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Dossier Real Estate
IMMOBILIER LOGISTIQUE DURABLE
Investir les gains d’aujourd’hui dans l’avenir
Si l'économie mondiale a souffert de la pandémie du coronavirus en 2020, un certain nombre de secteurs s’en sortent plutôt bien. L’e-commerce, par exemple, mais aussi l'immobilier logistique. Dans notre pays, l'espace logistique immédiatement disponible se raréfi e, les loyers augmentent et les nouveaux développements tournent à plein régime. Et ces nouveaux projets investissent de plus en plus dans la durabilité.
Arnaud Henckaerts
Si la construction écologique était autrefois réservée à quelques-uns, elle devient progressivement la norme pour les bâtiments logistiques. Ces derniers sont géographiquement mieux situés, isolés de manière optimale et chauffés plus effi cacement. Ils récupèrent les eaux de pluie, subviennent de plus en plus souvent à leurs propres besoins énergétiques, et sont même à énergie positive ! Avec ce dossier, nous nous immergeons dans le secteur de l'immobilier logistique belge et pointons différents aspects intéressants en termes de durabilité.
Certificats de durabilité - p. 24
Bien que la certifi cation LEED (Leadership in Energy and Environmental Design) soit souvent utilisée de l'autre côté de l'Atlantique pour évaluer la durabilité des bâtiments logistiques, c’est BREEAM (Building Research Establishment Environmental Assessment Methodology) qui constitue la norme sur notre continent. Mais un tel certifi cat BREEAM est-il nécessaire ? La construction durable est également possible sans elle. Pour l’instant, il semble que ce soit surtout les promoteurs qui recherchent la certifi cation, plutôt que les utilisateurs fi naux.
Panneaux solaires - p. 27
L'installation de panneaux solaires sur les bâtiments logistiques a du sens pour plusieurs raisons. C'est même quasi un must en 2021. D’abord, ces bâtiments disposent en général d’une surface de toit généreuse, et ensuite, il s’agit d’un moyen relativement simple de réduire la consommation d'énergie nette et donc d'augmenter la durabilité. Mais avant de remplir le toit de panneaux solaires, il est préférable de tout mettre en œuvre pour limiter la consommation électrique du site. Sinon, différentes formules rendent le placement accessible…
Case Study Fiege - p. 30
Lorsque, en 2017, Fiege a concentré ses activités sur un seul site au lieu de deux, il a décidé d'agrandir le bâtiment existant et de lui donner un caractère durable en concertation avec le promoteur Goodman. Une opération réalisée alors que le bâtiment est resté opérationnel, et en partie sur la base d'une structure plus ancienne. De quoi générer un certain nombre de défi s, en particulier pour l'installation des panneaux solaires. Cela montre qu'il vaut mieux penser à l'avenir quand il s'agit d'un nouveau projet logistique.
Le centre de distribution Aldi à Turnhout a remporté le premier « Logistics Building of the Year » lors des Transport & Logistics Awards 2019.
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2020 a été un Grand Cru pour le parc immobilier logistique belge, malgré mais aussi en partie grâce à la crise du coronavirus. La chaîne logistique a en effet senti l'impact des limitations en termes d’importation et de production, de la forte demande pour certains produits, de la baisse de la demande pour d'autres et du boom du commerce électronique. Nous clôturons ce dossier par un aperçu des tendances et réalisations les plus marquantes de l'année écoulée.
ENTREPÔTS DURABLES
Le méga DC que WDP érige pour Barry Callebaut sera un BREEAM Exceptionnel. L'entreprise chocolatière poursuit sa certifi cation conformément à sa stratégie Forever Chocolate.
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Sens et non-sens de la certification BREEAM
En Europe, les standards BREEAM sont devenus la norme pour évaluer la durabilité d'un bâtiment. Ils aident les promoteurs, les architectes et les utilisateurs de bâtiments logistiques à réduire l'impact environnemental et constituent un moyen pour les investisseurs de mieux estimer leur valeur. Pourtant, tous les utilisateurs d'entrepôt ne cherchent pas à obtenir la certifi cation BREEAM.
