4 minute read

Se former à donner corps

Next Article
Ciel et terre

Ciel et terre

Pour beaucoup d’étudiants, se lancer dans l’animation est l’occasion de réaliser un rêve d’enfant. Même si, dans les faits, les profils peuvent être assez variés, avec une appétence plus ou moins prononcée pour l’histoire, le dessin, le volume ou l’image de synthèse.

1. La NEF est la première plate-forme professionnelle francophone dédiée à l’écriture autour de l’animation ; son délégué général est Xavier Kawa-Topor.

Advertisement

Dans le bureau d’Alexis Venet, l’actuel directeur de l’école Pivaut, les affiches de films et les dessins accrochés au mur évoquent la vie passée de cet ancien professionnel qui pendant vingt ans a travaillé dans les plus grands studios, chez Disney et ailleurs. Depuis 2015, il dirige l’école Pivaut dont la réputation le précède : « C’est non seulement l’école privée la moins chère de l’Ouest, mais c’est surtout l’une des premières à avoir ouvert un cursus spécialisé dans l’animation. » L’histoire de l’école est fortement associée à la figure de son fondateur, Gérard Pivaut, ouvrier soudeur aux Chantiers navals et artiste peintre. Après avoir donné pendant des années des cours de dessin aux enfants du quartier Saint-Donatien (à l’est de Nantes), il ouvre en 1985 une école d’art qui étoffe progressivement son offre : « La première formation dans le domaine de l’animation 2D a été ouverte en 2000 sous le pilotage de Barham Rohani, qui avait travaillé sur plusieurs séries au sein du studio IDDH, à Blois, comme Prince Vaillant , Denver le dernier dinosaure, Les Tortues Ninja... L’animation était alors un secteur très confidentiel. Les rares studios travaillaient surtout pour la télévision. »

La liste est longue de ces écoles d’art créées par des figures emblématiques. On peut citer, à titre d’exemples, la fondation de l’école Penninghen à Paris, en 1868, par le peintre Rodolphe Julian ; la création par le peintre décorateur René Brassart d’une école d’arts graphiques portant son nom en 1949, à Tours ; ou encore celle de l’école Émile Cohl, en référence au dessinateur français qui est considéré comme l’inventeur du dessin animé, par l’écrivain Philippe Rivière et le plasticien Roland Andrieu, à Lyon, en 1984… Mais cette dernière décennie, le marché des écoles d’arts appliqués et de création visuelle a explosé, et des réseaux de campus se sont développés partout. À Nantes, par exemple, de nombreuses écoles proposent désormais des formations en animation, avec des spécialisations dans la 2D/3D, les effets spéciaux ou le motion : ECV, e-artsup, Brassart, l’École de design Nantes Atlantique… Quant à l’école Pivaut, elle fait désormais partie du réseau Icônes-écoles créatives qui regroupe plusieurs écoles, dont l’Esma, basée elle aussi à Nantes, qui propose des formations dans l’animation 3D, et Ciné-Créatis, l’école jumelle spécialisée dans les formations en cinéma.

Des profils variés

Ce foisonnement de formations se traduit par une pluralité de cursus et renforce la variété des profils. À l’Esma, par exemple, les bacheliers viennent de tous les horizons. « Certains sont vraiment des littéraires, ce qui les intéresse, c’est la mise en récit ; d’autres aiment surtout dessiner ; d’autres enfin ont surtout une appétence pour l’informatique et la modélisation

3D. Ils sont à la fois très ouverts et très disciplinés. Il faut avoir beaucoup de patience pour réussir à faire bouger une seule patte d’un insecte ! Ils doivent puiser leur inspiration partout », explique Sandra Mellot, la toute nouvelle directrice de l’Esma et de Ciné-Créatis.

Si, pour les jeunes générations, certaines références restent partagées comme Le Roi et l’Oiseau, le film culte de Paul Grimault sorti en 1980, de nouveaux supports, comme le téléphone ou la tablette, permettent la diffusion d’images animées variées : « Pour moi, dans l’animation, il ne doit pas y avoir de dogme, on doit pouvoir passer d’un monde à l’autre, d’un univers exigeant graphiquement à South Park ou Les Cassos », assure de son côté Alexis Venet. Le défi pédagogique relève alors d’un travail d’équilibriste entre exigence et lâcher-prise : « Beaucoup de références sont puisées dans l’univers du manga, mais aussi dans les jeux vidéo comme Zelda ou Dofus. Ils regardent aussi beaucoup de webtoons sur ordinateur. J’essaye de leur transmettre des références autres que les dessins animés du Studio Ghibli qu’ils ont biberonnés étant petits. Moi, je suis une grande fan du cinéma d’animation japonais de Masaaki Yuasa ou de Satoshi Kon. Je leur dis toujours qu’il n’est pas nécessaire de bien dessiner pour faire un film d’animation, mais qu’il n’est pas suffisant de bien dessiner pour faire un film. Ce qui compte, c’est aussi l’histoire », assure Soizic Mouton, qui assure à l’école Pivaut le cours de design de personnages et de concept art. Pour ceux qui sont avant tout attirés par le cinéma d’auteur, que ce soit sous forme de court ou de long-métrage, certaines écoles sont identifiées comme des références dans le milieu : La Poudrière à Valence, l’École La Cambre en Belgique, Le Royal College of Art à Londres ou encore l’École nationale supérieure des arts décoratifs à Paris. À Angers, cette attention à l’écriture est également au cœur du projet porté depuis 2022 par l’École supérieure d’art et de design (Esad-Talm), la NEF Animation 1 et le festival Premiers Plans. La formation ECRAn (Écriture Cinématographique en Récit Animé) permet ainsi de valider un diplôme supérieur d’expression plastique, niveau Master, centré sur l’écriture cinématographique et la mise en scène, sous toutes ses formes : story-board, écriture scénaristique, écriture sonore…

Des histoires de hasard

Soizic Mouton, elle, a choisi il y a une dizaine d’années de valider un double cursus, via un diplôme d’illustration à l’école Estienne, à Paris, puis un diplôme en cinéma d’animation aux Gobelins, pratiquant longtemps en parallèle les deux métiers : « La nuit je travaillais sur des projets de livres pour enfants et le jour, sur le décor de films pour le compte de gros

This article is from: