Les crises se multiplient – la pauvreté croît à nouveau

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« Les crises multiples actuelles affectent durement les populations locales et provoquent une insécurité alimentaire très importante qui met en danger des vies humaines. Nous demandons à la Suisse de se montrer solidaire en tant que membre de la communauté internationale. »

Crises multiples dans le monde : l’exemple de l’Éthiopie

Les crises se multiplient –la pauvreté croît à nouveau

Une crise multiple aggrave l’insécurité alimentaire mondiale

En bref La pauvreté augmente partout dans le monde et, pour la première fois depuis sa création en 1990, la courbe de l’indice de développement humain (IDH) est en baisse.

L’Éthiopie est un bon exemple de la complexité de la crise multiple actuelle. Le pays a longtemps été considéré comme porteur d’espoir, véhiculant une image positive d’une évolution visant à l’éradication de la pauvreté. Mais la pandémie a ensuite provoqué un revers. La persistance d’une inflation élevée, l’augmentation de la dette extérieure, une grave sécheresse, la guerre civile dans les régions du nord et les conflits armés dans d’autres régions du pays ont entraîné une aggravation massive de l’insécurité alimentaire.

Avec la crise multiple actuelle, non seulement le besoin de soutien financier est devenu plus important, mais l’écart entre ce dernier et le financement effectivement disponible n’a cessé de se creuser. L’Éthiopie n’est pas seule dans ce cas ; de nombreux autres pays du Sud mondial sont également concernés.

Par cette prise de position, Caritas Suisse demande que la Suisse augmente massivement les moyens financiers qu’elle consacre à lutter contre la crise alimentaire, et qu’elle renforce la coopération internationale. En aidant les pays concernés à se désendetter et en luttant résolument contre la crise climatique, la Suisse peut en outre contribuer à contrecarrer leur évolution négative.

humain (IDH) a baissé. Le Programme alimentaire mondial (PAM) et l’Organisation mondiale de l’alimentation (FAO) tirent également la sonnette d’alarme et préviennent que la faim a fortement augmenté dans le monde. Selon les estimations des organisations, entre 702 et 828 millions de personnes étaient touchées par la faim dans le monde en 2021. 1 Le nombre de personnes en situation d’insécurité alimentaire aiguë est passé de 135 millions à 193 millions entre 2019 et 2021. 2 Les populations d’Afrique subsaharienne sont particulièrement touchées.

La pandémie de Covid-19 a ébranlé l’économie mondiale, entraînant des ruptures dans les chaînes d’approvisionnement et partant, des incertitudes sur les prix des marchés mondiaux. Dans différents pays, les confinements et autres restrictions ont provoqué une stagnation économique. À cette crise économique sont venus s’ajouter des conflits armés et des guerres régionales, tout cela encore aggravé par la crise climatique mondiale. Enfin, la situation s’est encore considérablement aggravée dans de nombreux pays du Sud mondial avec l’éclatement de la guerre en Ukraine au printemps 2022, provoquant partout dans le monde une nouvelle augmentation des prix des céréales, des engrais et des carburants. L’inflation a fortement augmenté, et l’endettement des pays a explosé.

Après le changement de millénaire, la communauté internationale a obtenu quelques résultats dans la lutte contre la pauvreté et la réduction de la faim dans le monde. Pendant un certain temps, on a pu penser que l’on allait atteindre les objectifs ambitieux de développement durable que les États membres de l’ONU s’étaient fixés en 2015 dans le cadre de l’Agenda 2030. L’agenda prévoit notamment d’éradiquer l’extrême pauvreté partout dans le monde, de venir à bout de la faim et de parvenir à la sécurité alimentaire d’ici 2030.

Mais la pandémie de Covid-19 a complètement changé la donne : dans de nombreuses régions du monde, la pauvreté a fortement augmenté. L’évolution positive des années précédentes a été stoppée, ou même, on est revenu en arrière. Les chiffres de la Banque mondiale et du Programme des Nations unies pour le développement (PNUD) sont explicites : partout dans le monde, l’extrême pauvreté est repartie à la hausse et le développement humain a reculé. En 2020, pour la première fois depuis sa création en 1990, l’indice de développement

Jusqu’ici, la crise alimentaire était principalement due à une répartition inéquitable et à des prix trop élevés. Globalement en effet, il n’y a pas de pénurie alimentaire, mais les denrées alimentaires sont trop chères pour de nombreuses personnes, ou alors elles n’y ont pas accès. Mais étant donné l’augmentation actuelle des prix des engrais et des carburants utilisés dans l’agriculture, il est à craindre que l’on vive une pénurie des denrées alimentaires dans les mois à venir. Si les agriculteurs utilisent moins d’engrais chimiques sans prendre en parallèle des mesures pour maintenir leurs rendements, ceux-ci risquent de s’effondrer. Il est d’ores et déjà prévisible que ce sont les personnes les plus pauvres qui, à nouveau, souffriront le plus de cette pénurie de denrées alimentaires. L’équité alimentaire doit donc être l’objectif premier.

