MEMOIRE HMONP - DAVID PELISSOU

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REMERCIEMENTS

Je souhaite tout particulièrement remercier Noël Dominguez, pour son accompagnement tout au long de ce travail en me transmettant les outils et les méthodes nécessaires à la réalisation de ce dernier au travers d’un regard critique. Merci à l’École Nationale Supérieure d’Architecture de Paris Belleville de nous offrir cette riche formation et d’avoir maintenu son enseignement malgré le contexte sanitaire difficile. Toute ma gratitude va à The Brand-Tailors et à ses collaborateurs qui m’ont accueillis chaleureusement et avec bienveillance, en me transmettant notamment de nombreuses informations ayant contribué tant au présent travail qu’à l’exercice quotidien de mon métier. Un immense merci à Hugo Clara, gérant de The Brand-Tailors qui m’a soutenu, accompagné et transmit ses connaissances avec pédagogie depuis le début de ma collaboration à l’agence. Enfin, je remercie tendrement mon entourage qui a su m’accompagner et me soutenir jusqu’à ce jour et m’ont permis de m’épanouir personnellement et professionnellement.

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TABLE DES MATIERES

REMERCIEMENTS

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INTRODUCTION

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PRÉSENTATION DE LA STRUCTURE D’ACCUEIL

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LE PROFIL - THE BRAND TAILORS / HQA

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L’INTÉRÊT D’UNE DOUBLE ENTITÉ

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LE TYPE DE COMMANDES

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LES MISSIONS AU SEIN DE L’AGENCE

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LE RÔLE DE L’ARCHITECTE DANS LA MAITRISE DES COÛTS ET DÉLAIS D’UN CHANTIER. UN EFFACEMENT DES ARCHITECTES DANS LES MISSIONS D’EXÉCUTION

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CONSTAT DES DIFFÉRENTES RAISONS D’UN DÉPASSEMENT BUDGÉTAIRE 22 LES ENJEUX DU PRO/DCE À L’APPEL D’OFFRE

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L’IMPORTANCE DU SUIVI FINANCIER EN PHASE CHANTIER

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CONCLUSION

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GLOSSAIRE

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BIBLIOGRAPHIE

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ANNEXES

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PARCOURS

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CV

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ORGANIGRAMME DE L’AGENCE

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PROJETS RÉALISÉS

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INTRODUCTION

Lors de ma mise en situation professionnelle, orientée presque exclusivement à la maîtrise d’œuvre d’exécution en marché privé, un élément majeur et systématique ressortait de mes différentes expériences de chantier : La problématique coût / temps. Cette problématique récurrente est d’ailleurs le sujet principal de critiques de la part du grand public à l’égard des architectes : des budgets de travaux multipliés par deux ou plus, des retards de chantier de plusieurs mois voire années, sont des commentaires entendus et fréquents. Mais est-ce véritablement la faute des architectes qui dans l’inconscient collectif sont les seuls maîtres à bord et se permettent des caprices afin que leur création soient au plus proche de leur idéal en dépit des délais et des coûts de construction ? Cette image négative, et parfois exagérée m’interpelle. Ce sont en effet des points noirs qui nuisent à la profession et peuvent rendre réticent de potentiels clients à recourir à un architecte. Ce mémoire professionnel d’habilitation à la maîtrise d’œuvre en son nom propre, a donc pour objectif de décortiquer ces problèmes de dépassements budgétaires en phase chantier qui induisent de près ou de loin des retards de chantier. Nous nous concentrerons dans la première partie à la présentation d’une agence d’architecture qui s’est positionnée sur le marché de l’architecture commerciale et qui, à l’opposé des agences qui se concentrent exclusivement sur les missions de conception, se spécialise sur les missions d’exécution en ayant une politique claire : être au service total de la maîtrise d’ouvrage dans le but de fidéliser sa clientèle. Cette première partie détaillera la forme juridique de l’entreprise, son image, et les missions qu’elle exerce. Dans la seconde partie nous identifierons les différents facteurs qui amènent un chantier à dépasser son budget initial en analysant les différentes phases dans lesquelles ces enjeux se nouent. Nous tenterons de mieux comprendre pourquoi les architectes sont de moins en moins présents dans les missions d’exécution en marché privé et quelles sont les différentes causes d’un dépassement budgétaire et de retard de chantier. Nous identifierons par la suite les acteurs de la construction, avec les avantages et les inconvénients sur le choix du type d’entreprise en charge de la réalisation des travaux. Enfin, nous analyserons la mission d’importance 6


capitale qu’a le maître d’œuvre dans le suivi financier assidu d’un projet architectural. Pour conclure, nous tâcherons d’apporter un point de vue personnel en se basant sur les informations décrites dans la partie précédente afin de tenter de trouver des solutions pour palier à ces problèmes de dépassement budgétaire en phase chantier.

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PRÉSENTATION DE LA STRUCTURE D’ACCUEIL LE PROFIL - THE BRAND TAILORS / HQA L’agence, qui se situe dans la commune de Vincennes, à Saint-Mandé, dans le département du Val-de-Marne, est installée depuis mars 2018 dans un ancien garage automobile, entièrement réhabilité, par le dirigeant de l’entreprise. L’agence bénéficie d’une bonne situation géographique se trouvant dans un quartier à la fois résidentiel et tertiaire assurant un certain dynamisme et une bonne visibilité de par sa façade donnant sur une rue passante. Sur cette façade, deux noms s'affichent en lettres capitales dorées : HQA sur la porte et The Brand-Tailors sur le fronton.

Photographie de la façade de l’agence TBT/HQA

Vient alors la question : que signifient ces noms et à quoi correspondent-ils ? C’est en 2007 que Hugo Clara s’associe avec un couple d’architectes, avec qui il s’était lié d’amitié lors de ses études d’architecture à Marnes la Vallée, afin de répondre à un appel d’offre pour la construction d’un club-house dans sa ville d’origine, à Fontenay-sous-Bois. Ils remportent alors ensemble ce projet sous le nom de HQA (Haute Qualité Architecturale). 8


À la suite de ce premier projet, leur stratégie d’accès à la commande se résume à répondre à autant d’appels d’offre que possible, presque 200 par an, afin de maximiser leurs chances d’être retenus et de se faire connaître. Seulement, la réalité et les lois du marché rattrapent très vite les rêves de la petite agence. Sans références appropriées, ni expériences fondées, HQA engendre une perte importante d’argent et donc n’a pas de rentabilité. La survie de la structure s’opère grâce à quelques projets de particuliers, obtenus grâce à divers contacts personnels, mais pas suffisamment importants pour faire vivre l’agence. Par conséquent, n’ayant pas suffisamment de fonds ni de projets pour se consacrer à temps plein à leur structure, les trois associés travaillent parallèlement en tant que salariés dans d’autres agences d’architecture. Ce rythme, déjà difficile à tenir s’additionne au fait que le couple d’architectes avec qui Hugo Clara s’était associé attendent un enfant et préfèrent se concentrer davantage à leur vie de famille. Ces éléments mèneront à la séparation des associés courant 2011. Cependant, au même moment, une opportunité professionnelle se présente à Hugo, lui permettant de continuer l’aventure HQA en tant que gérant unique et à temps plein. En effet, après avoir quitté son ancien employeur, l’enseigne Nike contacte Hugo afin de reprendre leur collaboration et de les accompagner dans le développement et l’expansion de leur points de ventes sur le marché français. Aussi, en 2014, la marque emblématique qui se trouve alors en pleine restructuration, cherche à uniformiser les procédures de mise en œuvre en ne travaillant plus avec des maîtrises d’œuvre « locales » mais plutôt avec des maîtrises d’œuvre « globales », capables d’intervenir à l’échelle mondiale. En effet, l’une des caractéristiques principales du marché de l’architecture commerciale réside dans la déclinaison d’un même concept, représentant une marque sous une image forte et reconnaissable par le plus grand nombre et ceci, quelle que soit sa localisation dans le monde. Ainsi, ces enseignes possèdent leur propre équipe de conception et de design en interne, maîtrisant à la foi : •

l’image de la marque par l’ambiance et le mobilier choisi,

le coût des équipements, mobilier et fourniture, répertoriés dans un inventaire avec des fournisseurs réguliers,

la disposition et l’organisation générale en plan, selon des techniques de ventes et de marketing développées en interne ainsi que diverses chartes d’hygiène ou salariales propre à chaque enseigne. 9


Ces équipes de conception sont très souvent regroupées et localisées au siège social de l’enseigne, ne se déplaçant que très rarement localement, principalement pour des raisons de coût. Ainsi, elles ne sont pas en mesure de maîtriser ou d’anticiper les contraintes sur le terrain ou encore les réglementations locales. C’est pourquoi elles utilisent des maîtrises d’œuvre externes sur place. Cependant, traiter avec des maîtres d’œuvre « locaux » ne s’avère ni gage de qualité ni de rentabilité pour l’enseigne, souvent confrontée à une trop grande complexité dans les échanges et les procédures d’exécution d’un pays à un autre. En conséquence, cette enseigne, propose à Hugo et deux autres partenaires, Wolf Weikert et Grazia Ferrara, avec qui elle traite depuis quelques années également, de s’associer afin de devenir les maîtres d’œuvre « globaux » et donc les interlocuteurs uniques et privilégiés de Nike dans le monde. Après plusieurs mois de négociation et de mise en place, The Brand-Tailors est officiellement lancée.

