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Focus
Xavier Muller et Flavio Higelin, deux étudiants de l’ENSAS, sont lauréats pour la région Grand Est du concours Impact. Avec leur réhabilitation de la Ferme du Kertoff, il est question de frugalité, de flexibilité et de savoir-faire locaux.
Apprendre de l’existant
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Par Cécile Becker
Le concours
Dans le cadre de l’option « Concours techniques et innovation » de l’ENSAS animée par Emmanuel Dufrasnes et Brice Chapon, les enseignants ont encouragé Xavier Muller et Flavio Higelin à participer au concours Impact, qui a notamment pour objectif de promouvoir les matériaux biosourcés. Ils se sont associés à deux étudiants de l’école d’architecture de Nancy.
Le site
Le quatuor a imaginé l’avenir de la Ferme du Kertoff à Gérardmer, une «ferme à l’écriture vernaculaire» située à proximité du domaine skiable et du GR533, qui abrite aujourd’hui une ferme-auberge. Le CAUE des Vosges a validé ce choix et guidé le groupe sur les problématiques du territoire et le patrimoine architectural local.
Le contexte
Dans les Vosges comme ailleurs, le réchauffement climatique a déshabillé les montagnes de leur neige. Les infrastructures tournées vers les sports d’hiver sont donc mises en danger. La filière textile périclite mais possède encore quelques industries haut-de-gamme. Il s’agit d’imaginer de nouvelles activités tout en valorisant les savoir-faire locaux.
«Frugaléxité» et saisonnalité
Pour pérenniser la ferme, les étudiants ont choisi d’inscrire leur projet dans le cycle des saisons et de proposer des bâtiments modulables qui puissent accueillir des activités variées, hiver comme été. La ferme est réhabilitée, le bâtiment principal accueille une ferme pédagogique, une bergerie et fait office de volume de réception pour repas, séminaires, ateliers. Une extension abrite des dortoirs pour visiteurs, randonneurs, scolaires… Adossée à la pente située au nord, elle s’ouvre vers le paysage au sud et « s’insère parfaitement dans le paysage, guidant les visiteurs jusqu’à la ferme», jusqu’alors très discrète. Pour s’adapter aux changements climatiques et sociétaux, la ferme doit pouvoir se transformer facilement. Le groupe parle alors de «frugalexité» : une frugalité architecturale qui vient servir une adaptation perpétuelle.
Compenser la construction
«Pour réduire les coûts de construction», le groupe se tourne vers des matériaux locaux : le hêtre vosgien, encore sous-utilisé, et le textile. Ainsi, le hêtre est utilisé pour les charpentes, des chutes de tissus et vêtements recyclés sont défibrés, transformés en briques isolantes. Pour augmenter les performances énergétiques du bâtiment, on revient à des
La ferme-auberge réhabilitée. On remarque un système de traitement (via la toiture végétalisée) et de collecte des eaux de pluie, le puits canadien qui permet le chauffage en hiver et la climatisation en été, l’optimisation des surfaces vitrées.
À gauche sur l’image, l’extension permet d’héberger les visiteurs. Un chemin de ronde relie les deux bâtiments.
solutions simples et traditionnelles : ventilation, orientation des bâtiments par rapport à la pente et au soleil, mur de soutènement en moellons qui permet une inertie thermique. «Dans une logique de consommer ce qui est produit directement sur le site», un potager reprend place sur une surface précédemment agricole. Le groupe a aussi créé un système de phytoépuration : l’eau pluviale est stockée dans des cuves et permet d’alimenter les wc (en utilisant la gravité) et est ensuite traitée pour les usages domestiques. L’entretien de la clairière est assuré par les animaux, «pour une collaboration homme-animal qui fait la poésie du projet».
Ce que ce concours leur a apporté
«Nous ne nous étions jamais frottés à un projet de réhabilitation, ce qui a été très intéressant. Ça nous a permis de nous intéresser davantage au patrimoine architectural: nous n’étions pas très au point sur cette question et ça nous a marqué tous les quatre. Nous avons pu rencontrer des gens qui ont énormément de savoir et de savoir-faire, que nous avons pu réinjecter dans le projet et intègrerons dans nos projets futurs.»