Caritas demande que la Suisse contribue activement, de sa propre initiative et en collaboration avec d’autres États et les institutions des Nations unies, à la lutte contre la crise multiple actuelle dans les pays du Sud. Dans cette prise de position, nous prenons l’exemple de l’Éthiopie pour montrer les conséquences dramatiques que peut avoir l’accumulation de ces différentes crises. Et nous prenons exemple de notre coopération internationale dans ce pays pour mettre en évidence les moyens d’obtenir des changements sur place, à court terme par le biais d’interventions d’aide humanitaire et à plus long terme grâce à des projets de coopération au développement qui permettent d’assurer l’avenir de la population locale.

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Inflation et crises multiples en Éthiopie

L’Éthiopie est l’un des pays du Sud les plus touchés par la crise multiple actuelle. La persistance d’une grave sécheresse, d’une inflation élevée, l’augmentation de la dette extérieure, la guerre civile dans les régions du nord et les conflits armés dans d’autres régions du pays ont entraîné une aggravation massive de l’insécurité alimentaire. La fragilité du pays due aux conflits armés est de plus en plus grande.

La situation actuelle en Éthiopie met en évidence un renversement d’évolution de ces dernières années dans le pays, et elle est également emblématique de la crise multiple dans laquelle se trouvent actuellement de nombreux pays du monde. Pendant longtemps, l’Éthiopie a été considérée comme une terre d’espoir pour l’Afrique. L’économie nationale du pays a connu une croissance régulière au cours des années qui ont suivi le changement de millénaire. Le changement de gouvernement en avril 2018 a également été porteur d’espoir puisque la communauté internationale considérait que les nouveaux dirigeants politiques éthiopiens pouvaient être des partenaires fiables. Peu après leur prise de pouvoir, ces derniers ont conclu un accord de paix avec leur voisin érythréen (en juillet 2018), mettant fin à des

années de guerre frontalière entre les deux pays. Le Premier ministre éthiopien Abiy Ahmed a d’ailleurs reçu le prix Nobel de la paix en 2019.

Les espoirs suscités par les avancées dans le pays ne sont plus guère perceptibles aujourd’hui. Avec plus de 120 millions d’habitants, l’Éthiopie est le deuxième pays le plus peuplé d’Afrique. Bien que son économie ait connu la croissance la plus rapide de la région ces dernières années, le revenu annuel moyen par habitant n’était que de 925 dollars en 2021. C’est cent fois moins que le revenu par habitant en Suisse.

Malgré la croissance économique, une grande partie de la population éthiopienne vit dans la pauvreté. Le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD) et l’indice de pauvreté multidimensionnelle recensent différents facteurs de pauvreté, ce qui permet de comparer la situation entre les pays. Sont notamment pris en compte les trois facteurs suivants : santé, éducation et niveau de vie. Selon cet indice, 68,7 % de la population éthiopienne était touchée par la pauvreté multidimensionnelle en 2019. L’Éthiopie faisait ainsi partie des huit pays les plus pauvres d’Afrique. 3

de pauvreté multidimensionnel des Nations unies*

de la population touchée par la pauvreté multidimensionnelle en tenant compte des trois facteurs que sont la santé, l’éducation et le niveau de vie)

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L’Éthiopie en chiffres (2021) La Suisse en comparaison Population totale 120 millions 8,7 millions Produit intérieur brut par habitant 925 USD 91 992 USD Classement dans l’Indice de développement humain (IDH) des Nations unies (sur un total de 191 pays) 175 1 Espérance de vie** 65 ans 83 ans Taux de mortalité infantile des moins de 5 ans (pour 1 000 naissances)** 49 3 Accès à l’électricité (pourcentage de la population)** 51 % 100 % Indice
68,7 % n.a. Émissions de CO 2 (tonnes par habitant et par an)*** 0,2 t 14 t
(proportion
* Seuls les chiffres de 2019 sont disponibles ; ** Seuls les chiffres de 2020 sont disponibles ; *** Les émissions de CO2 de la Suisse tiennent également compte des émissions produites à l’étranger par les biens et services importés. Pour l’Éthiopie, ces chiffres ne sont pas disponibles et l’on ne présente donc que les émissions nationales.. Sources : Banque mondiale, données nationales sur l’Éthiopie et la Suisse, PNUD Rapport sur le développement humain 2021–22, ainsi que MyClimate Figure 1 : Chiffres clés sur l’Éthiopie et comparaison avec la Suisse

Par rapport à la situation d’il y a une vingtaine d’années, le pays avait certes progressé dans la réduction de la pauvreté. En 2016 encore, la part de population touchée par la pauvreté multidimensionnelle était de 83,5 %. En 2011, ce chiffre était de 88,4 %. La pauvreté dans le pays était donc en voie de diminution. Précisons que les chiffres actuels de la pauvreté se réfèrent à la période précédant l’apparition de la pandémie de Covid-19 et la guerre civile dans les régions septentrionales du Tigré, de l’Amhara et de l’Afar. Il n’existe pas encore de données tenant compte de ces facteurs. Comme le PNUD l’écrit lui-même dans son rapport sur la pauvreté multidimensionnelle, on peut imaginer que les progrès réalisés ont été annulés dans les années suivant 2019.

Stagnation du développement, augmentation de la faim

D’autres enquêtes statistiques menées par des organisations multilatérales confirment cette hypothèse et indiquent que l’Éthiopie a vu son évolution positive effectivement stoppée, voire inversée, à partir de 2019. Par exemple l’indice de développement humain (IDH), également relevé par le PNUD, en arrive à cette conclusion. Il prend en compte pour son calcul des facteurs tels que l’espérance de vie, l’éducation et le revenu national brut.