L’INTÉRÊT D’UNE DOUBLE ENTITÉ Bien que co-existent deux noms, HQA et The Brand-Tailors sont une seule et même entité juridique, une société à responsabilité limitée de type SARL. Hugo Clara est le gérant majoritaire à 95% en tant qu’architecte inscrit à l’Ordre, comme stipulé par l’article 13 de la loi n°77-2 du 3 janvier 1977 sur l’architecture. Les 5% restants sont détenus par une personne tierce, associée minoritaire et non architecte. Cette distribution lui permet de prendre la majorité des décisions et surtout, d’être protégé sur deux points : •

En premier lieu, au sein même de sa structure : selon l’article L.223-25 du code du commerce stipulant que le gérant ne peut être révoqué que par décision des associés représentant plus de la moitié des parts sociales. Une situation qui s’explique notamment par l’échec de sa première expérience avec ses deux anciens associés, détaillée précédemment.

En second lieu, sur le volet de la responsabilité : en principe limitée à l’apport initial dans le capital social de chaque associé à une SARL et permettant, entre autres, de protéger son patrimoine personnel, contrairement à l’exercice libéral.

Ainsi, The Brand-Tailors est la raison sociale de l’entreprise et HQA, le nom commercial. Ces deux noms co-existent, avant tout, afin de faire la distinction entre 10


les projets selon leurs caractéristiques : commercial pour The Brand-Tailors et équipement public ou marché du particulier pour HQA. Ce positionnement fait partie intégrante d’une stratégie de communication et d’image de l’agence, souhaitant mettre en avant sa spécialisation et son savoir-faire en termes d’architecture commerciale. D’autre part, cette démarcation laisse l’opportunité à Hugo, dans un futur proche, de scinder la société en deux entités indépendantes en conservant un nom, une « marque » connue de la clientèle, particulièrement celle de The Brand-Tailors, si le capital devait s’ouvrir à de nouveaux associés. Fondée par trois architectes : Hugo Clara, Wolf Weikert et Grazia Ferrara, The BrandTailors est divisée en trois entités distinctes dont chaque partenaire est à la tête. Leur collaboration se base sur un contrat de partenariat à parts égales, leur assurant d’être responsables et indépendants de leur entité au niveau financier, salarial ou en termes de politique d’entreprise, sans avoir le pouvoir de s’influencer mutuellement. Par conséquent, leurs échanges se concentrent principalement sur les stratégies d’accès à la commande, la gestion de l’image et de la communication ou encore sur les méthodologies de travail communes aux trois entités, qui seront développées ci-après.

Document graphique issu de l’agence, indiquant les différents pays d’intervention de cette dernière.

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Le contrat de partenariat établit également des principes de confidentialité, d’exclusivité et de répartition de marché. Sur cette base, ils se partagent les territoires d’implantation de leur client selon leurs origines et les langues parlées.

Schéma de répartition des différents pays d’intervention selon les trois entités.

Par conséquent, la gestion d’entreprise est commune à HQA et The Brand-Tailors pour la filiale française et reste dans les mains de son dirigeant. Appuyé par son statut juridique, il reste le seul acteur et décisionnaire pour : •

la prospection et l’entretien des relations avec les maîtrises d’ouvrage, essentiellement privées

le management des équipes et des projets

la politique salariale : quand et qui embaucher, à quel salaire, sur quel contrat et sur quelle durée.

les questions administratives : rédaction des contrats avec la maîtrise d’ouvrage, factures, déclarations, et assurances diverses.

La comptabilité, la gestion des bulletins de salaire et la rédaction des contrats de travail sont suivies par un comptable, prestataire extérieur. Les questions juridiques sont traitées par une société d’experts-comptables, SEDAG. 12


LE TYPE DE COMMANDES L’architecture commerciale ou « retail » consiste en la conception et la réalisation d’espaces de vente aussi bien pour le compte d’enseignes d’échelle internationale ou locale (prêt-à-porter, restauration...) que pour le compte de professionnels indépendants. L’architecte traite alors avec une maîtrise d’ouvrage privée et n’est donc pas soumis à la loi MOP relative à ses rapports avec une maîtrise d’ouvrage publique et ses éléments de missions. Les espaces de vente relèvent des établissements recevant du public (ERP) et sont classés par catégories selon leur capacité d’accueil, définissant les exigences réglementaires applicables. Ce marché est réputé difficilement accessible pour les architectes souhaitant s’y intéresser. Tout autant que pour un marché public, les références de projets sont indispensables. En effet, l’architecture commerciale reste un marché exigent, répondant à des contraintes propres, notamment pour le temps alloué pour l’exécution des travaux. Chaque jour de fermeture d’une enseigne représente une perte de vente, de chiffre d’affaires et donc un manque à gagner important. Pour autant, la contrainte du temps ne doit en aucun cas correspondre à une baisse de la qualité d’exécution. Ainsi, tout l’enjeu pour l’architecte, à travers ses références, réside à démontrer sa maîtrise et son savoir-faire par une méthodologie de travail rigoureuse, permettant de tenir des délais courts, tout en délivrant une prestation de qualité. C’est sur ce thème que The Brand-Tailors axe sa stratégie de prospection. Tout d’abord, grâce à ses projets avec l’enseigne Nike, l’agence s’est assurée une référence solide en matière d’architecture commerciale. La structure ayant été créée pour les besoins de ce client, elle a su identifier rapidement les arguments à mettre en avant, notamment sa capacité à penser un projet « globalement » et à le mettre en œuvre « localement », partout dans le monde, grâce à un interlocuteur unique. Ainsi, le réseau tissé par l’agence tend à rassurer des enseignes concurrentes, comme la marque Adidas, avec qui elle collabore depuis 5 ans. Plus spécifiquement, le développement d’une relation de confiance et de qualité avec la maîtrise d’ouvrage est un facteur essentiel dans la pérennisation du succès de l’agence et peut aussi, déboucher sur de nouvelles commandes plus inattendues. Il n’est en effet pas rare d’observer des « migrations » de maître d’ouvrage privé d’une enseigne à une autre, le secteur du « retail » ayant son propre réseau. Par exemple, c’est de cette façon que The Brand-Tailors fut démarché par 13


l’enseigne Starbucks, grâce à un contact parti de chez Nike pour rejoindre les salons de café. Enfin, le « retail » est régit par une loi de l’image très forte. Par le nom choisi, The Brand-Tailors soit « les tailleurs de marques », l’agence s’installe dans la logique d’une enseigne, se mettant au niveau de sa clientèle, dans le but de démontrer qu’elle parle le même langage, qu’elle comprend et maîtrise les codes liés à ce type de marché, et notamment la problématique de marque. Aujourd’hui, The Brand-Tailors est une structure rentable, représentant la plus grosse partie du chiffre d’affaires de l’agence. Cette situation tend à démontrer l’avantage indéniable du marché de l’architecture commerciale pour un architecte, d’un point de vue économique, car c’est l’une des rares clientèles, avec la promotion privée, à pouvoir être fidélisée et à assurer un revenu régulier. En effet, ces enseignes s’adaptent en permanence à la fluctuation de leur marché, se traduisant par des stratégies commerciales agressives, dynamique et solvables, avec, pour certaines marques, des dizaines d’ouvertures ou de rénovations de sites par an. Ainsi, les rémunérations perçues par The Brand-Tailors permettent de payer les charges de fonctionnement de l’agence comme le paiement des salaires, des prestataires de services, des factures et charges diverses. Cette stabilité financière était l’un des principaux objectifs à atteindre pour Hugo, afin de ne pas reproduire les erreurs du passé vécues avec HQA. À présent, il ne s’agit plus de répondre à une multitude d’appels d’offre pour HQA, dans une démarche quantitative, mais d’opter pour une démarche qualitative, en répondant à des appels d’offres correspondant aux références déjà réalisées par The Brand-Tailors. Cet atout des références est renforcé par la nature juridique de l’agence, permettant à ces références d’être communes aux deux entités. De cette façon, HQA a remporté courant 2018 un projet de restructuration du centre commercial de Ville-du-Bois, en banlieue parisienne, en partenariat avec une autre agence d’architecture. La stabilité financière acquise a également permis à la structure d’augmenter ses effectifs : de trois salariés il y a 3 ans, à 10 collaborateurs aujourd’hui. En outre, il s’est avéré que la localisation choisie joue un rôle prépondérant dans l’accès à d’autres commandes : celles des particuliers. En effet, Vincennes est une commune dynamique abritant à la fois de nombreuses activités tertiaires et des 14


quartiers résidentiels de catégories sociales aisées. Par sa situation en rez-dechaussée, avec de grandes portes vitrées laissant apparaître l’activité, l’agence dispose d’une vitrine formidable où de nombreux riverains se sont présentés spontanément, essentiellement pour des projets d’aménagement d’appartements, depuis l’installation en mars 2018. Bien que ce marché n’ait pas été une cible prioritaire pour le gérant, qu’il juge trop instable et pas assez pérenne, les quelques commandes abouties lui permettent d’agrandir le champ de compétences et de références d’HQA et de s’émanciper progressivement de sa consœur The BrandTailors.

