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Focus • ZF plus globalisé que jamais

ZF, plus globalisé que jamais

L’intégration de Wabco dans le groupe ZF s’achève en 2021 et confère à la division ZF Aftermarket l’activité véhicules autonomes et innovation digitale. Philippe Colpron, ancien responsable de la division Aftermarket Wabco, devient tout naturellement le vice-président de la nouvelle entité. Lors d’une conférence de presse, il a exposé la stratégie du groupe, désormais plus global que jamais.

Avec la finalisation de l’intégration de Wabco dans ZF, de nouvelles structures et répartitions de compétences se sont faites, à l’image de la création début 2022 de l’entité ZF Commercial Vehicules Solutions. À la base, il y a 3 lignes de produits dans le groupe : l’automobile (véhicules légers et utilitaires), les véhicules industriels (transport de marchandises et de voyageurs) et les applications industrielles (marine, agricole, éolien). Fin 2021, ZF a conclu un partenariat avec CATL, basé en Chine mais à portée mondiale, afin d’effectuer le service après-vente et la maintenance des packs de batteries du géant chinois. « Pour ZF, c’est une opportunité de mieux comprendre, et apprendre des batteries de traction », confie Philippe Colpron, vice-président de ZF Aftermarket monde.

Thermique et électrique côte à côte

Si l’appellation est contre-intuitive et peut prêter à confusion, l’activité ZF Aftermarket a la responsabilité commerciale des véhicules autonomes et de l’innovation digitale. Un domaine où l’avancée des connaissances et le développement de ces systèmes sont confrontés à des exigences de plus en plus fortes en matière de cybersécurité •••

Philippe Colpron, vice-président de ZF Aftermarket.

d’information et de consentement des utilisateurs (le fameux RGPD européen). Mais il y a aussi des enjeux majeurs, que rappelle Philippe Colpron : « Face aux constructeurs, le libre choix est un critère fondamental pour le marché des indépendants ». Cela concerne bien sûr les pièces, mais aussi tous les systèmes de diagnostic. Quant à l’avenir des ateliers avec l’émergence des véhicules électriques, le vice-président se veut rassurant : « Les deux types de motorisation [thermique et électrique, N.D.L.R.] vont cohabiter pendant au moins 20 ans ». Confirmation de cette affirmation par un rapide inventaire industriel : « ZF dispose de 22 usines de reconditionnement et rénovation de boîtes de vitesses, qu’il s’agisse de boîtes manuelles, robotisées ou automatiques. Cette activité est également étendue aux freins et étriers de freins, ainsi qu’aux boîtiers électroniques. Cette activité pose toutefois des questions très particulières en matière de logistique inversée ».

La formation manque d’effectifs

Le sujet de la formation est plus que jamais crucial, car l’évolution vers l’électromobilité n’exclura pas les moteurs thermiques. Il faut ajouter des compétences, et sans perdre les anciennes. Pour pérenniser les réseaux, Philippe Colpron insiste sur la formation, notamment pour les systèmes d’aides à la conduite, les fameux ADAS (Advanced Driver Assistance Systems). Calibrage et paramétrages sont fondamentaux, même après un simple changement de pare-brise ou de pare-chocs. Face aux sous-effectifs dans les ateliers, il devient difficile de trouver des disponibilités parmi les équipes pour suivre ces formations, et les équipes de ZF Aftermarket le déplorent : « En France, de nombreuses formations sont annulées, dans les groupements, dans les réseaux de pièces de rechange, faute d’effectifs ». Un cercle vicieux, qui à long terme pourrait être toxique pour les ateliers indépendants. Selon le vice-président, cela est particulièrement marqué en France, nos voisins européens suivant davantage ces formations aux nouvelles technologies. D’autres options de développement pour les ateliers sont promues par ZF : « Les nouveaux partenariats digitaux [à l’image de celui entre ZF Transics et Goodyear Dunlop Tires

Europe, N.D.L.R.] sont là pour préserver le marché de la rechange indépendante ».

Quel avenir pour les ateliers?

À la question de savoir s’il faut s’attendre à un développement ou à une contraction du marché de l’après-vente, Philippe Colpron s’amuse en regrettant de ne pas avoir de boule de cristal, mais il relève tout de même les indices suivants: « Les réflexions sont en cours, nous observons le marché. Il y aura probablement une contraction sur certains composants du véhicule et un accroissement pour d’autres. Les pièces de roulement, rotules et trains roulants devraient voir leur activité rechange se développer du fait des masses plus élevées des véhicules électrifiés ». En outre, « le vieillissement du parc crée une hausse naturelle de l’activité de rechange. Il faudra voir les calendriers d’introduction (phase in) et de retrait (phase out) industriels en fonction des composants ». Il confirme une tendance à long terme: « Avec le développement de la télématique et des services associés, il y aura une meilleure anticipation des immobilisations. Ce marché est encore très faible. Ce qui va créer de la valeur, c’est l’applicatif: allons exploiter la connectivité pour avoir une approche complète qui ne se limite pas aux pneus, freins, voire les services comme les assurances. Il faut croiser et combiner les informations ». Philippe Colpron revient sur le partenariat entre ZF et Goodyear Dunlop : « Cela réduit les coûts d’équipement, d’installation. Le portail commun facilite le travail quotidien pour le client et les développements ». Le loueur TIP serait client test pour ce service, avec des fonctionnalités inédites telles que le diagnostic à distance de l’EBS. Un outil précieux pour remonter les informations sur l’état de fonctionnement des semi-remorques.

Quelles perspectives pour le marché du véhicule industriel neuf?

Avec l’électrification, on voit fleurir une pléiade de « marques Ikea », ces start-up qui assemblent des composants achetés sur étagère. Pour ZF Aftermarket, c’est une aubaine, comme le confirme Philippe Colpron: « Ces nouvelles marques auront des dépendances beaucoup plus fortes vis-à-vis des sociétés comme les nôtres. En outre, elles n’auront pas les moyens d’avoir de réseau en propre et devront établir des partenariats avec des groupements ou des indépendants. Cela crée une opportunité pour tout le monde. Il y a de nouveaux types de partenariats à établir, c’est une très bonne chose pour le marché des indépendants ». Sur les perturbations qui affectent le marché du neuf, que ce soit en termes de production ou de livraison, il se fait philosophe (ou résigné) : « L’adversité, il y en a toujours eu. Cela ajoute une contrainte pour les indépendants. Il est difficile de donner une réponse péremptoire du fait de la diversité des utilisateurs finaux, le marché est très fragmenté. La production des camions, pour au moins 2 ans, sera très liée à la capacité à obtenir les composants électroniques. À long terme, il y a une croissance naturelle qui peut être anticipée du fait de l’augmentation du nombre de véhicules plus âgés. Il y a aussi des opportunités importantes avec le rétrofit, et cela bien davantage sur les véhicules industriels que sur le marché des voitures particulières en raison de la valeur du matériel ». Philippe Colpron tente une analyse prospective plus fine sur ce sujet: « Les ZFE-m entraîneront une spécialisation du transport et une ubérisation de celui-ci (on le constate déjà avec les vélos cargos et la logistique du dernier kilomètre). Les grands groupes auront un rôle accru en raison des investissements massifs à faire vers l’électrification. La vraie question se pose pour les sous-traitants. Ce que l’on peut retenir de tout ceci, c’est que la linéarité de l’évolution n’existe plus ».

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