En 2021, l’Éthiopie était classée 175e sur 191 pays étudiés. Alors qu’au changement du millénaire, le pays avait réalisé des progrès significatifs dans tous les domaines comptant pour le calcul de l’indice, on constate une stagnation depuis 2019.

Les statistiques des organisations internationales observant la faim en Éthiopie dressent également un tableau sombre de la situation. Selon le Programme alimentaire mondial, on estime qu’en 2022, 22,6 millions de personnes souffraient d’insécurité alimentaire dans le pays. 4 En décembre 2022, l’organisation onusienne a averti : 240 000 enfants du pays risquaient de mourir si l’on ne traitait pas leur malnutrition de manière urgente. En 2022, la situation s’est particulièrement aggravée dans les régions du nord du pays touchées par la guerre civile, ainsi que dans les régions du sud et du sud-est qui souffrent de la sécheresse. On estime que, seulement dans la zone de sécheresse, 18,1 millions de personnes sont concernées par l’insécurité alimentaire.

Différents facteurs reflétant de manière exemplaire les dimensions de la crise multiple mondiale participent actuellement de la situation tendue en Éthiopie. Parmi ces facteurs, citons notamment l’inflation et la hausse des prix des denrées

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Figure 3 : Dimensions de la crise multiple
2021 2000 2005 2010 2015 2020 ■■ HDI mondial ■■ HDI Éthiopie Source : PNUD, divers rapports sur le développement humain. 0.8 0.7 0.6 0.5 0.4 0.3 0.2 0.1 0 Crise
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Figure 2 : Évolution de l’indice de développement humain depuis les années 2000
multiple
Sécheresses
Inflation et flambée des prix des denrées alimentaires
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persistantes
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Guerre civile et conflits
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Perte de change et endettement extérieur

alimentaires qui en découle, la perte de change et la dette extérieure, la sécheresse prolongée et les conflits armés à l’intérieur du pays. Nous discuterons de ces quatre facteurs dans le détail plus bas.

1. Inflation et flambée des prix des denrées alimentaires

Avec le début de la guerre en Ukraine, les prix de plusieurs denrées alimentaires et produits non alimentaires de base –céréales ou huiles végétales, carburants fossiles et engrais chimiques – ont fortement augmenté dans le monde (voir aussi la prise de position de Caritas Suisse sur la crise multiple, 2022). En 2022, partout dans le monde, on a dû dépenser de plus en plus pour se nourrir, se chauffer et se déplacer, y compris en Europe occidentale et en Suisse. La population touchée par la pauvreté est celle qui a le plus souffert de ces hausses de prix.

En Suisse, le prix des denrées alimentaires a augmenté d’environ 4 % par rapport à l’année précédente ; les personnes vivant en Éthiopie ont dû faire face à une inflation dix fois plus élevée. Selon l’indice des prix à la consommation (CPI), relevé mensuellement par le service éthiopien des statistiques, l’inflation des produits alimentaires a atteint plus de 40 pour cent en juin et juillet 2022 par rapport aux mêmes mois un an plus tôt. Des collaborateurs locaux de Caritas Suisse rapportent que pour certains produits et dans certaines régions, les prix ont augmenté encore plus que ce qui a été officiellement déclaré par les autorités éthiopiennes.

Dans l’IPC, on mesure les prix des biens sur la base de paniers de biens standards. Les statistiques sont comparables à l’indice suisse des prix à la consommation établi par l’Office fédéral de la statistique. En Éthiopie, les prix des céréales et des huiles végétales ont connu une hausse particulièrement marquée. Les produits importés ont également augmenté à cause de l’explosion des coûts de transport. Comme près des deux tiers de la population éthiopienne sont touchés par une pauvreté multidimensionnelle, ces hausses de prix ont directement entraîné une crise majeure. Selon les données d’Our World of Data, les Éthiopiens consacrent en moyenne

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Apr 21 Mai 21 Jun 21 Jul 21 Aug 21 Sep 21 Okt 21 Nov 21 Dez 21 Jan 22 Feb 22 Mär 22 Apr 22 Mai 22 Jun 22 Jul 22 Aug 22 Sep 22 Okt 22 Nov 22 Dez 22 45 40 35 30 25 20 15 10 5 0 -5 ■■ Éthiopie food ■■ Éthiopie total ■■ Äthiopien : Éthiopie non food ■■ Suisse total ■■ Suisse food Sources : Indice suisse des prix à la consommation de l’OFS et Consumer Price Index (CPI) de l’Ethiopian Statistics Service.
Figure 4 : Taux de variation des prix en Suisse et en Éthiopie par rapport aux mêmes mois de l’année précédente (%)

plus de 40 % de leurs revenus à l’alimentation. 5 Pour la population touchée par la pauvreté dans les régions rurales, les collaborateurs locaux de Caritas Suisse estiment que ce pourcentage est supérieur à 80 %, voire plus dans les cas extrêmes. Dans les régions où Caritas mène des projets, nos collaboratrices et collaborateurs ont été témoins de la manière dont les hausses de prix ont directement entraîné une crise alimentaire majeure pour la population pauvre. Lorsque le prix des aliments est soudainement multiplié, les gens ne peuvent tout simplement plus manger.

