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LES BUSINESS DE DEMAIN

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DÉBAT

DÉBAT

Des entrepreneurs qui osent L’AVENIR EST À L’INNOVATION

Ce sont des start-ups ou des technologies innovantes qu’il faut suivre du coin de l’oeil car elles feront beaucoup pour l’économie de demain dans la région. De l’élevage de mouches à la construction de maisons en 3D, bienvenue dans le futur.

PAINS, CONTENEURS, DRÊCHES DE BRASSERIE : LES RECYCLAGES DU QUOTIDIEN

Le pain sec permet de brasser une bière… … les drèches issues du brassage servent à fabriquer un aggloméré destiné à la menuiserie.

Savez-vous que des produits recyclés peuvent finir dans votre demi de bière ? C’est ce que vous propose le brasseur rémois Yves Leboeuf avec la Sicampe une bière anti-gaspi qui valorise le pain invendu des grandes surfaces en l’ajoutant aux ingrédients habituels des brassins. Le patron de Sense Brewing pense utiliser 2 tonnes de pain chaque année. Cela ne change pas la face du monde… sauf si le brasseur rémois fait école. On pourra peut-être déguster la Sicampe bien assis sur un tabouret fabriqué à partir de ses propres déchets de production. En effet l’ébéniste, designer et amateur de bière, Franck Grossel a lancé à SaintQuentin, Instead, une gamme d’objets faits à partir des drêches récoltées chez les brasseurs. Le jeune homme de 27 ans a voulu trouver un nouvel usage à ce résidu qui finit le plus souvent dans l’auge des animaux d’élevage ou dans les cuves des méthaniseurs. La drêche pressée sert en particulier à la fabrication de l’assise d’un tabouret, qui est le produit phare de la jeune marque française. Les déchets d’orge maltée sont réduits en poudre et agglomérés naturellement par le sucre produit lors de la première phase de brassage. Pour plus de rigidité, Instead y ajoute, dans une proportion de 2 %, une colle de sa conception garantie sans formaldéhyde, recyclable, sans aucun dégagement de COV et inerte pour l’homme comme pour l’environnement. Les déchets et équipements déclassés sont une source d’inspiration infinie pour les ingénieurs ou les amateurs ingénieux. Par exemple, l’entreprise d’insertion de le Lien de Vireux fabrique dans le nord des Ardennes des piscines en transformant tout simplement des conteneurs maritimes réformés venus du port d’Anvers. Ces piscines de 1,5 mètre de profondeur ont déjà des clients et s’ajoutent aux autres déclinaisons de conteneurs que sont les vestiaires sportifs, les bases de vie ou les bureaux.

DE LA BETTERAVE AU MAQUILLAGE LONGUE DURÉE

On savait qu’en plus de vous fournir le morceau de sucre que vous plongez chaque matin dans votre café, la betterave pouvait remplir, en partie, le réservoir de votre voiture, via les carburant plus ou moins verts E85 et E10. Mais on ne savait pas que la racine sucrée cultivée dans le quart nord-est de la France pouvait colorer durablement les paupières de ces dames. Normal, car c’est nouveau. Alors qu’on l’attendait à l’origine sur le marché des biocarburants pour l’automobile, la start-up Global Bioenergies, vient de faire un virage étonnant dans le maquillage longue durée. Elle a découvert que l’isobutène d’origine renouvelable, dont elle développe le procédé depuis douze ans afin de remplacer son équivalent d’origine pétrolière, pouvait s’avérer très utile dans d’autres domaines que le transport routier. Associées entre elles, des molécules d’isobutène (qui sont composées d’atomes de carbone et d’hydrogène) peuvent former l’isododécane, qui est utilisé dans l’industrie cosmétique et notamment le maquillage longue durée. En plus de fournir un composant pour les grands acteurs de la cosmétique, la start-up a décidé de lancer sa propre marque propriétaire de maquillage longue durée, dénommée « LAST® ». Les mascaras et fards à paupières sont censés tenir au moins 24 heures. Global Bioenergies, qui a pour partenaire historique Cristal Union, va produire ses composants au sein d’ARD à Pomacle, bras R&D des coopératives agricoles régionales.

