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TAAF
« DES RÉCIFS LOIN DES HOMMES » : UNE MISSION AUX GLORIEUSES, SUR LES BANCS DU GEYSER ET DE LA ZÉLÉE
L’éloignement des récifs coralliens au nord du canal du Mozambique rend leur suivi complexe, coûteux et donc rare. Pour faire le point sur leur état de santé, le Parc naturel marin de Mayotte a mis en place une mission d’acquisition de connaissances, en coopération avec l’administration des TAAF.
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Débutée le 20 septembre, la mission « Des récifs loin des hommes » a pris fin le 12 décembre. Ses trois campagnes – deux à bord du navire Antsiva, et la troisième à bord du Champlain avec le soutien des FAZSOI (Forces armées dans la zone sud de l’océan Indien) – ont permis de passer 29 jours sur les lieux d’étude : banc de la Zélée dans le Parc naturel marin de Mayotte (OFB) ; banc du Geyser, Grande Glorieuse et île du Lys dans la Réserve naturelle nationale de l’archipel des Glorieuses, créée le 8 juin 2021.
Face au changement climatique et à l’exploitation croissante des ressources naturelles, évaluer l’état de santé des écosystèmes récifaux est un préalable essentiel à la gestion des espaces protégés. Les données acquises durant la mission serviront ainsi à orienter les mesures de gestion.
Plusieurs partenaires scientifiques ont accompagné les équipes du Parc et des TAAF dans cette mission, en particulier l’Unité mixte de recherche Entropie de l’université de La Réunion et les bureaux d’étude Marex, Galaxea et Biorécif.
Aux Glorieuses, les scientifiques ont visité les stations existantes de suivi des récifs coralliens et en ont installé une au banc du Geyser. De plus, ils ont pu estimer l’importance du braconnage d’holothuries notamment sur la petite île du Lys.
La macrofaune présente dans le sable a également été étudiée afin d’établir un état de référence aux Glorieuses, et être en mesure d’estimer les dégradations en cas de pollution aux hydrocarbures. Des caméras rotatives ont été immergées par des plongeurs pour suivre les populations de poissons commerciaux.
La température des eaux de surface a par ailleurs été relevée, et les scientifiques ont répertorié les macrodéchets observés en mer pour évaluer leur quantité et leur provenance.
La mission a également porté sur le suivi du banc sousmarin de la Zélée, situé dans les eaux mahoraises. Cette synergie entre le Parc naturel marin de Mayotte et les TAAF a ainsi posé les jalons d’une coopération entre les deux aires marines protégées limitrophes.
LES PREMIERS RÉSULTATS
• Des espèces nouvelles pour les Glorieuses et Mayotte ont été identifiées (nudibranches, poissons et crustacés).
• Le constat de la baisse des populations d’holothuries et des poissons d’intérêts commerciaux confirme une pression de pêche illégale dans les eaux des Glorieuses.
• La diversité exceptionnelle des coraux semble stable, bien qu’il reste quelques traces du dernier épisode de blanchissement lié au réchauffement des eaux en 2016.
Rédaction : Stéphanie Légeron
Publi-communiqué
LA FONDATION DES ARMEMENTS DE LA PÊCHE AUSTRALE A LE VENT EN POUPE !
Unique fondation d’entreprises créée en France par des armements de pêche, la Fondation des mers australes est née d’un constat partagé : la nécessité de soutenir la recherche scientifique dans ces eaux éloignées des terres habitées – sud de l’océan Indien et océan Austral – qui demeurent méconnues et abritent une biodiversité exceptionnelle.
Armas Pêche, Cap Bourbon, Comata-Scapêche, Les Armements réunionnais, Pêche Avenir et Sapmer : les six sociétés de la pêche australe qui ont donné naissance à la Fondation en 2013 opèrent depuis La Réunion, principalement dans les eaux des îles Kerguelen et Crozet. Toutes étaient déjà réunies depuis 2002 au sein du Syndicat des armements réunionnais de palangriers congélateurs (SARPC) pour parler d’une voix commune et mutualiser leurs moyens.
À travers la Fondation des mers australes, ces armements développent du mécénat de façon cohérente avec leurs enjeux en initiant, supportant, promouvant, finançant ou participant au financement de : • toute étude ou action de recherche liée à la mer dans les zones australes (fonds marins, faune, flore, pêcheries...) ; • toute action contribuant à préserver et mettre en valeur le patrimoine maritime des zones australes ; • formations aux métiers de la mer de personnes en difficulté, notamment à La Réunion. Le conseil d’administration compte les six membres fondateurs, une représentante du personnel, de même que cinq personnalités qualifiées du monde maritime et scientifique.
La Fondation a par exemple porté et accompagné le programme scientifique OrcaDepred, entamé en 2015 pour mieux comprendre l’écologie des orques et des cachalots, afin de limiter la déprédation des lignes par ces cétacés.
