour rembarquer. Par relation, un bateau, le José est trouvé au chantier Marcel de Clé. Les voilà salariés jusqu'en 1946. Ils le louent puis l'achète en 1952. L'inconvénient est que ce bateau à sa coque trouée et abîmé au point que son père fait glisser son bateau sur les fonds vaseux pour colmater les trous ou pomper régulièrement sur trois pompes à l’avant, à l’arrière et au niveau du mât par le fils de 5 ans et la sœur de 14 ans.141

Tout ce qui peut rapporter un peu d’argent est tenté : « Si vous voulez trouver du bois, n'importe où à terre, dans l'eau, le scier, le couper en petit bois pour faire des fagots et les vendre dans les alimentations ou bistrots et ainsi fut fait avec Paul et Michel nous avons fait des fagots et réussit à les vendre à Paris ou Saint Denis et gagner un peu d'argent de poche. » 142

139 Eliane Droissart Bourdon - Marinière, ma vie, ma profession - n° 26 - 1990 140 Eliane Droissart Bourdon - Marinière, ma vie, ma profession - n° 26 - 1990 141 Simon Desselle, 85 ans - 2020 142 Jacquelin Hesbert – archives Cité des bateliers

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