La start-up Global Bioenergies substitue un composant végétal à un composant d’origine pétrolière pour les produits de maquillage.

LA MOUCHE, UN ALIMENT D’AVENIR

Vous prendrez bien une salade de mouches des Ardennes ? Rassurez-vous, on en n’est pas là. Pourtant, l’élevage de ce petit insecte pas très ragoûtant pour le palais humain va susciter un investissement de 40 millions d’euros et permettre la création de 60 emplois à Rethel. Que va-t-on y faire ? Seront élevées des mouches dites « soldat » (hermetia illucens) qui seront dans la quasi-totalité des cas tuées et déshydratées au stade de larve. Trois produits sortiront de l’usine : une farine d’insecte « délipidée » (séparée de l’huile), très riche en protéines, destinée à la pisciculture et au « petfood » (alimentation animale) ; une huile d’insecte destinée au « petfood » ou à d’autres utilisations encore à l’étude ; et des déjections utilisables comme fertilisants naturels et éligibles à l’agriculture biologique. Les mouches peuvent être alimentées avec des coproduits issus de la première transformation des productions agricoles (céréales, betterave, etc.). Mais Agronutris ne communique pas précisément sur sa recette maison, fruit d’années de recherche. Le site agro-industriel de Pomacle-Bazancourt sera un pourvoyeur important de ces aliments. C’est pourquoi la seconde usine d’Agronutris pourrait naître sur ce site. La start-up toulousaine vient de lever 100 millions d’euros pour essaimer. Elle n’est pas la seule. Innovafeed construit une usine à Nesle (Somme), et Ynsect, une autre à Amiens. L’« agTech » (agriculture technologique) française est en pointe sur ce marché des protéines alternatives.

EXTRAIRE LES MÉTAUX STRATÉGIQUES DES DÉCHETS ÉLECTRONIQUES

On a besoin de nickel, de cobalt, de tantale ou d’étain pour construire smartphones, tablettes et ordinateurs. Les gisements de ces métaux dits stratégiques se trouvent hors d’Europe. Ils génèrent donc des dépendances en même temps qu’ils épuisent des ressources naturelles non renouvelables et alimentent des industries d’extraction polluantes. Paradoxalement, la filière recyclage de ces matières précieuses est sous-développée. Ce constat est à l’origine de l’usine Sanou Koura que veulent construire les ingénieurs Michel Trabuc et Christian Thomas à Donchery, dans les Ardennes. L’investissement doit s’élever à 40 millions d’euros et permettre la création de 80 emplois. Les recherches de longue haleine ont été menées début des années 2000 avec des laboratoires renommés comme le CNRS, l’institut Jean-Lamour à Nancy, Chimie-Paris Tech ou encore le BRGM. Des techniques éprouvées de broyage, dégazéification, chauffe, et électrolyse seront utilisées pour extraire les métaux des déchets électroniques. Pour la petite histoire, Sanou Koura veut dire la renaissance de l’or en bambara, l’une des langues du Mali.

Les déchets électroniques sont une mine d’or, ou plutôt de métaux précieux.

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L’ÈRE DE LA MAISON IMPRIMÉE

Les parpaings et le béton coulé entre deux banches vont-ils être rangés au rayon préhistoire de la construction ? C’est que l’on pourrait croire en découvrant le potentiel de la construction 3D béton. Cette technologie consiste à ériger des murs par couches successives de béton frais. Quel intérêt ? « Cela permet de libérer les formes architecturales. Avec son logiciel, l’architecte peut donner aux murs la forme qu’il veut. La forme droite, courbe ou elliptique, c’est la même chose pour le robot, il n’y a pas de surcoût » explique Jérôme Florentin, directeur de la maîtrise d’ouvrage de Plurial Novilia. Cet organisme logeur est à l’origine du premier groupe de maisons construites par impression 3D en France. Elles viennent d’être assemblées dans le quartier Réma’Vert de Reims, à partir de structures réalisées d’après fichier numérique par un robot dans l’atelier de l’entreprise XtreeE, à Rungis. Ces maisons sont facilement reconnaissables à leurs murs arrondis et aux bourrelets de béton laissés volontaire-