Évolution des prix et dépendance du marché des céréales

Les principaux aliments de base de l’Éthiopie sont le teff, le maïs, le sorgho et le blé. Le teff est un sorgho nain à partir duquel est fabriqué le plat national appelé Injera. Les céréales sont l’aliment de base le plus important des classes moyennes vivant dans les villes, notamment à Addis-Abeba. Le maïs est moins cher que le teff ; c’est surtout une source de nourriture pour les populations les plus pauvres, notamment en dehors des villes. Toutes les céréales ont vu leurs prix augmenter exponentiellement en septembre 2022 par rapport aux cinq années précédentes. Le prix du teff a augmenté de 63 pour cent, celui du blé de 110 pour cent et celui du maïs de 131 pour cent. 6 On comprend bien pourquoi les hausses de prix représentent un grand danger, en particulier pour la sécurité alimentaire de la population éthiopienne touchée par la pauvreté.

Le blé fournit environ 10 pour cent des calories consommées par la population éthiopienne et joue un rôle plutôt secondaire dans le régime alimentaire local, comparé au teff et au maïs. Mais c’est le blé qui permet de mettre en évidence les défis de l’approvisionnement alimentaire en Éthiopie et la dépendance du pays vis-à-vis de l’économie mondiale. Selon la base de données des Nations unies sur le commerce international, UN Comtrade, l’Éthiopie a importé environ 1 million de tonnes de blé par an ces dernières années, pour une valeur d’environ 400 millions de dollars. Cela correspond à environ un quart de la consommation nationale de blé. 7 En 2021, les importations de blé de l’Éthiopie s’élevaient même à environ 1,8 million de tonnes pour une valeur de près d’un milliard de dollars américains.

L’Ukraine et la Russie faisaient partie des principaux exportateurs de blé pour l’Éthiopie, aux côtés des États-Unis et de la Roumanie. En 2021, plus de 40 % du blé importé en Éthiopie provenait de la région de la mer Noire. 8 Comme d’autres pays du Sud, c’est sur l’importation du blé que l’Éthiopie a subi indirectement les conséquences de la guerre en Ukraine. Toutefois, comme le blé joue un rôle secondaire dans l’approvisionnement alimentaire de l’Éthiopie, la guerre en Ukraine

n’est pas le principal déclencheur de la crise alimentaire dans le pays. La sécheresse et les actes de guerre, qui ont eu de terribles conséquences sur l’agriculture locale, ont eu un impact beaucoup plus important.

Malgré la crise alimentaire persistante, l’Éthiopie a également exporté des céréales, notamment du teff, ces dernières années. Le pays a ainsi pu se procurer des devises dont il avait un besoin urgent. Selon UN Comtrade, les principaux acheteurs de ces céréales ont été Israël, le Kenya, les États-Unis et le Royaume-Uni. En 2020, l’Éthiopie a exporté jusqu’à 1600 tonnes de teff, et plus encore en 2021, jusqu’à 3900 tonnes. Depuis quelques années, cette céréale qui ne contient pas de gluten est considérée comme un superaliment et consommée dans les pays du Nord.

2. Perte de change et dette extérieure

Comme d’autres pays du Sud, l’Éthiopie fait face au problème de la forte dépréciation de sa monnaie par rapport au dollar américain et à d’autres devises étrangères. Cette dépréciation a pour conséquence que les denrées alimentaires et l’essence importées de l’étranger, ou encore, p. ex. les biens médicaux, sont devenus beaucoup plus chers, ce qui fait augmenter l’inflation dans le pays.

Parallèlement, la dépréciation de sa monnaie oblige l’État éthiopien à puiser encore plus dans ses réserves pour assurer le paiement de ses dettes à l’étranger. Selon les chiffres de la Banque mondiale, la dette extérieure de l’Éthiopie s’élevait à plus de 30 milliards de dollars en 2021. En janvier 2018, le Fonds monétaire international (FMI) avait déjà revu à la hausse le risque de surendettement de l’Éthiopie, le faisant passer de « moyen » à « élevé ». Fin 2020, la dette publique du pays s’élevait à environ 32 % du produit intérieur brut et représentait près de cinq fois le total des recettes publiques.9

Les principaux créanciers de l’Éthiopie sont des bailleurs de fonds multilatéraux comme l’Association internationale de développement (IDA), filiale de la Banque mondiale, ou la Banque africaine de développement, mais aussi des bailleurs de fonds bilatéraux comme la Chine. Avec une dette estimée entre 9 et 12 milliards de dollars, l’Éthiopie est le deuxième plus gros emprunteur auprès de la Chine sur le continent africain. Cela est principalement dû à d’importants investissements dans le domaine des infrastructures, réalisés dans le cadre de l’initiative chinoise « Belt and Road ».

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La dette extérieure et le manque de ressources dans le budget des ménages font que l’État éthiopien dispose de moyens de plus en plus limités pour répondre aux besoins de sa population. Dans la situation actuelle de chevauchement de différents facteurs de crise, le fait que les possibilités d’action sont limitées entraîne de graves conséquences pour la population.

