Actu Santé Mai-Juin 2010

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santé N°117 / mai - juin 2010 / 1€ www.defense.gouv.fr/sante

Actualités du service de santé des armées

1 - Djibouti

2 - Antilles

LesDIASS 1er cadrede santé en OPEX Maladiede Chagas : quelrisque pourles militairesen Guyane ? Ambroise Paré,précurseur delachirurgie

3 - Nouvelle-Calédonie


Sommaire Activitésopérationnelles

Vieduservice page 4

De nouveaux interlocuteurs RH

page 22

Haïti : l’éprouvante expérience des experts en identification

page 5

Une mission SAR ne s’improvise pas

page 23

Détachement d’instruction opérationnel en Ouganda

page 6

1er cadre de santé en OPEX

OMLT : une journée en poste avancé dans l’Uruzgan

Réserve page 24

1re journée nationale de l’AMITRHA

page 26

page 7

Actualitésscientifiques

Quoideneuf

Maladie de Chagas : quel risque pour les militaires en Guyane ? pages 8 et 9

page 24

Histoire

Dossier Les directions interarmées du service de santé

Un MITRHA en renfort à l’HMC Bouffard de Djibouti

Ambroise Paré, précurseur de la chirurgie

Hommage

pages 10 à 19

Hommage au médecin général Patrice Le Nepvou de Carfort

Témoignage Être kinésithérapeute militaire

page 25

page 26

page 20

Événement Évolution de la pratique médicale outre-mer

page 21

© Photos couverture : 1 - FFDJ ; 2 - PM Charmoi ; 3 - FANC

Direction centrale du service de santé des armées

pp. 4 et 5

Bureau communication et information Fort neuf de Vincennes - Cours des Maréchaux 75614 Paris Cedex 12 - Tél : 01 41 93 27 77 Mél : bcissa@sante.interarmees.defense.gouv.fr www.defense.gouv.fr/sante Directeur de la publication : Médecin général inspecteur Joël Marionnet Rédacteur en chef : Médecin chef des services Anne Robert Secrétaire de rédaction : Infirmier anesthésiste cadre de santé Alexandre Schauer Maquettiste PAO : Technicien supérieur hospitalier Anne-Cécile Delpeuch Impression : Pôle graphique de Tulle BP 290 - 19007 Tulle Cedex - Tél : 05 55 93 61 00

pp. 8 et 9

Edition : DICOD 1, place Joffre - 75007 Paris Abonnements payants : ECPAD 2 à 8 route du Fort - 94205 Ivry-sur-Seine Tél : 01 49 60 52 44 Régie publicitaire : M. Thierry Lepsch (ECPAD) Tél : 01 49 60 58 56 Numéro de commission paritaire : N°0211 B05691 ISSN : 1165-2268 Dépôt légal : Mars 2010 Tirage : 17 300 exemplaires 6 numéros annuels

Service de Santé des Armées

pp. 18 et 19 Actu Santé - N°

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Activitésopérationnelles

er

1 cadredesanté

OPEX

© ICAS Lopez

en

L’Hôpital médico-chirurgical (HMC) de KAIA (1) est le premier hôpital construit par l’OTAN sur une de ses zones d’opérations. La France en assure le commandement, depuis son ouverture en juillet 2009. L’Infirmier cadre de santé (ICaS) Lionel Lopez livre le témoignage de ses premiers pas à KAIA.

AS : Que retenez-vous de cette expérience en contexte opérationnel et multinational ? 1

ACTUSANTÉ : Comment avez-vous vécu la montée en puissance de l’HMC ?

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ICaS Lionel Lopez : J’ai fait partie de l’équipe qui a effectué un état des lieux pour la NAMSA (2) afin d’identifier les questions qui nécessitaient une réponse avant l’ouverture de l’HMC. Cet établissement, construit selon des normes anglo-saxonnes, a ouvert ses portes et ses vingt-neuf lits d’hospitalisation, avec les soucis inhérents à toute nouvelle structure de soins. Le scanner a été mis en place fin juillet et la télémédecine fin août. L’absence d’eau potable a été résolue ultérieurement avec l’arrivée d’une unité de traitement de l’eau. AS : Quel a été votre rôle ? LL : L’HMC KAIA présente les particularités d’un hôpital, installé sur un étage mais éclaté en neuf services. Il accueille aussi bien des militaires de l’ISAF (3) que ceux de l’Armée nationale afghane (ANA), ainsi que la population locale. Son bon fonctionnement nécessite 124 personnels, dont 81

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Français. Les autres professionnels de santé sont portugais, allemands, belges, bulgares, américains et espagnols. À travers la fonction fédératrice du cadre de santé, j’ai essayé de garder une certaine polyvalence pour décloisonner les ser vices et améliorer la communication. Les équipes ont été confrontées aux blessures de guerre, aux injustices des attentats, à la peur des roquettes, mais également à l’attente des blessés. En effet, l’isolement créé par la zone aéroportuaire rend difficile les consultations dans le cadre de l’Aide

Photos 1, 2, 3 : Activités hospitalières à l’HMC KAIA

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médicale à la population (AMP). À l’entrée du camp, les mesures de sécurité sont strictement appliquées. En période d’attente, j’ai fédéré les personnels par des exercices de secourisme, la rédaction de protocoles ou de fiches techniques, l’élaboration du dossier de soins commun, réalisé en concertation avec l’équipe portugaise. Les pratiques différentes selon les nations, n’ont pas rendu l’exercice facile.

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LL : Les quatre exercices MASCAL, simulant l’arrivée massive de blessés, ont mis en évidence que l’activité de l’hôpital reste tributaire des moyens d’évacuation en amont, qui ne comprennent que deux ambulances à l’intérieur du camp et deux Véhicules de l’avant blindés (VAB) pour les transports extérieurs. Les équipes médicale portugaise et chirurgicale allemande se sont montrées indispensables au bon fonctionnement de la structure. Une dynamique de travail s’est instaurée, renforçant la complémentarité des équipes entre nations. Le manque de pratique de la langue anglaise par l’équipe française a été un frein à la communication. À l’HMC, le dispositif d’évacuation du linge et des déchets souillés est traité par une société turque. Avec un cadre de référence bien différent du nôtre, force est de constater que la réglementation concernant la gestion des risques ne peut s’appliquer en OPEX comme en métropole. Le cadre de santé ne se contente pas de rendre compte au médecin-chef des difficultés rencontrées par les équipes, au gestionnaire des problèmes de locaux, au technicien supérieur hospitalier des soucis de matériel, il propose aussi des solutions. Propos recueillis par la rédaction d’Actu santé (1) Kabul international airport (2) Organisme logistique de l’OTAN qui a construit la structure. (3) International security assistance force


Activitésopérationnelles

Recherche de victimes par la sécurité civile

Haïti: l’éprouvanteexpérience

© CDC Rateau

des expertsenidentification Cinq praticiens du Service de santé des armées (SSA) ont participé à la mission d’identification des victimes du séisme qui a frappé Haïti en janvier dernier. De retour en France, ils racontent les difficultés de leur mission.

« © CDC Rateau

Cette mission est la plus éprouvante que l’on ait jamais effectuée, à cause du contexte dramatique et dangereux qui régnait sur l’île » témoignent les médecins et chirurgiens-dentistes, d’active et de réserve, en exercice en métropole et en Martinique. Ils ont rallié en urgence Port-au-Prince en Haïti, le 14 janvier 2010, pour armer l’Unité nationale d’identification des victimes de catastrophe (UNIVC) regroupant des personnels de la police technique scientifique et de l’Institut de recherche criminelle de la gendarmerie nationale (IRCGN). Sur le terrain, les experts ont examiné tous les corps sortis des décombres sur des sites sélectionnés. Cette mission s’est effectuée dans un contexte difficile

et chaotique. La première raison en est la forme même de la mission. La coordination des équipes médicolégales n’était pas supervisée par l’Organisation internationale de police criminelle (INTERPOL) et les données s’échangeaient au gré des rencontres entre professionnels.

Instabilité sur tous les fronts Mais surtout, il a fallu prendre en compte la fragilité géologique de la zone. Durant les quinze jours de mission, de nombreuses répliques du tremblement de terre ont menacé. Par ailleurs, nous avons dû également composer avec l’instabilité politique. Après les effondrements de bâtiments officiels, anéantissant les dirigeants de la Mission de stabilisation de l’ONU en Haïti (MINUSTAH) ainsi que de nombreux responsables haïtiens, plus aucune structure de commandement n’était en place. Et, que dire de l’insécurité au sein d’une population livrée à elle-même ? La tension était palpable dans les rues, c’est pourquoi tout déplacement s’effectuait sous escorte armée.

Ambassade de France à Port-au-Prince Actu Santé - N°

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Dans ces conditions, difficile de trouver le sommeil au rythme des fusillades et des répliques du tremblement de terre, sur fond d’incantations vaudou d’une population meurtrie. Nous étions regroupés dans les jardins de la résidence de l’ambassadeur de France avec les autres militaires français, les journalistes, les ONG et les familles haïtiennes en instance de départ. Notre village improvisé de tentes, rassemblait près de 900 personnes, dans des conditions d’hygiène précaire.

Sciences et humanité, indissociables Au total, les trente-cinq ressortissants français disparus, ont été retrouvés et identifiés en grande partie grâce aux odontogrammes ante mortem établis par les chirurgiens-dentistes et récupérés par la mission. Les corps ont pu être restitués aux familles sur place ou en métropole, leur permettant de démarrer le travail de deuil. Mais, en marge du processus d’identification humaine, nous ne sommes pas prêts d’oublier cette mission particulière. Au-delà des morts, c’est le contact avec les familles rescapées présentes sur place, leur stress, leur désespoir, dans un contexte permanent de dangerosité, qui a rendu les identifications plus pénibles et plus difficiles que jamais. Médecin en chef Florent Ducrettet Chirugien-dentiste en chef (R) Dominique Berger Chirugien-dentiste en chef Henri-Philippe Rateau

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Activitésopérationnelles

Détachement d’instructionopérationnel

en Ouganda

Dans le cadre d’un Détachement d’instruction opérationnel (DIO) effectué du 13 janvier au 18 février 2010 au camp de Singo en Ouganda, trente-cinq militaires de la 13e Demibrigade de légion étrangère (13 e DBLE) stationnée en république de Djibouti ont dispensé des cours aux soldats ougandais désignés pour le prochain mandat de l’Union africaine (UA) chargée d’une mission de maintien de la paix à Mogadiscio.

