N° 03 - Avril 2020

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DEMAIN 04-2020

ACTUALITÉ CORONAVIRUS

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L’après-Covid-19 : apprenons de l’expérience chinoise L’économie de la Chine, en particulier dans la région du Hubei, a connu ces dernières semaines un ralentissement sans précédent dû à la pandémie. La situation sanitaire dans le pays étant stabilisée, les activités reprennent… mais l’économie a changé. Décodage des facteurs de succès et des enseignements à tirer.

• La gestion et l’allocation des ressources a aussi été cruciale en cette période de Nouvel An chinois. Des entreprises ont aussi innové en devenant « porteuses salariales ». Des magasins physiques ont réalloué leurs ressources vers la supply chain de e-commerces qui n’arrivaient plus à suivre. D’autres entreprises ont plutôt opéré des réallocations internes en optant pour une transition entre leurs différentes activités et canaux de distribution.

Le 23 janvier dernier, la ville de Wuhan se retrouvait coupée du monde en raison du coronavirus. Les mesures restrictives se sont étendues au reste du pays dans les sept jours qui ont suivi. Il aura fallu attendre deux à trois semaines pour que ces mesures montrent leurs premiers effets et près de deux mois pour que le pays commence à apercevoir le bout du tunnel. En attendant, l’économie et la société ont dû se réorganiser. Que peut-on apprendre l’expérience chinoise ?

Aline Ballaman-Garibian constate aussi des bouleversements au niveau des PME en Chine. Pour elle, le fait de devoir composer avec les ressources humaines et matérielles limitées a aussi amené les petites structures à repenser leurs processus et leur culture du travail pour être plus efficaces et agiles. Elles ont aussi dû acquérir de nouveaux clients en adaptant leurs canaux de vente, de distribution et de communication. Toutes ces adaptations et l’intégration de protocoles de crise les rendront donc plus résilientes face à de nouvelles crises.

« Le mot chinois « crise » est composé de deux caractères : wei ji : Le premier représente le danger, le péril, la crise. Quant au second , il représente la chance, l’occasion, l’opportunité. Ainsi, la philosophie veut que de chaque crise naît une opportunité. » C’est ce que nous dit Aline Ballaman-Garibian, directrice des Swiss Centers en Chine, que nous avons contactée pour avoir un éclairage de l’intérieur sur la situation économique. Bien que les entreprises aient l’autorisation de travailler depuis le 10 février (à l’exception du Hubei), d’importantes contraintes ne permettent pas à ces dernières d’être complétement opérationnelles à ce jour. De nombreux employés rentrés dans leurs régions d’origine pour le Nouvel An chinois se sont retrouvés confinés loin de leur lieu de travail, ce qui a eu un impact majeur sur la disponibilité de la main-d’œuvre après les Fêtes. Si une majorité de collaborateurs est aujourd’hui de retour au travail, le redémarrage économique est plutôt lent, car il reste encore des restrictions pour les rencontres professionnelles, les voyages et les grands rassemblements. Cependant, les entrepreneurs et employés sont motivés et attendent de pied

ferme les opportunités à venir, sans oublier qu’à l’échelle mondiale, ils feront partie des rares à pouvoir produire à plein régime durant les deux prochains mois.

QUELLE EST LA MARGE DE MANŒUVRE DES ENTREPRISES ? Un panel d’auteurs du Boston Consulting Group a partagé dans un article récent (HBR, 10 mars) quelques recommandations sur la base de leurs observations en Chine. • Tout d’abord, les entreprises qui ont concentré leurs efforts sur la réorientation de leur business et les rentrées d’argent ont mieux passé le cap que celles qui se sont engluées dans des processus complexes et bureaucratiques de coordination interne. En Suisse, on peut citer l’exemple de ces nombreux petits restaurants qui se sont reconvertis en points de vente à l’emporter. Les entreprises familiales et les PME disposent là souvent d’un vrai avantage en termes d’agilité. • Le leadership joue également un rôle décisif : la direction doit donner le cap, mais les idées provenant des collaborateurs doivent être entendues. Les équipes doivent bénéficier de la souplesse nécessaire pour rapidement s’adapter au contexte sur le terrain, tout en restant connectées aux directives générales de l’entreprise. C’est pourquoi le développement de canaux de communication internes efficaces (topdown et bottom-up) a pu profiter aux sociétés qui ont misé par exemple sur des applications mobiles à usage interne, créant un lien avec chaque employé et permettant de rapidement faire remonter l’information depuis le terrain.

TOUS LES SECTEURS NE SONT PAS LOGÉS À LA MÊME ENSEIGNE En Chine, le retour à la normale est variable. Il existe de grandes disparités entre les régions et les secteurs d’activité. Pour les exportateurs, la marche des affaires risque de repartir de manière décalée, en fonction de la reprise dans chaque région d’approvisionnement, de production et de distribution. C’est aussi un facteur à considérer dans l’allocation des ressources. En Chine, « l’effet de rattrapage », après plusieurs semaines de fermeture, a nécessité de redéployer rapidement toutes les ressources disponibles dans l’industrie. Toutefois, ce redéploiement souffre aujourd’hui de la crise mondiale. Dans les secteurs du tourisme ou des transports, toujours soumis à des restrictions par ailleurs, la reprise s’avère plus lente.


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