N°253 JANVIER 2023 POLY.FR MAGAZINE ACTE II
Laissez-les danser
Les espaces publics strasbourgeois sont sublimés par la vision artistique d’Irena Tatiboit, chorégraphe et professeure de danse contemporaine à l’école du Carré d’Art. La Danse du temps suspendu (13/01-26/02) est une exposition de photographies retraçant ce projet, conçu comme une alternative à un spectacle impacté par la crise sanitaire : douze clichés sont ainsi à découvrir au 5e Lieu (Strasbourg, entrée
gratuite). Une trentaine de jeunes danseurs sont immortalisés par Francis Gast au cœur de différents environnements urbains, hors de leur cadre de représentation habituelle (par exemple la spirale Warburg, place de la République). Par ailleurs, la plume d’Ambroise Perrin accompagne l’histoire de cette initiative, dans deux livres vendus sur place. 5elieu.strasbourg.eu
Ça tourne !
Pour célébrer ses trente ans, le Festival international du film fantastique de Gérardmer (25-29/01) fait appel à un jury éclectique : Alex Lutz, Gringe ou encore Pierre Rochefort sont présents aux côtés de l’actrice Bérénice Bejo et du réalisateur Michel Hazanavicius, présidents de cette nouvelle édition. Le couple s’étant illustré dans The Artist orchestre quatre jours de compétition où le cinéma de genre sera dans tous ses états… festival-gerardmer.com
Mythique
Une œuvre phare du répertoire de Tchaïkovski s’apprête à déployer ses ailes en ce début d’année : Le Lac des Cygnes va se poser à la salle Poirel (Nancy, 18/01). Sous la direction artistique de Vladimir Troshenko, trente-cinq danseurs de l’Ukrainian National Ballet of Odessa, fondé en 2006 sur les rives de la mer Noire, interprètent le célèbre classique. La compagnie se produira ensuite à Sausheim (19/01), Thionville (21/01) et Belfort (10/02). poirel.nancy.fr
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B é r é nice Bejo, The Artist © Warner Bros. France
© Francis Gast
À deux
Pour débuter l’année, l’AJAM (Amis des jeunes artistes musiciens) a convié l’incroyable duo formé par la violoniste Élise Bertrand et le pianiste Gaspard Thomas pour une tournée dans toute l’Alsace (22/01-01/02) en sept dates, de Saverne à Altkirch via Strasbourg. Au menu, une page sublime d’un Lekeu trop peu joué, l’un des grands chefs-d’œuvre de Saint-Saëns, un autre de Ravel et l’intense Sonate-Poème d’Élise Bertrand. ajam.fr
Événement
Chorégraphe et cinéaste pionnière, Yvonne Rainer (née en 1934) est la fondatrice du Judson Dance Theatre, collectif expérimental informel qui a marqué la danse postmoderne dans les années 1960. Intitulée HELLZAPOPPIN’ : What about the bees ? sa nouvelle œuvre (annoncée comme l’ultime) est créée en Europe à la Staatliche Kunsthalle de Baden-Baden (27-29/01) : réflexion sur le racisme systémique, elle combine texte, danse et extraits de films. kunsthalle-baden-baden.de
Place aux
jeunes
La deuxième édition du festival de théâtre franco-allemand Allez hop ! s’annonce : de l’Alsace jusqu’à Baden-Baden (08/01-29/03), treize lieux accueillent différentes productions, à destination des enfants et des adolescents. Initiée par le Theater Eurodistrict BAden ALsace, la manifestation propose, entre autres, deux représentations en avant-première, dont celle de la très engagée Hintermwald (08/01, Neuried), signée Ursula Kohlert. Lauréate du dernier prix de théâtre jeunesse du Bade-Wurtemberg, elle retrace la rencontre de Julian et Marie. L’un est originaire de la Forêt-Noire, l’autre est
une militante écologiste parisienne. Ensemble, ils se lancent dans une nuit de défis pour défendre la cause environnementale. Également au programme, une pièce jouée entièrement en français : Ne m’oublie pas – Vergissemeinnicht, de l’auteur strasbourgeois Gabriel Schoettel. Dans celle-ci, deux jeunes découvrent par hasard l’histoire d’une famille franco-allemande pendant la Seconde Guerre mondiale… en rangeant le grenier de leur maison alsacienne. theater-baden-alsace.com
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Élise Bertrand © Marco Borggreve
© Maria-Baranova, Courtesy Performa and New-York Live Arts
© Theater BAAL
Lire
Annoncée riche, la session d’hiver des Bibliothèques idéales (18-22/01, Strasbourg) débute avec Grand Corps Malade et Ben Mazué. Seront aussi sur la scène le journaliste Hugo Clément, Fabrice Hergott, directeur du Musée d’Art moderne de la Ville de Paris, Christiane Taubira, qui publie Frivolités , ou encore Jacques Tardi et Dominique Grange. Lui, a livré le dernier opus d’Adèle Blanc-Sec, Le Bébé des Buttes-Chaumont , elle, a composé la chanson Immortelle Adèle bibliotheques-ideales.strasbourg.eu
Lanceur d’alerte
École de Paris
À l’occasion des trente ans de sa disparition, cette rétrospective intitulée L’Œil du labyrinthe rassemble près de 80 œuvres de Maria Helena Vieira da Silva. Au Musée des Beaux-Arts de Dijon (jusqu’au 03/04) sont retracées les étapes d’une carrière marquée par un questionnement sans relâche sur la perspective, les transformations urbaines, la dynamique architecturale ou encore la musicalité de la touche picturale. musees.dijon.fr
À situation exceptionnelle, projet d’exception. Sahra Datoussaid et Sarah Siré se lancent dans un forum théâtral mêlant tribunal d’opinion et théâtre documentaire afin de sensibiliser le grand public à la situation critique de l’un des lanceurs d’alerte les plus célèbres : Julian Assange. Incarcéré depuis quatre ans dans la prison de haute sécurité de Bellmarsch, sans réelle charge retenue contre lui par les autorités britanniques, le co-fondateur de WikiLeaks est suspendu à une décision en appel relative à son extradition aux États-Unis, où le menace une peine de 175 années d’emprisonnement ! Avec des témoins de choix et des experts, Assange Odysseia (24/01, Théâtre national de Strasbourg, entrée libre sur réservation) entend ouvrir le débat sur ce que révèle de notre société le sort de ce journaliste ayant publié des millions de documents classés confidentiels autour des “dégâts collatéraux” de l’armée américaine en Irak et en Afghanistan. Finaliste du Prix Sakharov 2022 remis par le Parlement européen, son sort cristallise les enjeux de la liberté de la presse et du travail autour de la recherche de la vérité. assangeodysseia.com – tns.fr
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La Grande chambre bleue 1951 © MBA de Dijon François Jay, © ADAGP, Paris 2022
THOMAS FLAGEL
Théâtre des balkans, danse expérimentale, graffeurs sauvages, auteurs africains… Sa curiosité ne connaît pas de limites. Il nous fait partager ses découvertes dans Poly
JULIEN SCHICK
Il papote archi avec son copain Rudy, cherche des cèpes dans les forêts alsaciennes, se perd dans les sables de Namibie… Mais comment fait-il pour, en plus, diriger la publication de Poly ?
SARAH MARIA KREIN
Cette Française de cœur qui vient d’outreRhin a plus d’un tour dans son sac : traduction, rédaction, corrections… Ajoutons “coaching des troupes en cas de coup de mou” pour compléter la liste des compétences de SMK.
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DIRECTEUR DE LA PUBLICATION
Julien Schick julien.schick@bkn.fr
RÉDACTEUR EN CHEF
Hervé Lévy herve.levy@poly.fr
LA RÉDACTION
Thomas Flagel thomas.flagel@poly.fr Suzi Vieira suzi.vieira@bkn.fr
ONT PARTICIPÉ À CE NUMÉRO
Julia Percheron, Pierre Reichert, Irina Schrag, Daniel Vogel & Raphaël Zimmermann
STUDIO GRAPHIQUE
ANAÏS GUILLON
Entre clics frénétiques et plaisanteries de baraque à frites, elle illumine le studio graphique de son rire atomique et maquette à la vitesse d’une Fiat 500 lancée entre Strasbourg et Bietlenheim. Véridique !
Anaïs Guillon anais.guillon@bkn.fr Emma Riedinger
DIGITAL Mohamed Outougane webmaster@bkn.fr
MAQUETTE
Blãs Alonso-Garcia logotype Anaïs Guillon maquette avec l’équipe de Poly ADMINISTRATION
Mélissa Hufschmitt melissa.hufschmitt@bkn.fr +33 (0)3 90 22 93 30
DIFFUSION
SUZI VIEIRA
Après Courrier international ou Books, elle pose ses valises à Poly. Intraitable avec les concepts, elle jongle avec les mots comme son homonyme le faisait avec les ballons à la Coupe du monde 1998.
ÉRIC MEYER
Ronchon et bon vivant. À son univers poétique d’objets en tôle amoureusement façonnés s’ajoute un autre, description acerbe et enlevée de notre monde contemporain.
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Magazine mensuel édité par BKN Dépôt légal : Décembre 2022 — Impression : CE S.à.R.L. au capital de 100 000 € SIRET : 402 074 678 000 44 — ISSN 1956-9130
© Poly 2022 Les manuscrits et documents publiés ne sont pas renvoyés. Tous droits de reproduction réservés. Le contenu des articles n’engage que leurs auteurs.
8 POLY 253 Janvier 23 OURS Liste des collaborateurs d’un journal, d’une revue (Petit Robert)
Ours méditatif © Vincent Bourgin
"
11 numéros / an - 55 €
SCÈNE
COUVERTURE
Cap-Verdienne née en 1994 sur l’île de Santo Antão, au nord de l’archipel, Queila Sofia Gomes Fernandes a grandi à São Vicente. La légende veut qu’elle ait trouvé son premier appareil dans un club, en pleine fête de nouvel an. Depuis, elle pratique assidument l’art du portrait, poussé au point de révéler l’âme de ses sujets. Après avoir signé les photographies des spectacles de la chorégraphe Marlene Monteiro Freitas, c’est l’immortalisation de Mascarades (voir page 46), pièce de l’une de ses interprètes, Betty Tchomanga, qui fait aujourd’hui notre Une. La danseuse y trône étrangement sur un îlot scintillant recouvert de couvertures de survie, le corps tendu et le regard happé par le hors-champ, au loin. queila_fernandes_
10 POLY 253 Janvier 23 SOMMAIRE
62 22 20 66 46 47
19
20
se met à l’heure du festival jeune public Momix 22 Place à la Décadanse dans les Scènes du Nord Alsace 25-44 46 L’année commence avec elles à Pôle Sud en compagnie de onze chorégraphes 47 Émilie Chariot crée Un sentiment de vie au TNS MUSIQUE 51 À la découverte du rap brut de Deen Burbigo 52 Les jumelles d’Ibeyi en quête d’influences avec Spell 31 54 Derya Yildirim & Grup Şimşek souffle un vent de pop psyché orientale EXPOSITION 59 Face au nazisme : le cas alsacien est présenté à la BNU 62 Le Centre-Pompidou Metz fait preuve de Mimèsis GASTRONOMIE 66 Un dernier pour la route : le domaine biodynamique Marc Kreydenweiss ACTE II
Martin Chaix revisite Giselle à l’Opéra national du Rhin
Kingersheim
Préserver le Beau
Par Hervé Lévy — Illustration d’Éric Meyer pour Poly
e Semeur de Van Gogh recouvert de soupe aux pois à Rome : « Un cri désespéré et fondé scientifiquement qui ne peut être assimilé à du simple vandalisme », pour le groupe The Last Generation. Il ne s’agit pas d’un acte isolé puisque, depuis quelques mois, les gestes de ce type se sont multipliés : de la purée de pommes de terre giclant sur Les Meules de Monet à Potsdam, des membres du collectif Stop Oil se collant sur la vitre de protection de La Jeune Fille à la perle de Vermeer à La Haye, d’autres balançant du potage à la tomate sur Les Tournesols de Van Gogh à Londres ou encore des militants d’Extinction Rebellion s’attaquant au Massacre en Corée de Picasso à Victoria. Liste non exhaustive. Si de telles opérations sont menées, c’est évidemment pour leur résonance médiatique, puisque le lien logique entre la démarche et la cause dont elle se réclame est assez lâche. Ce modus operandi n’est
Lguère nouveau : en 1914, la suffragette Mary Richardson avait ainsi donné des coups de hachoir à la Vénus à son miroir de Vélasquez à Londres. Il a néanmoins pris une nouvelle extension, soutenu par un substrat intellectuel appelant à l’action directe dont un des grands théoriciens est Andreas Malm. Auteur du passionnant Comment saboter un pipeline (La Fabrique, 2020), il affirme que les revendications pacifiques n’ont qu’un temps : « Nous parlons d’extinction et d’avenir annulé. Et pourtant, les affaires continuent tout à fait comme avant. […] À quel moment nous déciderons-nous à passer au stade supérieur ? » Mais les œuvres d’art constituent un patrimoine commun à l’Humanité et ceux qui s’y sont attaqué dans l’Histoire ne sont pas les plus recommandables des êtres, des SA cramant des livres aux Talibans dynamitant les Bouddhas de Bâmiyân. Il est en outre plus facile de s’en prendre à un Manet qu’à une multinationale des énergies fossiles. Alors oui, la planète est en danger et il faut agir et vite, mais non aucune action visant à dégrader une œuvre d’art n’est recevable, ni légitime. Le monde tournerait mieux si tous pouvaient en être convaincus dès 2023, année que nous vous souhaitons douce et exquise.
12 POLY 253 Janvier 23 ÉDITO
Carabistouille
Cinq ans après Anna qui chante, l’autrice Sonia Paoloni et l’illustratrice strasbourgeoise Éloïse Rey signent une préquelle à l’histoire de leur petite héroïne. Dans Anna et Ogre-mangeur-de-mots, nom donné à son père dont la seule présence fait taire tout un chacun, rien de plus normal si la petite fille de 5 ans ne pipe jamais mot. Mais elle comprend le langage de son amie la pie qui jacasse pour deux. Dans une ode à la force de la parole, la douceur de l’écoute et la joie de la musique, c’est un coquillage offert par celle que tout le monde appelle la sorcière qui permettra à Anna et son papa de trouver leur voie au Pays des Sept Collines. L’amour de l’encre de chine et des couleurs en tons directs superposés en couches comme en sérigraphie de la dessinatrice resplendissent dans un déluge de traits, points et courbes calligraphiques illustrant un récit dont la seconde partie chemine sur des cases de BD, à la découverte de l’enfance du père, en Ogrétat, sous les diktats de la force et de la peur. (T.F.)
Paru chez Biscoto éditions (18 €) biscotojournal.com
Oiseaux des villes
Merle noir, faucon pèlerin, roitelet à triple bandeau, pigeons en tous genres… À côté du bestiaire de pierre de Notre-Dame de Strasbourg – également évoqué dans ces pages – se découvre un biotope, bien vivant celuilà. Dans Cathédrale sauvage, Pauline Bugeon et Cédric Chambin, associés au photographe Alain Mauviel, partent sur les traces des volatiles peuplant cet immense vaisseau de grès. Le résultat est passionnant ! Et de découvrir la grande diversité des oiseaux qui ont élu domicile dans la capitale alsacienne, mais aussi ceux pour lesquels elle n’est qu’une étape dans leur migration, ainsi que la fonction de l’endroit : abri permanent ou temporaire, garde-manger, lieu de reproduction… Si ce livre est une véritable découverte, il permet aussi de mesurer les changements opérés depuis la fin du XIXe siècle, lorsque Ferdinand Reiber publiait sa Note sur la zoologie de la cathédrale de Strasbourg soulignant notamment la présence d’hirondelles de cheminées qui ont disparu de l’espace urbain. (H.L.)
Paru à la Nuée Bleue (27 €) nueebleue.com
Super Size Me
Passée par la Hear et Prix révélation à Angoulême en 2019 avec Ted, drôle de coco (Atrabile, 2018), son projet de diplôme sur le syndrome d’Asperger, Émilie Gleason est de retour. Avec le journaliste Arthur Croque au scénario, elle signe Junk Food, roman graphique documentaire qui porte bien son nom. Sous-titré Les Dessous d’une addiction, le livre narre l’histoire de Zazou, une jeune anorexique participant à une réunion de Food Addicts. En toute finesse, drôlerie et sans moralisation aucune, les auteurs nous emportent dans l’univers de la malbouffe où certains bingent frénétiquement un saladier de Froot Loops – « Ça te catapulte sur Mars » –ou planquent de la bouffe dans tous les recoins. Entre IMC explosif et sucro-dépendants, l’album s’appuie sur de nombreux témoignages pour montrer que la junk food est devenue un fléau universel alimenté par une publicité agressive et mortifère des industries agro-alimentaires. En le refermant, une seule envie vous étreint : manger une salade verte 100% bio. (H.L.)
Paru chez Casterman (21 €) — casterman.com > Dédicace d’Émilie Gleason, librairie Le Tigre (Strasbourg) le 14/01
14 POLY 253 Janvier 23 CHRONIQUES
Hop hop hop
Après un premier album surprise réalisé courant 2020, l’artiste Prokop a dévoilé un tout nouveau projet original. Vivant à Strasbourg mais originaire de la ville de Hull, en Angleterre, cet amoureux de la folk et des sonorités anglo-saxonnes s’est lancé à l’assaut d’un triple disque, regroupant pas moins de 28 chansons. Divisé en trois actes, Love Letters from across the Street narre des tranches de vie de cet auteur-compositeur-interprète-musicien. Des textes écrits alors qu’il observait machinalement des inconnus ou regardait le monde à travers les fenêtres des pubs de sa ville anglaise. Entre notes bleues, airs de swing jazz et ballade rock, Prokop esquisse ainsi sur Time keeps flying on, comme par petites touches précises, le portrait touchant de cette femme « standing by your side, her eyes are locked on the shadow you used to be » (« se tenant à tes côtés, ses yeux bloqués sur l’ombre que tu étais »). Des paroles déroulant le fil d’une histoire mélancolique, dans laquelle on aime prendre le temps de se perdre. (J. P.)
Édité par Footsteps Records (25 €) pegasemusic.com
Stratosphérique
Les années 19 80 ont toujours autant le vent en poupe ! À 34 ans, la Dijonnaise Christelle Armenio, alias Pilote, fait vibrer ses claviers, sa basse et sa guitare en un claquement de doigts. L’auteure-compositrice-interprète-musicienne-productrice (un vrai couteau suisse) publie un nouveau vinyle, Entropic heart . Un concentré d’electro pop aux notes nostalgiques, rappelant parfois la mélodie de classiques modernes du genre (Daft Punk ou le duo Post Malone et Swae Lee en tête). Très influencée par les œuvres de Kate Bush, Björk ou encore du groupe français Air, Pilote pose sa voix chaude et voilée sur huit textes rédigés en anglais. « Strange world, I open my eyes / In a real world, I’m sometimes alone (Monde étrange, j’ouvre mes yeux / dans un monde réel, je me sens parfois seule) », entonne-telle dans My Best Friend. Des paroles tristes, bercées par une musique aérienne, envoûtante, prenant par la main « a child who has always been there so far (un enfant qui a toujours été là) ». (J.P.)
Vinyle autoproduit (26€30) wearepilotemusique
Hope & dreams
Après quatre opus de Tulipe (dont 3 en sélection officielle au Festival international de la BD) et en attendant le tome 3 du Club des amis au printemps (Prix jeunesse 2021 à Angoulême), Sophie Guerrive signe un époustouflant voyage initiatique en quête d’Eden. Les personnages de ses deux séries sont propulsés dans un monastère. La coule sied à merveille à Tulipe, vivant sous les ordres du Prieur Cosmos, corbac peu commode. L’illustratrice bouscule la petite communauté à grands coups d’élans philosophiques subtils (faut-il rêver le Paradis ou passer sa vie à le chercher, quitte à forcément être déçu de ce qu’on y trouve ?), instillant dans la tête de son ourson héros des envies d’ailleurs. Son écriture décalée oscille entre pudeur et sensibilité merveilleuse, humour de situation et inspirations spirituelles. Si l’ancienne pensionnaire des Arts déco strasbourgeois a bouleversé sa technique, délaissant ses crayons pour se challenger à l’iPad, ses pages aux multiples détails n’ont rien perdu de leur force évocatrice. Un petit Fauve d’or au 50e FIBD (26-29/01) ? (T.F.)
Paru aux Éditions 2024 (23 €) editions2024.com
POLY 253 Janvier 23 15 CHRONIQUES
Prokop
© Ben Pi
Romance d’aventures
Somptueux nouvel opus du Strasbourgeois Blutch , Grand Prix de la Ville d’Angoulême en 2009, La Mer à boire décrit un irrépressible élan amoureux entre un homme et une femme.
Par Hervé Lévy – Dessin original de Blutch pour Poly
En ouvrant l’album, on tombe directement sur un dessin. Point de page de titre – ce sera pour plus tard – ni d’introduction, à l’image des expérimentations formelles menées par Marc-Antoine Mathieu dans sa série Julius Corentin Acquefacques, prisonnier des rêves. « Je voulais donner au lecteur l’impression que l’histoire a débuté avant qu’il ouvre le livre, qu’il la prend en cours », explique Blutch. L’histoire ? D’une grande simplicité, c’est celle d’une rencontre amoureuse entre deux personnages, un garçon nommé B et une fille qui s’appelle A : « Au départ, le fil conducteur était très ténu : le garçon se déplace de la gauche vers la droite et la fille de la droite vers la gauche, jusqu’à ce qu’ils se rencontrent. C’est de la géométrie, un titre possible a longtemps été A + B », s’amuse l’auteur, qui lui a préféré une référence à un écrivain confidentiel, Henri Calet. « Dans son roman – enfin c’est plus une confession qu’un roman – Monsieur Paul, il raconte une histoire d’amour et décrit la vie de couple comme la mer à boire. » Renversant l’expression consacrée, il prolonge même le propos : « C’est la mer à boire et tous les poissons qu’elle contient et l’écume d’en haut et la boue qui est au fond et le sel et l’amertume . » Dans sa BD, on peut voir cela de manière ironique, tant cette rencontre est enthousiasmante, oscillant entre Romance – qualificatif qu’il retient comme sous-titre – et histoire d’aventures où les traces sont multiples… Mais est-ce si étonnant chez un artiste qui a publié Variations, hommage à ceux qui l’ont marqué de Morris à Jacobs ?
« L’Oreille cassée m’a servi de mètre étalon, ne serait-ce que pour les couleurs : j’ai puisé dans les gammes chromatiques de l’album. Mais on trouve aussi des références à Tintin en Amérique, sur lequel le début de l’album est calqué, ou Coke en Stock » Dans cette course-poursuite amoureuse, des réminiscences de Manara (HP et Giuseppe Bergman) ou Moebius (Les Jardins d’Edena) sont aussi perceptibles. Blutch emporte son lecteur dans un « monde flottant, indistinct, où Bruxelles est au bord du Lac Majeur. Au début, j’ai pensé que cette BD aurait pu être réalisée dans 200 ans par un dessinateur souhaitant narrer une histoire se déroulant aujourd’hui, mais qui aurait possédé une documentation imprécise sur notre époque. Il mélange donc un peu tout. » A et B nous emportent, nous transportent. La bonne nouvelle est que leur saga n’est pas achevée, puisqu’elle va se prolonger dans quelques années. Ce ne sera néanmoins pas pour 2023, où il publiera une aventure de Lucky Luke.
