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DÉVELOPPEMENT URBAIN Plaidoyer pour des villes à échelle humaine
PLAIDOYER POUR DES VILLES À ÉCHELLE HUMAINE
PAR ANNE-MARIE TREMBLAY, JOURNALISTE
Après des années en mode «tout à l’auto», l’heure est venue de remettre l’humain au cœur des projets de développement immobiliers et urbains, plaide l’architecte Pierre Thibault. Une vision qui touche non seulement la conception des habitations, mais aussi celle des espaces communs et publics. Explications.
ATELIER PIERRE THIBAULT
I
l y a une vingtaine d’années, Pierre Thibault a quitté sa maison de banlieue pour s’installer temporairement dans un appartement en plein cœur de Rome, près de la Place Trastevere. «Sur le coup, mes enfants ont paniqué. Ils se demandaient comment ils allaient survivre sans cour et sans gazon», se rappelle-t-il. Au fil du temps, la famille a développé de nouvelles habitudes. «Je me suis mis à jouer au foot avec mon fils sur le parvis de l’église qui était juste en face de notre maison et quand on sortait notre ballon, ce n’était pas long qu’une quinzaine de petits se joignaient à nous! Ma fille s’installait à côté de la fontaine à proximité pour dessiner», explique celui qui a fondé l’Atelier Pierre Thibault.
Résultat: l’architecte a été séduit par ce mode de vie qui s’articule autour des quartiers et de ses habitants. «Quand tu goûtes à cela et que tu retournes à ta maison de banlieue, où tu dois prendre ton auto pour aller chercher du lait au dépanneur, disons que c’est difficile de revenir en arrière.» Cette façon de vivre plus urbaine
HÉLÈNE BOUFFARD ET STÉPHANE BOURGEOIS
DE COPENHAGUE… L’architecte reconnu mondialement cite en exemple la ville de Copenhague, au Danemark, qui a totalement modifié son visage au cours des 30 dernières années. Les pistes cyclables y sont légion, et un soin particulier est mis pour concevoir des lieux publics ou des espaces verts attrayants pour la population. Ces aménagements sont pensés pour améliorer la qualité de vie des Danois, notamment leur santé en leur proposant un mode de vie plus actif. «Le simple fait d’être près d’un parc devient une extension de sa maison et permet de réduire d’une certaine façon l’espace privé dont on a besoin », explique-t -il. Sans compter que cela favorise les relations entre les résidents d’un même quartier.
typique des villes européennes s’accorde tout à fait avec les valeurs de la nouvelle génération, prête à opter pour des unités de plus petites dimensions, mais plus centrales et à pro ximité de tout. « Je n ’ai pas de données sur l’Amérique du Nord, mais selon une étude menée en France, 80% des acheteurs de voitures neuves avaient 50 ans et plus.» Ce qui illustre aussi le recul du mode de vie de type banlieue.
Ce changement générationnel doit se refléter sur les nouveaux projets de développement résidentiels et urbains. «L’époque où tout tournait autour de l’automobile est révolue. Aujourd’hui, tout ce qui se construit doit s’inscrire dans cette perspective. Voir des séries de condos tous pareils pousser à perte de vue sur des terrains agricoles, on ne peut plus faire cela. C’est un sacrilège!», exprime Pierre Thibault. Selon lui, les plans doivent maintenant combiner une certaine densité, mais surtout, être pensés pour recréer des communautés.
PATRICE GROLEAU, propriétaire
DEBBY DOKTORCZYK, présidente
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Cette philosophie teinte aussi la construction des ensembles résidentiels, a-t-il constaté. Par exemple, dans plusieurs cas, les cours intérieures se trouvent au-dessus des stationnements. Ainsi, plutôt que de donner vu sur les voitures, les fenêtres s’ouvrent sur des espaces végétalisés et aménagés. «Certains vont plus loin et achètent des véhicules qu’ils se partagent entre occupants», illustre-t-il.
