Magazine de l'Automobile Club de Suisse no 291

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EXCLUSIF

Delage, le siècle de la Renaissance La futuriste hypercar Delage D12 annoncée par Laurent Tapie ressuscite la célèbre marque française disparue en 1953. Mais un autre projet capte aujourd’hui l’attention de Patrick Delâge, l’arrière-petit-fils du fondateur, Louis Delâge. Explications. Par Pierre Thaulaz

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UTO : Vous allez redonner vie à une voiture mythique, la Delage V12 de 1937 ? Patrick Delâge : Le projet a démarré officiellement il y a un peu plus d’une année à Rétromobile. Il devrait être achevé dans 3 ans. Les élèves des Arts et Métiers, en France, travaillent sur le moteur et nous nous chargerons de la carrosserie (réd. : Auto Classique Touraine). Comment est né le projet ? L’initiateur du projet s’appelle Olivier Masi, président de l’association «Des voitures et des hommes». C’est à cet avocat que l’on doit la réalisation d’un premier projet, la reconstitution du «Scarabée d’or», la Kégresse de la Croisière noire. Sous sa houlette, des étudiants des Arts et Métiers ont démonté le véhicule original qui se trouvait au Musée Citroën et ont recopié toutes les pièces. Quelqu’un leur a également offert un châssis de Kégresse. Une fois l’automobile reconstituée, Olivier Masi s’est posé la question : que pourrait-on faire maintenant ? On en a parlé en réunion et j’ai dit : s’il y a une voiture à refaire chez Delage, c’est cette V12 qui a entièrement disparu. Un projet plus compliqué que celui de la Kégresse ? C’est sûr, puisque la voiture n’existe plus. Il faut donc faire de la rétro-ingénierie pour essayer de savoir comment ils avaient opéré à l’époque. Les étudiants ont récupéré tous les documents du motoriste Albert Lory, mais malheureusement il n’y avait rien. On sait qu’il s’agit d’un V12 de 4,5 l. équipé de deux culasses de Delahaye 135 MS avec un arbre à cames au centre, mais on n’a pas beaucoup d’autres éléments. La plus grande difficulté, c’est justement le moteur ? Oui. La carrosserie ne pose pas de difficultés en soi puisque nous avons même

toutes les photos de la charpente bois de Labourdette, le carrossier à l’époque. En se basant sur des photos et en modélisant en 3 D, les spécialistes sont arrivés à la conclusion que ça ne pouvait être qu’un châssis de Delahaye 135 avec empattement de 2,95 mètres. Une voiture fantastique ? Elle est intéressante sur le plan du style, mais sur le plan technique ça n’a pas été une grande réussite. C’est peut-être le seul échec de Delage. Elle avait été victime d’un accident aux essais précédant le GP de France 37 disputé à Montlhéry ? Oui, et elle a été suffisamment abîmée pour ne pas pouvoir prendre part à l’épreuve. Heureusement, avaient dit certaines méchantes langues, parce qu’elle aurait fait la honte de Delage. Une voiture qui a été transformée par la suite ? Oui. La voiture a été recarrossée en barquette pour courir en Angleterre. Aux commandes du pilote Joseph Paul, elle a pris feu et est entrée dans la foule, tuant quatre personnes. C’est un peu la fin de l’histoire… Enfin, pas tout à fait

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puisque le moteur aurait été remonté sur un bateau et il aurait fini au fond d’un lac des Grisons. Les «Amis de Delage» ont été créés en 1956. Gabriel Chéreau, qui avait lancé ce club, avait réalisé des recherches à l’époque. Il semblerait que si le bateau était bien au fond du lac, le moteur serait parti dans une casse. Et on n’a jamais rien retrouvé. Vous êtes venu récemment scanner la maquette d’origine à Cortaillod ? Oui. Cette maquette de 1936, propriété de la Fondation Renaud, est probablement passée par la soufflerie Eiffel, à


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