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Balades japonaises
JĂŠrĂŠmie Souteyrat pour Zoom Japon
gratuit hors-sĂŠrie 1 - mars 2012
www.zoomjapon.info
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AVANT-PROPOS INVITATION
Saisir l’occasion qui se prÊsente
Disposant d’un potentiel extraordinaire et encore trop peu connu, l’archipel est une destination qu’il faut dÊcouvrir d’urgence.
JĂŠrĂŠmie Souteyrat pour Zoom Japon
C
’est ici que le soleil parmi des brumes diaphanes surnage — lotus vermeil — sur les flots ocĂŠaniens‌ Puis il monte sur sa tige d’or, ĂŠparpillant ses pĂŠtales roses. En nuages lĂŠgers, monte au zĂŠnith en lotus blanc, rayonnant comme un diamant. Dans un ciel laiteux, candide‌â€? C’est en ces termes que commençait le chapitre consacrĂŠ Ă Nihon - L’Île du Soleil-levant dans Le Japon mystique, petit guide en français ĂŠditĂŠ en 1927 par Les Chemins de fer de l’Etat japonais. A l’Êpoque, il n’y avait pas de mots trop forts pour dĂŠcrire le Japon afin d’attirer une clientèle curieuse de dĂŠcouvrir les “mystèresâ€? du Japon. Quatre-ving-cinq ans plus tard, c’est le Japan cool que l’on vante pour sĂŠduire les touristes, tout en continuant Ă dĂŠfendre les valeurs sĂťres de la tradition touristique comme KyĂ´to. Zoom Japon, dont le premier numĂŠro est paru en juin 2010, encourage ses lecteurs francophones Ă se rendre dans l’archipel japonais pour en apprĂŠcier la richesse et la diversitĂŠ, tout en refusant de se limiter aux destinations classiques. Dans ce hors-sĂŠrie, premier du genre pour notre publication, nous vous proposons justement quelques balades dans des endroits moins connus, donc moins frĂŠquentĂŠs par les touristes ĂŠtrangers afin, espĂŠrons-nous, de susciter votre envie de partir Ă la dĂŠcouverte de cet extraordinaire pays. Celui-ci dispose de très nombreux atouts pour rendre l’expĂŠrience inoubliable. Nous pourrions parler du service quasiment irrĂŠprochable, de la nourriture indubitablement savoureuse, des transports forcĂŠment Ă l’heure ou des hĂ´tels irrĂŠmĂŠdiablement confortables, mais nous nous contenterons d’Êvoquer six lieux dont la visite s’impose si l’on souhaite sortir des sentiers battus. Au lieu de vous prĂŠ-
A Miyajima, le grand torii de 16 mètres annonce le superbe sanctuaire d’Itsukushima construit sur la mer.
senter Miyajima (voir la photo ci-dessus), nous avons dĂŠcidĂŠ de mettre l’accent sur Hiraizumi qui, Ă l’instar de Miyajima, est inscrit au Patrimoine de l’humanitĂŠ par l’Unesco. C’est un endroit que le poète BashĂ´, père du haiku, apprĂŠcia particulièrement lors de son voyage dans le nord-est du pays au XVIIème siècle. PlutĂ´t que KyĂ´to (voir notre photo de couverture), nous avons voulu mettre Ă l’honneur Takayama qu’on a surnommĂŠe la “petite KyĂ´to des Alpes japonaisesâ€?. Cette ville fait de gros efforts pour accueillir le public francophone. Nous aurions tort de ne pas en profiter. Nous n’avons pas non plus voulu insister sur le quartier d’Akihabara, Ă TĂ´kyĂ´, devenu La Mecque des amateurs de
culture pop japonaise, mais plutôt sur le quartier de Shin-Ôkubo, royaume de la culture pop‌ corÊenne dont les Japonais sont aujourd’hui complètement fous. Il y a d’autres endroits à dÊcouvrir dans ce petit hors-sÊrie dont le but principal est de susciter l’envie de faire vos bagages pour vous rendre dans un pays dont la richesse est à peine effleurÊe ici. C’est aussi une invitation à nous lire plus rÊgulièrement, chaque mois par exemple, en rÊcupÊrant un exemplaire dans l’un de nos 850 points de distribution en France, sur Internet (www.zoomjapon.info) ou, mieux encore, en vous abonnant. ODAIRA NAMIHEI
Couverture : Kiyomizu-dera Ă KyĂ´to, photo de JĂŠrĂŠmie Souteyrat pour Zoom Japon
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SOMMAIRE PARTIR
Suivez le guide
Jérémie Souteyrat pour Zoom Japon
L
’archipel japonais est composé de plus de 3 500 îles. Il s’étire sur près de 3 000 kilomètres. Les quatre principales îles sont du nord au sud Hokkaidô, Honshû, Shikoku et Kyûshû, auxquelles il faut ajouter Okinawa. Cet ensemble géographique tout en longueur lui permet de bénéficier de variations climatiques importantes dont chaque région sait tirer avantage. Ainsi le voyageur, amateur de cerisiers en fleurs, peut suivre la floraison de ce magnifique arbre sur près de trois mois entre le moment où les premières fleurs apparaissent à Kyûshû et les dernières à Hokkaidô. En revanche, l’une des caractéristiques communes à toutes ces régions, c’est la presence des montagnes. Elles occupent plus de 70 % du territoire, ne sont quasiment pas peuplées et donc recouvertes la plupart du temps de forêts qui, au printemps et en automne, assurent un spectacle étonnant au voyageur qui restera sans voix devant les couleurs qu’elles leur réservent. Pays insulaire, le Japon est évidemment très liés à la mer,
N
sa cuisine en est une parfaite illustration. Mais c’est aussi un pays qui a su développer une agriculture variée dont les restaurateurs savent aussi tirer profit. C’est donc dans cet archipel à l’histoire et la culture très riches que nous vous proposons de faire quelques balades. Dans chacune des destinations présentées dans ce hors-série, vous retrouverez une ou plusieurs des caractéristiques évoquées ci-dessus. Il ne vous reste plus qu’à suivre le guide. Bon voyage.
HOKKAIDÔ Sapporo
Hiraizumi p. 4 Sendai
HONSHÛ p. 22 Shirakawagô p. 21 Takayama Kyotô Kôbe
Fukuoka
KYÛSHÛ
Ôsaka
Nagano
Tôkyô p. 12
Nagoya
Kamakura p. 8
SHIKOKU OKINAWA
Amakusa p. 18
200 km
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Gabriel Bernard
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A Chûson-ji, au milieu des arbres, un toit apparaît.
PATRIMOINE
Les mystères de Hiraizumi
L’ancien centre culturel et intellectuel du nord-est du Japon constitue une belle étape pour sortir des sentiers battus.
