N°174
/
MARS
2022
ART & CULTURE
/
GRATUIT
Hauts-de-France / Belgique
SOMMAIRE magazine LM magazine 174 - mars 2022
NEWS - 08 Lee Sangsoo Peaky Blinders La Maison des géants Tram Expérience Ugly Belgian Houses Les Safra’Numériques STYLE
Illusion Brussels - 12 Remède mirage L’Orient-Express - 18 La légende du rail
© Illusion Brussels
PORTFOLIO - 26
Jérôme Masi Forever Young
RENCONTRE Odezenne - 36 Toujours plus haut Elvire Duvelle-Charles - 66 Clic Revolution
ÉVÉNEMENT Lille Art Up ! - 82 En toute transparence Le Grand Bain - 102 Eaux bouillantes
LE MOT DE LA FIN - 130 © Jérôme Masi
Greenpeace Le plastique c’est fantastique !
SOMMAIRE Sélection
LM magazine 174 - mars 2022
MUSIQUE - 36
Odezenne, Amber Mark, Trentemøller, Polo & Pan, Les Enchanteurs, Rejjie Snow, Hugo TSR, JPEGMafia, Hatik, Dope Lemon, Bebel Gilberto, Randy Newman, Echo & the Bunnymen, Sophie Ellis-Bextor, Joe Jackson, Alfie Templeman, Si ça vous chante !, À travers chants, The Divine Comedy
Les Enchanteurs, Yseult © Thibault Theodore
CHRONIQUES - 64 Disques : Charlotte Adigéry & Bolis Pupul, Laurent Bardainne & Tigre d’Eau Douce, Alex Cameron, Mitski, Yumi Zouma Livres : Sophie Burrows, François Bégaudeau, Raphaël Malkin, James Bridle, Mad Max, au-delà de la radicalité Écrans : Un Peuple, Compagnons, La Brigade, La Nature, Des Mots qui restent, Séries Mania
EXPOSITION - 82 Musée de Picardie, Merci de déranger, Gilles Fromonteil © DR
Lille Art Up !, Musée de Picardie, Michel Vanden Eeckhoudt, Cruising Bye, Pop Art. De Warhol à Panamarenko, Agenda…
THÉÂTRE & DANSE - 102 Le Grand Bain, Kontakthof, Festival Legs, Festival Kicks, La Beauté du geste, Label Danse, Viril, Est-ce que vous pouvez laisser la porte ouverte en sortant ?, Elles en rient encore, Homo Sapiens, Elles vivent, Loustix en fête, Qu’est-ce qu’on fabrique en famille ?, Guillaume Meurice, Guillermo Guiz, Patrick Timsit, Felix Radu, Agenda… Guillaume Meurice © Magali R
MAGAZINE LM magazine – France & Belgique 28 rue François de Badts 59110 LA MADELEINE - F tél : +33 (0)3 62 64 80 09
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Direction de la publication Rédaction en chef Nicolas Pattou nicolas.pattou@lastrolab.com Rédaction Julien Damien redaction@lm-magazine.com Maïssam Mezioud info@lm-magazine.com
Direction artistique Cécile Fauré cecile.faure@lastrolab.com
Administration Laurent Desplat laurent.desplat@lastrolab.com
Couverture Jérôme Masi Childhood www.jeromemasi.com www.behance.net/jeromemasi c @jerome.masi
Réseaux sociaux Sophie Desplat
Publicité pub@lm-magazine.com
Impression Tanghe Printing (Comines) Diffusion C*RED (France / Belgique) ; Zoom On Arts (Bruxelles / Hainaut)
Ont collaboré à ce n° : Thibaut Allemand, Mathieu Dauchy, Marine Durand, Hugo Guyon, François Lecocq, Grégory Marouzé, Jérôme Masi, Raphaël Nieuwjaer et plus si affinités.
LM magazine France & Belgique est édité par la Sarl L’astrolab* - info@lastrolab.com L’astrolab* Sarl au capital de 5 000 euros - RCS Lille 538 422 973 Dépôt légal à parution - ISSN : en cours
L’éditeur décline toute responsabilité quant aux visuels, photos, libellé des annonces, fournis par ses annonceurs, omissions ou erreurs figurant dans cette publication. Tous droits d’auteur réservés pour tous pays. Toute reproduction, même partielle, par quelque procédé que ce soit, ainsi que l’enregistrement d’informations par système de traitement de données à des fins professionnelles, sont interdites et donnent lieu à des sanctions pénales. LM magazine est imprimé sur du papier certifié PEFC. Cette certification assure la chaîne de traçabilité de l’origine du papier et garantit qu'il provient de forêts gérées durablement. Ne pas jeter sur la voie publique.
PAPIER ISSU DE FORÊTS GÉRÉES DURABLEMENT
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Chat alors ! Lee Sangsoo aime les animaux... et le métal. Dans son atelier installé à Séoul, cet artiste sud-coréen plie des barres en acier inoxydable pour engendrer un bestiaire fantastique : flamants roses, cochons, perroquets, taureaux, chiens ou encore ce chat. Minimaliste, un poil abstraite, cette sculpture peinte à la bombe saisit parfaitement la grâce du mouvement félin – et a l'avantage, ô combien inestimable, de ne pas faire ses griffes sur le canapé.
© Lee Sangsoo
c @artsangsoo
Peaky Blinders méritait bien une fresque. Pour annoncer la diffusion de la sixième et ultime saison des aventures de la tempétueuse fratrie, la BBC a vu les choses en grand. La chaîne a fait appel au street artiste Akse pour dresser un immense portrait de Cillian Murphy (aka Tommy Shelby) sur la façade d'un immeuble de Birmingham. Révélée le 15 février, l'œuvre n'a pas été installée n'importe où. On la trouve à proximité du Rainbow, pub où le gang qui a inspiré la série avait ses habitudes, à la fin du xixe siècle. Qui aura le courage de la vandaliser ? Pas nous... c @akse_p19
© Akse P19
BANDE ORGANISÉE
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À quoi ressemble le monde lorsqu'on est haut comme trois pommes ? Pour répondre à cette question, la Ligue des familles a construit une maison où la taille des pièces, meubles ou objets a été multipliée par trois – les chaises, la table, le fer à repasser… Ludique, cette exposition interactive vise surtout à sensibiliser les adultes sur les dangers domestiques qu'encourent au quotidien les enfants. Un petit pas pour l'Homme, mais un bond de géant pour la sécurité.
TRAMWAY OF LIFE Le Tram Expérience remet le couvert. Créé en 2012 par l'office du tourisme de Bruxelles et la STIB, arrêté en 2019 pour cause de rénovation, il a repris sa route en septembre. Au programme ? Une promenade gastronomique à bord d'un tramway-restaurant (tout neuf) où l'on déguste les plats envoyés par de grands chef locaux, tout en scrutant les lieux emblématiques de la capitale par la fenêtre. Comme un petit Orient-Express ? On peut le dire. www.tramexperience.be
Péril en la demeure Depuis une dizaine d'années, Hannes Coudenys parcourt la patrie de Magritte pour en photographier les maisons les plus "moches", alimentant un blog et une série de livres : Ugly Belgian Houses. À Bruxelles, cette exposition témoigne de ces assemblages hérétiques de fenêtres et autres architectures outrageusement cubiques que n'aurait pas reniées Picasso. Drôles, ces clichés célèbrent aussi un précieux sens de l'anticonformisme, à une époque où tout finit par se ressembler.
© Hannes Coudenys
© La Ligue des familles
Anvers, 11 > 22.03, Reuzenhuis // Namur, 23.04 > 01.05, Espace culturel d'Harscamp, 10h-17h, 6/5,50€ (grat. -5 ans), maisondesgeants.org
© P. Bontinck
LA MAISON DES GÉANTS
Bruxelles, jusqu'au 05.03, Ruby Gallery, rubygallery.be c @uglybelgianhouses 9
© Tilt
Les Safra'Numériques Depuis 2016, l'espace de quelques jours, le quartier Nord d'Amiens prend des allures de Silicon Valley. On y élabore le festival des arts numériques et des nouvelles technologies qui rayonne dans toute la cité de Jules Verne. Intelligence artificielle, robots ou réalité virtuelle nourrissent une programmation de spectacles et d'installations interrogeant notre rapport aux machines. Lors de cette sixième édition, parmi une trentaine de créations, on découvre les golems numériques de Dylan Cote et Pierre Lafanechère. Baptisée EMET, cette installation est constituée d'écrans à l'intérieur desquels divaguent des créatures humanoïdes. Au centre du dispositif, un clavier semble s'activer tout seul. Pourquoi ? Dans cet attelage, qui est au service de l'autre ? L'Homme ou l'ordinateur ? Vaste question... Tout aussi troublant, Que du bonheur (avec vos capteurs) ouvre les portes d'un monde où l'humain et le digital ont fusionné. Entre théâtre, mentalisme et illusion, Thierry Collet « pactise » avec les objets connectés et autres applications pour renouveler son art… et nous alerter sur l'emprise grandissante des algorithmes – en somme, il ouvre son cœur de hacker. Amiens, 22 > 26.03, Safran & divers lieux, gratuit (sauf Avion papier du collectif La Méandre & Que du bonheur (avec vos capteurs) par la compagnie Le Phalène : 13,50 > 5€), www.amiens.fr Sélection / 22 > 26.03 : Collectif La Méandre - Avion papier // 23 & 24.03 : Cie La Phalène Que du bonheur (avec vos capteurs) // 25.03 : DJ set de Verlatour depuis le toit du Safran 10
© Maïssam Mezioud
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ILLUSION BRUSSELS Remède mirage
Les apparences sont souvent trompeuses, dit le dicton. Pour l'Illusion Brussels, c'est une règle d'or. À deux pas de la GrandPlace de Bruxelles, dans un bâtiment classé au patrimoine mondial de l'Unesco, on trouve depuis le mois d'octobre un musée pas tout à fait comme les autres. Pour cause, ici l'eau s'écoule à l'envers, les objets ont une fâcheuse tendance à léviter ou disparaître inexplicablement... quand ce n'est pas vous qui rapetissez ! Visite guidée entre jeux de perspectives, effets d'optique et hallucinations. •••
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© Illusion Brussels
Bizarres, ces deux règles courbées. Elles n'ont pas la même taille et pourtant... elles se superposent. Mais bon sang, pourquoi ?! « Ça peut rendre fou, n'est-ce pas ? », s'amuse Anouar Sadi, le gérant des lieux, bien décidé à garder ses petits secrets de fabrication, « comme les magiciens ».
« L’idée, c’est de proposer une expérience interactive. » Parmi la trentaine de trompe-l'œil présentés sur ces deux étages, beaucoup sont sortis de son imagination et de celle de sa bande de copains. Si le concept a déjà fait
ses preuves en France, en Croatie ou en Écosse, ce musée de l'illusion est une première en Belgique. Accessoires indispensables pour en profiter au mieux : un cerveau en bon état de marche (mais prêt à dérailler) et un smartphone. Certains effets d’optique ne sont en effet perceptibles qu'avec une petite assistance technologique, à l'image de cette "chatroom" vous donnant littéralement l'impression de sortir d'un écran d'ordinateur. Surtout, l'expérience est hautement Instagrammable. « L’idée, c’est de proposer une expérience interactive. On peut toucher les dispositifs, se creuser les méninges et prendre de chouettes photos ••• 14
© Maïssam Mezioud
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pour les partager sur les réseaux sociaux ». Histoire d'épater la galerie en s'affichant la tête à l'envers, en train de marcher sur le plafond, comme Spiderman. « Oui, ici vous vous découvrez pas mal de superpouvoirs ». Défi de taille Parmi les grands classiques, il y a la fameuse chambre d'Ames, conçue par l'ophtalmologiste américain Adelbert Ames Jr. dans les années 1940. Soit une pièce dont le sol est recouvert d'un damier de trapèzes blancs et noirs. Entrezy à deux et placez-vous chacun
à une extrémité : l'un paraîtra gigantesque et l'autre minuscule ! « Les personnes qui se sont senties petites toute leur vie peuvent enfin être grandes ». Et les enfants regarder leurs parents de haut… Devant le succès inattendu du musée, Anouar et ses associés espèrent en ouvrir d'autres en Belgique « et pourquoi pas ailleurs dans le monde, aux Pays-Bas ou en Allemagne par exemple ». C'est bien connu : les magiciens osent. Julien Damien Illusion Brussels Bruxelles - 22, Rue du Marché aux Fromages, lun > jeu : 10h-19h • ven > dim : 9h-21h, 12/9€ (gratuit -7 ans), illusionbrussels.be
© Illusion Brussels
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Orient Express © Lola Hakimian
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L'ORIENT-EXPRESS La légende du rail
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C'est un train mythique, une épopée industrielle hors norme. Depuis sa création à la fin du xixe siècle, et bien après son ultime voyage entre Paris et Istanbul le 20 mai 1977, l'Orient-Express n'a cessé d'alimenter les rêves. À l'occasion du festival Europalia, il fait aujourd'hui halte à Bruxelles, à Train World, le temps d'une fascinante exposition. Installé dans l'ancienne gare de Schaerbeek, ce musée du chemin de fer retrace une odyssée légendaire... qui est avant tout une histoire belge.