Paru aux Éditions 2024 (28 €) editions2024.com
> En sélection officielle pour le 50e festival d’Angoulême (26-29/01) bdangouleme.com
> Exposition autour de La Mer à boire à la Galerie Barbier (Paris) du 5 janvier au 4 février galeriebarbier.com
16 POLY 253 Janvier 23 LIVRE
Tordre le réel
Dans sa nouvelle création ALL (à la lisière), la chorégraphe nancéenne Marie Cambois déplie des couches de réalité en s’inspirant de son amour pour la lenteur et pour le cinéma de David Lynch.
Par Thomas Flagel – Photo de Christophe Urbain
Composer pour d’autres que soi, depuis l’extérieur du plateau. Rien d’une évidence pour Marie Cambois, qui aime tant danser, éprouver ses contraintes, réfléchir la lenteur en regard de la présence, depuis longtemps déjà, de musiciens. Chorégraphe et danseuse dans l’âme, c’est pourtant le cinéma qui déborde, toujours, dans ses propos. Ainsi en va-t-il de son nouveau projet, ALL (à la lisière). Les ressorts empruntés au 7e art y sont légion, à l’instar de l’écriture d’un scénario confié à Sonia Larue à partir d’entretiens menés avec les deux danseuses et la comédienne du projet. « Il est comme une partition de la pièce parmi d’autres, racontant la rencontre de ces trois femmes dans une brasserie de gare, un endroit chargé et symbolique, où l’on se croise, se rapproche et se sépare, où se nouent les drames des départs et des retrouvailles », confie la metteuse en scène. Comme un prétexte à des évocations et des pensées qui ne prennent toutefois pas le pas sur les autres éléments de l’écriture de cette pièce, dans laquelle tout concourt à un sentiment d’étrangeté. À l’opposé de sa dernière création d’ampleur, 131, dans laquelle tout était
caché et où elle évoluait, seule, perdue dans le noir, Marie Cambois propose une scénographie sans coulisses, dessinée par la lumière. L’espace de jeu, délimité par la projection des lignes d’un rectangle, offre au regard « la fabrique de ce qui naît autant que ses diverses potentialités, dans un changement de focales guidé par le son et la musique, nous baladant comme dans les films » Autant d’éléments servant d’écrin à un flux continu de mouvements, dont les variations de temporalités s’appuient sur des effets cinétiques : ralentissements, accélérations, vibrations des intensités de présence. Dans cette danse-théâtre, tout ce qui l’anime depuis tant d’années s’entremêle : minimalisme, paroles portées, extrême lenteur, trouble de ce qui est exposé… quitte à désarçonner. Une posture assumée : « Je suis de celles qui se fichent de ne rien comprendre à un film comme Mulholland Drive car ce ne sont pas les réponses aux questions de sens que l’on peut se poser qui m’intéressent et me remuent, mais bien la grande place laissée à mes projections personnelles. » La suspension du temps orchestrée dans ALL (à la lisière) permet à qui se laisse porter de s’y réfléchir à
l’intérieur. Les arrêts sur image forment autant de torsions du réel, bribes de vie et de mouvements oscillant entre intimité pure, surgissement de l’inconscient et relations interpersonnelles. La danse, inspirée par la Judson Church* à New York, dans les années 1960, place les interprètes sur le qui-vive, « dans l’excitation de ce qui va advenir » Le millefeuille narratif se déploie par la contamination et nous embarque dans une étrange rêverie, les yeux ouverts.
À Pôle Sud (Strasbourg) les 12 et 13 janvier dans le cadre de L’Année commence avec elles (voir page 46), puis en tournée à la Salle Europe (Colmar) le 18 janvier, à l’Espace 110 (Illzach) les 20 et 21 janvier dans le cadre de La Quinzaine de la Danse (12-31/01), au CCAM (Vandœuvre-lès-Nancy) les 7 et 8 février, à L’Arsenal (Metz) le 2 mars et au Nouveau Relax (Chaumont) le 23 mars mariecambois.fr
* Notamment la pratique du Tuning score de Lisa Nelson, outil de composition chorégraphique qui repose sur des appels vocaux pris en charge par chacun des membres d’un groupe
18 POLY 253 Janvier 23 FESTIVAL
Par-delà le bien et le mâle
Avec le Ballet du Rhin, Martin Chaix revisite le chef-d’œuvre romantique Giselle, datant de 1841, dans une perspective féministe. Interview avec le chorégraphe, en pleine création.
Par Thomas Flagel – Photo de répétition d’Agathe Poupeney / BOnR
Écrire une Giselle du XXIe siècle, c’est tordre le cou à certaines lectures misogynes d’une héroïne naïve pardonnant bien vite. Quelles modifications apportez-vous à ce ballet romantique afin de ne plus objectiver son héroïne et vous inscrire dans les pensées féministes actuelles ? Malgré son titre, le point de vue de ce ballet iconique était tout à fait masculin. Je l’ai analysé à l’aune des mouvements féministes d’aujourd’hui afin de donner la parole aux femmes dans cette histoire. La raconter par le prisme de Giselle et voir comment elle pourrait évoluer, à l’instar de Bathilde, princesse et personnage secondaire soumis et silencieux, qui est la promise d’Albrecht, lequel a séduit la jeune paysanne. Myrtha, reine des Wilis, est aussi traditionnellement un stéréotype réducteur de femme vengeresse, alors que je la souhaite bienveillante. Albrecht sera dépeint tel qu’il est réellement : un pervers narcissique trompant son monde et pas le prince valeureux, héroïque et séducteur habituel. C’est un Weinstein d’alors, rien de plus ! Quant à Giselle, innocente au départ, elle va s’affirmer et s’assumer en devenant indépendante face aux coups du sort qui la guettent. Elle clôture aussi la pièce, ce qui change tout.
Vous donnez corps à une véritable sororité ?
Elle imprègne totalement le 2e Acte avec les Wilis. Les blessures nées de la trahison amoureuse vécue par ces femmes mortes avant leurs noces débouchent sur leur résilience et leur bienveillance les unes à l’égard des autres. Je devrais aussi dire les uns à l’égard des autres car il y aura des hommes.
Vous ajoutez aussi à la musique d’Adolphe Adam deux symphonies de Louise Farenc, compositrice et pianiste
du XIXe siècle, qui a dû publier certaines de ses partitions sous le nom de son mari…
Je m’inscris dans le travail de revisibilisation des compositrices oubliées et redonne la valeur qu’elles méritent à ces deux magnifiques symphonies aux similarités troublantes avec les compositions d’Adam.
Casser les codes passe aussi par un travail sur le corps… Je mène depuis plusieurs années une réflexion sur les techniques masculines et féminines, travaillant sur les pointes et le bienfondé de leur utilisation. Cette technique est née pour alléger le corps de la femme, le rendre éthéré à l’époque romantique. Je veux à l’inverse lui donner de la force. Si le 1er Acte conserve des rôles ciblés avec de nombreux portés masculins, au 2e on passe de l’un à l’autre avec un homme sur pointes et inversement. Je brouille les pistes et casse ce qui dans notre éducation relève du masculin et du féminin.
C’est une gageure que de proposer d’autres modèles romantiques aujourd’hui ?
La finalité est d’arriver à s’aimer sur un même pied d’égalité, sans objectiver l’autre. La clé de voûte de ce ballet est de trouver, d’inventer un nouveau langage amoureux.
À l’Opéra (Strasbourg) du 14 au 20 janvier, puis au Théâtre de la Sinne (Mulhouse) du 26 au 31 janvier dans le cadre de la Quinzaine de la Danse et au Théâtre municipal de Colmar dimanche 5 février operanationaldurhin.eu
POLY 253 Janvier 23 19 FESTIVAL
Chant du cygne ou renaissance du phénix ?
Le 32e festival international jeune public Momix pourrait être le dernier sous cette forme, à Kingersheim. Retour sur une édition audacieuse, malgré des baisses drastiques de subventions.
Par Thomas Flagel
Pour ses derniers mois à la tête du Créa de Kingersheim, qu’il dirige depuis 1992, Philippe Schlienger ne pensait pas vivre une telle tempête. Avant de partir à la retraite, il aura dû se battre pour la survie de son rendez-vous étendard, Momix, l’un des plus importants en France. Il croyait pourtant avoir fait le plus dur en temps de Covid, mais c’était sans compter sur une coupe sèche de 100 000 euros de la subvention municipale, soit « la moitié de sa contribution au festival international jeune public, dont le budget est de 600 000 euros » À l’automne, le commissaire aux comptes donnait 15 jours à la structure pour trouver l’équilibre malgré cette baisse. Après les douloureuses fermetures du Théâtre Gérard Philipe à Frouard (2018), l’abandon de toute ambition au Théâtre de Lunéville après le choix par la municipalité de déconventionner La Méridienne en 2020 et le fauchage de toute la saison de La Machinerie 54 à Homécourt cet automne, c’est une quatrième scène conventionnée du Grand Est qui est menacée de disparition. K.O debout, l’équipe plie mais ne rompt pas. S’organise, réduit la masse salariale de deux
équivalents temps plein, renonce aux primes de fin d’année comme aux aides à la production se décidant habituellement en fin d’année civile. Les répercussions sur les artistes ne font que débuter. Avec trois lieux de moins dans Kingersheim, Momix 2023 sera amputé d’un tiers des compagnies qui devaient y jouer, la ville étant le navire amiral de l’événement, qui conserve une fière allure en trompe-l’œil grâce à son emprise territoriale : décentralisations (Momix en balade) et programmations de lieux partenaires dans toute l’Alsace. « 18 compagnies de moins afin de limiter les licenciements et de préserver le rendez-vous, nous n’avons pu faire mieux, obligés de rogner les projets périphériques. Nous réussissons tout juste à maintenir notre travail auprès des 3 000 élèves qui bénéficient de nos projets d’éducation artistique et culturelle à l’année », assure, dépité mais pas abattu, le directeur historique.
Se réinventer ou disparaître La Ville a besoin de quelque 1,5 million d’euros d’économies en 2023. Mi-octobre, elle annonçait également un recul de
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Je suis tigre - Groupe Noces Danse Images © Marc Ginot
200 000 euros de sa subvention l’an prochain sur un total de dépenses directes d’1,1 million, induisant la fin de la Scène conventionnée du Créa et un projet bien plus modeste, sans place pour Momix. Pas d’alternance politique en cause, mais « de nouveaux édiles n’ayant plus la culture autant chevillée au corps. J’ai presque été étonné, vu leurs difficultés budgétaires actuelles, de la réaction rapide des autres collectivités territoriales : la Région Grand Est a débloqué 20 000 €, la Collectivité européenne d’Alsace 15 000 €, complétant une aide exceptionnelle d’urgence de 40 000 € de la Direction générale de la création artistique. » L’avenir devrait se jouer à l’échelle de Mulhouse Alsace Agglomération, autour de La Filature, mais aussi de la Passerelle à Rixheim, spécialisée dans l’enfance, ou de L’Espace 110 à Illzach. « C’est peut-être un mal pour un bien, l’occasion de repenser l’offre jeune public à une échelle plus grande. Il faudra pour cela créer une structure légère, à la gouvernance partagée, avec une personne garante de la ligne artistique dédiée à la création, qui fait partie de l’ADN de Momix. Outre le festival dont elle porterait la programmation et le travail de territoire, elle pourrait imaginer définir une offre globale de saison, rendant lisible le secteur jeune public tout en respectant le cahier des charges de chacun des partenaires », s’enthousiasme Philippe Schlienger, qui pose ainsi les bases de la reconstruction et des perspectives pour l’avenir.
Les pépites de 2023
Mais l’heure est à l’artistique, avec une belle place à la danse et à la musique. Les Wackids (dès 6 ans, 04/02, Noumatrouff, Mulhouse)1 remplacent leurs vrais instruments par des jouets afin de revisiter les tubes des années 1990. Leur Rock’n’Toys ne se contente pas d’être décalé et drôle : il dépote sacrément ! Pour une fois, pas sûr que les enfants chantent aussi fort que les parents sur les hits de Rage against the machine,
Nirvana et Blur ! Même époque musicale pour La Chambre d’eaux de Marie Barbottin (dès 6 ans, 25/01, La Filature, Mulhouse)2, dans laquelle la chorégraphe rémoise questionne les injonctions de genre naissant dès l’enfance. Autour d’une simple baignoire, elle se joue avec humour des stéréotypes et des archétypes véhiculés par l’art, de la Renaissance à l’imagerie des contes de fées. Avec la complicité de Catherine Verlaguet et de Yan Giraldou (dansant et signant en langue des signes française), les diktats en prennent pour leur grade avec jubilation. Autre question sociale, celle de la solitude et de la précarité dans Dominique toute seule (dès 7 ans, 05/02, Salle Cité-Jardin, Kingersheim). La compagnie belge Au détour du Cairn donne voix à une femme qui « se sent devenir transparente ». Il faudra l’éclat de la lune, les arbres d’une forêt et quelques rencontres pour qu’elle retrouve sa petite musique à elle au milieu de sa nuit. Du côté du collectif l a c a v a l e, formé en 2010 par des artistes issus du théâtre et du cinéma documentaire, JO&LÉO (dès 12 ans, 03/02, Hangar, Kingersheim) conte les amours et la quête identitaire de deux jeunes filles, soumises au jugement des autres et de la société. L’autrice Julie Ménard avait envie d’écrire sur une histoire d’amour d’ados au moment des manifestations contre le Mariage pour tous. Cela s’est fini par la création, sciemment, d’autres modèles féminins sur scène. L’amour changera le monde.
À Kingersheim et dans divers lieux partenaires en Alsace du 26 janvier au 5 février momix.org
1 Également en tournée au Théâtre de Charleville-Mézières 31/03 et à L’Illiade (Illkirch-Graffenstaden) 02/04
2 À voir ensuite à Côté Cour (Besançon) du 31/01 au 04/02
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JO&LÉO, Collectif l a c a v a l e © Marie-Clémence David
Météores
Pour la seconde édition de Décadanse, les Scènes du Nord Alsace invitent notamment à repenser le rapport au vivant avec une centaine de peluches et à observer les troubles de la psyché en société.
Par Thomas Flagel
En résidence pour trois ans dans les Scènes du Nord Alsace, la compagnie franco-italienne Ez3 du chorégraphe Ezio Schiavulli a la part belle dans le festival Décadanse. Après avoir présenté diverses étapes de ses deux dernières créations aux moments clés des répétitions dans le cadre de Network Grand Est (un rendez-vous mensuel dans chaque lieu partenaire), il peut enfin faire découvrir l’aboutissement de ce travail. Dans Heres, Nel nome del figlio (27/01, Relais culturel de Wissembourg), il interroge la figure du père, éclairé par la lecture du Complexe
de Télémaque du psychiatre Massimo Recalcati. Dans ce solo qu’il interprète lui-même, Ezio fait face à deux batteries, lui qui a toujours été “le fils de”, grandissant aux côtés de Nino, batteur renommé. Entre Dario De Filippo et Donato Manco, le jeune quarantenaire fait face à son paternel et à leur histoire empêchée. Il danse au milieu des deux imposants instruments, rehaussés sur pieds et roulettes, tournoyant autour de lui. L’affrontement symbolique est aussi musical, “pulsationnel”. Subissant les assauts du rythme effréné des baguettes, il plie mais ne rompt pas. Son corps
s’anime de bouffées d’air salvatrices, et se défait de la gangue accumulée depuis tant d’années, dépassant la violence initiale pour toucher à la poésie des gestes.
Poètes voyants
Ce rapport physique aux êtres se retrouve aussi dans Jeux de société (26/01, Espace Rohan, Saverne puis en tournée1), qui nourrit une réflexion autour des ruptures et des déséquilibres maillant les relations humaines. Ezio Schiavulli s’inspire du concept des “états du Moi” du psychiatre Éric
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Silent poets © Biagio Sivilla
Berne. Mais aussi de l’univers poétique de Kafka sur le rivage de Murakami et des métamorphoses sociétales de La Ferme des animaux d’Orwell. Six danseurs expérimentent à partir de jeux réels, choisis aléatoirement mais toujours très physiques, les processus d’affiliation faisant qu’au sein d’un groupe qui s’auto-évalue, se composent et se recréent une chaîne d’identités sociales et de relations de pouvoir. Mis en compétition – seul le vainqueur peut interpréter le solo écrit pour lui –, leurs battements, souffles et glissements sont captés par des micros. Ils sont réinjectés en live dans des nappes sonores, tour à tour harmoniques et dissonantes, sur lesquelles tous doivent danser… et tenter de gagner la prochaine épreuve. Entre évocation du rêve et utopie chorégraphique, naît un groupe guidé par l’implacable balancier oscillant entre besoin d’appartenance et volonté d’émancipation. Il sera enfin possible de découvrir une pièce de répertoire d’Ez3 avec Silent poets (24/01, MAC de Bischwiller) qui explore l’univers des pathologies borderline dans un concept scénique à 360 degrés. S’inspirant de Baudelaire, Janis Joplin, Jimi Hendrix ou Pasolini, il convoque un trio de danseurs embarqués dans les troubles de personnalité limite (TPL) entraînant des difficultés à contenir les émotions ou à maîtriser les impulsions. Absence de frontière entre névrose et psychose, instabilité des relations interpersonnelles et de l’humeur, sentiments chroniques de vide et d’abandon prennent corps dans des relations triangulaires où se multiplient portés et passages virtuoses au sol, intranquillité permanente et mouvements perpétuels hantés par l’autre, celui qui se niche en nous comme celui qui se tient à nos côtés en un miroir déformant. Les artistes invoqués ont tous en commun cette part d’ombre nourrissant le besoin de dénoncer les dysfonctionnements, les injustices et l’hypocrisie.
Manières d’être vivant Autre temps fort du festival, la création de Broutille (24 & 25/01 à La Saline, 31/01 & 01/02 à La Castine, puis en tournée2) par la compagnie alsacienne Bleu Renard. Une pièce chorégraphique pour une centaine de doudous,
une danseuse et un musicien usant du violon, de la guitare et de la voix. Jetées en tas, les peluches quittent cet amoncellement de douceur poilue sous l’action des interprètes qui utilisent la forme du conte pour nous mener dans une approche sensible aux rapports que nous entretenons avec nos amies les bêtes. Sont ainsi battues en brèche les questions de filiation, de fraternité, de territoire, de rivalité, de domination ou encore de coopération. Rien de futile derrière une apparente légèreté, mais de vrais sujets à considérer, à hauteur d’enfant (dès 3 ans).
À La Castine (Reichshoffen), à L’Espace Rohan (Saverne), à la MAC (Bischwiller), à La Nef (Wissembourg), à La Saline (Soultz-sousForêts) et au Théâtre de Haguenau du 24 janvier au 4 février scenes-du-nord.fr
1 À voir également à l’Espace Georges Sadoul (SaintDié-des-Vosges) 20/01, à Pôle Sud (Strasbourg) 07 & 08/02, à la Salle Europe (Colmar) 10/02 et à L’Arsenal (Metz) 17/05 – ezioschiavulli.com
2 En tournée à La Passerelle (Rixheim) 03 & 04/02 dans le cadre du festival Momix, au Relais culturel d’Erstein 07 & 08/02, à la Salle des Fêtes (Munchhausen) 08/04 dans le cadre de Sur les Sentiers du Théâtre, à La Maison des Arts (Lingolsheim) 05 & 07/05, à Mangiennes 09/06 avec Scènes et Territoires – bleurenard.com
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Heres © Chiara Ventola
Jeux de société © Jesus.S.Baptista
Inten(c)ité
Temps fort de la Cité musicale de Metz dédié à la création contemporaine, Transverses sort des cadres, en quête de nouvelles sensations.
Par Suzi Vieira – Photo de Vagues par José Caldeira
Un festival de projets inclassables, pour rendre compte des chemins de la création de plus en plus atypiques et interdisciplinaires empruntés par les artistes aujourd’hui. Au croisement de la danse contemporaine, du théâtre, de la musique expérimentale et de la performance, Transverses ouvre sa seconde édition à huit détonantes propositions, qui toutes conjuguent l’expérience sonore avec l’immersion. En prenant pour titre de son hypnotique spectacle un vers célèbre de T.S. Eliot, Florentin Ginot, musicien à l’origine du percutant Dead trees give no shelter (“Les arbres morts n’offrent aucun refuge”, 21/01 à L’Arsenal), donne d’emblée le ton. Les danseurs, emmenés par Soa Ratsifandrihana, évoluent dans une imposante structure verticale de six mètres de haut. Implantée au centre du plateau, elle s’érode peu à peu, se délite et se démantèle au rythme de la contrebasse amplifiée de Ginot et des machines analogiques d’Helge Sten – figure de la dark ambient norvégienne, dont le son monte en puissance jusqu’aux limites de l’audible. Ici, la musique vrombissante s’écoute avec le corps, déferle sur le public, disloque les parois du décor et fléchit les mouvements syncopés de Julie Richalet et Germain Zambi, grand spécialiste du krump. La tension musculaire est à son comble, tout comme sur la scène des Vagues (19/01 à L’Arsenal), adapté du roman de Virginia Woolf par le chorégraphe Noé Soulier. Tels des projectiles lancés au cœur de la tempête, les six interprètes voient leur gestuelle criblée par les percussions âpres jouées en direct par Tom De Cock et Gerrit Nulens de l’Ensemble
Ictus. Impulsions, poussées, évitements et brusques arrêts. Les membres se cabrent, les trajectoires se heurtent, se brisent ou bifurquent dans une intensité que seules les séquences textuelles piochées dans l’œuvre de Woolf, déclamées tout en douceur, viennent relâcher à intervalles réguliers.
Autre expérience forte : Bach to 3D (18/01 à L’Arsenal), de la Nantaise Soizic Lebrat, improbable re-composition cubiste et en trois dimensions de la première Suite en sol majeur pour violoncelle seul de Jean-Sébastien Bach, à écouter casque vissé sur les oreilles pendant que, sur scène, dans la pénombre, trois violoncellistes et une performeuse preneuse de son atomisent et démultiplient la familière partition. Ne manquez pas non plus les tribulations virtuoses du violoncelliste Gaspard Claus (19/01 aux Trinitaires), les installations lumino-electrosoniques de la Compagnie Hörspiel (Buzz and Bulbs, 10/01 aux Trinitaires) ou encore les métaphysiques aventures en terres amérindiennes de l’ensemble vocal Les Métaboles. Revisitant le répertoire hors du commun du compositeur canadien Raymond Murray Schafer, qui conçoit ses œuvres comme des paysages sonores, Léo Warynski et ses acolytes emportent le public dans une soirée mystique et magique (Vox Naturae, 12/01 à L’Arsenal).