Ce type de cour, implantée en plein cœur de la ville, n’a rien à envier à celui qu’offre la vie en banlieue, ajoute-t-il. « Comme les voitures n ’y circulent pas, l’endroit est complètement silencieux. De plus, ça devient un espace de jeu sécurisé pour les enfants, qui n’ont pas besoin de traverser la rue pour aller voir leurs amis.» Ces espaces semi-privés, végétalisés et tranquilles sont aussi propices au bon voisinage, une autre valeur chère aux Danois. « La communauté s’y tisse naturellement», constate l’architecte. … À DRUMMONDVILLE Des idées qui ont inspiré Pierre Thibault, dans différents projets menés ici, dont l’un qui logera sur un ancien terrain industriel de la ville de Drummondville. Situé à deux pas du centre-ville et longeant la rivière, le projet Fortissimo permettra de limiter l’emprise de la voiture, grâce à sa proximité avec le centre-ville.
«Ce terrain se trouve au cœur de tout, à cinq minutes de la bibliothèque, de l’hôpital, de l’école secondaire et de la gare de train. Les gens réalisent que, dans une ville comme Drummondville qui a été conçue pour les automobilistes, on peut tout faire à pied. C’est quand même incroyable, et cela prouve que ce n’est pas juste à Montréal que c’est possible. »
Dans ce tout nouveau quartier, pas question de voir les stationnements s’aligner côte à côte. «Nous avons repris le modèle scandinave avec des cours intérieures végétalisées, sécuritaires, camouflant
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Projet 86 Delancey, Lower East Side
ATELIER PIERRE THIBAULT
les stationnements.» L’accent sera également mis sur le transport actif, notamment au moyen de rues partagées, ajoute-t-il: «Selon ce concept, les piétons et les cyclistes ont préséance sur les voitures, qui n’y occupent pas la place principale. »
U ne promenade aménagée au bord de la rivière, de nombreux parcs et des espaces consacrés à des activités sportives, culturelles et communautaires complètent le tableau. «Le fait de construire un quartier exemplaire comme celui-ci aura aussi des effets positifs sur le reste de la ville, puisque ce ne sont pas seulement les résidents de Fortissimo qui pourront bénéficier de ces installations, mais tous les citoyens de Drummondville», se réjouit M. Thibault. De même, cela peut devenir un facteur d’attraction pour les employeurs, générant un nouveau bassin de travailleurs à proximité.
Pour que ce genre de développement soit vivant, il faut cultiver la diversité, ajoute toutefois Pierre Thibault: «Trop souvent, on voit des projets où sont construites 500 habitations presque pareilles, vendues à peu près au même prix, ce qui va réunir des clients du même profil. Mais pour créer un véritable milieu de vie, il faut attirer des familles, de jeunes professionnels, des gens plus âgés... C’est ce qui permet de voir naître un quartier vivant, qui va se renouveler.» Voilà pourquoi des condos, mais aussi des maisons en rangée et des immeubles locatifs s’érigeront sur les terrains de Fortissimo.
Ce genre de projet pourrait devenir un remède pour contrer ce vieillissement et attirer les plus jeunes, avec une offre qui a tout pour leur plaire.»Une formule qui pourrait s’appliquer dans des villes comme Sherbrooke ou Trois-Rivières en passant par Matane, une municipalité qui a fait appel à l’Atelier Pierre Thibault pour valoriser son centre-ville.
L’ARCHITECTE QUI CRÉE DES LIENS L’architecture permet donc de réfléchir non seulement à l’aménagement optimal des unités intérieures, mais aussi a celui des aires communes et même au déploiement de la ville en fonction du bien-être des humains. Même les places publiques temporaires, comme on en voit à Montréal ou à Québec (par exemple, Au pied du courant), contribuent à cette dynamique. Mais pour cela, il faut prendre le temps de planifier, autant le design urbain que le bâti. «La conception du meilleur projet possible, en fonction du lieu et du terrain, représente autour de 1% du budget total. Je pense que ce n’est pas une bonne idée de couper là-dedans. Au contraire, c’est important d’investir pour s’assurer de construire le meilleur», avertit l’architecte qui travaille notamment sur le projet de Lab-école avec Ricardo Larrivée et Pierre Lavoie.