Plurial-Novilia a réalisé un premier groupe de maisons imprimées en 3D à Reims.

ment apparents par l’architecte. C’est la nouvelle signature de ce procédé constructif qui a par ailleurs l’avantage de réduire la pénibilité du travail sur les chantiers et de rendre plus attractifs les métiers du bâtiment.

LE LIN, VIEUX COMME LE MONDE ET PLEIN D’AVENIR

Le lin est l’une des premières espèces cultivées par l’homme. Cette plante herbacée annuelle est à l’origine du plus ancien textile au monde. Des archéologues ont trouvé, dans une grotte de Géorgie, des fibres de lin vieilles de 36 000 ans. La famille Decock, où l’on est tailleur de père en fils depuis quatre générations, ne vient pas du Caucase mais de Quaëdypre, dans le nord de la France, commune rurale proche de Dunkerque. L’entreprise créée en 1957 a attendu 2021 pour lancer une usine dans l’Aisne, à Barenton-Bugny, près de Laon. L’investissement de 17 millions d’euros s’ajoute aux 24 teillages français sont situés dans les principaux bassins de production proches des littoraux des Hauts-deFrance et de Normandie. Si Decock a créé cette usine, qui transformera 1 200 hectares de cultures axonaises, c’est que le lin est dans l’air du temps et donc plein d’avenir. Il ne nécessite que peu d’intrants quand on le cultive et ne génère aucun déchet quand on le transforme. Les fabricants de textile ont bien compris aussi que le lin pouvait répondre à l’aspiration des consommateurs soucieux de la traçabilité et de l’origine de ce qu’ils achètent. Le lin représente aujourd’hui 0,4 % du marché mondial des textiles selon la confédération européenne du lin et du chanvre (CELC). Lors du deuxième « World Linen Forum » en 2020, la filière a annoncé son objectif d’atteindre la barre des 1 % de l’offre mondiale de fibres textiles. Et le lin de l’Aisne apportera sa pierre à l’édifice.

DES COLLANTS CONTRE L’OBSOLESCENCE PROGRAMMÉE

Des collants qui ne filent pas grâce à des fils de nylon ultra-résistants, une véritable innovation made in France.

La ficelle est un peu grosse mais elle fait les affaires d’industriels qui ont compris qu’en fabricant des produits qui durent moins longtemps, ils pourraient en vendre plus souvent. Si les intentions perfides des grands faiseurs ne sont pas faciles à prouver, Inès Saadallah et Axel Delannoy ont décidé de répondre à la frustration des nombreuses femmes dont les collants filent à vitesse grand V. Selon une enquête de l’association Halte à l’Obsolescence Programmée (HOP), 40 % des collants ne seraient utilisés que 2 à 3 fois maximum, 32 % 5 ou 6 fois (étude réalisée d’après 3 000 témoignages). Ils ont donc lancé Cygnes « les collants les plus résistants fabriqués en France ». Ces collants nylon sont censés pouvoir être utilisés « plusieurs dizaines de fois ». Pour y parvenir, le duo d’entrepreneurs rémois a demandé à ses partenaires industriels de transformer du fil habituellement utilisé dans le domaine de l’escalade. Vendus 39 euros, les collants sont plus chers à l’achat que la plupart de leurs concurrents mais le prix rapporté à l’utilisation est très compétitif. L’autre innovation réside dans le mode de financement du projet qui repose la précommande via une plate-forme participative. Elle permet au duo de commencer à commercialiser sans avoir à financer le stock de départ et étant sûr d’avoir un acheteur devant chaque produit. C’est une nouvelle tendance dans le textile qui favorise les jeunes créateurs et la production française de qualité.

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