À L’Arsenal et aux Trinitaires (Metz) du 10 au 21 janvier citemusicale-metz.fr
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Saisons 2023
Les choix de la rédaction
© Arnaud Bertereau
LA FILATURE - MULHOUSE Dom Juan ou le Festin de Pierre, de Molière, par David Bobée (04 & 05/05)
ALSACE
AJAM
Tournées. Pour leur 62e saison, les Amis des jeunes artistes musiciens continuent à faire découvrir les futurs grands du classique pour des dates dans toute l’Alsace. On craque pour le duo composé par la violoniste Élise Bertrand et le pianiste Gaspard Thomas (22/01-01/02) ou encore le pianiste Kojiro Okada (02-10/05). Hors-série. La Philharmonie invite l’AJAM au Palais des fêtes de Strasbourg (12/06), avec le clarinettiste Lilian Lefebvre. ajam.fr
AUDINCOURT
LE MOLOCO
Sensation. Pierre de Maere et Oete dans une même soirée (25/02) ! Le nouveau héraut belge de la pop à texte et le futur roi de la chanson française présentent leurs premiers albums respectifs avec la même flamboyance insolente. Indés. Entre le rock kraut grunge des Psychotic Monks et la folk lo-fi de l’activiste ovni Louis Jucker, la Nuit des Indés s’annonce haute en couleurs et en sons (25/03). lemoloco.com
BADEN-BADEN
FESTSPIELHAUS
Nos coups de cœur Un récital de l’immense pianiste Fazıl Say (19/02), la São Paulo Dance Company (18-20/05), Ute Lemper chante Astor Piazzolla (21/05), le Festival de Pentecôte (27/05-04/06) avec notamment l’irradiante présence de Teodor Currentzis, la diva du violon Anne-Sophie Mutter (17/06).
Avenir. Avec le festival Takeover (03-06/02), la jeunesse s’empare de l’institution avec notamment Hakanaï d’Adrien M & Claire B (04 & 05/02)
La Capitale d’été. Un programme de dingue pour ce festival (30/06-09/07) avec Renée Fleming, The Met Orchestra & Yannick Nézet-Séguin, Lisa Batiashvili, etc. Berlin . Pour leur résidence pascale traditionnelle à Baden-Baden (01-09/04), les Berliner Philharmoniker donnent Die Frau ohne Schatten de Richard Strauss, sous la direction de Kirill Petrenko, ainsi qu’un bouquet de concerts. festspielhaus.de
BÂLE
GARE DU NORD
French. Pour « Objets trouvés #1 » (24/01), la percussionniste française Jeanne Larrouturou se livre à une performance où les objets du quotidien jouent à la fois le rôle d’instruments de musique et de protagonistes sur scène.
Persona. Adaptant le scénario du célèbre film d’Ingmar Bergman, la compositrice Anda Kryeziu et la réalisatrice Caterina Cianfarini explorent les limites du dicible et de l’identité humaine au moyen de l’électronique et de la distorsion du son (04-17/03). garedunord.ch
KASERNE BASEL
AKA. L’indie-rock de Sam Himself (18/02), qui revient avec son nouvel opus après avoir notamment joué sous son vrai nom – Samuel Koechlin – avec le Sinfonieorchester Basel. Anatolie. Le folk anatolien de Derya Yıldırım & Grup Şimşek (11/03), en collab avec Jazzhane. (voir page 54)
New Jazz. Invitées dans le cadre du offbeat
Jazzfestival 2023 (19/04-17/05), les Suisses de Sirens of Lesbos (28/04) poursuivent leur exploration du cosmos mixant jazz, soul, funk et hip-hop. Elles nous rappellent les médiations atmosphériques d’un certain Connan Mockasin. Elles seront suivies par le Delvon Lamarr Organ Trio (29/04) et son groove made in Detroit ! kaserne-basel.ch
THEATER BASEL
Bartók Power. En rassemblant deux pages du compositeur hongrois, Le Mandarin merveilleux et Le Château de Barbe-Bleue (jusqu’au 14/01), Christof Loy crée un fascinant spectacle.
Création mondiale. Avec Persona (04-17/03 à Gare du Nord), Anda Kryeziu s’attaque à l’œuvre éponyme d’Ingmar Bergman. Événement. Vergeigt (26/05-16/06) est une collaboration entre le metteur en scène Herbert Fritsch, la violoniste Patricia Kopatchinskaja et le plasticien Jannis Varelas. Le résultat ? Un univers néo-dada explosant les frontières des genres et présenté dans le cadre d’Art Basel.
Ballet. Explosiv! (26/05-16/06) marque la rencontre entre deux chorégraphes d’exception, Alexander Ekman et Andonis Foniadakis. theater-basel.ch
BELFORT
VIADANSE CCN DE FRANCHE-COMTÉ
Temps fort. Mulhouse, Belfort et Illzach organisent Constellations, temps fort dédié à Catherine Diverrès durant la Quinzaine de la danse (voir page 18). L’Installation éponyme (11-14/01, le 14 en présence de l’artiste) se compose de films réalisés ou proposés par la chorégraphe et d’une exposition photo de Teo Hernandez. viadanse.com
LE GRRRANIT
Théâtre. Cédric Gourmelon monte corde. raide de l’Anglaise debbie tucker green (28/02). Un huis clos sombre dans laquelle une victime doit décider, devant des membres de l’administration, de la peine de son agresseur...
Marionnettes. La star Ingvild Aspeli revisite le mythe de Dracula avec le Puppentheater Halle (04/02). grrranit.eu
LA POUDRIÈRE
Cru. Miel de Montagne revient avec son drôle de personnage pour une pop faussement nonchalante et solaire (25/01).
26 POLY 253 Janvier 23 RETROUVEZ L'ARTICLE SUR NOTRE SITE POLY.FR ACTE II
BELFORT
LE GRRRANIT
Dracula © Compagnie Plexus Polaire
BISCHWILLER
Famille. Au milieu d’une chambre, entre radiocassette et patins à roulettes, les musiciens de Chapi Chapo réinventent la bande-son de leur enfance à l’aide de jouets amplifiés, guitares toy et mini synthétiseurs (01/04). poudriere.com
BESANÇON
CDN DE BESANÇON
Twenty-seven. L’ancienne pensionnaire de l’École du TNS, Dea Liane, crée un spectacle en hommage à la chanteuse libano-syrienne Asmahan. Le Cœur au bord des lèvres est une variation autour de la trajectoire d’une actrice de cinéma et messagère des Alliés pendant la Seconde Guerre mondiale (31/01-03/02), disparue tragiquement au Caire, à 27 ans.
Palerme. Violence patriarcale et incroyable solidarité féminine sont au cœur de la dernière pièce d’Emma Dante sur les bas-fonds de sa Sicile de toujours dans Misericordia (20-24/03 avec Les 2 Scènes, dès 16 ans, à La Manufacture de Nancy 09-11/03 et au TDB de Dijon 14-17/03). (voir page 16) cdn-besancon.fr
LES 2 SCÈNES
Hommage x2. Mathieu Bauer présente un vibrant hommage hybride et gaguesque au cinéma de Keaton, l’homme qui ne souriait jamais (Buster, 17 & 18/01). Le duo alléchant Fanny de Chaillé et Sarah Murcia revisite Lou Reed avec leur voix et contrebasse dans Transformé (27 & 28/03).
Palerme. Violence patriarcale et incroyable solidarité féminine sont au cœur de la der-
nière pièce d’Emma Dante sur les bas-fonds de sa Sicile de toujours dans Misericordia (20-24/03 avec le CDN de Besançon, dès 16 ans, à La Manufacture de Nancy 09-11/03 et au TDB de Dijon 14-17/03).
Performance. Spectacle coup de poing, poignant et puissant, avec une dizaine de performeuses sous la direction de Rébecca Chaillon, Carte noire nommée désir (2123/02) est un des grands spectacles créés l’an passé. les2scenes.fr
ORCHESTRE VICTOR HUGO FRANCHE-COMTÉ
Création mondiale. Les Mélodies d’Adèle Hugo, sur des poèmes de son père, dans une orchestration de Richard Dubugnon (31/03 au Théâtre Ledoux puis à la Commanderie de Dole le 02/04) ovhfc.com
BISCHHEIM
SALLE DU CERCLE
Sonore. Création de Juliette Steiner, Hors Services engage une bagarre sonique archaïque contre l’absurdité chaotique du monde présent (13, 14 & 17/04). Tzigane. Elle au chant et lui aux cordes. Le duo Ladislava revisite le répertoire des musiques traditionnelles d’Europe de l’Est en reprenant les grands classiques du jazz manouche, Brassens, Montant et Piaf (18/05, et avant cela au Riverhin de Village-Neuf le 25/02). salleducercle.fr
BISCHWILLER
MAC ROBERT LIEB BISCHWILLER
Démons. Comment nos croyances façonnent-elles notre rapport au réel, à la morale ? Tentative de réponse avec Les Possédés d’Illfurth du Munstrum Théâtre (05/01, également le 07/01 au 13e Sens d’Obernai, et le 25/03 au Musée Würth France Erstein). Famille. Que devient la fratrie à l’âge adulte, entre rivalités, coups bas, jalousies, souvenirs heureux et jeux d’enfants ? Avec Cowboy ou Indien, la compagnie Groupe Déjà explore la subtile frontière entre amour et haine (dès 10 ans, 19/01).
#vieréelle. Laurent Crovella poursuit son exploration des écritures d’aujourd’hui avec Michelle doit-on t’en vouloir d’avoir fait un selfie à Auschwitz ? (30/03 et 03/04, puis à la Salle du Cercle de Bischheim 04 & 06/04, et à l’Espace Malraux de Geispolsheim le 20/04). Sylvain Levey y réfléchit notre époque gorgée de haters et de jugements permanents sur les réseaux sociaux. mac-bischwiller.fr
CHÂLONS-ENCHAMPAGNE
LA COMÈTE
Australie. La compagnie australienne Gravity & Other Myths s’empare avec acrobaties et autres portés talentueux de l’Out of Chaos (10 & 11/01).
Inde. De la danse traditionnelle chinoise à la danse classique indienne, Samsara (06 & 07/04) est une véritable invitation au voyage, fruit d’une rencontre chorégraphiée et dansée par Aakash Odedra, Hu Shenyuan. New Kids. Dans La Mécanique des ombres (28 & 29/01), Sylvain Bouillet, Mathieu Desseigne-Ravel et Lucien Reynès travaillent avec les étudiants de la 37 e promotion du Centre national des Arts du cirque sur la reprise d’un spectacle de 2017.
Nouvelle création. Philippe Decouflé propose une forme hybride, entre concert et spectacle, où musique et danse ne font plus qu’un. Stéréo (09 & 10/03) revisite les Clash et Talking Heads… la-comete.fr
CHAUMONT
NOUVEAU RELAX
Alléchant. Thibaut Wenger monte Un Ennemi du peuple, pièce grinçante d’Ibsen (06/04, également à L’Espace 110 d’Illzach le 04/04, puis à l’Espace BMK de Metz les 13 & 14/04), où la vérité induit la solitude. Poétique. Écriture poétique et fildeféristes
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MAC ROBERT LIEB
Compagnie Groupe Déjà, Cowboy ou Indien © Pascal Boudet
DIJON OPÉRA
du nouveau cirque s’unissent pour Traverser les murs opaques, avec Marion Collé et le Collectif Porte27 (26/01).
Plastique. Les impressions plastiques et chorégraphiques du Grand Nord, signées par la jeune et prometteuse Emily Evans, dans L’Odeur du gel (03/02 et aussi au TJP de Strasbourg, 19 & 20/01, et à La Filature de Mulhouse, 10/02).
Ludique. Le Dark Circus de la compagnie Stereoptik met tout le monde d’accord, petits comme grands enfants (08 & 09/02) !
Dansant. La nouvelle pièce de Marie Cambois ALL (à la lisière) (23/03, et aussi à Pôle Sud, Strasbourg, les 12 & 13/01, à l’Espace 110 d’Illzach les 20-21/01, au CCAM de Vandœuvre-lès-Nancy les 07 & 08/02, à L’Arsenal de Metz le 02/03) (voir page 18) . La nouvelle pièce de groupe d’Ezio Schiavulli, Jeux de société (16/05 et aussi à La Filature de Mulhouse, 08 & 09/11, à Pôle Sud, Strasbourg, 07 & 08/02, et à L’Arsenal de Metz, 17/05) (voir page 22)
Talent. Sous prétexte de rendre hommage à l’icône du glamour avec un micro et un piano, Cécile Milliat Baumgartner entremêle les destins de femmes, d’Hollywood à Colmar, avec Marilyn, ma Grand-mère et moi (04/03).
lenouveaurelax.fr
COLMAR
COMÉDIE DE COLMAR
Créations. Émilie Capliez s’empare Des Femmes qui nagent, récit peuplé de figures fortes de sororité avec quatre comédiennes de tous âges (31/01-07/02, puis à La Comé-
die de Reims, 19-21/04). Matthieu Cruciani compose de son côté une comédie à l’italienne, Les Adultes n’existent pas (15-17/06, puis à La Comédie de Reims, 22-24/06), traversée cinématographique des fantômes de Vitti, Gassman, Lollobrigida, Loren... Star. Ne manquez pas l’excellent et classieux Jean-Christophe Folly dans Sensuelle, drame pétri d’humanité (10 & 11/02). En Famille. Le Petit chaperon rouge de Céleste Germe se déguste dès 4 ans (01/04, et à La Comédie de Reims 08-10/06), quand La Tristesse de l’éléphant, adaptation pour marionnettes, signée Thomas Ress, de la célèbre BD, attend les enfants dès 10 ans et leurs parents (20 & 21/01, puis au Taps, Strasbourg, 25-27/01) (voir page 48) Par les villages. Youssouf Abi Ayad crée Rêver Molière, librement adapté du Roman de Monsieur de Molière de Mikhaïl Boulgakov et du film Molière d’Ariane Mnouchkine. Cette nouvelle pièce en itinérance jouera dans douze lieux partenaires (jusqu’au 27/05).
comedie-colmar.com
SALLE EUROPE
Jeune Public. Les sons et les chansons bricolés du Machinarmonium (04/02, dès 6 ans). Politique. Comédie onirique, enquête loufoque, portrait d’un héritage, La Vie et la mort de Jacques Chirac, roi des Français (09/03) est tout cela à la fois. salle-europe.colmar.fr
THÉÂTRE MUNICIPAL
Jeune public. Avec Panique dans la forêt
(22/01, dès 5 ans), les Weepers Circus viennent raconter une histoire vraie dans une nuit peuplée de personnages mystérieux, corbac un peu truqueur, vieux cyclope devenu myope, licorne… Boulevard. Le Dindon de Feydeau (24/03) dans une adaptation théâtrale et musicale libre ! theatre.colmar.fr
DIJON
LA MINOTERIE
Cirque. Dans une chambre en forme de caverne, un jeune aventurier embarque à bord d’une coquille dont le vide s’emplit de mille acrobatiques histoires possibles (07 & 08/02, Dans ma coquille, dès 2 ans).
Théâtre-vidéo. Après avoir mené un long travail de recueil de parole dans les établissements scolaires, la Cie Lili label entraîne les spectateurs dans les coulisses du tribunal glaçant que peut parfois être le conseil de discipline et analyse les mécanismes qui mènent un jeune à la violence (J’ai comme un trou dans la tête, 04/05, dès 14 ans). laminoterie-jeunepublic.fr
OPÉRA
Bondissant. Offenbach mis en scène par Laurent Pelly, c’est la garantie d’une soirée follement gaie avec La Périchole (15-21/01, Auditorium). (voir page 57)
Événement. CHICAGO [DISTRICT] (2629/01, Grand Théâtre) est un hommage à l’une des villes les plus mythiques du continent américain, qui a vu la house music suc-
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Cage 2 © Alain Julien
céder au free jazz et au gospel. British. Le directeur de la maison Dominique Pitoiset monte Le Tour d’écrou de Britten (26/02-02/03, Grand Théâtre), huis clos hallucinatoire et oppressant, plein de nondits. On attend aussi sa version d’ Armide de Lully (25-29/04, Auditorium) avec vive impatience.
Inattendu. Le Cabaret du Faune (23/05, Grand Théâtre) de Romie Estèves et Nicolas Krüger, ou la rencontre entre Debussy et le cabaret.
Coup de cœur. Avec Cage2 (06/06, Grand Théâtre), Élodie Sicard et Bertrand Chamayou ont imaginé un dispositif où le corps dansant évolue autour de quatre pianos préparés. opera-dijon.fr
ORCHESTRE DIJON BOURGOGNE
Classique. Joseph Bastian dirige un concert 100% Mozart (31/03, Centre Pierre Jacques de Fontaine-lès-Dijon) en compagnie de la pianiste Anne Queffélec. Création mondiale. Italia de Pierre Thilloy (04/04, La Maison du Peuple de Belfort). orchestredijonbourgogne.fr
THÉÂTRE DIJON BOURGOGNE
Palerme. Violence patriarcale et incroyable solidarité féminine sont au cœur de la dernière pièce d’Emma Dante sur les bas-fonds de sa Sicile de toujours dans Misericordia (14-17/03, dès 16 ans, et à La Filature de Mulhouse 29/09-01/10, à La Manufacture de Nancy 09-11/03, et au CDN de Besançon 20-24/03).
Associée x2. Tamara Al Saadi maille finement son histoire personnelle et celle de l’occupation coloniale au Moyen-Orient. Elle signe Elles (en tournée régionale, 14/1131/03).
Ovni. ANIMA ou la rencontre de la plasticienne Noémie Goudal et de la metteuse en scène Maëlle Poésy pour une œuvre traversée par la circassienne Chloé Moglia (06-14/01).
Danse. Le très beau Giselle... de François Grémaud (30/03 avec Le Dancing et l’Opéra de Dijon, puis au Carreau de Forbach le 28/02), où un ballet classique se dévoile par les mots et quelques touches de gestes.
Pouchkine. Dans Onéguine (03-07/04), Jean Bellorini nous plonge, casque sur les oreilles en bi-frontal, dans l’intimité de jeunes russes aristocrates du XIXe siècle, entre rivalités amoureuses, passions et spleen d’une jeunesse dorée.
Festival. Le toujours surprenant Théâtre en Mai, nouvelle version signée Maëlle Poésy (18-28/05) ! tdb-cdn.com
LA VAPEUR
Survoltée. Rythmes soutenus, textes puissants et gestuelle tendue : Suzane dynamite l’electro pop française (23/02). Désabusé. Avec Montagnes russes, le rappeur Lujipeka continue de bousculer l’imagerie hip-hop avec des textes introspectifs et autocritiques, tantôt désinvoltes tantôt dépités, à l’instar de toute une génération (17/03, et aussi le 09/03 au Noumatrouff de Mulhouse, le 23/03 à L’Autre Canal de Nancy et le 25/03 à La Cartonnerie de Reims). lavapeur.com
DUDELANGE
CENTRE CULTUREL OPDERSCHMELZ
Electro. Nouvelle révélation de la scène musicale belge, le groupe Rex Rebel, formé par Sam Bettens (anciennement Sarah Bettens), Reinout Swinnen et Wim Van der Westen, combine basse, claviers, batterie et voix en transition, pour une electro pop 100 % désinhibée (13/01).
Jeune public. Bibi Blocksberg est la petite sorcière la plus célèbre d’Allemagne. Pour le 40e anniversaire de sa création, COCOMICO raconte ses péripéties en une malicieuse comédie musicale qui séduira tous les petits (26/03). À partir de 4 ans. opderschmelz.lu
ERSTEIN
MUSÉE WÜRTH
Eurovision. Avec On n’enferme pas les oiseaux , premier album de Barbara Pravi, l’autrice-compositrice a bel et bien pris son envol (03/03, et aussi le 02/03 à la Rockhal d’Esch-sur-Alzette).
Démoniaque. Le Munstrum Théâtre joue Les Possédés d’Illfurth (25/03) de Lionel Lingelser, qui revient sur l’histoire de Joseph et Thiébaut, deux enfants de ce village alsacien, accusés par l’Église, à l’automne 1864, d’être sous l’emprise du démon (et aussi le 05/01 à la MAC Robert Lieb de Bischwiller et le 07/01 au 13e Sens d’Obernai). musee-wurth.fr
RELAIS CULTUREL
Doudous & Cie. Pour les tout tout-petits (dès 8 mois), la compagnie Bleu Renard a imaginé une Broutille (07 & 08/02, et en tournée le 01/02 à La Castine de Reichshoffen, à La Passerelle de Rixheim 03 & 04/02, à la Salle des Fêtes de Munchhausen 08/04, à La Maison des Arts de Lingolsheim 05 & 07/05, à Mangiennes 09/06 (voir page 22)
DRUSENHEIM
PÔLE CULTUREL
Icône. C’est toute une époque qui se termine : Capitaine Sprütz tire sa révérence avec Un Héros s’arrête (24/03, et aussi 20/01 à La RuCHE d’Erstein, puis 25-27/05 à l’Espace K de Strasbourg). Doit-on vraiment croire le désopilant Jean-Luc Falbriard ? Anniversaire. Pour les 10 ans du Pôle culturel, Les Barboozes revisitent tous les tubes du passé (12/05). pole-culturel.drusenheim.fr
Icône. C’est toute une époque qui se termine : Capitaine Sprütz tire sa révérence avec Un Héros s’arrête (20/01, La RuCHE centre hospitalier, puis 24/03 au pôle culturel de Drusenheim et 25-27/05 à l’Espace K de Strasbourg). Doit-on vraiment croire le désopilant Jean-Luc Falbriard ? Femmes. Catriona Morrison s’empare du destin de Marguerite Möwel, brûlée comme sorcière au XVIe siècle, dans un duo haletant entre Sophie Nehama et Marie Schoenbock (L’Avis de Marguerite, 06/05 dans les jardins de l’Hôtel de Ville et le 04/05 au Fort Frère d’Oberhausbergen). ville-erstein.fr
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ERSTEIN SAISON CULTURELLE
Broutille, pièce chorégraphique pour 100 peluches © Valentine Zeler
ESCH-SUR-ALZETTE
ESCHER THEATER
Théâtre. Gaël Leveugle signe une superbe adaptation d’une nouvelle de Bukowski (Un Homme, 10 & 11/02, et à l’Espace BMK de Metz les 05 & 06/01). Amours et tendresse qui cognent sous les assauts du désir et du whisky.
Danse. Mourad Merzouki mêle musique baroque et danse hip-hop dans Folia (13 & 14/01). Jean-Claude Gallotta revisite le mythe de Pénélope (22/02) et les codes du ballet classique. theatre.esch.lu
KULTURFABRIK
Turquie. Bien avant les frasques du combo psyché Altin Gün, la rockeuse stambouliote Gaye Su Akyol enflammait les scènes européennes avec sa musique aux influences anatoliennes (26/02).
France. Pour ses 20 ans de carrière, l’excellent Vitalic sort un double album en forme de bande-son électronique sans concession de notre époque troublée (10/06). kulturfabrik.lu
ROCKHAL
Eurovision. Avec On n’enferme pas les oiseaux , premier album de Barbara Pravi, l’autrice-compositrice a bel et bien pris son envol (02/03, puis le 03/03 au Musée Würth d’Erstein).