3. La pire sécheresse depuis des décennies

Dans les régions rurales d’Éthiopie, l’agriculture reste la principale source de revenus pour près de 80 % de la population, une population par conséquent extrêmement dépendante des conditions climatiques. Les régions du sud de l’Éthiopie notamment, qui sont rurales et vouées au pâturage et à l’élevage, font face à des défis complexes depuis longtemps déjà. La sécheresse actuelle a bien sûr considérablement aggravé la situation.

Cette sécheresse qui a débuté en octobre 2020 est la plus étendue et la plus prolongée que la Corne de l’Afrique ait vécu depuis 1981. En 2022, c’est la troisième année consécutive que, partout dans le monde, se font sentir les conséquences du phénomène dit La Niña. Cet événement météorologique mondial, considéré comme l’équivalent du célèbre phénomène El Niño, provoque de fortes pluies dans certaines régions, et laisse d’autres parties du monde, notamment la Corne de l’Afrique, en proie à de terribles sécheresses. Il y a une deuxième saison des pluies, plus courte, qui dure généralement d’octobre à décembre dans les régions du sud de l’Éthiopie. En 2022, cette saison des pluies a commencé plus tard et a été moins importante que d’habitude. Il s’agit de la cinquième année consécutive où les précipitations sont inférieures à la moyenne, et cela a entraîné une sécheresse extrême et persistante dans la région.

La sécheresse a détruit les moyens de subsistance de millions de personnes dans le sud et le sud-est de l’Éthiopie et elle entraîne des conséquences catastrophiques pour l’agriculture locale. À l’automne 2022, le Programme alimentaire mondial estimait que la sécheresse avait provoqué la mort de 4,5 millions de têtes de bétail en un peu moins d’un an. Les populations qui pratiquent le pâturage et l’élevage dans les régions du sud de l’Éthiopie ont ainsi perdu un pilier de leurs moyens de subsistance, ce qui fait que la situation ne se rétablira pas de sitôt, même à long terme. Pour échapper à la sécheresse, de nombreux hommes ont migré et quitté

la région avec le bétail qui leur restait. Les personnes âgées, les femmes et les enfants sont restés.

En 2020 et 2021, l’agriculture éthiopienne avait déjà souffert d’importantes pertes de récoltes due à l’une des pires invasions de criquets depuis des décennies dans la Corne de l’Afrique. Des milliers d’hectares de terres agricoles et de pâturages avaient alors été détruits.

La sécheresse prolongée et l’invasion de criquets qui l’a précédée ont donc de graves conséquences pour la population éthiopienne, et notamment celle des zones rurales, et elles sont représentatives des phénomènes extrêmes liés aux conditions météorologiques et au climat. On peut s’attendre à ce que ces événements se multiplient avec l’aggravation de la crise climatique mondiale. Il s’agit là de perspectives extrêmement préoccupantes pour la sécurité alimentaire du pays ; des perspectives qui appelleraient une action conséquente tant du gouvernement éthiopien que de la communauté internationale. Le fait que le gouvernement, justement, n’ait souvent pas été en mesure de réagir ces dernières années est lié d’une part à l’inflation dont nous avons parlé plus haut, et à la hausse globale des prix du marché, et d’autre part, à la situation tendue sur le plan de la politique de sécurité, ce qui a encore aggravé la crise.

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4. Guerre civile au nord, conflit armé en Oromia

Les régions du Tigré, de l’Amhara et de l’Afar, dans le nord de l’Éthiopie, ont été le théâtre d’une guerre civile sanglante de novembre 2020 à novembre 2022. Le prétexte de cette guerre était un conflit entre le parti régional, le Front populaire de libération du Tigré (TPLF), et le gouvernement national. Pendant la guerre civile, l’armée nationale a reçu le soutien d’unités régionales des régions d’Amhara et d’Afar ainsi que de troupes de l’Érythrée voisine. Toutes les parties au conflit sont accusées de violations massives des droits de l’homme, de massacres et d’autres atrocités contre la population. On estime qu’entre 500 000 et 800 000 personnes ont perdu la vie dans cette guerre ; cela représente cinq à dix pour cent de la population locale. Une grande part des victimes civiles n’est pas décédée à cause des combats directs, mais à la suite de la famine ou du manque de soins médicaux. 10

Pendant des mois, les régions du nord ont été isolées du monde extérieur en raison des hostilités, et l’accès à l’aide humanitaire a été bloqué. La population locale a souffert d’une insécurité alimentaire extrême. Le Programme alimentaire mondial a signalé qu’entre mars et octobre 2022, les prix de différentes céréales ont massivement augmenté dans la région. L’organisation fait état de hausses de prix bien supérieures à la moyenne pour le teff (172 pour cent), le maïs (218 pour cent), le sorgho (281 pour cent) et le blé (219 pour cent). Selon les estimations sur la période de juin à septembre 2021, 401 000 personnes ont été touchées par la famine dans la région. Des millions de personnes ont fui cette guerre et cette violence pour se réfugier notamment au Soudan voisin. Ce terrible conflit n’a guère attiré l’attention internationale en dépit des conséquences catastrophiques de la guerre civile pour la population locale.