U

n médecin et un infirmier du Centre médical interarmées (CMIA) de Djibouti ont assuré la formation au secourisme de combat de 1700 soldats ougandais, l’instruction complémentaire de 85 medics et le soutien des militaires de la 13e DBLE.

Une mission particulière Depuis février 2007, l’UA sous mandat de l’ONU a mis en place une mission de maintien de la paix afin de favoriser le retour d’un régime stable en Somalie. Basée à Mogadiscio, l’African union mission to Somalia (AMISOM) est majoritairement armée par l’Ouganda et le Burundi. Par leur persévérance, ces deux pays ont prouvé la viabilité d’une mission exclusivement africaine que beaucoup vouaient à l’échec. La France s’est inscrite dès le départ comme un partenaire privilégié en termes de formation mais aussi de soutien en évacuant, de Mogadiscio à Nairobi, en septembre 2009, des blessés à la suite d’un attentat contre la base de l’AMISOM.

Former au sauvetage au combat Chaque contingent de l’AMISOM ayant subi des pertes humaines, le sauvetage au combat était de toute évidence un des axes majeurs du programme de formation. La plus

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grande difficulté a résidé dans l’adaptation au référentiel français du Sauvetage au combat de 1er niveau (SC1) de la réalité d’une armée qui ne possède ni dotation, ni doctrine dans ce domaine. Par groupes de 80 soldats, vingt et un modules ont été dispensés en quatre heures. Ils ont concerné la mise à couvert, le message opérationnel, le contrôle des hémorragies, la prise en charge des blessés inconscients et la mise en position d’attente. Les moyens pédagogiques et le matériel étaient rudimentaires : écharpe en tissu, adhésif, plastique et morceau de bois… Les modules comprenaient des parties théorique et pratique, des rappels et des restitutions. Tous les cours donnés en anglais étaient traduits en swahili par un militaire ougandais. La part belle était laissée à la démonstration et à la pratique. En outre, un enseignement complémentaire théorico-pratique de six heures a été dispensé aux medics. Il s’agissait de les former afin qu’ils puissent eux-mêmes transmettre les savoir-faire acquis. Ils ont été également formés à la prise en charge des blessés à l’avant selon la méthode du SAFE MARCHE RYAN (1) telle qu’elle est enseignée par le Centre d’instruction aux techniques élémentaires de réanimation de l’avant (CITERA) de Lyon.

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Vacciner contre la grippe A Par ailleurs, en accord avec la Direction centrale du service de santé des armées (DCSSA), l’équipe médicale a vacciné contre la grippe A(H1N1) quatorze personnels de l’ambassade de France à Kampala, quatorze élèves de l’école française et six ressortissants français. Cette mission enrichissante a permis de mettre en avant plusieurs points. Toute préparation opérationnelle doit intégrer une partie de secours au combat avec des exercices de restitution dans des situations tactiques variées. Nous avons pu mesurer les avancées des concepts et des matériels opérationnels. Sur un plan personnel, ce type de mission est l’occasion de remettre en question ses pratiques, de progresser dans les méthodes d’instruction et les relations avec les militaires français ou étrangers dont nous avons la charge. Les soldats ougandais ont montré un intérêt et un enthousiasme certains pour pratiquer ces nouvelles techniques et notamment les medics qui se sont vus ainsi valorisés. Médecin François-Xavier Le Flem Médecin-adjoint du centre médical interarmées de Djibouti (1) SAFE MARCHE RYAN : méthode standardisée de prise en charge des blessés de guerre


Activitésopérationnelles

OMLT: une journéeenposteavancédansl’Uruzgan Dans la province de Dehravood en Uruzgan au centre de l’Afghanistan, un détachement français de six personnels encadre une compagnie de militaires afghans. L’infirmier en poste OMLT est responsable du soutien santé de l’ensemble des personnels et participe aux différentes activités du COY (1). L’Infirmier de classe supérieure (ICS) Jean-Pierre Treussier nous fait partager une de ses journées.

5h00 : chacun se réveille à son

rythme. Petit-déjeuner.

6h00 : vérification du matériel et essai des transmissions.

6h30 : rassemblement avec les militaires afghans et départ en véhicules. Aujourd’hui je pilote un Véhicule de l’avant blindé (VAB).

10h30 : fin de la patrouille à pied, je reprends ma place de pilote pour le retour.

Prise en charge d’un bébé de trois semaines

11h00 : arrivée au poste avancé. Lors du débriefing avec l’ANA, rien à signaler de particulier.

16h00 : des civils, dont quelques enfants, se présentent à l’entrée du camp afin de recevoir des soins. C’est un moment d’échange important qui permet de se faire accepter par la population locale et de se faire une idée sur ses sentiments à notre égard.

Entrée du poste médical

7h00 : arrivée sur les hauteurs. Un personnel de chaque VAB reste en position de tireur afin d’appuyer la patrouille à pied qui aura lieu en contrebas. Je participe à la patrouille, en fin de dispositif, avec un militaire de l’Armée nationale afghane (ANA) derrière moi.

© ICS Treussier

12h00 : repas rapide en commun, chacun se prépare ce qu’il veut. En patrouille avec l’ANA

12h30 : reconditionnement, à notre guise : sieste, lecture, étirements…

15h00 : séance de sport à base de

pompes, tractions, abdominaux et étirements, pour ceux qui ne les ont pas faits.

Bain et soins d’un enfant

8h10 : la patrouille s’arrête. Le chef

de COY va s’entretenir avec le Malek (2) du village. Les autres personnels se mettent en couverture afin de sécuriser la zone.

17h30 : douche.

18h00 : avec un autre équipier, nous préparons le dîner.

19h00 : réunion de l’ensemble du COY pour organiser la journée suivante.

19h10 : prise de repas en commun. C’est, le plus souvent, un moment de détente.

20h00 : fin du repas et début de la garde. Ce soir, je prends le tour de minuit à 2h00. Infirmier de classe supérieure Jean-Pierre Treussier Centre médical des armées de Valence

8h30 : la patrouille reprend sa progression sur l’itinéraire prévu.

(1) Compagnie (2) Représentant religieux

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Actualitésscientifiques

MaladiedeChagas:

quelrisquepourlesmilitairesenGuyane ? Due à un parasite, Trypanosoma cruzi , transmis par des punaises hématophages (1), la maladie de Chagas sévit du sud des États-Unis au sud de l’Argentine. Des chercheurs de l’Institut de recherche biomédicale des armées (IRBA) ont mené une étude afin d’évaluer le niveau de risque pour les militaires servant au sein des Forces armées en Guyane (FAG).

Océan Atlantique 1

KOUROU

SAINT-JEANDU-MARONI

2 3 CAYENNE

4

Lors de l’infection, un nodule cutané peut apparaître au point d’inoculation. Mais, bien souvent asymptomatique, celle-ci peut passer inaperçue. Si la phase aiguë de la maladie peut être asymptomatique, elle se manifeste le plus souvent par une myocardite fébrile ou, à distance, une insuffisance cardiaque chez un sujet jeune.

Au cours de l’infection chronique, les malades peuvent développer des lésions irréversibles du système cardiaque (26% des cas), de l’appareil digestif (6% des cas) ou encore des troubles neurologiques. En l’absence de traitement, la maladie peut s’avérer mortelle à la phase aiguë comme à la phase chronique.

Une évolution du risque infectieux

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Alors que l’Amazonie était considérée comme hors de la zone d’endémie, une recrudescence du nombre de personnes infectées a été observée, depuis 2004, dans le bassin amazonien. La Guyane a, elle aussi, connu une augmentation du nombre de malades ces cinq dernières années. En 2007, un cas de maladie de Chagas est identifié pour la première fois au sein des Forces armées en Guyane. S’agissait-il d’un cas isolé, ou était-ce la manifestation d’un risque important chez les FAG ? Afin de le découvrir, une équipe d’entomologistes de l’IRBAantenne de Marseille a conduit une étude dans les différentes emprises des FAG, en partenariat avec la faculté de médecine de Cayenne. Les résultats sont en cours de publication dans la littérature scientifique.

Trypanozoma cruzi est transmis par des punaises hématophages appelées Actu Santé - N°

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SURINAM

BRÉSIL

1 - Groupement du service militaire adapté (GSMA) de SaintJean du Maroni 2 - Centre spatial guyanais (CSG) de Kourou

Une étude des vecteurs de la maladie Insectes capturés sur le piège lumineux

REGINA

© BCISSA

A

vec près de 50 000 nouveaux cas par an, huit à neuf millions de personnes infectées et près de 100 millions de personnes potentiellement exposées à travers vingt et un pays d’Amérique centrale et d’Amérique du sud, la maladie de Chagas, ou trypanosomiase américaine, fait partie des grandes infections oubliées. En effet, il n’existe aujourd’hui ni vaccin, ni traitement totalement efficace contre cette maladie, qui présente des formes aiguës, latentes et chroniques.

GUYANE FRANÇAISE

2010

3 - Régiment du service militaire adapté (RSMA) à Cayenne - Base aérienne (BA) de Cayenne-Rochambeau 4 - Centre d’entraînement en forêt équatoriale (CEFE) de Regina

triatomes. Hommes, animaux sauvages ou domestiques, à l’exception des oiseaux, peuvent être touchés par le parasite lorsqu’ils sont en contact avec un triatome infecté ou ses déjections. À travers l’Amérique latine, les infections sont principalement dues à des triatomes domestiques vivant dans les maisons, notamment les habitations vétustes en zone rurale et péri-urbaine. Le réservoir de parasites est essentiellement humain. En zone amazonienne, dite non endémique, la transmission est assurée par des triatomes sauvages. Le réservoir de parasites est constitué par la faune sauvage et parfois domestique. Ces vecteurs sauvages sont peu connus mais certains d’entre eux montrent une tendance à pénétrer les habitations pour venir s’y nourrir.