L
a préfecture d’Iwate a été fortement touchée par le séisme et le tsunami du 11 mars 2011. De nombreuses séquelles sont encore visibles le long de sa côte Pacifique, mais à l’intérieur des terres, de nombreuses zones ont été épargnées par la nature déchaînée. C’est notamment le cas de Hiraizumi qui, le 28 juin, a été inscrit au Patrimoine de l’humanité par l’Unesco après plusieurs années d’attente. La nouvelle a suscité une immense vague d’enthousiasme à un moment où la population locale avait besoin d’un
4 ZOOM JAPON hors-série 1 mars 2012
petit coup de pouce au moral. Il faut dire que Hiraizumi a souffert indirectement de la tragédie puisque de nombreux touristes ont choisi d’éviter cette partie du pays en raison des répliques et de la situation à la centrale de Fukushima pourtant très éloignée. A Hiraizumi, on a donc accueilli avec soulagement l’inscription du site dont la vocation originelle était d’incarner le “paradis sur terre” entièrement dédié aux principes du bouddhisme. Voulu par le clan Fujiwara qui avait quitté Kyôto, en particulier le premier d’entre eux Kiyohira qui avait fait fortune grâce aux mines d’or, ce lieu a pris une importance considérable à partir du XIIème siècle avec la construction de très nombreux temples et jardins dont la plupart ont été
détruits lors de raids menés par l’armée du shôgun Yorimoto. Cependant, ceux qui ont échappé à ce triste sort permettent d’imaginer aisément la richesse de la ville et méritent que le voyageur prenne le temps d’y faire halte. Très facile d’accès, notamment par le train, Hiraizumi est une destination qui mérite une visite d’au moins une journée sinon deux jours pour en percer tous les mystères et en découvrir les charmes. Désireux de créer un centre intellectuel et culturel aussi prestigieux que Kyôto, les Fujiwara ont redoublé d’efforts pour y parvenir. Les principaux vestiges de cette splendeur passée se situent au nord et au sud de la ville. Pour le voyageur qui ne veut pas s’attarder, il est recommandé de se rendre à Chûson-ji accessible avec
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HIRAIZUMI Hokkaidô
Rivière K oromo ku Tôh o le JR
Honshû
Tokyo
Shikoku Kyûshû
Takadachi Gikei-dô Poste
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Centre du patrimoine culturel de Hiraizumi
H I R A I Z U M I Office du tourisme
Temple Môtsû-ji de Môtsû
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Gare de Hiraizumi
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Vers Takkoku-no-iwaya Bishamon-dô
Vers Ichinoseki
Konjiki-dô
Chûson-ji Nôbutai
Kyûôi-dô
Statue de Matsuo Bashô
Hondô
Kyûôi-dô
Sankôzô
Benkei-dô
Nôbutai
Tsukimizaka Arrêt de bus Chûson-ji 200 m
Ligne principale JR Tôhoku
Konjiki-dô
RN4
Pour rappeler sa présence sur les lieux, une statue du poète a été érigée à proximité. La Chapelle d’or et son extraordinaire Bouddha Amida Nyorai bénéficient ainsi de la caution du plus illustre des écrivains japonais. Les amateurs de haiku s’arrêtent souvent devant la représentation de Bashô pour lui rendre hommage avant de reprendre leur découverte du site et déambuler dans les allées. Ils se retrouvent ensuite devant le Kyûôi-dô, l’ancien bâtiment en bois qui protégeait du vent et de la neige le Konjiki-dô. Malgré sa sobriété, l’édifice qui date du XIVème siècle vaut le coup d’œil, ne serait-ce que pour observer l’ingéniosité de ses architectes ou simplement se recueillir en se disant qu’il y a plus de trois siècles un grand poète se trouvait ici même. A une centaine de mètres de là, on trouve une
Hiraizumi
cipa
Temple de Chûson Chûson-ji
Samidare no Furi nokoshite ya Hikari-dô De la cinquième lune Les pluies épargneraient-elles La Chapelle d’or
Vers Morioka
500 m
Ligne pri n
le bus RunRun (4 mn) ou à pied (compter 20 mn). La promenade est agréable notamment en automne ou au printemps au moment où la nature expose ses plus belles couleurs. Chûson-ji, qui regroupe un ensemble de temples, est implanté au milieu de la forêt. On y pénètre par Tsukimizaka, un chemin bordé de cyprès du Japon plantés il y a près de 400 ans. Selon la saison, on voit de très nombreux Japonais s’y attarder pour apprécier la beauté de ces arbres dont les feuilles prennent des couleurs extraordinaires en octobre et novembre ou celle de la neige qui envahit le lieu en hiver. Ce chemin constitue une mise en bouche des plus agréables, il rappelle combien la nature occupe une place centrale dans la culture nippone. A Chûson-ji, c’est d’autant plus marquant qu’il s’agissait d’illustrer le paradis sur terre. C’est en 850 que le moine Ennin a commencé à édifier les temples de Chûsonji, mais c’est sous l’impulsion de FUJIWARA Kiyohira que l’ensemble devint un important centre religieux puisqu’il y fit bâtir près de 40 temples. Parmi eux, ne subsiste aujourd’hui que le magnifique Konjiki-dô (Chapelle d’or) achevé en 1124. Il est recouvert de feuilles d’or et serti de nacre venue d’Okinawa. Le sanctuaire intérieur comporte 33 statues, dont la principale et la plus importante est une représentation du Bouddha Amida Nyorai, assis. Quatre membres du clan F UJIWARA reposent dessous. Cet étonnant édifice, consacré trésor national par les autorités, a inspiré le poète Bashô, le père du haikai ou poème enchaîné, qui l’avait poussé jusqu’à Chûson-ji lors de son périple dans le nord de l’archipel en 1689. Il a rapporté dans son journal de voyage Oku no hosomichi (La Sente étroite du bout du monde) son émerveillement devant le Konjiki-dô ou Hikari-dô (Chapelle de lumière) en lui consacrant un poème :
Vers Hiraizumi
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scène de thÊâtre nĂ´ reconstruite en 1853. Câ&#x20AC;&#x2122;est la seule en son genre dans tout le nord-est de lâ&#x20AC;&#x2122;archipel. On y prĂŠsente de temps en temps des spectacles, mais elle sert principalement lors de la fĂŞte des FUJIWARA (Fujiwara Matsuri) qui a lieu chaque annĂŠe en mai et en novembre. ConsĂŠquence du sĂŠisme du 11 mars, celle de mai 2011 a ĂŠtĂŠ annulĂŠe, mais elle reprendra lâ&#x20AC;&#x2122;annĂŠe prochaine. Câ&#x20AC;&#x2122;est une des grandes attractions de Hiraizumi puisquâ&#x20AC;&#x2122;elle se dĂŠroule dĂŠbut mai, câ&#x20AC;&#x2122;est-Ă -dire au moment de la golden week quand la plupart des Japonais prennent plusieurs jours de congĂŠs consĂŠcutifs. On peut terminer la visite de ChĂťson-ji par HondĂ´, le pavillon principal qui se trouve au centre de ce vaste ensemble. Lâ&#x20AC;&#x2122;ĂŠdifice reconstruit en 1909 est le plus imposant de tout le site, mais on lui prĂŠfĂŠrera la maison de thĂŠ ShĂ´juan oĂš lâ&#x20AC;&#x2122;on peut savourer un dĂŠlicieux thĂŠ vert et des pâtisseries japonaises tout en contemplant les jardins. Il est alors temps de quitter ce bel endroit pour faire dâ&#x20AC;&#x2122;autres dĂŠcouvertes ou reprendre le train. Le bus repasse par la gare ou peut vous mener Ă MĂ´tsĂť-ji qui se trouve au sud de la ville. FondĂŠ en 850 par Jikaku Daishi, ce complexe monastique a longtemps ĂŠtĂŠ considĂŠrĂŠ comme lâ&#x20AC;&#x2122;un des plus beaux de lâ&#x20AC;&#x2122;archipel grâce aux investissements consentis par les FUJIWARA avant sa destruction par le feu en 1226. Son immense jardin qui reprĂŠsente le paradis sur terre du Bouddha de la Terre pure est magnifique. Il entoure lâ&#x20AC;&#x2122;ĂŠtang du Grand printemps (Ă&#x201D;izumigaike), seul vestige de lâ&#x20AC;&#x2122;ĂŠpoque Heian et lâ&#x20AC;&#x2122;un des très rares du pays. En parcourant le jardin, on peut voir les traces des anciens bâtiments disparus, mais on peut surtout profiter encore une fois de la nature. En juin, lâ&#x20AC;&#x2122;ĂŠclosion des iris qui donne lieu Ă la fĂŞte des iris (Ayame matsuri) est un spectacle Ă ne pas manquer. Il est probable quâ&#x20AC;&#x2122;un Claude Monet amateur de cette fleur aurait adorĂŠ peindre cette symphonie de bleus. Lâ&#x20AC;&#x2122;endroit est propice Ă la mĂŠditation et Ă la poĂŠsie, câ&#x20AC;&#x2122;est sans doute pour cette raison quâ&#x20AC;&#x2122;on y a installĂŠ une ĂŠnorme stèle sur laquelle a ĂŠtĂŠ gravĂŠ le fameux haiku de Matsuo BashĂ´ : Natsukusa ya
moto no Yoshitsune, lâ&#x20AC;&#x2122;un des grands hĂŠros japonais, connut une fin tragique. Ce guerrier qui combattit aux cĂ´tĂŠs de Minamoto no Yoritomo, puissant seigneur qui crĂŠa le shogunat, devint bientĂ´t son pire ennemi. MalgrĂŠ la prĂŠsence de son serviteur Benkei, il aurait fini par se donner la mort faute de pouvoir trouver une issue dans le combat quâ&#x20AC;&#x2122;il menait. Un mĂŠmorial (Takadachi Gikei-dĂ´) lui est consacrĂŠ au sommet dâ&#x20AC;&#x2122;oĂš lâ&#x20AC;&#x2122;on a une belle vue sur Hiraizumi et ses environs. A la suite du dĂŠcès de Yoshitsune, Yoritomo dĂŠcida de raser Hiraizumi et de dĂŠtruire ce que les FUJIWARA avaient mis en place. Mais pour beaucoup, Yoshitsune nâ&#x20AC;&#x2122;est pas mort Ă Hiraizumi. Il aurait fui avec Benkei en Mongolie oĂš il serait devenu Gengis Khan, laissant mourir Ă leur place deux sosies pour tromper son rival. Une lĂŠgende qui est soigneusement entretenue par la population locale. Câ&#x20AC;&#x2122;est ce qui fait aussi le charme de cette citĂŠ si fière aujourdâ&#x20AC;&#x2122;hui de son glorieux passĂŠ. Il suffit de se prendre au jeu et de sâ&#x20AC;&#x2122;imaginer remonter le temps. Dans cette partie du Japon oĂš la nature est très prĂŠsente, il est facile dâ&#x20AC;&#x2122;oublier que lâ&#x20AC;&#x2122;on vit au XXIème siècle. Que ce soit Ă ChĂťson-ji, Ă MĂ´tsĂťji ou au Takadachi Gikei-dĂ´, par une journĂŠe un peu brumeuse, en fermant les yeux et vous concentrant, vous entendrez peut-ĂŞtre remonter les voix des guerriers, des moines bouddhistes ou du poète BashĂ´ qui vous remercieront dâ&#x20AC;&#x2122;ĂŞtre venu passer un moment en leur compagnie. Hiraizumi comme toute cette partie de lâ&#x20AC;&#x2122;archipel a bien besoin de la prĂŠsence de touristes qui nâ&#x20AC;&#x2122;ont pas peur de faire un petit voyage dans le temps et dâ&#x20AC;&#x2122;en revenir comblĂŠs pour peu quâ&#x20AC;&#x2122;ils acceptent de prĂŠserver une petite part de mystère. GABRIEL BERNARD Statue de Matsuo BashĂ´ Ă proximitĂŠ de Konjiki-dĂ´.