En novembre 2022, le gouvernement éthiopien et le TPLF ont conclu un accord de cessez-le-feu. Dans les semaines qui ont suivi, il a de nouveau été possible d’acheminer des biens humanitaires dans la région en empruntant des couloirs d’aide. Les télécommunications et l’électricité ont été partiellement rétablies et on a pu commencer à reconstruire les systèmes d’approvisionnement en eau dans plusieurs villes. Les liaisons aériennes avec Mekele, la capitale du Tigré, ont également repris. Il est certes difficile de prévoir à l’heure actuelle comment la situation va évoluer et si les efforts de paix entre les parties au conflit vont se poursuivre. Les observateurs sont prudemment optimistes à l’heure actuelle.

La guerre civile dans les régions du nord n’est toutefois pas le seul conflit armé qui a eu lieu récemment en Éthiopie. La politique sécuritaire du pays est influencée par différents conflits à motivation ethnique et politique, qui conduisent régulièrement à des affrontements violents entre les unités gouvernementales et les groupes locaux. Par exemple, peu après la signature du cessez-le-feu dans les régions du nord, un conflit armé a repris dans la région d’Oromia. De violents affrontements ont eu lieu entre les rebelles locaux et les forces gouvernementales. Et des centaines de milliers de civils ont été déplacés. L’accès pour l’approvisionnement en biens humanitaires a été fortement entravé par ces violents affrontements.

La guerre civile dans les régions du Tigré, de l’Amhara et de l’Afar et le conflit armé en Oromia ont donc entraîné des conséquences catastrophiques pour la population locale, tout en contribuant à aggraver la crise et la situation fragile de tout le pays.

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Engagement de Caritas Suisse en Éthiopie

Avec une centaine de collaborateurs, pour la plupart locaux, et actuellement douze projets en cours, l’Éthiopie fait partie des plus grands programmes Pays de Caritas Suisse. L’organisation met en œuvre ses projets et programmes par le biais de son bureau de pays à Addis-Abeba et de ses bureaux de terrain dans les trois régions d’Oromia, du Tigré et de la région des Nations, des Nationalités et des Peuples du Sud (SNNPR). En collaboration avec différentes structures locales, on met en priorité le renforcement de la responsabilisation des populations locales en matière de développement durable. La localisation de l’aide, c’est-à-dire la capacité des acteurs locaux à réagir directement et efficacement aux crises ou aux catastrophes, est une préoccupation centrale.

Humanitarian-Development (HD) Nexus

L’engagement de Caritas Suisse en Éthiopie a débuté en 1974, lors de la grande crise alimentaire de l’époque, par un programme d’aide d’urgence ; plus récemment, les activités de l’organisation se sont fortement orientées vers le « nexus » aide humanitaire-développement (Humanitarian-Development (HD) Nexus). Cette approche associe les instruments de l’aide humanitaire à ceux de la coopération au développement.

L’aide humanitaire et la coopération au développement sont deux domaines de la coopération internationale (CI) qui ont beaucoup évolué au cours de la dernière décennie. Les crises se multiplient dans le monde et touchent davantage de personnes qu’il y a dix ans. Les mesures d’urgence à court terme qui ont caractérisé l’aide humanitaire par le passé ne sont plus adaptées aux crises actuelles. Parallèlement, la coopération au développement classique dans les contextes fragiles est devenue extrêmement difficile ces dernières années ; il n’est pas rare que les succès obtenus soient réduits à néant par la réapparition de crises telles que les sécheresses ou les conflits armés. Le lien et la complémentarité (nexus) entre l’aide humanitaire et la coopération au développement sont une réponse à ces défis. On utilise ces deux approches de manière complémentaire afin de faire efficacement face aux réalités complexes, de manière adaptée aux besoins.

Ce nexus est par exemple mis en œuvre par Caritas Suisse dans un projet actuel visant à renforcer l’entrepreneuriat et l’intégration au marché dans une région du sud de l’Éthiopie particulièrement touchée par la sécheresse. Ce projet à long terme a pour but d’aider les ménages à trouver de nouvelles sources de revenus. Ceux-ci doivent compléter

les revenus de l’élevage traditionnel, qui n’est plus rentable avec les sécheresses persistantes et autres événements climatiques extrêmes. Sur la base d’une analyse de marché détaillée, trois mille participants au projet, en majorité des femmes, sont soutenus en groupes pour la création de petites entreprises, qui transforment par exemple du miel ou vendent des produits mixtes. Outre des formations spécialement adaptées aux besoins des participants et au type de petite entreprise, ainsi qu’un programme de mentorat, les participants reçoivent également un capital de départ. L’accès aux services financiers formels ou informels est assuré.

Caritas Suisse mène délibérément ce projet de promotion de l’entrepreneuriat local dans des régions touchées par l’extrême pauvreté et les crises alimentaires. Il s’agit de s’assurer que les personnes ne soient pas obligées de dépenser le financement qu’elles reçoivent pour leurs petites entreprises pour couvrir leurs besoins de base immédiats, comme la nourriture ou les médicaments. C’est dans cette optique que Caritas Suisse combine le projet avec des interventions humanitaires, au cours desquelles elle met à disposition des transferts en espèces. Les personnes peuvent ainsi couvrir leurs besoins de base de manière autonome et acheter par exemple des denrées alimentaires sur les marchés locaux. La combinaison de cette aide humanitaire avec une coopération au développement à long terme doit permettre de briser la spirale descendante dans laquelle se trouvent souvent les populations vivant dans l’extrême pauvreté.