Et, surtout, les acteurs de l’industrie doivent penser autrement le développement urbain, d’autant que cela touche différents enjeux, comme la santé des citoyens, celle de l’économie locale et même celle de la planète. «Les promoteurs doivent concevoir leurs projets non seulement en fonction d’aujourd’hui, mais sur un horizon de 5 à 10 ans », soutient Pierre Thibault. Et c’est bien plus qu’une mode temporaire.
Suzanne Roy
Experte invitée
Suzanne Roy est présidente intérimaire de l’Union des municipalités du Québec (UMQ) depuis novembre 2019. Elle a auparavant présidé l’organisation de 2014 à 2016. Elle est également mairesse de Sainte-Julie depuis 2005, où elle a aussi œuvré c omme conseillère municipale de 1996 à 2005.
CESSION DE TERRAINS MUNICIPAUX: LA PRÉCIPITATION EST MAUVAISE CONSEILLÈRE!
Dans la nuit du 7 au 8 février dernier, le gouvernement du Québec a déposé sous bâillon un amendement inattendu au projet de loi n o 40 sur les commissions scolaires prenant ainsi par surprise l’ensemble des parlementaires, des mairesses et maires, ainsi que la population. Sans consulter les municipalités, le ministre de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur, Jean-François Roberge, a changé les règles du jeu du partenariat qui lie le gouvernement du Québec avec les gouvernements de proximité depuis plus de 20 ans.
UNE BRÈCHE DANS LE PARTENARIAT QUÉBEC-MUNICIPALITÉS En effet, les municipalités ont toujours été des partenaires de première importance des gouvernements, peu importe leur allégeance politique, dans la construction de nouvelles écoles au Québec. Par les pouvoirs qui lui étaient conférés par la loi de 1995, une municipalité pouvait octroyer un terrain sur son territoire à une commission scolaire qui souhaitait y construire une école. Cette cession se faisait gratuitement, par échange ou encore à la juste valeur marchande de la propriété, selon les discussions entre les deux parties.
Désormais, les règles du jeu ont changé sans que les municipalités aient eu leur mot à dire, avec une conséquence que le gouvernement refuse de nommer : une augmentation certaine des taxes municipales que paient les contribuables. Dans certains cas, les terrains disponibles se font rares, et leurs coûts peuvent atteindre plusieurs dizaines de millions de dollars. Les municipalités ne demandent pas mieux que de nouvelles écoles s’érigent dans leurs quartiers, mais pas au prix d’une hausse de taxes.
Au surplus, il est sans aucun doute ironique qu’après avoir réduit les taxes scolaires à son
arrivée au pouvoir, le gouvernement se tourne maintenant vers les municipalités, qui n’auront d’autre choix que de se tourner à leur tour vers les citoyens pour éponger le manque à gagner. Ici, on déshabille Pierre pour habiller Paul.
UNE MAIN TENDUE POUR UNE SOLUTION ÉQUITABLE Il n’est pas trop tard pour bien faire les choses puisque les municipalités sont déjà au travail depuis près de deux ans dans ce dossier. Conscient du contexte nouveau en éducation et de l’importance d’offrir de nouvelles classes, le milieu municipal n’a pas tardé à proposer ses solutions, notamment en participant à un comité spécial gouvernemental sur l’acquisition de terrains pour l’implantation des infrastructures scolaires dès l’hiver 2018. Ce même comité a d’ailleurs recommandé de prévoir un financement complet de l’achat de terrains, ce que se refuse à faire le gouvernement aujourd’hui.
Devant le coup de force du gouvernement, quelles voies de passage trouver pour éviter de passer la facture aux citoyens? Évidemment, les solutions doivent être à la hauteur de la valeur des terrains
qui sont en jeu. C’est une question de capacité de payer des contribuables municipaux, de respect des compétences de chacun et de la nécessité économique impliquant de relancer le partenariat entre les gouvernements de proximité et le gouvernement du Québec.
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*Julien Méthot - Courtier immobilier commercial. Colliers International (Québec) Inc. Agence immobilière.