Actualitésscientifiques CAPTURE DE TRIATOMES

à l’aide d’un piège Noireau

© IRBA

à l’aide d’un piège lumineux

Les travaux de recherche se sont donc naturellement concentrés sur l’étude des vecteurs présents dans les implantations des FAG. Deux missions, en 2007 et 2008, ont eu pour objectif d’identifier les différentes espèces de triatomes, leur densité et leur taux d’infection par le parasite. Les insectes étaient capturés à l’aide de différents pièges (lumineux, avec appât,...). Certains se trouvaient près des éclairages extérieurs, ainsi qu’à l’intérieur des logements. Contrairement aux triatomes responsables de la plupart des épidémies d’Amérique latine, les individus collectés n’avaient, a priori, pas élu domicile dans les habitations. « Les individus que nous avons capturés dans les logements étaient tous adultes et nous n’avons pas trouvé de larves, explique le Médecin en chef (MC) Frédéric Pagès, responsable de la mission. Cela indique que ces triatomes n’étaient pas “domestiqués” et qu’ils y pénétraient, sans doute attirés par la lumière.» Les punaises ont ensuite été étudiées à la faculté de médecine de Cayenne et leurs intestins disséqués afin de rechercher le parasite T.cruzi. Résultats : six espèces différentes de triatomes ont été identifiées et 67% des individus capturés se sont révélés infectés par le parasite après identification moléculaire. Au CEFE de Regina, le taux d’infection des triatomes atteignait 71%. Par ailleurs, quatre spécimens infectés ont été retrouvés dans les cuisines, faisant courir le risque d’une

contamination de la chaîne alimentaire par leurs déjections. Il existe donc un risque de contact avec des punaises infectées par le parasite ou leurs déjections sur l’ensemble des sites militaires étudiés par les entomologistes. Le risque de contamination alimentaire n’est, en outre, pas à négliger. « Dans le bassin amazonien, les épidémies de Chagas aiguës à partir d’aliments contaminés par des déjections de triatomes sont fréquentes, note le MC Pagès. Une épidémie d’origine alimentaire au sein des forces, identique à celle qui s’est produite en 2005 à Iracoubo en Guyane lors d’une fête familiale, pourrait survenir. »

Les moyens préventifs En l’absence de traitement prophylactique, la seule mesure réellement efficace est d’éviter au maximum le contact avec les punaises. Lorsque le triatome effectue son repas de sang, il ne transmet pas l’infection par la piqûre, mais en vidant ses intestins. Le parasite pénètre alors dans l’organisme, soit par grattage et formation d’une plaie au niveau de la piqûre, soit par contact avec les muqueuses ou encore par ingestion. Des conseils en matière de lutte antivectorielle ont donc été prodigués sur les différents sites des FAG. « En forêt, la prévention repose essentiellement sur l’usage de moustiquaires et de bâches imprégnées d’insecticides qui devraient être mises en place courant 2010 et sur Actu Santé - N°

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Triatome responsable de la maladie de Chagas

la protection de la nourriture, indiquent les chercheurs. Dans les emplacements fixes, il faut diminuer les éclairages attirant les punaises, protéger la nourriture, protéger les couverts, ustensiles de cuisine, plats et assiettes, protéger les ouvertures par des moustiquaires et utiliser des moustiquaires de lit imprégnées d’insecticide. » Actuellement, le traitement de première ligne contre la maladie de Chagas repose principalement sur un médicament délivré sous Autorisation temporaire d’utilisation (ATU), c’està-dire uniquement en milieu hospitalier et présentant potentiellement des effets secondaires importants. Le diagnostic parasitologique, sérologique ou moléculaire est aussi souvent difficile. Dans le cas d’une infection chronique, un traitement antiparasitaire est administré en plus du traitement symptomatique. Bien que peu fréquente en Guyane, cette infection est grave, avec parfois des séquelles irréversibles, voire une issue fatale. Les militaires ayant séjourné en Guyane sont désormais sensibilisés à la possibilité d’y être confrontés. Sur place, des dépliants sont mis à la disposition des résidents pour les informer sur les modes de contamination et les moyens de protection. Emmanuelle Chartier EVDG - Cellule de formalisation des projets de recherche (1) Hématophage : qui se nourrit de sang

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Dossier

Les DIASS

Lesdirectionsinterarmées DUSERVICEDESANTÉ E

lles sont implantées dans les départements d’outre-mer (Antilles, Guyane, La Réunion), les collectivités d’outre-mer (NouvelleCalédonie, Polynésie française) et en Afrique (Djibouti et Sénégal) où stationnent des forces armées françaises. Ces forces sont placées sous l’autorité d’un Commandant interarmées (COMIA) dénommé Commandant supérieur (COMSUP) pour les forces de souveraineté ou Commandant des forces (COMFOR) pour les forces de présence à l’étranger.

Situées dans des contrées lointaines aux parfums d’exotisme ou d’aventure, les sept Directions interarmées du service de santé (DIASS) sont des échelons intermédiaires du Service de santé des armées (SSA) bien particuliers.

médico-chirurgical (HMC) Bouffard, et à disposer d’un médecin épidémiologiste. De par leur situation, les DIASS sont en contact étroit avec les forces. Le directeur interarmées est l’adjoint santé du COMIA et ses personnels arment le J4 (logistique) santé du Poste de commandement interarmées (PCIA) lors des exercices et des opérations. Les services médicaux des forces qui, jusqu’à présent, ne leur étaient subordonnés que sur le plan technique, vont être réunis en Centres médicaux interarmées, placés sous l’autorité pleine et entière des DIASS. Cette évolution accompagne la réforme des bases de défense. C’est déjà le cas pour la DIASS de Djibouti qui a fait partie des onze bases de défense

Pionniers de l’interarmisation, les DIASS, organismes extérieurs du Service de santé des armées, occupent une situation originale. Elles sont en effet subordonnées pour emploi aux COMIA mais relèvent de la Direction centrale du service de santé en matière administrative et technique. Organes de direction à petit effectif, elles se voient toutes adjoindre une Unité de MARTINIQUE distribution de produits FORT-DE-FRANCE de santé (UDPS) en charge du ravitaillement et dirigée par un pharmacien ainsi qu’un vétérinaire qui est parfois mutualisé entre PAPEETE deux DIASS (zones TAHITI Pacifique et Caraïbes). Des services médicaux interarmées, précurseurs des tout récents Centres médicaux interarmées (CMIA), leurs sont rattachés. La DIASS de Djibouti est la seule à avoir conservé une structure hospitalière, l’Hôpital

expérimentales et pour la DIASS de La Réunion qui est entrée, à son tour, au 1er janvier 2010, dans le cercle des dix-huit bases de défense pilotes. Fortement imbriquées avec les forces dont elles s’assurent de la qualité du soutien médical, les DIASS sont de ce fait liées au devenir de ces forces et, en particulier, à l’évolution de leur format appelé à être modifié par la révision du dispositif militaire outremer et par les accords de défense pour l’étranger. Médecin général Michel Sarthou-Moutengou Directeur interarmées du service de santé des Forces françaises stationnées à Djibouti

Localisation des 7 DIASS MAURITANIE

Océan Atlantique Océan Atlantique

SÉNÉGAL

ÉRYTHRÉE

DAKAR

ÉTHIOPIE

DJIBOUTI GAMBIE

Mer Rouge GUINÉE-BISSAU Lac Assal

DJIBOUTI

Mer des Caraïbes

Lac Abhé SOMALIE

Océan Pacifique

NOUVELLE-CALÉDONIE

Océan que Pacifique

10

Océan Atlantique

SAINT-DENIS

CAYENNE

NOUMÉA Océan Indien

GUYANE FRANÇAISE

Actu Santé - N°

ILE DE LA RÉUNION

© BCISSA

BRÉSIL

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Les DIASS

Dossier

Missionsamphibies La Direction interarmées du service de santé des forces françaises du Cap-Vert (DIASSFFCV) remplit une mission particulière de soutien santé des opérations amphibies.

L

es Forces françaises du Cap-Vert (FFCV) confirment sans discontinuer la vocation de point d’appui de Dakar. Celle-ci se décline sous l’angle du soutien opérationnel, avec ses atouts d’escales navale et aérienne, et au travers de la préparation à l’engagement militaire avec un effort marqué dans le domaine des opérations amphibies. Ces dernières consistent à amener les troupes, par voie maritime, au plus près de leur zone d’intervention où elles sont débarquées. Le service de santé est systématiquement impliqué dans les différents exercices mis en place par le commandant des FFCV.

La presqu’île du Cap-Vert se prête au déploiement amphibie avec une large ouverture sur l’océan Atlantique et un accès aisé vers le delta du Sine Saloum. L’Engin de débarquement d’infanterie et de char (EDIC) Sabre a été affecté en partie dans ce but et de façon pérenne dans la rade en eaux profondes de Dakar. Ce bâtiment et les Transports de chalands de débarquement (TCD) de la mission Corymbe apportent leur soutien afin d’assurer une présence française sur les côtes africaines.

de ces exercices, une antenne médicale reste en alerte au Centre médical interarmées (CMIA) avec, si besoin, l’appui de l’Hôpital principal de Dakar (HPD). De la même façon, les FFCV et les forces armées sénégalaises réalisent, tous les ans, un exercice conjoint destiné à renforcer la coopération entre les deux armées. Cet exercice aéronavalo-terrestre se déroule sur une semaine et change de leadership un an sur deux. L’exercice amphibie Deggo (1) requiert un Véhicule de l’avant blindé (VAB) sanitaire avec un médecin, un infirmier et quatre brancardierssecouristes. Un conseiller santé est placé auprès du commandement. En novembre 2010, le Sénégal a obtenu d’être le pays organisateur d’un exercice européen en partie amphibie, Emerald move, où plus de 3 000 militaires s’exerceront à des manœuvres dans un contexte multinational.

à

Dakar

Une nouvelle qualification amphibie Devant la place grandissante de l’amphibie dans les activités des FFCV, le général commandant les FFCV (COMFOR) a récemment créé un diplôme de reconnaissances de ces compétences. Le Stage de qualification aux opérations amphibies (SQOA), d’une à deux semaines, est proposé aux militaires français et sénégalais. Trois niveaux de qualification existent selon la durée du stage pratique. Le médecin-chef du CMIA a été diplômé en 2009. D’autres praticiens devraient suivre. À terme, ce brevet pourrait être ouvert aux infirmiers. Vétérinaire principal Florence Calvet Officier communication de la DIASS-FFCV (1) Deggo signifie « amitié » en ouolof, une des langues nationales du Sénégal.