© Train World
Derrière l'Orient-Express, il y a d'abord un homme : le Liégeois Georges Nagelmackers. Et comme toutes les bonnes histoires, celle-ci commence par un chagrin d'amour. Héritier de la plus ancienne banque de Belgique, le jeune ingénieur souhaite se marier avec sa cousine, « qui n'est pas un bon parti, explique Thierry Denuit, responsable de Train World. Pour qu'il l'oublie, ses parents l'envoient aux États-Unis ». Nous sommes en 1867. Le pays de l'Oncle Sam vit sa grande conquête ferroviaire. Le Belge y découvre les fameuses
voitures Pullman, soit des wagonscouchettes traversant l'Amérique d'est en ouest. De retour sur le vieux continent, Nagelmackers va s'inspirer de ce concept pour concrétiser le projet de sa vie : créer des trains luxueux qui mèneront aux confins de l'Europe. Eh oui, nous sommes en plein "orientalisme". L'Occident est captivé par l'Empire ottoman, cet ailleurs inconnu, exotique et fantasmé. Le 4 décembre 1876, le Belge fonde la Compagnie internationale des wagons-lits. Sept ans plus tard, le train le plus fascinant du monde quitte pour la première fois Paris pour les rives du Bosphore. L'OrientExpress est né. Sacré train de vie Dès son entrée dans la majestueuse salle des guichets de l'ancienne gare de Schaerbeek, joyau de la renaissance flamande élevé au xixe siècle, le visiteur est accueilli par un sublime panorama d'Istanbul. ••• 20
© Train World
© Julien Damien
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© Danny Migalski
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On aperçoit la Corne d'Or, la Mosquée bleue... « C'était ce que voyaient les voyageurs dès leur arrivée », après avoir parcouru 3 055 kilomètres en près de 80 heures... et déboursé l'équivalent de 20 000 euros – pour un aller simple. Seuls les plus riches pouvaient se payer le trajet : ambassadeurs, princes et princesses ou stars comme Marlene Dietrich, Joséphine Baker... Au premier étage de Train World, on découvre l'authentique bureau de Nagelmackers, mais le clou du spectacle se trouve à l'extérieur de la gare, dans un gigantesque bâtiment. Scénographié par le dessinateur de BD François Schuiten, cet espace plongé dans une lumière en clairobscur renferme une collection unique de wagons et de locomotives historiques. Pour l'occasion, il accueille deux voitures originales de l'Orient-Express datant de 1920 et synonymes de (très grand) luxe. Ici, les verres sont en cristal de Baccarat, les couverts signés Christofle, le tissu des sièges et les panneaux en verre conçus par René Lalique, sans parler des marqueteries, des boiseries laquées, des porte-manteaux chromés Art déco... on en passe ! Le dernier cri Cette science du détail témoigne aussi de la personnalité de Georges
Nagelmackers, du genre "control freak". « C'était un entrepreneur total. Il a façonné toutes les facettes du voyage, de la nourriture à la décoration, jusqu'au design des wagons qu'il a lui-même dessiné ». Le Liégeois a d'ailleurs révolutionné la technologie ferroviaire. Il fut par exemple le premier à installer l'air conditionné dans ses trains qui « transportaient d'énormes blocs de glace, laquelle était ensuite envoyée à travers des tuyaux logés dans les parois des wagons... C'est fou ! ». Trop fou.
« L'Orient-Express roula durant plus d'un siècle. » La Compagnie internationale des wagons-lits accusa vite des pertes financières, fut régulièrement recapitalisée, avant que cette ligne ne soit enterrée par l'avènement de l'automobile et de l'aviation. « À bien y regarder, ce train n'aurait jamais dû exister, car pas assez rentable. Cette folie créatrice a dépassé tout ce que le marché pouvait supporter, et pourtant l'Orient-Express roula durant plus d'un siècle ». Le rêve, sans doute, n'a pas de prix. Julien Damien Bruxelles, jusqu'au 17.04, Train World mar > dim : 10h-17h, 14 > 5€ (gratuit -6 ans) www.trainworld.be 24
Remue méninges
folio
po r t
JÉRÔME MASI Forever Young
Analysons un instant les silhouettes tout en couleurs de Jérôme Masi. « Quelle fantastique économie de moyens », s’exclamera l’esthète, quand le pragmatique remarquera avant tout une passion immodérée pour les casquettes. « J’aime les choses sobres, et les aplats », indique l’artiste annécien, pointant un penchant pour le rond, « qui permet d’attirer l’œil à un endroit de l’image », plus que pour le couvre-chef. Formé en arts appliqués, passé par le monde du jeu vidéo avant un premier virage vers le "motion design", ce quadragénaire avoue volontiers avoir démarré sa carrière d’illustrateur sur le tard. « Petit à petit j’ai ressorti mes pinceaux, et je m’autorise davantage à aller dans le fond des choses », note-t-il. Le jeune garçon de dos, qui illumine notre couverture ? « Ce sont les silences, l’intériorité. J’ai « J’ai envie que envie que chaque personne remplisse à sa chaque personne façon les vides laissés par cette image ». remplisse à sa façon Pour ce duo à tête de lune (voir page 29), les vides laissés le message se fait plus limpide, naviguant par mes images. » entre communication et empathie. Un peu d’humour, un brin de poésie et un soupçon de culture urbaine, telles sont les inspirations revendiquées de Jérôme Masi. Mais le vrai carburant de ce "cool kid" élevé dans le goût du beau par un père architecte, c’est l’enfance. Au point de collectionner les vieux objets des années 1980, quand il ne signe pas depuis sa tablette graphique une campagne pour Orange ou British Airways. Le digital pour les commandes, les toiles pour les projets personnels, l’illustrateur a trouvé son équilibre. C’est d’ailleurs sur ce chemin qu’il espère guider ses trois enfants : « J’essaie de développer chez eux ce qui leur amènera la liberté ». Marine Durand À lire / L'interview de Jérôme Masi sur lm-magazine.com À visiter / www.jeromemasi.com, www.behance.net/jeromemasi, c @jerome.masi 27
Behind the Wall
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The Gift
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Recto Verso
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Morning
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Summer
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mus
ique
Mattia Lucchini, Alix Caillet et Jacques Cormary © Édouard Nardon et Clément Pascal
interview
ODEZENNE En haut lieu
Formé au début des années 2000 par Jacques Cormary, Mattia Lucchini et Alix Caillet, Odezenne dénote dans le paysage musical français, entre spoken word désabusé, poésie enfumée et electro nerveuse. Après les remarquables Dolziger Str.2 et Au Baccara, le groupe bordelais est de retour avec 1 200 mètres en tout, mirifique cinquième album empli de vie, d'amour mais aussi marqué par la perte. Soit 16 compositions hors du temps, parfois loufoques, et surtout foisonnantes de styles – du rap autotuné de Deux traits aux synthés hypnotiques de Mr. Fétis, en passant par le "daftpunkien"Mamour. Entretien avec Jacques, dit "Jaco". 36
Quelle est l'histoire de votre trio ? Mattia et Alix se sont rencontrés au collège, en classe de cinquième. Ils avaient déjà fondé un premier groupe lorsque je suis monté dans le wagon. À l’époque je vivais de jobs alimentaires, notamment à Rungis. À côté de ça j’écrivais, produisais un peu de son. On a sorti notre premier album en 2008, sans. chantilly. Pourquoi vous appelez-vous Odezenne ? C’est le nom de l’ancienne proviseure d’Alix et de Mattia, on l'a utilisé dans un freestyle puis on l’a gardé, parce qu’il sonne bien.
Justement, comment définiriezvous votre son si particulier ? On chante toujours en français, et on part dans tous les sens entre le rap, l’electro, le rock, la pop… On est en constante recherche. Avec 1 200 mètres en tout on s’est vraiment fait plaisir, avec la musique autant que les textes.
« On est en constante recherche. » Comment avez-vous conçu cet album ? Juste après une grosse tournée qui s’est terminée fin 2019 à New York, ••• le temps s’est arrêté... 37
On est donc retourné en studio plus vite que prévu. À bien y regarder, on est toujours en confinement, à travailler toute la journée dans notre cave... On ne voulait sortir que des singles mais on a tellement bossé que l’album s'est imposé naturellement. Il s’agit d'une "photographie" de cette période inédite. On parle ici d’amitié, d’amour mais aussi de deuil. (ndlr : Vu d’ici, qui clôt l’album, est un hommage à la sœur d’Alix, décédée d'un cancer en fin d’année dernière). Que signifie ce titre, 1 200 mètres en tout ? C’est une hauteur à laquelle on atteint la plénitude. Même en restant au niveau du plancher des vaches. L’album reflète cette humeur en dents de scie, de 0 à 1 200 mètres d'altitude. La vie ressemble à des montagnes russes. Qu'en est-il du clip de San Pellegrino, où Pio Marmaï laisse échapper toute sa rage à coups de club de golf… Le morceau raconte l’histoire d’un mec marié et père de deux enfants. Un jour, il a un coup de cœur pour une fille, une serveuse. Toute sa vie est alors remise en question : son
couple va-t-il exploser ? Pour illustrer cet état, on a proposé à Pio de tout casser dans un appartement, d'arracher le lustre, d'exploser les meubles... et ça l’a bien éclaté ! L’appartement est celui d’Alix, n'est-ce pas ? Oui, il venait d’avoir les clés ! On l’a décoré pour le clip, car il était vide, avant de tout détruire. En tout cas maintenant, il peut envisager ses travaux tranquillement, Pio lui a fait économiser le coût de la démolition des murs ! Parlons de cette tournée, que verra-t-on sur scène ? Nous sommes quatre avec le renfort de Stefano (le frère de Mattia) qui est batteur. On joue les titres du dernier album et certains des précédents… On a vraiment hâte de retrouver notre public. D'ailleurs, en novembre dernier on a proposé une écoute de l'album deux mois avant sa sortie dans notre studio. On a payé 100 billets de train ou d’avion à des gens venus d’Irlande, du Portugal et de toute la France. Ils ont passé une semaine à Bordeaux tous frais payés ! C’est notre façon de les remercier. Propos recueillis par Julien Damien
Liège, 05 & 06.03, Reflektor, 20h, 27,50€ (sam : complet !), www.reflektor.be Bruxelles, 14.03, Ancienne Belgique, 19h, 29/28€, www.abconcerts.be À lire / La version longue de cette interview sur lm-magazine.com 38
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AMBER MARK À fleur de peau
Résilience. Un mot galvaudé, employé à tort et travers mais, que voulez-vous, on n'a pas trouvé mieux pour définir Amber Mark. Née en 1993 d’un père jamaïcain et d’une mère allemande, la chanteuse passe son enfance à sillonner le monde avant de s’installer à New York. Elle s'est révélée au grand public en 2017 avec 3:33AM. Composé après la mort de sa mère, l'EP raconte la perte d’un être cher, le deuil interminable puis la vie qui, doucement, reprend son cours. Dans Conexão, son deuxième essai, l’intention est la même : trouver dans le chagrin la plus grande source d’inspiration, à l'image de Love Me Right, une ballade R’n’B sur laquelle la jeune femme demande de sa voix puissante : « Ne suis-je donc pas ce que tu veux ? ». Three Dimensions Deep, son premier album, ne déroge pas à cette sincérité. Déboires sentimentaux, ambition professionnelle… Amber Mark expose toutes ses difficultés pour mieux les dépasser, les exorciser. Et, forcément, nous touche. Ses morceaux marient dans un même geste cosmopolite R’n’B, funk, pop, disco, bossa nova ou dancehall, et s’appréhendent comme un voyage intérieur duquel on ne revient pas indemne. Maïssam Mezioud Bruxelles, 06.03, Botanique, 19h30, 21,50 > 15,50€, botanique.be
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Anders Trentemøller, c’est beaucoup de choses à la fois. Depuis une petite vingtaine d’années, le producteur et remixeur de génie (de Röyksopp à… Bruce Springsteen !) déploie une musique électronique nourrie à la cold wave. Celui qui appuyait un clin d’œil à Faith (1981) de The Cure sur la pochette de son premier LP (The Last Resort, 2006) organise aujourd’hui la rencontre entre Joy Division et New Order (No More Kissing in the Rain). Accompagné du timbre diaphane de la guitariste Lisbet Fritze (membre de Giana Factory), le Danois amène des effluves gris anthracite sur le dancefloor. Ce n’est pas la fête, et pourtant quel pied ! T.A.
© Sofie Nørregaard
TRENTEMØLLER
Anvers, 10.03 (reporté au 06.04), Trix, 19h, 29,90€, www.trixonline.be Tourcoing, 11.03 (reporté au 07.04), Le Grand Mix, 20h, 23 > 6€, www.legrandmix.com
© Fiona Torre
POLO & PAN Franche innocence ou projet millimétré ? Impossible de placer Polo & Pan dans l’une ou l’autre de ses deux catégories pourtant opposées. Alors non, on n’a pas toujours succombé à cette électronique solaire, ces samples estivaux et ces comptines agrémentées de BPM (Ani Kuni, sérieusement…). N’empêche, face au raz-de-marée de bonne humeur provoqué sur les foules par le tandem, on s’incline. L’époque est triste, ces morceaux réconfortent. Pourquoi bouder ce plaisir ? T.A. Bruxelles, 24.03, La Madeleine, complet ! Lille, 05.04, L'Aéronef, 20h, 29,80€, www.aeronef.fr 42
Ausgang © Tcho Antidote
LES ENCHANTEURS Ballades composées
Ce festival itinérant mis sur pied par l’association Droit de Cité enchante depuis plus de 20 ans le bassin minier du Pas-de-Calais. Disséminés dans 28 villes, ces concerts sont organisés dans des lieux pas forcément habitués à ce genre de programme, parfois insolites, mais qui ne demandent qu'à vibrer. La preuve… Ici une cour d'école, là une salle des fêtes, un complexe sportif ou une petite place de village... Voilà tout le charme de ce festival : apporter la musique là où parfois elle fait défaut. La particularité ? « Nous faisons la part belle à la chanson française, sous toutes ses formes, explique Manon Defrancq, responsable de la communication. Il y a du reggae avec Danakil, par exemple, mais aussi de la pop, du bal musette où même du rap, pour la première fois ». En cela, la venue d'Ausgang, à Rouvroy, constitue l'un des temps forts de cette 23e édition. Emmené par Casey, ce groupe mêle rap et rock pour mieux servir des textes rageurs et ciselés. Dans une autre genre, GiedRé maîtrise bien la plume pour délivrer des merveilles de comptines salées ! Entre autres têtes d'affiche (Juliette, Yseult) ou découvertes (la poésie de Lo’Jo), on ne manquera pas Delgres et son hard blues chanté en créole, histoire d'aborder la belle saison regonflés à bloc. À ce moment-là aussi, on pourra compter sur les Enchanteurs car, autre nouveauté, le festival se déploie cette année en deux autres parties, jusqu'en juillet « avec cette fois des concerts en plein air et gratuits ». Un sacré tour de magie. Julien Damien Bassin minier du Pas-de-Calais, 03.03 > 22.04 + 20.05 > 04.06 + 22.06 > 03.07, divers lieux, 1 concert : 20 > 5€ (gratuit en plein air) • pass 10 concerts : 55€, festival-lesenchanteurs.com 44
© Llyod Pursall
PLANÈTE RAP
Toujours boudé par les Victoires de la Musique (pas un mal, lorsqu'on aperçoit la cérémonie), le rap s'est pourtant imposé comme la nouvelle pop, affichant un visage kaléidoscopique – du point de vue musical ou textuel. La preuve en quatre actes, où l’on découvre l'"Irish hip-hop", un laborantin zélé et un pilier de l'underground – avant de se rasseoir sur notre chaise pliante.