Philippe Van Dooren
BREEAM signifi e Building Research Establishment Environmental Assessment Method. La méthode a été développée par l'institut de recherche anglais Building Research Establishment (BRE) pour minimiser l'impact des bâtiments sur l'environnement et les personnes. Le certifi cat représente un label de durabilité pour les nouveaux projets de construction et de rénovation. Notamment dans l'immobilier logistique. C'est une évolution relativement récente - les évaluations sont effectuées depuis 2009 - mais le certifi cat constitue désormais la norme européenne. Contrairement aux autres labels de durabilité, BREEAM suit une approche multicritères. Le processus de certifi cation porte non seulement sur la consommation énergétique d'un bâtiment, mais aussi sur d'autres aspects tels que l'utilisation du sol, l'écologie (protection de la biodiversité), le processus de construction, l'utilisation de l'eau, les déchets, la pollution, le transport, les matériaux, la santé et le confort. L'évaluation débouche sur un score BREEAM : Passable, Bon, Très bon, Excellent ou Exceptionnel. Dans certains pays, comme les Pays-Bas, les directives d'évaluation ont été adaptées aux exigences du marché local. La Belgique, quant à elle, s’appuie sur les directives générales BREEAM Europe. L'évaluation est effectuée par un assesseur BREEAM reconnu ou un professionnel accrédité. Il inspecte non seulement le projet, mais accompagne également le donneur d’ordre et le concepteur de la phase de conception jusqu'à la mise en service.
AVANTAGES
La certifi cation BREEAM n'est pas obligatoire en Belgique. Bien que la certifi cation implique pas mal d'investissements supplémentaires, elle présente des avantages. Selon Stabo, auditeir BREEAM reconnu, en plus de l'impact positif sur l'environnement, il y a aussi l’aspect
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Rudy Denutte (De Rocker Logistics) : « Une certifi cation BREEAM n'est pas pour tout le monde. C'est plus accessible dans le cadre d’un grand projet que pour un projet de PME ».
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économique. Un projet BREEAM a en effet une valeur ajoutée démontrable. Une étude du ‘World Green Building Council’ montre que les bâtiments durables ont des taux de location jusqu'à 20 % plus élevés. Cela est en partie dû au bon environnement intérieur (santé) et à la baisse des coûts d'exploitation, en raison, entre autres, de la baisse des coûts énergétiques, des économies d'eau et de la maintenance. Un certifi cat est également intéressant pour obtenir des prêts verts auprès des banques. Et tant les locataires que les utilisateurs sont généralement prêts à payer davantage. En Belgique, si le bâtiment neuf ou rénové dispose d’un score Excellent ou Exceptionnel, le client peut demander une prime écologique. De ce qui précède, on peut déduire que la certifi cation BREEAM concerne principalement les promoteurs immobiliers et moins les utilisateurs. En effet, la certifi cation infl uence la valeur du bâtiment.
DE ‘NICE TO HAVE’ À ‘MUST HAVE’
« BREEAM, c'est en effet un peu le miroir à deux faces », confi rme Walter Goossens, Head of Industrial & Logistics Agency du promoteur immobilier JLL. « Les promoteurs sont intéressés par la certifi cation car elle donne plus de valeur au bâtiment. L'utilisateur, en revanche, est moins intéressé. » « Lorsqu'un bâtiment logistique en Belgique est certifi é BREEAM, il obtient généralement le label Bon. En termes d'investissements, les labels Très bon et Excellent sont plus intéressants, mais dans notre pays, il est rare que les gens visent ‘Excellent’. Il est plus facile pour les développeurs d’obtenir un Bon ou un Très bon », ajoute-t-il. Selon Goossens, les investisseurs en immobilier logistique jouent également un rôle important. « Ils tablent sur des bâtiments développés de manière durable. Mais les clients des prestataires de services logistiques - et notamment les grandes entreprises, sous la pression de leurs actionnaires - attendent d'eux qu’ils travaillent aussi de façon plus durable. Et les opérateurs logistiques ainsi que les transporteurs doivent apporter la preuve de ces activités durables. L'importance des labels et des certifi cations va donc augmenter. » Bien que la demande des utilisateurs soit plutôt faible, Walter Goossens pense donc que BREEAM deviendra une nécessité. « La tendance dans l'immobilier de bureaux est claire : la certifi cation évolue de ‘nice to have’ à ‘must have’. Dans le domaine de la logistique également, les exigences en matière de durabilité deviennent si élevées que la certifi cation deviendra obligatoire à terme », dit-il.
BARRY CALLEBAUT
Le centre de distribution européen que WDP construit pour le producteur de chocolat Barry Callebaut à Lokeren et qui aura une certifi cation BREEAM Exceptionnel en est un exemple. Dans ce cas, la certifi cation n'est pas seulement initiée par le promoteur, mais également par l'utilisateur lui-même. L'entreprise chocolatière poursuit sa certifi cation conformément à sa stratégie durable Forever Chocolate. D’ici à 2025, Barry Callebaut s'est engagé à œuvrer positivement par rapport au carbone et aux forêts, à sortir plus de 500.000 producteurs de cacao de la pauvreté, à supprimer totalement le travail des enfants de sa chaîne d'approvisionnement et à utiliser des ingrédients 100 % durables.