Débarquement amphibie sur la presqu’île du Cap-Vert

Des exercices nationaux et internationaux

© FFCV

La DIASS met à profit ces exercices et ceux organisés tous les deux mois avec les troupes en mission de courte durée au 23e Bataillon d’infanterie de marine (BIMa), pour s’entraîner à la prise en charge de blessés et à l’Évacuation de ressortissants (RESEVAC). Tout au long Actu Santé - N°

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Dossier

Les DIASS

Chefferiesanté opérationnelle aux Antilles

Médecin du CMIA auprès d’un blessé haïtien

es missions prioritaires sont la protection du territoire national, la sécurité de la Zone de responsabilité permanente (ZRP) (1), la présence française en coopération avec les pays de la Caraïbe, l’action de l’État en mer et la lutte contre le narcotrafic. En temps de crise, les militaires peuvent conduire des opérations avec projection de forces ou contribuer à des secours d’urgence, comme en janvier dernier, lors du séisme en Haïti.

L

L’action du service de santé des armées s’inscrit dans le soutien des missions dévolues aux différentes composantes militaires : préparation opérationnelle, aguerrissement des troupes et participation aux exercices, échanges militaires avec les îles avoisinantes et les pays d’Amérique Centrale et du Sud. Les personnels des services médicaux des bâtiments de la Force d’action navale (FAN) naviguant dans la ZRP participent à l’action de l’État en mer. Cinq entités, dont le nouveau Centre médical interarmées (CMIA) de Fort-deFrance, assurent le soutien médical d’environ 4 600 personnels.

joué le rôle d’interface entre la Direction centrale du service de santé des armées (DCSSA), l’Unité de distribution de produits de santé (UDPS), le CMIA, le Centre opérationnel (CENTOPS) des FAA et le théâtre sur lequel étaient déployés un Poste médical (PM) et une Antenne médico-chirurgicale embarquée (AMCE) à bord du Siroco. Ce bureau a recueilli et traité les informations nécessaires à l’expression des besoins logistiques et à la communication des directives. Véritable plateforme logistique sanitaire entre la métropole et Haïti, l’UDPS a mis en place le lot de projection initiale, les lots tropicaux et de lutte anti-vectorielle au profit du PM. Elle a fourni des lots EVASAN et de convoyage sanitaire aux équipes d’Evacuation médicale (MEDEVAC). Durant toute la durée de l’opération, cette unité a commandé, réceptionné et acheminé par voie aérienne militaire les lots spécifiques « antenne chirurgicale » puis les produits de santé indispensables à l’AMCE.

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Le CMIA a démontré sa capacité opérationnelle. Il a armé simultanément un poste médical, avec sept personnels sur l’aéroport de Port-au-Prince et une antenne à l’ambassade de France, et des équipes MEDEVAC. Dans le même temps, il a continué d’assurer le fonctionnement médical de la base arrière sur le morne Desaix. Ainsi cette opération, montée en moins d’une semaine par les FAA, montre bien la faisabilité de la mise en place d’un dispositif adapté aux secours d’urgence. Elle nécessite réactivité, adaptabilité et adhésion des personnels et des structures logistiques. Elle démontre qu’une DIASS peut se voir confier de telles attributions dans des circonstances exceptionnelles. Médecin en chef Hervé Decoussy Directeur interarmées du service de santé des forces armées aux Antilles (1) Essentiellement la Caraïbe

© PP Lacombe

En temps de crise, la Direction interarmées du service de santé (DIASS) aux Antilles peut devenir chefferie santé opérationnelle. Ainsi, lors de l’opération Séisme Haïti 2010, le bureau technico-opérationnel a

Deux régions, la Guadeloupe et la Martinique, constituent les Antilles françaises. La présence militaire regroupe les Forces armées aux Antilles (FAA), le Service militaire adapté (SMA) et la gendarmerie nationale, à raison d’un régiment et d’un commandement de gendarmerie (COMGEND) par région.

CMIA Étienne Montestruc Actu Santé - N°

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Opération Atalante Chaque année, 20000 navires marchands et 30% des approvisionnements de pétrole à destination de l’Europe, transitent par le Golfe d’Aden. 90% de l’aide alimentaire destinée aux populations déplacées en Somalie est acheminé par cette route maritime. Face aux actes de piraterie dans cette région du monde, le Conseil européen a adopté, le 10 novembre 2008, l’action commune qui a permis le déclenchement, le 8 décembre, de l’opération Atalante menée par l’EU NAVFOR Somalie.

Dans la nuit du 1er au 2 janvier 2010, la Frégate légère furtive (FLF) Surcouf intercepte un boutre de pêche pakistanais piraté un mois plus tôt et

Entrée du GMC devenu HMC Bouffard

marines russe, chinoise, indienne, espagnole, saoudienne, sud-coréenne et japonaise. La lutte contre la piraterie a contribué fortement à l’internationalisation de la place de Djibouti avec 360 escales de bâtiments de guerre de tous pays en 2009 et l’implantation d’une force japonaise. Dans ce contexte, le rôle de l’HMC Bouffard, déjà incontournable, s’en est trouvé conforté.

Djibouti, place incontournable Outre la force européenne, soit de sept à treize bâtiments à la mer, deux autres coalitions opèrent dans l’océan Indien : quatre navires de l’Ocean shield de l’OTAN et six bâtiments de l’US navy, en coopération avec les

Capitaine Thierry Journet Officier supérieur adjoint HMC Bouffard - Djibouti

© FFDJ

Pirates arraisonnés, victimes hospitalisées

suspecté d’avoir perpétré une attaque contre un navire de commerce le jour même, à environ 600 nautiques des côtes somaliennes. À son bord, les marins français portent secours à vingt-neuf membres d’équipage pakistanais abandonnés par les pirates. Un pêcheur, grièvement blessé, est évacué par hélicoptère et pris en charge sur la FLF Surcouf, puis transféré vers l’HMC Bouffard où il est hospitalisé six jours après. Guéri, il quitte l’hôpital trois semaines plus tard et a depuis regagné son pays. L’EU NAVFOR a supporté en totalité son hospitalisation. © MC Boete

L’

intégralité du soutien santé de l’opération Atalante (du rôle 1 à 3) est assurée par l’Hôpital médico-chirurgical (HMC) Bouffard de Djibouti. En 2009, quarante-cinq militaires participant à cette opération ont consulté aux urgences, quinze ont été hospitalisés. Quarante actes de radiologie/scanner, une vingtaine de consultations spécialisées en ophtalmologie, chirurgie et ORL, trente interventions dentaires et vingt-six analyses de biologie médicale ont été réalisés. En tout, ce sont 127 militaires européens qui ont eu recours aux soins dispensés à l’HMC Bouffard, pour un montant total facturé de 54 000 €. Cette prise en charge ne se limite pas à l’opération Atalante mais s’étend, en vertu d’accords bilatéraux, aux marins d’autres nations engagées dans la lutte contre la piraterie et aux victimes.

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Souteniretformer unbataillon somalien En 2009, les Forces françaises stationnées à Djibouti (FFDJ) ont formé des jeunes recrues des forces de sécurité somaliennes.

Consultation d’un stagiaire somalien

En quelques semaines, un camp de toile destiné à héberger les recrues et l’encadrement français est construit à plusieurs dizaines de kilomètres de la ville de Djibouti. Dans des conditions de vie très difficiles, compte tenu de l’éloignement du camp, avec une chaleur entre 40 et 45°C pendant l’été et du vent, les personnels du Centre médical interarmées (CMIA), appartenant pour la plupart à l’antenne médicale du 5e Régiment interarmes d’outre-mer (RIAOM), ont déterminé l’aptitude des candidats à suivre la formation. En effet, si la sélection des recrues est une responsabilité des autorités somaliennes, la visite médicale a permis d’écarter les individus qui n’étaient pas en mesure de suivre la formation pour diverses raisons telles que la tuberculose ou des séquelles fonctionnelles de blessures de guerre. Par ailleurs, une étude anthropométrique couplée à un

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entretien mené par les autorités militaires, a permis d’éliminer les stagiaires mineurs. Au total, trentesept recrues ont été remplacées. Le CMIA a également assuré le soutien sanitaire quotidien des activités et la formation au secourisme du personnel somalien. Ces missions ont mobilisé en permanence un médecin, un à deux infirmiers et deux brancardierssecouristes, ponctuellement renforcés lors des incorporations par un

deuxième médecin du CMIA ou un médecin de la réserve opérationnelle venu de France pendant un mois. Au total, 535 visites d’incorporation, 1125 consultations et six hospitalisations à l’HMC Bouffard ont été effectuées au profit des stagiaires somaliens. Médecin en chef Fabrice Boete Médecin-chef du centre médical interarmées - Djibouti

Camp de formation des forces somaliennes

© FFDJ

Vérifier l’aptitude médicale

© MC Boete

À

la demande du président du Gouvernement fédéral de transition (GFT) de Somalie, la France a assuré, durant six semaines, la formation individuelle de 500 hommes des forces de ce pays. Il s’agit d’un engagement fort de la France pour soutenir le GFT somalien. La France a rempli cette mission en partenariat avec la République de Djibouti qui a permis que ce stage se déroule sur son territoire et a instruit le même nombre de recrues somaliennes dans son centre d’instruction situé à Hol-Hol.

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CMIA de Cayenne

Guyane: desmissionsopérationnellesvariées Le Service de santé des Forces armées en Guyane (FAG) soutient plus de 4 000 militaires et gendarmes ainsi que leurs familles. Vivant, pour certains, dans des conditions isolées, ils sont confrontés à des pathologies tropicales comme la dengue, le paludisme ou la leishmaniose. Deux opérations particulières et deux éclairages différents sont présentés : l’opération Titan et l’opération Harpie. Opération Titan

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epuis 1979, le 3e Régiment étranger d’infanterie (REI) assure la protection externe des installations du Centre spatial guyanais (CSG) dans le cadre de l’opération Titan. Cette mission permanente de sur veillance est renforcée lors du transfert des éléments du lanceur entre les différents halls de montage, de l’installation du lanceur sur son pas de tir et du lancement de la fusée.