Tsuwamono domo ga Yume no ato Herbes folles de lâ&#x20AC;&#x2122;ĂŠtĂŠ â&#x20AC;&#x201D; oĂš frĂŠmit encore le rĂŞve des guerriers Le poète sâ&#x20AC;&#x2122;ĂŠtait rendu sur la colline Takadachi oĂš Mina-
PRATIQUE POUR Sâ&#x20AC;&#x2122;Y RENDRE Au dĂŠpart de TĂ´kyĂ´, empruntez le TĂ´hoku Shinkansen (Hayate ou Yamabiko) jusquâ&#x20AC;&#x2122;Ă Ichinoseki. Il y a deux trains par heure. Prendre ensuite la ligne principale JR TĂ´hoku jusquâ&#x20AC;&#x2122;Ă Hiraizumi (8 mn). De lĂ , on peut marcher ou emprunter le bus RunRun (300 yens, billet valable une journĂŠe). Pour en savoir plus, consultez le site de lâ&#x20AC;&#x2122;ofďŹ ce du tourisme : www.hiraizumi.or.jp/en
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Gabriel Bernard
HIRAIZUMI
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Gabriel Bernard
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Les Japonais adorent les trains. La ligne Enoden qui relie Kamakura à Fujisawa est particulièrement appréciée.
ESCAPADE
Si loin et si proche de Tôkyô
A moins d’une heure de la capitale, Kamakura ne manque pas de charme et saura vous faire oublier la grande ville.
Q
uitter Tôkyô pour une autre capitale, plus ancienne, telle est l’idée qui se cache derrière ce petit voyage. Je ne parle pas de Kyôto qui ne manque pas de charme, mais de Kamakura qui devint la capitale de Minamoto no Yoritomo en 1192 et donna son nom à la période historique qui s’étend de 1192 à 1333. Située à moins d’une heure de train (ligne JR Yokosuka) de Tôkyô, cette cité de 174 000
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âmes présente bien des avantages pour le voyageur en quête d’un peu de fraîcheur que la mer, les forêts et les nombreux édifices religieux rassemblés dans ce même lieu pourront lui apporter. A une époque particulièrement agitée de son histoire, Kamakura devient à partir du XIIème siècle un des hauts lieux du bouddhisme zen, ce qui explique la présence de plus de soixante temples. On trouve également près d’une vingtaine de sanctuaires shintoïstes, ce qui signifie que le programme des visites sera chargé. Voilà pourquoi, je recommande de passer au moins deux jours sur place sinon trois si l’on veut également profiter du
front de mer dans la baie de Sagami que les Japonais aiment tant et dont les couchers de soleil sont mémorables.
PRATIQUE POUR S’Y RENDRE Au départ de Tôkyô, la ligne JR Yokosuka jusqu’à Kita-Kamakura (780 yens) ou Kamakura (890 yens). Au départ de Shinjuku, prenez la JR Shônan Shinjuku Line (890 yens). POUR Y DORMIR Le Kaihinsô Kamakura est un bel hôtel des années 1920 à deux pas de la gare de Yuigahama (Yuigahama eki). A partir de 18 900 yens en demi-pension. www.kaihinso.jp
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KAMAKURA jusqu’à Tsurugaoka Hachiman-gû, le principal sanctuaire shintoïste de Kamakura érigé au cœur de la cité en 1180. Très différent des temples visités précédemment, ce sanctuaire constitue une belle conclusion pour la première journée à Kamakura. Même si la balade à l’ombre des arbres n’a pas été trop éprouvante, la chaleur se fait tout de même sentir de même que la faim. Puisque vous êtes désormais à proximité de la gare de Kamakura, vous trouverez aisément de quoi
ligne de train encore en service dans l’archipel. De très nombreux amoureux des trains viennent spécialement à Kamakura pour photographier les voitures dont la couleur jaune pâle et verte est connue de tous dans le pays. Pour 580 yens, vous pouvez bénéficier d’un billet à la journée qui permet de descendre et reprendre le train à tout moment pour profiter des nombreuses attractions à proximité des gares de la ligne. Si l’on veut garder le rythme des visites, on peut choi-
Gabriel Bernard
Comme il se doit au Japon, Kamakura ne déroge pas à la règle, la visite s’organise à partir de la gare (ou des gares). Si l’on souhaite être efficace et profiter au maximum de la concentration des transports en commun, il convient de descendre à la gare de Kamakura (Kamakura eki) qui est aussi le terminus de la ligne Enoden dont une grande partie du parcours longe la côte. Plusieurs bus partent également de cette gare et desservent les principaux sites touristiques. Toutefois, si l’on a choisi d’arriver tôt et si l’on dispose d’assez de temps, il est bien plus agréable de partir à la découverte des richesses de cette ville en descendant à Kita-Kamakura (Kita-Kamakura eki), la gare qui précède celle de Kamakura. De là, on peut entreprendre une belle balade qui va nous mener vers les joyaux architecturaux et historiques de l’ancienne capitale. Première étape de la promenade : le temple Engaku (Engakuji) à deux minutes de la gare. Fondé en 1282 en hommage aux Japonais et Mongols morts lors des deux tentatives avortées d’invasion de l’archipel par les Mongols, le site est entouré d’arbres, ce qui rend la visite très agréable l’été. Au printemps, les cerisiers en fleurs attirent beaucoup de visiteurs tout comme en automne au moment où les feuilles prennent ces tons rougeoyants qui nous fascinent tant. La porte San-mon, qui a inspiré le romancier NATSUME Sôseki pour son roman La Porte [trad. de Raymond Martinie, éditions Sillage, 2010], est le seul vestige rappelant la grandeur du site qui abrite également deux trésors nationaux : la grande cloche de 1301 et le pavillon des reliques (Shari-den). La visite du temple Engaku peut s’achever à la maison de thé Benten-dô où l’on savourera un délicieux macha (600 yens), en contemplant la nature située en contrebas. Ensuite, on prend la direction du temple Kenchô (Kenchô-ji) situé à environ 15 minutes à pied. Premier temple zen du pays fondé en 1253, il est le plus beau des quatre autres implantés dans la ville. Sa salle du Bouddha (Butsu-den) et son dragon dans les nuages (Unryû) peint, dans les années 1920, au plafond du hall des cérémonies publiques (Hattô) valent le déplacement. Après ce magnifique site, une petite marche de dix minutes nous conduit
Le grand Bouddha (Daibutsu) du Kôtoku-in est une des grandes attractions de Kamakura.
vous restaurer. Vous avez ensuite la possibilité de repartir vers Tôkyô par l’un des nombreux trains de la ligne JR Yokosuka ou bien de prolonger le plaisir en empruntant la fameuse ligne Enoden qui relie Kamakura à Fujisawa en une trentaine de minutes dont une partie du trajet longe la magnifique côte. Plus proche du tram que du train proprement dit, la ligne Enoden a été ouverte en 1902. C’est la troisième plus ancienne
sir de se rendre au Kôtoku-in où se trouve l’imposante statue de Bouddha (Daibutsu). Situé à une dizaine de minutes de la gare de Hase, ce site vaut essentiellement le déplacement pour cette statue en bronze de 13,35 m de haut et d’un poids 121 tonnes. Inspiré par le grand Bouddha du Tôdai-ji de Nara, celui de Kamakura est plus petit, mais à la réputation d’être plus beau. En tout cas, difficile de faire l’économie d’un passage
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KAMAKURA devant cette magnifique sculpture comme il serait presque inconvenant de ne pas se rendre ensuite au temple de Hase (Hase-dera) situé à environ cinq minutes du Kôtoku-in. Ce magnifique endroit mérite de s’y arrêter un bon moment afin de profiter de toutes ses richesses. La plus célèbre d’entre elles est une sculpture de Kannon, la déesse du pardon, à onze têtes située dans le Kannon-dô qui dispose aussi d’une terrasse d’observation donnant sur la baie de Sagami. A droite, dans le pavillon Amida-dô, vous trouverez la statue en or de Yakuyoke qui protège des esprits malins. En automne, la visite de ce temple est particulièrement agréable au moment où les arbres changent de couleur. En été, ce sont les hortensias qui dominent. Tout autour du temple de Hase, des centaines d’hortensias font apparaître des touches de rose, pourpre et blanc sur le chemin qui mène au sanctuaire Lign
600 m
Temple d'Engaku
Kita-Kamakura
FUKASAWA 1
PRÉFECTURE
JR
DE KANAGAWA
Yo k o s u k a
NISHIKAMAKURA 5
Temple de Kenchô
Ligne
Ligne E noden
ne Lig
Juste à la sortie de la gare de Sichirigahama (Shichirigahama eki) qui se trouve entre celles d’Inamuragasaki et Kamakura Kôkômae, le restaurant Amalfi della Sera dont le nom et l’architecture rappellent davantage l’Italie que le Japon sert une bonne cuisine méditerranéenne. Cependant, sa célèbre terrasse est souvent prise d’assaut. On peut poursuivre jusqu’à la gare d’Enoshima (Enoshima eki) pour une balade à pied sur Enoshima au crépuscule. Que vous ayez passé une seule journée ou que vous soyez resté plus longtemps, Kamakura aura réussi à vous faire oublier Tôkyô et sa chaleur. Vous aurez fait le plein de belles images et de souvenirs à partager avec vos amis. G. B.
Vers Ôfuna
e JR Tô k a i d ô
Od
ak
yû
Vers Fujisawa
de Goryô (Goryô jinja), au Jôju-in et au temple de Gokuraku (Gokuraku-ji) d’où vous pourrez reprendre la ligne Enoden. A partir de cet instant, vous pourrez oublier les temples et autres sanctuaires pour vous concentrer sur la mer et la silhouette d’Enoshima qui se détache à l’horizon. Bon nombre de Japonais s’arrêtent à la gare d’Inamuragasaki (Inamuragasaki eki) ou Kamakura Kôkômae (Kamakura Kôkômae eki). De très nombreux films ou téléfilms y ont été tournés, mais surtout ces deux endroits permettent de magnifiques prises de vue notamment au moment où le soleil se couche. Les jeunes couples adorent ces lieux où l’on trouve de nombreux restaurants avec terrasse. Mais ne vous attendez pas à un repas digne de la plus haute gastronomie. Cela dit, un inoubliable coucher de soleil vaut parfois un dîner de qualité moyenne.