REJJIE SNOW Voici deux ans, pendant le confinement, on avait lu tout Wikipédia. Fallait bien s’occuper. Eh bien croyez-le ou non, mais la page "Irish hip-hop" était vide ! Les choses devraient changer avec Rejjie Snow. Ce Dublinois signé chez les Américains de 300 (Young Thug, Future…) fut acclamé par Skepta, Odd Future ou le regretté MF Doom – avec lequel il a travaillé. Enregistré à Los Angeles, Dear Annie compte les apports de pas mal de producteurs locaux, mais aussi du Français Lewis OfMan et même un titre chanté dans la langue de Molière. Juste retour des choses : l’Hexagone avait beaucoup fait pour la popularité des lacs du Connemara. T.A. Bruxelles, 27.03, Botanique, 19h30, 25,50 > 19,50€, www.botanique.be Tourcoing, 28.03, Le Grand Mix, 20h, 22 > 6€, www.legrandmix.com 46
© DR
© Henri Coutant
HUGO TSR
JPEGMAFIA
Incorruptible. Depuis 15 ans, Hugo TSR cultive son intégrité, son indépendance et un son typique du boom-bap new-yorkais. Le tout à Paris, coincé entre Marx Dormoy et la Porte de la Chapelle. Les thèmes n’ont guère changé (harcèlement policier, menace de l’extrême-droite, violence économique…) mais Hugo conserve le génie des punchlines jamais gratuites. Six albums plus tard, sans le soutien des grosses radios, le Parisien remplit L’Aéro. Hugo TSR, roi de l’underground ? Non, tranchet-il : « underground c’est d’jà trop mainstream ». T.A.
Généralement, on renvoie au hiphop l’image de jeunes désœuvrés trouvant un exutoire dans la musique. JPEGMafia, lui, avait un travail plutôt sérieux lorsqu’il a débuté. Pour cause : il était dans l’armée, d’où le nom de son deuxième LP, Veteran, qui l’a révélé. Depuis, l’Américain joue les insoumis et ses derniers essais en date, All My Heroes Are Cornballs et LP!, jonglent avec le glitch-hop, la noise, le dub et la pop expérimentale. Le tout est autrement plus passionnant que les élucubrations du brave Kanye. T.A
Lille, 04.03, L’Aéronef, 20h, 21 > 14€ + Bxl, 28.05
Anvers, 17.03 (reporté au 12.09), Kavka Zappa
HATIK
© Fifou
Révélé par la série Validé et sa reprise d'Angela du Saïan Supa Crew, Hatik a surtout érigé la chaise pliante en totem de la "banlieue way of life", asseyant son succès avec une discographie presqu'exclusivement baptisée à la gloire de ce trône de fortune. Dans les faits, le lyriciste des Yvelines délivre des chroniques urbaines assez sombres (« la rue a d'jà tué mon enfance donc n'appelle pas l'Samu ») sur des productions cloud rap parfois rehaussées de piano et de cordes. Pas franchement la joie, mais on n'est pas là pour ça, non ? J.D. Lille, 03.03, Le Splendid, 20h, 27€ // Oignies, 04.03, Le Métaphone 20h30, 15/12€ // Bruxelles, 05.03, La Madeleine, 20h, 26€ 47
© Daniel Mayne
DOPE LEMON
La beauté du zeste Quand il est apparu au bras de sa sœur aînée, Angus Stone passait pour un ado débonnaire un peu réservé. Aussitôt échappé du giron familial, on a découvert un cadet facétieux porté sur les substances à fumer et les choses de l’amour. Quand Julia n’est pas là, Angus se prend carrément pour un citron. Santé Magazine est catégorique : dans une fratrie, "le cadet est volontiers indépendant et apprécie de faire des découvertes". Une fois mis en orbite grâce au duo familial et à son tube planétaire Big Jet Plane, Angus est en effet parti, seul, en quête de lui-même. Face à l’océan, expulsant d’imposantes volutes de fumée, l’Australien s’est rêvé en stupéfiant citron. Depuis 2016, Dope Lemon est la planche sur laquelle il évite de toucher terre – ce que lui permettent également les royalties des succès passés. Sur son troisième album, Rose Pink Cadillac, paru au tout début de l’année, le jus d’agrume est encore plus psychotrope. Stone n’a jamais aussi bien porté son nom et se rapproche des plus laidback des songwriters, tels Kurt Vile ou Mac DeMarco, avec qui il a l’élégance de partager en outre la maîtrise experte d’un folk aux mélodies radieuses. Dans ce western des glandeurs géniaux, Angus se prend même à chasser sur les terres de Matthew Houck aka Phosphorescent, dont il emprunte le chant traînant pour quelques ballades. Santé Magazine l’avait prédit : le cadet, depuis sa place inconfortable, est obligé de montrer ce qu’il sait faire et, "en général, il réussit". Mathieu Dauchy Anvers, 15.03 (reporté au 07.09), Trix, www.trixonline.be Bruxelles, 06.09, Ancienne Belgique, www.abconcerts.be 48
© Luigi & Lango
BEBEL GILBERTO La boss de la bossa
Bénie des dieux. Ou pas loin. Lorsque vous avez pour père João Gilberto, pour mère la chanteuse Miúcha et pour oncle l’illustre Chico Buarque, on peut dire que la bossa, la samba et autres rythmes brésiliens n’ont à peu près aucun secret pour vous. Et c’est également une bonne raison de prendre la tangente, direction New York. C’est là, voici un peu plus de 20 ans, que la Sud-Américaine habile avait mêlé les couleurs bossa à une électronique légère – en France, Daho s’y était essayé sur l’excellent Eden (1996). Époque oblige, les albums de remixes se sont enchaînés et, non, ils ne furent pas tous indispensables. N’empêche, on la gardait à l’œil, et grand bien nous fit : All In Ones, en 2009, fut une heureuse surprise qui la voyait reprendre, entre autres, Bob Marley ou Stevie Wonder avec un égal bonheur. En 2020, paraissait Agora, produit par Thomas Bartlett (complice de David Byrne ou Sufjan Stevens). La Brésilienne revenait alors à un son plus organique, nimbé de cordes soyeuses – et c’est dans cet exercice qu’on la préfère. Thibaut Allemand Louvain, 16.03, Het Depot, 20h, 32 / 29€, www.hetdepot.be 50
QUOI DE NEUF ? Si vous pensez qu’un musicien a tout dit dans son premier album, passez votre chemin. Ici, on s’intéresse aux artisans qui, dix mille fois, remettent l’ouvrage sur le métier. Ces quatre noms font partie de notre décor – de celui de nos parents, parfois. Alors, chefs-d’œuvre en péril, baudruches cent fois rafistolées ou monuments incontournables ? Thibaut Allemand
© Roger Sargent
Bruxelles, 27.03, Cirque royal, 20h, 62 > 52€ cirque-royal-bruxelles.be
© Pamela Springsteen
RANDY NEWMAN
Quelle injustice ! De ce côté de l’Atlantique, Randy Newman est surtout connu pour ses innombrables BO – Toy Story, Cars ou encore Marriage Story… Or, nous avons affaire à un immense compositeur, doublé d’un parolier d’exception. Une sorte d’Elton John à l’humour absurde et caustique. Mais nous n’entravons que pouic. Pourtant, de Short People à Putin, en passant par Rednecks ou I Love LA, l’Américain a manié la plume avec un style sardonique reconnaissable entre mille. Si sa production n’est pas phénoménale (douze albums studio en plus de soixante ans de carrière), son influence, elle, demeure indéniable sur ses contemporains… anglophones.
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SOPHIE ELLIS-BEXTOR 2003. Sophie Ellis-Bextor signe le tube disco pop Murder on the Dancefloor et rivalise avec le meilleur de Kylie ou Britney. Depuis, les loyers sont assurés. Les sorties se sont espacées et, si elle possède avec ce single une poule aux œufs d’or (on ne compte plus les remixes et versions orchestrales), l’Anglaise a mené une carrière honorable, comme en témoigne, au hasard, l’ambitieux Familia (2016), collaborant avec Matthew Cars (Nada Surf) ou Ed Harcourt. Bref, il y a une vie après le meurtre.
Il fut un temps rival d’Elvis Costello au rayon "songwriter au physique de clerc de notaire ayant explosé en pleine période punk mais s’avérant bien plus ambitieux et en quête de respectabilité". Rayon où l’on ne se bousculait pas, nous direz-vous. Vrai. Cette relative confidentialité permit à Jackson, passé le sommet Look Sharp ! (1979), de ne s’adresser qu’à une poignée de fidèles en s’essayant à la pop, au jazz, croquant finement son époque planqué derrière des lunettes de soleil. Anvers, 05.04, De Roma, complet ! Bruxelles, 06.04, Ancienne Belgique, complet !,
Bruxelles, 03.04 (reporté au 04.10) La Madeleine, 20h, 34€, la-madeleine.be
© DR
© Richard Jones
JOE JACKSON
ECHO & THE BUNNYMEN Pas la première fois que Ian McCulloch et ses amis apparaissent dans cette rubrique – mais que voulez-vous, ils sont comme le bon vin et se bonifient avec le temps. D’autant que la grande gueule précitée a conservé sa voix, malgré pas mal d’années d’excès, ce qui n’est pas exactement le cas de tous ses congénères. Auteurs de quelques-unes des plus belles chansons des 80’s (The Killing Moon en tête), les Liverpuldiens ont réussi, en plus, à signer des albums de reformation à la hauteur de leurs grandes œuvres. Anvers, 19.03, De Roma, 20h, 35 / 33€, www.deroma.be 53
Jeune premier
Bruxelles, 28.03, Ancienne Belgique, 20h, 15€, www.abconcerts.be
alfietem
Tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes. Ici, on ne vous fera pas le storytelling du jeune prodige qui n’avait d’autre choix que la musique pour s’en sortir, panser ses plaies ou mettre du baume sur son mal-être. Doté d’un prénom en hommage possible à Burt Bacharach ou Sonny Rollins, Alfie a grandi dans le sud-est de l'Angleterre, à Bedfordshire, le genre de verdoyant village jadis chanté par The Kinks, dans une famille de musiciens et mélomanes. Naturellement, il s’essaie tôt à la guitare et, à l’âge canonique de 13 ans, signe ses premières démos. Il en aligne 20 aujourd’hui et, déjà, cinq ans de carrière. Forcément confidentielle, elle ne devrait pas le rester longtemps : le bougre possède un talent certain pour la pop accrocheuse qui fait fi des chapelles. Un son né des plateformes de streaming, où tout, genres et époques, est à portée de main, mis sur le même plan, et absolument pas hiérarchisé. Désormais épaulé par Justin Young (The Vaccines), le jeune Britannique se révèle, de plus, pas mauvais du tout sur scène. En attendant un premier LP prévu pour le mois de mai, nous est donnée l’occasion de découvrir de nouveaux titres et de l’applaudir, pour la dernière fois peut-être, dans une salle à taille humaine. Thibaut Allemand
À écouter / Broken, single du nouvel album Mellow Moon qui sortira le 27 mai.
ALFIE TEMPLEMAN
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pleman.com
© Lillie Eiger
29e édition (déjà !) pour ce festival dédié à la chanson française. Excepté Cali, cette affiche fait la part belle à des artistes snobés par les médias, mais pas moins talentueux, à l'instar de Karpatt. Depuis plus de 20 ans, ce groupe enflamme les salles ou bars de France et de Navarre avec ses hymnes à la joie. Dans un autre genre, entre electro et musique orientale, Karimouche livre des chroniques sociétales tout en gouaille et poésie. J.D.
Cali © DR
À TRAVERS CHANTS
Saint-Saulve, 06 > 27.03, MJC - Espace Athéna, 1 concert : 20 > 6€, www.mjc-athena.org Sélection / 06.03 : Chœur de femmes L // 11.03 : Cali // 12.03 : Karpatt + Karimouche
Manou Gallo © Stéphane Kone
SI ÇA VOUS CHANTE ! Où l'on célèbre la chanson francophone, selon ses meilleures acceptations. Avec Keren Ann d'abord, qui défend un répertoire naviguant entre pop et folk. Son huitième album, Bleue, fait la part belle aux orchestrations amples, à la lenteur, la mélancolie... En somme, tout le contraire de Ma Pauvre Lucette (MPL). Entre rock, electro ou loufoqueries rap, ces Grenoblois n'ont pas leur pareil pour mettre une salle debout. Samedi soir, Ingrid Nomad et son quartette (piano, contrebasse, batterie et guitare) font retomber la fièvre, mais pas l'émotion. Entre jazz et pop, la chanteuse gantoise clôt le festival tout en douceur et ballades langoureuses. J.D. La Louvière, 21> 26.03, Le Théâtre & Le Palace 1 concert : 25 > 10€, www.cestcentral.be Sélection / 21.03 : MPL // 22.03 : Anna // 23.03 : Keren Ann 26.03 : Ingrid Nomad 4tet 56
The Divine Comedy Charmed Life
© Kevin Westenberg
(Divine Comedy Records / PIAS)
THE DIVINE COMEDY
Fantaisie héroïque Dans les années 1990, Neil Hannon rêvait de domination mondiale. Le Nord-Irlandais pensait sérieusement qu’en s’inspirant de Burt Bacharach et des Walker Brothers, il remplirait des stades. Bon, le farfadet est revenu de ses illusions, mais n’a rien perdu de son talent pour faire jaillir des chansons majestueusement orchestrées qui, sous leur démesure apparente, demeurent avant tout des pop songs remarquablement écrites. Plus de 30 ans après des débuts difficiles (et un premier LP renié et jamais réédité qui, franchement, ne vaut pas grandchose), The Divine Comedy n’a à rougir de rien et fait partie des rares songwriters dont on attend un nouvel album avec autre chose que de la nostalgie. Et sur scène, quelle présence ! T.A.
