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Le rationnement

« La belle activité du Secours National ravitaillement des mariniers » M. Delarue, du S.B.A. Une circulaire du préfet de la Meuse pour que soit assuré à leur passage, le ravitaillement des bateliers.

Il a été signalé qu'au cours de leurs déplacements, les mariniers et leurs familles, naviguant avec eux éprouvent parfois des difficultés à faire accepter par des commerçants des titres d'alimentation émis dans les départements autres que celui de leur stationnement. Il y a lieu de rappeler à tous les commerçants que ces titres d'alimentation doivent être acceptés par eux sans restriction, après vérification de leur authenticité par le cachet de la mairie, la concordance des numéros des feuilles de tickets et de la carte d'alimentation. Les tickets ainsi recueillis seront acceptés comme les tickets ordinaires du département, pour le réapprovisionnement des commerçants. D’autre part, la régie habituelle de la carte de lait ne peut être appliquée exactement à ces consommateurs suivant les modalités prévues par les textes en vigueurs, étant donné qu'ils ne peuvent, en raison de leur déplacement, désigner un fournisseur attitré. Vous voudrez donc bien inviter les détaillants en lait à servir les titulaires de cartes de lait portant la mention « service de la navigation », sur simple présentation de cette carte. Un relevé, sans modèle spécial, des rations délivrées, mais donnant toutes précisions utiles quant aux distributions effectuées, sera tenu à jour par les détaillants. Ce relevé sera adressé, en fin de trimestre au Comité départemental de gestion du groupement laitier. D'autre part, des démarches sont actuellement en instance pour que les bateliers obtiennent, dans le Nord, les feuilles de supplément M-T, leur donnant droit à la ration supplémentaire prévue pour leur catégorie. » 104

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Le rationnement

Contrairement à ce que l'on croit rapidement, le rationnement et les tickets qui l'accompagne commence dès mars 1940 avant l'invasion allemandes de mai 40 et perdure quelques années après la fin de la guerre. Les cartes de rationnement sont toujours en vigueur pour les produits alimentaires ou ménagers tel que le charbon ou les détergents jusqu'en 1949. Comme le rapporte une témoin vers la fin de la guerre, la gestion des tickets c’est tout une organisation : « J’ouvre le magasin à 09h00 ou il y a déjà la foule dehors, vendeuse en 1944, n'est pas vendeuse de 1990. Il faut découper les tickets sur les feuilles de ravitaillement, être au courant, combien de sucre, de café, beurre, huile et le reste. Adultes J.3, J.2, J.1 et d'autres, tous n'ont pas la même chose, nous avons des boites pour mettre les coupons coupés car au bout de la semaine, enfin, le lundi, nous passons des heures à coller tout cela sur des feuilles catégories par catégories. Ne pas se tromper, il faut les envoyer pour avoir d'autres marchandises et il faut peser sans arrêt gramme par gramme. Presque pas de paquet, presque tout est en vrac, motte

104 Le réveil du Nord – 03/01/41

de beurre coupée avec un fil à couper le beurre, fromage, huile, légumes secs, sel. Tous passent sur la balance, les grammes, le prix, il faut calculer, ne pas se tromper, et nous n'avons pas de calculette comme à présent. » 105

Mais pendant l'occupation, petit à petit la très grande partie des biens de consommation va être concernée. Pour la nourriture avec le pain, la viande, le beurre, les chaussures et les textiles... Mais aussi le gas-oil, le charbon ou l'huile à moteur.

Un problème supplémentaire apparaît pour la population batelière qui circule d'une zone à une autre zone en France. Le franchissement des lignes entraîne la nécessité d'avoir des tickets valident dans la nouvelle zone. « Des cartes de textiles, des bons d'achat de vêtements et du tabac pour les mariniers.