Ce hub logistique durable (60.000 m²) fonctionnera de manière totalement neutre en
énergie, grâce notamment à des panneaux solaires. Afi n d'obtenir le label ‘Exceptionnel’, des mesures d’envergure sont prises, telles que l'utilisation de matériaux dont le cycle de vie présente un faible coût, la géothermie, des bornes de recharge pour véhicules électriques, des aménagements pour les cyclistes, etc.
DES ÉCHOS CRITIQUES ÉGALEMENT
Rudy Denutte, PDG et propriétaire de De Rocker Logistics, est plus critique. Son entreprise vient de construire un bâtiment logistique performant et durable à Zele, près de Lokeren. Un bâtiment qui stockera aussi du chocolat. « Une certifi cation BREEAM n'est pas pour tout le monde. Pour un grand projet comme celui de Barry Callebaut, c'est plus accessible que pour une PME. L'une des raisons est qu'un assesseur est présent en permanence pendant la construction et peut intervenir. Ceci a par exemple un impact sur les réunions pendant les travaux de construction. Le label et les contrôles représentent un coût considérable », explique-t-il. « Nous avons donc adopté une approche pragmatique. Nous avons appliqué et suivi au mieux les normes BREEAM. Quelles sont les attentes ? Combien de panneaux solaires devons-nous installer ? Combien consomme le refroidissement ou le chauffage ? Nous avons répondu à toutes ces questions comme si nous cherchions à obtenir une certifi cation », ajoute-t-il. « Il existe en effet de grands groupes internationaux qui demandent de plus en plus souvent la certifi cation BREEAM. Ils ont certainement un impact. Mais il y a aussi de nombreux clients qui demandent dans quelle mesure le bâtiment fonctionne de manière durable sans exiger un certifi cat », explique Denutte.
DIFFÉRENTES MANIÈRES
Serge Gregoir, PDG et propriétaire d'Eutraco acquiesce. En janvier, son entreprise a mis en service un centre de distribution de 40.000 m² (pour un total de 60.000 m² à terme) totalement neutre en énergie et en carbone. C'est l'un des tout premiers bâtiments logistiques en Belgique sans chauffage au gaz : toutes les installations, y compris le chauffage par pompes à chaleur, sont électriques. L'électricité est 100 % verte, les panneaux solaires rendront le site au moins auto-suffi sant. Le bâtiment a été construit par MG Real Estate pour Eutraco. « Le bâtiment n'est pas encore certifi é BREEAM, mais le sera dans quelques mois. Contractuellement, il faut un certifi cat Bon, mais je sais que MG Real Estate vise le Très bon », déclare Gregoir. Mais il ajoute : « La construction durable est un must absolu aujourd'hui. Il peut générer de meilleurs prix ou au moins être un argument décisif lorsque le prix du concurrent est le même. Mais le bâtiment doit-il être certifi é BREEAM ? Je n'en suis pas si sûr ». Selon lui, le certifi cat BREEAM est important pour le développeur. « L'aspect durabilité est présent dans presque tous les appels d'offres aujourd'hui. Mais BREEAM n'entre presque jamais en ligne de compte. Il existe d'autres moyens de démontrer que le bâtiment est neutre en énergie ou en carbone. D'après mon expérience, vous devez pouvoir prouver la performance CO2, mais l'instrument de mesure est moins important », déclare Gregoir.
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Le nouveau centre de distribution d'Eutraco sera certifi é BREEAM. « Mais le certifi cat est-il nécessaire ? D'après mon expérience, il faut être capable de prouver la performance CO2, mais l'instrument de mesure est moins important », explique Serge Gregoir.
PLUS FACILE À PROUVER
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Pourtant, il existe également des prestataires logistiques qui optent pour BREEAM. Par exemple, Snel Logistics Solutions construit actuellement un nouvel entrepôt à Ham, dans le Limbourg, qui sera certifi é. « J'ai remarqué que la demande de logistique durable augmente. Pourquoi ne pas immédiatement certifi er BREEAM un nouveau bâtiment ? », déclare le CEO Gert Snel. « Certes, cela coûte de l'argent, mais que représentent grosso modo 50.000 € par rapport à la valeur totale du bâtiment ? Et cet assesseur perturbe-t-il le travail ? Pas vraiment. Il passe à certains moments mais n'est pas présent en permanence. Il ne faut pas transformer ce certifi cat en tigre de papier », dit-il. « Je suis convaincu qu'à terme, nous pourrons négocier de meilleurs prix si nous prouvons noir sur blanc que le bâtiment est durable. Et c'est plus facile si vous disposez d’un certifi cat BREEAM ».
CONSTRUIRE DURABLEMENT
« Les panneaux solaires s’inscrivent dans une politique à plus large spectre »
Les 11.000 m2 de panneaux solaires de Van Moer Logistics produisent 1.500 MWh par an.