Neil Hannon s’est construit une place à part. Une chambre à soi. Un cocon au sein duquel il peut donner lieu à ses fantasmes de pop orchestrale, teintée d’un humour tout en retenue (The Booklovers, hélas absente…). En témoigne cette collection de chansons qui, aussi "best" soient-elles, aurait pu allègrement être remplacée par une autre sélection. Oui, The Divine Comedy a signé des merveilles trois décennies durant : National Express, Something for the Weekend, At the IndieDisco, A Lady of a Certain Age… Si ce florilège est indispensable, les albums originaux le sont tout autant ! T.A.
Lille, 30.03, Théâtre Sébastopol, 20h, 39 > 29€ Anvers, 31.03, De Roma, 20h, 31 / 29€ 58
DIM 13.03 IBRAHIM MAALOUF
Lille, Théâtre du Casino Barrière, 18h, 58>49€
MAR 15.03 THE APARTMENTS
Roubaix, La Cave aux Poètes, 20h, 14 > 10€ LYNDA LEMAY
Roubaix, Le Colisée, 20h30, 49>15€
MER 16.03 STEPHAN EICHER
Mons, Théâtre Royal, 20h, 50>35€ POÈMES : ALEXANDRE BLOCH, NEMANJA RADULOVIĆ, ONL
Caribou © Amber Elise
Lille, Le Grand Sud, 20h, 33 > 27€
et aussi…
J E U 1 7. 0 3 ASAF AVIDAN & BAND
Bruxelles, Ancienne Belgique, 19h, 40/39€
MAR 01.03
L U N 0 7. 0 3
PAULINE CROZE
SIMPLE MINDS
MER 02.03
MAR 08.03
BONNIE TYLER
BOY PABLO
Gand, Vooruit, 20h, 23/19€
VEN 18.03
CELESTE + CONJURER
CARIBOU
JOAN AS POLICE WOMAN
SAM 19.03
Lille, Le Splendid, 20h, 25€
Lille, Théâtre Sébastopol, 20h, 94,50>60€ GAËTAN ROUSSEL
Lille, L'Aéronef, 20h, 29,80€
VEN 04.03 MAXENCE CYRIN + SEGOLÈNE HOCHART
Lille, Le Zénith, 20h, 70>49,50€
Tourcoing, Le Grand Mix, 20h, 19>6€ Bruxelles, Botanique, 19h30, 26,50>20,50€
Erquinghem-le-Sec, Eglise SaintVaast, 20h, 1€
MER 09.03
OTHER LIVES + GAÉTAN NONCHALANT
Lille, mF Wazemmes, 20h, 5>3€
Tourcoing, Le Grand Mix, 20h, 21>6€ PAULINE CROZE + BAPTISTE W.HAMON
BÄRLIN
CLARA LUCIANI
Bruxelles, Forest National, 20h, 55>36€
Béthune, Le Poche, 20h30, 12/10€
VEN 11.03
SAM 05.03
Lille, L’Aéronef, 20h, 19 > 11€
VAUDOU GAME + MAX’1 & THE ROOTSMAKER
Tourcoing, Le Grand Mix, 20h, 13€ / gratuit abonnés YVES JAMAIT
Hem, Zéphyr, 20h, 30€
DIM 06.03 TÊTES RAIDES
Lille, L'Aéronef, 18h30, 28>20€ AMY MACDONALD
Bruxelles, AB, 19h, 40/39€
ANIKA
POUPIE +ACHILE + KALIKA
Oignies, Le Métaphone, 20h30, 16/13€
SAM 12.03 FATOUMATA DIAWARA
BERNARD LAVILLIERS
Roubaix, Le Colisée, 20h30, 58>15€ ERIK TRUFFAZ QUARTET
Amiens, Maison de la Culture, 20h30, 29>11€
Lille, L'Aéronef, 20h, 28>20€
ROMAIN WATSON
Hem, Zéphyr, 17h, gratuit YSEULT + FILS CARA
Oignies, Le Métaphone, 20h30, 17/14€
DIM 20.03 JULIEN DORE
Bruxelles, Forest National, 20h, 69>37€
LUN 21.03 ASAF AVIDAN
Lille, Le Zénith, 20h, 63>41€ BENABAR
Lille, Théâtre Sébastopol, 20h, 49,10>36,30€ THE TOASTERS
Bruxelles, Magasin 4, 20h, 10€
Anvers, De Roma, 20h, 29/27€
MAR 22.03
GRÉGOIRE
BONNIE TYLER
Hem, Le Zéphyr, 20h, 36€
ANIMAL TRISTE + YOU SAID STRANGE
Béthune, Le Poche, 20h30, 12/10€
Bruxelles, Cirque Royal, 20h, 71/66€ BENABAR
Lille, Théâtre Sébastopol, 20h, 49,10>36,30€
60
NNEKA
Anvers, De Roma, 20h, 26/24€ RAG'N'BONE MAN
Bruxelles, Forest National, 20h, 39,09€
MER 30.03 BEN MAZUÉ
Lille, Le Zénith, 20h, 60>30€ DEBOUT SUR LE ZINC
Lille, L'Aéronef, 20h, 26>19€ EMILY JANE WHITE RICHARD ALLEN
Roubaix, La Cave aux Poètes, 20h, 14>10€ NILÜFER YANYA - LÉA SEN
Bruxelles, Botanique, 19h30, 21,50>15,50€ Orelsan © Alice Moitié
VEN 01.04 MAGENTA
ONL : VIOLON NEMANJA RADULOVIĆ / DIR.A.BLOCH
Dunkerque, Le Bateau-Feu, 20h, 15€
MER 23.03 BRNS
YUMI ZOUMA
Bruxelles, Botanique, 19h30, 10/7€ JONI ÎLE SEULE TOURBE
Carvin, Salle d’honneur de la mairie, 20h30, gratuit
Anvers, Trix, 19h30, 16>12,50€
SAM 26.03
KEREN ANN
TIM DUP
La Louvière, Le Théâtre, 20h, 25/22€ LOW ROAR
Woluwe St-Pierre, W:Halll, 20h30, 25/22€
Roubaix, La Cave aux Poètes, 20h, 14 > 10€
D I M 2 7. 0 3
POÈMES : ALEXANDRE BLOCH, NEMANJA RADULOVIĆ, ONL
ORELSAN
Lille, Le Grand Sud, 20h, 33 > 27€
JEU 24.03 TÊTES RAIDES
Bruxelles, AB, 19h, 34/33€
Lille, Le Zénith, 20h, 65>50€
LUN 28.03 CATE LE BON + MEGA BOG
Lille, L'Aéronef, 20h, 10>5€ MIOSSEC
Lille, L'Aéronef, 20h, 22>14€ PONGO + UZI FREYJA
Dunkerque, Les 4 Ecluses, 20h, 15/12€ SEA GIRLS
Bruxelles, Ancienne Belgique, 20h, 15€ UMBERTO TOZZI
Bruxelles, Cirque Royal, 20h, 55>35€ CHAPELIER FOU ENSEMB7E
Arras, Théâtre d'Arras, 20h30, 22>5€ DOMBRANCE + CHAMBERLAIN + SYLVAIN GROUD
Roubaix, La Cave aux Poètes, 20h30, 12 > 8€
JOHN TALABOT + PALMBOMEN II (LIVE) + ARNO LEMONS + MISS SCHWARZKOPF
Anvers, Trix, 22h, 20>14€
47 TER
Lille, Le Zénith, 20h, 42>35,50€
Bruxelles, La Madeleine , 20h, 30,20€
FEU ! CHATTERTON
ROBERT GLASPER
Anvers, De Roma, 20h, 28/26€
SAM 02.04 MÉLISSA LAVEAUX
RUFUS WAINWRIGHT
LES SIÈCLES (FX. ROTH, ISABELLE FAUST) 100% STRAVINSKY
Anvers, De Roma, 20h, 36/34€
Arras, Casino, 20h30, 35>15€
ASIAN DUB FOUNDATION
MAR 29.03
VENDREDI-SUR-MER
ZWANGERE GUY
KID FRANCESCOLI + REQUIN CHAGRIN
Mons, Théâtre Le Manège, 20h, 30>21€
Boulogne-sur-Mer, Carré-Sam, 20h30, 10>6€
VEN 25.03 AMADOU & MARIAM & BLIND BOYS OF ALABAMA
Bruges, Stadsschouwburg, 20h, 38>13€ GRUFF RHYS + THE BREAKFAST CLUB
Dunkerque, Les 4 Ecluses, 20h, 13/10€
Bruxelles, AB, 19h, 26/25€
FLASHFORWARD: ACID ARAB
Charleroi, Rockerill, 22h, 15/12€
Bruxelles, Atelier 210, 19h30, 18>15€ Lille, Le Splendid, 20h, 28€
DINOS
Oignies, Le Métaphone, 20h30, 18/15€
JO WEDIN & JEAN FELZINE + WEEKEND AFFAIR
KYLE EASTWOOD - JAZZ EN NORD
Lille, L'Aéronef, 20h, 26/21€
Houplin-Ancoisne, Salle des fêtes, 20h, gratuit KEREN ANN
Jeumont, Gare numérique, 20h, 9/4€
Saint-Amand-les-Eaux, Théâtre des Sources, 20h30, 18>8€
LUN 04.04 METRONOMY
Lille, Le Zénith, 20h, 44>38,50€
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disques Charlotte Adigéry & Bolis Pupul Topical Dancer (Deewee / Because) Charlotte Adigéry précède le conseil de défense sanitaire pour décréter la sortie de crise. Eh oui, son premier album est enfin prêt, trois ans après Zandoli et ses cinq titres électroniques très prometteurs, garantis sans excès de BPM. C’est évidemment dans les studios Deewee que Charlotte et son beatmaker (et partenaire de scène) Bolis Pupul ont couvé ce long format. Topical Dancer bénéficie ainsi de la meilleure patte du royaume (voire d’Europe) en matière de rondeur de production et de justesse des arrangements. À distance respectable de l’eurodance, en plongée douce vers la house chantée d’Ultra Naté ou de Jomanda, cet album est de plus parsemé de touches d’humour et d’authenticité (le featuring de Christiane Adigéry, les paroles de Ceci n’est pas un cliché !) culminant avec l’extraordinaire titre HAHA. Pour clore cet exercice de spontanéité jubilatoire, Adigéry et Pupul adressent un final Thank You mordant d'ironie à tous ceux qui se sont sentis obligés de juger leur musique au début, et achèvent de nous contaminer par leur euphorie. Que vienne donc cette épidémie. Mathieu Dauchy
Laurent Bardainne & Tigre d'Eau Douce Hymne au soleil (Heavenly Sweetness) Bien qu’ex-membre de Poni Hoax, le nom de Laurent Bardainne n’est pas forcément connu des amateurs de rock indépendant. Et pour cause : c’est en jazzman ouvert aux quatre vents que ce brillant saxophoniste officie désormais, au sein de la formation Tigre d’Eau Douce – ce nom ! Deux ans après un Love is Everywhere écouté en boucle durant le confinement, paraît cet Hymne au soleil renversant. Ouvert par l’un des plus beaux singles de l’année (le simplement nommé Oh Yeah, rehaussé de chœurs féminins façon Leonard Cohen, mais un Cohen enjoué), ce disque navigue entre soul, jazz, musiques africaines et latines. Cela ne ressemble à rien de particulier, sinon à une certaine idée du plaisir – et ce n’est pas rien. Thibaut Allemand 64
Alex Cameron Onyx Music
Mitski Laurel Hell
(Secretly Canadian / Modulor)
(Dead Oceans/ Modulor)
Alex Cameron a toujours signé des pop songs étranges, jouant avec le bon et le mauvais goût, s’imposant comme un petit cousin d’Ariel Pink – dont il reprit d’ailleurs Picture Me Gone. Ce quatrième album, accrocheur et "cheesy", ne déroge pas à la règle. On songe parfois aux Strokes, ailleurs à Phoenix, plus loin à Bruce Springsteen. Derrière l’apparente légèreté d’une pop taillée pour le cruising le long d’un coucher de soleil californien, Onyx Music raconte la descente aux enfers d’un addict aux opiacés – en témoigne K Hole, à la fois soft-rock détendu et évocation d’une prise de kétamine… Alors, excepté la présence, en fin de parcours, de Jason Williamson (Sleaford Mods) pour un p’tit numéro bien rôdé de gouailleur anglais, voici un fabuleux disque printanier… qui durera plus d’une saison. Thibaut Allemand
Avec son précédent disque, Be the Cowboy, Mitski a opéré un tournant, passant de figure de l’indie rock à artiste pop multifacettes. Une voie qu’elle continue d’explorer dans Laurel Hell. Les premières notes de synthétiseur de Valentine Texas, graves et solennelles, contrastent avec la suite de l’album, aux sonorités beaucoup plus optimistes. Stay Soft, par exemple, est une ballade electro-pop tout en légèreté. De même, The Only Heartbreaker pourrait être le tube d’une compilation synthwave, paroles déprimantes sur une rupture amoureuse en prime ! Malheureusement, la formule n'est pas toujours gagnante. Notamment Love Me More qui voit son premier couplet prometteur gâché par un refrain trop plat. Un morceau inégal, à l’image de cet album. Hugo Guyon
Yumi Zouma Present Tense (Polyvinyl Records) Une certaine idée de la légèreté. Depuis huit ans, ces NéoZélandais alignent les mignardises pop avec une régularité et un talent qui forcent le respect. Posée sur des basses fleurant bon une certaine idée des 80’s (avec A-ha en ligne de mire) l’alliance des voix de Christie Simpson et Josh Burgess est pour beaucoup dans le charme de l’ensemble. Il n’y a pas, c’est vrai, de tube aussi imparable que Catastrophe (assurément l’un des hits mineurs de l’an 2015), mais le quatuor s’en tire joliment, parvenant à jouer avec les codes d’une pop trentenaire (on y entend même du saxophone) en ne perdant ni sa fraîcheur, ni son ingénuité. Bref, un groupe dénué de cynisme, des innocents aux mains pleines de mélodies – aucune raison que l’on fasse la fine bouche. Thibaut Allemand 65
littér
ature
interview
ELVIRE DUVELLE-CHARLES Clic Revolution
Elle fut l’une des premières Femen françaises, n’hésitant pas à interpeller Marine Le Pen lors d'un déplacement de la dirigeante d’extrême-droite. Elle a aussi créé une websérie documentaire, Clit Revolution, pour inciter les femmes à se réapproprier leur corps et leur sexualité. Afin d’aider ses abonnées à passer à l’action elle publiait dans la foulée un Manuel d’activisme féministe... En dix ans, Elvire DuvelleCharles a ainsi vu évoluer le militantisme en ligne, entre diffusion des idées et soumission aux algorithmes. Avec l’essai Féminisme et réseaux sociaux : une histoire d’amour et de haine, la journaliste, réalisatrice et activiste pointe toute l’ambivalence de ces nouveaux outils pour celles et ceux qui défendent la cause des femmes. Entretien avec une combattante qui assume ses fragilités. Propos recueillis par Marine Durand Photos © Clit Revolution - francetvslash
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Comment êtes-vous devenue militante ? Après des études de cinéma, j’ai travaillé quelques semaines comme documentaliste chez TF1, dans un contexte assez malsain. C’était bien avant #MeToo, avant que l’on considère les remarques sexistes récurrentes au travail comme du harcèlement. Un jour, les filles n’ont plus été conviées aux réunions : nous « déconcentrions les garçons ».