Urban Punk. Avec leur look plein de panache, guitares hurlantes et verve rutilante, les deux fausses jumelles de Nova Twins embrassent à elles seules trente ans de contestation sonore made in England (02/04). rockhal.lu
HÉSINGUE LA COMÈTE
FORBACH
LE CARREAU
Festival. Migrations, où l’on pourra voir Incandescences d’Ahmed Madani (16/03). Sans oublier le franco-allemand Perspectives, qui proposera notamment le Dialaw Project de Mikaël Serre, autour de la construction du port de Ndayane, projet titanesque vendu par les Émirats au gouvernement sénégalais, ou le récit des personnes vulnérabilisées par les choix politiques de quelques élites (30 & 31/05, ainsi qu’au Théâtre de la Ville de Luxembourg les 19 & 20/05).
Danse. Le très beau Giselle... de François Grémaud (28/02, puis au TDB de Dijon le 30/03 avec Le Dancing et l’Opéra de Dijon), où un ballet classique se dévoile par les mots et quelques touches de gestes seulement. carreau-forbach.com
FRANCFORT-SURLE-MAIN
OPER
Rareté 1. Francesca da Rimini de Saverio Mercadante (26/02-08/04) est une variation sur l’histoire contée par Dante. Iconique. Lorsque le metteur en scène Claus Guth s’empare d’Elektra de Richard Strauss (19/03-05/05), cela fait des étincelles ! Rareté 2. Die ersten Menschen de Rudi Stephan (02-20/07) narre l’histoire des premiers hommes chassés du Paradis... Une œuvre qui entre en résonance avec la période où elle fut écrite, juste avant la Première Guerre mondiale.
Reprise. Le rarissime Vin herbé de Frank Martin (07-16/07). oper-frankfurt.de
FRIBOURG-ENBRISGAU THEATER FREIBURG
Hitchcockien. Marnie de Nico Muhly (14/01-20/05) est un fascinant opéra contemporain de 2017 ! Création mondiale. En collaboration avec une spécialiste de l’IA, la jeune compositrice Sara Glojnarić élabore un jeu de rôle avec Neuro-moon, Manage your Memories (07/05). theater.freiburg.de
GUEBWILLER
LES DOMINICAINS DE HAUTE-ALSACE
Cool. Dans Les Séparables (08/03), on parle d’amour et de racisme, ce cadeau merveilleux et ce fléau ordinaire. Un amour pur mais menacé. Comme un instantané d’un certain état de notre monde… Classique. Ça vibre, ça sonne, c’est vertigineux : la version du Requiem de Mozart (18/03, puis 19/04 Église Saint-Étienne de Cernay, 25/03 Église Sainte-Marie de Masevaux et 26/03 Église Saint-Étienne de Mulhouse) est présentée ici par 170 instrumentistes et chanteurs amateurs éclairés. les-dominicains.com
HAGUENAU
RELAIS CULTUREL
Nos coups de cœur. Avec Égérie(s) (17/01), le Quatuor Debussy a l’ambition de déchiffrer les arcanes de la création. Usure (24/01) nous emporte entre hip-hop et danse contemporaine dans le cadre de Décadanse (voir page 22). Le Tartuffe (30/03, Mac Bischwiller) de la compagnie Astrov dans le cadre de Région(s) en Scène(s).
Rires & chansons. Le festival L’Humour des Notes en est à sa 31e édition, en salle et dans les rues, au printemps (13-21/05). On ne manquerait ça sous aucun prétexte ! relais-culturel-haguenau.com
HEIDELBERG
THEATER HEIDELBERG
Comédie musicale. Sunset Boulevard d’Andrew Lloyd Webber (26/01-12/07) est l’histoire émouvante d’une star qui se bat contre l’oubli.
Danse. Avec Reality and the Cosmos (20/0506/07), le directeur du Ballet de la maison, Iván Pérez, met en scène des questionnements métaphysiques inspirés par Alfred North Whitehead. theaterheidelberg.de
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Esencial © JAC
CRÉA KINGERSHEIM MOMIX
HÉSINGUE
LA COMÈTE
Danse. Pour Alix, Sasha, Lou et Noa, tout va pour le mieux dans leur petit monde tout rose aux journées pleines d’histoires. Jusqu’à ce qu’une terrible nouvelle leur parvienne : le rose, c’est pour les filles. Tel est Le problème avec le rose (19/03, dès 5 ans) ! Cirque. Avec Esencial, les Espagnols du Vaivén Circo plongent le public au cœur d’une scénographie spectaculaire et en changement permanent, entre piliers tremblants, tours géantes et arcs vacillants (10/11). lacometehesingue.fr
ILLKIRCHGRAFFENSTADEN
L’ILLIADE
Joy. Les Grenoblois déjantés du Big Ukulélé Syndicate débarquent et enjaillent le public avec leurs folles orchestrations joyeusement décalées (24/01).
Legend. Le fameux Glenn Miller Memorial Orchestra présente Le meilleur des années swing, entre hommage à Sinatra et reprise des plus grands hits des forties (31/01).
Energy. Dernière création des Wanted Posse, Steps on Strings rend hommage à la musique classique en enchaînant arabesques, house, saltos et breakdance (30/05). illiade.illkirch.eu
LA VILL’A
Première. Jeune pianiste et chanteuse franco-américaine, Melissa Weikart (21/01) est la première femme et Strasbourgeoise à
gagner, en 2022, le tremplin du Nancy Jazz Pulsations. Avec l’intime Here, There elle livre un album piano-voix tout en délicatesse. lavilla.illkirch.eu
ILLZACH
ESPACE 110
Temps forts. Une excitante Quinzaine de la danse (12-26/01, voir page 18), qui accueillera notamment la nouvelle pièce de Marie Cambois (ALL (à la lisière) les 20-21/01, également à Pôle Sud, Strasbourg, les 12 & 13/01, au CCAM de Vandœuvre-lès-Nancy les 07 & 08/02, à L’Arsenal de Metz le 02/03 et au Nouveau Relax de Chaumont le 23/03) et l’inclassable L’Odeur du gel d’Emily Evans, impressions plastiques et chorégraphiques du Grand Nord (10/02, et aussi au TJP de Strasbourg, 19 & 20/01, et au Nouveau Relax de Chaumont, 03/02).
Alléchant. Thibaut Wenger monte Un Ennemi du peuple, pièce grinçante d’Ibsen (04/04, également à l’Espace BMK de Metz les 13 & 14/04 et au Nouveau Relax de Chaumont le 06/04), où la vérité induit la solitude. espace110.org
KARLSRUHE
BADISCHES STAATSTHEATER
Culte. La Flûte enchantée mise en scène par Ulrich Peters, intendant de l’endroit (jusqu’au 15/01) qui s’attaque aussi à La Bohème de Puccini (24/06-21/07).
Tube. Carmen (21/01-20/05) dans une mise en scène d’Immo Karaman qui lance l’héroïne de Bizet dans un tourbillon de volupté et de mort.
Festival. Les Händel-Festspiele (17/02-
03/03) où sera créée une nouvelle mise en scène d’Ottone, Re di Germania (17/0203/03), page de 1719 rarement donnée.
Danse. Maria Stuart (16/04-16/06) : Bridget Breiner chorégraphie la pièce de Schiller. staatstheater.karlsruhe.de
TOLLHAUS
Nordique. La Norvégienne Kari Bremnes (21/04) balance un mystérieux mélange de folk arctique, de pop et de jazz. Guitar hero. Au programme du Shapeshifting Tour de Joe Satriani (26/05), de grands classiques comme Surfing With The Alien, Cherry Blossoms tollhaus.de
KINGERSHEIM
CRÉA
Festival. La 32e édition de Momix (26/0105/02), dédié au jeune public : une référence. (voir page 20)
Atypique. Bougrr et Bigrr sont des voleurs de chansons. Pour les deux cambrioleurs, rien n’a plus de valeur que les beaux mots et les jolies ritournelles (dès 5 ans, 12 & 13/04, Espace Tival).
crea-kingersheim.com
LINGOLSHEIM
MAISON DES ARTS
Dickens. Trois comédiens adaptent les Grandes Espérances pour décrire les inégalités d’hier et d’aujourd’hui (29 & 30/01, dès 9 ans).
Doudous & Cie. Pour les tout tout-petits, la compagnie Bleu Renard a imaginé une
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Poil de la Bête © Daniel Michelon
Broutille , pièce chorégraphique pour 100 peluches (dès 8 mois, 05 & 07/05, et avant cela le 01/02 à La Castine de Reichshoffen et les 07 & 08/02 à Erstein). (voir page 22) mdarts-lingo.com
LUXEMBOURG
LES THÉÂTRES DE LA VILLE DE LUXEMBOURG
Opéra. Simon Stone monte Tristan und Isolde de Wagner (27/02-05/03) au cœur de la contemporanéité, le duo iconique Emmanuelle Haïm / Guy Cassiers pour The Indian Queen de Purcell (21 & 22/04). Danse. Grupo Corpo avec un Double bill fondé sur les danses rituelles brésiliennes (10 & 11/03), Anne Teresa De Keersmaeker danse Les Variations Goldberg de Bach (04 & 05/05) et Vlaemsch (chez moi), premier volet d’un nouveau diptyque de Sidi Larbi Cherkaoui (29 & 30/06).
Théâtre. Songes d’une Nuit... (19-29/01) de Myriam Muller est un magnifique prétexte à la fête, à la communion entre scène et salle. La vision de Laurent Delvert d’ On ne badine pas avec l’amour de Musset (22/02-09/03). theatres.lu
PHILHARMONIE
En résidence 1. Sir John Eliot Gardiner dirige le Royal Concertgebouw Orchestra (10 & 11/05), mais aussi la Messe en si mineur de Bach (17/04) avec les English Baroque Soloists.
En résidence 2. Un des plus grands pianistes de la planète, Sir András Schiff (12, 16 & 18/06).
En résidence 3. Le légendaire Jazz at Lincoln Center Orchestra avec le trompettiste Wynton Marsalis (07 & 09/06).
Culte. Angélique Kidjo et Alexandre Tharaud se disent des Mots d’Amour (19/03), le Chamber Orchestra of Europe dirigé par l’inoxydable Herbert Blomstedt (26/05). philharmonie.lu
LES ROTONDES
Cirque contemporain. Avec Trait(s) , Coline Garcia propulse sa roue Cyr dans l’Art contemporain avec la figure du cercle, inspirée par Kandinsky (dès 3 ans, 06-11/10, puis au TJP de Strasbourg 07-13/01). Le Cirque du bout du monde chamboule tout avec des équilibres précaires (Der Lauf, 21 & 22/10).
Fabula rasa. Un temps fort pour « raconter les histoires autrement » (20/01-12/02), avec
notamment un Hamlet et nous entre deux frères (26-28/01).
Multiplica. Arts et réalités numériques (2426/02).
Picelectronic. Festival faisant bouger la tête des kids et groover leurs parents (22 & 23/04).
rotondes.lu
LYON
MAISON DE LA DANSE
Young Gods. Nouvelle création du couple star Honji Wang et Sébastien Ramirez, qui mêlent toujours influence des arts martiaux et danse contemporaine avec Parts (11 & 12/01), descente en quatre parties dans la noirceur du monde.
Collab’. Ne manquez pas la première pièce de groupe de Nach. La krumpeuse signe un quatuor dans Elles disent (02 & 03/03, au Théâtre de la Croix-Rousse), programmé dans le cadre du Festival Sens dessus dessous. maisondeladanse.com
OPÉRA
Génial 1. Avec Mélisande (28/02-05/03), Richard Brunel et le compositeur Florent
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LYON OPÉRA
Mélisande © Jean- Louis Fernandez
Hubert posent un nouveau regard sur cette héroïne emblématique.
Génial 2. Le metteur en scène ukrainien Andriy Zholdak livre une expérience d’une intensité peu commune autour du Château de Barbe-Bleue de Bartók donnant deux interprétations successives de l’opéra (18/0302/04). opera-lyon.com
ORCHESTRE NATIONAL DE LYON
Artiste associé. Le pianiste Alexandre Tharaud donne plusieurs concerts, notamment au cours d’un week-end qui lui est consacré (21-23/04).
Guest. Le Concertgebouworkest dirigé par Paavo Järvi avec la violoniste Lisa Batiashvili (22/02) et l’Orchestre de Paris accompagné de l’incandescente pianiste Yuja Wang (16/04).
Culte. Nikolaj Szeps-Znaider et l’ONL concluent le premier volet de leur intégrale des symphonies de Beethoven sur deux saisons avec la neuvième (15 & 17/06). auditorium-lyon.com
THÉÂTRE DE LA CROIX-ROUSSE
Bijou. Antoine et Cléopâtre, rêverie de Tiago Rodrigues pour deux personnages, inspirée de l’épopée shakespearienne (04-07/04), est peut-être la plus belle des pièces du metteur en scène portugais, c’est dire !
Sang et Or. Dans Stadium (23-26/03), Mohamed El Khatib livre un vibrant hommage aux supporters lensois, le meilleur public de l’Hexagone, n’en déplaise aux Lyonnais et aux Strasbourgeois.
Artiste complice. Johanny Bert présente
deux pièces : la sortie des clichés et des cases du genre avec Elle pas princesse, lui pas héros de Magali Mougel (10/06) et un Petit Bain plein de mousse et de tendresse (10 & 11/06). croix-rousse.com
THÉÂTRE DES CÉLESTINS
Bujumbura. Frédéric R. Fisbach adapte à la scène le Petit pays de Gaël Faye (04-08/01). Stars. Opéra cosmique parcouru d’émotions fortes, le nouveau spectacle d’Emmanuel Meirieu (Dark was the night, 31/01-04/02) revient sur l’histoire d’une bouteille à la mer interstellaire lancée avec la sonde spatiale Voyager II. theatredescelestins.com
TNP
URSS. Dans la tradition satirique d’un Gogol, mêlant lucidité féroce et comique grotesque, Le Suicidé de Nicolaï Erdman, monté par Jean Bellorini (jusqu’au 20/01), a tout du vaudeville soviétique. Brésil. Dans Après le silence (23-26/05), Christiane Jatahy se penche sur les ressorts de la violence sociale de son pays. Elle s’inspire du roman Torto Arado d’Itamar Vieira Junior, dans lequel le culte afro-brésilien du Jarê et le contact avec une nature peuplée d’esprits anciens et de panthères magiques font face aux troubles connus depuis l’esclavage. tnp-villeurbanne.com
MANNHEIM
NATIONALTHEATER
Immense. Les Huguenots de Meyerbeer (22/01-05/02, Pfalzbau Ludwigshafen) est
mis en scène par le duo Jossi Wieler / Sergio Morabito qui en livrent une vision électrisante et radicale.
Rareté. Zemira e Azor de Grétry (26/0516/06, Schlosstheater Schwetzingen) est à la fois une comédie divertissante et un conte magique.
nationaltheater-mannheim.de
MEISENTHAL
LA HALLE VERRIÈRE
Génial. Avec sa pop rock au phrasé étrange, Stephan Eicher (04/02, puis le 22/03 à l’Ed&n de Sausheim) continue à fourbir de belles chansons sur l’air du temps, entre remords et regrets.
Mortel. The Stranglers reviennent avec leur son tout en british provocation (18/03). halle-verriere.fr
METZ
L’ARSENAL
Révélation . À 27 ans, Mikhaïl Bouzine est un immense pianiste. Il fait se croiser Scriabine, Feldman et Schumann (14/03).
Culte . Des Cantates de Bach par le Collegium Vocale Gent et Philippe Herreweghe (26/01).
Danse. Anne Teresa De Keersmaeker poursuit sa collaboration avec la violoniste Amandine Beyer avec Mystery Sonatas / for Rosa (31/03).
Jazz. Théo et Valentin Ceccaldi avec le Grand Orchestre du Tricot proposent Constantine (07/06), road movie imaginaire, où résonne la musique de l’exil.
Temps forts. L’hybride Transverses #2 (1021/01, voir page 24 ), qui casse les codes et dépasse les frontières, Vous avez dit baroque ? (21-25/03), Musiques à croquer (02-13/04), une rencontre avec la BD et les Balkans (15-17/06). citemusicale-metz.fr
ESPACE BMK THÉÂTRE DU SAULCY
Alléchant. Thibaut Wenger monte Un Ennemi du peuple, pièce grinçante d’Ibsen (13 & 14/04, également à L’Espace 110 d’Illzach 04/04 et au Nouveau Relax de Chaumont 06/04), où la vérité induit la solitude.
Le grand Charles. Gaël Leveugle signe une superbe adaptation d’une nouvelle de Bukowski (Un Homme, 05 & 06/01, puis à l’Escher Theater d’Esch-sur-Alzette les 10 & 11/02). Amours et tendresse qui cognent sous les assauts du désir et du whisky.
Vertigineux. Girls and Boys, solo écrit par le dramaturge Dennis Kelly, tape fort. La mise en scène de Chloé Dabert (09 & 10/03) sert d’écrin lumineux à l’indicible. ebmk.fr
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METZ
OPÉRA-THÉÂTRE
Le Voyage dans la Lune , DR
Metz LES TRINITAIRES
OPÉRA-THÉÂTRE
Éric-Emmanuel Schmitt. Madame Pylinska et le secret de Chopin (02 & 03/02), monologue autobiographique, interprété par l’auteur lui-même.
Dans l’espace 1. Pierre Thirion-Vallet a choisi de situer l’action d’ Il Mondo della luna de Haydn (25-29/01) en 1969, en pleine guerre froide.
Dans l’espace 2. Le Voyage dans la Lune (04 & 05/03, et à l’Opéra de Reims 11 & 12/03) est une comédie féerique et poétique, servie par la musique irrésistible d’Offenbach et la mise en scène d’Olivier Fredj.
Ondine. Paul-Émile Fourny monte Rusalka de Dvorák (02-08/06). opera.eurometropolemetz.eu
ORCHESTRE NATIONAL DE METZ GRAND EST
Rencontre. La trop méconnue Augusta Holmès (1847-1903) dialogue avec Richard Wagner (03/02).
Pianissimo. Le Concerto pour piano n°1 de Chopin par Jonathan Fournel (17/03, puis le 18/03 à la Salle des Fêtes de Sarrebourg, 19/03 à l’Hôtel de Ville de Sarreguemines, 22/03 à l’Espace Montrichard de Pont-à-
Mousson, 23/03 à l’Espace Saint-Pierremont de Mancieulles, 24/03 à La Comète de Chalons-en-Champagne).
Participatif. Œuvre poétique, vocale (avec des choristes amateurs) et instrumentale de Romain Didier et Gil Chovet, Mademoiselle Moselle (30/06, puis aux Salines royales de Dieuze, 01/07) évoque le patrimoine de la région. citemusicale-metz.fr
LES TRINITAIRES & LA BAM
Décloisonnement. À 37 ans, Gaspar Claus (19/01, Les Trinitaires) continue de faire sortir son violoncelle des carcans, le trimballant du classique à la noise, de l’electro à la pop et du jazz au flamenco.
Dégrisement. Contorsionniste de la langue et des mots, Bertrand Belin livre avec Tambour Vision une enivrante mixture hybride de pop francophone, antidote idéal aux angoisses de l’époque (02/03, à la BAM et 03/03 à L’Autre Canal de Nancy).
Succès fou. Avec Armes et paillettes, premier album tout en mélodies pop éthérées, Oete s’impose en futur roi de la chanson française (30/03, Les Trinitaires, puis le 31/03 à l’Espace Django de Strasbourg).
citemusicale-metz.fr
MONTBÉLIARD
MA SCÈNE NATIONALE
Jeune public. Renaud Herbin signe À qui mieux mieux (11/01), invention des sons, des mots et du monde à voir dès 3 ans.
Ovni. Miet Warlop revisite, 10 ans après, une ancienne création toujours peuplée de ses personnages cartoonesques et extravagants, prêts à toutes les pétarades plastiques (After All Springville, 13/01, puis au Maillon de Strasbourg, avec le TJP, 01-03/06).
Icônes. Ne manquez pas la Vuelta a uno de la grande flamenca Rocío Molina (20/01) et le journal de bord espiègle de l’ancienne danseuse phare de Pina, Cristiana Morganti (Création 2022, 14/03).
Théâtre. La Tempesta shakespearienne présentée en Avignon cet été par Allessandro Serra, l’une des figures majeures du théâtre italien actuel (25/04), et les trois niveaux de narration du spectacle novateur avec casques audio de Joris Mathieu Hikikomori – Le Refuge (18/01).
mascenenationale.eu
MULHOUSE
LA FILATURE
Temps forts. La Quinzaine de la Danse (1231/01) avec un temps fort dédié à Catherine Diverrès ! Les Vagamondes, festival centré cette année sur le trouble (17-31/03) ou
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Gaspar Claus © Sylvain Gripoix
encore le nouveau Marathon minimaliste (02-04/06).
Cirque. Rachid Ouramdane signe avec la compagnie circassienne XY Corps Extrêmes (27/01) pour une vingtaine d’acrobates.
Danse. Le Requiem, la mort joyeuse de Béatrice Massin, qui nous emmène dans la fête des morts avec 12 danseurs (28/02, et à L’Arsenal de Metz le 09/02) et Narr : pour entrer dans la nuit, expérience participative de Vidal Bini rejouant la chorémanie de 1518 (02 & 03/03).
Stars x2. Le grand Christoph Marthaler s’attaque à Labiche ( Das Weisse vom ei , 10 & 11/01) et à une série de sketchs extravagants dans Aucune idée (23/03, à La Maison du Peuple avec Le Granit de Belfort). Et aussi le somptueux travail de Baro d’evel (Là, 0306/05) et le Dom Juan très esthétique de David Bobée (04 & 05/05). lafilature.org
NOUMATROUFF
Désabusé. Avec les Montagnes russes du rappeur Lujipeka (09/03, puis le 17/03 à La Vapeur de Dijon, le 23/03 à L’Autre Canal de Nancy et le 25/03 à La Cartonnerie de Reims).
Métal. Le grand retour des Mass Hysteria, pionniers du métal indus’ français (06/04). noumatrouff.fr
ORCHESTRE SYMPHONIQUE DE MULHOUSE
Artiste associé 1. Le violoncelliste Victor Julien-Laferrière pour le Concerto de Dvořák (14 & 15/04) et le Concerto pour violoncelle n°2 de Haydn (14/10 à Feldbach et 15/10 à Richwiller).
Artiste associé 2. Fabien Cali, dont sera créée une page pour clarinette et orchestre
par Paul Meyer himself (24 & 25/03). Événement. Le Roi David d’Arthur Honegger (17 & 18/06, Temple Saint-Étienne) dans sa version originale de 1921. orchestre-mulhouse.fr
NANCY
CCN – BALLET DE LORRAINE
International. Double programme où l’Australien Adam Linder croise les styles dans une réinterrogation du vocabulaire du ballet pour mieux révéler ses usages contemporains (Rarity), quand la Franco-Américaine Michèle Murray recherche la liberté du danseur sur le Dancefloor (01-07/04).
Répertoire. Petter Jacobsson et Thomas Caley s’inspirent librement de La Guerre (de la ligne et de la couleur) d’Yves Klein pour donner corps à Air-Condition (25 & 26/05), qui se complète des installations de toiles cosmiques de Tomás Saraceno. Dans le même temps, Dominque Brun recrée pour sa part, avec les danseurs du ballet de Lorraine, Un Boléro.