Le soutien médical sur l’emprise du CSG est assuré par une équipe composée d’un médecin et de deux infirmiers appartenant au détachement de la Brigade des sapeurs-pompiers de Paris (BSPP). Lors des phases de renforcement, une équipe du centre médical du 3e REI est également mise en alerte. Elle peut déployer, sur ordre du PC militaire de Pariacabo, un poste médical avancé.

Avec une dizaine de lancements Ariane par an, le début de la campagne de lancement des fusées Soyouz programmé en 2010, puis des fusées Vega en 2011, le service médical du 3e REI restera particulièrement actif dans l’opération Titan. Médecin principal Rémy Dubourg Médecin-chef du 3e REI - Kourou

Opération Harpie ntre septembre 2009 et janvier 2010, six infirmières affectées en mission de courte durée en Guyane ont participé à l’opération Harpie de lutte contre l’orpaillage illégal. Après un stage d’initiation à la vie en forêt de trois jours, elles ont alterné des séjours de deux à cinq semaines en base opérationnelle avancée et le travail dans les centres médicaux. Sans médecin, aidées d’un ou deux brancardiers-secouristes, elles ont soutenu des bases opérationnelles isolées, accessibles uniquement par pirogue, avion ou hélicoptère où sont déployés une quarantaine de militaires (1). Guidées par des fiches pratiques validées, conseillées par les médecins d’unité grâce à des liaisons téléphoniques par satellite, elles ont pris en charge des pathologies variées (ORL, digestives ou cutanées), des traumatismes et des accès palustres.

E

© FAG

Poste médical “BOA Chantal”

Elles ont initié des évacuations médicales qui nécessitaient obligatoirement le déplacement d’un aéronef, parfois un hélitreuillage et souvent des vols et des atterrissages de nuit. Enfin, elles ont pris part à des patrouilles en forêt de cinq à sept jours en pirogue et à pied, portant non seulement le sac vie comme tout militaire mais également le sac de secours. Malgré des conditions de vie éprouvantes dans les bases opérationnelles, ces infirmières ont vécu une expérience et une aventure humaine inoubliables. Actu Santé - N°

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En 2009, l’opération Harpie s’est soldée par la saisie de 6,7 kg d’or, l’arrestation de 300 travailleurs étrangers en situation illégale et la destruction de 200 mines et sites d’exploitation illégale. Cette opération se poursuit en 2010 et certaines infirmières envisagent de revenir en Guyane. Infirmières de classe normale Tiphaine Bouloc et Laetitia Vernine (1) Gendarmes, marsouins ou légionnaires

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La Réunion,unefonction

sur unterritoiregigantesque La zone d’influence des Forces armées de la zone sud de l’océan Indien (FAZSOI) s’étend sur une vaste étendue maritime, de l’Équateur jusqu’à la zone démilitarisée de la Terre Adélie et sur les pays de l’Afrique australe.

D

ans cette zone, émergent des îles d’importance variable : Mayotte et les îles Éparses dans le canal du Mozambique à l’ouest de Madagascar, l’île de La Réunion et l’île de Tromelin à l’est de Madagascar, et les îles Crozet et Kerguelen plus au sud. Pour y assurer sa mission de souveraineté, la France y déploie 4200 militaires dont 1060 gendarmes, tous soutenus par le Service de santé des armées (SSA). Cette région du monde est particulièrement exposée aux catastrophes naturelles que ce soient des cyclones ou les éruptions volcaniques du Piton de la Fournaise sur l’île de La Réunion. Elle présente aussi des risques sanitaires particuliers tels qu’une potentielle épidémie de dengue dans la région et le paludisme autochtone dans le nord de l’île de Mayotte. Tous ces risques sont majorés par les migrations illégales de population.

Des compétences reconnues et un soutien aux autorités civiles Le soutien santé des militaires positionnés sur les îles Éparses assuré par les Centres médicaux interarmées (CMIA) de Saint-Pierre et de Mayotte doit prendre en compte leur isolement. Le brancardier-secouriste dispose depuis peu d’un système de télé-

assistance médicale qui a amélioré la qualité des soins. À plusieurs reprises, un bilan complet de blessures a été effectué à distance par les médecins des CMIA permettant ainsi de guider le personnel paramédical dans ses soins et évitant également une Evacuation médicale (MEDEVAC). Par ailleurs, la DIASS prend en charge les MEDEVAC des Terres australes et antarctiques françaises (TAAF), en relation avec la préfecture qui gère ces territoires. À l’instar d’un Centre d’expertise médicale du personnel navigant (CEMPN) métropolitain, l’antenne de Sainte-Clotilde du CMIA de SaintDenis détermine l’aptitude de plusieurs centaines de personnels navigants au profit de la direction générale de l’aviation civile.

Des défis à relever maintenant L’efficacité des forces européennes dans le cadre de l’opération Atalante et de celles de l’OTAN (1) a déplacé la piraterie des côtes somaliennes vers le sud de l’océan Indien, dans la zone des FAZSOI. Cette piraterie mobilise des bateaux de haute mer de la marine nationale mais aussi des équipes de protection embarquées à bord des chalutiers français basés aux Seychelles. Le soutien santé est assuré par la DIASS. Dans le cadre de la modernisation du soutien des forces armées, la base de défense pilote des FAZSOI a été créée en début d’année, ce qui a nécessité de modifier en profondeur l’organisation locale. De façon concomitante, la fonction santé évolue par la création de trois CMIA, issus des services médicaux d’unité, et relevant dorénavant directement de la DIASS. Le CMIA de Saint-Denis au

nord dispose de deux antennes (Le Port pour la marine et Sainte-Clotilde pour la base aérienne) auquel s’ajoutent ceux de Saint-Pierre au sud de l’île de La Réunion et de Mayotte à Dzaoudzi. La France, via deux organisations internationales, la Commission de l’océan Indien (COI) et la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADEC), étend son influence militaire qui se concrétise par des demandes spécifiques de plusieurs pays de l’Afrique australe. Celles-ci concernent des équipements médicaux utilisés par le service de santé français ou son modèle d’organisation. Enfin, la situation politique à Madagascar est suivie par la France dans le cadre du lien historique qu’elle entretient avec ce pays. Les FAZSOI sont naturellement le relais militaire local qui participe à la perception de la situation et sont en charge d’une éventuelle récupération de ressortissants français d’Afrique australe en cas de troubles politiques ou sociaux.

Des défis pour l’avenir Structures militaires relevant du ministère de l’Intérieur, le régiment du service militaire adapté de La Réunion et le groupement du service militaire adapté de Mayotte jouent un rôle majeur dans la réinsertion de jeunes non diplômés, constituant ainsi un réel facteur de stabilité sociale. L’augmentation du recrutement prévu dans les prochaines années entraînera une augmentation des visites médicales. Ces décisions ont des conséquences très concrètes pour le Service qui va devoir assurer ces nouvelles charges dans une situation contrainte. (1) TF 508 Ocean shield

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© FAZSOI

médicale P4 sanitaire du 2e RPIMa en cours d’homologation

La DIASS des FAZSOI agit sur un territoire maritime gigantesque. Elle relève en ce moment plusieurs challenges : le soutien médical des opérations militaires (lutte contre la piraterie et l’éventuelle évacuation de ressortissants français), sa réorganisation avec les nouveaux CMIA et la BdD, auxquels s’ajoute un support à la

coopération militaire avec les pays de l’océan Indien et de l’Afrique australe. Médecin chef des services Jean-Michel Clère Directeur interarmées du service de santé des forces armées de la zone Sud de l’océan Indien

Essaisnucléaires:

lecentremédicaldesuividePapeete Entre 1962 et 1996, 195 tirs nucléaires ont été réalisés par le Centre d’expérimentation du Pacifique (CEP) à Moruroa et Fangataufa, atolls isolés de la Polynésie française situés à 1200 km de Tahiti. Malgré les précautions prises à l’époque, des tirs sont à l’origine de retombées de radionucléides sur Tahiti et cinq atolls habités.

A

près l’arrêt des essais nucléaires, l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) a effectué, à la demande de la France, le bilan radiologique des atolls de Moruroa et Fangataufa. Même si le rapport concluait à « l’impossibilité de pouvoir diagnostiquer médicalement un effet sanitaire attribuable aux doses de rayonnements reçues (doses estimées) » et n’estimait pas nécessaire de poursuivre la surveillance des atolls, le président de la République a décidé de poursuivre la surveillance de ces sites et de créer un comité de liaison

interministériel de suivi sanitaire des essais nucléaires français.

Le centre médical de suivi Conformément aux recommandations du comité, un Centre médical de suivi (CMS) de l’état sanitaire des anciens travailleurs du CEP et des populations proches de Moruroa est créé le 30 août 2007. Il est chargé d’identifier l’impact sanitaire des essais nucléaires français. Placé sous la tutelle du ministère de la santé de Polynésie, il est situé à Papeete. Il est dirigé par un médecin des armées, assisté d’un infirmier et Actu Santé - N°

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d’une secrétaire, personnel civil de la Défense. Trois lieux de consultation existent à Tahiti et l’équipe se déplace deux fois par an sur chacun des quatre atolls figurant aux recommandations du comité.

Un suivi épidémiologique difficile La visite médicale annuelle reste classique avec la réalisation d’une numération-formule sanguine. Des examens complémentaires sont effectués à la demande du médecin. Le suivi des anciens travailleurs du nucléaire qui sont toujours en activité

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Essais nucléaires:le centremédicaldesuividePapeete (suite) © DSND

au sein de la Défense est réalisé au cours de la visite de médecine de prévention. Lors du déplacement sur les atolls, le médecin du CMS examine les habitants de plus de vingt-cinq ans qui entrent dans le cadre du projet. Il reçoit aussi les autres habitants au titre de la protection maternelle et infantile, de la médecine scolaire, du suivi des affectations de longue durée, etc. Ces actions de santé publique sont coordonnées avec le dispensaire des Tuamotu-Gambier. Malgré la campagne de communication du ministère de la santé en langues française et tahitienne, le CMS est peu sollicité à Papeete. Au terme d’un peu plus de deux années, 1 052 patients ont fait l’objet d’un suivi médical. Les données épidémiologiques recueillies sont donc partielles et émaillées de biais : les malades ont tendance à consulter plus fréquemment, les niveaux d’exposition aux rayonnements ionisants sont difficiles à évaluer, d’autres facteurs de risque sont présents (tabac, alcool,...). Par ailleurs, les comparaisons de morbidité et de mortalité sont difficiles avec les autres habitants de Polynésie car le registre des cancers est récent et les certificats de décès incomplets.