« Retourner la honte vers les agresseurs. » En plus de l’humiliation subie, je me suis retrouvée le matin à errer sur les sites d’agences photos, et c’est comme ça que j’ai découvert l’action des Femen devant le domicile de Dominique Strauss-Kahn, au moment de l’affaire Nafissatou Diallo.
Cela vous a-t-il immédiatement touchée ? Personne ne connaissait encore ces militantes ukrainiennes. Elles étaient déguisées en soubrettes, tournaient en dérision l’un des violeurs les plus connus de France, et cela m’a réjouie. Je n’ai même pas fait attention au côté topless. C’est la mise en scène qui m'a attirée, elle retournait la honte. Un an plus tard (j’avais quitté TF1) j'ai repéré une de leurs nouvelles actions : elles venaient de tronçonner une croix chrétienne place Maïdan, à Kiev. Je me suis rendue sur leur page Facebook appelant justement les Françaises à les rejoindre. C’est comme ça que j’ai rallié ce mouvement durant six ans, devenant l’une des premières Femen françaises.
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En France, leur mode d’action seins nus laissait plutôt perplexe au début… Les Femen suscitaient deux types de critiques. Celles des personnes que l’on combattait, l’extrême droite, les religieux, les machos, confortant l'idée de les déranger. Mais il y a eu aussi des critiques de la part de féministes quant à notre mode d’action, nous reprochant de n'avoir « rien à dire ». Ça m’a blessée, car cela venait de personnes que j’admirais, comme Mona Chollet. Nous épousions cette histoire militante en prenant des risques ! Tandis qu'elles écrivaient des livres, nous recevions les coups des fascistes ou de la police... C’était une façon de s’impliquer physiquement, un mode d’action qui attire des femmes en colère.
Rapidement, vous gérez la communication du collectif, n’est-ce pas ? À l’époque, la communication sur les réseaux sociaux était balbutiante, mais les Femen étaient bien rodées. On savait que l’impact était différent selon l’heure, le format du post, si c’était sur Twitter ou sur Facebook… Cela nous a permis de recruter pas mal de membres, de lancer des appels aux dons. Pourquoi avoir lancé le mouvement Clit Revolution ? J’avais l’impression d’avoir fait le tour avec les Femen, il fallait envisager l’étape suivante... En fait, tout est parti d’une blague : nous étions en 2016, Orelsan venait d’être relaxé pour ses textes violents envers les femmes et nous avons parodié l’un de ses clips, … 69
Saint-Valentin, en inversant les paroles. « Suce ma bite pour la SaintValentin » est donc devenu « Suce mon clit pour la Saint-Valentin ». On l’a sorti un 8 mars, pour la Journée internationale des droits de la femme, cela a fait plutôt rire les gens mais, en moins de 72 h, notre clip a été censuré par YouTube pour "contenu sexuellement explicite", alors que celui d’Orelsan était en ligne depuis sept ans ! Nous avons réussi à médiatiser cette censure, la vidéo a été remise en ligne, mais en restant interdite aux moins de 18 ans. C’est ce qui nous a donné envie de lancer la série Clit Revolution.
est finalement sortie en 2019 sur la chaîne numérique France.tv Slash. En parallèle, d’autres comptes militants et pédagogiques sur le corps féminin ont percé… Oui, le compte "T’as joui ?" a eu un succès fou, et cela a donné de la visibilité à plein de comptes sexos, sur l’orgasme, l’endométriose, le clitoris… Après l’ère des Tumblr féministes précurseurs, comme "Paye ta Shnek" en 2012, sur le harcèlement de rue, une nouvelle communauté, que la presse a baptisé les "sexploratrices", a vu le jour.
« Le féminisme en ligne est conditionné par les algorithmes. »
Comment ce livre est-il né ? Pendant mon master d’études de genre de l’université Paris 8, j’ai rédigé un mémoire sur l’éducation sexuelle sur Instagram. J’ai pris conscience que nous, les militantes féministes en ligne, à cause de la puissance des algorithmes, du pouvoir des marques, des violences propres aux réseaux sociaux, étions en train de nous enfermer dans une cage dorée. Ce livre est le prolongement de ce travail.
C'est pourquoi nous avons créé le compte Instagram "Clit Revolution", où nous recevions beaucoup de témoignages. Et puis il y a eu #MeToo. La websérie, neuf épisodes dans lesquels nous décryptons les mythes sur le sexe féminin,
Pourquoi ce titre, une histoire d’amour et de haine ? Les réseaux sociaux ont permis des choses formidables, notamment la diffusion des idées. Ils ont même aidé à protéger des femmes victimes de violence conjugale grâce à
En quoi consiste-t-elle ? Nous observons les rapports entre le corps, l’intime et le politique. Devant l'inertie des chaînes, nous avons envisagé un projet en mode "guérilla", avec les moyens du bord, et du financement participatif.
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des signalements sur Twitter. Mais l’évolution de ce féminisme en ligne est aussi conditionnée par les algorithmes, qui poussent à produire toujours plus de contenus pour se maintenir à flot, et donc à nous appauvrir. Pour rester visible, Instagram recommande de publier au moins un format vidéo par semaine, trois stories par jour... Il est impossible de créer du contenu intelligent à ce rythme-là. Et puis, lorsqu'on parle de sexualité on est censuré, beaucoup de comptes militants ont été supprimés. Nous avons donc aussi développé une forme de haine à l’égard des réseaux sociaux.
Le féminisme en ligne peut-il se substituer à militantisme plus classique ? Non, c’est impossible. Dans le livre, je cite la chercheuse Elena Waldispuehl. Elle explique que les féministes ne militant qu’en ligne sont les plus véhémentes, celles qui font le moins preuve d’empathie. Or, on ne peut pas militer sans empathie, il est primordial de garder un pied sur le terrain. "Scroller moins pour manifester plus", pourrait être l’une des résolutions des mouvements féministes d’aujourd’hui.
À lire / Féminisme et réseaux sociaux, une histoire d’amour et de haine, d'Elvire Duvelle-Charles (Editions Hors d’atteinte), 216 p., 17€ www.horsdatteinte.org/ À voir / Série Clit Revolution : www.france.tv/slash/clit-revolution À visiter / c @Elviredcharles, @Clitrevolution À lire / La version longue de cette interview sur lm-magazine.com
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livres Sophie Burrows Crushing (Gallimard BD) Noyées dans le bouillonnement d’une grande ville, deux solitudes se frôlent sans jamais se rencontrer. La quête perpétuelle de contact et d’affection annonce-t-elle un happy end ? Pour son premier roman graphique, l’illustratrice britannique Sophie Burrows manie le crayon sur un canevas familier. Ici une jeune femme sensible enchaîne les désillusions sur les applis de "dating", là un jeune homme un peu en marge compose avec les micro-agressions du quotidien de citadin. De planches en cases, leurs déambulations parallèles, sans un mot ou presque (puisque toute la place est laissée aux dessins en bichromie), disent toute la difficulté à vivre seul au milieu de la foule. Mais il ne sera pas question de déprime ! Sous le trait faussement brouillon, voire enfantin de cette jeune artiste pointe une immense tendresse pour ses personnages, gentils inadaptés témoins du bonheur des autres – et parfois, ça leur suffirait presque. Virée au kebab en pyjama, expérimentations devant le miroir de la salle de bain, petites disputes ordinaires entre clients dans les rayons du supermarché… On rit franchement devant les gags de cette BD réconfortante et d’une grande justesse. 160 p., 20€. Marine Durand
François Bégaudeau Comment s'occuper un dimanche d'élection (Divergences)
La critique de la messe républicaine que sont les élections, en particulier présidentielles, n'est pas nouvelle à gauche. Mais sans doute faut-il un certain courage pour la reprendre à l'heure où l'extrême droite domine les débats. À ceux qui se sont résignés à ne plus voter que pour éviter le pire, l'opuscule de François Bégaudeau offrira une perspective salutaire. Car le problème n'y est plus envisagé sur le plan de la conjoncture mais de la structure. La réduction de la politique à la seule représentation est bien ce qui favorise l'ordre et la domination – y compris dans ses expressions nationalistes-autoritaires. Avec acuité et humour, l'écrivain imagine alors un retour à la réalité des situations, là où les luttes font véritablement advenir de nouvelles formes d'organisation sociale. 112 p., 14 €. Raphaël Nieuwjaer 72
Raphaël Malkin Lieutenant Versiga (Marchialy)
Une carrure imposante, une moustache saillante, un passé de détective privé et une passion pour les affaires criminelles non résolues : le lieutenant Versiga semble tout droit sorti d’un thriller hollywoodien. Un de ces personnages qui vous tape tout de suite dans l'œil et vous donne envie de creuser pour en comprendre la psychologie. En tout cas, c’est l'idée de Raphaël Malkin, qui l'a rencontré au détour d’un reportage. Au point que le journaliste français a décidé de lui consacrer un livre. Celui-ci oscille entre la biographie de l’inspecteur et le récit d’une enquête sur le meurtre d’une jeune femme non identifiée en Louisiane, à la fin des années 1970. Un cold case résolu grâce au travail de Versiga, et une plongée en apnée dans les entrailles du bayou américain. 300 p., 20€. Hugo Guyon
James Bridle Un Nouvel âge de ténèbres (Allia) « La technologie reflète un monde réel et non un monde idéal ». Ce constat, limpide, résume bien la pensée de James Bridle. Sorti en 2018 et traduit en français quatre ans plus tard, son livre est un argumentaire démontant la "pensée computationnelle". Soit un mouvement de réflexion qui place une foi absolue dans la technologie et ses solutions pour nos sociétés. Selon l'Anglais, cette croyance nous amène à un âge sombre, noyé dans les flux d’information et régi par les algorithmes. Paradoxalement, pour nous réarmer face à cette réalité, Bridle a écrit un pavé informatif mais très décousu. D’une page à l’autre, il évoque l’histoire de l’intelligence artificielle ou l’évolution du "trading" à haute-fréquence. Une lecture touffue, parfois déprimante mais nécessaire. 320 p., 20€. Hugo Guyon
Collectif Mad Max, au-delà de la radicalité (Playlist Society) En attendant la sortie prochaine d’un hypothétique Mad Max 5, le collectif Playlist Society revient sur les quatre volets de la saga post-apocalyptique de George Miller. En une centaine de pages, sont passées en revue la vie et la carrière étonnante du réalisateur (Mad Max donc, mais aussi Babe, le cochon dans la ville ou Happy Feet). On y retrouve aussi les grands thèmes qui traversent l’univers du policier jeté dans un monde sans foi ni loi : la place (ou la perte) de l’espoir en l’humanité, les valeurs décomposées, l’imagerie punk et SM, le virilisme et la misogynie (avec un volte-face dans le quatrième volet). Le tout narré avec une passion érudite et un enthousiasme communicatif. À l’heure où le diesel frôle les deux euros, voici un livre à lire en affûtant son boomerang… 128p., 14€. Thibaut Allemand 73
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© Les films Velvet
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UN PEUPLE Retour de bâton
Depuis J'veux du soleil de Gilles Perret et François Ruffin, sorti en avril 2019, les Gilets jaunes occupent régulièrement les écrans français. Tourné à Chartres et dans sa périphérie, Un peuple s'inscrit dans le quotidien, euphorique et chahuté, de ceux qui entendent redonner un sens à la démocratie. En se concentrant sur quelques figures, Un peuple semble d'abord en contradiction avec un mouvement qui s'est largement défié des processus de représentation. Porte-parole ou coordinateurs, Agnès, Benoît, Nathalie et Allan n'occupent toutefois aucune position d'autorité, et ne se distinguent pas davantage par leur charisme. Plutôt que des icônes de la révolte, Emmanuel Gras suit des gens ordinaires, âgés pour la plupart d'une cinquantaine d'années, dont la vie se trouve bouleversée par quelque chose qui les dépasse de plus en plus... Dignité retrouvée La puissance du mouvement tel que le montre ce documentaire tient moins à ses élaborations conceptuelles (les débats sur le référendum d'initiative citoyenne) qu'à ses pratiques égalitaires et à l'affirmation d'une fierté populaire. C'est bien celle-ci qui sera mise à mal par les gaz lacrymogènes, les tirs de Flash-Ball et les coups. Une discussion laissera entendre le traumatisme qu'a pu engendrer la réponse de l'État, coinçant chacun entre la peur et la honte de cette peur. Car voilà aussi ce qu'est la politique : une affaire de corps qui se rassemblent, se dressent, s'exposent. En l'occurrence, des corps brisés par le travail, la rue ou la précarité ayant (re)trouvé un élan, une tenue, pour faire face et affirmer leur dignité. Si Un peuple témoigne, après l'enthousiasme des débuts, d'un épuisement profond, il suggère aussi que le feu a laissé des traces. Raphaël Nieuwjaer Documentaire d'Emmanuel Gras. En salle