Photographie de l’intérieur des locaux de TBT / HQA

C’est pourquoi, conscient de cette visibilité et des perspectives offertes par ce nouveau marché, Hugo n’hésite pas à mettre en avant l’atelier tel un produit, s’inspirant des techniques de marketing des enseignes avec qui il collabore depuis quelques années via The Brand-Tailors. Ainsi, l’agence organise régulièrement des pots le vendredi soir et participe chaque année aux Portes Ouvertes de l’Architecture, en conviant le voisinage afin de présenter les locaux, le travail, le rôle de l’architecte dans la ville et, dans une moindre mesure, se faire connaître par le bouche à oreille. Le développement actif du site internet et la gestion des réseaux sociaux s’inscrit également dans cette stratégie de communication. 15


LES MISSIONS AU SEIN DE L’AGENCE Les premières missions de conception sont internalisées au sein des marques. Les missions confiées à The Brand-Tailors débutent donc en phase APD afin d’adapter l’avant-projet reçus aux contraintes techniques et réglementaire sur site, puis, d’assurer le suivi et la conformité du projet jusqu’à la réception du chantier et la levée des réserves. L’agence est également missionnée afin d’effectuer toutes les autorisations administratives auprès des autorités compétentes (mairie, Architectes des Bâtiments de France ou autres.)

Schéma de la relation entre la MOA et la MOE

Aussi, en fonction de la localité du projet (Amérique du sud, Afrique du sud, Russie, Japon…), les phases d’exécution sont soit co-traitées par des partenaires locaux de The Brand-Tailors, soit gérées directement par l’entité elle-même. Cette organisation à l’international exige donc un contrat tripartie liant le maître d’œuvre de conception (The Brand-Tailors), le maître d’œuvre d’exécution (le partenaire local) et la maîtrise d’ouvrage (l’enseigne), afin de clarifier les missions et responsabilités de chacun et de respecter des clauses de confidentialité vis-à-vis de la marque. En effet, l’expérience des chantiers à l’international lointain a démontré la nécessité d’une double maîtrise d’œuvre, l’une, globale, assurée par The BrandTailors, pour vérifier la cohérence de marque et le suivi des coûts vis à vis du client, et l’autre, locale, permettant un suivi quotidien et précis sur site afin de s’assurer de l’exécution effective des travaux. Dans ce dispositif, The Brand-Tailors apparaît comme un intermédiaire entre la maîtrise d’ouvrage et la maîtrise d’œuvre d’exécution, reconnu dans sa capacité à « centraliser » les projets, afin d’obtenir plus de contrôle architectural et qualitatif, dans l’intérêt de son client.

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Cette problématique « locale » ne se retrouve pas dans les projets situés en France et en Europe, la branche française de The Brand-Tailors assurant l’ensemble des missions de maîtrise d’œuvre. Développer et suivre ces projets ciblés permet ainsi aux salariés de l’agence de bâtir un socle solide de connaissance dans la construction et surtout, de comprendre et de mesurer l’importance du dessin et des carnets de détails car ceux-ci sont déterminants pour la suite du projet et le suivi d’exécution. Cela leur donne par ailleurs la connaissance des enchaînements et responsabilités pour les phases suivantes dans des environnements réglementaires variés. En effet, The Brand Tailors tend à se spécialiser dans les missions d’exécution en étant au service exclusif de la maitrise d’ouvrage. Ainsi, la politique de l’agence s’attache à détailler très précisément les dossiers PRO/DCE en rédigeant notamment le DPGF qui servira aux entreprises qui devront chiffrer le projet, puis exerce son devoir de conseil et analyse les offres des entreprises lors des appels d’offres. The Brand-Tailors oriente alors la maitrise d’ouvrage dans le choix des entreprises et sert également de passerelle dans la traduction et la communication entre les différents intervenants.

Schéma des relations entre les différents acteurs

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Les marques pour lesquelles The Brand-Tailors travaille sont majoritairement anglosaxonnes et ont pour habitude de travailler avec des « Général Contractors » (GC) appelés Contractants Généraux en France. Ces entreprises, contrairement aux entreprises générales, n’ont pas de corps de métiers ouvriers en interne. Le Contractant Général est composé d’économistes, de dessinateurs et de pilotes de chantier. Il est chargé de sous-traiter tous les lots d’un projet de construction et joue en quelque sorte la mission d’un OPC en élaborant un planning, en veillant à la présence des intervenants, en les coordonnant ainsi qu’en respectant (en théorie) les coûts négociés lors de l’appel d’offre pour chaque lot. On peut en effet identifier dans ce système d’entreprise un conflit d’intérêts évident : Le Contractant Général qui calcule sa marge sur chaque prestation de chaque sous-traitant, façonne lui-même les plannings, et cherche, dans un souci de rentabilité optimale, à identifier des failles et des problèmes imprévus qui vont être prétexte à engendrer des travaux supplémentaires et par conséquent des coûts et facturations supplémentaires. Le rôle de The Brand-Tailors en phase chantier ne va donc pas se cantonner au suivi architectural d’un projet mais va compléter cette mission OPC qui est gérée par le contractant général. Pour cela, il révise le ou les plannings de ce dernier, en s’assurant avec le Coordonnateur SPS de la bonne tenue du chantier et des mesures de sécurité. Il va également faire un suivi financier rigoureux et drastique afin de servir au mieux les intérêts du client. Ce travail se fait donc sous forme de visites de chantier hebdomadaires (1 à 2 fois par semaine), de compte rendus détaillés et de tableaux de suivi financiers clairs et argumentés. Ainsi, The Brand-Tailors assure une communication constante entre la maîtrise d’ouvrage et les différents intervenants du chantier (bureau de contrôle, CSPS, contractant général, corps d’état séparés, etc.), allant de la phase APD jusqu’à la garantie de parfait achèvement.

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LE RÔLE DE L’ARCHITECTE DANS LA MAITRISE DES COÛTS ET DÉLAIS D’UN CHANTIER. UN EFFACEMENT DES ARCHITECTES DANS LES MISSIONS D’EXÉCUTION En premier lieu, il est utile de préciser qu’il existe deux types de commande en architecture, la commande publique et la commande privée. La commande publique rassemble quatre grandes natures de Contrats administratifs tels que les marchés publics, les montages complexes, les délégations de service public et les partenariats public / privé. Ces familles de contrats publics sont régies par le Code de la Commande Publique (CCP) qui donne un cadre juridique extrêmement précis. Ce cadre juridique garantit entre autres à l’architecte une mission complète. Nous n’entrerons pas dans le détail des marchés publics car nous allons davantage nous intéresser à la commande privée qui, à l’opposé de la commande publique, aborde le contrat librement et de ce fait, laisse libre-court à la négociation en termes de rémunération, en termes de missions attribuées au maître d’œuvre et des méthodes qu’il emploiera. En effet, ce type de relation contractuelle introduit la notion de risque sur le plan juridique et financier, et c’est pourquoi il est nécessaire pour les architectes de prêter une attention particulière dans la négociation des types de missions et de leur rémunération. Le MOE aura alors intérêt à se référer à la norme volontaire et non obligatoire NF P 03-001 qui régit les marchés de droit privé et qui leur fixe un cadre réglementaire et technique à l’instar des CCAG et CCAP dans le domaine public. Face à une certaine complexité des marchés privés, on assiste de nos jours à un changement de la part des architectes et des agences d’architecture qui, de plus en plus, délaissent les missions d’exécution pour se concentrer exclusivement sur les missions de conception. Ceci les conduit à perdre une partie des compétences qui étaient les leurs et par conséquent à perdre en légitimité. Selon Olivier Chadoin, ce phénomène a pour cause deux raisons principales : « D’une part le travail de clarification des besoins qu’opère le travail de conception est rendu difficile par la programmation, d’autre part « l’esthétisation de l’architecture » fait perdre aux architectes le savoir et la maîtrise de la technique qui est pourtant une des bases de leur compétence professionnelle. C’est alors l’autonomie de la profession et la