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Produire sa propre électricité verte grâce à des panneaux photovoltaïques ? Un choix qui reste rentable si l’on s’y prend bien, même en tenant compte des incertitudes. L’important est de l’intégrer dans une stratégie durable plus large. Hans Verboven, CEO de Sustacon et professeur de gestion du développement durable à l’université d’Anvers, nous explique comment s’y prendre.
Michaël Vandamme
« Comme d’autres secteurs, la logistique se dirige vers une gestion d’entreprise plus durable et tournée vers l’avenir », affi rme Hans Verboven. « Cela veut dire beaucoup de choses. Le développement durable, c’est l’excellence opérationnelle, le lean thinking, des clients, travailleurs et riverains satisfaits, mais aussi des éléments plus axés vers le futur comme les modèles circulaires. L’énergie verte et les économies de CO2 ne forment qu’un des axes d’une stratégie plus large. » « Il n’y a pas un seul chemin pour y arriver », poursuit Hans Verboven. « Tous commencent cependant par la même question : comment économiser de l’énergie ? Ensuite, il s’agit de réduire au maximum la quantité d’énergie d’origine fossile. Soit en l’achetant, soit – c’est souvent possible – en la produisant. Une éolienne ? Trop de conditions et de formalités à remplir avant d’obtenir un permis. L’énergie solaire reste de loin l’option la plus simple pour produire de l’énergie verte à grande échelle. »
INVESTISSEMENT INTÉRESSANT
Hans Verboven remarque que les panneaux solaires sont de plus en plus populaires en entreprise. Leur atout : l’espace. « La surface cumulée des toitures de leurs entrepôts est énorme, ce qui les avantage par rapport à d’autres types d’entreprises », explique-t-il. « Le photovoltaïque est donc une solution vite amortie. Cela ne veut pas dire qu’il ne faut pas y réfl échir et analyser tous les paramètres : coût de l’investissement, entretien, assurance, besoins propres en énergie. Souvent, la capacité de production dépassera ces besoins. Si l’entreprise ne peut pas utiliser ce surplus, elle doit pouvoir s’en délester via le réseau. Comment sera-t-elle rémunérée ? Nul ne le sait à moins d’avoir une boule de cristal. Mais
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« Pour moi, le photovoltaïque est un investissement judicieux. Mais ce sont le transport multimodal et la gestion de chaîne qui offrent les seules vraies perspectives en termes de stratégie durable à long terme. »
Le professeur Hans Verboven
cette incertitude ne fait pas le poids face au coût de l’énergie produite par rapport à celui de l’énergie achetée, sans oublier la valorisation du site. Chaque cas est différent, mais les technologies actuelles permettent toutes de compter sur un rendement intéressant. »
FINANCEMENT EXTERNE
Pas d’investissement sans financement. Pour beaucoup d’entreprises, c’est le principal obstacle, parfois insurmontable. Quid des panneaux solaires si les dépenses d’investissement sont déjà jugées trop élevées ? « Les entreprises se tournent de plus en plus vers le financement par des tiers », indique Hans Verboven. « Ces tiers prennent en charge le financement, mais souvent aussi l’entretien et l’exploitation. Différentes formules existent. Une des plus courantes consiste à destiner toutes les recettes, y compris les certificats verts, à cette tierce partie, contre une compensation forfaitaire pour l’entreprise. Celle-ci lui achète l’électricité dont elle a besoin, ce qui lui revient de toute façon moins cher. Ces partenariats ont souvent une durée de 15 à 20 ans, après quoi l’entreprise devient propriétaire des panneaux. »
STOCKAGE
« Ce que nous réserve l’avenir ? Difficile à dire », ajoute Hans Verboven. « Personnellement, je pense que les nouvelles possibilités en matière de stockage changeront la donne. Aujourd’hui, les surplus finissent obligatoirement sur le réseau. Dès que des systèmes de stockage performants verront le jour, une entreprise ou un parc d’activités formeront une sorte de circuit fermé. Le stockage par l’hydrogène, c’est pour bientôt. Le futur, ce sont les communautés énergétiques locales. »
STRATÉGIE DURABLE
« Les panneaux solaires ne sont qu’un seul aspect de la durabilité », insiste Hans Verboven. « Pour moi, ils sont simplement un choix d’investissement. En ce qui me concerne, ce sont le transport multimodal et la gestion de la chaîne logistique qui offrent les seules vraies perspectives en termes de stratégie durable à long terme. La coordination de la collaboration au sein de cette chaîne de valeur offre de multiples possibilités. Les prestataires logistiques doivent prendre l’initiative et trouver des synergies entre les différents maillons de la chaîne. »
Dans la pratique…
• Van Moer Logistics (Zwijndrecht) a fait installer plus de 11.000 m2 de panneaux solaires sur les toits de ses entrepôts. Ceux-ci produisent 1.500 MWh par an. Grâce à un contrat d’entretien intensif par un partenaire externe, le rendement des panneaux – constamment monitoré – atteint 97%. Environ la moitié de l’énergie produite est consommée sur place, le reste est injecté dans le réseau. Au total, l’entreprise produit 15% de l’électricité qu’elle consomme. Elle utilise aussi l’énergie produite par les panneaux photovoltaïques des entrepôts loués.