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© Stephanie Branchu, Wild Bunch Distribution
COMPAGNONS Le sens du devoir Pour son cinquième film, François Favrat s’intéresse aux Compagnons du Devoir, rarement filmés au cinéma. On y découvre Naëlle, une jeune femme issue de la banlieue parisienne et obligée de faire ses preuves dans un milieu aux codes éloignés des siens... Un joli récit d'apprentissage révélant un monde encore trop méconnu. François Favrat aime changer d’univers. Il a filmé les coulisses du cinéma dans Le Rôle de sa vie, la politique à l'occasion de La Sainte Victoire ou adapté Tatiana de Rosnay avec Boomerang. Certes Compagnons est une commande de producteurs fondée sur un synopsis original de Johanne Bernard. Mais le réalisateur a retravaillé le scénario avec son auteur avant de s'immerger dans la cité de Bellevue et la maison des Compagnons de Nantes. Il retrace ici l’histoire de Naëlle, 19 ans, issue d'une banlieue difficile et contrainte de suivre un chantier de réinsertion. Hélène (Agnès Jaoui), la responsable des lieux, lui présente alors cette institution où s’acquièrent savoir-faire lié à l'artisanat traditionnel et transmission entre générations. Paul (Pio Marmaï), vitrailliste, l'accueille dans son atelier. Naëlle (épatante Najaa) découvre ici un nouveau monde, qui pourrait représenter un tournant de sa vie... Avec un tel sujet, on craignait le pire : un déluge de bons sentiments, une approche démagogique... Au contraire, Compagnons fascine, touche par sa sincérité et sa modestie. En somme, un joli film sur l’apprentissage, l’exigence et qui réhabilite le travail manuel. De la belle ouvrage. Grégory Marouzé De François Favrat, avec Najaa, Agnès Jaoui, Pio Marmaï... En salle 76
© Odyssee Pictures - photo : Marcel Hartmann
LA BRIGADE Top cheffe
Après s'être penché sur le sort de femmes SDF (Les Invisibles) ou la lutte d'employés contre la mise en place de caisses automatiques dans leur magasin (Discount), Louis-Julien Petit aborde le délicat sujet du traitement des mineurs non-accompagnés (MNA). En mariant une nouvelle fois drame et comédie, il signe un film lumineux. Louis-Julien Petit est un habitué des comédies sociales. Celui qui veut trouver « la lumière, l’humour et l’espoir » à travers des sujets lourds s’attaque, cette fois, à la situation tragique des mineurs sans papiers menacés d’expulsion. Celle qui vient illuminer le quotidien monotone des membres d'un foyer pour migrants, c’est Cathy Marie, incarnée par Audrey Lamy. Cette cuisinière talentueuse au caractère bien trempé décide, presque contre son gré, de monter une brigade de cuisine avec ces jeunes réfugiés. Lors de cette aventure, chacun découvre la légèreté des rires partagés, la satisfaction de se sentir utile mais aussi le traitement réservé aux exilés, pas forcément bienvenus en France… Aux côtés d’Audrey Lamy, une vingtaine de jeunes migrants portent le film avec une énergie impressionnante. « Ils ne connaissaient pas le scénario, confie le réalisateur, je voulais que leur jeu dégage de la vie et de la sincérité ». Citons aussi François Cluzet et Chantal Neuwirth, rayonnants dans la peau de personnages timides qui s'émanciperont auprès de Cathy. De la rencontre de ces rôles sensibles mais réalistes naît une histoire de partage et de tolérance. Une bonne recette. Maïssam Mezioud De Louis-Julien Petit, avec Audrey Lamy, François Cluzet, Chantal Neuwirth... Sortie le 23.03 À lire / L'interview de Louis-Julien Petit, Audrey Lamy et François Cluzet sur lm-mgazine.com 78
Rien ne semblait devoir succéder à l'image d'une mère et de son enfant, serrés l'un contre l'autre, tandis que se mêlaient les battements d'un cœur et le Requiem de Verdi. La fin suspendue de Vie (1994) avait atteint un sublime équilibre. Fracassant, le retour d'Artavazd Pelechian l'est donc doublement. Avec La Nature, le grand cinéaste arménien laisse s'épancher son goût pour la violence de la matière. Entamé sur les crêtes des montagnes, le film, qui emprunte ses images à des documentaires Disney autant qu'à des vidéos amateurs, laisse se déchaîner les forces telluriques, entre éruptions volcaniques, tremblements de terre et tsunamis. Plus qu'un principe mécanique, il y a là une métaphysique : ce qui se dresse doit s'effondrer. Et l'humain, vaniteux et fragile, d'être emporté dans le mouvement. Raphaël Nieuwjaer
© Les films du camelia
Documentaire d'Artavazd Pelechian. En salle
© Les PiQuantes
LA NATURE
DES MOTS QUI RESTENT Tourné vers une fenêtre, chaque intervenant égrène des mots ou expressions dans un dialecte mystérieux – « théière », « grosse bouche », « maman », éclairent les sous-titres. Ainsi prononcés, ils s'arrachent à l'oubli de langues qui ne sont plus guère pratiquées, comme le judéoespagnol ou l'une des formes du judéo-arabe. Interrogeant écrivains, universitaires ou traducteurs ayant baigné dans ces parlers durant leur enfance, Nurith Aviv exhume en même temps l'histoire de croisements culturels féconds et de transmissions avortées. C'est aussi une matérialité de la parole qui se dit. Ainsi, pour Zohar Elmakias, « cette langue sortait tout le temps du corps d'autres personnes et entrait dans le mien ». Sobre, Des Mots qui restent nous place dans les meilleures conditions pour écouter. Raphaël Nieuwjaer Documentaire de Nurith Aviv. Sortie le 09.03 79
En Thérapie © Manuel Moutier
SÉRIES MANIA Nouvelle saison
Six mois après l'édition 2021 (décalée à cause de vous-savez-quoi), Séries Mania est déjà de retour, cette fois dans un format "normal". Au programme ? Une soirée d’ouverture The Wire avec Cut Killer, une exposition au Tripostal consacrée aux tenues portées par Fran Drescher dans Une Nounou d’enfer, et surtout 58 séries issues des quatre coins de la planète, défendues par une pléiade d'invités. Citons Mathieu Kassovitz, Nathalie Baye, François Busnel ou encore Kool Shen, qui vient découvrir en première mondiale Le Monde de demain, soit six épisodes produits par Arte et racontant l’émergence du hip-hop dans l'Hexagone – notamment l'adolescence des fondateurs de NTM. Si le festival fait la part belle à des exclusivités internationales (comme Billy The Kid signée par Michael Hirst, le "père" de Vikings), la France n'est pas en reste. On attend par exemple la présentation (en ouverture) de Drôle, nouvelle création de Fanny Herrero, "showrunneuse" de Dix pour cent, qui s'intéresse cette fois aux aventures de stand-uppers parisiens. On guette aussi avec impatience la saison 2 d'En thérapie (Arte, toujours), rare œuvre à aborder l'impact sur notre santé mentale du confinement – d'ailleurs passé à... regarder des séries. Julien Damien Lille & Hauts-de-France, 18 > 25.03, UGC Ciné-Cité, Majestic, Nouveau Siècle, Tripostal & divers lieux, seriesmania.com 80
LILLE ART UP ! En toute transparence
Une centaine de galeries françaises et internationales, 750 artistes présentés, plus de 40 000 visiteurs attendus... En 14 éditions, Lille Art Up! s'est imposée comme la plus importante foire d'art contemporain en France après la Fiac de Paris. Visite guidée dans les allées foisonnantes de Lille Grand Palais en compagnie de Didier Vesse, directeur artistique d'un événement qui, après avoir tiré le fil du textile en 2021, joue la carte de la transparence. ••• 82
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expo
Hugo Miel, Trame, 2021 - Peinture acrylique, plaques de PVC
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Agata Wieczorek, Double Portrait, 2019 – Photographie
Lille Art Up !, « c'est d'abord un lieu d'échanges, de rencontres et de commerce, résume Didier Vesse. Finalement, c'est un peu comme une pièce de théâtre, où l'on rassemblerait dans un même lieu des personnages multiples : les marchands, les artistes et les galeristes qui sont de véritables découvreurs de talents », souligne le directeur artistique.
« Il suffit d’un rien pour inoculer le virus de l’art. » Le défi constant reste d’attirer de nouveaux publics – « car il suffit parfois d’un rien pour inoculer le virus de l’art, et transformer un amateur en collectionneur ». Mais cette foire c'est aussi (et surtout) une grande fête de l'art contemporain.
Durant quatre jours, cette manifestation offre en effet un panorama rare de la création d'aujourd'hui. Peintures, sculptures, installations, vidéos, photographies... Et la lumière fut On découvre des œuvres signées par les plus grands noms (de Ben à Robert Combas, en passant par César, Hervé Di Rosa...) ou de nouveaux talents. À ce propos, ne manquez pas la 9e édition de Révélation, exposition dédiée aux artistes émergents. En somme, « toutes les disciplines et tendances sont représentées », déclinées cette année sous le prisme de la transparence et de son corollaire, la lumière. C'est-à-dire des thèmes majeurs de l'histoire de l'art envisageables au sens propre 84
(« la matière, les techniques ») comme au figuré (« selon un angle poétique, politique ou intellectuel »). À la masse Et quel meilleur invité de marque que le MusVerre pour illustrer ce propos ? L'institution avesnoise bénéficie d'un espace de 110 mètres carrés au cœur du parcours pour mettre en avant ses collections.
« Toutes les tendances sont représentées. » Citons la série Sleeves de l'Italienne Laura De Santillana, soit des assemblages de tubes de verre colorés évoluant avec la lumière et le point de vue. Nombre de galeristes ont ainsi joué le jeu, présentant des œuvres et des artistes en lien avec
la thématique de la foire. En face de l'espace dévolu au MusVerre, la galerie Daniel Guidat (Cannes) dévoile ainsi les sculptures de l'immense Czeslaw Zuber. Issu du mouvement Studio Glass, ce FrancoPolonais est connu depuis les années 1980 pour fracasser des blocs de verre de plusieurs centaines de kilos à la masse, pour ensuite les peindre. Tout aussi spectaculaires, les huiles sur toile de Jérôme Baudouin (représenté par la Bear Galerie dans le Gard) montrent des paysages urbains nocturnes, entre abstraction et figuration. Cet entrelacs de touches de peinture et de halos rayonnants (autour d'un lampadaire, d'un phare de voiture) prend tout son sens lorsqu'on s'en éloigne, dans un flou artistique... lumineux. Julien Damien •••
Jerome Bauduin, Traffic de rimes, 2021, Bear Galerie
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SÉLECTION
Emilie Rosati, Cosmogonies personnelles, 2021
Thierry Martenon, 101221, 2021, Galerie Platini
Révélation
Thierry Martenon
Depuis 9 ans, Lille Art Up! met en lumière des artistes tout juste diplômés, pour qui la foire représente la première exposition d'envergure. Issus des écoles de l'eurorégion (du Fresnoy de Tourcoing à l'ArBA de Bruxelles) ces dix lauréats ont réalisé une œuvre originale en rapport avec la thématique de cette édition – à l'image, entre autres, des (sublimes) constellations gravées d' Emilie Rosati.
C'est l'un des solo-shows les plus attendus de la foire. Sculpteur et ébéniste autodidacte, Thierry Martenon joue avec les différentes essences, textures ou couleurs de bois pour mieux les recombiner. Ce montagnard, grand amoureux des forêts, cisèle dès lors autant d'œuvres aux formes simples, arrondies, abstraites, toujours d'une grande pureté.
Justin Weiler, Dedale screen 9, 2021, Galerie Provost Hacker
Galerie Provost-Hacker C'est l'une des dix galeries lilloises présentes lors de cette foire. Outre des œuvres signées des pionniers du street-art Speedy Graphito et JonOne, elle dévoile les toiles saisissantes de Justin Weiler. Tel un sculpteur, ce peintre superpose moult couches monochromatiques, dévoilant des compositions tout en jeux d'ombres et clair-obscur, faisant littéralement jaillir la lumière de ses tableaux. 86
Lille, 10 > 13.03 Lille Grand Palais, jeu : 11h-23h ven : 11h-19h • sam & dim : 10h-20h 1 jour : 12/9€ (gratuit -10 ans) lilleartup.com
© Maxime Dufour
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© Alice Sidoli - Musée de Picardie
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© Alice Sidoli - Musée de Picardie
MUSÉE DE PICARDIE
Esprit d'ouverture Après trois ans de travaux et une vraie-fausse réouverture en mars 2020 (inutile d’entrer dans les détails, non ?), le Musée de Picardie dévoile enfin à son public, depuis cet été, ses espaces rénovés. Tour du propriétaire, à l’occasion des nouvelles expositions printanières.