Activités du CMS 1 052 personnes suivies : - 739 anciens travailleurs, - 313 habitants des atolls 992 consultations de santé publique

L’actualité En décembre 2009, la loi dite Morin, initiée par le ministre de la Défense, est votée. Elle prévoit d’indemniser les personnes souffrant d’une maladie radio-induite du fait des essais nucléaires. Tout malade bénéficie de la présomption de causalité dès lors qu’ il a séjourné ou résidé sur un lieu

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Les zones de protection mises en place lors d’un essai atmosphérique

© DIASS PF

Ministère de la Santé de Polynésie

géographique et à un temps précisés dans le décret d’application à paraître. La liste des maladies radio-induites retenues figurera également dans le décret. Un comité d’indemnisation composé de magistrats, de spécialistes en santé publique, radioprotection et réparation du dommage corporel, émettra une recommandation sur les suites qu’il convient de donner à la demande d’indemnisation. Le ministre de la Défense notifiera l’offre d’indemnisation au demandeur. Une commission consultative, élargie aux représentants des assemblées (France, Polynésie) et aux associations, est chargée du suivi de l’application de la loi et formule des recommandations comme la modification de la liste des maladies. L’avenir en Polynésie porte sur la mise en œuvre de cette loi et sur la prise Actu Santé - N°

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en compte de mesures pour l’environnement : réhabilitation des anciens sites nucléaires et suivi radiologique et mécanique des atolls. Il faut souligner l’attachement des anciens travailleurs à la France et leur volonté de respecter les clauses de confidentialité prévues dans leur contrat de travail, y compris lors du colloque singulier avec le médecin. On a bien l’impression qu’ils ont vécu au CEP une “tranche de vie” qui restera gravée en eux à jamais. Médecin en chef Bruno Massit Médecin chef des services Alain Leroux Direction interarmées du service de santé en Polynésie française


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CrashaérienauVanuatu Dans l’après-midi du 19 décembre 2008, un avion de la compagnie Air Vanuatu s’écrase dans la chaîne montagneuse centrale de l’île de Santo (Vanuatu) avec, à son bord, huit passagers et deux membres d’équipage. Une mission d’assistance est déclenchée.

L

es conditions météorologiques sont très défavorables en raison d’une forte dépression sur l’archipel. Dans cet environnement particulièrement hostile de sommets escarpés couverts d’une forêt tropicale dense, battus par les bourrasques de vent et les grains, un petit hélicoptère local arrive à repérer le lieu du crash à une altitude de 1 300 mètres. Faute de treuil pour les déposer à terre, un infirmier canadien coopérant et un policier vanuatais sautent dans la végétation pour porter secours aux victimes. Sur place, ils découvrent le pilote décédé. Le copilote est grièvement blessé et présente un traumatisme thoracique. N’espérant aucun secours, les passagers, légèrement blessés, ont quitté l’avion.

Des plongeurs dans la forêt tropicale Ne disposant pas d’hélicoptère lourd avec treuil capable d’intervenir, le Vanuatu sollicite alors l’aide de la

France via sa représentation diplomatique. Les forces armées en Nouvelle-Calédonie sont chargées de cette mission d’assistance. Une intervention étant impossible de nuit, c’est le lendemain à cinq heures qu’un Puma de l’escadron de transport outremer décolle de la base de Tontouta. Chargé de deux réservoirs supplémentaires, il transporte deux plongeurs sauveteurs de la gendarmerie nationale, le médecin-chef et un infirmier de la base aéronavale. Après avoir difficilement repéré le lieu du crash dans les rares trouées de la couverture nuageuse, une véritable course contre le temps débute. L’équipe médicale est hélitreuillée sur le site et procède rapidement aux gestes de stabilisation de la fonction respiratoire du blessé. Celui-ci est déplacé de quelques mètres en contrebas de l’épave de l’avion puis treuillé à travers la végétation. Transporté immédiatement à l’hôpital de Santo, puis à

Port-Vila, il est ensuite évacué vers un hôpital australien de Brisbane. Les passagers sont ensuite retrouvés par le Puma et l’équipe médicale. Cette opération exceptionnelle de sauvetage s’ajoute aux missions de secours menées par les personnels de la DIASS en Nouvelle-Calédonie : cyclone à Popondetta (Papouasie Nouvelle-Guinée) en novembre 2007, inondations à Guadalcanal (îles Salomon) en février 2009, tsunami à Niuatoputapu (Tonga) en octobre 2009 et éruption volcanique à Gaua (Vanuatu) en décembre 2009. Médecin en chef Jean-Luc Tudal Directeur interarmées du service de santé des forces armées en Nouvelle-Calédonie

Survol de la zone du crash

© FANC

Secours aux victimes

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Témoignage

Êtrekinésithérapeutemilitaire © MKCaS Poujade

La France, comme les pays de l’OTAN, envoie des Masseurs-kinésithérapeutes (MK) en Opération extérieure (OPEX). Depuis septembre 2009, un kinésithérapeute portugais travaille au sein de l’HMC KAIA. Ces professionnels de la rééducation, encadrée au niveau du Service par le consultant national, permettent au militaire accidenté de réintégrer rapidement son emploi opérationnel. Le masseur-kinésithérapeute cadre de santé Michel Poujade témoigne. À bord du Charles de Gaulle

ACTUSANTÉ : La profession de kinésithérapeute militaire est méconnue, pouvezvous nous en dire plus ?

MKCaS Michel Poujade : C’est aux États-Unis, en 1926, que les premiers physiothérapeutes des armées sont recrutés pour répondre aux besoins en thérapie de reconstruction des soldats. Pendant la Seconde Guerre mondiale, le concept de reconstruction et réadaptation médicale apparaît. Cette spécificité se développe grâce à une demande croissante au profit des blessés de guerre. AS : Comment le SSA recrute-t-il ses kinésithérapeutes ? MP : 68 kinésithérapeutes travaillent pour le Service de santé des armées (SSA), dont quarante-quatre sous statut MITHA. Le MK est recruté sur titre parmi des candidats de nationalité française, titulaires du diplôme d’État et médicalement aptes. Le jeune engagé suit une formation militaire initiale d’un mois à Châteaulin et porte des galons d’apparence de sous-officier. Fin 2009, un septième kinésithérapeute sous statut MITHA, a été recruté dans l’unité de Médecine physique et de réadaptation (MPR) de l’HIA Sainte-Anne de Toulon. Grâce à une annonce sur un site internet

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spécialisé, les critères de recrutement ont pu être affinés : pratique courante de l’anglais pour les OPEX, détention d’un Diplôme universitaire (DU) de sport et de connaissances en thérapie manuelle pour le suivi physique des militaires. AS : Au sein de l’OTAN, comment sont employés les physiothérapeutes des forces ? MP : Les physiothérapeutes des forces de l’OTAN sont régulièrement déployés sur les théâtres d’opérations. La France, en 2002, a embarqué le premier kinésithérapeute MITHA sur le porteavions nucléaire Charles de Gaulle durant la mission Héraclès, pour soutenir les personnels navigant et du bord. Depuis, trois pairs ont participé à des missions du groupe aéronaval. La prochaine mission est prévue d’octobre 2010 à février 2011. En 2000, des physiothérapeutes des forces canadiennes sont affectés, à l’essai, en Bosnie. Après avoir constaté qu’un militaire blessé pouvait reprendre son poste après traitement, au lieu d’être rapatrié et remplacé, ils sont envoyés sur la base de Kandahar en Afghanistan depuis 2009. Le domaine d’exercice des Américains est avant tout opérationnel. L’Irak, Actu Santé - N°

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l’Afghanistan, les Balkans sont les principales zones d’intervention des physical therapists. Le cadre d’intervention des Anglais est large : en hôpital de campagne, en Afghanistan et dans les Balkans ou en unités régionales de réhabilitation. Hors OPEX, l’activité des physiothérapeutes ou kinésithérapeutes de l’OTAN s’exerce principalement au sein des hôpitaux militaires. AS : Quelles sont les compétences spécifiques d’un physiothérapeute des forces ? MP : Le candidat désigné pour une OPEX doit avoir une pratique hospitalière polyvalente, qu’il s’agisse de l’évaluation ou du suivi du sportif. Au-delà des compétences, les kinésithérapeutes militaires portent conseil, préviennent, éduquent et traitent les déficiences et incapacités. Ces paramédicaux contribuent par leur savoir-faire à soutenir efficacement les unités sur le terrain et dans les services hospitaliers. La qualité de leurs soins valorise et crédibilise notre profession dans le milieu militaire comme civil. Propos recueillis par la rédaction d’Actu Santé


Événement

ÉVOLUTION DE LA PRATIQUE MÉDICALE

OUTRE-MER Des maladies graves et rares Les besoins de santé sont énormes à Djibouti. Il faut soutenir 820 000 habitants (1), plus de 5 000 expatriés français, dont 2 800 militaires, et l’opération Atalante qui lutte contre la piraterie et l’instabilité régionale. L’offre de soins est très faible, sans activité locale spécialisée viable à ce jour. Si la mission prioritaire de l’HMC Bouffard est le soutien des militaires français, l’essentiel de l’activité du service de médecine est réalisée au profit des Djiboutiens avec des résultats hors normes : 862 hospitalisations (2), dont les deux tiers par les urgences, et plus de 3 200 consultations pour l’année 2009. La gravité, la variété et la rareté de certaines pathologies (méningites, hépatites, infections opportunistes du SIDA - une cohorte de 145 patients VIH/SIDA est suivie à l’hôpital e n d o c a r d i t e s “ h i s t o r i q u e s”, complications des cirrhoses, des cardiopathies…) font tout l’intérêt de la pratique outre-mer. Ainsi, ce sont 74 cas de tuberculose, 60 complications de diabète, plus de 200 pathologies infectieuses ou tropicales aigues, une centaine de pathologies

cardio-vasculaires et autant de pathologies digestives, 160 enfants de moins de 15 ans qui ont été hospitalisés en 2009.