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définition de sa compétence qui sont mises en jeu. »1. À l’opposé des idées reçues, idéalisant ou dénigrant l’architecte comme étant le « concepteur-réalisateur suprême » d’une construction et le seul responsable, on s’aperçoit aujourd’hui que la réalité est tout autre. En effet, l’architecte est de plus en plus relégué au second plan comme l’explique Florent Champy, « les compétences que les architectes mettent en oeuvre sont de moins en moins consensuelles et de plus en plus difficiles à faire reconnaître : les architectes les plus en vue revendiquent comme principale source de légitimité leur créativité, mais celle-ci ne peut être la base d’une identité professionnelle partagée et d’une reconnaissance officielle ».2 Ce détachement et ce désintérêt de la part des architectes vis-à-vis de la maîtrise d’œuvre d’exécution se caractérisent par une inquiétude profonde, sous-jacente, vis-à-vis des compromis à faire entre « esthético-symbolique » et contraintes budgétaires. Ainsi, les architectes préfèrent mettre en avant leur apport culturel comme le souligne aussi l’analyse de Florent Champy, « la capacité des architectes à produire du non-reproductible et/ou à faire valoir leurs produits comme tels serait le dernier domaine sur lequel les architectes pourraient faire valoir leur exclusivité ? Le processus de stratification symbolique, expression de leur seule revendication à être les seuls détenteurs des critères de leur évaluation, fonctionnerait alors au bénéfice plus ou moins conscient et avoué de tous, fournissant à l’ensemble de la profession les arguments de sa prédominance, voire de son quasi-monopole, sur la maîtrise de la dimension esthético-symbolique de la production de l’espace ».3 Ces propos doivent tout de même être nuancés car une autre donnée pousse les architectes à s’éloigner des missions d’exécution. C’est en effet la venue de nouveaux acteurs sur le marché de la construction tels que les contractants généraux et entreprises générales qui développent une tout autre logique que les architectes, celle de la rentabilité. Ces entreprises s’exposent à des risques financiers assez importants lorsqu’elles sont missionnées pour un chantier et l’une de leurs principales préoccupations va être de s’assurer que leurs dépenses en fournitures et en main d’œuvre correspondent bien au marché qu’elles ont signé. De plus, elles doivent être en mesure de garder un certain pourcentage sur chacune des prestations afin de faire vivre l’entreprise et collecter de la trésorerie pour palier 1

CHADOIN Olivier, Être architecte : Les vertus de l’indétermination, Pulim, 2017, p.89-90. 2 CHAMPY Florent, Sociologie de l’architecture, La Découverte, 2001, p.108. 3 CHAMPY Florent, Sociologie de l’architecture, La Découverte, 2001, p.63. 20


à d’éventuels aléas de chantier. En cela, du point de vue de l'exécution, ces entreprises partagent la même logique que certains maîtres d’ouvrages, à savoir, construire efficacement et le moins cher possible. Par conséquent, l’architecte, désireux de faire valoir une qualité de finition, de détails architecturaux et d’espaces de vie répondant aux attentes de la commande, se trouve dans une posture très délicate lorsque les deux entités énoncées plus haut se rejoignent sur ces mêmes intérêts. Selon les études d’Archigraphie 2020, seulement 4% des maisons individuelles de moins de 170 m² étaient construites en mission complète de maîtrise d’œuvre par les architectes alors que cette proportion s’élevait à 18% pour les maisons de plus de 170 m² de surface de plancher, où le recours à l’architecte est rendu obligatoire par la Loi du 3 janvier 1977 pour l’établissement du permis de construire. Ainsi, 90 % des maisons individuelles se font sans architecte et 70 % des projets privés se font sans que ceux-ci assurent la maîtrise d'œuvre du chantier. Ce constat est à l'opposé de ce qui se passe dans la construction publique, bien mieux organisée du fait de la loi MOP (aujourd’hui Code de la Commande Publique), qui dans la mission de base de l'architecte inclut obligatoirement la direction de l'exécution des travaux.

Statistiques issues de l’étude Archigraphie 2020, portant sur l’évolution de la maîtrise d’œuvre en mission complète concernant la maison individuelle, p.109

Ainsi, Régis Chaumon, ex président de l’Union National des Syndicats Français d'Architectes (UNSFA), constate ceci dans un article du Moniteur paru en 2018 : « Il est beaucoup plus simple pour le maître d'ouvrage de s'adresser au fabricant d'un produit «clé en main» qui lui présentera un parcours sans obstacle. (…) En cas de 21


complication, la situation peut être dramatique et conduire à la ruine du maître d'ouvrage, car ni la garantie d'achèvement, ni celle de l'assurance dommageouvrages (si elles existent !) ne rentreront toujours et totalement en application. »4 De ce fait, on entre dans une spirale d'extinction qui écarte le recours à l'architecte et le met de plus en plus hors du circuit des projets de construction (grands et petits). « Plus les architectes sont condamnés, plus chère est leur intervention en raison des coûts d'assurance et de la difficulté de leur travail. Plus compliquée est leur intervention, plus le risque de mise en cause est grand, plus contraignantes sont leurs demandes. Plus les maîtres d'ouvrage se passent de leur service et de leur expérience, moins qualitatives sont les constructions et plus il y a de sinistres. Plus il y a de sinistres sans architecte et moins les usagers ont de garanties. »5 Pour résumer, on constate deux phénomènes, d’une part les architectes s’éloignent de plus en plus des missions d’exécution en raison de la complexité de ces dernières et des contraintes de coût et de temps et d’autre part, une mise à l’écart des architectes par la maîtrise d’ouvrage en raison de l’alourdissent des démarches qu’il devra réaliser afin d’assurer aux deux parties une certaine sécurisation à l’inverse des constructeurs qui fourniront au maître d’ouvrage un projet clé en main encourant ainsi le risque de nombreux litiges et sinistres. Actant de ce constat, nous allons pour la suite, partir du principe que l’architecte maître d’œuvre est en charge d’une mission complète et nous allons tenter d’identifier les différentes raisons d’un dépassement budgétaire d’un ouvrage et quels sont les méthodes et outils pour palier à ces problèmes de coûts.

CONSTAT DES DIFFÉRENTES RAISONS D’UN DÉPASSEMENT BUDGÉTAIRE Lors de l’exécution d’un chantier, la contrainte budgétaire est omniprésente et il est quasiment systématique de devoir réaliser des travaux supplémentaires causant ainsi un dépassement du budget initial. Les travaux supplémentaires (TS) se résument pour les maîtres d’ouvrage, le maître d’œuvre et les entreprises par une équation simple : « le montant du marché exécuté est supérieur au montant du marché notifié. Le montant des travaux supplémentaires ainsi réalisés n'étant pas 4 5

CHAUMON Régis, Article paru dans Le Moniteur, 2018. Cf. op. cit. 22


couvert par le prix du contrat de base, la question se pose de leur indemnisation, que ces travaux aient été décidés par le maître d'ouvrage et notifiés à l'entrepreneur, ou qu'ils aient été exécutés par ce dernier, à son initiative, en raison de leur caractère indispensable à l'exécution de l’ouvrage. »6. En d’autres termes, les travaux supplémentaires se définissent comme des travaux non prévus au marché initial. Ainsi, ces travaux supplémentaires représentent un vrai point noir dans l’exécution d’un chantier et demandent au maître d’œuvre un travail considérable dans l’analyse, la vérification et la justification des coûts supplémentaires qu’ils engendreront. Dans un premier temps, l’analyse que devra faire l’architecte consiste à discerner clairement la ou les raisons des travaux supplémentaires. Il existe quatre raisons principales de modification lors d’un chantier :

Demande du maître d’ouvrage : « Il s’agit soit des modifications de programme ou de prestations réellement demandées par le maître d’ouvrage, soit des propositions d’améliorations faites par le maître d’œuvre et validées par le maître d’ouvrage, soit des demandes du contrôleur technique ou SPS qui vont au-delà de la réglementation ou qui sont différentes des accords donnés précédemment. »7 Si cela concerne une demande supplémentaire du maître d’ouvrage, l’architecte peut alors être amené à réaliser un chiffrage prévisionnel afin que le maître d’ouvrage puisse prendre sa décision. Bien entendu, s’il s’agit d’une demande supplémentaire de la maîtrise d’ouvrage, les couts des TS seront à sa charge. Négligence du maître d’œuvre : « Dans le dossier marché, il peut exister des erreurs, des oublis ou des incohérences entre les différentes pièces du marché. »8 En effet, l’erreur étant humaine, il n’est pas rare de constater certaines négligences de la part des maîtres d’œuvre notamment pour des projets de grande ampleur et cela peut coûter relativement cher à l’architecte. En marché public, pour les contrats soumis au Code de la Commande Publique (CCP), il existe souvent une notion de taux de tolérance pour le chantier qui permet au maître d’œuvre d’avoir une certaine marge d’erreur possible sans qu’il ait à couvrir de lui-même les frais des travaux supplémentaires. En revanche, en marché privé, si le maître d’œuvre n’a pas négocié avec le maître d’ouvrage un certain taux de tolérance dans les

6

BERBARI Mireille, Article paru dans Le Moniteur, 1998. FORGUE Michel & CHANCEAULME Renaud, Profession Architecte, sous la direction d’Isabelle Chesneau, Eyrolles, 2020, p.580. 8 FORGUE Michel & CHANCEAULME Renaud, Profession Architecte, sous la direction d’Isabelle Chesneau, Eyrolles, 2020, p.580. 7

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clauses du contrat, alors, le maître d’ouvrage peut lui demander de prendre à sa charge les coûts des travaux supplémentaires qui seront imputés à ses honoraires.