Big Up. Ne manquez pas la reprise de l’incandescent et orgasmique Cela nous concerne tous de Miguel Gutierrez, couplé à Earthbone du duo hip-hop Johanna Faye et Saïdo Lehlouh, conversations dansées des interprètes du CCN de Rennes et de Bretagne (02/06). ballet-de-lorraine.com
L’AUTRE CANAL
Désabusé. Avec Montagnes russes, le rappeur Lujipeka continue de bousculer l’imagerie hip-hop avec des textes introspectifs et autocritiques, tantôt désinvoltes tantôt dépités, à l’instar de toute une génération (23/03, et avant cela le 09/03 au Noumatrouff, le 17/03 à La Vapeur de Dijon et le
25/03 à La Cartonnerie de Reims).
Grisé. Contorsionniste de la langue et des mots, Bertrand Belin livre avec Tambour Vision une enivrante mixture hybride de pop francophone, antidote idéal aux angoisses de l’époque (03/03, et la veille à la BAM de Metz). lautrecanalnancy.fr
OPÉRA NATIONAL DE LORRAINE
Événement 1. Tiago Rodrigues s’empare de Tristan und Isolde de Wagner (29/01-10/02), suivant le mouvement du mythe à travers les âges au gré des transcriptions, réécritures, traductions, malentendus, erreurs et errances.
Rareté. Manru de Paderewski (09-16/05), véritable “Carmen polonais”.
Événement 2. Jean-François Sivadier monte La Traviata (25/06-04/07). opera-national-lorraine.fr
ORCHESTRE DE L’OPÉRA NATIONAL DE LORRAINE
Création mondiale. Une œuvre pour trombone et orchestre de la compositrice hongroise Judit Varga (06 & 08/01).
Classicisme. Dans un programme passionnant se côtoient des pages d’Antoni Habel, Joseph Bologne de Saint-George, AnneAmélie de Brunswick et... Wolfgang Amadeus Mozart (23 & 24/03). opera-national-lorraine.fr
SALLE POIREL
Chambriste. Le quatuor Varèse retrouve la pianiste Anne Queffélec pour une soirée autour de Schumann (16/01).
Humour 1. Laune fait son grand retour avec Glory Alleluia (27/01).
Culte 1. Maxime Le Forestier chante Brassens (29/01).
Culte 2. Stephan Eicher est sur scène (02/02, au Palais des Congrès de Vittel 03/02 et à la Halle Verrière de Meisenthal 04/02).
Humour 2. La plume acérée et l’art de rire de tout de Fabrice Eboué dans Adieu Hier (30 & 31/03). poirel.nancy.fr
THÉÂTRE DE LA MANUFACTURE
Créations. Dans Climato quoi ?, Julia Vidit s’associe à nouveau à l’auteur Guillaume Cayet (13 & 14/05) pour une épopée poético-politique réunissant amateurs et professionnels de tous âges. Les artistes associés Élise Chatauret et Thomas Pondevie signent Les Moments doux (01-04/03), exploration de la violence à l’école, au travail, en famille et au tribunal.
Itinérance. Johanny Bert monte le Processus
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nancy
CCN – BALLET DE LORRAINE
Cela nous concerne tous © Laurent Philippe
REIMS LA CARTONNERIE
de Catherine Verlaguet autour d’une maternité non désirée et des interrogations intimes qu’elle provoque (06-10/02) et Bérangère Vantusso s’intéresse aux radios libres et à la lutte dans le milieu ouvrier lorrain (Longueurs d’ondes, 03-08/04).
Palerme. Violence patriarcale et solidarité féminine sont au cœur de la dernière pièce d’Emma Dante sur les bas-fonds de sa Sicile de toujours dans Misericordia (09-11/03, dès 16 ans, et au TDB de Dijon, 14-17/03, et au CDN de Besançon, 20-24/03).
Se souvenir de l’avenir. Amine Adjina plonge la plume dans la plaie avec Histoire(s) de France (26-28/01). (voir page 49) theatre-manufacture.fr
NEURIED
THEATER EURODISTRICT BADEN ALSACE
Tournée Kids. Un Mouton pour la vie (à partir de 6 ans, en allemand et en français) est une promenade musicale et ludique en luge signée Edzard Schoppmann, qui tourne en Alsace dans le cadre de Allez Hop ! 2023 (12/01, Salle des fêtes de Gerstheim, puis les 17 & 18/01, Salle du Cercle à Bischheim). theater-baden-alsace.com
NIEDERBRONN-LeSBAINS & REICHSHOFFEN
LE MOULIN9 & LA CASTINE
Doudous & Cie. Pour les tout tout-petits (dès 8 mois), la compagnie Bleu Renard a imaginé une Broutille (01/02 voir page 22). Solo. Molière du Meilleur seul en scène 2022, Marc Arnaud mêle savamment standup et théâtre pour La Métamorphose des
cigognes, qui raconte l’histoire d’un homme livré à lui-même dans une salle de recueil de sperme (04/03, La Castine). lacastine.com
NILVANGE
LE GUEULARD PLUS
Girl Power. Aloïse Sauvage revient avec Sauvage, deuxième album tout en sensibilité explosive (01/03, puis le 24/03 à l’Espace Django de Strasbourg). Famille. Quand ton aprèm’ fait boum, ce sont des freestyles et improvisations de danse avec le public pour de mémorables battles parents/enfants (12/04, dès 6 ans). legueulardplus.fr
OBERHAUSBERGEN
LE PRÉO
Théâtre. Dans un laboratoire de recherche en intelligence machine, trois scientifiques développent une créature artificielle capable de passer le Turing test (18/04). Femmes. Catriona Morrison s’empare du destin de Marguerite Möwel, brûlée comme sorcière au XVIe siècle, dans un duo haletant entre Sophie Nehama et Marie Schoenbock (L’Avis de Marguerite, 04/05 au Fort Frère d’Oberhausbergen, puis le 06/05 dans les jardins de l’Hôtel de Ville d’Erstein). le-preo.fr
Obernai
13e SENS
Démons. Comment nos croyances façonnent-elles notre rapport au réel, à la morale ? Tentative de réponse avec Les Pos-
sédés d’Illfurth du Munstrum Théâtre (07/01, et aussi le 05/01 à la MAC Robert Lieb de Bischwiller et le 25/03 au Musée Würth France Erstein).
In Utero. Ils vivent dans les eaux chaudes de la mère et, un jour, naissent. Progressivement, ils trouvent leur souffle, commencent à danser et à chanter… Avec Hallux et Poplité (25/03), le collectif Les Arts en tous sens fait du théâtre un lieu d’expérimentation sensorielle, dès 3 mois.
13esens.com
OSTWALD
LE POINT D’EAU
Circassien. Pour ceux qui avaient raté Humans, spectacle au succès international, les virtuoses Australiens du Circa Contemporary Circus offrent une séance de rattrapage avec le tout aussi grandiose Humans 2.0 (dès 7 ans, 25/03).
Sociétal. Création de Juliette Steiner, Services (17/05, dès 14 ans), revisite dans une douce folie rituelle les rapports de domination actuels. lepointdeau.com
REIMS
LA CARTONNERIE
Désabusé. Avec Montagnes russes, le rappeur Lujipeka continue de bousculer l’imagerie hip-hop avec des textes introspectifs et autocritiques, tantôt désinvoltes tantôt dépités, à l’instar de toute une génération (25/03, et avant cela le 09/03 au Noumatrouff de Mulhouse, le 17/03 à La Vapeur de Dijon et le 23/03 à L’Autre Canal de Nancy).
Galactique. Fakear présente Talisman, dans lequel il fusionne accidents sonores et electro pointilleuse (15/03, à La Vapeur de Dijon 11/03 et à La Laiterie de Strasbourg 16/03). cartonnerie.fr
CÉSARÉ
Événement 1. Sur nos Terres Sacrées (08/01, Opéra) fait se rencontrer Ninon Valder, chanteuse, bandonéoniste et flûtiste et Michel Godard au tuba et serpent, pour une musique intemporelle à la croisée du jazz, du folklore argentin et du classique.
Événement 2. Le blues écorché de la Réunionnaise Ann O’aro dans Le Sourire de la Wouivre (05/03), qui explore, avec la flûtiste et compositrice Fanny Ménégoz, le thème de la monstruosité. cesare-cncm.com
LA COMÉDIE DE REIMS
Création. Chloé Dabert s’attaque au Firmament de Lucy Kirkwood (à la Comédie de
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Lujipeka © Shelby Duncan
Colmar les 22 & 23/03). Un drame anglais dans le XVIIIe où un jury populaire de femmes décide du sort d’une condamnée à mort et surtout de l’enfant qu’elle porte dans le ventre. Langue sublime, récits de vie puissants et drames à tous les étages.
Girl Power. Marie Rémond et Caroline Arrouas revisitent le documentaire culte Delphine et Carole, insoumuses (en itinérance 22-24/05 et 31/05-02/06), dans lequel la journaliste Carole Roussopoulos et Delphine Seyrig donnent la parole à celles qu’on n’écoute pas, participant à l’émancipation des femmes.
Festivals. Far Away (01/02-11/02) avec notamment la satire Plaidoirie pour vendre le Congo de Sinzo Aanza monté par l’artiste résident de La Comédie, Aristide Tarnagda, Et mon règne arrive de Léonora Miano monté par Odile Sankara, qui revisite la place des femmes en Afrique noire (08 & 09/02), ou encore, pour la première fois en France, les textes de prisonniers politiques du Bélarus regroupés par Ivan Viripaev dans 1,8 M (07 & 08/02). Sans oublier le festival jeune public Méli’Môme avec Comment je suis devenue Olivia de Kevin Keiss mis en scène par Alexandre Esthève sur une choré signée Jean-Claude Gallota (28-30/03, avec Nova Villa).
lacomediedereims.fr
LE MANÈGE DE REIMS
Ovni. Les Fauves lâchés par la Compagnie Ea Eo (05-07/05) qui signe un manifeste du jonglage du futur, pop-punk et inventif. Get on the bus. Dans le cadre du Festival C’est comme ça ! (17/09-08/10) de L’Échangeur (Château-Thierry), Le Manège vous emmène en bus pour trois solos de Rebecca Journo, Daniel Larrieu et Emmanuel Egger-
mont (30/09). Star. Régine Chopinot revient pied au plancher avec Top (12 & 13/01), création débridée pour sept danseurs, un batteur et un guitariste et Marcos Morau pour une Belle au bois dormant dantesque (14-16/04, à l’Opéra de Reims avec le Ballet de l’Opéra de Lyon). Enfin, l’hommage de Fouad Boussouf à deux artistes géniaux dans Oüm (14 & 15/06, et aussi au Théâtre Edwige Feuillere de Vesoul le 10/01, puis au CCAM de Vandœuvrelès-Nancy les 28 & 29/03), qui orchestre la rencontre entre la diva égyptienne Oum Kalthoum et le poète perse Omar Khayyam. Far Away. Le festival des Arts (01-12/02) regroupant toutes les structures de Reims offre un focus sur l’Afrique de l’Ouest, avec l’omniprésent Salia Sanou de Ouagadougou, qui présentera Clameur des arènes, transmise à 8 jeunes danseurs (04 & 05/02), et À nos combats (11 & 12/02) où il jette sur le ring deux danseuses et... une soixantaine de figurants ! manege-reims.eu
OPÉRA
Jazz. Kadri Voorand (18/01), c’est le feu sous la neige, la Baltique qui bouillonne : la chanteuse jazz estonienne va briser la glace ! Dans l’espace. Le Voyage dans la Lune (11 & 12/03, et à l’Opéra-Théâtre de Metz les 04 & 05/03) est une comédie féerique et poétique, servie par la musique irrésistible d’Offenbach et la mise en scène d’Olivier Fredj. Danse. Marcos Morau réveille La Belle au Bois Dormant (14-16/04 avec Le Manège) au XXIe siècle pour le Ballet de l’Opéra de Lyon. Grand classique. Die Zauberflöte de Mozart (26-30/05) mise en scène par Vincent Tavernier. operadereims.com
SAINT-DIÉ-Des-Vosges
ESPACE GEORGES-SADOUL
LA NEF
Penser. Dans Solace, les fascinantes marionnettes signées Tibo Gebert, de la Compagnie Numen, questionnent, entre poésie et métaphysique, le rapport de chacun à sa propre solitude (13/01, Musée Pierre-Noël, dès 11 ans). Jouer. Dans sa nouvelle pièce de groupe, Jeux de société (voir page 22), Ezio Schiavulli plonge ses danseurs au cœur des ruptures et des déséquilibres qui maillent les relations humaines (20/01, Espace GeorgesSadoul, 26/01 à l’Espace Rohan de Saverne). saint-die.eu
SAINT-LOUIS
LA COUPOLE
Spectaculaire. Avec Dimanche , les deux compagnies belges Focus et Chaliwaté en mettent plein la vue aux petits comme aux grands. Entre drolatique histoire de famille et dystopie écologique, ces comédiens déjantés côtoient les marionnettes géantes de flamants roses et autres ours blancs (dès 10 ans, 03/03). Révoltant. Julie Bertin et Léa Girardet reviennent sur la folle polémique suscitée par la médaille d’or de Caster Semenya au championnat du monde d’athlétisme de Berlin en 2009. Libre Arbitre interroge notre société sur le corps de la femme en tant qu’enjeu social et politique (22/03). lacoupole.fr
SARREBRUCK
SAARLÄNDISCHES STAATSTHEATER
Verdissimo. La Forza del Destino (04/0202/06) est mis en scène par Lorenzo Fioroni. Événement. Sébastien Rouland, dirige le Requiem de Fauré (02 & 03/07).
Focus. Sarah Nemtsov est en résidence avec la création mondiale de son opéra Ophelia (13/05-28/06).
Danse. Le Ballet national de la Sarre et Stijn Celis proposent The Privacy of Things (12/0516/06), subtile variation sur le cycle de Lieder de Schubert. Festival. Perspectives (25/05-03/06), entre France et Allemagne. theater-saarbruecken.de
SAUSHEIM
ED&N
Régressif. Chantal Goya nous emporte sur La Route enchantée (15/01). Génial. Stephan Eicher (22/03) ! eden-sausheim.com
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LA COUPOLE Libre
SAINT-LOUIS
arbitre © Simon Gosselin
SAVERNE
ESPACE ROHAN
Danse. Dans sa nouvelle pièce de groupe, Jeux de société (voir page 22), Ezio Schiavulli plonge ses danseurs au cœur des ruptures et des déséquilibres qui maillent les relations humaines (26/01, et avant cela le 20/01 à l’Espace Georges-Sadoul de Saint-Dié). Cirque. Dans leur dernière création, ExCENTRIQUES , les Acrostiches s’emparent des modernes mono-roues électriques et ouvrent un terrain d’expérimentation inédit à la mesure de leurs talents d’acrobates et de jongleurs (09/02). espace-rohan.org
SCHILTIGHEIM
CHEVAL BLANC
BRIQUETERIE / BRASSIN
Soul. Descendant de la famille royale du Burundi, réfugié à Londres, J.P. Bimeni retrouve son puissant combo funk The Black Belts sur Give Me Hope, un sommet de groove gorgé d’optimisme (02/03, Cheval blanc).
Theâtre. Une Goutte d’eau dans un nuage est l’histoire vraie d’une femme qui s’expatrie à Saïgon et se raconte, seule en scène avec des accessoires miniatures. Un voyage théâtral et sonore délicat comme la pluie (04/05, Brassin). ville-schiltigheim.fr
SCHWEIGHOUSESUR-MODER
LA K’ARTONNERIE
Poétique. Avec La Fabrique, la Compagnie Sans Souci déploie son délicat et sensible
théâtre de papier pour chuchoter aux bambins l’envie de vivre en harmonie avec la nature, entre notes de musiques et bouquet de couleurs primaires (dès 3 ans, 21/01). mairie-schweighouse.fr
SÉLESTAT
TANZMATTEN
Danse. Entre hip-hop et rythmes de la tradition gnawa, Näss exalte la puissance du collectif à travers sept corps en transe (09/02). Concert. Nouveau héraut de la chanson à texte, le Belge Pierre de Maere dynamite la pop francophone avec une insolente flamboyance, entre textes lucides et phrasé mutant (16/05, et avant cela au Moloco d’Audincourt le 25/02). tanzmatten.fr
SOULTZ-SOUS-FORÊTS / WISSEMBOURG
LA SALINE & LA NEF
Varièt’. Comme Perceval, Luke Skywalker ou Jésus, Robert n’a pas de père et ne jure que par ceux qu’ils s’inventent, stars du télécrochet. Mon père est une chanson de variété française (06/04, La Nef) manie l’humour et l’irrévérence.
I Will Survive. La compagnie You’ll Never Walk Alone signe un hommage que les moins de vingt ans ne vivront pas comme leurs aînés. Dans France (21/04, La Saline), ils reviennent sur l’épopée de notre quête d’une première étoile à la coupe du monde de foot. Mime. Dans Play War (04/04, La Saline), deux soldats aux intentions héroïques sont catapultés en pleine jungle vietnamienne. Un duo hilarant façon Laurel et Hardy à la sauce Rambo ! Musique. Tartine Reverdy Dans les bois
(14/04, La Saline), super disque et super spectacle à voir dès 6 ans !
Danse. Avec Heres : Nel nome del figlio (au nom du fils) (voir page 22), Ezio Schiavulli interroge la filiation avec son père entre deux batteurs endiablés (27/01, La Nef) ! Drôle. Dans Der Lauf (11/10, La Nef), le duo du Cirque du bout du monde jongle à l’aveugle avec des assiettes, la tête sous un seau, ou empile des verres muni de gants de boxe... la-saline.fr nef-wissembourg.fr
STRASBOURG
ESPACE DJANGO
Girl Power. Chanteuse, musicienne, actrice, danseuse, acrobate, Aloïse Sauvage est tout cela à la fois et avec la même énergie. Elle revient avec Sauvage, deuxième album tout en sensibilité explosive (24/03, et aussi le 01/03 au Gueulard Plus de Nilvange). Succès fou. Avec Armes et paillettes, premier album tout en mélodies pop éthérées, Oete s’impose en futur roi de la chanson française (31/03, et aussi 25/02 au Moloco d’Audincourt et 30/03 aux Trinitaires de Metz). espacedjango.eu
ESPACE K
Improvisation. Pour son Strasbourg Impro Festival, la compagnie Impro Alsace invite à la fête pendant trois jours (09-11/03). Icône. C’est toute une époque qui se termine : Capitaine Sprütz tire sa révérence avec Un Héros s’arrête (25-27/05, et aussi le 20/01 à La RuCHE d’Erstein et le 24/03 au pôle culturel de Drusenheim). espace-k.com
JAZZDOR
Bridge. Poétesse et chanteuse d’origine nigériane, Ugochi Nwaogwugwu débarque de Chicago et convoque de sa voix puissante toutes les mémoires de la diaspora noire (07/02, Fossé des Treize).
Fly or die. Nouvelle star de la scène jazz chicagoane, Jamie Branch joue une musique à nue, sans concession, pour retranscrire les soubresauts politiques et sociaux de son pays (09/05, Fossé des Treize). jazzdor.com
LA LAITERIE
Queen. Trois ans après son sacre aux Victoires de la musique, la Rémoise Jeanne Added revient avec By your Side et signe le début d’une nouvelle ère (10/02).
King. Maniant le verbe et la plume comme personne, Médine poursuit ses combats, en vers et contre tous ses détracteurs, avec un
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SCHWEIGHOUSE-SUR-MODER
LA K’ARTONNERIE
La Fabrique © Claude Boisnard
huitième album Médine France, toujours dans la veine du regretté rap conscient (25/03). artefact.org
LE MAILLON
Performance. Rébecca Chaillon, découverte avec Carte noire nommée désir (2123/02 au CDN de Besançon ) crée son premier spectacle pour ados, Plutôt vomir que faillir (18-21/01, et aussi au CDN de Besançon, 29/11-03/12, et à NEST, Thionville, les 21 & 22/03).
Focus. Un air d’Iran avec ces Espaces d’exil (25/01-04/02) réunissant l’excellent Amir Reza Koohestani (En transit) et Gurshad Shaheman (Les Forteresses). (voir page 45)
Temps fort. Le Monde du travail (18/0302/04) avec notamment l’agit-prop de Nicoleta Esinescu (Sinfonie des Fortschritts, 31/03-01/04) ou L’Âge d’or d’Igor Cardellini et Tomas Gonzalez, visite guidée dans des lieux qui échappent à notre attention au quotidien, rarement considérés au-delà de leur dimension fonctionnelle, et où se jouent pourtant la création du Capital (18 & 19/03).
Come back. Le retour de Mathias Moritz avec un nouveau Groupe Tongue dans Hôtel Proust (12 & 13/01). maillon.eu
OPÉRA NATIONAL DU RHIN
Duo. La Voix humaine de Poulenc est chanté par Patricia Petibon dans une mise en scène de Katie Mitchell, qui imagine un nouvel épilogue cinématographique porté par une composition symphonique d’Anna Thorvaldsdottir (18-26/02 à Strasbourg, 12 & 14/03 à Mulhouse).
Printemps slave. Le Conte du Tsar Saltane de Rimski-Korsakov (05-13/05 à Strasbourg,
26 & 28/05 à Mulhouse) est donné dans le cadre du Festival Arsmondo, cette année dédié à la culture slave. Culte. Emmanuelle Bastet monte Turandot de Puccini (09-20/06 à Strasbourg, 02 & 04/07 à Mulhouse).
Danse. Un nouveau volet de Spectres d’Europe (27-30/04 à Mulhouse, 25-30/06 à Strasbourg). operanationaldurhin.eu
ORCHESTRE PHILHARMONIQUE DE STRASBOURG
Musique romantique. Passer Une journée avec Schubert (29/01) est une invitation chambriste lancée par les musiciens de l’OPS.
Musique viennoise. L’Orchestre national de Lille fait voisiner Mozart, Schubert, Berg et Webern (10/02).
Musique de films. Ciné-concert Mary Poppins (10 & 11/03).
Musique au cube. Avec le Triple concerto de Beethoven (23/03) dirigé et interprété par Renaud Capuçon.
Musique française. L’Orchestre et John Nelson poursuivent leur compagnonnage avec une Carmen en version de concert (04 & 06/04) chantée par Michael Spyres et Joyce DiDonato.