2
Sanctuaire de Tsurugaoka Hachiman-gû 3
4
Kamakura
Kôtoku-In (Grand Bouddha) Temple de Hase Enoshima 6
Kamakura Kôkômae
B a i e
d e
Enoshima
S a g a m i 1 2
Observatoire d’Enoshima
10 ZOOM JAPON hors-série 1 mars 2012
3
Temple de Gokuraku Gokuraku-ji Shichirigahama
Hase Temple de Goryô
Yuigahama Plage
de K
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Hokkaido
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Honshu
Imamuragasaki
Temple d'Engaku Gare de Kamakura Sanctuaire Tsurugaoka Hachiman-gû
4 5 6
Gare de Gokuraku-ji Gare d’Enoshima Enoshima vue de la gare de Kamakura Kôkômae
Tokyo
Shikoku Kyushu
Kamakura
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GUIDES GUIDE
Le Japon dans la poche
Pourquoi s’encombrer d’un volumineux guide quand vous pouvez avoir le meilleur sur une grande feuille pliée en trois.
une région ou sur une ville. Avec Been There, Done That, je fournis 26 listes avec trente possibilités à chaque fois. Ce que je propose ressemble à une sorte de pense-bête qui s’avère extrêmement pratique”, explique-t-il. En effet, à côté de chaque proposition figurent quatre petites cases à cocher : “à faire, fait, encore, j’adore”. Le voyageur peut ainsi au fil de son périple dans l’archipel marquer les endroits où il est passé, ceux qu’il a aimés ou ceux qu’il voudrait voir ou revoir. “Je crois que cette approche donne au voyageur un sentiment d’avoir accompli quelque chose”, ajoute Harry Cheng qui préfère limiter les informations fournies. “De toute façon, en un seul clic, vous trouvez les coordonnées de tous les endroits proposés. Pourquoi faire compliqué quand on peut faire simple”. Un large sourire éclaire son visage. Il nous a convaincus et on se demande pourquoi personne n’y avait pensé avant lui. O. N.
A
vant de partir en voyage, en général, on se documente. On se rend chez son libraire préféré et on achète un ou deux guides pour se faire une idée des endroits à visiter et des choses à faire une fois sur place. Compte tenu de leur poids souvent conséquent, on préfère les laisser chez soi et noter sur une feuille de papier les lieux à visiter. Harry Cheng a imaginé de faire ce travail de défrichage. Il propose ainsi un guide qui ne ressemble à aucun autre puisqu’il se présente sur la forme d’un document dépliable à la manière d’une carte routière sur lequel figure quelques petites cartes, mais surtout 26 listes de lieux, plats, souvenirs ou encore stations thermales qu’un touriste digne de ce nom doit avoir vus, goûtés ou achetés. Intitulé simplement Been there, Done that [Je suis allé là-bas, j’ai fait ça], cet objet qui tient facilement dans la poche arrière d’un jean ou dans un sac à main peut être qualifié de guide même s’il n’en est pas un à proprement parlé puisqu’il ne fournit aucune information détaillée. Ne cherchez pas l’adresse de tel ou tel
LU
Le vrai guide du routard
Vous en rêviez, Julien Joly l’a fait. Il a fait le tour du Japon pour presque rien.
C
musée ou le numéro de téléphone de telle ou telle auberge, car ils n’y figurent pas. Quand on lui demande s’il entend réinventer notre façon de voyager, Harry Cheng, qui a grandi à Kôbe, se gratte un peu la tête avec un petit sourire aux lèvres. “La plupart du temps avant de se rendre dans un pays, on consulte Internet ou un guide touristique dans lequel on trouve de nombreux détails très précieux sur
omme le laisse entendre le sous-titre de ce guide original, il s’agit de donner envie de se rendre au Japon à toutes celles et tous ceux qui n’ont pas beaucoup plus que le prix d’un aller-retour Paris-Tôkyô. En effet, le pays du Soleil-levant reste une destination onéreuse malgré une baisse très sensible des prix ces dernières années. Mais en ces temps de yen fort et d’euro faible, le touriste désireux de parcourir l’archipel y réfléchit à
deux fois et décide parfois même d’attendre des jours meilleurs. Julien Joly fait fi de toutes ces questions matérielles et démontre qu’un voyage au Japon est possible pour peu que vous ayez envie d’approcher les Japonais. “A partir du moment où vous avez décidé de ne dépenser que le strict minimum pour votre voyage, le Japon
RÉFÉRENCES AUTO-STOP AU JAPON : GUIDE PRATIQUE MICROBUDGET de Julien Joly, éd. Solilang, 9,20 € www.autostopaujapon.fr
RÉFÉRENCE BEEN THERE, DONE THAT est commercialisé à compter du 1er avril au prix de 1000 yens [8,70 euros]. Pour en savoir plus, vous pouvez consulter le site www.haveyoubeentheredonethat.travel.
devient une destination tout à fait abordable pour les étudiants ou les fauchés”, affirme-t-il. Il ne s’agit pas seulement de faire de l’auto-stop comme le suggère abusivement le titre de l’ouvrage, mais plutôt de voyager malin même si l’on ne maîtrise pas la langue de MURAKAMI. Il propose d’ailleurs un lexique très pratique qui permet de se repérer facilement lorsqu’on entreprend un voyage comme celui-là. Des adresses, des bons plans et des techniques pour convaincre les automobilistes les plus récalcitrants. Bref, un vade-mecum obligé pour quiconque veut découvrir le Japon autrement. O. N.
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Jérémie Souteyrat pour Zoom Japon
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Dans une des nombreuses boutiques spécialisées, les fans de tous âges de la culture coréenne viennent se procurer ce qui concerne leurs vedettes préférées.
TÔKYÔ
Shin-Ôkubo, un petit coin de Corée
Les fans de pop coréenne sont de plus en plus nombreux au Japon. C’est dans ce quartier qu’on les retrouve. Visite guidée.
L
es rapports entre le Japon et la Corée ont toujours été chaotiques. L’annexion de la péninsule coréenne en 1910 par l’empire du Soleil-levant a laissé un goût amer chez les Coréens qui ont longtemps eu du mal à oublier le joug nippon. Par ailleurs, les Japonais ont souvent considéré par le passé les personnes d’origine coréenne comme des fauteurs de troubles ou des êtres maléfiques. En 1923, au lendemain du séisme qui avait ravagé la région de Tôkyô, des centaines de Coréens ont perdu la vie à la suite de rumeurs les accusant d’être responsables de tous les malheurs qui frappaient le pays. Utilisés comme main-d’œuvre dans l’archipel pendant la Seconde Guerre mondiale, des milliers de personnes originaires de la péninsule sont restées coincées au Japon après 1945. Les Zainichi [ceux qui sont restés au Japon], comme on les a surnommés, ont subi toutes sortes de discriminations qui, avec le temps, se sont heureusement estompées. Le temps aidant à panser les blessures (même si toutes les plaies ne sont pas refermées), les jeunes générations des deux côtés du détroit de Tsushima ont fini par mieux s’accepter et s’ouvrir à la culture du voisin. La Coupe du monde de football coorganisée par la Corée du Sud et le Japon en 2002 a joué en ce sens un rôle déterminant, puisque les autorités coréennes ont levé les restrictions sur les importations de produits culturels japonais, tandis que les Japonais commençaient à s’intéresser de plus en plus à la culture venue de Corée. Près de dix 12 ZOOM JAPON hors-série 1 mars 2012
ans après cet événement, l’intérêt pour la culture pop made in Korea ne cesse de croître. Résumé par l’expression K-pop (Korean pop) en opposition à la J-pop (Japanese pop), cet engouement concerne toutes les couches de la population. Ce fut d’abord les Japonaises dans la quarantaine qui tombèrent amoureuses de la série Fuyu no sonata [Sonate d’hiver] à partir du printemps 2003 et de ses acteurs avant que cette attirance ne touche un public plus large et dépasse le cadre de la télévision. Peu à peu la musique est devenue un des vecteurs les plus importants dans la diffusion de la culture coréenne dans l’archipel. Les groupes ont commencé à déferler, attirant chaque jour de nouveaux amateurs prêts à succomber à leur charme et à leur talent. Pour profiter à fond de leur passion, certains fans n’hésitaient pas à faire le déplacement vers la Corée voisine, se rendant sur les lieux de tournage de leurs séries préférées ou à des concerts. Si le nombre de Japonais, qui font le voyage dans la péninsule pour assouvir leur passion, reste très élevé, ils peuvent tout aussi bien se plonger dans l’univers coréen à Tôkyô. D’une part, les publications consacrées à la K-pop ont poussé comme les champignons après une averse. D’autre part, le quartier de Shin-Ôkubo est devenu le rendezvous obligé de tous ceux qui consomment la culture coréenne. Du supermarché à la boutique de CD, en passant par les restaurants spécialisés, tout ce que la Corée compte d’intéressant s’y trouve. Situé au nord de Shinjuku sur la ligne Yamanote, équivalent de la petite ceinture à Paris, le quartier de ShinÔkubo s’est imposé depuis 5 ans comme le lieu incontournable des amoureux des stars de la K-pop. En l’espace