De nouveaux investissements sont prévus en 2021. • H. Essers (Genk) possède pas moins de 350.000 m² de panneaux solaires, qui produisent environ 12.000 MWh/ an. L’entreprise possède aussi des éoliennes. Au total, elle produit 45% de sa consommation d’énergie. Depuis janvier, elle mène une expérience avec deux camions équipés de panneaux solaires. Elle espère économiser 1.000 litres de diesel par an en alimentant ainsi l’électronique des véhicules.
Hans Verboven
(expert en stratégies durables)
• Titulaire de diplômes en Économie,
Langue & littérature et Philosophie des universités de Leuven, Bruxelles,
Heidelberg et de la London School of
Economics
• Professeur en Gestion du développement durable à UAntwerpen • CEO de Sustacon (www.sustacon.me), cabinet de consultance en gestion et communication du développement durable.
ENTREPÔT DURABLE FIEGE
Pour l'éclairage, le choix s’est porté sur les LED.
« Un engagement durable requiert une approche globale »
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En 2017, la rationalisation des (à l’époque) deux sites de Fiege en Belgique est allée de pair avec un engagement en faveur du développement durable. Un scénario large et surtout complémentaire a été élaboré allant du chauffage à la plantation d’une forêt en passant par l'éclairage et la production d'électricité.
Michaël Vandamme - Photos : Jeroen Willems
Jusqu'en 2017, Fiege disposait dans notre pays de deux entrepôts proches l'un de l'autre (à proximité du croisement de la N16 et de l'A12). Après une analyse coûts/bénéfi ces, il a été décidé de quitter un des sites et de développer l'autre. Cette décision a rendu possibles bien des progrès dans le domaine de la durabilité. « Il y avait une double raison à cela », déclare Christoph Verhavert, responsable RH. « D'une part, il est toujours utile de réduire les coûts. D'un autre côté, la durabilité est devenue de plus en plus importante pour notre entreprise au fi l des ans, en principe mais aussi en pratique. Aujourd’hui, cela concerne spécifi quement notre entrepôt, mais nous voulons étendre cette approche aux opérations. Cela se traduit par exemple par la consolidation des palettes, la volonté d’utiliser tout l’espace de chargement des poids lourds, la recherche d'alternatives au plastique, etc. »
APPROCHE DANS DIVERS DOMAINES
Les mesures relatives à l'entrepôt ont été adoptées alors qu'il était encore en service. « Concrètement, l'entrepôt existant a dû être entièrement rénové. En parallèle, nous avons construit 3 halls supplémentaires, ce qui nous a permis de passer de 20.000 à 50.000 m² », explique Christoph Verhavert. Cette extension / rénovation s’appuie sur une collaboration avec Goodman. « Ce n’est pas un hasard. C’était déjà notre propriétaire et ils nous ont rapidement soutenus dans notre évolution, avec la fl exibilité nécessaire en cours de processus quand il a fallu parfois ajuster certaines choses. Le fait que nous ayons notre mot à dire dans l'approche a été une réelle valeur ajoutée.
En raison de la construction de halls supplémentaires, la surface du site est passée de 20.000 à 50.000 m2 .
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Des panneaux solaires d’une puissance de 3,2 MWp seront ajoutés sur les nouveaux halls, la phase fi nale (provisoire) du projet.