Musique en résidence. Avec Memoria (20 & 21/04), Bruno Mantovani, compositeur à l’honneur cette saison, se penche sur le conflit arménien. philharmonique.strasbourg.eu
LA POKOP
Deuxième. Le danseur strasbourgeois Marino Vanna signe sa seconde pièce, Man’s Madness (19/01), quatuor en quête de par-
tage d’émotions et de mélange des genres. Épopée. Artiste associé à l’Université de Strasbourg cette année, Geoffrey RougeCarrassat explore la plus vieille histoire écrite du monde dans Gilgamesh Variations (2527/05), créée après des temps de résidence à La Pokop. Festival. La 6 e édition du festival des arts scéniques émergents Démostratif se tiendra du 06 au 10/06. lapokop.fr
PÔLE SUD
Back to back. La krumpeuse Nach est de retour avec la conférence dansée Nulle part est un endroit (23/01, à La Pokop). Créations. La nouvelle pièce de Marie Cambois ALL (à la lisière) (12 & 13/01, puis à l’Espace 110 d’Illzach les 20-21/01, au CCAM de Vandœuvre-lès-Nancy les 07 & 08/02, à L’Arsenal de Metz le 02/03 et au Nouveau Relax de Chaumont le 23/03 voir page 18). La création de groupe d’Ezio Schiavulli, Jeux de société (07 & 08/02, aussi à La Filature de Mulhouse les 08 & 09/11, à L’Arsenal de Metz le 17/05 et au Nouveau Relax de Chaumont le 16/05, voir page 45). Festival. L’Année commence avec elles (1228/01) et EXTRAPOLE (30/05-07/06). Minimalism. Maud Le Pladec tente de donner corps aux œuvres de compositrices invisibilisées (Kassia de Constantinople, Hildegarde von Bingen ou encore Lucie Antunes). Counting stars with you (24 & 25/01) trouble les représentations et les corps au son de la DJ et compositrice Chloé Thévenin. Report. Les Guérillères de Marta Izquierdo Muñoz (27 & 28/01) revisite l’inspiration de Monique Wittig. pole-sud.fr
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Fraternité de Caroline Guiela Nguyen © Jean-Louis Fernandez
STRASBOURG
TNS
LE TAPS
Actuelles XXV. Le festival de lectures de textes d’auteurs contemporains (14-18/03).
Engagée. Charlotte Lagrange décrit le quotidien d’une assistante sociale chargée des Mineurs non accompagnés dans L’Araignée (07-09/02, et au Théâtre de Haguenau dans le cadre de Région(s) en scène(s), 29/03), solo sur les dégâts de la bureaucratie et la maltraitance dans l’accueil des migrants et demandeurs d’asile.
Création. Catherine Javaloyès passe de Dennis Kelly à Jean-Luc Lagarce en créant Histoire d’amour (derniers chapitres), entre triangulations amoureuses et profondes solitudes (17-21/01).
Épopée. La compagnie du Matamore de Serge Lipszyc monte Richard III et York de Shakespeare (08-11/03, également au Point d’eau d’Ostwald 24/11-04/12, à l’Espace Rohan de Saverne les 13 & 14/01, et au Diapason de Vendenheim le 19/01), plongée dans les affres de l’âme humaine, des tirants et de la soif de pouvoir. taps.strasbourg.eu
TJP
Ovnis. L’inclassable L’Odeur du gel d’Emily Evans, impressions plastiques et chorégraphiques du Grand Nord (19 & 20/01, et aussi à L’Espace 110 d’Illzach 10/02 et au Nouveau Relax de Chaumont 03/02). Miet Warlop revisite, 10 ans après, une ancienne création toujours peuplée de ses personnages cartoonesques et extravagants prêts à toutes les pétarades plastiques (After All Springville, 01-03/06 avec Le Maillon, puis à MA scène nationale de Montbéliard le 13/01).
Cirque contemporain. Avec Trait(s) , Coline Garcia propulse sa roue Cyr dans l’Art contemporain en explorant la figure du cercle, inspirée par Kandinsky (dès 3 ans, 07-13/01, puis aux Rotondes de Luxembourg, 06-11/10). Marion Collé entend, elle, Traverser les murs opaques avec le Collectif Porte27 (16 & 17/05 avec Le Maillon), évocation poétique du soulèvement, avec des artistes travaillant l’aérien (fil, funambule, trapèze ballant).
tjp-strasbourg.com
THÉÂTRE NATIONAL DE STRASBOURG
Créations. Pièce 100 % féminine avec Valérie Dréville portant Un Sentiment de vie très intime et autobiographique de Claudine Galea, sous la direction d’Émilie Charriot. Un questionnement du poids de nos héritages (17-27/01, voir page 47). Sylvain Creuzevault crée à Strasbourg L’Esthétique de la résistance (23-27/05), spectacle d’entrée dans la vie professionnelle du groupe 47 de l’École. Une traversée, sous la plume
de Peter Weiss, de la lutte ouvrière contre le fascisme du milieu du XXe siècle, gorgée de références. Blandine Savetier s’attaque à l’incarnation et l’appropriation artistique avec Un Pas de chat sauvage (03-10/03), de Marie NDiaye sur Maria Martinez, chanteuse cubaine à la célébrité éphémère. Conte fantastique. Caroline Guiela Nguyen, qui sera directrice du TNS dès septembre 2023, présente son ode à la Fraternité et aux disparus (12-20/01). tns.fr
LE ZÉNITH
Grandiose. Les mondes telluriques de Carmina Burana (14/01). Iconique. Thomas Jolly signe une nouvelle mise en scène de Starmania (10-12/02), tandis que les chorégraphies sont signées Sidi Larbi Cherkaoui. Comédie musicale. Je vais t’aimer (04/03) rend hommage à l’immense Michel Sardou. Événement. Michel Polnareff (18/06) est de retour avec des arrangements piano-voix. zenith-strasbourg.fr
STUTTGART
STAATSTHEATER STUTTGART
Essentiel 1. Suite et fin du nouveau Ring (présenté en cycle complet : 03, 04, 10 & 12/03, puis 05, 06, 08 & 10/04), avec Götterdämmerung (29/01-10/04).
Essentiel 2. Une production du Saint François d’Assise de Messiaen (11/06-09/07) est toujours un événement ! staatstheater-stuttgart.de
THANN-CERNAY ESPACES CULTURELS
Immersif. Plus qu’à un spectacle, Invuk Trip invite les spectateurs à un événement, une expérience, un voyage en terre inconnue, à la rencontre d’un peuple imaginaire (Hors les murs, à Bourbach-le-Haut, 12/05). ectc.fr
THIONVILLE
NEST – NORD-EST THÉÂTRE
Performance. Rébecca Chaillon présente son premier spectacle pour ados, Plutôt vomir que faillir (21 & 22/03, et aussi au Maillon de Strasbourg 18-21/01).
Dimanches en famille. Les Jambes à son cou de Jean-Baptiste André, qui joue physiquement avec nos expressions (27 & 29/01, également à Pôle Sud, Strasbourg, 03-05/05).
Festival. La Semaine EXTRA (18-24/03).
Bruit du monde. Les Petits pouvoirs de Charlotte Lagrange (12/04), exploration des mécanismes de la domination au travail, et les Abysses d’Alexandra Tobelaim (0206/05), récit intime de Davide Enia sur la crise des migrants. nest-theatre.fr
POLY 253 Janvier 23 43
VANDŒUVRE-LÈS-NANCY
CCAM
Fouad Boussouf © Elian Bachini
TRÈVES
THEATER TRIER
Coup de cœur. Le directeur de la maison, Jean-Claude Berutti monte Pelléas et Mélisande de Debussy (27/05-05/07). Ballet. Avec The Door (06/05-07/07), trois chorégraphes explorent le thème du passage : Damien Nazabal, Beatrice Bodini et le lauréat d’une bourse font souffler un vente de fraîcheur sur la danse ! theater-trier.de
VANDŒUVRE-LÈS-NANCY
CCAM
Danse. La nouvelle pièce de Marie Cambois ALL (à la lisière) (07 & 08/02, puis à Pôle Sud à Strasbourg les 12 & 13/01, à l’Espace 110 d’Illzach les 20-21/01, à L’Arsenal de Metz le 02/03 et au Nouveau Relax, Chaumont, le 23/03, voir page 18). Sans oublier le sombre Nebula de l’excellente Vania Vaneau (30/05) et la variation hommage à la grande Oüm Kalthoum et à Omar Khayyam de Fouad Boussouf (28 & 29/03, au Théâtre Edwige Feuillère de Vesoul le 10/01 et au Manège de Reims les 14 & 15/06).
Jeune public. Le théâtre d’ombres est aussi au programme avec Natchav, ou l’émancipation de circassiens face à la dictature (1517/03, également aux 2 Scènes de Besançon 28/02-03/03).
Théâtre. Tg STAN s’empare de Je suis le vent de Jon Fosse pour un alléchant duo entre Damiaan De Schrijver et Matthias de Koning
(02 & 03/02).
Festoche. Édition n°39 de Musique Action, festival de création sonore (17-31/05). centremalraux.com
VENDENHEIM
PÔLE CULTUREL LE DIAPASON
Métisse. Saxophoniste aventurier et nomade, Samy Thiébault perpétue avec créativité les origines métisses du jazz (09/02). Acrobatique. Avec Knot (14/04), le duo de circassiens Nikki & JD se raconte entre mainà-main, gymnastique, danse contemporaine et capoeira. Magique. vendenheim.fr
VESOUL
THÉÂTRE EDWIGE FEUILLÈRE
Temps fort. Mois Voix d’enfants / Espace scénique, en mai. Love. Chœur des amants de Tiago Rodrigues était sa première pièce, en 2007. Il y revient pour notre plus grand plaisir (06/04). Ne manquez pas l’hommage de Fouad Boussouf à deux artistes géniaux dans Oüm (10/01, puis au CCAM de Vandœuvre-lèsNancy les 28 & 29/03 et au Manège de Reims les 14 & 15/06), qui orchestre la rencontre entre la diva égyptienne Oum Kalthoum et le poète perse Omar Khayyam. Musique. Le jazz inspiré par les explorations nouvelles d’Émile Parisien et Vincent Peirani (20/01). theatre-edwige-feuillere.fr
VILLAGE-NEUF RIVERHIN
Tzigane. Le duo Ladislava revisite le répertoire des musiques traditionnelles d’Europe de l’Est en reprenant les grands classiques du jazz manouche, Brassens, Montant et Piaf (25/02, également à la Salle du Cercle de Bischheim le 18/05). mairie-village-neuf.fr
VOSGES
SCÈNES VOSGES
Musique. De la chanson à textes avec le subtil Thomas Fersen (03/03 à La Rotonde) où les reprises de Brassens par l’inoxydable Maxime Le Forestier (10/02).
Ciné-spectacle. La compagnie La Cordonnerie entend bien Ne pas finir comme Roméo et Juliette (05 & 06/04) avec ce spectacle en forme de fable, mi filmée, mi jouée et commentée.
Théâtre. La Tendresse de Julie Bérès (24/01, dès 15 ans), explore la sexualité et les assignations sociales. scenes-vosges.com
ZURICH
OPÉRA
Wagner Power. Suite de la Tétralogie mise en scène par Andreas Homoki avec Siegfried (05-26/03).
Contemporain. Lessons in Love and Violence de George Benjamin (21/05-11/06). Ballet. On the Move (14/01-11/02), chorégraphie de Christian Spuck. Reprises. La voix merveilleuse d’Anja Harteros dans Il Trovatore de Verdi (17/09-16/10), Jonas Kaufmann chante le rôle de Cavaradossi dans Tosca de Puccini (15-20/12) et Cecilia Bartoli dans le rôle-titre de La Cenerentola de Rossini (08-24/03). opernhaus.ch
TONHALLE ORCHESTER
Focus. Sont les fils rouges de la saison, le flûtiste Emmanuel Pahud et le pianiste Fazıl Say (avec un concert chambriste permettant de découvrir ses compositions, 02/04). Creative chair. De nombreuses œuvres du compositeur japonais Toshio Hosokawa sont données au cours de la saison dont L’Étreinte, Ombre et Lumière (29 & 30/06) sous la direction de Jakub Hrůša. Culte. L’immense Kent Nagano dirige la Symphonie n°9 de Bruckner (01-03/03). tonhalle-orchester.ch
44 POLY 253 Janvier 23 RETROUVEZ L'ARTICLE SUR NOTRE SITE POLY.FR ACTE II
ZURICH
OPÉRA
Il Trovatore
Vert persan
Avec son focus Espaces d’exil, Le Maillon poursuit son exploration des migrations en accueillant notamment deux pièces ancrées dans l’Iran contemporain, entre lutte intérieure et liberté ailleurs.
De sa chevelure fougueuse et ondulée, il ne reste quasiment rien. Comme si Gurshad Shaheman avait anticipé à sa manière la contestation populaire bousculant le régime autoritaire iranien depuis la mort de Mahsa Amini sous les coups de la police des mœurs. Les voiles tombent, les femmes coupent leurs cheveux mais la répression s’organise. Depuis la France, ses Forteresses (02-04/02) éclairent un demi-siècle d’histoire contemporaine de son pays natal, et offrent une lecture fine des soubresauts qui l’agitent. Ses yeux verts perçants voisinent sur scène avec ceux de sa mère et de ses deux tantes, qu’il a longuement interrogées sur leurs vies pour écrire cette pièce. La famille est là, sur des tapis persans, rejouant les gestes du passé, mais ce sont trois comédiennes qui portent leurs monologues, revenant sur les espoirs de la révolution renversant le Shah, les rêves de liberté et de démocratie vite douchés par la prise en main des intégristes mettant au pas une gauche radicale divisée. Tout y est : les bombardements de la guerre avec l’Irak, le poids de la religion et l’endoctrinement
dès l’école, les mariages arrangés et la jeunesse volée, la répression et la torture dans l’immuable prison d’Evin, toujours active. Mais aussi les chants, en azéri, contant l’amour et l’absence. Une génération née à la fin des années 1950, dont l’exil sera le royaume pour deux d’entre-elles. Destins croisés de femmes courageuses, capables de surmonter des unions ratées, les embuches et humiliations des demandes d’asile en Europe avec leurs enfants.
Poètes…
vos papiers !
Depuis plus de deux décennies, Amir Reza Koohestani vit sur plusieurs fuseaux horaires, créant et jouant ses pièces sur les plus grandes scènes du monde. À l’instar des cinéastes Jafar Panahi (de nouveau incarcéré par le régime alors qu’il est interdit de tournage depuis plus d’une décennie) ou d’Asghar Farhadi, cet Iranien participe à un renouveau de la tradition théâtrale, centré sur des histoires quotidiennes aux fortes dimensions sociétales. Sa critique des mœurs conservatrices se noue au cœur d’une certaine poésie, d’un art du dialogue ciselé et du jeu
aussi contenu qu’intense. Il présente En transit (25-27/01), dans lequel il entremêle le roman d’Anna Seghers décrivant le sort de ceux qui tentent, durant la Seconde Guerre mondiale, de fuir le régime nazi depuis Marseille, à sa propre détention en 2018, à l’aéroport de Munich, avant d’être renvoyé à Téhéran pour avoir dépassé son droit de séjour dans l’espace Schengen. Lieux et époques se répondent dans un espace froid et vitré, où des exilés ploient sous les injonctions administratives, en quête de liberté de vivre, scrutés par des caméras dédoublant leurs présences autant qu’elles renforcent le sentiment d’enfermement. S’y révèlent des destins de femmes au milieu d’une déshumanisation sidérante… et pourtant toujours à l’œuvre.
Au Maillon (Strasbourg) du 25 janvier au 4 février maillon.eu
> Huit artistes afghans ayant fui leur pays à l’été 2021 au retour des Talibans ont été accueillis à Strasbourg grâce à la mobilisation des grandes structures culturelles. Ils présentent leurs travaux le samedi 28 janvier.
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Par Irina Schrag – Photos d’Agn è s Mellon (Les Forteresses) et de Magali Dougados (En transit)
Eleven All Stars
Désormais sanctuarisé, le temps fort L’Année commence avec elles convie onze chorégraphes à Pôle Sud pour en découdre tous azimuts avec ce qui agite l’époque.
Par Thomas Flagel – Photo de Queila Fernandes (Betty Tchomanga)
Elles sont onze, venues de quatre continents, choisies pour leur personnalité et leur écriture particulière de la danse, mâtinée d’intime et de liens historiques. Sept d’entre elles dansent en solo, à l’image de Soa Ratsifandrihana dans g r oo v e (20 & 21/01). Interprète pour James Thierrée, Salia Sanou ou Boris Charmatz, la danseuse franco-malgache a été adoubée par Anne Teresa de Keersmaeker, qui lui a transmis son rôle dans l’iconique Violin Phase. Voilà qu’elle compose une pièce pour elle-même, afin de danser le groove né avec le jazz. Entourée par les spectateurs placés au plus près, elle danse la joie et l’harmonie communicative sur des sons à dominante electro et hip-hop. Nach, venue l’an passé avec le superbe Beloved Shadows – exploration intimiste de fantasmes et de blessures amoureuses mêlant influences du butō et du krump où elle excelle – propose une conférence dansée (23/01, La Pokop). Nulle part est un endroit revient à la manière d’un dictionnaire amoureux sur les gestes et influences du krump, mais aussi sur ce que la danse contient de potentiel d’exploration émancipatrice et de découverte de soi.
Sur son îlot clinquant et scintillant en couverture de survie, Betty Tchomanga prend les atours de Mami Wata, déesse des océans. Mascarades (17 & 18/01) est hanté par cette puissante divinité du panthéon vodou, amenée par les esclaves depuis le Golfe du Bénin jusqu’en Haïti, à Cuba et au Brésil. La Franco-Camerounaise y signe un hommage au carnaval haïtien comme à l’ambivalence de celle qu’on représente avec la peau claire et les traits blancs, mélange syncrétique entre appropriation de la puissance des Occidentaux (leurs représentations de bustes féminin à la proue des navires) et crainte de son pouvoir : les serpents qui l’entourent, sa beauté ravageuse et le lot de rituels nécessaires pour s’attirer ses bonnes grâces. La danseuse au regard inquiétant dissocie le haut et le bas de son corps, mue par une pulsation ventrale inarrêtable. Hantés de soubresauts, en quête de spiritualité, les râles du tréfonds de sa gorge voisinent avec la rage de Casey, dont elle reprend Libérez la bête, remuglant la vision du sauvage de son enracinement racialiste sous nos latitudes, tout en exultant sur un possible basculement du rapport de force. Autre voyage dans l’histoire des arts et des liens sociaux, celui de Lenio Kaklea. Dans sa Ballad (24 & 25/01), la Grecque mêle une critique radicale et drôle de sa formation en danse moderne – vidée de tout féminisme – à celle, non moins acerbe, du pillage organisé par la danse contemporaine des moindres mouvements culturels minoritaires et “exotiques”.
Elle tape fort et juste, s’empoigne avec le capitalisme et son rejeton libéral, pour finir par dénoncer la contamination des valeurs qu’elle voulait défendre avec la culture par le règne de l’efficacité et de la flexibilité. Son acte de résistance invite à faire autrement, en revenant à ce qui nous anime vraiment, loin des spotlights de la réussite.
À Pôle Sud et à La Pokop (Strasbourg) du 12 au 28 janvier pole-sud.fr
46 POLY 253 Janvier 23 DANSE
Écrire dit-elle
En choisissant l’époustouflante Valérie Dréville pour interpréter Un Sentiment de vie de Claudine Galea, Émilie Chariot signe l’une des créations les plus attendues de ce début d’année. Interview.
Par Thomas Flagel Portrait de Claudine
Galea par Jean-Louis Fernandez
En 2021, vous montiez ce texte, en allemand, à l’invitation du Theater Basel. Pour cette nouvelle création, en français, vous choisissez Valérie Dréville, son jeu tellurique et sa profondeur rare. Changer de comédienne, est-ce totalement changer la pièce ?
Effectivement, ce ne sera pas du tout le même spectacle, même si, avec mes plateaux nus, il n’y a que l’actrice et son texte sur scène. Je ne maîtrise pas la langue allemande, je n’ai donc pas travaillé aussi finement à Bâle que je le fais aujourd’hui. J’ai rêvé cette pièce en français et Valérie a un bagage et des outils très forts, qui font qu’elle élève les textes dont elle s’empare.
Il y a du Duras chez Galea, dans sa manière de parler, sans cesse, de l’acte d’écrire. Elle possède la même impudeur, qui est un cadeau magnifique… Duras est centrale, elle est avec nous tous les jours dans le travail au plateau. Claudine Galea l’aime beaucoup d’ailleurs. Le texte en est très emprunté, même si je ne m’en suis rendu compte qu’il y a peu. Il ne parle que de l’acte d’écrire, au-delà de ce qui se joue sur son père militaire, le colonialisme et la mort. Tout converge vers l’écriture, ce besoin impérieux de dire.
La dernière partie du texte est émaillée de références à un panthéon artistique au destin tragique : Paul Celan, Marina Tsvetaeva, Robert Musil, Sarah Kane… et Lenz de Büchner.
Elle cite des gens allant jusqu’au suicide, comme Lenz qui traverse tout son texte, quelqu’un de perdu, qui erre dans la plus grande difficulté en écrivant, un peu comme Celan trouvant la force de le faire après la Seconde Guerre mondiale. La grande histoire contamine la petite. Ce sont autant de guides pour elle, Lenz en étant le chef-d’œuvre.
Elle revient sur son histoire familiale, son père colon algérien et militaire fier, quittant l’armée pour ne pas se battre en Algérie. De cette guerre d’indépendance elle dit dans son style dénué de ponctuation : « Le sale laisse
des traces avec ça qu’on écrit avec ce qui est sale et n’est jamais classé » puis « Tout se transmet dans l’inconscient coups et viscères »… La France a mis 70 ans à demander pardon pour ses exactions là-bas ! Nous vivons avec cet héritage, dont on ne veut pas mais qui est là. Galea parle de ce que l’on cache : le tabou de la guerre et la situation des pieds-noirs. Elle regarde l’histoire en face, comme les contradictions de chacun.
Sa mère, anticolonialiste et anti-militariste ayant épousé un soldat, est la grande absente. Mais son ombre plane autour, en creux… C’est le bon mot : sa mère est en creux, absente. Claudine Galea avoue avoir fait le tour de la question de sa mère dans d’autres livres*. Ici elle fait une déclaration d’amour à son père, post-mortem. Elle lui dit ce qu’elle n’a pas su lui dire de son vivant. Entre elle et lui, il y a un conflit de génération : il était pour l’Algérie française, elle pour l’indépendance, ce qui n’empêche pas l’amour, mais demande du courage. Elle touche au sublime en s’emparant du pouvoir suprême de l’écriture : dialoguer avec ceux qui ne sont plus.
Au Théâtre national de Strasbourg du 17 au 27 janvier tns.fr
Au Théâtre Vidy-Lausanne du 1er au 11 février vidy.ch
* Les Choses comme elles sont (Verticales, 2019) et dans Au Bord (Éditions Espaces 34, 2010). Voir notre entretien avec l’autrice sur poly.fr
POLY 253 Janvier 23 47 THÉÂTRE
De la planche aux planches
Thomas Ress met en scène La Tristesse de l’éléphant, retraçant la vie du petit Louis, entre traversée de l’enfance et questionnements sur la différence.