Négligence du constructeur de l’ouvrage : Il est également possible que la ou les entreprises mandatées pour la réalisation des travaux commettent des erreurs lors de la remise de leurs offres et s’en rendent compte au moment de l’exécution. Dans ce cas soit l’entreprise est transparente en communiquant à l’architecte leur erreur de chiffrage et qu’elle en assume les frais supplémentaires, soit elle décide d’occulter cette ou ces erreurs afin que le maître d’ouvrage ou le maître d’œuvre en assument les frais. Dans ce dernier cas, la tâche de l’architecte dans la vérification et la compréhension des travaux supplémentaires peut devenir un véritable casse-tête en fonction du type de marché, s’il a été conclu sur un prix forfaitaire ou sur un prix unitaire. « Dans un marché à prix unitaire, l’entreprise est réglée en fonction des quantités réellement mises en œuvre. »9 Il est alors relativement simple pour l’architecte de constater où se trouve l’erreur en se référant au détail de chaque prix à l’unité. En revanche, « dans un marché à prix forfaitaire, l’entreprise s’engage sur un montant forfaitaire qui doit lui permettre de réaliser l’ouvrage dessiné et décrit dans les pièces du marché »10 rendant la vérification pour l’architecte presque impossible. C’est effectivement une question de bonne foi. Malheureusement il est assez fréquent, et pour certaines entreprises, c’est même devenu un « sport » en rendant la plusvalue toujours plus chiche et en renvoyant la faute sur l’architecte. L’entreprise se justifiera alors par le fait que les pièces graphiques n’étaient pas suffisamment claires ou pas suffisamment décrites. Cela conduit à de gros conflits que l’architecte se doit de manier avec agilité mais cela entraine à coup sûr une dégradation considérable des relations entre les parties et une coûteuse perte de temps et d’énergie pour l’architecte. Aléas et évènements extérieurs imprévus : « Par exemple, on peut rencontrer sur le terrain une nature de sol que les sondages n’ont pas permis de mettre en évidence, ou une canalisation non repérée, ou bien en réhabilitation une structure ne correspondant pas aux relevés effectués avant le curage du bâtiment. »11 Dans ce cas, l’architecte devra se demander si ces aléas aurait

9

FORGUE Michel & CHANCEAULME Renaud, Profession Architecte, sous la direction d’Isabelle Chesneau, Eyrolles, 2020, p.576. 10 Cf, Op, Cit. 11 FORGUE Michel & CHANCEAULME Renaud, Profession Architecte, sous la direction d’Isabelle Chesneau, Eyrolles, 2020, p.580. 24


pu être détectés dans le cadre des études préliminaires normalement diligentées et si oui, à qui revient la responsabilité des sondages et diagnostiques afin de convenir à qui devra revenir les frais des travaux supplémentaires en question. La question de l’analyse et des raisons des travaux supplémentaires étant faite, il convient par la suite d’en informer la maîtrise d’ouvrage. En effet, nous pouvons rappeler le Code de la déontologie des architectes qui stipule : « l’architecte doit s’abstenir de prendre toute décision ou de donner tous ordres pouvant entrainer une dépense non prévue ou qui n’a pas été préalablement approuvée par le maître d’ouvrage »12. L’analyse du maître d’œuvre se présente généralement sous la forme d’un tableau avec une colonne « prix entreprise » et une colonne « prix maître d’œuvre ». Après accord du maître d’ouvrage sur les raisons, sur le coût, sur l’impact du planning travaux et sur la nécessité de réaliser ces travaux supplémentaires, il conviendra de réaliser des ordres de service destinés aux entreprises qui devront être signés par la MOE et par la MOA. « L’ordre de service (…), ou un autre ordre de service intervenant au plus tard quinze jours après, notifie au titulaire les prix proposés pour le règlement des travaux nouveaux ou modificatifs. Ces prix qui ne sont pas fixés définitivement, sont arrêtés par le maître d’œuvre après consultation du titulaire. »13. Il est fréquent sur les chantiers de voir des entreprises qui commencent, et parfois terminent, la réalisation des travaux supplémentaires sans avoir encore reçu du maître d’œuvre l’ordre de service notifiant l’accord sur leur réalisation. Comme l’explique Léonard Hamburger, « cette pratique est à éviter, car elle provoque couramment des différents ultérieurs avec les entreprises. Les travaux supplémentaires doivent être précédés d’un ordre de service, tant sur les petits chantiers que sur les grands »14. Les

travaux

supplémentaires

lors

d’un

chantier

sont

malheureusement

pratiquement inévitables et comme nous avons pu le voir plus tôt, cela entraîne des dépassements budgétaires et par la même occasion, cela est synonyme de retards de chantier. Néanmoins, le rôle de l’architecte est de les limiter le plus possible et surtout d’éviter que les TS apparaissent par sa faute. Cela se joue principalement entre la fin de la phase d’étude et le démarrage du chantier, ou l’architecte, de par

12

Cf. Code de déontologie des architectes, consultable sur http://www.architectes.org 13 Cf. Article 14, Arrêté du 8 septembre 2009 portant approbation du cahier des clauses administratives générales, Consultable sur http://www.legifrance.gouv.fr 14 HAMBURGER Léonard, Maître d’œuvre bâtiment, Eyrolles, 2021, p.499. 25


son expérience et sa perspicacité, se doit de détecter à temps les impasses des contractants. En somme, prévenir plutôt que guérir.

LES ENJEUX DU PRO/DCE À L’APPEL D’OFFRE En effet, les éléments de mission se situant entre la fin des missions d’étude et le début des missions d’exécution sont cruciaux pour aborder le chantier de manière optimale. Cette phase d’entre deux se décline en deux missions principales :

• Mission PRO / DCE : La mission PRO qui vient juste après la mission APD consiste à préciser à l’aide de plans, coupes et élévations, les formes des différents éléments de la construction, la nature et les caractéristiques des matériaux et les conditions de leur mise en œuvre. C’est une étape essentielle permettant d’établir un coût prévisionnel des travaux décomposés par corps d’état (DPGF) sur la base d’un avant métré. Cette évaluation permet par la suite au maître de l’ouvrage, d’arrêter le coût prévisionnel de la réalisation de l’ouvrage et, par ailleurs, d’estimer les coûts de son exploitation. L’APD et le PRO servent de base à la mise en concurrence des entreprises. À cela vient s’ajouter les pièces administratives (RICT, CCAG, CCAP, CCTP, planning prévisionnel, contrats d’assurances etc.) qui dans son ensemble vient constituer le Dossier de Consultation des Entreprises (DCE).

• Mission ACT :

L’assistance apportée au maître de l’ouvrage pour la

passation du ou des contrats de travaux a pour objet de préparer la consultation des entreprises en fonction du mode de passation des marchés que nous aborderons plus tard. L’ACT a également pour objet de sélectionner les candidats qui répondront à l’appel d’offres, d’analyser les différentes offres permettant par la suite la passation du ou des contrats de travaux par le maître d’ouvrage. Ces éléments de missions constituent un enjeu déterminant pour l’architecte en vue de la bonne réussite du projet. Il convient donc, avec l’aide des autres entités composant la maîtrise d’œuvre (BET, bureau de contrôle, CSPS, CSSI…) de détailler le projet le plus possible à l’aide de plans, coupes, élévations et détails techniques dans le dossier PRO. Afin d’éviter certaines déconvenues lors du chantier, il est également très utile que la maîtrise d’œuvre réalise précisément le métré de chaque élément du projet afin de constituer elle-même la Décomposition du Prix Global et 26


Forfaitaire. Cela permet à l’architecte d’avoir une vision précise et globale de tous les éléments décomposés par lots pour le suivi du chantier mais surtout, cela permet d’estimer les coûts prévisionnels du projet, de permettre aux entreprises de chiffrer sur une même base pour la cohérence de l’appel d’offres et enfin, cela permet par la suite dans le cas de TS, de vérifier plus facilement si les travaux en question étaient compris ou non dans le marché de base. Vient ensuite la phase d’Assistance à la passation des marchés de travaux qui est essentiellement un devoir de conseil qu’exerce l’architecte pour le compte du Maître d’ouvrage. Il faudra dans un premier temps convenir de la stratégie de l’allotissement des marchés, c’est à dire, définir si les marchés travaux seront passés par corps d’état séparés ou entreprise générale. Chaque type d’allotissement de marché a ses avantages et ses inconvénients comme décrit dans le tableau cidessous.