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Fiege en Belgique
« Nous faisons principalement du stockage, du transbordement et de la distribution », explique Christoph Verhavert. « Nous sous-traitons la partie transport à des tiers. C'est une décision stratégique pour ne pas devoir investir dans des camions et des chauffeurs. Notons aussi quelques activités douanières, tout comme certains services à valeur ajoutée tels que le déballage ou le ré-étiquetage. »
Chiffres
Belgique
Chiffre d’affaires : 200 millions € Actif depuis : 1993 Effectif : 200 collaborateurs Implantations : une seule depuis 2017 Superfi cie : 50.000 m2 Principaux clients actifs dans le FMCG, l’e-commerce et Airline Catering Supplies
Monde
Chiffre d’affaires : 3 milliards € Activités dans 15 pays Implantations : 160 Effectif : 10.500 collaborateurs
Par exemple, nous voulions une mezzanine de 12 m sur toute la longueur, ce qui n'était pas prévu à l'origine. Plus tard, nous avons aussi demandé de la renforcer pour supporter 750 kg/m², ce qui n'était pas non plus un problème. » La société s’est ensuite engagée sur la voie de la durabilité. « Afi n de réaliser notre ambition dans le domaine du développement durable, nous avons œuvré dans divers domaines », déclare Christoph Verhavert. « Nous avons prévu une isolation supplémentaire, y compris sur le toit. Nous avons opté pour un éclairage LED et utilisé des détecteurs de mouvement. Nous avons également choisi un chauffage radiant, ce qui génère des économies par rapport aux souffl eries que nous utilisions dans le passé. Toute la surface du toit a été préparée pour l'installation de panneaux solaires et des bornes de recharge ont été prévues pour notre propre effectif, mais aussi pour les visiteurs. Au total, l'installation de panneaux solaires devrait produire 2,74 GWh d'électricité verte par an. »
DÉPLOIEMENT PAR PHASES
Un certain nombre de facteurs ont eu un impact signifi catif sur le déploiement du projet. Il fallait intervenir sur un site qui devait également rester opérationnel. « Cette situation nous a contraints de travailler par étapes », explique Verhavert. « Nous avons commencé, en 2017, par le bâtiment en tant que tel, précisément pour assurer la continuité. Notre forêt a été plantée en 2020 (voir cadre), et les panneaux solaires suivront plus tard cette année, peut-être d'ici l'été. Au début, nous n'avions pas vraiment de calendrier, mais au total cela aura pris environ quatre ans. Par ailleurs, partir d’un bâtiment existant présentait un inconvénient par rapport à notre ambition d'installer des panneaux solaires. Les 30.000 m² prévus coifferont le nouveau bâtiment, car le toit de l'entrepôt initial de 2001 n'était pas adapté pour supporter ce poids. Beaucoup de choses se sont passées dans le domaine de la durabilité en deux décennies. En 2001, les panneaux solaires n'étaient guère un must, maintenant bien. »
Forêts, abeilles et oiseaux
Des excavations sur le site de Fiege ont généré une montagne de terre. « La question était donc de savoir ce que nous pouvions en faire », déclare Christoph Verhavert. « Plutôt que d’avoir des mauvaises herbes, nous avons opté pour une véritable forêt urbaine, plus précisément pour la méthode miyawaki. Sa valeur ajoutée en termes de durabilité est très claire : ces forêts sont plus intenses et idéales pour éliminer le CO2 de l'air. Il s’agit d’un projet à long terme. Les premiers résultats apparaîtront après trois ans et il faudra environ cinq ans avant que tout n’ait totalement poussé. C'est une contribution essentielle pour rendre notre site aussi neutre que possible en CO2. Mais il ne faut pas toujours prendre des mesures drastiques, chaque petit geste compte. Par exemple, nous avons des ruches qui nous permettent de distribuer du miel à nos employés. Nous avons également placé des nichoirs à oiseaux qui, espérons-le, contribueront à la lutte contre la chenille processionnaire sur nos chênes. Aujourd’hui, quelqu'un doit venir chaque année pour régler ce problème. Mais j'espère que les oiseaux feront le travail (sourires). »
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Logistics Capital Partners Durable par nature
Promoteur et gestionnaire paneuropéen actif dans l'immobilier logistique, Logistics Capital Partners est relativement jeune, mais depuis sa fondation en 2015, la société s’est constitué un portefeuille impressionnant avec des bureaux et des projets dans 7 pays européens et des réalisations pour de grands noms tels qu'Amazon, Kering, XPO et Primark. La durabilité est l'une de ses valeurs fondamentales. Avec ou sans certifi cat.
Logistics Capital Partners gère plus d'un million de m² en actifs logistiques et mène des projets de construction pour 1,5 million de m² supplémentaires. La société est active en Belgique depuis début 2019, avec la gestion du portefeuille immobilier de Tritax Eurobox. Au début de cette année, un premier projet belge de 30.000 m² a été mené à son terme à Nivelles. Un prochain projet est déjà prévu dans le Limbourg et Logistics Capital Partners continue à chercher activement des terrains supplémentaires.