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SUD SOUDAN SOUDAN ÉRYTHRÉE YÉMEN DJIBOUTI SOMALIE KENYA
ÉTHIOPIE
SNNPR Tigré
Addis Abeba 
Oromia Somali

Conclusions

Fin 2022, la Suisse a réagi au fait que la crise alimentaire continuait de s’aggraver dans le monde. La Confédération a augmenté sa contribution au PAM de 14,5 millions de francs. La contribution totale de la Suisse au PAM en 2022 s’est donc élevée à 109,5 millions de dollars, soit à peine moins que l’année précédente (2021 : 110,4 millions. Dans son exposé des motifs, le Conseil fédéral a fait directement référence à la crise alimentaire qui s’aggrave et a ainsi reconnu que la crise multiple actuelle exigeait un engagement plus important.

L’exemple de l’Éthiopie l’illustre bien : la superposition de différents facteurs de crise, tels que les sécheresses et autres phénomènes extrêmes liés au climat, les conflits armés et la guerre, l’endettement extérieur, l’inflation et l’augmentation massive des prix des denrées alimentaires et des engrais, entraîne directement une insécurité alimentaire aiguë pour les populations concernées et fait augmenter la faim. La situation

actuelle exige un degré de solidarité internationale bien plus élevé que ce que nous avons pu observer jusqu’à présent, par exemple de la part de la Suisse.

Avec la crise multiple actuelle, non seulement le besoin de soutien financier est devenu plus important, mais l’écart entre ce dernier et le financement effectivement disponible n’a cessé de se creuser. L’exemple de l’Éthiopie illustre également ce phénomène : en décembre 2022, par exemple, le Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations unies (OCHA) a indiqué que le Plan de réponse humanitaire de l’Éthiopie pour l’année en cours avait été financé à moins de la moitié. Le plan prévoyait d’apporter une aide humanitaire à quelque 20 millions d’Éthiopiens pendant la crise actuelle. Cela montre à quel point le soutien financier des États et des organisations donateurs est à la traîne par rapport aux besoins accrus par la crise multiple.

Revendications de Caritas Suisse

L’exemple de l’Éthiopie l’illustre bien : la crise multiple actuelle touche durement la population locale, provoque une insécurité alimentaire massive et met en danger des vies humaines. Nous demandons à la Suisse, en tant que membre de la communauté internationale, de faire preuve de solidarité et de soutenir les habitants de l’Éthiopie, ainsi que ceux d’autres pays du Sud, dans cette crise. Concrètement, Caritas Suisse demande :

1. Lutter contre la crise alimentaire avec plus de moyens financiers

Face à la crise alimentaire mondiale, la Suisse doit agir rapidement et augmenter en 2023 l’aide humanitaire destinée aux pays les plus touchés, notamment en Afrique subsaharienne. C’est la seule façon de s’assurer que les organisations humanitaires disposent toujours de ressources financières suffisantes pour fournir de l’aide aux personnes qui en ont le plus besoin, même si les prix des denrées alimentaires augmentent dans le monde entier. En effet, avec la crise mondiale multiple, non seulement le nombre de personnes touchées par la malnutrition et la faim a explosé, mais les coûts des organisations humanitaires ont également fortement augmenté. La Suisse doit tenir compte de cet état de fait.

L’augmentation de l’aide humanitaire ne doit en aucun cas se faire au détriment de la coopération au développement

à long terme. C’est pourquoi Caritas Suisse demande une nette augmentation du budget 2024. L’importance de la coopération au développement se manifeste précisément dans le renforcement et la mise en place de systèmes agricoles durables et résilients, qui permettent de faire face à la crise climatique. Nous refusons toute réduction de la coopération internationale. En décidant d’augmenter massivement les dépenses militaires dans les années à venir tout en respectant de manière restrictive le frein à l’endettement, le Parlement fédéral s’est mis dans une impasse. Caritas Suisse et ses partenaires s’opposent à ce que ces décisions politiques entraînent des économies sur le dos des plus pauvres dans les pays du Sud.

2. Renforcer la coopération internationale de la Suisse

À long terme également, la Suisse doit renforcer son engagement financier dans la lutte contre la pauvreté et la faim dans le Sud global. En ce qui concerne la stratégie CI 20252028 de la Confédération, Caritas Suisse estime nécessaire d’augmenter massivement le cadre financier par rapport à la dernière période stratégique. C’est la seule façon de s’assurer que la Suisse apporte une contribution adéquate à la résolution des crises mondiales actuelles, à la hauteur de ses capacités financières et de ses promesses internationales.

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Caritas Suisse critique en outre le fait que la Confédération impute une part considérable de dépenses qui n’ont que peu ou pas de rapport avec la lutte contre la pauvreté et la coopération au développement dans les pays les plus pauvres au quota sur l’aide publique au développement (en anglais Official Development Assistance, ODA). Il s’agit notamment des dépenses pour les personnes en quête d’asile lors de leur première année de séjour ou du transfert des doses de vaccins excédentaires vers les pays plus pauvres. Nous demandons que la Confédération abandonne cette pratique et s’engage au sein de l’OCDE pour améliorer la qualité et l’importance du quota.