de quelques années, ce lieu cosmopolite, où vivait une partie de la population immigrée de la capitale, s’est peu à peu transformé en bastion coréen. Les femmes au foyer tombées sous le charme de Bae Yong-joon, star de la série Fuyu no sonata, contribuèrent grandement à transformer ce quartier avec ses petites épiceries en un espace spécialisé dans les produits culturels coréens. Aujourd’hui, la population que l’on rencontre le plus dans les rues de Shin-Ôkubo est principalement composée d’adolescentes et de jeunes adultes, en quête des dernières nouveautés en provenance directe de Séoul. Le boom des boys bands coréens y est pour beaucoup. BigBang ou encore Dongbang Singi, pour ne citer que ceux-là, ont détrôné une partie des vedettes nippones tandis que les groupes féminins comme Kara et Sonyeo Sidae (Girls’ generation) ont commencé à faire de l’ombre à leurs homologues japonaises. Peu à peu, la mode est en train de changer sous l’influence coréenne, ce qui n’est pas forcément du goût de tout le monde. Récemment des manifestations ont été organisées pour dénoncer cette montée en puissance de la culture coréenne dans l’archipel. Malgré le mécontentement des défenseurs de la culture pop japonaise, force est de constater que l’intérêt pour les artistes coréens ne cesse de croître. En d’autres termes, pour être branché au Japon en 2011, il faut oublier Shibuya, Harajuku et même Roppongi pour se rendre d’urgence à Shin-Ôkubo. C’est le meilleur moyen de prendre le pouls du Japon. A la sortie de la gare, on est très vite happé par la foule qui nous entraîne vers les nombreuses boutiques suscitant tant de convoitises. La première d’entre elles est ▶
Numéro de mars 2012
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L’actualité par les livres du monde
Tous les mois en kiosque, tous les jours en ligne sur Books.fr
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TÔKYÔ
Korea n Tow n dôr i
▶ à quelques pas de la gare. C’est pour cette raison que Hanryû Hyakkaten est Geinôjin Tonchang souvent bondé. On y trouve bien éviHiroba Ôkubo dôr i demment les CD des artistes coréens, Hanryu Han Salam mais aussi tout un tas de gadgets et proHyakkaten Gare JR de Shin-Ôkubo duits dérivés dont raffolent les fans. C’est Dongnara Macchan aussi un endroit intéressant pour celles et ceux qui cherchent à ressembler à leurs idoles. En effet, on vient dans ce quartier parce qu’on s’identifie totalement aux vedettes coréennes. Elles ont, semble-t-il, un truc de plus que les artistes Moiza S H I N - Ô K U B O Honten japonais, et à la différence des stars occidentales qu’un Japonais a plus de mal Jongno Hotok à imiter, celles venues de Corée sont bien plus faciles à copier. Il y a une proximité de culture qui n’a échappé à personne. K-Yatai En tout cas à Shin-Ôkubo, tout est fait pour inciter les visiteurs à se mettre dans Korea Plaza la peau d’un Coréen. La présence dans Hanryu Star les rues du quartier d’un jeune talent en dôri Shokuan provenance de Séoul provoque régulièMoiza 2 Hiroba rement des attroupements, les uns réclamant des autographes, les autres vou100 m Restaurant Boutique lant prendre une photo. Bienvenue à Shin-Ôkubo ! Lorsqu’on quitte la grande artère Ôkubo dôri pour s’enfoncer vers la droite ficie aussi d’un grand intérêt de la part des fans de K-pop. dans de plus petites rues, on a l’impression en levant la Ce bâtiment moderne propose à la fois toutes sortes tête en direction des enseignes d’avoir quitté Tôkyô pour de publications sur les stars coréennes, dont bon nomse retrouver au cœur de Séoul. Mais très vite, on est bre d’entre elles ne sont pas écrites en japonais, et au rezramené à la réalité par les rires et les voix de Japonaises de-chaussée des CD et des DVD. On en ressort rarement les mains vides. Il est amusant de voir les clientes qui, d’un pas décidé, se dirigent vers un autre magasin passer de longues minutes à feuilleter, commenter et rêver spécialisé où elles pourront dénicher d’autres merveilles. L’un des plus prisés est implanté dans la Korean Town devant les pages de papier glacé. A force de les voir, vous dôri. Moiza honten est très apprécié parce que son per- finirez peut-être par y prendre goût et ramener un sousonnel parle un japonais parfait et est ainsi en mesure de venir coréen de Tôkyô. répondre à toutes sortes de questions sur les dernières A force de marcher, de piétiner et d’être entraîné par la tendances de l’autre côté du détroit de Tsushima. Devant foule, la fatigue se fera sans doute sentir. Il sera temps le succès de la boutique qui, vue de l’extérieur, ne paie pas alors d’aller profiter d’un bon repas dans l’un des très de mine, ses propriétaires ont ouvert une annexe à une nombreux restaurants de Shin-Ôkubo. Les Japonais centaine de mètres de là baptisée simplement Moiza 2. apprécient beaucoup la cuisine coréenne, en ce sens qu’elle Un peu plus bas dans la même rue, le Korea Plaza béné- est plus relevée que la leur réputée plus raffinée. Cepen-
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dant, ne vous attendez pas à échapper à la fièvre K-pop dans ces endroits. La plupart des établissements doivent non seulement leur notoriété à la cuisine qu’ils servent, mais aussi et peut-être surtout aux prestigieux visiteurs qui les ont fréquentés. Quand on parle de prestigieux visiteurs, on veut évidemment parler des vedettes qui ont daigné prendre un repas chez eux. Dès lors que Dongbang Singi, Jang Keun-suk ou Cho Shin Sung se sont rendus dans tel ou tel restaurant, les fans de ces groupes ou artistes viennent à leur tour goûter les mêmes plats. Sur les murs du Han Salam, on peut choisir sa place en fonction de ses préférences musicales ou télévisuelles puisqu’un grand nombre de stars coréennes y sont venues notamment goûter son fameux samgyetang (soupe de poulet au ginseng). Un vrai régal pour 1380 yens (1500 yens le soir). Tonchang est un autre lieu très apprécié surtout depuis que Jang Keun-suk, acteur, chanteur et mannequin à ses heures, devenu la coqueluche des jeunes Japonaises, y a fait une halte. On y sert une cuisine simple et familiale pour un prix modéré. Son misonabe, mijoté de légumes et de tofu, vaut le déplacement (980 yens). Seul bémol, le lieu n’est pas grand. On y fait donc souvent la queue. S’il vous reste encore quelques forces en réserve, vous pouvez ensuite vous rendre dans l’une des nombreuses salles proposant des concerts comme le K-pop live situé non loin de la gare en face du Geinôjin Hiroba, boutique spécialisée dans l’univers de la variété coréenne. Après avoir passé quelques heures à arpenter Shin-Ôkubo à la découverte de cet étrange engouement nippon pour la culture pop coréenne, vous serez sans doute heureux de reprendre le train et de descendre à Shinjuku, la station suivante, ou Shibuya, un peu plus loin, pour faire le plein de Japon comme vous en rêviez. G. B.
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Dans les petites rues situées à la sortie ouest de la gare de Shinjuku, tous les jours, on peut assister au ballet des autocars
TRANSPORT
Découvrir l’archipel en autocar
Jugeant le train trop cher, de nombreux Japonais choisissent l’autocar. Une autre façon d’appréhender le pays.
