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l’allocation pour enfants et jeunes du Danemark
Encadré 5.6 « Ciblage à partir du haut » avec les prestations universelles : l’allocation pour enfants et jeunes du Danemark
Il a beaucoup été question dans les travaux de recherche des prestations universelles de soutien au revenu. L’une des options analysées est la notion de « revenu de base universel dégressif » (TUBI –tapered universal basic income). Dans cette option, l’éligibilité est universelle, mais les niveaux de prestations diminuent progressivement quand le revenu des personnes augmente. Bien qu’elles ne soient pas utilisées pour l’éligibilité, les informations sur les revenus et les actifs des ménages sont soumises à des conditions de ressources pour permettre cette réduction progressive des niveaux de prestations.
Un exemple de cette réduction ou de ce « ciblage à partir du haut » (« targeting from the top ») est l’allocation pour enfants et jeunes du Danemark. Ce régime est universellement accessible à tous les enfants et jeunes de moins de 18 ans (citoyens et résidents). Les niveaux de prestations sont ensuite calculés sur la base : 1) des prestations plus élevées pour les enfants plus jeunes (avec des prestations différentielles pour les enfants de 0 à 2 ans, 3 à 6 ans, 7 à 14 ans et 15 à 17 ans) et 2) des prestations plus faibles pour les bénéficiaires ayant des revenus plus élevés. L’allocation pour enfants et jeunes est donc réduite pour les familles ayant un revenu élevé. La réduction de la prestation commence lorsque le revenu dépasse 765 800 DKK (102 854 EUR) et que le montant de cette prestation est égal à 2 % du revenu dépassant 765 800 DKK (102 854 EUR). Pour les couples mariés, la réduction est de 2 % du revenu de chaque conjoint dépassant 749 000 DKK (100 598 EUR). Ainsi, même si aucune information sur le revenu familial n’est nécessaire pour déterminer l’éligibilité à la prestation universelle pour les enfants et les jeunes, elle est néanmoins requise pour le « ciblage à partir du haut » visant à réduire les prestations pour les familles à revenu élevé.
Sources : Banque mondiale, 2018c ; base de données MISSOC pour l’allocation pour enfants et jeunes du Danemark.
l Paiements. Les formules de prestations complexes peuvent également avoir des effets sur le processus de paiement, tant pour les administrateurs que pour les bénéficiaires. Pour les bénéficiaires, un problème souvent négligé est l’importance pratique d’obtenir une prestation d’un montant qu’ils peuvent retirer à un guichet automatique bancaire (GAB). Des montants de prestations inhabituels peuvent rendre les versements particulièrement complexes. Par exemple, lorsqu’un bénéficiaire doit recevoir 100 USD et l’autre 118,50 USD, tous deux ne peuvent en pratique retirer que 100 USD si le guichet automatique utilisé pour le paiement ne distribue que des billets de 20 USD. Il est vrai qu’ils pourraient chercher d’autres points de paiement (comme des agences bancaires), mais cela leur coûterait du temps et des frais de déplacement, qui constitueraient une gêne importante. Les prestations qui doivent être payées en billets ou en pièces de différentes valeurs compliquent également le versement manuel des allocations, parce que les prestataires des services de
paiement doivent avoir la monnaie exacte, compter les montants des prestations individuelles pour chaque famille et enregistrer les montants précis versés. Plus généralement, les formules de prestations forfaitaires ou simples peuvent être plus faciles pour les administrateurs en termes de traitement, d’encaissement, de réconciliation et d’audit. l Gestion des opérations des bénéficiaires : mises à jour, corrections et réclamations. L’uniformité des montants des prestations peut faciliter la gestion des opérations des bénéficiaires, notamment la mise à jour des dossiers. Si les catégories de prestations sont moins nombreuses ou si le calcul des prestations est plus simple, il y aura moins de mises à jour ou de modifications des montants des prestations et donc moins de modifications des versements pour le cycle suivant. Lorsque les prestations sont plus complexes, de petits changements peuvent affecter leur montant, entraînant des mises à jour et des modifications plus fréquentes des versements. De même, des formules de prestations plus complexes
peuvent donner lieu à un plus grand nombre de réclamations et de corrections parce que les bénéficiaires sont déroutés ou que les administrateurs ont commis des erreurs dans le calcul des prestations. Même si nous nous concentrons principalement sur les structures des prestations, il nous faut relever également certaines difficultés de mise en œuvre liées aux montants des prestations. En effet, plus la prestation est importante, plus le risque de fraude est élevé, et plus il est nécessaire de mettre en place des mécanismes de surveillance et de contrôle étendus et intensifs (voir chapitre 8).
La mise en œuvre de prestations forfaitaires est relativement simple. Elles sont utilisées dans tous les types de programmes de protection sociale : pensions sociales, allocations pour enfants, transferts monétaires conditionnels et inconditionnels, et allocations d’invalidité (voir annexe 5A). La plupart des prestations forfaitaires sont définies par un montant fixe pour chaque bénéficiaire (par individu, famille ou ménage). Certaines sont toutefois calculées en pourcentage d’une valeur de référence, telle que le salaire minimum. C’est le cas, par exemple, de la prestation d’assistance en cas de chômage en Arménie et de la pension sociale au Brésil. Les prestations forfaitaires requièrent un minimum d’informations, sont faciles à communiquer et entraînent des mises à jour, des corrections et des réclamations moins fréquentes. Les prestations forfaitaires simplifient également le traitement des paiements, la réconciliation et les audits.