En raison de leurs déplacements continuels sur les voies navigables, les mariniers et leur famille habitant sur les bateaux de navigation intérieure ne peuvent être astreints à l'inscription préalable chez les débitants Les débitants exigent la certification, par la carte d'alimentation, d'un domicile dans la commune. » 106

Il y a souvent falsification des dates ou des lieux avec des tâches de café même si les commerçants ne sont pas dupes. En cas de déplacement à l'étranger, le système D pour s'en procurer des valides est de mise. En 39 40, la population se soumet à cet état de crise après le blocage des prix, début janvier voit le rationnement des denrées alimentaires et la création des cartes d’alimentation.107

« Le ravitaillement se fessait de plus en plus rare. Nous avions des cartes de rationnement et il fallait donner des tickets pour acheter du pain. Seules les cartes « V » pour Vieillard et les cartes « J » pour jeunes avaient le droit au lait, ¼ de litre par jour. Je faisais partie des « J2 ». » 108

« Un jour, nous sommes allés dans un grand magasin ; comme il y avait des tickets pour tout ce qu'on achetait, avec les tickets textiles, maman et tante Augusta achetèrent chacune une paire de bas en laine pour l'hiver. » 109 « Les privations au point de vue alimentation étaient de rigueur, mais pour ceux qui faisaient des transports transfrontaliers, nous recevions des tickets d'alimentation allemands, lorsque nous étions en Moselle. En passant à Novéant nous touchions des tickets d'alimentation français ; en repassant à Lagarde nous retouchions des tickets allemands : c'était une subtilité à bien suivre. A certains moments, les Allemands nous donnaient des tickets pour une durée réduite, une partie des tickets

105 Jacquelin Hesbert – archives Cité des bateliers

106 Journal navigation 01/08/41 107 Lydia Carnec-Branchet - Une saga batelière de 1850 à 1980 - n° 64 - 2010 108 Marinière, ma vie, ma profession – Eliane Droissart Bourdon - n° 26 - 1990 109 Marinière, ma vie, ma profession – Eliane Droissart Bourdon - n° 26 - 1990

étaient annulés, avec un cachet « Ungügtig ». Mais la Javel ou bien l'ersatz de café, ainsi qu'une pomme de terre crue tranchée, faisaient des merveilles ! Bien sûr, certains commerçants n'étaient pas dupes ! » 110

« Les difficultés rencontrées sont essentiellement celles du ravitaillement aussi bien pour la nourriture que pour le renouvellement du matériel. Il faut des bons pour tout. » 111

« Mars 41. Pris par le gel pendant deux mois à Gand en Belgique. Ce pays est plus encore rationné que la France ; nous sommes à une période de tickets d'alimentation. Nous trouvant devant l'écluse de Bruges où il faut attendre deux à trois jours avant de la franchir, je m'offre l'audace de me rendre à la Kommandantur. Je rencontre un gradé d'un rang assez élevé et luis dis : « Voilà, nous sommes ici quelques mariniers français et, en Belgique, nous ne bénéficions pas des mêmes tickets de rationnement que les belges ». (ce qui est faux précise le témoin). Ce gradé me répond : « Que votre métier doit être dur, je vois les mariniers haler leurs péniches avant d'entrer dans l'écluse ». C'était partiellement vrai, mais ce faisait partie de notre travail. L'écluse de Bruges contenant environ huit péniches, nous devions haler notre bateau jusque dans le sas éloigné de deux cents à trois cents mètres. Ce gradé ouvre un tiroir et me donne une poignée de tickets divers, pain, viande, graisse, etc. que j'ai eu le plaisir de partager avec mes quatre camarades du convoi. » 112

« Comme toute la population française, les mariniers sont soumis aux mêmes contraintes, sauf le S.T.O., les Allemands ayant besoin de la voie d'eau et de la batellerie. Tout ce qui se rattache à celle-ci est soumis à un régime de faveur. Par contre les cartes d'alimentation sont souvent difficiles à obtenir, le marinier n'étant jamais au même endroit. Alors leur seul recours est le marché noir ou le troc. Le charbon était souvent une monnaie d’échange. » 113

110 François Berenwanger - Transporteur par eau, souvenirs de mon métier - n° 67 - 2012 111 André Miquel et sa famille – des barquiers du Midi - n°69 - 2013 112 François Berenwanger - Transporteur par eau, souvenirs de mon métier - n° 67 - 2012 113 Lydia Carnec-Branchet - Une saga batelière de 1850 à 1980 - n° 64 - 2010

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