T
ous les soirs à partir de 20 heures environ, devant les deux principales gares de la capitale japonaise, Shinjuku et Tôkyô, mais aussi dans plusieurs autres villes de l’archipel, on peut assister à une certaine agitation. Des dizaines d’hommes et de femmes tirant leur valise répondent à l’appel des employés des sociétés d’autocars qui annoncent les nombreux départs prévus. On a beau se trouver devant des gares ferroviaires, ce qui mobilise l’attention de toutes ces personnes, ce sont les autocars qui les emmèneront à Osaka, Nagoya, Hiro-
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shima ou encore Sendai. Elles mettront bien sûr plus de temps pour rejoindre leur destination que si elles avaient emprunté le shinkansen, le train à grande vitesse, mais elles feront une économie non négligeable. Un argument qui, en ces temps de crise, pèse grandement dans la décision de ces hommes et ces femmes. Sur le trajet TôkyôÔsaka, ils feront en moyenne près de 9 000 yens
PRATIQUE A L’EXCEPTION DE WILLER TRAVEL, les sociétés d’autocars ne disposent pas de site en langues occidentales. Si vous avez quelques notions de japonais (ou en utilisant un site de traduction automatique), n’hésitez pas à consulter Kôsoku Bus Net : www.kousokubus.net
[84 euros] d’économie par rapport au train, ce qui est loin d’être négligeable. Sur certaines lignes très concurrentielles, les entreprises se livrent une guerre des tarifs qui profitent très largement aux consommateurs, puisqu’on peut trouver des places à 500 yens [one coin seat, un siège pour une pièce de 500 yens] entre Tôkyô et Nagoya et entre Tôkyô et Osaka. De quoi intéresser les voyageurs prêts à sacrifier la rapidité au profit d’un service bon marché et de mieux en mieux adapté aux besoins des clients. En d’autres termes, n’imaginez pas les Japonais voyager sur de longues distances dans des véhicules au confort sommaire comme on peut en rencontrer en Europe quand on décide de rallier Paris à Amsterdam (à peu près la même distance qu’entre Tôkyô et
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Jérémie Souteyrat pour Zoom Japon
TRANSPORT Ôsaka). Ici, rien n’est laissé au hasard. On soigne le client, car on sait qu’une petite faute de goût peut avoir des conséquences fâcheuses. Désormais, les différentes sociétés qui se sont lancées dans l’exploitation de lignes autoroutières rivalisent d’imagination pour attirer le chaland. Il existe en fait deux types d’entreprises qui se partagent actuellement ce juteux marché. Il y a celles spécialisées dans le transport de passagers en car (rosen basu) et les sociétés de transport touristique (tsuâ basu). Jusqu’en 2000, ces dernières ne pouvaient pas exploiter de lignes régulières, ce qui expliquait la relative stabilité du marché dominé alors par JR Bus, la filiale automobile de la compagnie de chemin de fer. La réforme de la règlementation, en février 2001, leur a alors permis de se lancer dans l’aventure et proposer l’ouverture de nouvelles lignes. Voilà pourquoi il règne une telle activité autour des gares avec des ballets d’autocars et des files de voyageurs qui attendent de pouvoir embarquer. En l’espace de dix ans, le nombre de clients sur les différentes lignes d’autocars a décuplé grâce à une très forte concurrence. Alors qu’un aller simple entre Tôkyô et Ôsaka coûte au tarif normal 8 000 yens, on trouve régulièrement des places à 3 000 yens et même à 2 300 yens si on les réserve 21 jours à l’avance. En y ajoutant les réductions consenties lorsque la réservation est faite en ligne, ces déplacements en autocar sont une bonne affaire. Mais cela ne suffit pas toujours au Japon pour garantir le succès. Il faut faire preuve d’inventivité pour séduire une clientèle parfois exigeante. Outre le siège à 500 yens mis en place comme produit d’appel, plusieurs sociétés proposent des services exclusifs qui répondent à des besoins exprimés par les usagers. Désireux de mettre la main sur la clientèle des hommes d’affaires, JR Bus a mis en place une sorte de business class dans certains de ses autocars avec des sièges beaucoup plus confortables que ceux du shinkansen, mais 30 % moins chers. Entre 9 900 et 10 500 yens, les Premier seat sont très appréciés à tel point que sur la ligne Tôkyô-Ôsaka, la société propose cinq allers-retours où l’on trouve au premier étage de ses véhicules ces espaces VIP qui font vraiment penser aux classes affaires des compagnies aériennes. D’autres sociétés, soucieuses de répondre aux demandes des femmes souhaitant voya-
ger l’esprit tranquille, ont créé des lignes entièrement réservées aux voyageuses afin d’éviter les désagréments liés à la mixité comme le rappelait récemment un article de presse dans lequel ont pouvait lire qu’un homme avait été condamné par la justice pour avoir laissé ses mains se balader sur sa voisine lors d’un voyage entre
En partance pour Shizuoka
Tôkyô et Sendai. Comme la plupart des trajets s’effectuent de nuit, la création de ses autocars réservés aux femmes a permis d’augmenter sensiblement la fréquentation de ces lignes. La mise en place de rideaux entre les sièges permet aussi d’assurer une meilleure intimité, ce qui n’est pas pour déplaire. Peu à peu, les services s’affinent et permettent aux clients de voyager de la manière la plus confortable qui soit. Imaginez que vous ayez envie d’aller visiter Kakunodate et le lac Tazawa, situés à environ 600 kilomètres au nordest de la capitale. Pour se rendre dans cette ville que
l’on a surnommé “la petite Kyôto du Tôhoku”, il est possible d’emprunter le shinkansen. Il vous en coûtera un peu plus de 15 000 yens si vous ne disposez pas du JR Pass. En revanche, si vous optez pour l’autocar, vous n’aurez qu’à débourser 8 860 yens. Un aller-retour par jour au départ de Yokohama et du terminal de bus de Hamamatsu-chô à Tôkyô. Le départ a lieu à 21h35 à Yokohama (22h25 à Hamamatsu-chô) pour une arrivée à 7h25 à Kakunodate (8h devant la gare de Tazawako). Après les quelque 11 heures de voyage, on peut aller profiter des nombreuses maisons de samourais ouvertes au public comme la merveilleuse demeure des Aoyagi, l’une des plus belles de cette ville fondée en 1620 et dont certaines semblent avoir été figées dans le temps. Ensuite, un petit tour au lac Tazawa, le plus profond du Japon (423 m), lieu magnifique que l’on peut parcourir en vélo ou sur lequel des mini-croisières sont organisées. A la fin de la journée, après un bon repas dans l’un des nombreux et délicieux restaurants des environs, on peut reprendre l’autocar (20h20 devant la gare de Tazawako, 20h55 à Kakunodate) pour redescendre vers la capitale (6h05 à Hamamatsu-chô) et Yokohama (6h50). Compte tenu du prix et du nombre réduit de liaison en autocar, il n’est pas toujours facile de trouver des places notamment les veilles de week-end. D’autant plus que le lac Tazawa est devenu le lieu de pèlerinage de nombreuses Japonaises qui veulent découvrir le lieu où l’on a tourné la série coréenne Iris qui a remporté un grand succès la fin de l’année 2009 lors de sa diffusion sur la chaîne TBS. Si vous avez du mal à réserver pour Kakunodate ou le lac Tazawa, sachez qu’il existe des centaines d’autres destinations accessibles par autocar. Willer Express, l’un des leaders du secteur, propose pour les touristes étrangers un Japan Bus Pass, équivalent du JR Pass, mais pour un tarif bien inférieur. Il est possible de réserver depuis l’étranger via son site Internet (http://willerexpress.com) en anglais. Un bon moyen de faire des économies et de voyager autrement au pays du Soleil-levant. G. B.
mars 2012 hors-série 1 ZOOM JAPON 17
Gabriel Bernard
Achevée en 1933, l’église d’Ôe est construite en craie blanche. Elle l’a été par le père Garnier, un Français venu rendre hommage à la foi de la population.
DESTINATION
Amakusa, bienvenue au paradis
A quelques kilomètres au sud-ouest de Kumamoto, l’archipel d’Amakusa est un endroit étonnant et plein de charme.
M
ajestueux sans pour autant être gigantesque, le pont de Matsushima est le dernier ouvrage d’art que vous empruntez avant d’arriver dans l’archipel d’Amakusa, territoire paradisiaque composé de plusieurs îles dont les deux principales sont Amakusa Kamishima et Amakusa Shimoshima. La première grande étape de ce périple au sud de Kyûshû est donc le pont de Matsushima et son observatoire qui permet de prendre la mesure de la beauté de cette région méconnue des touristes occi-
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dentaux qui préfèrent encore les grands classiques que sont Kyôto ou Tôkyô. Aussi, à un moment où l’on hésite à se rendre dans l’archipel par crainte des séismes et des radiations, Amakusa est un endroit qui vous fera oublier les centrales nucléaires et les tremblements de terre. En provenance de la péninsule de Sankaku, le voyageur n’a pas d’autres moyens de profiter d’Amakusa que la voiture, le bus ou la bicyclette pour les plus courageux. Depuis la gare de Misumi, on peut emprunter des bus (le pass de 4 jours coûte 4000 yens) grâce auxquels on peut accéder à l’ensemble des principaux lieux intéressants des deux îles. Une façon tout à fait agréable de profiter des paysages et de l’atmosphère particulière qui règne dans cette partie du Japon
que les Japonais eux-mêmes ne fréquentaient pas beaucoup. La mise en service du Shinkansen à Kyûshû début mars a, semble-t-il, ravivé l’intérêt des touristes nippons qui viennent découvrir un endroit riche en traditions et chargé d’histoire. Avant de se lancer
PRATIQUE POUR S’Y RENDRE Au départ de Kumamoto, 1h40 jusqu’à Matsushima (1 480 yens) ou 2h25 jusqu’à Hondo (2 180 yens). Un à deux autocars par heure. 53 mn jusqu’à Misumi par train (ligne Misumi, 720 yens). Pour circuler à l’intérieur de l’archipel, possibilité d’emprunter des bus (4 000 yens le pass). On peut avantageusement consulter le site de l’Office du tourisme : www.t-island.jp
AMAKUSA édifice digne d’intérêt dont la couleur blanche, le plafond décoré de fleurs colorées et le style qui rappellent les églises mexicaines, tranchent avec l’austérité de celle de Sakitsu. Implantée sur une petite colline, elle a été construite en 1933 par un Français, le père Garnier, dans une région où les “chrétiens cachés”