Avantages Corps d’état séparés

- Meilleur contrôle du choix des entreprises.

- Le maître d’œuvre pilote

directement les entreprises, d’où une meilleure qualité de travaux.

Inconvénients

- Travaux supplémentaires plus

nombreux du fait des limites de prestations entre lots.

- Nécessité d’un OPC

- Coûts inférieurs Entreprise Générale

- Travaux supplémentaires moins nombreux grâce aux interfaces moindres.

- Le maître d’ouvrage peut

normalement se dispenser d’un OPC.

- Meilleure tenue des délais (en théorie).

- Gestion du chantier plus simple

pour le maître d’œuvre car il n’y a souvent qu’un seul interlocuteur coté entreprise.

- Risque de désignation

d’entreprises sous-traitantes peu qualifiées par l’entreprise générale, les délais serrés limitant les possibilités de refus par la MOA ou la MOE.

- Risque de moins bonne qualité des travaux car les instructions du maître d’œuvre sont parfois déformées par le mandataire lors de leur transmission aux sous-traitants.

- Coût supérieur du marché.

Suivant le constat de Léonard Hamburger, on peut retenir que « si la qualité des travaux est prioritaire, les corps d’état séparés sont préférables ; si le respect des 27


délais est prioritaire, l’entreprise générale est préférable. »15. Le conseil de l’architecte vis à vis du maître d’ouvrage peut donc se baser sur ces critères afin d’aider le choix de ce dernier mais ce ne peut être le seul élément de décision. En fonction de la taille, des spécificités programmatiques, et de la complexité du projet, il sera plus intéressant de choisir un type d’allotissement de marché plutôt qu’un autre. En effet, un marché de travaux passé en corps d’état séparés demandera à la maitrise d’ouvrage un investissement et une organisation plus conséquente et rigoureuse mais aboutira à une plus grande qualité de finition. Le corps d’état séparé se prêtera donc bien à des projets à petite échelle tels que des maisons individuelles, des magasins, restaurants, aménagements intérieurs ou certains projets de réhabilitation / restauration. En revanche pour des projets de plus grande ampleur, il sera plus simple pour la maîtrise d’œuvre de traiter avec des entreprises générales. Néanmoins, le Code de la Commande Publique prévoit les corps d’état séparés comme étant la solution de référence, dans le but de favoriser l’accès des PME à la commande publique « l’acheteur public qui décide de ne pas allotir doit motiver son choix »16. Une fois l’allotissement des marchés choisi par la maîtrise d’ouvrage, il faudra convenir du type de marché pour l’appel d’offre, à savoir, un marché global et forfaitaire ou un marché à prix unitaire. Comme vu précédemment cela pourra, par la suite, avoir un impact en cas de travaux supplémentaires lors de la phase chantier. Enfin lors de la constitution des pièces administratives, il conviendra d’y incorporer les clauses administratives particulières (CCAP), sous ce nom ou sous un autre nom. Le maître d’ouvrage pouvant s’il le souhaite, utiliser le CCAG type proposé par la norme volontaire NF P03-001, et le modifier par un CCAP de son cru. Cette norme volontaire ne s’applique, bien entendu, qu’aux marchés qui la citent explicitement comme une pièce contractuelle. Afin de se prémunir de certains aléas lors de la phase chantier, il sera important d’y préciser les seuils de tolérance, les pénalités de retards, les responsabilités contractuelles ainsi que les niveaux de sous traitance tolérés. En effet, ce dernier point sur la sous-traitance est un élément important à prendre en compte s’il on veut pouvoir régler les conflits entre les différents corps d’état sur un chantier : moins il y aura de sous-traitants, plus l’organisation sera simplifiée et moins il y aura de conflits entre les différents compagnons. Par ailleurs, comme le souligne Xavier Fabre, « de plus en plus de chantiers sont confrontés à l’emploi de travailleurs intermédiaires, qui sont parfois sous-équipés et sous15

HAMBURGER Léonard, Maître d’œuvre bâtiment, Eyrolles, 2021, p.485. Cf. Article R2113-2 du Code de la commande publique, consultable sur http://www.code-commande-publique.com 16

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expérimentés, mal encadrés et peu intégrés à l’entreprise. (…) Il faut donc d’autant plus faire vivre ces procédures de précautions, en bonne intelligence avec la qualité de réalisation des ouvrages, c’est à dire en expliquant et en appliquant strictement la loi. »17 Ce faisant, il faudra par la suite analyser les offres de chaque entreprise lors de l’appel d’offre. Pour les comparer il sera utile de créer un tableau en comparant le prix de chaque entreprise pour chaque lot afin d’établir une valeur médiane permettant d’indiquer aux entreprises les lots qui ne sont pas cohérents par rapport à leur concurrents afin de leur permettre de les ajuster pour une offre révisée. Si l’un des lots est beaucoup moins cher que celui des concurrents c’est qu’il y a probablement une erreur sur les quantités et il faudra donc s’attendre à des TS. En revanche si le prix est beaucoup plus cher que celui des concurrents cela peut être dû à une difficulté à chiffrer le lot, gonflant donc volontairement les prix pour être sûr de rentrer dans ses frais. Une fois les offres révisées et une seconde fois analysées, le maître d’ouvrage pourra alors juger quelle entreprise a été la plus sérieuse et la plus cohérente lors de l’ensemble de l’appel d’offre.

Tableau de comparaison des offres des trois entreprises sélectionnées pour l’appel d’offres

Enfin, une fois le marché signé, l’architecte devra, s’il y en a, analyser et valider les demandes d’agréments des sous-traitants, en vérifiant, les assurances (RC et décennale si besoin), l’attestation URSSAF, l’attestation caisse de congés payés, l’extrait K-BIS, l’attestation relative au travail illégal, le chiffre d’affaires de l’entreprise

17

FABRE Xavier, Profession architecte, sous la direction d’Isabelle Chesneau, Eyrolles, 2020, p.560. 29


sur l’année passée, les cartes BTP des intervenants, ainsi que la liste du personnel étranger de l’entreprise. Tous ces éléments pouvant être vérifiés par les autorités compétentes en cas de litiges ou de sinistres. Il est donc de la responsabilité de l’architecte maître d’œuvre d’être vigilant sur ses points afin de se protéger et de protéger son client.

L’IMPORTANCE DU SUIVI FINANCIER EN PHASE CHANTIER SI l’on a pu voir précédemment, que le maître d’œuvre doit être en mesure de rédiger les descriptifs travaux, de réaliser les estimations et d’analyser les offres des entreprises, il n’en demeure pas moins important, lors de la phase chantier, d’assurer un suivi financier constant et rigoureux. Ce suivi se décline en trois tâches essentielles : •

Réceptionner, analyser, contrôler et confirmer les situations de règlement des entreprises.

Préparer et produire les ordres de service et avenants qui viendraient valider les travaux supplémentaires en plus ou moins-values.

Établir le bilan des décomptes définitifs de chaque entreprise en fin de travaux.

En effet, ces tâches impliquent une présence de l’architecte dans les réunions de chantier quotidiennes afin de réaliser un suivi précis de l’avancement des travaux. « Le suivi d’un bilan financier continu de l’opération est essentiel pour gérer les plus et moins-values, veiller à l’équilibre du budget de travaux, tenir le registre des causes de variations financières. »18. Il est donc utile que l’architecte puisse établir un tableau des OS, des avenants, des actualisations des situations d’avancement transmises par les entreprises et leurs règlements. Le maître d’œuvre est alors souvent contraint de jongler entre qualité de l’exécution des ouvrages, délais, et contraintes financières ce qui engendre presque systématiquement des litiges car le chantier se résume souvent à un conflit entre les délais, la quantité de main d’œuvre induite, le coût des matériaux employés ainsi que leur mise en œuvre et, bien sûr, l’impératif de rentabilité de l’entreprise. Comme le souligne Xavier Fabre, « il faut cependant mettre avant la raison technique les règles de l’art, la qualité finale, les objectifs de service rendu de l’ouvrage exécuté etc., pour ne pas se laisser emporter dans d’uniques considérations financières, qui doivent être traitées dans le 18