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Prêt à emménager et durable
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Le site de 6 ha de Nivelles n'était plus utilisé depuis 10 ans. Logistics Capital Partners a pris en charge les travaux de démolition, d'assainissement et les autorisations. Medi Market Group loue aujourd’hui la moitié du site et l'autre moitié est toujours disponible. Celle-ci est achevée et prête à emménager, un atout dans un monde où la demande de biens immobiliers directement disponibles dans un lieu attractif est élevée. C'est pourquoi LCP a aussi lancé la construction du dernier hall de 12.000 m² dans le parc logistique de Bornem, propriété de Tritax Eurobox. La réception est prévue pour la mi-2021. « Bien que les travaux à Nivelles n’aient pas été entrepris en pensant d’emblée à un certifi cat de durabilité, Logistics Capital Partners s’est fi xé des objectifs clairs quant à la durabilité de ses bâtiments. Ont dès lors été prévus : des panneaux photovoltaïques, un éclairage LED, des systèmes de chauffage peu énergivores, la récupération des eaux de pluie ainsi qu'une nouvelle piste cyclable et un hangar à vélos. Cette approche a fonctionné comme l’atteste une évaluation BREEAM effectuée à la demande d'un investisseur et l'obtention d'un classement ‘Très Bon’ ne poserait aucun problème. Les principes de développement de Logistics Capital Partners portent donc leurs fruits », a déclaré Kim Cornille de Logistics Capital Partners.
Le détaillant de luxe opte pour une énergie positive
Même le premier projet de Logistics Capital Partners pour Primark à Roosendaal a obtenu sans aucun problème un certifi cat BREEAM ‘Très Bon’. Logistics Capital Partners applique aussi ses propres règles strictes de durabilité au dernier projet en date de l'entreprise aux Pays-Bas : un campus de 120.000 m². Tout en examinant, en concertation avec l'utilisateur fi nal, les implémentations supplémentaires qui peuvent encore augmenter la valeur ajoutée écologique. La prise de conscience et l'intérêt grandissants des clients pour un parc immobilier logistique plus durable ont encore été confi rmés par le développement d'un DC global de 160.000 m² pour le Kering Group, connu pour des marques de luxe telles que Gucci et Yves Saint Laurent. Il dispose d'un label LEED ‘Platinum’ mais a décidé, en concertation avec l'utilisateur, d'aller plus loin et de produire davantage d'énergie verte qu'il n'en consomme. Complètement future-proof.
Le premier projet belge de Logistics Capital Partners à Nivelles vient de s'achever et est encore partiellement disponible.
Kim Cornille, Asset & Development Director Logistics Capital Partners.
MARCHÉ DE L’IMMOBILIER LOGISTIQUE
Une résilience de bon aloi
Selon le courtier JLL, l’année 2020 a été un grand cru pour l’immobilier logistique en Belgique. Les autres secteurs de l’immobilier ne peuvent pas en dire autant, ce qui accorde aux entrepôts (modernes) le statut de valeur-refuge.
Claude Yvens
“La réorganisation brutale et nécessaire de nombreuses chaînes d’approvisionnement a fait exploser le nombre de contrats de location puisqu’il s’agissait souvent de trouver à court terme des solutions d’entreposage supplémentaires, quitte à se rabattre sur des entrepôts moins performants”, estime Walter Goossens (Head of Industrial and Logistics Agency chez JLL Belgium).
UN MARCHÉ TRÈS ‘COURT-TERMISTE’
Les chiffres parlent en effet d’eux-mêmes : le marché logistique est le seul à présenter des chiffres de prise en occupation supérieurs en 2020 par rapport à 2019 (976.929 m2, soit une progression de 6 %), là où le secteur semi-industriel, par exemple, a baissé de 13 %. Ce sont surtout les centres de distribution de plus de 20.000 m² et les bâtiments de petite surface qui ont tiré le marché vers le haut. Autre particularité : 85 % des surfaces ont fait l’objet d’un contrat de location, alors que la moyenne de ces cinq dernières années était de 57 % seulement. C’est une conséquence logique de la rapidité avec laquelle il a fallu(ré) organiser certaines chaînes d’approvisionnement en pleine pandémie. Le volume des acquisitions, par contre, a fortement chuté, passant de 351.000 à 142.000 m2. Autre baisse (mais il s’agit là d’un corollaire au constat précédent) : les transactions relatives à des bâtiments construits sur mesures (‘build-to-suit’) ont baissé de 18 % en un an.
Ces 48.900 m2 d’entrepôts installés à Genk ont eu la particularité d’avoir été loués deux fois la même année.
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C’est dans le port de Gand que se lance le plus grand projet immobilier belge consacré à la logistique.