blissant la liberté religieuse, de nouveaux missionnaires ont fait le déplacement et aidé la population locale à reconstruire des églises. On voit donc de nombreux clochers à l’horizon, ce qui ne manque pas d’étonner le voyageur qui s’attend plutôt à rencontrer des temples ou des sanctuaires. C’est particulièrement Mer
Shimabara
l
e
A m a k u s a
Mémorial Amakusa Shirô Asahisô
i
p
324
h Shimoda Onsen Myôkenura Église d'Ôe Amakusa Rosario Kan
Misumi Nishikô
Baie de
Amakusa-Nada
47 47
A r c
sur la route des cinq ponts qui relient la péninsule aux deux îles d’Amakusa et de faire halte au pont de Matsushima, une petite visite de Misumi Nishikô s’impose. Ce port construit à la fin du XIXème siècle est le seul de cette époque encore en l’état dans l’archipel. Plusieurs bâtisses au style bien marqué et avec des couleurs chatoyantes sont ouvertes au public, certaines ayant été transformées en café. Le temps d’avaler un petit en-cas, en profitant de la vue sur la baie de Misumi, et vous serez prêt à prendre la route pour aller à la découverte d’autres surprises pour le moins étonnantes. Sur le chemin qui mène au pont de Matsushima, vous serez sans doute interpellé par un bâtiment dont la forme rappelle à la fois celle d’un gros gâteau à la crème et celle d’une église. Il s’agit du Mémorial Amakusa Shirô situé à Kami-Amakusa. Au-delà de son architecture originale, cet endroit est intéressant, car il rappelle aux visiteurs que la région a longtemps été un bastion chrétien et qu’elle le reste encore aujourd’hui. Introduit par les missionnaires portugais arrivés au Japon au milieu du XVIème siècle, le christianisme s’est très bien implanté dans cette région particulièrement pauvre. En 1589, Amakusa comptait 30 églises et plus des deux tiers de sa population avaient été convertis. L’interdiction de la religion chrétienne par les TOKUGAWA quelques années plus tard et la fermeture du pays à l’influence étrangère se sont traduites pour les habitants d’Amakusa par l’obligation de renier leur religion et par une traque de tous ceux qui s’y refusaient. Bon nombre d’entre eux ont continué à prier secrètement devant de petites statues de la Vierge. C’est cette histoire que le Mémorial Amakusa Shirô retrace ainsi que celle d’Amakusa Shirô, adolescent de 16 ans, qui, à la fin de 1637 a mené la rébellion de Shimabara contre la politique anti-chrétienne des Tokugawa. Le christianisme a donc profondément marqué cette région qui reste aujourd’hui plus chrétienne que la moyenne nationale. Il faut dire que la ferveur des “chrétiens cachés” (kakure kurisutian) comme on les appelait a contribué à enraciner cette religion. Lorsque le Japon s’est doté d’une Constitution réta-
Ariake
Aéroport d'Amakusa
324 32 24 2
Île Tobase
Ôyano 266
Île Iwajima
Pont de Matsushima Yatsushiro
Kamishima
Hondo
Kura Take 682 m
Kado Yama 526 m
266 26 2 66 6
226 666 266
Île Hinoshima
Shimoshima
Église de Sakitsu
Misumi
Île Goshoura Rokurôji Yama 405 m
Île Shishi
PRÉFECTURE DE KUMAMOTO
Mer de Yatsushiro
266
Ushibuka
Île Nagashima
Plage de Satsuki
Minamata
PRÉFECTURE
K y û s h û
DE KAGOSHIMA
Parc de Tsurubayama 20 km
vrai dans le port de Sakitsu, à Amakusa Shimoshima. Implantée dans un fjord qui rappelle la Norvège, l’église de Sakitsu avec son clocher de tuiles grises domine les autres constructions. Bâtie en 1934 dans un style néo-gothique, elle a la particularité de disposer d’un sol recouvert de tatami, ce qui signifie que l’on y pénètre après s’être déchaussé. A quelques kilomètres au nord de Sakitsu, l’église d’Ôe est aussi un
étaient particulièrement nombreux. Lorsque le ciel est bleu et que le soleil darde ses rayons sur ce bâtiment (ce qui est souvent le cas), il s’en dégage une impression assez étonnante de sérénité. Non loin de là, l’Amakusa Rosario-kan regroupe de nombreux objets de culte que les “chrétiens cachés” utilisaient pour prier. Une petite visite s’impose pour comprendre cette période de l’histoire japonaise.
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[ 8 regards sur le drame ]
JAPON 1 AN APRÈS
Une anthologie graphique franco-japonaise autour de la catastrophe et ses conséquences.
300 pages de bande dessinée - En LIBRAIRIE et sur l IBOOKSTORE le 14 MARS 2012 L INTÉGRALITÉ DES BÉNÉFICES SERA REVERSÉE À LA CROIX ROUGE JAPONAISE AU PROFIT DES RÉGIONS SINISTRÉES PAR LE SÉISME.
mars 2012 hors-série 1 ZOOM JAPON 19
Après avoir été impressionné par cette présence chrétienne, le visiteur le sera tout autant par la beauté des paysages naturels. Outre l’observatoire situé au pont de Matsushima à partir duquel on prend la mesure de la richesse des lieux, une petite halte à Myôken-ura est recommandée. Il suffit de suivre la route 389 au nord de l’église d’Ôe pour découvrir ce site magnifique façonné par les vagues et le vent. Un cadre digne de figurer dans votre album de souvenirs et dont on ne se lasse pas. Amakusa ne manque pas de ressources en la matière. La nature a bien fait les choses et lorsque celle-ci n’a pas fait suffisamment, l’homme y a ajouté sa touche comme le parc de Tsurubayama à la pointe sud d’Amakusa Shimoshima. En 1978, on y a planté quelque mille cerisiers dont la floraison en mars-avril est un véritable régal pour les yeux. Cette période de l’année est d’ailleurs un des moments les plus agréables pour visiter la région, car les températures y sont douces et la météo clémente. Pour peu que l’on s’y trouve le troisième week-end d’avril, on peut assister à la fête d’Ushibuka Haiya où des milliers de personnes viennent danser dans les rues de la ville d’Amakusa. L’été, il fait chaud, très chaud malgré la présence d’une petite brise marine. C’est le moment de profiter des plages, notamment celles de Satsuki, située non loin du Tsurubayama, d’Ariake, sur la côte ouest d’Amakusa Kamishima, elles aussi aménagées par les hommes. Elles sont nombreuses et le sable blanc devant cette mer bleue turquoise constitue une invitation à laquelle il est difficile de résister. Comme d’autres endroits paradisiaques, Amakusa sait aussi séduire le visiteur par la qualité de sa cuisine. Rappelons que le Japon ne manque pas de ressources en la matière. La spécialité d’Amakusa, s’il faut n’en citer qu’une seule, est le poulpe (tako). A Ariake, une énorme sculpture vient vous le rappeler. Après avoir profité de la plage, un petit tour au marché local où l’un des nombreux restaurants vous permettront de déguster l’un des succulents plats à base de poulpe comme le steak de poulpe, le tako tendon (beignets de poulpe sur un lit de riz) le tako meshi que l’on mélange simplement à du riz blanc. On trouve bien sûr des takoyaki, bou-
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DR
AMAKUSA
Quelques spécialités à base de poulpe vendues au marché d’Ariake, haut lieu de la gastronomie locale.
lettes grillées de poulpe, que les Japonais apprécient beaucoup. Un des meilleurs endroits pour goûter la cuisine à base de poulpe se nomme Asahisô. Pour 5 000 yens [45 euros], on vous servira un menu dans lequel le mollusque est accommodé de huit manières différentes, un véritable moment de plaisir. Mais tout le monde n’est pas fan de tako et il serait injuste de limiter Amakusa au seul poulpe. La région est riche en poissons et coquillages. La sardine, la daurade ou encore les praires figurent à la carte de plusieurs très bons restaurants où le plaisir des yeux et du palais est divinement entretenu. C’est aussi le cas dans la plupart des établissements thermaux que l’on trouve à Amakusa. A l’instar des autres régions du Japon, l’archipel dispose de nombreuses sources d’eau chaude au tour desquelles des hôtels ont été implantés. Sur l’île d’Amakusa Shi-
moshima, il est recommandé de séjourner à la source thermale de Shimoda Okuzashiki, la plus ancienne de la région avec ses 800 ans d’histoire. Elle se situe au nord de Myôken-ura. Parmi les établissements qu’on y trouve, on peut se laisser séduire par l’ambiance du Gunpôkaku Garasha (à partir de 10 500 yens la nuit en demi-pension) et son style années 20 ou celle de l’Ishiyama Rikyû Gosoku no Kutsu plus luxueuse (à partir de 26 400 yens en demi-pension). Ses balcons et ses bains privés avec vue sur la mer, sans oublier une nourriture irréprochable, justifient ce prix un peu élevé. Mais n’est-on pas prêt à tout pour un petit coin de paradis ? G. B.
TAKAYAMA TAKAYAMA
Osez la beauté et l’originalité
Au milieu de paysages magnifiques, Satoyama Experience vous permet de profiter de votre séjour autrement.
S
ituée au cœur des Alpes japonaises, la région de Hida-Takayama est un de ces remarquables lieux dont on a du mal à se détacher lorsqu’on l’a découvert. Entourée de montagnes dont certaines culminent à 3 000 mètres, elle réserve de très nombreuses et agréables surprises à celles et ceux qui choisissent d’y faire un séjour un peu prolongé. Elle se distingue notamment par ses maisons gasshô-zukuri (lire pp. 22-23), terme qui signifie “mains jointes en prière”, avec ses toits si caractéristiques. Elle est réputée pour sa cuisine, en particulier le bœuf de Hida que l’on peut savourer cuit avec un peu de miso. Elle est enfin très appréciée pour ses paysages et ses sites inoubliables comme la ville de Takayama ou encore Shirakawagô (lire pp. 22-23). Takayama constitue une étape incontournable lorsqu’on se rend dans la région. Elle dispose de très nombreux atouts qui ne laissent pas le voyageur indifférent. La “petite Kyôto des Alpes”, comme certains l’ont surnommée, rappelle du fait de son découpage en échiquier l’ancienne capitale impériale. Elle ne bénéficie pas de sa richesse architecturale, mais il faut savoir que de nombreux artisans de la ville ont participé à la construction des temples et palais de Kyôto. On retrouve dans les nombreux édifices qui ont survécu au passage du temps le savoir-faire de ces hommes. C’est le cas notamment dans le quartier de Sanmachi. Cette partie de la ville, la mieux préservée, est un ensemble de trois rues parallèles à la rivière Miya dans lesquelles les très nombreux bâtiments anciens, qui appartenaient aux marchands de la ville, illustrent l’importance de la cité qui fut le centre politique de la région. On y trouve des distilleries de sake où l’on peut goûter une production locale de qualité, des produc-
L’automne est un des meilleurs moments pour se rendre dans cette région.