Une activité spécialisée de haut niveau L’activité spécialisée se partage entre la gastro-entérologie et la cardiologie. Les actes de gastro-entérologie n’ont cessé d’augmenter avec le développement de l’échographie (400 examens/an). La pratique endoscopique est unique à Djibouti : 232 fibroscopies œso-gastroduodénales et 65 coloscopies en 2009. Les interventions sous endoscopie restent une solution de secours : ligature de varices œsophagiennes, mise en place de gastrostomie per-endoscopique et d’endoprothèse œsophagienne. L’exercice spécialisé cardio-vasculaire est également sans équivalent à Djibouti. En 2009, 700 échocardiographies, dont trente-huit trans-œsophagiennes et 160 vasculaires, ont été effectuées. La réalisation de 80 échocardiographies de stress apporte une valeur ajoutée diagnostique (3) inestimable dans cette

situation d’éloignement. Les dons associatifs et l’aide des fabricants ont permis de réaliser quatre implantations de stimulateurs cardiaques, dont une chez une jeune de dix-huit ans. Lors des dix-huit derniers mois, douze cardiopathies congénitales ont été dépistées. Cinq ont été prises en charge par l’association Mécénat chirurgie cardiaque avec la possibilité de se faire opérer en France. L’activité spécialisée médicale est possible, avec un haut niveau de technicité et sans complication, même dans un HMC situé dans une des régions les plus pauvres du monde. Dans cette situation d’isolement, elle apporte une valeur ajoutée inestimable à la prise en charge des militaires français, de leurs familles et de milliers de Djiboutiens. Médecin en chef Pierre-Laurent Massoure Médecin en chef Gatien Lamblin HMC Bouffard - Djibouti (1) Espérance de vie : 54 ans. (2) Moyenne d’âge : 36 ans. (3) En plus des 161 épreuves d’effort.

Échocardiographie de stress à l’HMC Bouffard

© MC Massoure

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ans le monde de la “surspécialisation”, devant l’évolution de nos pratiques vers une médecine de plus en plus technologique (robots, navigation, cartographies, nanotechnologies,…), le fossé entre la médecine occidentale et la médecine “tropicale” est-il définitivement trop profond ? Est-ce une hérésie que de vouloir appliquer les techniques d’aujourd’hui (stimulation cardiaque, endoprothèses digestives,…) dans un HMC ?

La synergie des spécialités médicales à l’Hôpital médico-chirurgical (HMC) Bouffard permet d’associer un haut niveau de technicité à une activité clinique intense et originale par bien des aspects. À partir de leur expérience djiboutienne, deux praticiens proposent une réflexion sur l’évolution de la pratique de la médecine outre-mer.

Actu Santé - N°

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Vieduservice

De nouveauxinterlocuteursRH

pour le personnel isolé

Depuis le 1er septembre 2009, la nouvelle organisation Ressources humaines (RH) concernant l’ensemble du personnel civil et militaire du Service de santé des armées (SSA) est effective.

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ette évolution s’accompagne notamment de la mise en place d’un nouveau Système d’information des ressources humaines (SIRH) Arhmonie, qui permet de gérer de façon intégrée les ressources humaines et la solde. À cet effet, l’administration du personnel isolé du SSA est réorganisée et les interlocuteurs RH évoluent. L’unique interlocuteur RH/solde est le Bureau central d’administration des personnels militaires (BCAPM) auquel le personnel isolé doit transmettre directement l’ensemble des pièces justificatives d’un changement de situation. Ces pièces seront ainsi prises en compte dans l’outil de façon instantanée et l’impact sur la solde transcrit plus rapidement que dans l’ancien système.

Plus de détails sur le projet « Évolution de la fonction RH du SSA » sur le site www.sante.defense. gouv.fr, rubrique « Modernisation de la fonction ressources humaines ».

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pourlepersonnel danslesarmées

etformationsrattachées

Aux onze Bases de défense expérimentales (BdDe), sept BdD supplémentaires sont ajoutées au 1er janvier 2010, portant à dix-huit le nombre de Bases de défense pilotes (BdDp) en vue de préciser l’organisation à partir de laquelle seront ensuite déployées toutes les bases courant 2011. ans ce cadre, l’administration générale et le soutien commun des formations rattachées sont mutualisés dans un Groupement de soutien des bases de défense pilote (GSBdDp). Cette réforme impactant la médecine d’unité, le Service a créé seize Centres médicaux des armées (CMA) en métropole et quatre Centres médicaux interarmées (CMIA) outre-mer. Ces centres sont subordonnés à la direction régionale (DRSSA) ou à la Direction interarmées (DIASS) la plus proche. Ils assurent le soutien médical des unités situées dans le périmètre de la BdD à laquelle ils sont rattachés.

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Parallèlement, le SSA déploie, pour la gestion du personnel militaire, Arhmonie qui permet de gérer de façon intégrée les ressources humaines et la solde. Les pièces justificatives d’un changement de situation seront ainsi prises en compte dans l’outil de façon instantanée et l’impact sur la solde transcrit plus rapidement que dans l’ancien système. Ce déploiement s’accompagne de la mise en œuvre d’une nouvelle organisation des ressources humaines, effective depuis le 1er septembre 2009. Afin de tenir compte de ces différentes évolutions externes et internes, l’administration du personnel militaire et civil affecté dans les armées et unités rattachées est réorganisée et les interlocuteurs RH changent. Pour le personnel militaire de statut Santé (praticiens, MITHA, OCTASSA, VSSA) affecté dans un CMA, l’interlocuteur RH/ solde est le bureau RH du GSBdD auquel il est rattaché (1). Il est en interaction avec Actu Santé - N°

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le BCAPM pour les questions relatives à l’administration et avec la DRSSA de rattachement pour les questions relatives à la chancellerie, la formation ou la gestion du temps et des activités. Le personnel doit donc transmettre les pièces justificatives au GSBdD. Celui-ci les fera suivre à l’interlocuteur adéquat de la chaine RH du SSA. Pour le personnel militaire administratif ou technique (SASS, EVAT, etc.) affecté dans un CMA, l’unique interlocuteur RH/solde est le bureau RH du GSBdD qui en assure l’administration pleine et entière. Le personnel doit donc transmettre les pièces justificatives à ce bureau RH qui les traite directement. Pour le personnel civil affecté dans un CMA, l’interlocuteur RH/solde est le bureau RH du GSBdD auquel il est rattaché. Il est en interaction avec le BCGAPC pour le personnel de statuts/corps spécifiques Santé (fonctionnaires appartenant à des corps paramédicaux, ouvriers d’État branches 9 et 15, agents non titulaires recrutés au titre des articles 4 et 6 de la loi 84-16) et avec le CMG territorialement compétent pour le personnel technique et administratif. Le personnel doit donc transmettre les pièces justificatives au bureau RH qui les fera suivre au bon interlocuteur. Médecin général inspecteur Frédéric Flocard Sous-directeur ressources humaines (1) pour les unités qui ne sont pas encore soutenues par une BdD, le rôle ci-après décrit sera tenu par le bureau RH de l’unité


Vieduservice

Unemission SAR nes’improvisepas Les moyens dévolus à la mission Search and rescue (SAR) sont régulièrement sollicités pour renforcer ou suppléer les moyens de secours civils. L’expérience montre que la pratique de la médecine d’urgence dans un environnement aéronautique particulier demande, aux personnels santé embarqués, une préparation et une capacité d’adaptation importantes. Un médecin et un infirmier font part de leur expérience.

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La réussite d’une Évacuation sanitaire (EVASAN) aérienne dépend souvent de la qualité de la mise en condition du blessé avant son transport. Cette modalité n’est pas toujours remplie. Il est parfois nécessaire de réaliser des gestes techniques après l’hélitreuillage du patient, ne serait-ce qu’à cause d’un temps contraint sur zone pour des raisons d’autonomie de l’hélicoptère. Cette préparation se fait quelquefois sans être accompagné d’un infirmier. L’entretien des compétences, allié à des entraînements en vol, sont probablement les clefs d’une prise en

charge sereine, excluant toute improvisation. Par ailleurs, la connaissance du vecteur est un atout pour conseiller les donneurs d’ordre. En effet, le poids et la taille de l’hélicoptère ne lui permettent pas de se poser dans tous les hôpitaux. En fonction du type de blessure, nous devons décider du centre de soins le mieux adapté pour écourter au maximum les délais de transfert de la victime.

médicale de s’installer et de travailler à bord, tout en garantissant une prise en charge efficace de la victime.

Une des difficultés est d’arriver sur le lieu d’intervention en pleine possession de ses moyens. Lorsqu’on passe plusieurs heures en vol avec les turbulences, la chaleur et les odeurs de carburant, avant d’être hélitreuillé sur un bateau pour secourir une victime située au fond de la cale, quelques secondes sont nécessaires pour reprendre ses esprits et être efficace à 100 %. Les entraînements réguliers avec les équipages permettent d’acquérir une certaine aisance en vol et lors des mises à terre, d’identifier les difficultés liées au vecteur aéronautique et d’adapter en permanence le matériel et les procédures Mission SAR par Caracal d’intervention.

L’hélicoptère n’est pas spécifiquement conçu pour être médicalisé. À chaque alerte, nous devons y installer le matériel du service médical pour le transformer en version sanitaire. Le lot de secours doit être bien étudié, qualitativement et quantitativement, pour répondre aux impératifs de poids et de volume de la soute et permettre à l’équipe

Même si chaque mission est différente, ces acquis facilitent considérablement les interventions en réduisant les facteurs anxiogènes. La mission SAR est contraignante en termes de préparation, de temps passé à l’entraînement et en astreinte, mais chaque mise en alerte apporte son lot d’adrénaline et de satisfaction qui compense les efforts qu’elle impose.

Médecin en chef Patrick Causse Le Dorze Infirmier de classe normale Sylvain Goyet Base aérienne de Cazaux

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© BA 120

a mission SAR est censée s’adresser à des aéronefs en perdition. Certes, il peut s’agir d’avions militaires ou civils, mais on imagine avoir affaire à des personnels médicalement suivis. Les expériences récentes montrent que les moyens SAR peuvent être engagés dans le cadre de missions de service public, ce qui a pour effet d’ouvrir très largement l’éventail des pathologies et des types de patients. Matériel et médicaments doivent être dimensionnés pour couvrir ce large spectre. Cela s’ajoute aux contraintes spécifiques du transport sanitaire héliporté qui se caractérise par sa rapidité mais souvent aussi par son inconfort du fait de l’exiguïté, des mouvements de l’hélicoptère ou par manque de lumière.

