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PRENDRE EXEMPLE SUR LA « CONCEPTION UNIVERSELLE DES APPRENTISSAGES »

L’école est bien l’endroit qui accueille de manière obligatoire, tous les enfants de 3 à 16 ans, peu y déroge. La loi pose le cadre dans le code de l’éducation : « le service public d'éducation contribue à l'égalité des chances et à lutter contre les inégalités sociales et territoriales en matière de réussite scolaire et éducative. Il reconnaît que tous les enfants partagent la capacité d'apprendre et de progresser. Il veille à la scolarisation inclusive de tous les enfants, sans aucune distinction ».

2005 et 2013 sont des étapes de l’évolution du cadre légal qui ont vu le système scolaire remplacer le mot Intégration par le mot Inclusion. Le ministère a d’abord changé des sigles : les CLIS, Classes pour l’intégration Scolaire, sont devenues les Classes pour l’Inclusion scolaire, mais ça n’a pas suffi à changer la donne. Alors l’acronyme ULIS, pour Unité localisée pour l’inclusion scolaire, est apparu. Mais ça ne suffit toujours pas…

Julia Midelet, auteure, et formatrice CAPPEI (Certificat d'Aptitude Professionnelle aux Pratiques de l'Éducation Inclusive) en Inspé répond à nos questions.

QDE. Comment de votre place de chercheuse observez-vous cet avènement de l’école inclusive ? Changer les sigles suffirait-il à opérer « magiquement » un changement ? Pourquoi ce sujet est-il une source de difficultés professionnelles, et surtout comment atténuer, mettre en œuvre l’inclusion en limitant les souffrances des enfants, des familles, des professionnels ?

Julia Midelet

Changer de sigle ne suffit pas si les enjeux ne sont pas clairement explicités aux différents professionnels engagés autour de l’apprenant.

Je fais le choix de vous présenter trois enjeux et ce sont ces mêmes enjeux qui sont utilisés dans les différentes formations auxquelles je participe : auprès des futurs enseignants, auprès des futurs enseignants spécialisés, auprès des futurs ergothérapeutes ou encore auprès de formateurs en entreprise. Il s’agit ici de mettre en avant la nécessité de faire culture commune c’est-à-dire d’avoir un langage commun, des points de repères qui permettent un réel travail « ensemble »

Tout d’abord il est important de s’accorder sur le sens des expressions et particulièrement les différences inhérentes aux deux expressions souvent utilisées l’une pour l’autre comme si elles étaient équivalentes : école inclusive ou éducation inclusive ?

Parler d’école inclusive veut dire parler de l’élève, scolarisé au sein d’un établissement scolaire. Les enseignants et les personnels de l’établissement scolaire sont amenés à travailler autour du projet scolaire du jeune. Ce serait donc particulièrement les enseignants les plus à même d’accompagner le jeune sur cette voie inclusive.

Parler d’éducation inclusive est plus large au sens où il s’agit de considérer tous les lieux et temps où le jeune est un apprenant (à la crèche, au périscolaire, sur le temps de restauration, dans la cour de récréation, en classe mais aussi dans les espaces sportifs et culturels). De nombreux professionnels de tous horizons (et agissant sur la sphère personnelle, éducative, sociale, scolaire, médicale…) sont dans ce cas présent pour accompagner le jeune dans la construction de son parcours de formation. Une dynamique collective se doit de se mettre en œuvre entre les différents acteurs.

Un deuxième enjeu serait par conséquence de s’interroger sur les conditions de la coopération interinstitutionnelle et intercatégorielle. La nécessité de faire culture commune s’appuie sur trois piliers :

- Savoir coopérer : développer des compétences de travail, connaître les différents professionnels et leurs champs d’intervention réciproques ainsi que leurs référentiels de formation

- Vouloir coopérer : accepter de rendre compte de sa pratique, accepter le regard de l’autre et aller voir l’autre professionnel dans sa pratique, partager des outils, partager des points de vue

L'école inclusive : un défi pour l'école

Cet ouvrage de référence répond aux interrogations et accompagne les différents acteurs pour une intégration et un épanouissement de tous les élèves. Il offre des perspectives nouvelles et indispensables à l’école d’aujourd’hui. Les ensei-

- Pouvoir coopérer : construire des espaces et des temps de travail commun (pour l’enseignant, que cela fasse partie de son temps de service serait important car dans d’autres professions c’est le cas)

- En formation initiale et continue, s’interroger sur ce qui est commun aux différents champs professionnels et former ensemble ces professionnels de divers secteurs et statuts est très enrichissant et permettrait d’être plus à même de cerner les enjeux de l’accompagnement d’un jeune sans en arriver à un « empilement » des aides qui peut vite devenir illisible tant pour les professionnels que pour le jeune et sa famille.

Un troisième enjeu serait de s’interroger sur la mise en œuvre de deux concepts mis en avant notamment dans la loi du 11 février 2005 : la compensation et l’accessibilité. Si historiquement c’est la compensa- gnants et les formateurs trouveront dans cette nouvelle édition actualisée des analyses, des référentiels, ainsi que des outils utilisables au quotidien et adaptables à chaque contexte éducatif. tion qui a majoritairement été mise en œuvre pour permettre à un apprenant de suivre la classe avec les autres, cela revient à penser une individualisation de la scolarisation. Or, il est intéressant de penser une accessibilité plus globale des situations d’apprentissage en mobilisant par exemple les principes de la Conception Universelle des Apprentissages (CUA) développée par les Québécois. Pour le dire simplement, l’idée est d’anticiper au moment de la construction des séquences d’apprentissage, les obstacles possibles et de généraliser les aides pensées. Lorsque des adaptations sont proposées pour un jeune en particulier, il serait intéressant de se demander si ces adaptations ne pourraient pas, finalement, servir à tous les apprenants et les mettre en œuvre sans attendre que l’obstacle se révèle.

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