teurs de miso (pâte de soja) qui se feront un plaisir de vous vanter les différences des miso produits. Il y a aussi de nombreuses boutiques merveilleusement agencées et devant lesquelles il est souvent difficile de ne pas craquer. La visite du quartier peut se faire avant ou après un tour sur le marché du matin (asa-ichi) qui se tient tous les jours entre 6 h et midi. En fonction de l’heure de votre réveil, pensez à réserver au moins une heure pour parcourir ce marché le long de la rivère Miya. Depuis plus de 200 ans, c’est le rendez-vous quotidien des agricultrices de la région qui viennent vendre leurs produits fraîchement cueillis. A la différence
des marchés parisiens bruyants, celui-ci est plutôt tranquille même si la foule est bien présente. Les amateurs de photographies se régaleront avec tous ces visages souriants qui attendent le chaland. En traversant le pont rouge qui chevauche la rivière, vous vous retrouverez face au Takayama jinya qui fut le siège du gouvernement local de la fin du XVII ème à la restauration de Meiji en 1868. Seul bâtiment de ce genre existant encore au Japon, il vaut bien une longue visite, notamment la salle de torture à côté du tribunal et les greniers à riz. Il y a encore bien d’autres choses à voir dans la ville comme le magnifique Musée des arts de HidaTakayama ou le musée en plein air Hida no sato sans parler de belles balades à faire tout autour. Voilà pourquoi, on ne peut que recommander de rester plusieurs jours et de profiter de la région. Plutôt que de choisir un hôtel, Satoyama Experience propose à la location des maisons traditionnelles avec tout le confort au milieu de la campagne japonaise. Il n’y a pas de meilleur moyen pour s’immerger et profiter au maximum de la richesse locale. Les initiateurs de ce projet original ont également imaginé une autre façon de partir à la découverte de la région : la bicyclette. Hida Satoyama Cycling, c’est son nom, permet soit de louer des vélos (2 500 yens la journée, environ 23 euros) pour se lancer seul dans l’aventure, soit de participer à des visites guidées à bicyclette (7 000 yens, environ 63€, la demi-journée de 13 h 30 à 17 h). On ne peut pas rêver mieux pour prendre réellement la mesure de la variété des paysages et des sites. O. N.
PRATIQUE SATOYAMA EXPERIENCE & HIDA SATOYAMA CYCLING 8-11,Ninomachi,Hida,Gifu 509-4235, Tél. 0577-73-5715 www.satoyama-experience.com/fr
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Gabriel Bernard
Exemples de gasshô-zukuri que l’on rencontre au cours de sa promenade dans ce village fier de son caractère si particulier
TRADITION
Shirakawagô, un trésor préservé
En plein cœur du Japon, dans la préfecture de Gifu, ce hameau permet un voyage dans le temps pour le moins étonnant.
B
runo Taut, architecte allemand, a vécu plusieurs années au Japon avant la Seconde Guerre mondiale, passant son temps à parcourir l’archipel à la découverte de l’architecture locale dont il était tombé amoureux. Parmi les nombreux ouvrages et articles qu’il lui a consacré, figure Maisons et peuple du Japon, livre qui, plus de 70 ans après sa parution, reste l’une des références en la matière. Dans cette publication très illustrée, il a mis en évidence l’existence des gasshô-zukuri, maisons au toit très pentu de Shirakawagô, situé au cœur de la préfecture de Gifu, dont la conception n’a pas d’équivalent dans le reste du pays. Leur immense toit, dont la forme rappelle des mains en prière, est en chaume. A la différence de la plupart des édifices qu’il a rencontrés pendant ses périples, Bruno Taut soulignait que les maisons de Shirakawagô lui rappelaient une architecture
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primitive, celle des huttes. Mais dans le même temps, il montrait son admiration pour la qualité de ces structures immenses parfaitement équilibrées. Il rappelait aussi qu’aucun clou n’était utilisé dans leur construction, mais qu’on avait recouru à des cordes pour assurer la bonne tenue des différents éléments de la structure. Lors de son passage et sur les photographies qu’il a prises du hameau,
Mer du Japon Kanazawa
Toyama H o n s h û
Shirakawagô
Takayama
Gifu Kyôto
Nagoya 100 km
les maisons étaient peu nombreuses et éparpillées. La plupart de celles que l’on peut voir ont été déplacées au cours des années à l’occasion de la construction du barrage de Miboro qui menaçait de submerger plusieurs hameaux de la région. Rassemblées au même endroit, elles sont devenues au fil des années un lieu de pèlerinage pour des millions de touristes japonais qui viennent s’extasier devant leur beauté brute dans une vallée encaissée dont les montagnes environnantes laissent sans voix. Depuis son classement au patrimoine mondial de l’humanité par l’Unesco en 1995, Shirakawagô attire aussi de nombreux touristes étrangers. Sur 1,8 million de visiteurs, on recense environ 100 000 étrangers, les Européens ne représentant qu’à peine 3 % de ce chiffre encore modeste, mais qui devrait augmenter sensiblement au fil des années. Les autorités locales sont en effet très désireuses de promouvoir ce site hors du commun et impressionnant. Sa situation géographique a obligé les paysans à s’adapter à la rigueur du climat, en pratiquant la culture de
céréales sur de courtes durées et surtout l’élevage de vers à soie. La promenade que l’on peut faire dans le hameau permet de saisir l’économie locale. La plupart des maisons se trouvent sur des lots individuels séparés par des parcelles de terre cultivées. Les limites sont marquées par des rues, des canaux d'irrigation ou des parcelles cultivées. Beaucoup de lots sont occupés par de petits édifices en bois, servant à stocker les récoltes. La ballade est très agréable au milieu de ce paysage ouvert et de ces maisons qui restent habitées. Certaines d’entre elles sont ouvertes au public qui peut ainsi découvrir de l’intérieur de ces constructions qui ont enchanté Bruno Taut. Les familles Wada et Kanda ouvrent ainsi leurs demeures pour la modeste somme de 300 yens [2,6 euros]. Situées au cœur du village, ces deux bâtisses permettent de se faire une idée assez précise des conditions de vie très difficiles auxquelles les habitants devaient faire face il y a encore quelques décennies. A l’entrée, on trouve un foyer dont la fonction première n’était pas vraiment de chauffer l’immense maison, mais de renforcer la solidité des cordages noués autour des poteaux qui structurent la maison. Avec le temps, les plafonds et les planchers se sont patinés du fait de la suie produite par le foyer. L’autre mission de ce foyer était le séchage des cocons des vers à soie que l’on plaçait à l’étage sur des panneaux percés de trous pour que la chaleur du foyer se propage plus facilement. Dans les étages, on expose désormais les objets et les outils utilsés pour l’agriculture, la sériciculture ou l’entretien des maisons, en particulier le toit de chaume. Celui-ci est refait à neuf tous les 30 ans et nécessite plusieurs semaines de travail. L’accueil des habitants est particulièrement chaleureux. Conscients de l’importance de leur patrimoine et de la nécessité de le mettre en valeur auprès des visiteurs, ils n’hésitent pas à prendre un peu de leur temps pour expliquer la vie quotidienne, notamment au moment de l’hiver quand le village est quasiment coupé du reste du Japon en raison des quantités incroyables de neige qui y tombent. Aujourd’hui, l’hiver ne fait plus peur et c’est même particulièrement agréable de visiter le village lorsque la neige est de la partie. Il y a un côté magique indéniable. Néanmoins, le printemps et l’automne demeurent les saisons
DR
SHIRAKAWAGÔ
La visite de Shirakawagô commence souvent à partir de la plateforme panoramique qui domine le village.
les plus agréables, en raison de la clémence des températures, mais aussi des paysages colorés liés à ces deux moments de l’année. Outre les maisons, Shirakawagô abrite le joli temple Myôzen bâti au début du XIXème siècle dans le style gasshô. Si l’on dispose d’un peu de temps, il est recommandé de passer la nuit dans l’un des nombreux gîtes mis à la disposition des voyageurs. A une petite dizaine de minutes de la gare routière, le gîte Hisamatsu dispose de 4 chambres. La maison de pur style local est charmante au même titre que les hôtes. Ces derniers servent un excellent repas composé notamment du fameux bœuf de Hida (aussi célèbre que le bœuf de Kôbe). Ils vous en coûtera 7 700 yens la nuit, dîner et petit déjeuner compris. Après avoir passé la journée à déambuler, on y passe une excellente nuit. Ne partez pas sans avoir goûté le fameux hôba miso, un morceau de bœuf de Hida déposé sur du miso et une feuille de magnolia que l’on fait chauf-
fer. Un moment inoubliable pour votre palais. Et peutêtre, comme Bruno Taut, vous vous souviendrez encore longtemps de votre passage dans ce lieu où le temps semble s’être arrêté. G. B.
PRATIQUE S’Y RENDRE Isolé, le seul moyen pour s’y rendre est la route. Plusieurs lignes de bus desservent Shirakawagô. Au départ de Takayama, la compagnie Nôhi bus propose 9 départs quotidiens (4 300 yens l’aller-retour). Il faut compter 50 minutes de trajet. www.nouhibus.co.jp/english/. Des lignes existent également au départ de Kanazawa (Nôhi bus, tél. 0577-32-1688, 1h15 de trajet) et de Nagoya (Gifu bus, tél. 058-240-0489, 2h50 de trajet).
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