Par Julia Percheron – Photo de Vladimir Lutz
«
J e suis rarement parti d’une matière non dédiée à la scène », analyse le directeur artistique de la compagnie des Rives de l’Ill, Thomas Ress. Adaptée du roman graphique signé Nicolas Antona et Nina Jacqmin « La Tristesse de l’éléphant est un pas de côté dans le parcours de notre compagnie. L’histoire de Louis, un jeune orphelin rejeté par ses compagnons, m’a profondément touché. On le suit depuis sa rencontre, enfant, avec Clara, dresseuse d’éléphants, jusqu’à l’adolescence, et peut-être même jusqu’au bout de leur vie. » Entre les thèmes de la maladie, de l’amour, de la bienveillance et du regard de l’autre, « on aborde toute une palette de l’existence humaine, dans ce qu’elle a de plus beau et de plus dur. » Au vu de « l’esthétique de la BD », ajoute le metteur en scène, « l’univers de la marionnette et du théâtre de papier m’ont semblé un bon moyen de faire ressortir ce qui m’a bouleversé. »
Dépourvue d’artifices, la représentation se déroule sur une simple table en bois. Les deux marionnettistes Morgane Aimerie Robin et Stéphane Roblès se partagent une trentaine de personnages, dans quinze lieux différents. La dessinatrice du livre a également repris ses crayons afin d’adapter ses héros
sous un nouvel angle. « Les comédiens deviennent en même temps les narrateurs de l’histoire », explique Thomas Ress. « Ils explorent ainsi plusieurs codes et différentes sémiologies. » Le duo du Cirque des Mirages s’occupe de la musique. « Dès que j’ai lu le roman graphique, j’ai pensé à Fred Parker et Yanovski : leurs œuvres à l’ambiance circassienne, magique et fantasmagorique, collent parfaitement à ce que j’avais en tête. » Un ensemble curieux mais abordant des sujets universels, « qui résonneront différemment selon l’expérience de chacun. À la fin d’une représentation, je me souviens d’un petit garçon me demandant de quel type de cancer un personnage souffrait. C’est assez inattendu, de la part d’un enfant », sourit-il. Du côté des adultes, ils seront peut-être plus sensibles à l’histoire d’amour entre les deux jeunes gens, qui se tisse tout au long des différentes étapes de leur vie.
À La Comédie de Colmar les 20 & 21 janvier comedie-colmar.com
Au Taps Scala (Strasbourg) du 23 au 25 janvier taps.strasbourg.eu
48 POLY 253 Janvier 23 THÉÂTRE
Il était plusieurs fois
Avec Histoire(s) de France, Amine Adjina questionne la fabrique du récit national et poursuit son travail d’écriture à destination de la jeunesse.
Par Suzi Vieira – Photo de Géraldine Aresteanu
Ils sont trois : la belle rebelle Camille, flanquée d’Arthur et Ibrahim – deux collégiens dont l’amitié était mise à mal par le racisme et le repli identitaire de leurs familles dans le précédent spectacle d’Amine Adjina, en 2018. Ensemble, ils doivent se mettre d’accord et choisir, à la demande de leur professeure, un épisode marquant de l’Histoire de France pour le rejouer devant la classe. De la Préhistoire à la Coupe du monde 1998, en passant par la bataille d’Alésia et la Révolution, les comédiens, avec leurs mots d’ados – entre humour décalé et impertinence –, revisitent chacun à leur façon le grand roman national, se déchirent sur le récit fait du passé de leur pays. Quelle place pour les femmes quand il est écrit par des hommes, interroge Camille (jouée par Émilie Prévosteau), qui se propose d’incarner un Vercingétorix à forte poitrine et longue épée ? Comment intégrer les immigrés ou les Français issus de l’immigration dans une épopée narrée par les
colonisateurs et instrumentalisée par l’extrême-droite pour brandir une soidisant pureté des origines ? En s’inventant un personnage de druide en djellaba qui psalmodie en arabe, Ibrahim se joue de l’image faussement uniforme de Gaulois agissant comme un seul peuple uni sur un territoire qui serait la France historique. « Parce que les Gaulois, c’est nous, les sauvages indisciplinés, les barbares », répond le jeune homme interprété par Mathias Bentahar à son enseignante quand elle lui fait remarquer les libertés prises avec la réalité. « Plus je découvre l’histoire des Gaulois, plus je découvre que c’est la nôtre », celle de « toutes les personnes qui ne sont pas dans la règle », qui « ne ressemblent pas à l’image d’un bon Français ».
« L’Histoire, ce sont des visions qui s’affrontent. Ce n’est pas la succession objective de faits bruts et incontestables que certains voudraient nous faire croire. Voilà pourquoi son enseignement doit
se décliner au pluriel », soutient Amine Adjina. « Ce qu’on nous apprend à l’école est un récit narré du point de vue du pouvoir (celui des empires, des rois, des conquêtes, etc.), mais quid du point de vue des femmes, des colonisés, des minorités, des ouvriers… ? », regrette l’auteur né de parents algériens. Et si, à y regarder de plus près, cette nation dont on entend tant parler était le fruit d’une lente et patiente construction, celle de peuples hétérogènes vivant les uns à côté des autres et qui, au fil des siècles, sont devenus une communauté ? Les retours de la part des scolaires et des enseignants venus assister aux représentations, eux, sont très positifs. « C’est comme si, avec la pièce, il y avait une permission qui était prise pour ouvrir le débat dans les classes. »
Au Théâtre de la Manufacture (Nancy) du 26 au 28 janvier (dès 10 ans) theatre-manufacture.fr
POLY 253 Janvier 23 49 THÉÂTRE
Objectif Lune
Les trois amis survoltés d’Hyphen Hyphen sortent C’est la vie, lumineux album d’électro pop racée, avec la volonté affichée d’attaquer les États-Unis.
Par Suzi Vieira – Photo de Kimdary
En 2015, les Niçois d’Hyphen Hyphen publiaient Times, premier disque où brille la voix soul puissante de la chanteuse Santa (Samanta Cotta). Truffé de morceaux à l’accrocheuse pop dansante, l’opus avait valu au groupe une Victoire de la musique dans la catégorie Révélation Scène. Car au-delà des mélodies ultra vitaminées aux refrains euphoriques, c’est par leurs prestations folles et dévergondées en concert que les énergumènes peinturlurés ont su conquérir le public de France et d’Europe. Après avoir transformé l’essai en 2018 avec le décomplexé HH , gorgé de basses et gonflé à l’electro, ils reviennent avec un troisième album né en pleine pandémie, pour lequel ils ont pris le temps de retourner aux sources, à ce qui a toujours fait l’âme du groupe : le live . Les douze pistes du bien nommé C’est La Vie ont ainsi toutes été enregistrées en direct entre les studios ICP de Bruxelles (où avait déjà été façonné le premier LP) et le
home made studio agencé par le trio dans le 19e arrondissement de Paris lors des divers confinements. Des mélodies taillées dans l’air du temps, entre douce mélancolie, humour grinçant et hédonisme forcené, qui tantôt invitent au lâcher-prise (Own God) et à l’acceptation de nos failles (Cry Cry Cry), tantôt libèrent une jouissive et sauvage énergie prompte à conquérir n’importe quel dancefloor (Don’t Wait for Me ou Too Young, choisi comme hymne officiel de l’Euro de football féminin l’été dernier).
Bien décidés à perfectionner encore leur écriture, Santa, Line (basse) et Adam (guitare) se sont adjoint pour l’occasion les services du très prisé Glen Ballard, collaborateur d’Alanis Morissette et Katy Perry, dont le CV affiche au compteur plusieurs Grammy. « Il nous a beaucoup aidés à nous libérer pour aller vers plus de simplicité dans l’expression de nos émotions », confie la chanteuse. Objectif assumé : la
conquête de l’Ouest ! « Pour cet album, on a eu envie d’aller vers une musique universelle, qu’on pourra ainsi défendre à l’étranger. C’est notre fonctionnement depuis le début : on essaye de s’approcher de notre rêve, marche après marche », concluent sans ambages les ambitieux Frenchies . La grande tournée 2023 prévoit ainsi quelques haltes outre-Atlantique à l’automne. « You can count on [them] ! »
À La Cartonnerie (Reims) samedi 28 janvier, à Den Atelier (Luxembourg) jeudi 2 février, à La Laiterie (Strasbourg) vendredi 3 février et à L’Autre canal (Nancy) samedi 4 février
50 POLY 253 Janvier 23 MUSIQUE
Édité par Parlophone hyphenhyphen.store
À cru
Pilier du collectif parisien L’Entourage, Deen Burbigo reste fidèle à sa vision d’un rap brut, loin des toplines et de l’autotune.
Par Suzi Vieira
Il est né à la fin des eighties et appartient à cette génération inspirée par l’esprit rap des origines quoique ancrée dans la contemporanéité, exigeante dans sa vision et polyamoureuse de la rime. Avec ses collègues du crew L’Entourage, Deen Burbigo (prononcez “beur-bigo”, autrement dit téléphone arabe) a fait ses armes dans les Rap Contenders parisiens des années 2010. Aux côtés de Nekfeu, Alpha Wann et Jazzy Bazz, le Toulonnais – à l’époque fraîchement débarqué dans la capitale et étudiant en Histoire – peaufine un style
couplant rigueur technique et sujets plutôt terre-à-terre, entre embûches du quotidien et petites galères, prenant alors le contre-pied d’un courant musical qui glorifiait à outrance la vie de ghetto. Il faut dire qu’avant d’être dans le rap, Mikael Castelle (le vrai nom de ce fils d’un militaire et d’une horticultrice) était dans l’intérim : plagiste, plâtrier, bagagiste, vendeur en magasin, plongeur de restaurant… « Putain mais quelle vie ! Je sors du pôle emploi et on me demande un selfie », scandait-il ainsi sur Retour en Arrière, titre emblématique de son premier album, Grand Cru (2017), soulignant avec un humour non dénué de cynisme la démesure d’une ère numérique où les millions de vues et la célébrité sur YouTube contrastent souvent avec les réelles rentrées d’argent.
Placements au millimètre, textes pointilleux et prods érudites : Deen Burbigo rappe pour les rappeurs, même si sa discothèque personnelle va de Kaaris à Brel, en passant par Brassens, Aznavour, Peter Tosh ou Aretha Franklin. Respectivement sortis en 2020 et 2021, ses disques Cercle vertueux et OG SAN confirment la veine brute dans laquelle il s’inscrit, avec des morceaux au flow acéré, plein d’assonances et d’allitérations mais souvent sans refrain chanté. Point de revendications sociales chez lui – on l’a souvent reproché à Deen comme aux autres membres de L’Entourage – mais le respect de certains codes old school et la priorité donnée à l’écriture ! Une signature que l’on retrouve sur la toute nouvelle Saboteur Mixtape Vol.1, ambitieuse compilation lancée par Burbigo et Eff Gee sur leur label, réunissant pas moins de vingt-deux rappeurs, entre grands noms et jeunes pousses de talent. Si Doums et Nekfeu y croisent en effet le fer sur le beat nerveux de Quotidien (« Me parlez pas d’rue / Ils ont traficante que les vues »), on peut aussi y entendre sur l’un des meilleurs titres de l’opus (Faux G) la rising star du moment, La Fève, avec les rimes précises et le découpage insolent des syllabes qui le caractérisent.
À La Vapeur (Dijon) samedi 7 janvier, à L’Autre Canal (Nancy) samedi 11 février et au Moloco (Audincourt) vendredi 10 mars lavapeur.com – lautrecanalnancy.fr – lemoloco.com
Édité par Saboteur Records saboteurmusique.com
POLY 253 Janvier 23 51 MUSIQUE
A Love Supreme
Filles du virtuose conguero cubain Miguel Angá Díaz, les jumelles d’Ibeyi poursuivent, avec Spell 31, leur quête d’une musique empreinte d’influences métisses et de magie.
Par
Suzi Vieira – Photo de Rafael Pavarotti
52 POLY 253 Janvier 23
Comment est né ce troisième album, où la voix de Naomi est bien plus présente que sur les précédents ?
Lisa-Kaindé. Le disque a été conçu en plein Covid. Il parle de healing, de se faire du bien et de célébration. Nous avons pu, pendant le confinement, nous retrouver à huis-clos dans le studio de campagne de notre producteur, le Londonien Richard Russell [découvreur d’Adele, entre autres, NDLR].
Naomi s’est d’abord enfermée seule avec Richard et ils ont travaillé sur des productions, en expérimentant, sans penser l’album comme une unité, mais au contraire comme une série de chansons ayant chacune leur personnalité. Quand je suis arrivée par la suite, ils avaient quelque 60 morceaux : « Voilà, maintenant, à toi de faire matcher tes pianos-voix avec ça ! » Je n’étais pas sûre du résultat, mais le miracle a opéré et, au final, on a un album beaucoup plus équilibré que les précédents. Mes chansons en sont même sorties plus fortes : elles ont pris du muscle, se sont comme étirées.
Spell 31, le titre est assez énigmatique…
Naomi. C’est l’une des incantations du Livre des morts égyptien, un ensemble de formules funéraires destinées à guider le défunt à travers l’au-delà. Le deuxième jour de studio, alors qu’on travaillait sur Made of Gold et qu’on parlait de tout le savoir perdu de nos ancêtres yorubas, à cause de la colonisation, Richard nous a invitées à ouvrir son exemplaire. Nous sommes tombées sur le chapitre 31.
L.-K. En le lisant à haute voix, j’ai su que l’album, qui parle de notre connexion aux ancêtres et du pouvoir qu’ils peuvent nous transmettre, devait s’appeler ainsi.
Le morceau d’ouverture, Sangoma, revêt clairement une dimension incantatoire. Qu’est-ce qu’un sangoma ?
L.-K. C’est le nom donné aux sorciers
d’Afrique du Sud. En zoulou, le terme signifie “soigner comme une chanson”. Or, selon leurs croyances, ce don est aussi un destin : s’ils n’acceptent pas le chemin qui est le leur, s’ils refusent de guérir les autres, alors ils tombent euxmêmes malades. Cette idée de destinée et de pouvoirs liés à la musique me parle beaucoup, d’où les paroles de cette chanson : « Eh, somos milagrosas / Curándoles el alma » (« Nous sommes miraculeuses / Nous soignons leurs âmes »).
Quel rôle joue la spiritualité pour vous ?
L.-K. La musique est un moyen de se connecter à nous-mêmes, à nos morts, à notre père, à notre culture yoruba et aussi l’une à l’autre en tant que sœurs. Chanter est ma manière de prier, de méditer. Mais plus j’avance et plus je me rends compte qu’un morceau n’a pas besoin d’être grave pour toucher au mystère. Naomi m’aide beaucoup en cela. Par exemple, Rise Above ou Sister 2 Sister, avec leur rythme joyeux, sont peut-être plus habitées encore que Sangoma. Ce n’est pas tant la musique que la connexion avec les chansons et la manière dont tu te sens quand tu les interprètes qui les rend spirituelles. Un reggaeton peut l’être au même titre qu’un gospel !
Ce syncrétisme, comment l’expliquez-vous ?
L.K. Il nous vient de notre père, Angá Díaz. C’était un grand percussionniste cubain, un célèbre conguero . Nous avions onze ans à sa mort, mais l’œuvre qu’il a laissée derrière lui n’est que métissage. Du groupe Irakere dirigé par Chucho Valdès à Steve Coleman, en passant par Orishas, il a joué tous les styles, sans peur du mélange. Echu Mingua (2005), son album solo, est une foisonnante mosaïque où se croisent chants yorubas, hip-hop, jazz, rythmes caribéens… Selon lui, pour faire une musique qui nous ressemble, il faut savoir chercher l’inspiration partout.
N. Nous avons eu la chance de grandir dans une famille où il n’y avait ni bonne ni mauvaise musique. Nous pouvions écouter tout ce qui nous plaisait sans jamais être jugées.
Y compris Shakira, sur laquelle vous dansiez enfants devant la glace, à en croire les paroles de Sister 2 Sister ? N. C’est vrai ! Notre père nous avait donné de l’argent pour acheter notre premier CD et nous étions revenues du plus grand disquaire de Barcelone avec… Shakira et Anastacia ! Mais lui, il était simplement heureux de nous voir écouter ces tubes en boucle.
Vous le citez dans Los muertos L.-K. De plusieurs façons ! Non seulement la chanson, qui est une liste de noms – celle de nos défunts –, s’ouvre sur le sien, mais le concept même en a été repris d’un de ses disques. Enfin, c’est sa voix qu’on entend tout au long répéter « Ibaé » ( « Qu’il repose en paix », en langue yoruba). Pour nous, chanter nos morts n’a rien de macabre. Au contraire, c’est une façon de les célébrer dans la joie et la reconnaissance. À Cuba, les disparus font partie de la vie, ils nous accompagnent au quotidien : on leur parle, on pose une tasse de café devant leur photo quand on s’en sert une…
À L’Alhambra (Genève) mardi 24 janvier, à L’Autre Canal (Nancy) vendredi 27 janvier et au Transbordeur (Villeurbanne) samedi 28 janvier alhambra-geneve.ch – lautrecanalnancy.fr transbordeur.fr
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Édité par XL Recordings xlrecordings.com
Anatolian psyche
Entre finesse des arrangements et profondeur de l’interprétation, les quatre de Derya Yıldırım & Grup Şimşek poursuivent, avec Dost 2, leur voyage au pays de la folk synthétique.
Par Suzi Vieira – Photo d’Allegra Kortlang
Dost, en turc, c’est l’ami. D’une grande élégance, avec son envoûtant mélange de pop psychédélique et de mélopées d’Anatolie, ce disque – second volet d’un projet lancé en 2021 – embrasse large, de l’Orient à l’Occident, des seventies à aujourd’hui. Formé en 2014 autour de la chanteuse et multi-instrumentiste germano-turque Derya Yıldırım, le groupe transnational Şimşek (prononcer Chimchek, qui signifie “éclair”) compte parmi ses membres la fantastique batteuse londonienne Greta Eacott et les Français Antonin Voyant (basse) et Graham Mushnik (claviers). À eux quatre, ils réinventent la folk alternative d’une certaine scène stambouliote des années 1960 et 1970 à grands renforts d’envolées de synthés atmosphériques, de groove profond et de pop contemporaine. Il faut dire que le vent de liberté qui soufflait sur la planète à l’époque des Doors et de Jimi Hendrix a aussi nourri, sur le Bosphore, toute une génération d’artistes contestataires. D’Arif Sağ à Cem Karaka, ils forment aujourd’hui le socle et l’alphabet de Derya Yıldırım, citant ici le poète communiste Nâzim Hikmet ayant passé une partie de sa vie en prison, reprenant là un titre de la militante chansonnière Selda Bağcan. Sur Dost 2, la jeune joueuse de bağlama (le nom turc du saz) rend hommage au grand Mahzuni Şerif en interprétant le déchirant Darıldım Darıldım (“Offensé, Offensé”, dans la langue d’Orhan Pamuk), air célèbre de ce barde anatolien contraint à l’exil. Derrière la voix ensorceleuse gorgée de sentiments tortueux et les compositions en forme de ballades cosmiques aux airs futuristes vibre donc une histoire dense et complexe. Issue d’une famille alévie originaire de la ville de Sivas, Yıldırım puise aussi son inspiration dans le folklore de cette communauté à l’islam hétérodoxe, pour
laquelle religion, poésie et musique n’ont jamais fait qu’un. Comment oublier, par exemple, le sublime Haydar Haydar de Dost 1, basé sur un conte datant du XVIIe siècle ? Sur Mola, composition instrumentale discrète mais puissante, se déploie avec virtuosité le son métallique du luth, avec ce rythme roulé évoquant les grandes cavalcades, où les pauses et les silences savamment dosés peuvent vous entraîner au bord des larmes. Basée sur une chanson d’amour traditionnelle, Odam Kireç Tutmuyor, avec ses mélopées aériennes, transcrit quant à elle avec maestria la douleur du chagrin. Oscillant entre voix séraphique, basse funky (Bal) et psychédélisme à la cool (Meraklı Gönül), Dost 2 est un pur joyau de poésie pop et intemporelle. Pas étonnant que le combo, à l’instar de leurs cousins néerlandais d’Altın Gün* – avec lesquels ils partagent d’évidentes affinités électives – ait été repéré par l’indispensable label genevois Bongo Joe, véritable caisse de résonance entre musiques du monde et scène indépendante.
À l’Espace Django (Strasbourg) jeudi 19 janvier et à la Kaserne (Bâle) samedi 11 mars espacedjango.eu – kaserne-basel.ch
Édité par Bongo Joe Records bongojoe.ch
*Retrouvez notre article sur poly.fr
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Friends
Deux chanteurs majeurs, le ténor Jonas Kaufmann et le baryton Ludovic Tézier, ont rendez-vous pour un récital d’anthologie à Baden-Baden.
Par Hervé Lévy – Photo de Gregor Hohenberg / Sony Classical
Ils sont deux des plus grandes voix de la planète. Se connaissent depuis des années. Sont amis et viennent de publier un très beau disque joliment intitulé Insieme (Ensemble, en italien). Au début de la cinquantaine, les deux compères sont au sommet de leur art. Le premier se nomme Ludovic Tézier. Celui qui est un des barytons étincelant de la scène lyrique décrit ainsi son modus operandi : « Une fois qu’on a travaillé un rôle, qu’on s’est documenté, qu’on a intériorisé la mise en scène, il n’est plus nécessaire d’intellectualiser. Dans un spectacle, il y a quelques rendez-vous avec son cerveau : il faut en effet parfois se reconnecter, lorsque la partition est “sur le fil du rasoir” techniquement, mais le reste du temps, la soirée doit être gérée dans un relatif pilotage automatique pour qu’on soit “traversé” par l’œuvre Je n’ai pas la prétention de réussir ça – et surement pas à chaque représentation –, mais c’est un idéal… » Voilà des années qu’il poursuit cette quête du naturel, chantant avec son âme et ses tripes, puisqu’il est bien connu que, « premièrement : un cerveau ça ne chante pas. Deuxièmement, pour produire un son il faut mettre en branle une machine, une soufflerie, dans une véritable danse du ventre. » Aux côtés du chanteur français, on retrouve son ami, le ténor allemand Jonas Kaufmann, superstar ayant quitté depuis quelques années sa chrysalide de fragilité juvénile pour voguer sur les eaux d’une maturité glamour riche en couleurs et en robustesse. On le constate sur Verismo Arias (Decca, 2016), où la netteté ne se laisse jamais subjuguer par
l’émotion inhérente au patchwork musical choisi, dans lequel se mêlent extraits de Cavalleria rusticana, Andrea Chenier ou encore Adriana Leucouvreur. C’est aussi un récital kaléidoscopique inspiré de leur récent disque que proposent les deux hommes, accompagnés par la Deutsche Radio Philharmonie Saarbrücken Kaiserslautern dirigée par Jochen Rieder. La plus grande partie de la soirée est dédiée à Verdi, avec un duo célébrissime d’Otello (Tu?! Indietro! Fuggi!), l’ouverture d’I Vespri siciliani et un important bloc issu de La Forza del destino, dont les deux artistes sont des interprètes d’exception. Pour faire bonne mesure, des extraits du (trop) rare opéra d’Amilcare Ponchielli, La Gioconda, sont également au menu, dont le duo Enzo Grimaldi, Principe di Santafior
Au Festspielhaus (Baden-Baden) dimanche 8 janvier festspielhaus.de
Paru chez Sony Classical sonyclassical.com
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Entre Russie et Finlande
Accueillant le pianiste Denis Kozhukhin, l’Orchestre philharmonique de Strasbourg propose une échappée de saison, entre Rachmaninov et Sibelius.