FABRE Xavier, Profession architecte, sous la direction d’Isabelle Chesneau, Eyrolles, 2020, p.571. 30


cadre strict du marché. »19, d’où l’importance d’être extrêmement rigoureux lors de la phase PRO / DCE. Pour se faire, il faudra également que l’architecte sache comprendre et s’adapter aux différentes typologies d’entreprises. En effet, ces sujets ne vont pas être traités de la même manière dans une petite entreprise habituée à travailler en confiance et ne disposant pas d’un grand personnel administratif, ou dans une grande entreprise dotée d’un service contentieux et juridique à l’affut du potentiel gain financier compensatoire de chaque événement de chantier. Les petites entreprises ne font généralement pas de courriers recommandés par faute de moyens en personnel administratif. Elles axeront donc leur stratégie sur une relation de confiance. Il est donc important que l’architecte ait conscience que l’usage d’un ou plusieurs courriers recommandés vers ce type d’entreprise, pourra les choquer et être considéré comme une rupture d’un contrat moral tacite de confiance réciproque. Il sera donc préférable que le maître d’œuvre n’agisse de la sorte qu’en cas de manquements répétés ou de mauvaise foi flagrante afin de défendre les intérêts du maître d’ouvrage. Les plus grandes entreprises auront quant à elles une tradition contentieuse bien plus ancrée et adresseront un courrier au maître d’œuvre et au maître d’ouvrage dès qu’un fait sur le chantier pourra induire une réclamation. Sur ce constat, l’architecte devra alors être conscient qu’avec ces entreprises, tout document transmis à l’entreprise après la signature du marché peut être une pierre à l’édifice d’un futur litige. Et ceci, même si l’architecte croit bien faire en ajoutant davantage de détails à un élément constructif dans l’optique de faciliter la réalisation de ce dernier. Outre cette veille, destinée à anticiper la réponse au dossier de réclamation, il convient de prendre le temps, durant tout le déroulement du chantier, d’analyser impartialement les devis de travaux supplémentaires comme on a pu le voir dans les chapitres précédents. En effet, si l’on parvient, ce qui n’est pas toujours évident, à obtenir un compromis en cours de chantier entre l’entreprise et le maitre d’ouvrage sur les montants des TS, alors la réclamation sera souvent diminuée. En revanche, si le maître d’œuvre s’obstine à refuser systématiquement tous les devis, cela ne fera que reporter le problème, et l’analyse lors du Décompte Global et 19

FABRE Xavier, Profession architecte, sous la direction d’Isabelle Chesneau, Eyrolles, 2020, p.568. 31


Définitif (DGD) en fin de chantier ne sera que plus difficile. Les devis doivent donc faire l’objet d’une analyse objective et quotidienne afin d’identifier si oui ou non la prestation était incluse au marché de base et ceci, au fur et à mesure du chantier, tant que les éléments justificatifs sont encore présents, ou leur absence patente. On retrouve ces notions dans ce que Léonard Hamburger décrit comme le « Hard Contract Management » et le « Soft Contract Management ». Le « Hard Contract Management » est décrit comme une attitude qui consiste à repousser la résolution des différents en fin d’opération. « les relations contractuelles sont tendues, chaque intervenant exploitant au maximum les droits et obligations des parties, avec un volume important de courriers recommandés, nécessaires pour assurer la traçabilité des événements jusqu’à la réclamation finale. »20. Cela engendre souvent des litiges importants qui peuvent entrainer la réalisation de prestations bâclées voir, dans les cas les plus extrêmes, une démission de l’entreprise engendrant un arrêt de chantier allant ainsi vers le contentieux devant les tribunaux. À l’opposé, le « Soft Contrat Management » est désigné comme étant l’attitude qui consiste à s’atteler à obtenir tout au long du chantier un accord avec les entreprises sur tous les suppléments et litiges. « les devis reçus sont négociés méthodiquement jusqu’à l’obtention d’un consensus, et les ordres de service (ou les avenants) ne sont émis qu’après accord entre les parties. »21. Dans cette méthode, chaque partie démontre une véritable volonté de trouver une solution acceptable pour tous face aux aléas de chantier et les risques et responsabilité sont ainsi partagés. Il s’agit donc ici d’une approche collaborative qui sera appréciable vis-à-vis de la maîtrise d’ouvrage grâce aux économies que cette stratégie « gagnant-gagnant » génère. Bien sûr, la situation réelle, pratique, d’une conduite de projet n’est jamais aussi tranchée. Les réalités et difficultés de chaque projet sont diverses et poussent chaque maître d’œuvre à s’adapter constamment en fonction du type et de la qualité des intervenants mais aussi des défis à relever. Toutefois, il sera toujours utile de garder à l’esprit cette dualité entre HCM et SCM de manière à « orienter » son action de la manière la plus positive possible pour chaque projet. Il n’existe pas de solution miracle ou infaillible, mais, sur le long terme, une attitude collaborative dans la résolution des difficultés s’avèrera sans doute plus efficace et contribuera grandement à la bonne réputation et au respect de l’architecte dans ses fonctions de maître d’œuvre.

20 21

HAMBURGER Léonard, Maître d’œuvre bâtiment, Eyrolles, 2021, p.495. HAMBURGER Léonard, Maître d’œuvre bâtiment, Eyrolles, 2021, p.496. 32


CONCLUSION

Il est tout d’abord primordial que les architectes réinvestissent les missions d’exécutions en convainquant la maîtrise d’ouvrage de l’importance de la généralisation des savoirs que détient l’architecte permettant ainsi d’assurer la coordination et l’harmonisation des différents corps de métiers dans la production de plans d’exécutions et du suivi de chantier. C’est en reconquérant ces missions et en s’attachant de manière rigoureuse aux contraintes de temps et de budget qu’il pourra de nouveau devenir un acteur non seulement incontournable mais indispensable dans la réussite d’un projet architectural. De plus, il est le seul à défendre des principes architecturaux environnementaux, sociologiques et esthétiques qui sont propres à sa formation. Sans cet acteur, durant les phases d’exécution, ces valeurs fondamentales et les innovations qui en découlent sont délaissées au seul service des intérêts immédiats des maîtres d’ouvrage, promoteurs et entreprises de construction. Dans cette démarche, le premier enjeu qui s’impose à lui, consiste en la compréhension parfaite des intérêts et des contraintes de chacun des acteurs de la construction. En effet, l’analyse, de la part de l’architecte, du triptyque coût, bénéfice, risque, doit-être compris très tôt dans le projet afin d’orienter au mieux ce dernier dans la phase d’étude et ainsi faire l’économie des déconvenues lors des phases d’exécutions. Le second enjeu consiste à exercer pleinement son devoir de conseil vis-àvis de la maîtrise d’ouvrage en l’accompagnant tout au long du processus de conception et de réalisation. Celle-ci étant essentielle. Il en est de son devoir déontologique bien sûr, mais c’est aussi dans son propre intérêt s’il parvient à bien discerner les objectifs profonds du maître d’ouvrage. Il fera valoir de manière pragmatique ses arguments dans l’intérêt de son client afin de pérenniser la relation d’affaires avec ce dernier. Ceci lui permettra d’améliorer sans cesse ses méthodes de 33


conception - réalisation. Pour ce faire, le maître d’œuvre, dans une optique d’optimisation de son domaine pluridisciplinaire, doit se former en continu (formation continue qui fait partie des obligations imposées par l’Ordre) sur des champs d’expertises élargis, et s’entourer le plus possible, de professionnels tels que des économistes et ingénieurs de la construction afin de renforcer ses savoirs. Cette démarche tendrait vers une organisation des acteurs de l’acte de construire moins pyramidale, plus horizontale, harmonisant ainsi les responsabilités de manière plus homogène et délivrant par la même occasion de meilleures prestations et une plus grande qualité des ouvrages dans le respect des contraintes de coûts et de délais. Dans ce processus, l’architecte apparaitrait comme étant l’assemblier des compétences nécessaires à la bonne conduite du projet en étant par là même le garant de l’intérêt général. Une démarche dans laquelle l’architecte retrouverait une place centrale et une réputation sociale et professionnelle indiscutable.