Premier bâtiment de France construit spécifiquement pour devenir un musée, l'institution picarde, édifiée entre 1855 et 1867, méritait bien un petit coup de frais. Et les rénovations ont réservé quelques surprises. « Nous avons découvert des décors architecturaux et des dorures dont nous ne soupçonnions pas la richesse, décrit Maya Derrien, conservatrice du patrimoine et responsable des collections modernes et contemporaines. En particulier au premier étage, dans le Salon de l’Impératrice » – soit Eugénie, épouse de Napoléon III. Parquets et marqueteries reluisants dans les espaces ••• 89
© Alice Sidoli - Musée de Picardie
historiques, mosaïques restaurées dans l’extension du pavillon Maignan, les 6 000 mètres carrés de ce palais des arts ont aussi été modernisés.
de la Préhistoire et de l’Antiquité au sous-sol, art médiéval et sculptures (Rodin, Lamotte) au rez-de-chaussée, riche sélection de peintures, du xve siècle à nos jours au 1er étage…
Le sens de l'accueil « Une boutique, un auditorium, un atelier pédagogique... nous avons redéfini les missions autour du confort du visiteur. Une attention a été accordée aux portraits, et l’on se promène en rencontrant des visages familiers », poursuit Maya Derrien. D'une façon générale, les collections, fortes de plus de 3 000 œuvres mises en valeur grâce à un parcours et une signalétique repensés, conservent leur faste et leur éclectisme. Artefacts
« Une attention a été accordée aux portraits. » Autant de trésors sur lesquels les quatre conservateurs comptent bien s’appuyer pour « monter des projets transversaux et accueillir un public le plus large possible ». Marine Durand Musée de Picardie Amiens – 2, rue Puvis de Chavannes mar > ven : 9h30 - 18h • sam > dim : 11h - 18h 7 /4€ (gratuit- 26 ans) +33 (0)3 22 97 14 00, www.amiens.fr 90
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Moulage en plâtre d’après l’œuvre originale d’Etienne-Maurice Falconet, Milon de Crotone, 1754, marbre, Paris, Musée du Louvre. Collection de l’ancienne École des Beaux-arts d’Amiens mise à disposition de l'Esad par Amiens Métropole. Photographie : Louise Berrez
Statues Modèles
Redécouverte récemment grâce à la pugnacité de Louise Derrez et Gwenn Fraser, deux étudiantes de l’École supérieure d’art et de design d’Amiens, la collection de moulages en plâtre de l’école gagne ici ses lettres de noblesse. Ces "statues modèles", reproduisant des œuvres de l’Antiquité jusqu’à la période moderne, ont longtemps été un vecteur de démocratisation de l’art, avant d’être jugées passéistes puis "dégradées" (parfois dans un but créatif) après mai 68. Réunis dans les espaces permanents du musée, ces plâtres témoignent de l’évolution des goûts au fil des époques, et sont l’occasion de questionner les notions d’original et de copie. 12.03 > 28.08
Jean-François Texier, La chaste beauté du sapeur pompier, 2001-2002, Fonds National d’Art Contemporain, en dépôt au Musée de Picardie depuis 2013 © Bruno Scotti
Merci de déranger ! Pendant que certaines pièces du Musée de Picardie voyagent au Louvre-Lens, l’institution amiénoise accueille les céramiques contemporaines de la Piscine de Roubaix, pour un dialogue avec ses propres collections. Cela donne des rencontres humoristiques et incongrues au sein d’une même vitrine entre Astro Boy et des céramiques gallo-romaines, illustrant des thèmes comme l’alimentation ou la religion - qui, eux, traversent toutes les époques. 26.03 > 28.08 91
Ile Maurice, 1991 © Michel Vanden Eeckhoudt
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MICHEL VANDEN EECKHOUDT Le quotidien enchanté
Disparu en 2015, Michel Vanden Eeckhoudt fait l’objet d’une magnifique exposition à Charleroi. Riche de 250 photographies, dont la moitié présentée pour la première fois, ce parcours rend hommage au cofondateur de l’Agence Vu, lequel a consacré sa vie à saisir en noir et blanc les choses du quotidien, avec humour et gravité. C’est sans doute le plus grand photographe belge contemporain, mais pas le plus connu. Cette ambitieuse exposition lui rend un hommage ô combien mérité, sept ans après sa brutale disparition à 67 ans. Mary van Eupen, son épouse, a travaillé deux ans pour sélectionner ces images, dont la moitié n’avait jamais été exposée ou publiée. Compagnon de route de Libération et du Channel à Calais, Michel Vanden Eeckhoudt n’est pas facile à classer. Il n’était ni photoreporter ni enclin à faire la "une" des journaux. Il préférait se focaliser sur le quotidien, les choses apparemment anodines qui, à travers son viseur, ne l’étaient pas. Comme des bêtes Le Bruxellois reste aussi celui qui a le mieux photographié les chiens et les animaux, notamment dans les zoos. Cette proximité avec la faune remonte à l’enfance (son
père professeur de sciences naturelles conservait plein de bestioles à la maison) et questionne la place que les humains lui accordent. En première lecture, c’est un sentiment de décalage, parfois teinté d’humour, qui émerge. Mais rapidement, la gravité et une certaine tristesse s’imposent à la vue de ces bêtes parquées, dont les expressions anthropomorphes sont des plus troublantes. Cet effet miroir, soutenu par des reflets dans l’image et des plans multiples, est caractéristique de la photographie de Vanden Eeckhoudt. De sorte qu'on finit par se demander où l'on se situe, de part et d’autre de ces barreaux... François Lecocq Charleroi, jusqu'au 22.05 Musée de la Photographie, mar > dim : 10h-18h 8 > 4€ (gratuit -12 ans), museephoto.be À lire / Michel Vanden Eeckhoudt éd. Le Bec en l’air et Musée de la Photographie de Charleroi, 348 p. 300 photographies, 55€, www.becair.com
>>> œuvres commentées page suivante >>> 93
PLANS RAPPROCHÉS
Par Xavier Canonne, directeur du Musée de la photographie de Charleroi et cocommissaire de l’exposition
© Michel Vanden Eeckhoudt
« Cette photo illustre parfaitement son travail. Il y a la joie de ces enfants (les siens d'ailleurs), qui s’étreignent sur un quai de gare. On voit ainsi les retrouvailles, ce train qui ouvre une perspective sur les quais et cet homme plus âgé, avec deux valises, qui s’éloigne de dos. Tout cela forme une parabole de l’âge, cette progression de l'adulte un peu voûté dans le lointain, laissant la joie des jeunes exploser derrière lui. C’est vraiment représentatif de Michel Vanden Eeckhoudt, ce dialogue entre l'arrière et le premier plan. On peut s’en amuser, s’en émouvoir, mais cette image évoque la vie qui s’en va... »
© Michel Vanden Eeckhoudt
Les enfants sur le quai de la gare (Bruxelles 1979)
La Mouette (Bretagne 2013) Par Mary Van Eupen, épouse de Michel Vanden Eeckhoudt et co-commissaire de l’exposition
« Michel rêvait de réussir une photographie de mouette. Il en avait souvent prises mais n'avait jamais été satisfait. Vers la fin de sa trop courte vie, il était déjà très malade, et nous avons entrepris un dernier voyage en Bretagne. Je le voyais sur la plage, allant et venant, photographier mouettes et chiens. Quelques mois plus tard, la maladie l’emporta. J’ai fait développer ses derniers films. Quand j’ai découvert les planches contacts (que lui-même n’avait pu voir), j’ai repéré cette mouette et je me suis dit : il l’a faite ! On ne sait pas si elle atterrit, mettant un point final à son œuvre ou si elle s’envole avec lui. C’est le mystère de Michel, chacun est libre d’y voir ce qu’il veut ». 94
Aline Bouvy n’a que faire du politiquement correct ni du "bon goût". Cette plasticienne s’attaque aux sujets de société (la sexualité, le genre, la violence…). Elle conteste toute forme d'entrave au désir, les normes qui empêchent les corps. Pensée comme « une parade sauvage » entre « vagabondage sexuel » et « batifolages queer », cette exposition intitulée Cruising Bye, (soit "la croisière des adieux") convoque matériaux dépréciés ou postures décadentes, défilé de policiers androgynes et sorcières pour mieux dézinguer le patriarcat et l’hétéronormativité. En somme, une ode décomplexée à la liberté. M.M.
Aline Bouvy,Splendeur et décadence des Sirènes, 2020 Photo Michiel De Cleene
ALINE BOUVY
Martial Raysse, Miss Nice, 1963 photo © Dirk Pauwels
Hornu, jusqu'au 18.09, MACS, mar > dim : 10h-18h, 10 > 2€ (gratuit -6 ans), www.mac-s.be
POP ART. DE WARHOL À PANAMARENKO « Je ne saurais pas dire ce que c’est que le pop art, c’est trop compliqué », déclarait Andy Warhol. On pourrait lui répondre que c'est un miroir de la société de consommation naissante dans les années 1960 et empruntant à la culture populaire. On l'enjoindrait surtout à visiter cette exposition réunissant une quarantaine d'œuvres signées par les grands noms de ce mouvement : Roy Lichtenstein, Panamarenko, Christo… et bien sûr Warhol ! M.M. Gand, jusqu'au 08.05, S.M.A.K., mar > ven : 9h30-17h30 sam & dim : 10h-18h, 15 > 2€ (gratuit -19 ans), smak.be 96
Sol LeWitt
Wall Drawing #528G, 1987 © Private Collection, Belgium / Photo : Hugard & Vanoverschelde
Des lignes, des figures isométriques, des aplats de couleurs vives. Solomon "Sol" LeWitt (19282007) a construit durant la deuxième moitié du xxe siècle une œuvre identifiable au premier coup d’œil, oscillant entre graphisme, dessin mural et sculpture. Dès lors, comment éclairer d’un jour nouveau le travail d’un artiste mondialement célèbre ? Ce défi est ici brillamment relevé. Les incontournables (Wall Drawings) s’y mêlent à l’inédit (son rapport à la spiritualité) pour révéler les obsessions de ce pionnier du mouvement conceptuel. Bruxelles, jusqu’au 01.05, Musée Juif de Belgique, mar > ven : 10h-17h • sam > dim : 10h-18h, 12/7€ (grat. -12 ans), mjb-jmb.org
Teen Spirit « L’adolescence est la seule période où l'on puisse parler de vie au plein sens du terme », selon Michel Houellebecq. Sans doute, mais quelle adolescence ? À Charleroi, le BPS22 réunit près d’une centaine d’œuvres contemporaines signées d’illustres noms (de Nan Goldin à Teresa Margolles, en passant par Larry Clark) pour mieux ausculter cet âge empli de mystères et de contradictions. Derrière ce titre empruntant à un hymne universel de Nirvana sur le mal-être de la jeunesse, se cache une exposition dénuée de clichés - mais pas d’émotion. Charleroi, jusqu'au 22.05, BPS22 mar > dim : 10h-18h, 6 > 3€ (gratuit -12 ans) bps22.be
Gaillard & Claude. A Certain Decade Depuis leur formation à l'aube des années 2000, les Français Gaillard et Claude produisent des pièces protéiformes, entre sculptures en plâtre, impression textile ou musique électronique. D'apparence hybride, ces créations semblent autant d'accidents poétiques télescopant tout et son contraire. Cette exposition rétrospective (la première en Belgique) célèbre une œuvre souvent drôle, intrigante et propice aux doubles sens et sous-entendus. Hornu, jusqu'au 18.09, MACS mar > dim : 10h-18h, 10 > 2€ (gratuit-6 ans) www.mac-s.be
Trouble pictural C'est un regard singulier, et une exposition atypique. Pour la quatrième fois, La Pommeraie (qui héberge des personnes en situation de handicap et d’exclusion sociale) et la Fondation Paul Duhem réunissent des peintures, dessins, ou sculptures signés de 14 créateurs n’ayant reçu aucune éducation artistique. Au sein du parcours, notons ce focus sur l'œuvre de Jacques Trovic, Anzinois décédé en 2018, soit un ensemble de tapisseries et de mosaïques rarement montrées. Lambersart, jusqu'au 10.04, Le Colysée, mar > dim : 13h-19h, gratuit, lambersart.fr 98
Lumière d'Opale À la fin du xix siècle, nombre d’artistes sont contraints de quitter Paris par manque de moyens et gagnent les régions. Parmi ces points de chute il y a la Bretagne, qui formera la célèbre école de Pont-Aven, mais aussi la Côte d’Opale. Ce qu’on appellera "la colonie d’Étaples" regroupe des peintres français ou anglo-saxons. Tous trouvent l’inspiration au fil des longues plages du nord et de leurs dunes, dans la verdure de l’arrière-pays... Cette exposition rassemble quelque 70 œuvres de cette période méconnue. e
Le Touquet, jusqu’au 22.05, Musée du Touquet-Paris-Plage mer > lun : 14h-18h, 3,50 / 2€ (gratuit -18 ans), letouquet-musee.com
Le mystère Mithra
De la gaillette à la reconquête
Durant le xixe siècle, l’académicien Ernest Renan affirma sans rire que « si le christianisme eût été arrêté dans sa croissance par quelque maladie mortelle, le monde eût été mithriaste ». Oui, parfois l’Histoire ne tient pas à grand-chose… Mais qui était Mithra ? D’où vient-il et en quoi son culte consistait-il ? À Morlanwelz, le Musée royal de Mariemont éclaircit pour la première fois le mystère nimbant ce Dieu célébré à travers tout l’Empire romain, entre pièces archéologiques rares et reconstitution de temple...