Par Hervé Lévy – Photo de Nicolas Hudak
Si Nikolaï Lugansky n’a pu se rendre à Strasbourg comme prévu (ce sera pour la saison 2023-24), il a été remplacé au pied levé par Denis Kozhukhin. Ardent défenseur du répertoire russe, le natif de NijniNovgorod, au jeu pétri d’élégance et de flamme mêlées, donne le standard que constitue la Rhapsodie sur un thème de Paganini de Rachmaninov, ultime œuvre concertante de son auteur. Si Paganini n’eut jamais de disciple – « Il n’en pouvait point avoir, car ce qu’il avait de meilleur, ce qui forme le degré le plus élevé de l’art, on ne peut l’enseigner ni l’apprendre », écrivit Heinrich Heine –, il exerça une fascination incroyable sur ses contemporains et ses successeurs. Chopin (avec son Souvenir de Paganini ), Schumann, Liszt, Brahms ou Rachmaninov lui rendirent en effet hommage. Avec cette série de varia -
tions diaboliques sur le thème du 24 e Caprice pour violon, possédant chacune leur personnalité propre, il crée une mosaïque étincelante, sous-tendue par une unique colonne vertébrale. Il faudra tout le talent du lauréat du très sélectif Concours Reine Élisabeth en 2010 pour nous guider au cœur de ces montagnes de virtuosité remplies de séracs et de replats, entre danse macabre, échappée lyrique et mélodie grégorienne du Dies iræ , que l’on retrouve dans L’Île des Morts qui ouvre la soirée, poème symphonique aux accents wagnériens inspiré du tableau éponyme d’Arnold Böcklin. Voilà qui épouse avec élégance la définition de la musique donnée par le compositeur au début des années 1930 : « Une nuit calme au clair de lune, un bruissement de feuillage en été, un lointain carillon au crépuscule. Sa sœur est la poésie et sa mère le cha-
grin. » Après ce bloc russe, la seconde partie de la soirée dirigée par Dalia Stasevska sera toute entière dédiée à Sibelius, avec un extrait de son Pelléas et Mélisande – sa conclusion tragique –et sa Symphonie n°7, son ultime, en un mouvement unique où l’on retrouve le principe de croissance thématique cher au compositeur finlandais, qui acquiert ici son plein épanouissement : il s’agit d’un bloc unique où tous les mouvements semblent fondus, mais au sein duquel les métamorphoses sont d’une intense subtilité. Si bien qu’on demeure durablement éblouis par une pièce nimbée d’une altière sérénité.
Au Palais de la Musique et des Congrès (Strasbourg) jeudi 12 et vendredi 13 janvier philharmonique.strasbourg.eu
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Opéra bouffe ébouriffant
À Dijon, La Périchole est mis en scène par Laurent Pelly, qui transpose l’œuvre virevoltante de Jacques Offenbach dans la contemporanéité.
Par Hervé Lévy – Photo de Vincent Pontet
La partition est irrésistible. Elle est sans doute une des plus abouties d’Offenbach, avec son propos satirique piqueté d’exotisme musical – à grands coups de grelots et de percussions, mais aussi d’échappées belles dans le folklore arabo-andalou –, où se mêlent le burlesque le plus échevelé et un certain romantisme. À Dijon, elle est servie par un casting scintillant où brillent Antoinette Dennefeld dans le rôle titre – qui fit des étincelles au Théâtre des Champs-Élysées dans cette même production, en novembre 2022 – et Philippe Talbot, Piquillo attendu d’anthologie. Si l’action est supposée se déployer dans le Pérou des dernières années de la domination coloniale espagnole, elle se voit transposée aujourd’hui (une esthétique renforcée par l’actualisation des dialogues parlés, signée Agathe Mélinand) par Laurent Pelly, amoureux fou du compositeur dont il a montré près d’une quinzaine de pièces : « C’est rarement le livret qui m’anime. Toujours la musique ! C’est la folie de la musique, sa poésie, son inventivité, sa vitalité, la drôlerie de certains passages. C’est son côté satirique et politique. Prenons les finales : ils dégagent une énergie hallucinante, qui donne envie au public de se lever et de danser. Ce sont des tubes. Qui résiste à cela ? C’est fou, joyeux, frénétique. Offenbach a un grand sens du théâtre, tout en ayant aussi un regard drôle et sensible sur le monde », décrit-il.
Ici le couple Périchole / Piquillo rappelle les « punks à chiens, des gens qui font la manche. Derrière cette pauvreté, toutefois, il y a le charme. […] Ils connaissent la misère mais s’aiment plus que tout. » L’opéra se déploie dans une ville qui a des points communs avec Lima, mais un Lima onirique où le palais du tyran est « quelque chose de cauchemardesque : un lieu non réaliste, une sorte de galerie des glaces mouvante, où se pavanent des courtisans bling-bling et des courtisanes habillées avec des robes qui évoquent la crinoline, mais coupées dans des tissus d’aujourd’hui, argentés, très brillants. Elles ont les cheveux blonds et raides, elles s’habillent comme certaines filles de Los Angeles. Ce monde artificiel et tape-à-l’œil, c’est à la fois le cauchemar de Piquillo et le rêve de Périchole, qui y accède pour la première fois. » Le résultat est un spectacle bondissant et plein de gaieté, en forme de plaidoyer contre l’autocratie parfaitement salutaire par les temps qui courent !
À l’Auditorium (Dijon) du 15 au 21 janvier opera-dijon.fr
> Ateliers en famille (07/01, dès 6 ans) et pour les enfants (15/01, dès 5 ans)
POLY 253 Janvier 23 57 OPÉRA
Mythologies
Archéologies humaines et urbaines, zones frontières… À l’Espace Apollonia s’épanouissent les œuvres d’essence photographique de l’artiste géorgien Shalvak.
Par Hervé Lévy
Vibrionnant, Shalvak – alias Shalva Khakhanashvili – est un plasticien multiforme, mais aussi un commissaire d’exposition qui fut musicien dans un groupe punk au cours des eighties. Cette énergie n’a jamais quitté un photographe aimant fabriquer des images complexes en noir et blanc, faites de savantes superpositions de clichés, plans et autres signes, qu’il rehausse parfois de peinture. Souvent imprimées sur toile, ses compositions ont envahi l’Espace Apollonia dans un parcours tricéphale. « Il ne s’agit pas d’une rétrospective, mais d’une présentation permettant de cerner les axes essentiels de mon travail », résume-t-il. Intitulée HUMAN, la première partie rassemble des images mettant en scène des femmes. Fragiles en apparence, elles sont des Amazones – série de 2022 évoquant curieusement les reliefs des métopes du Temple d’Apollon à Bassae – ou des guerrières (New Borders, 2008). Fréquemment, elles sont couvertes de bandages, ce qui les rend anonymes, effaçant leur identité au profit de l’universalité, mais il ne faut pas oublier que les « bandelettes préservaient les corps dans le monde terrestre pour protéger l’esprit et accéder à l’au-delà dans l’ancienne Égypte. » Sourd aussi une profonde sensualité de ces images, comme les troublants Androgynes (1995) – frôlements de peaux extatiques – ou Station 0, Voyageur (2004), dont les composantes
possèdent un érotisme trouble évoquant celui de Romain Slocombe ou de Nobuyoshi Araki. Intitulée Frontière, la deuxième section explore les limites entre les différents mediums (photo, peinture, collage…) tout autant que celles de l’Europe… De l’Ossétie à Tbilissi, via Paris, c’est toute une cartographie intime qui se met en place, avec des images construites puis déconstruites et reconstruites, reflétant des questionnements qui transpercent le continent : l’identité, les conflits, la forme d’une ville… D’un rouge mélancolique, la seule œuvre de couleur du parcours nous saute au visage. KAZBEK MOSKWA, 8 MAI 1945-1995 BERLIN, 2022 est une allégorie de la capitale allemande entre reconstruction anarchique post-Mur et réminiscences staliniennes. Enfin, le parcours s’achève avec La Cité, archéologie urbaine où « le hasard possède une place revendiquée » : se stratifient et s’enchevêtrent monuments existants et plans d’édifices jamais construits, histoire de générer un jeu dialectique entre visible et invisible, présence et absence. Voilà de singulières mythologies contemporaines. Une expression qui pourrait s’appliquer à la totalité de l’exposition.
À l’Espace Apollonia (Strasbourg) jusqu’au 29 janvier apollonia-art-exchanges.com
58 POLY 253 Janvier 23 EXPOSITION
Archélogie humaine / Recto Verso, 2022
L’ombre de la croix gammée
Riche de quelque 150 documents exceptionnels, Face au nazisme : le cas alsacien est une plongée dans un passé tourmenté, où la propagande s’immisçait au plus profond des existences.
Par Hervé Lévy
L’enjeu majeur de cette exposition, organisée à l’occasion du 80 e anniversaire du décret du 25 août 1942 instaurant l’incorporation de force des jeunes AlsaciensMosellans, « est de présenter au grand public les conclusions les plus récentes des historiens sur une période où l’Alsace annexée connut un sort très différent de celui de la France occupée », résume un de ses deux commissaires, Jérôme Schweitzer, Conservateur des bibliothèques à la BNU. Et pour mieux comprendre les caractéristiques d’une époque complexe, le parcours débute dans les années 1930, où un certain autonomisme, notamment incarné par Karl Roos, se compromet avec l’idéologie nazie. La lecture de Das Narrenschiff, avec ses caricatures antisémites, est édifiante, même si son audience demeure limitée, avec un tirage ne dépassant pas 3 000 exemplaires. Face à l’hebdomadaire, le très francophile Henri Zislin mène le combat avec Dr Franc-tireur
En 1940, la région est intégrée à l’Allemagne nationale-socialiste – dirigée par le Gauleiter du Land de Bade, Robert Wagner –, les Alsaciens devenant citoyens allemands. Les années qui suivent voient déferler des flots de propagande dans le but d’intégrer les habitants à la Volksgemeinschaft (communauté du peuple). De gré ou de force. La vue en coupe de la société est très complète, avec des films amateurs montrant des démonstrations de force du Parti, des affiches – un aigle martial, une serre posée sur chaque rive du Rhin, nous regarde, accompagné du slogan Ein Volk, ein Reich, ein Führer ! – et autres documents bien souvent inédits illustrant l’emprise sans cesse croissante des institutions comme la Hitlerjugend ou le Reichsarbeitsdienst . La culture se met au service de l’idéologie (et l’on découvre qu’un éphémère Musée de l’Armée fut installé à Strasbourg entre mai et août 1944), tout comme de l’enseignement, puisque la ville est un des trois établissements d’Europe à avoir le statut de Reichsuniversität (avec Prague et Poznań) et chargés de mettre en œuvre la nazification du savoir. Si la résistance n’est pas oubliée, une large section est dédiée à l’après-guerre et à la découverte aussi bien des atrocités du camp de concentration alsacien de Natzweiler-Struthof que du drame des Malgré Nous, versés de force dans la Wehrmacht ou la SS. Et l’Histoire n’est pas achevée, puisque dans les réserves de la BNU dorment quelque 4 000 ouvrages spoliés dont on recherche les légitimes propriétaires.
À la Bibliothèque nationale et universitaire (Strasbourg) jusqu’au 15 janvier bnu.fr
> Visites commentées les mercredis à 17h et les samedis à 11h
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Les Dernières Nouvelles de Strasbourg. Le quotidien de l'Alsace allemande, Strasbourg : impr. des Strassburger Neueste Nachrichten, entre 1940 et 1944 – BNU, M.AFFICHE.487
Les Animaux fantastiques
Créatures de la culture geek et de la mythologie sont mises sous le feu des projecteurs avec Anatomie comparée des espèces imaginaires Un voyage surprenant et pédagogique.
Par Julia Percheron – Photo de Jack Varlet
Avant l’exposition, il y eut un livre au titre éponyme. Sous la plume du paléontologue Jean-Sébastien Steyer associé à l’illustrateur Arnaud Rafaelian, dragons, vouivres, loups-garous ou encore le célèbre Marsupilami d’André Franquin ont été utilisés pour vulgariser les sciences de l’évolution. À présent, une « douzaine de ces personnages » habille le musée du Château des ducs de Wurtemberg, confie le scientifique. Le parcours réunit planches anatomiques, textes réalisés par les deux auteurs – devenus pour l’occasion commissaire et illustrateur de l’exposition – et sculptures signées par la société de moulage Ophys. Dans la première partie, les visiteurs peuvent observer « un mur rempli de squelettes aquatiques », de tapir et d’hippopotame, afin de mieux comprendre la discipline de l’anatomie comparée. Ce n’est qu’ensuite qu’ils plongent dans un monde fantaisiste, peuplé de bêtes folkloriques « monstrueuses ».
Bien sûr, l’une des figures phares du circuit n’est autre que le dragon. Profondément ancré dans l’imaginaire collectif « grâce à ses nombreuses représentations dans des œuvres mondialement connues, telles que Harry Potter, Game of Thrones ou Le Hobbit », ce monstre immense est à retrouver sous différentes formes. « Ce qui est intéressant et amusant, c’est de voir que cette espèce parle à tout le monde », sourit Jean-Sébastien Steyer. « Grands-parents et jeunes enfants ont tous une histoire avec cette créature. » La vouivre, cousine
hideuse de ce reptile volant, fait aussi partie du voyage. La légende raconte qu’elle se terre dans les marécages d’Europe, s’étendant des plateaux du Morvan au Jura suisse… Aujourd’hui, ce serpent ailé hante les salles du château, « haut de plus de deux mètres », ailes griffues déployées et mâchoires prêtes à engloutir les inconscients passant devant lui. Plus loin, le moulage crânien du Spinosaurus, « mesurant pratiquement trois mètres sur trois », est tellement gigantesque que « le regard du spectateur se situe globalement au niveau de ses naseaux ! » Le bestiaire s’enrichit de personnages plus dociles, à l’image de Totoro, chat-chouette-panda de Miyazaki. « C’est un peu l’animal totem des trentenaires », plaisante l’auteur. Une maquette virtuelle projette d’ailleurs son anatomie externe et interne, donnant l’occasion de le disséquer visuellement et d’affiner son savoir scientifique !
Au musée du Château des ducs de Wurtemberg (Montbéliard) jusqu’au 12 mars montbeliard.fr
> Escape game Le Cabinet secret jusqu’au 12/03 (les mercredis, samedis et dimanches)
> Visites commentées avec Jean-Sébastien Steyer (12 & 15/01)
> Apéritif littéraire autour du livre de Jean-Sébastien Steyer et Arnaud Rafaelian (14/01, Médiathèque)
60 POLY 253 Janvier 23 EXPOSITION
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C’est leur vraie nature
Avec Mimèsis , le Centre Pompidou-Metz explore Un Design vivant . Quelque 400 pièces reflètent la fascination pour la nature de leurs créateurs, dans un parcours d’une belle densité.
Par Hervé Lévy
Concept originellement platonicien, la Mimèsis a connu de nombreux avatars au fil des âges : dans cette exposition, il est possible de découvrir comment les designers ont dépassé l’imitation (traduction littérale du terme grec) de la nature, pour proposer de véritables artefacts poétiques correspondant à une recréation du vivant dans sa dynamique de croissance. La première salle plonge le visiteur dans le bain de la contemporanéité, montrant notamment la révolution opérée par les logiciels de simulation et l’impression 3D. Grotto II (2016) de Michael Hansmeyer – où il revisite les rocailles exubérantes de la Renaissance avec des techniques de pointe – voisine avec Crystalized Chair_Venus de Tokujin Yoshioka (2008). Une simple structure plongée dans une solution minérale se voit couverte d’une prolifération aléatoire et auto-générative de cristaux d’un blanc éclatant à l’inquiétante beauté, champ quartzeux au mille et un éclats acérés questionnant la notion même de siège. Bien plus accueillants sont les lignes courbes d’un espace consacré aux Modernes, dont l’intitulé se passe de commentaires : Biomorphisme. Le design organique d’Alvar Aalto (avec sa très épurée Chaise longue n°39, 1936) y côtoie les créations de Charlotte Perriand, qui capte la force de la matière, ou la Chaise DCW (1946) de Charles & Ray Eames, reflet des préoccupations d’un couple souhaitant combiner production de masse et confort.
Suivent les Natures artificielles de l’ère pop : hédonisme floral du Fauteuil Peacock (1960) de Verner Panton, glamour sixties du Fauteuil 577 (1967) de Pierre Paulin – la célèbre “langue”
évoquant certaines œuvres de Jean Arp –, designer star des années Pompidou, ou encore l’enveloppant Canapé Bazaar (1969-70) du Superstudio, au kitsch assumé, qui induit une critique de la société de consommation. Les couleurs claquent dans des compositions aux formes libérées utilisant les nouveaux matériaux (mousses de polyuréthane, plastiques…). Des luminaires biomimétiques de Serge Mouille au néo-primitivisme d’Andrea Branzi (Tree 5 interroge ainsi le devenir d’un monde postindustriel en 2010), le parcours est fascinant et culmine, à notre sens, avec les Rêveries urbaines (2016) de Ronan et Erwan Bouroullec. Voilà excitantes maquettes, qui sont autant de réflexions sur l’aménagement de l’espace public. Installées sur de longues tables, ces mirages déclinent en effet des formes idéales possibles pour la cité : une forêt suspendue, une douce pergola prenant un aspect nuageux… Certains de ces prototypes visant à réenchanter le monde ont, du reste, fait l’objet de réalisations.
Au Centre Pompidou-Metz jusqu’au 6 février centrepompidou-metz.fr
Légendes
1. Joris Laarman, Chaise Adaptation Chair (Gradient Cooper Chair), 2015 Paris, Centre Pompidou, Musée national d’art moderne © Joris Laarman / Photo : Centre Pompidou, MNAM-CCI, Dist. RMN-Grand Palais / Philippe Migeat
2. Tokujin Yoshioka, Crystalized Chair _ Venus, 2008, Paris, Centre Pompidou, Musée national d’art moderne © Tokujin Yoshioika
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Galette chic
Pâtissier mythique, natif de Colmar, Pierre Hermé propose une chasse au trésor pour l’Épiphanie : onze fèves rarissimes (en collaboration avec la Monnaie de Paris) attendent les chanceux. Le choix s’orchestre entre une galette Infiniment amande, une autre nommée Jardin de Palerme magnifiant les agrumes, une troisième Infiniment praliné pistache… Et si vous n’aimez pas ça, reste la brioche feuilletée où se mêlent crème au chocolat et caramel onctueux ! pierreherme.com
Top MOF
And the winner is…
Cuisinier majeur, Olivier Nasti a été désigné Cuisinier de l’année 2023 par le Gault&Millau. Voilà jolie reconnaissance pour sa Table de Kaysersberg, dont le credo se résume en quelques mots : chasse, pêche, nature et tradition (revisitée). Ne cessant d’innover, le Meilleur Ouvrier de France a récemment ouvert Levain, une boulangerie faisant revivre les méthodes de fabrication ancestrales. On attend la troisième Étoile au Michelin pour mars : même si les voies du guide rouge sont impénétrables, on ne comprendrait pas bien que ce ne soit pas le cas. fr.gaultmillau.com – lechambard.fr
Chef alsacien évoluant dans le Sauternais, au Château Lafaurie-Peyraguey (deux Étoiles au Guide Michelin), Jérôme Schilling est récemment devenu Meilleur Ouvrier de France. Bravo à un artiste notamment passé par une autre planète scintillante de la “galaxie Lalique”, la Villa de Wingen-surModer. Celui qui se définit comme un « cuisinier des vignes » compose ses assiettes et sa carte en s’inspirant de la typicité et du terroir de l’AOC Sauternes Barsac. lafauriepeyragueylalique.com
Comté d’hiver
Tout au long de l’année, sur le territoire de l’Appellation d’Origine Protégée, sept rendez-vous rassemblant autant de duos de cuisiniers se tiendront au sein de différents lieux emblématiques pour faire vivre la passion d’un fromage qu’on adore. Le Temps du Comté débute avec l’association du chef jurassien Romuald Fassenet et de la figure de la gastronomie lyonnaise qu’est Davy Tissot (07/01, Maison du Comté, Poligny). Quelque 140 convives sont attendus pour ce moment rare. letempsducomte.com
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© Anne-Emmanuelle Thion
© Deepix
Maison du Comt é
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La philosophie dans le terroir
Pionnier de la biodynamie en Alsace, le domaine Marc Kreydenweiss, géré depuis 2008 par son fils Antoine, produit des vins vibrants, exprimant l’essence du territoire où ils naissent.
Par Hervé Lévy
Flash-back. Nous sommes dans les années 1980 et le vignoble alsacien ronronne. Des raisins perfusés à la chimie donnent des blancs secs trop souvent mollassons, dont la personnalité peine à s’affirmer (des vins de soif, pour rester polis) et des liquoreux surchargés en sucres. Dans une région en quête d’âme œnologique, quelques pionniers se livrent à des expérimentations salutaires. À Andlau, Marc Kreydenweiss est du nombre : la conversion en biodynamie – presque un gros mot à l’époque, on a tendance à l’oublier –est réalisée en 1989. Il privilégie aussi le terroir, écorchant le culte du saint cépage, unique religion alors en vigueur, replongeant même dans le passé pour retrouver les “gentils”, des assemblages de cépages nobles. Le Clos du Val d’Éléon, à parts égales de riesling et de pinot gris, grandissant sur des schistes, est ainsi un retour aux sources réussi, qui s’est métamorphosé en classique viticole. Voilà flacon dont le millésime 2018 accompagne une recette de noix de Saint-Jacques imaginée par Paul Stradner, chef de la Villa René Lalique. Et le sommelier de la maison doublement étoilée, Romain Iltis, de préciser : « La tension droite, apportée par le riesling, met en exergue le caractère maritime et ses notes d’agrumes se font lien avec la bergamote. Le pinot gris vient ici apaiser cette tension et donne à la texture une sensation plus suave et ainsi épouse le fondant si particulier de la Saint-Jacques crue, accentué sur la partie garnie de noisette. L’ensemble est mar-
qué par l’expression de fumé caractéristique des schistes qui se révèlent dans la finale, imposant la force du terroir pour prolonger l’expression iodée de l’ensemble. » Quittant l’Alsace pour la région de Nîmes en 2008, Marc y explore la puissance et les charmes de cépages rouges (aujourd’hui, le domaine est géré par son plus jeune fils, Jean), laissant la main à Antoine. Il a poursuivi dans la voie tracée, même si, très vite, il a « choisi un pressurage plus lent, des élevages sur lies plus longs et une forte réduction du niveau de soufre ». Le credo demeure néanmoins le même : « Exprimer la puissance du terroir qui passe au-dessus du cépage », avec des flacons aux étiquettes arty en forme d’épure, incisifs en diable. Quelques mètres seulement peuvent séparer deux grands crus très différents : qu’ont ainsi de commun les schistes noirs de Steige formant une masse pierreuse dure, presque sauvage, du Kastelberg et les grès roses, tendres, policés et friables, du voisin Wiebelsberg ? Ce dernier donne un riesling exceptionnel, qu’on peut garder de longues années et dont le cœur battant est une minéralité ciselée avec élégance – comme une improbable dentelle –, non dépourvue de réminiscences florales et fruitières.
Domaine Marc Kreydenweiss 12 rue Deharbe (Andlau) kreydenweiss.com
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66 POLY 253 Janvier 23 UN DERNIER POUR LA ROUTE