De plus, la Fondation a coencadré, de 2019 à 2021 avec l’ENSTA-Bretagne, un ingénieur en acoustique sous-marine. Fabio Cassiano a ainsi consacré son étude – « Détéclic, un détecteur multi-méthodes de clics de cachalots » – au développement d’outils capables de détecter en temps réel les clics d’écholocation de cachalots, dans le but de réduire la déprédation dans la pêcherie à la légine australe. Les précieuses données ont été collectées en mer avec le soutien actif des équipages et armements de pêche australe, grâce à des hydrophones placés sur les palangres. Dans le cadre de cette étude, 41 déploiements ont été réalisés en 2020 aux îles Kerguelen, et 38 à Crozet, soit environ 4 400 heures d’enregistrements.
Pour citer un autre exemple d’étude scientifique, la Fondation cofinance une thèse (2020-2023) avec le MNHN et les TAAF, visant à évaluer la vulnérabilité des espèces de raies capturées accidentellement par la pêcherie palangrière de légine. Il s’agira aussi de concevoir des outils de suivi des populations de raies, et d’expérimenter de nouvelles pratiques à bord des navires pour accompagner les équipages dans leurs efforts de réduction de ces captures.
INTERVIEW
STÉPHANE CICCIONE
DIRECTEUR DE L’OBSERVATOIRE DES TORTUES MARINES KÉLONIA
• Quel est votre rôle en tant que personnalité qualifiée membre de la Fondation des mers australes ?
- Mon rôle consiste à donner un avis d’expert sur les programmes ou les actions que la Fondation décide de financer. Cela peut porter aussi bien sur des projets scientifiques que de sensibilisation de l’opinion publique, des thématiques sur lesquelles je travaille au quotidien à Kélonia. J’ai intégré la Fondation il y a cinq mois seulement. En ce qui concerne les dossiers sur lesquels j’ai été sollicité jusqu’à présent, il a été question de mammifères marins, de raies, ou encore de l’aide à apporter aux élèves de l’École maritime de La Réunion.
• Qu’est-ce qui vous a convaincu d’intervenir ainsi bénévolement pour la Fondation ?
- C’est le fait d’enrichir mes connaissances, et également de mettre mes compétences au service de l’étude d’autres espèces. En effet, la méthodologie employée pour les tortues marines est appliquable à différentes espèces, certaines choses peuvent être communes. S’il y a besoin de compétences particulières sur un dossier, je peux faire appel à mes réseaux, en télémétrie, imagerie sous-marine, traitement de données... Enfin, étant donné l’absence de tortues dans les mers australes, je peux avoir une indépendance de vue et de jugement, un avis totalement neutre.
Et puis, les mers australes sont des mers très particulières. Comme dans toutes les mers difficiles, la pression humaine n’y est pas très forte. Ce sont des référentiels en termes de préservation de l’environnement, où il y a une vraie volonté de développer une gestion durable des ressources. L’exploitation pour l’instant y est maîtrisée, mais il est important que la science ait sa place pour que les gestionnaires puissent prendre les décisions en connaissance de cause.
J’essaie simplement d’apporter ma pierre pour que l’exploitation de cet environnement continue à être maîtrisé. Car plus on intervient tôt, plus c’est efficace et facile. Une fois qu’on a basculé dans la surexploitation, cela devient compliqué de revenir en arrière, de faire face aux intérêts économiques...
• Comment envisagez-vous l’avenir de la Fondation ?
- Son devenir dépendra notamment du dialogue qui sera instauré entre les bailleurs de fonds et les experts qui donnent des avis sur les projets. Un élément est et restera au cœur de la Fondation : le dialogue entre chercheurs et pêcheurs. Je crois beaucoup à l’implication des pêcheurs pour faire progresser la recherche. À Kélonia, nous travaillons aussi depuis longtemps avec les pêcheurs afin de limiter l’impact de la pêche sur les tortues. Pour protéger le milieu marin, le fait que les pêcheurs, qui ont la connaissance empirique des écosystèmes, participent à la gestion des ressources, est en effet un élément très important.
TÉMOIGNAGE
ARMELLE DENOIZE PRÉSIDENTE DE LA FONDATION DES MERS AUSTRALES
- « La Fondation des mers australes, à travers ses trois objectifs – améliorer les connaissances des mers australes, valoriser le patrimoine maritime et aider à la formation aux métiers de la mer sur le territoire réunionnais – a accompagné une vingtaine de projets d’envergure régionale, nationale et internationale depuis sa création en 2013.
Si le volet concernant l’amélioration des connaissances a concentré la majeure partie des travaux de la Fondation, nous avons à cœur de diversifier nos sujets ainsi que nos partenariats. Pour cette nouvelle année, nous espérons ainsi que les collaborations déjà en place seront fructueuses et que de nouvelles pourront aboutir sur des projets enrichissants pour le territoire de La Réunion ».