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Les axes qui ont le mieux profité de cette situation sont Anvers-Gand d’une part et Anvers-Bruxelles-Nivelles d’autre part, alors que l’on note une baisse assez sensible des prises en occupation dans le Limbourg et sur l’axe wallon, un phénomène que Goossens attribue au manque de bâtiments disponibles entre Liège et le Hainaut. Les chiffres analysés par JLL sont en outre un peu biaisés par le fait qu’un même bâtiment a fait l’objet de deux transactions la même année (Stobart, puis VAB/Koopman à Genk sur 48.900 m2). D’autre part, les investissements réalisés pour compte propre ne sont pas inclus. Un groupe très actif comme Weerts, par exemple, n’est mentionné que pour les 21.000 m2 achetés au premier trimestre à Tongres, mais pas pour les presque 80.000 m2 construits pour WSC à Liège (45.000 m2 au Trilogiport et 33.500 m2 à Milmort), ni les 75.000 m2 construits par sa branche ‘immobilière’ pour le compte de Kuehne + Nagel à Beringen. On peut en dire autant pour les 50.000 m2 construits par H.Essers à Gand JLL souligne aussi un changement durable, non conjoncturel, sur le marché de l’immobilier logistique : à côté des grands centres de distribution mono- ou multi-clients, la demande glisse aussi vers des bâtiments plus petits, beaucoup plus adaptés à une fonction spécifique de la supply chain ; on pense en particulier aux centres de distribution urbains, aux plates-formes de fulfillment et aux bâtiments cross-dock. JLL note enfin que la Belgique commence enfin à céder à une mode qui s’est déjà largement répandue aux Pays-Bas, à savoir les entrepôts sur deux étages. Deux projets en cours répondent à cette définition : le futur centre de tri de DPD à Vilvorde (un bâtiment construit par Montea) et le futur centre de distribution de Cebeo à Tournai. Enfin, le taux de vacance est historiquement bas : 1,5 % des entrepôts construits sont actuellement disponibles sur le marché, et ce chiffre tombe même à 1,2 % entre Anvers et Bruxelles. Après deux années plus calme, ce chiffre amène certains investisseurs à revenir sur le marché des projets purement spéculatifs. Le meilleur exemple en est le projet Ghent Logistic Campus mené à Gand par Groep Heylen sur un terrain de 25 hectares. Ces projets spéculatifs pourraient permettre de doubler purement et simplement la surface nouvellement bâtie en 2021. Sur ce plan, après une année 2019 faible (266.000 m2), 2020 avait déjà été marqué par une forte progression (497.000 m2 construits), et on peut s’attendre à voir ce dernier chiffre doublé en 2021. Par contre, selon Walter Goossens, la première tranche du projet Lingang à Zeebruges (début des travaux prévus au 1er trimestre 2021) ne seront pas spéculatifs, contrairement à ce qui était supposé. Sera-ce suffisant pour faire revenir le taux de vacance à 5 %, valeur considérée comme garante d’un marché sain ? Et pour stopper l’inflation qui a frappé en particulier l’axe wallon en plus du triangle d’or Anvers-BruxellesGand ? Cela, c’est en grande partie la vigueur de l’économie post-corona qui en décidera…
« L’immobilier logistique est un des gagnants d’une année ‘Covid’. »
Walter Goossens (JLL)
Principales transactions 2020
• 150.000 m2 pré-loués par X2O et Overstock Home & Garden à
Evergem (investissement de WDP via une joint venture 71/29 créée avec les futurs occupants, inauguration prévue en 2022) • les 59.760 m2 pris en occupation par
Eutraco chez MG Real Estate à Willebroek et inaugurés à la mi-décembre 2020
• 48.900 m2 pour VAB Fleet Services à
Genk (redéveloppement du bâtiment qui était loué par Stobart pour Nike, et sera géré pour VAB par Koopman) • location de 34.000 m² par Eutraco dans la zone Tri Access Logistics à
Willebroek, en plus de l’achat de 22.000 m² à Sint-Niklaas
• 28000 m2 pour le nouveau campus
Pharma de DHL à Lot (un développement de MG Real Estate qui devrait être inauguré au 3e trimestre 2021) • 23730 m2 pour Bleckmann à Evergem • 22000 m2 pour Tailormade Logistics à Courcelles (ex-site Cora) • cinq transactions entre 13.500 m² et 27.000 m² à mettre à l’actif de DPD
Belgium, dont le nouveau centre de tri à Vilvorde construit par Montea et un bâtiment de 27.000 m2 à Puurs.
Projets 2021/2022
• le Ghent Logistic Campus de Groep
Heylen sur 150.000 m² • 60.000 m2 à construire par Jost Group au Trilogiport de Liège (30.000 m2 dans un premier temps, le reste à lancer dans une seconde phase) • Cebeo va faire construire un centre de distribution de 53.800 m² dans la zone industrielle de Tournai-Ouest 3 sur un terrain de 12 hectares
• un nouveau développement de 31.966 m2 pour Van Moer Logistics à Evergem (livraison prévue au 4e trimestre 2021) • la poursuite du redéveloppement de l’ex-site Ford à Genk
• l’achèvement du centre de distribution de Callebaut à Lokeren.