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1.1.2 Un coupable : l’automobiliste

1.1.2 Un coupable : l’automobiliste

Si une étude approfondie sur le phénomène de dispersion/concentration des polluants menée entre2014-2015sur le secteuret publiée en 2016 aconfirmé l’effet pervers du tunnel, sa présence était déjà qualifiée de problématique en matière de qualité de l’air par les militants à partir de 2013. En effet, comment ne pas accuser l’automobile d’être responsable de la pollution dans le secteur quand celle-ci est quasi omniprésente dans la vie quotidienne de l’école ? Une enseignante de CE2 témoigne :

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« Quand on utilisait encore la cour (celle qui donne sur le tunnel), oui on entendait les voitures. Oui il y avait un bruit constant de voitures à certaines heures ».

Un père de famille interrogé montre comment les représentations autour de l’automobile ont pu évoluer au cours du temps :

« La bagnole elle est omniprésente dans nos villes,car pendant longtemps elle était un objet sacré, symbole d’autonomie, de liberté, d’émancipation, de confort. Aujourd’hui, c’est à cause d’elle qu’on a ces problématiques de pollution en ville. »

Parce qu’elle est omniprésente dans le quotidien des habitants et des écoliers, l’automobile est clairement identifiée comme responsable du problème de pollution de l’air à l’école Michel Servet. De plus, comme l’explique ce père, la quasi-totalité des militants du collectif travaille dans le quartier ou dans le centre de l’agglomération ce qui rend l’usage d’un véhicule superflu. D’ailleurs, la plupart des personnes interrogées ne sont pas propriétaires d’un véhicule ou ne l’utilisent que très rarement. De ce fait, il leur est plus facile de critiquer l’automobile et de la désigner comme responsable du problème de l’école.

« On n’utilise pas la voiture donc on est légitime à dire à nos enfants que la voiture c’est mauvais pour l’environnement et la santé. Disons qu’on a un comportement moins contradictoire avec ce qu’on défend. »

Ce père de famille montre ici clairement comment le mode de vie des membres du collectif rend possible leur combat contre l’automobile. S’ilsen avaient l’usage quotidiennement,les personnes interrogées se trouveraient sans doute dans une situation qualifiée par la psychologie sociale de

« dissonance cognitive » (Festinger, 1957). Dans ce cas l’individu serait pris dans un étau entre ses représentations et ses pratiques. Ici, l’usage quotidien du véhicule contraint par des déplacements domicile-travail rentrerait en contradiction avec les convictions en matière d’environnement de l’individu. Un tel conflit psychique génère du stress et peut être neutralisé soit en rendant compatible son comportement à ses représentations soit en modifiant ses représentations. Comme nous l’avons vu en toute première partie avec la théorie du noyau central d’Abric, ces modifications affectent plus facilement les éléments périphériques de la représentation que le noyau central relativement stable. Enfin, les individus peuvent aussi neutraliser la dissonance cognitive procédant par dénégation, c’est-à-dire en interrompant leur activité psychique autour de ce problème.

Nous venons de voir à partir de quels objets, acteurs et informationsse sont cristallisé le problème de la pollution à l’école Michel Servet. Désormais, nous allons essayer de comprendre

comment le problème s’est publicisé, ou autrement dit, comment le problème s’est élargi du noyau des militants du collectif pour déborder à d’autres publics (familles de l’école, médias, élus et décideurs, etc.). Pour ce faire, nous étudierons la communication du collectif afin d’identifier quels ressorts et leviers sont activés par ces derniers. Dans cette partie, nous verrons comment les représentations précédemment étudiées sont mobilisées dans le discours et la communication du collectif à des fins stratégiques. Pour reprendre ce que nous avions vu lors de la première partie sur les caractéristiques des représentations, nous verrons comment les représentations de la pollution de l’air produisent un effet performatif à travers le discours des militants.

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