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GLOSSAIRE

ABF : Architecte des Bâtiments de France

DTU : Document Technique Unifié

ACT : Assistance pour la passation des Contrats de Travaux

EP : Étude Préliminaire

AMO : Assistance à Maîtrise d’Ouvrage

ERP : Établissement recevant du public

AOR : Assistance aux Opérations de Réception

ESQ : Esquisse

APD : Avant-Projet Définitif

MOA : Maîtrise d’Ouvrage

APS : Avant-Projet Sommaire

MOE : Maîtrise d’Œuvre

AR : Assistance à Réception

MOP : Maîtrise d’Ouvrage Publique

BDC : Bureau De Contrôle

OPC : Ordonnance Pilotage Coordination

BET : Bureau d’Étude Technique

OS : Ordre de Service

BPE : Bon Pour Exécution

PC : Permis de Construire

BTP : Bâtiment et Travaux Publics

PGC : Plan Général de Coordination

CCAG : Cahier des Clauses Administratives Générales

PLU : Plan Local d’Urbanisme

CCAP : Cahier des Clauses Administratives Particulières

PMR : Personne à mobilité réduite

CCTP : Cahier des Clauses Techniques Particulières

PPP : Partenariat Public Privé

CSPS : Coordonnateur de Sécurité et de Prévention de la Santé

PPSPS : Plan Particulier de Sécurité et de Prévention de la Santé

CSSI : Coordonnateur du Système de Sécurité Incendie

PRO : Phase Projet

DAACT : Déclaration Attestant de l’Achèvement et de la Conformité des Travaux

RICT : Rapport initial de Contrôle Technique RT : Règlementation Thermique

DCE : Dossier de Consultation des Entreprises DET : Direction de l’Exécution des travaux

RVRAT : Rapport de Vérifications Réglementaires Après Travaux

DIAG : Diagnostique

SPS : Sécurité et Prévention de la Santé

DICT : Déclaration d’Intention de Commencer les Travaux

SSI : Système de Sécurité Incendie

DOC : Déclaration d’Ouverture de Chantier

TGBT : Tableau Général Basse Tension

DOE : Dossier des Ouvrages Exécutés

TS : Travaux Supplémentaires

DP : Déclaration Préalable

VISA : Examen des documents d’exécution et avis du MOE

DPGF : Décomposition du Prix Global et Forfaitaire

VRD : Voiries et Réseaux Divers

DTA : Document Technique d’Application

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BIBLIOGRAPHIE

OUVRAGES

- BENCHIMOL Vidal, Les nouveaux bâtisseurs, Alternatives, 2020. - CHADOIN Olivier, Être architecte : Les vertus de l’indétermination, Pulim, 2017.

- CHAMPY Florent, Sociologie de l’architecture, La Découverte, 2001. - CHESNEAU Isabelle, Profession Architecte, Eyrolles, 2020. - FÈVRE Brice & FOURAGE Sébastien, Mémento du conducteur de travaux, Eyrolles, 2019.

- HAMBURGER Léonard, Maitre d’œuvre bâtiment, Eyrolles, 2021. - TERRIN Jean-Jacques, Conception collaborative pour innover en architecture, L’Harmattan, 2013.

ARTICLES & DOCUMENTS

- Arrêté du 22 mars 2019 précisant les modalités techniques d’exécution des éléments de mission de maître d’œuvre confiés par des maître d’ouvrage publics et des prestataires de droit privé Consultable sur Légifrance

- Le CCAG travaux - Consultable sur Légifrance dans l’arrêté du 8 septembre 2009.

- Le guide OGBTP, consultable sur Qualibat, établi par l’Office général du bâtiment et des travaux publics.


- La norme volontaire NF P 03-001, relatif aux marchés privés, consultable sur le site de l’Afnor.

SITES INTERNET

- www.ademe.fr - www.architectes.org - www.batiactu.com - www.cstb.fr - www.ffbatiment.fr - https://www.legifrance.gouv.fr - www.lemoniteur.fr - www.maf.fr - www.qualibat.com

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ANNEXES PARCOURS Féru de dessin et de peinture dès la plus tendre enfance, j’ai choisi de m’orienter dès la fin du collège vers un établissement scolaire d’arts appliqués ou j’ai pu découvrir différentes formes artistiques telles que la sculpture, la peinture, l’imprimerie, la publicité, la maquette architecturale etc. Cette formation a débouché dans un premier temps vers un CAP en communication graphique puis vers un Brevet de Technicien en dessinateur maquettiste. À la suite de ce cursus différents établissements scolaires supérieurs m’intéressaient beaucoup mais l’idée de me cantonner à une seule et même discipline ne me convenait pas. Je me suis donc inscris dans une PREPA générale à l’Institut Supérieur des Arts Appliqués (LISAA) où j’ai pu bénéficier d’une formation riche, allant de la mode, en passant par le graphisme et l’animation 3D jusqu’à l’architecture d’intérieur et le design d’objet. C’est dans cette dernière catégorie que j’ai choisi de poursuivre mon parcours scolaire à LISAA, ce qui m’a permis d’obtenir un Master en architecture d’intérieur et design d’environnement. Ce cursus a été une réelle révélation pour moi et m’a apporté une grande satisfaction de par la mixité des compétences artistiques et techniques nécessaires à cette profession. En effet, la compilation du dessin, du collage, des maquettes, de la CAO pour aboutir à un espace, à des formes volumétriques était pour moi l’accomplissement de mes aspirations initiales. Cependant, lors de ces études et des différents stages en architecture d’intérieur, j’ai rapidement été frustré par des rappels à l’ordre lorsque j’essayais de m’aventurer vers des projets dépassant l’échelle de l’architecture d’intérieur. Dans ce même temps, j’ai eu l’occasion de monter une startup dans le domaine de la bagagerie pour vélo innovante à la suite du premier prix obtenu au startup week-end de l’École Polytechnique. Cette expérience m’a permis de m’associer en tant que designer avec des ingénieurs et commerciaux et de découvrir la vie entrepreneuriale. Toutes ces découvertes étaient extrêmement enrichissantes, galvanisantes même, mais mon appétit pour les formes et les espaces à grande échelle m’indiquait un certain besoin… Un besoin d’expression artistique plus large, un besoin d’apprentissage technique plus poussé mais surtout le besoin d’être au service d’une profession ayant un sens utile fort et nécessaire à chacun, qui ne soit pas considérée comme ornemental ou superflu… 38


Fort de ce constat, j’ai choisi de poursuivre mes études en équivalence à l’École Nationale Supérieure d’Architecture de Paris Belleville ou j’ai pu acquérir des connaissances structurelles, bioclimatiques, sociologiques et bien d’autres encore. Lors de ces études, le large éventail de possibilités programmatiques et leur intégration dans des contextes toujours différents m’offrait des contraintes qui permettaient de canaliser mon imagination en trouvant des solutions pragmatiques et utiles justifiant ainsi mes choix architecturaux, ce qui m’apportait une grande satisfaction. En dépit des savoirs techniques délivrés par l’École d’Architecture, j’avais conscience d’avoir essentiellement un profil créatif. Me sont donc venu les interrogations suivantes : Comment mettre en œuvre ses idées et ses choix architecturaux ? Quels vont-être les jalons et comment se positionne-t-on en tant qu’architecte vis-à-vis des autres corps de métiers qui vont nous aider à mener à bien un projet architectural ? Quels sont les moteurs et les intérêts de chacun dans l’élaboration d’un projet ? Pour trouver des éléments de réponses à ces interrogations il m’a paru essentiel que je me confronte prioritairement au « chantier » en évitant de passer par de longues années en tant que dessinateur-projeteur, poste où finalement, comme j’ai pu le constater lors de mes stages et expériences professionnelles, toutes ces questions énumérées plus haut sont globalement occultées. J’ai donc choisi d’intégrer une agence de taille moyenne traitant essentiellement des projets d’architecture commerciale et m’offrant la promesse à court terme de pouvoir appréhender l’aspect constructif de projets ERP. C’est alors, que le gérant de l’entreprise, deux semaines après mon entrée dans l’agence décide de me mettre à l’épreuve en me mettant seul sur le projet de réaménagement du Hard Rock Café Paris sur les Grands Boulevards représentant une superficie de 964m2. Ce projet m’a permis de me confronter à de nombreux problèmes tels que des travaux phasés avec une exploitation du restaurant en continu, des éléments structurels et des réseaux non diagnostiqués et découverts en phase de démolition, des demandes imprévues de la part du bailleur de l’immeuble, des ordres de service transmis par la maitrise d’ouvrage aux entreprises quatre mois après le démarrage du chantier, un grand nombre de travaux supplémentaires demandés par la maitrise d’ouvrage, et enfin l’épidémie du Covid qui a mis en arrêt complet le chantier. Cette expérience éprouvante mais des plus enrichissante m’a permis de comprendre les relations entre maître d’œuvre et maîtrise d’ouvrage, entre maître d’œuvre et contractant général, ainsi que bon nombre d’aspects techniques et 39


contractuels. Par la suite j’ai pu continuer au sein de l’agence à suivre divers chantiers en temps de chef de projet et j’ai pu appréhender différentes méthodes de suivi de chantier. Afin de compléter mes connaissances acquises au sein de l’agence, j’ai choisis de faire la formation HMONP, me permettant ainsi de clarifier certains aspects de la profession mais également d’acquérir de nouvelles données pour me permettre d’améliorer mon travail et le rendre plus efficace. En effet, pour moi, cette formation a comme objectif de me perfectionner dans la pratique de la maîtrise d’œuvre au sein d’agences d’architecture et dans un second temps, de me permettre d’avoir les connaissances et outils adéquats à la création d’une agence d’architecture.

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ORGANIGRAMME DE L’AGENCE

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PROJETS RÉALISÉS

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