Certains programmes calculent les prestations sur base de la taille du ménage, tandis que d’autres considèrent à la fois la taille et la composition. Les objectifs de conception peuvent consister à favoriser les familles nombreuses (ou du moins à ne pas les défavoriser en fonction du nombre de personnes) ; à favoriser les ménages dont certains membres sont plus vulnérables (comme les femmes enceintes ou allaitantes, les jeunes enfants, les personnes âgées ou en situation de handicap), et à promouvoir des incitations spécifiques, telles que des niveaux de prestations plus élevés pour les adolescents pour lesquels les coûts d’opportunité de la fréquentation de l’école sont plus élevés que ceux de leurs frères et sœurs plus jeunes. Le programme de transferts sociaux en espèces du Malawi différencie les niveaux de prestations en fonction de la taille des ménages. De même, le programme de transferts monétaires Burkin-Naong-Sa Ya du Burkina Faso différencie les niveaux de prestations en fonction du nombre d’enfants ; les ménages ayant moins de cinq enfants de moins de 15 ans reçoivent un transfert de 30 000 FCFA (51 USD) tous les trois mois, contre 40 000 FCFA (68 USD) par trimestre pour les ménages en ayant cinq ou plus. Le programme Prospera du Mexique différencie les niveaux de prestations en fonction de l’année scolaire et du sexe, et la Tanzanie, en fonction du niveau d’éducation des enfants des ménages bénéficiaires (voir tableau 5.2). Parmi les autres exemples de programmes ciblant la pauvreté qui différencient les prestations en fonction de la taille et de la composition des ménages, on peut citer les transferts monétaires conditionnels ou inconditionnels en Croatie, en Jamaïque, aux Philippines et en Tanzanie. Ces structures de prestations n’ajoutent pas beaucoup de complexité à la mise en œuvre. Les exigences en matière d’information pour le calcul des prestations en fonction de la taille et de la composition du ménage reposent en grande partie sur les informations déjà recueillies pour l’éligibilité. Elles peuvent parfois accroître la complexité de l’étape de gestion des opérations des bénéficiaires. Étant donné que l’entité assistée est le ménage (plutôt que l’individu) et que la taille et la composition du ménage sont dynamiques, les données requises pour le calcul des prestations comprennent des informations de suivi et de liaison pour chaque membre du ménage, et pas seulement pour le récipiendaire désigné. Ces informations doivent être tenues à jour, ce qui ajoute à la tâche de gestion des opérations des bénéficiaires.
Certains programmes différencient également le calcul des prestations en fonction du groupe socioéconomique, afin de fournir des prestations plus importantes aux ménages des groupes les plus pauvres. Parmi ceux-ci figure le Programme brésilien Bolsa Família, qui verse des prestations plus élevées aux ménages classés comme extrêmement pauvres qu’à ceux considérés comme modérément pauvres (le programme différencie également les prestations en fonction de la taille et de la composition du ménage). Du point de vue de la mise en œuvre, une fois l’éligibilité établie, peu d’informations supplémentaires sont nécessaires pour calculer les prestations, car le ménage a déjà été jugé pauvre. La complexité de ce système est similaire à celle des prestations fondées uniquement sur la taille et la composition
Tableau 5.2 Structure des prestations du programme PSSN de la Tanzanie
Composante du PSSN Type de transfert Nom du transfert Coresponsabilité Prestation (TSh) Plafond mensuel (TSh) Plafond annuel (TSh)
TMC
Fixe Transfert de base Extrême pauvreté 10 000 10 000 120 000
Fixe Allocation pour enfants du ménage Ménage avec enfants de moins de 18 ans 4 000 4 000 48 000
Variable Allocation pour nourrisson Conformité sanitaire des petits de 0 à 5 ans 4 000 4 000 48 000
Variable Prestation individuelle pour l’école primaire
Variable Prestation individuelle pour l’enseignement secondaire inférieur Conformité scolaire au primaire
Conformité scolaire pour l’enseignement secondaire inférieur 2 000 8 000 96 000
4 000 12 000 144 000
Variable Prestation individuelle pour l’enseignement secondaire supérieur Conformité scolaire pour l’enseignement secondaire supérieur 6 000
Variable Prestation pour travaux publics Extrême pauvreté et personnes de plus de 18 ans en mesure de travailler 2 500 37 500 150 000
Source : Banque mondiale, 2016. Note : TMC = transfert monétaire conditionnel ; PSSN = Filet de sécurité sociale productif ; TP = travaux publics.
du ménage. Il peut certes être un peu plus difficile pour les gens de comprendre le niveau de leurs prestations (ou sa façon de différer de celui de leurs voisins), ce qui peut entraîner un certain nombre de réclamations supplémentaires (voir la section du chapitre 8 sur les réclamations). Le traitement et la réconciliation des paiements ne posent pas de problème particulier avec cette structure des prestations, bien que les audits puissent être plus complexes s’ils vérifient la taille et la composition des ménages ainsi que les classifications de la pauvreté. Hormis les réévaluations périodiques, les exigences au stade de la gestion sont comparables à celles des programmes où les prestations sont calculées uniquement en fonction de la taille et de la composition du ménage.
Les structures de prestations les plus complexes différencient les prestations en fonction du montant qu’un ménage devrait recevoir pour que le niveau de son revenu atteigne un certain minimum. Le programme de revenu minimal garanti (RMG) de la Bulgarie est un exemple typique de cette approche (voir encadré 5.7), qui fixe des niveaux pour le revenu familial existant, en plus de la taille et de la composition du ménage. Les prestations sont calculées pour chaque membre de la famille en fonction de ses caractéristiques et de la différence entre le revenu de la famille et le revenu minimum différencié (RMD) afin de porter son revenu à ce niveau minimum adapté. Les exemples de l’encadré 5.7 ne sont présentés que pour deux niveaux de revenus