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Réserve

UnMITRHAenrenfort

© ICN (R) Noret

àl’HMCBouffarddeDjibouti 2002, le manipulateur en électroradiologie Frédéric Noret intègre le corps des Militaires infirmiers techniciens de réserve des hôpitaux des armées (MITRHA). Il est affecté à l’Hôpital d’instruction des armées (HIA) Bégin. En octobre 2009, il est désigné pour une mission de renfort de deux mois à l’Hôpital médico-chirurgical (HMC) Bouffard. Le centre hospitalier de Montereau-FaultYonne, où il travaille depuis vingt-cinq ans, autorise cette absence. Récit.

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e très bon accueil par la surveillante et les personnels de l’HMC a favorisé ma mise en condition rapide au sein de l’hôpital. En effet, la remise en fonctionnement du scanner, qui a coïncidé avec mon arrivée, a provoqué une augmentation des examens Tomodensitométriques (TDM).

Pupitre de contrôle du scanner

Un manipulateur réserviste en renfort à l’HMC Bouffard ou sur des théâtres d’Opérations extérieures (OPEX) ne fait pas doublon avec la présence de personnel de carrière, qu’il complète. Il permet d’assurer, dans de bonnes conditions, la jonction lors de la relève entre manipulateurs d’active. Ce tuilage favorise la transmission de la technicité de l’imagerie spécifique au théâtre d’opération et garantit la continuité des soins.

Des particularités d’exercice Les facilités de logement octroyées sur place m’ont permis d’être disponible, hors gardes, à tout moment de la nuit et du week-end. Le cas s’est présenté au moins à trois reprises. Des TDM du crâne ont été demandées en urgence pour deux enfants de moins de deux ans, victimes de traumatismes crâniens et dont le pronostic vital était engagé. Il en fut de même lors de l’exploration au scanner d’un pirate somalien pour lequel l’examen devait être rapide et de qualité afin de permettre son transfert en Europe.

Une utilité, sans conteste

Le médecin principal de réserve Cockenpot, radiologue, présent les vingt premiers jours de ma mission, a notamment conduit les protocoles et défini une méthode de travail adaptée à la spécificité du territoire. Ensuite, face à l’absence de radiologue, j’ai dû faire preuve d’initiative et de réflexion afin d’optimiser la reconstruction des images scannographiques présentant des zones d’intérêt pathologique. Les médecins prescripteurs pouvaient ainsi affiner leur diagnostic.

Par ailleurs, les compétences du réserviste en situation réelle sont évaluées. Quel que soit le contexte, civil ou militaire, la prise en charge du blessé ou du patient reste toujours au cœur des décisions et des comportements des paramédicaux. Manipulateur en électroradiologie de classe normale (R) Frédéric Noret

Quoideneuf

© ESSA Lyon

Tournoisportifdesgrandesécolesdela Défense

Les santards se distinguent au rugby

Les 20 et 21 mars derniers a eu lieu, à l’École polytechnique de Palaiseau, le tournoi sportif des grandes écoles de la Défense. L’École du service de santé des armées (ESSA) de Lyon était représentée, dans toutes les disciplines, par 160 aspirants médecins. Ils se sont particulièrement distingués en remportant la première place au rugby, au sabre, à l’épée, au cross individuel, au crawl 50 mètres ainsi qu’au 50 mètres brasse féminin.

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Histoire © Musée du SSA

AmbroiseParé,

précurseur de lachirurgie Nous célébrons cette année les 500 ans de la naissance d’Ambroise Paré, que les médecins militaires français et européens considèrent comme leur ancêtre. Même s’il n’existait pas de service de santé militaire au XVIe siècle, sa vie et son œuvre, consacrées aux blessés des campagnes de la Renaissance puis des guerres de religion, font de lui le premier chirurgien des armées françaises. L’hôpital militaire de Rennes, fermé après plus de deux siècles d’existence portait son nom. « chirurgien du Roi ». Il suit son roi en Lorraine en 1552 et y applique la ligature des artères lors des amputations. En 1559, il ne peut rien faire pour sauver le souverain gravement blessé en tournoi.

Manquant d’argent pour passer ses Il sert ensuite François II, Charles IX examens, il rejoint les armées de puis Henri III. Ce chirurgien de quatre François 1er. Il reçoit le baptême du rois s’éteint en 1590, après avoir feu au Pas-de-Suze où il découvre les participé à quarante campagnes de dégâts des « armes modernes », les guerre. « playes d’hacquebutes ». Il est choqué par la pratique de l’époque qui, considérant ces plaies Ambroise Paré comme « vénéneuses », au siège de Metz, 1552 leur faisait appliquer de l’huile bouillante. En 1541, il est incorporé dans la communauté des chirurgiens de Saint-Côme et Saint-Damien. Dès 1542 il repart en campagne. Au siège de Perpignan, il sauve le grand maître de l’artillerie, Monsieur de Brissac, en réussissant une difficile extraction de balle. Les hostilités étant suspendues l’hiver, Paré en profite pour écrire son fameux traité « Méthode de traicter les playes faites par hacquebutes et autres bastons à feu et de celles qui sont faites par flèches, dartz et semblables ; aussi des combustions espécialement faictes par la poudre à canon ». La campagne de 1545 contre les Anglais lui donne l’occasion de soigner le duc François de Guise, gravement blessé à la face par une lance lors du siège de Boulogne. Henri II le nomme

Son œuvre considérable, étonnamment moderne, le rend très proche des préoccupations des médecins des armées d’aujourd’hui : adaptation des soins aux conséquences de l’emploi des armes modernes, progrès techniques induits par la contrainte de l’exercice en situation précaire et soulagement des souffrances du combattant blessé.

Huile sur toile par Cyprien-Eugène Boulet, 1919

jaune d’œuf, d’huile Rosat (1) et de térébenthine. Il en tirera la résolution de ne « jamais plus brusler ainsi les pauvres blesséz de hacquebutes ». Il s’attache par contre à éliminer les corps étrangers « choses estranges comme portions d’habitz, pièces de harnoys, mailles, ballotte, dragée, esquilles d’os, chair dilatté ». L’extraction des projectiles l’amène à développer ou à améliorer des instruments qui seront utilisés pendant des siècles : pinces à bec de cane, tire fonds (qui deviendra ensuite tire-balles), etc. En appliquant la ligature des artères aux amputations de membres, il en améliore le pronostic et épargne aux blessés la cautérisation par fer rouge. L’amputation devient dès lors un geste majeur qui sauvera des centaines de vies. © Musée du SSA

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mbroise Paré est né en 1510 à Bourg Hersent, en Mayenne. Apprenti chirurgien à Angers, il devient ensuite compagnon barbier à l’Hôtel Dieu de Paris.

Portrait d’Ambroise Paré

Il est donc légitime que les médecins des armées du XXIe siècle reconnaissent Ambroise Paré comme leur précurseur, voire leur « père fondateur ». Médecin général inspecteur Marc Morillon IRBA - antenne de Marseille, IMTSSA (1) Huile extraite d’un géranium, réputée antibactérienne et hémostatique.

Le manque d’huile pour brûler les plaies par armes à feu le conduit à utiliser avec succès un mélange de Actu Santé - N°

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Hommage aumédecin général PatriceLe NepvoudeCarfort

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Patrice Le Nepvou de Carfort est né dans les Côtes d’Armor, le 10 octobre 1925. Entré à l’école du service de santé militaire de Lyon en 1945, il est nommé docteur en médecine en 1951. Il rallie, en 1952, le 8e bataillon de parachutistes coloniaux en Indochine. Son comportement, tant comme médecin que comme officier, force l’admiration de tous. Il assure soins et évacuations des blessés dans les conditions les plus dures et sous le feu adverse. Il se dépense sans compter pour la population civile.

Sa carrière se poursuit aux Iles Marquises, en Algérie, aux Nouvelles Hébrides et à Djibouti. Ces affectations alternent avec des retours en métropole où il parfait ses qualifications. C’est au poste d’inspecteur de la médecine du travail dans les armées qu’il quitte le service actif en 1985. Grand officier de la Légion d’honneur et grand officier de l’Ordre national du mérite, le médecin général Patrice Le Nepvou de Carfort reste un des plus brillants exemples de l’accomplis© ECPAD

e médecin général Patrice Le Nepvou de Carfort est décédé le 20 mars 2010. Ses obsèques ont eu lieu le 25 mars aux Invalides, où les honneurs militaires lui ont été rendus.

Obsèques aux Invalides

sement professionnel et militaire pour un médecin des armées. Il laisse le souvenir d’un homme dont l’intelligence, la culture et le rayonnement exceptionnels, alliés à une grande modestie, ont su gagner l’estime de tous et contribuent à la gloire du service de santé des armées. Le médecin-lieutenant Patrice de Carfort à Dien-Bien-Phu

Il participe aux combats de Dien-BienPhu, où il se comporte en officier d’élite, avant d’être fait prisonnier.

Réserve

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1 journée nationale de l’AMITRHA

La journée nationale de l’Association des militaires infirmiers techniciens de réserve des hôpitaux des armées (AMITRHA), s’est déroulée le 11 mars 2010 dans l’enceinte de l’École du Valde-Grâce, sous le patronage du chef du bureau réserve de la DCSSA et du président du Groupement des officiers

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© ECPAD

En deux années de séjour en ExtrêmeOrient, cinq citations (trois à l’ordre de l’armée et deux à l’ordre de la division) couronnent sa brillante conduite au feu. Il est nommé au grade de capitaine et de chevalier de la Légion d’honneur à titre exceptionnel. Une sixième citation à l’ordre de la brigade lui sera attribuée plus tard en Algérie.

de réserve du service de santé des armées (GORSSA). Cette journée, qui sera reconduite en 2011, a permis aux adhérents provenant de toutes les directions régionales du SSA de se rencontrer, de partager leurs expériences et leurs parcours de réserviste au sein du Service. Actu Santé - N°

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Pour en savoir plus : amitrha@hotmail.fr ou site : amitrha.overblog.com

ICN(R) Didier Sevrain Président de l’AMITRHA


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