3.Soutenir le désendettement des pays les plus pauvres

L’endettement des pays les plus pauvres empêche leur développement. La pandémie de Covid-19 et la crise alimentaire mondiale actuelle ont toutes deux mis en évidence la manière dont les pays du Sud, en raison de leur endettement, ne sont plus en mesure de fournir des services de base et de soutenir leur population avec un minimum de soins de santé ou de nourriture. La population locale est toujours en première ligne, et la plus touchée par l’endettement des États.

De nombreux prestataires de services financiers et de nombreuses entreprises de matières premières actifs au niveau mondial sont implantés en Suisse ; notre pays est donc largement impliqué dans la crise de l’endettement dans les pays du Sud. Nous demandons que la Suisse s’engage activement en faveur de procédures de désendettement équitables impliquant le secteur privé. En outre, la Suisse doit se déclarer prête à céder des droits de tirage spéciaux inutilisés à des pays surendettés.

4.Lutter efficacement contre la crise climatique, tant au niveau national qu’international

Dans notre pays, les émissions de gaz à effet de serre sont énormes par rapport à la population ; la Suisse a donc une responsabilité particulière dans ce domaine. Caritas demande que la Suisse prenne enfin des mesures efficaces pour réduire massivement ses émissions de gaz à effet de serre sur son territoire. Les conséquences catastrophiques de la crise climatique sont visibles dans le Sud mondial, et les personnes touchées par la pauvreté sont celles qui en souffrent le plus. La Suisse doit apporter sa contribution pour que cette crise mondiale ne s’aggrave pas davantage.

En outre, elle doit également augmenter sa contribution au financement international du climat. Il faut consacrer des moyens «nouveaux et supplémentaires» aux mesures d’atténuation et d’adaptation dans les pays en développement, comme convenu au niveau international. Au lieu de cela, la Suisse a jusqu’à présent utilisé presque exclusivement les fonds du crédit-cadre de la CI. Caritas Suisse critique vivement ce procédé. Nous demandons au Conseil fédéral d’examiner d’autres mécanismes de financement et de les inscrire dans la loi. De plus, la contribution de la Suisse reste trop faible: par rapport à sa performance économique et à ses émissions de gaz à effet de serre, la Suisse doit, selon Caritas Suisse, consacrer chaque année 1 milliard de francs suisses au financement international du climat. En 2020, la contribution publique de la Suisse n’était que de 411 millions de dollars. La Suisse doit contribuer à hauteur d’au moins 1% à l’objectif de financement international pour la période après 2025.

Mai 2023

Autrice: Angela Lindt, responsable du service spécialisé «Politique de migration», e-mail alindt@caritas.ch, téléphone 041 419 23 95

Version en ligne de ce document: https://www.caritas.ch/fr/politique-de-developpement

1 Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), Fonds international de développement agricole (FIDA), UNICEF, Programme alimentaire mondial, & Organisation mondiale de la santé (OMS). (2022). The State of Food Security and Nutrition in the World 2022. FAO. https://doi.org/10.4060/cc0639en

2 Réseau d’information sur la sécurité alimentaire (FSIN). (2022). Global Report on Food Crises – 2022. https ://www.wfp.org/publications/global-report-food-crises-2022

3 Programme des Nations unies pour le développement (PNUD). (2022 c). 2022 Indice mondial multidimensionnel de la pauvreté (MPI) : Unpacking deprivation bundles to reduce multidimensional poverty. In :Rapport sur le développement humain. United Nations. https ://hdr.undp.org/content/2022-global-multidimensional-poverty-index-mpi

4 Programme alimentaire mondial. (2022a). Région de l’Afrique de l’Est : Regional Food Security & Nutrition Update 2022 Update #3.

https ://reliefweb.int/report/ethiopia/eastern-africa-region-regional-food-security-nutrition-update-2022-update-3-december-2022

5 Notre monde en données. (2021). Part des dépenses de consommation consacrées à l’alimentation vs. Total des dépenses de consommation. Our World in Data. https ://ourworldindata.org/grapher/food-expenditure-share-gdp

6 Programme alimentaire mondial. (2022 b). Market Watch Ethiopia October 2022. https ://docs.wfp.org/api/documents/WFP-0000144729/download/

7 Tamru, S., Makonnen Gebrewolde, T., & International Growth Center (IGC). (2022, 8 août). Impact de la guerre russo-ukrainienne sur l’Éthiopie. IGC. https ://www.theigc.org/blog/impact-of-the-russia-ukraine-war-on-ethiopia/

8 FAO. (2022). The importance of Ukraine and the Russian Federation for global agricultural markets and the risks associated with the current conflict (S. 47).

https ://www.fao.org/3/cb9236en/cb9236en.pdf

9 Erlassjahr.de. (2021, février). Éthiopie. erlassjahr.de.

https ://erlassjahr.de/laenderinfos/aethiopien/

10 York, G. (2022, mars 14). La guerre du Tigré a fait jusqu’à un demi-million de morts par violence et par mutilation, selon des chercheurs. The Globe and Mail. https ://www.theglobeandmail.com/world/article-tigray-war-has-seen-up-to-half-a-million-dead-from-violence-and/

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