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reportage
Texte Barbara De Munnynck
L A B E L G I Q U E , C E T T E M AT R I E D U J E U N E C I N É M A
PROFESSION : RÉALISATRICE
C’est un caillou dans la chaussure de l’Académie des Oscars. Parmi les plus de 90 récompenses décernées au meilleur réalisateur depuis 1927, seules deux ont été attribuées à une femme. « Mais la prise de conscience fait son chemin », affirme la réalisatrice bruxelloise Laura Wandel, qui a été ovationnée à Cannes cette année pour son premier long métrage, « Un Monde ». Pour la première fois de son histoire, le jury du prestigieux festival français comptait plus de femmes que d’hommes. Coïncidence ou non, la Palme d’or a été décernée à Julia Ducournau, l’une des quatre femmes parmi les 24 nommés. Faut-il plus de femmes critiques pour mieux apprécier l’approche cinématographique féminine ? Et celle-ci existe-t-elle vraiment ? L’actrice hollywoodienne membre du jury cannois Maggie Gyllenhaal en est convaincue : « Les femmes racontent les histoires d’une manière différente. » Parmi la nouvelle vague de réalisatrices belges, le doute subsiste. « Je suis une femme, j’aurai donc une approche féminine », déclare la réalisatrice belgo-roumaine Teodora Ana Mihai. « Mais selon moi, il ne devrait pas y avoir de prix dis-
tinct pour les femmes cinéastes. Je me considère avant tout comme une personne qui fait des films pour d’autres personnes. » À ses yeux, le secteur pourrait néanmoins prendre des mesures pour encourager la diversité. « J’ai longtemps attendu pour avoir des enfants, car j’avais peur d’éprouver des difficultés à combiner vie privée et activité professionnelle. Maintenant que ma fille est là, il se trouve que les choses se passent bien. Mais pourquoi la présence d’une nounou sur le plateau ne figure-t-elle pas au nombre des postes de dépenses dans le budget d’un film ? Et pourquoi tous les festivals ne disposent-ils pas d’une crèche ? Ça nous faciliterait la vie. » L’importance des rôles modèles ne doit pas non plus être sous-estimée. « J’ai eu des tas d’excellents professeurs », déclare Anouk Fortunier. Mais la première qui m’a vraiment comprise, c’est Patrice Toye (réalisatrice belge de « Rosie, sa vie est dans sa tête » et « Muidhond », NDLR). Elle a été mon mentor féminin et m’a aidée à trouver ma voie. » Rencontre avec trois jeunes cinéastes à propos de leurs débuts et du female gaze.
SABINA COSTINEL, PRESSE
Ça n’a pas échappé à l’industrie internationale du cinéma : la Belgique regorge aujourd’hui de jeunes réalisatrices de talent. Dans le monde entier, les premiers films de Teodora Ana Mihai, Anouk Fortunier et Laura Wandel reçoivent un très bon accueil. On vous présente ces trois jeunes femmes fortes habituellement cachées derrière leur caméra. « Un prix distinct pour les femmes cinéastes ? Ce n’est pas nécessaire. »
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