Le 20 décembre 1990, l’ultime gaillette était extraite de la fosse du 9-9 bis, marquant la fermeture du dernier puits de mine à Oignies. L’événement clôturait 270 ans d’extraction du charbon dans le bassin minier du Nord-Pas de Calais... mais ouvrait une nouvelle page. Ce site exceptionnel est ensuite devenu un lieu culturel, accueillant spectacles, concerts et expositions. Celle-ci revient justement sur ces 30 ans de transformation, rassemblant témoignages, vidéos, coupures de presse ou photographies. Oignies, jusqu’au 24.04, 9-9 bis mer > dim : 14h-18h, gratuit, 9-9bis.com
Jusque-là Entre François Pinault et le Fresnoy, c’est une longue histoire. Celle-ci débute à Lens, où l’homme d’affaires inaugurait en 2015 une résidence de création, à quelques pas du Louvre. L’institution tourquennoise y fut très vite impliquée. Cette affinité se traduit aujourd’hui par une exposition réunissant 17 œuvres du Chilien Enrique Ramirez, passé par ladite résidence, autour desquelles gravitent 28 autres pièces issues de la Collection Pinault et signées de dix artistes, interrogeant la notion universelle de traversée. Tourcoing, jusqu'au 30.04, Le Fresnoy mer > dim : 14h-19h, 4/3€ (gratuit -18 ans) lefresnoy.net
Un hombre que camina © Enrique Ramírez, ADAGP Paris 2022. Courtesy de l'artiste et Michel Rein, Paris Brussels
Morlanwelz, jusqu'au 17.04, Musée royal de Mariemont, mar> dim : 10h-17h, 8 > 3€ (gratuit -18 ans), musee-mariemont.be
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Alexander Vantourhout © Bart Grietens
théâtre & danse
LE GRAND BAIN Eaux bouillantes
Après deux années perturbées par la crise sanitaire, le festival de danse initié par le Gymnase revient plus fort que jamais. Pour cause, cette 9e édition déploie près d'une quarantaine de spectacles partout dans les Hauts-de-France, de Laon à Dunkerque, en passant par le bassin de la Piscine de Roubaix. Parés pour le grand plongeon ? Ultime programme élaboré par Céline Bréant (qui a quitté le Gymnase de Roubaix pour la Comédie de Clermont-Ferrand), ce Grand Bain 2022 s'annonce particulièrement dense. Son mot d'ordre ? « La diversité », souligne Romain Paquet, le responsable de la communication. Le festival fait la part belle aux solos comme aux performances collectives, aux artistes émergents ou confirmés. À côté de la compagnie de Pina Bausch, on découvre par exemple Nuit d'Eliott Pradot. Ce jeune homme passé par l’Université de Lille s'est inspiré de gestes observés dans l'espace public lors de ses déambulations nocturnes, nourrissant des chorégraphies propres à chaque ville traversée. Scène ouverte Pas de thème imposé ici, mais des pièces en prise avec le monde tel qu'il va – ou déraille, à l'image du post-apocalyptique After de Tatiana Julien. « Il est aussi beaucoup question d'émancipation », observe Romain Paquet. Citons Jezebel de Cherish Menzo. La Néerlandaise détourne l'esthétique des "Video Vixens", mettant en scène des femmes noires et hypersexualisées dans les clips de rap des années 1990, pour mieux déconstruire ces stéréotypes – et sublimer l'art du twerk ! Enfin, le public est lui aussi invité à se mettre en scène, par exemple en participant au Danceoke de Sylvain Huc. Soit un spectacle participatif rassemblant danse et karaoké, histoire de se glisser dans la peau de William Forsythe ou Lady Gaga. Joli pas de côté, n'est-ce pas ? Julien Damien ••• 103
La preuve par
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ROOM WITH A VIEW
(Rone, (La)Horde & le Ballet national de Marseille)
© Aude Arago
LE GRAND BAIN
Comme une dernière rave avant la fin du monde. Figure de l’electro française, Rone se joint au collectif de chorégraphes et plasticiens (La)Horde pour créer un spectacle explosif et onirique sur le désastre écologique en cours – une pièce écrite, rappelons-le, avant la crise sanitaire... Dans un décor évoquant une carrière de marbre blanc sur le point de s’effondrer, au milieu des gravats, 18 interprètes du Ballet national de Marseille entrent en transe, se battent parfois ou enchaînent les portés acrobatiques, sur un set techno tour à tour rageur ou envoûtant. Entre jeux circassiens et contorsions hip-hop, les corps vrillent, se frottent mais retombent (de justesse) sur leurs pieds ou dans les bras des autres. Ici une grotte abrite une fête sous les décombres, là certains tentent d'escalader la falaise à mains nues... Déséquilibre et chaos, amour, haine et espoir demeurent les motifs récurrents de cette allégorie dansée d’une humanité au bord du gouffre, mais toujours prête à se relever – jusqu’à quand ? Roubaix, 04.03, Le Colisée, 20h, complet !, www.coliseeroubaix.com
Hauts-de-France, 01.03 > 02.04, Le Gymnase de Roubaix & divers lieux 1 spectacle : 36€ > gratuit • Pass soirée (plusieurs spectacles dans la même soirée) : 14€ 5 places : 35€ • 10 places minimum : 5€ la place, www.gymnase-cdcn.com Sélection / 01.03 : Cyril Viallon - Sébastien B. (Maniac Opus III), Sylvain Huc - Danceoke // 02.03 : Alexander Vantournhout - Through the Grapevine // 04.03 : Rone feat (La)Horde & le Ballet National de Marseille - Room With a View // 08 & 09.03 : Emmanuel Eggermont - All Over Nymphéas // 10.03 : Fouad Boussoum - Oüm, Eliott Pradot – Nuit... // 10 > 12.03 : Gaëlle Bourges - (La bande à) Laura // 11.03 : Jann Gallois - Mandala + Reverse // 16 > 19.03 : Pina Bausch & Tanztheater Wuppertal – Palermo Palermo // 17.03 : Nathalie Pernette - La Mémoire de l'eau // 22.03 : Cherish Menzo - Jezebel // 29.03 : Christian Ubl + Kurt Demey Nuit - Garden of Chance, Eliott Pradot - Nuit, Tatiana Julien - After // 30.03 : Nathalie Béasse – Ceux-qui-vont-contrele-vent... // 31.03 : Christian Ubl + Kurt Demey Nuit - Garden of Chance, Rachid Ouramdane - Corps Extrêmes... 104
LA MÉMOIRE DE L’EAU Nathalie Pernet met en scène quatre interprètes… dans le bassin de la Piscine de Roubaix ! Dans cette chorégraphie aquatique, chacun disparaît sous la surface de l’eau, plonge ou resurgit, jouant joyeusement avec les ambivalences de cet élément, synonyme de naufrage comme de vie. Roubaix, 17.03, La Piscine, 18h, gratuit www.roubaix-lapiscine.com
© Olivier Look
(Nathalie Pernette)
PALERMO PALERMO (Pina Bausch & Tanztheater Wuppertal)
Dunkerque, 31.03, Le Bateau Feu 20h, 9€, www.lebateaufeu.com
Lille, 16 > 19.03, Opéra, 20h (sauf sam : 18h) 36 > 5 €, www.opera-lille.fr
© Pascale Cholette
Chorégraphe et danseur, Rachid Ouramdane applique sa même science de la virtuosité au cirque. Après Möbius, il invite une nouvelle fois acrobates et voltigeurs, mais aussi grimpeurs et funambules en haute altitude (ou "highliners") à défier les lois de la gravité – et c’est vertigineux.
Attention événement ! La compagnie de Pina Bausch ne s’était pas produite à Lille depuis 1975. Elle signe son retour à l’Opéra avec l’une des pièces iconiques de la chorégraphe allemande (1940-2009). Créée peu avant la chute du mur de Berlin, en 1989, Palermo Palermo met en scène 22 interprètes en robes à fleurs, talons aiguilles ou pieds nus, dans un décor apocalyptique. Devant un mur de parpaing qui s’effondre, les saynètes sidérantes se succèdent (ici on danse la tarentelle, là une jeune femme est bombardée de tomates) symboles d’une humanité en morceaux, un monde en déroute.
CORPS EXTRÊMES (Rachid Ouramdane)
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© Reiner Pfisterer
KONTAKTHOF
Le manège de la vie Attention, spectacle de légende ! En créant Kontakthof en 1978, Pina Bausch souhaitait déjà qu'il résiste à l’épreuve du temps. En 2000, c’est à des amateurs de plus de 65 ans qu’elle confiait l’interprétation de ce ballet contemporain, puis à des adolescents huit ans plus tard. L'illustre chorégraphe s’est éteinte en 2009, mais son œuvre lui survit : la pièce, donnée dans sa version originale à Charleroi, n’a jamais été aussi actuelle. Ils sont 24 interprètes sur la scène, transformée en salle de bal. Douze femmes moulées dans des robes de cocktail, satins chatoyants et drapés travaillés. Douze hommes engoncés dans de sombres costumescravates, mine concentrée et cheveux peignés. Prêts à se lancer dans une entreprise pour le moins sérieuse : le grand jeu de la séduction. Avec cette succession de courts tableaux sans lien apparent les uns avec les autres, Pina Bausch affermit à l’époque le concept de danse-théâtre qui fit sa renommée, en laissant s’exprimer les danseurs. Pendant près de trois heures, c’est tout le manège des rapports humains et amoureux qui s’affiche, sur une bande-son des années 1930. Déambulations sensuelles, confrontations épiques, tentatives parfois grossières d’attirer l’attention de l’autre. La danse s’imprègne des petits gestes du quotidien et livre des images saisissantes, tel ce tableau de groupe jazzy où le lâcher-prise règne en maître. À l’aube d’un renouveau (Boris Charmatz prendra la direction du Tanztheater Wuppertal en septembre) la compagnie historique de Pina Bausch affiche avec superbe ce qui fait son ADN. Marine Durand Charleroi, 10 > 12.03, Palais des Beaux-Arts, 20h, 36 > 19€, charleroi-danse.be 106
Save the Last Dance for Me © Claudia Borgia, Chiara Bruschini
FESTIVAL LEGS Où comment célébrer la danse à travers son histoire, son héritage et sa transmission – son legs, donc. C'est par exemple Stéphanie Auberville qui revisite avec sept interprètes le célèbre Boléro de Maurice Béjart, mais en se jouant des genres et du désir, renversant les points de vue féminins sur la séduction... La particularité de cette quatrième édition ? Une mise à l'honneur des formes festives. On trouve ici du cabaret, beaucoup de folklore (la danse en sabots de Dalila Belaza) et même... une œuvre chorégastronomique ! Le Brésilien Calixto Neto nous convie ainsi à la préparation d'une feijoada, tout en samba. Appétissant, n'est-ce pas ? J.D. Bruxelles, 23.03 > 02.04, La Raffinerie, 1 spectacle : 5€, www.charleroi-danse.be Sélection / 23.03 : Stéphanie Auberville - M-81 // 24.03 : Latifa Laâbissi - Consul et Meshie 30.03 : Calixto Neto - Feijoada // 01.04 : Dalila Belaza - Au cœur
Going Home © Hubert Amiel
FESTIVAL KICKS ! Cette huitième édition de Kicks ! célèbre la jeunesse à travers une dizaine de spectacles originaux. Citons par exemple Going Home, soit l'histoire d'un jeune Ethiopien vivant en Europe... mais prêt à tout pour regagner son pays. Tout aussi politique, Extreme/Malecane décortique à l'inverse l'adhésion des jeunes Européens aux thèses nationalistes. Enfin, on ne manquera pas cette relecture rock de Hamlet, sublimée par l'incandescent Thomas Mustin. M.M. Charleroi, jusqu'au 26.03, Théâtre de L'Ancre et divers lieux 1 sepctacle : 15 > 5€, ancre.be Sélection / 10 & 11.03 : Vincent Hennebicq - Going Home 15 > 17.03 : Paolo Pisciottano - Extreme/Malecane 15 > 18.03 : Emmanuel Dekoninck - Hamlet 108
De la danse partout et pour tous, aux quatre coins du Pas-de-Calais : telle est la promesse de ce festival. Au programme ? Des spectacles croisant les genres (avec le cirque, la musique) présentés dans des lieux atypiques. En témoigne Le Chemin de Mehdi Kerkouche, qui rend hommage aux Lensois. Lors de cette déambulation chorégraphique, six interprètes empruntent le chemin effectué par les mineurs pendant un siècle, pour finir en beauté au sein du Louvre. Au Métaphone de Oignies, le collectif Quatrième Souffle décrit la rencontre (façon "puzzle") entre un danseur de hip-hop et une clownesse, au rythme d’une batterie survoltée. J.D.
Anne Nguyen © Patrick Berger
LA BEAUTÉ DU GESTE
Bassin minier du Pas-de-Calais, 22 > 27.03, divers lieux, 1 spectacle : 5€, culturecommune.fr Sélection / 22 > 25.03 : Anne Nguyen - Le Procès de Goku // 23.03 : Collectif Quatrième Souffle - Tu me suis ? // 26.03 : Jonathan Guichard - 080, Cie Jeanne Simone - Ce qui s’appelle encore Peau // 27.03 : Mehdi Kerkouche - Le Chemin
LABEL DANSE
Pas de deux © DR
Mis sur pied par le Ballet du Nord, ce festival se déploie à Roubaix. À la Condition Publique, on admire ainsi le sens du collectif de Joanne Leighton. Depuis plus de dix ans, l'Australienne recueille des photos de rassemblements. Sur le plateau, neuf interprètes rejouent ces clichés, de la scène de liesse familiale à la manifestation. Plus intimiste, Pas de deux exprime à la Piscine toutes les facettes de l'altérité, de la tendresse à l'agressivité. J.D. Roubaix, 31.03 > 03.04, divers lieux, 1 spectacle : 12€ > gratuit www.balletdunord.fr Sélection / 01.04 : Joanne Leighton - People United, Sylvain Groud & Chamberlain - Between // 03.04 : Rita Cioffi & Cie Aurélia - Pas de deux 110
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© Arnaud Bertereau
VIRIL
Trois femmes puissantes Ce spectacle mis en scène par David Bobée, nouveau directeur du Théâtre du Nord à Lille, réunit Casey, Béatrice Dalle et Virginie Despentes. La rappeuse, l’actrice et la romancière délivrent onze textes féministes et antiracistes, accompagnées par le groupe de rock lyonnais Zëro. Et frappent juste : là où ça fait mal... Plus qu'un concert-lecture, un manifeste choral, un uppercut. Les cibles ? La virilité, le patriarcat et toutes les formes de domination masculine. Sur scène, Béatrice Dalle, Casey et Virginie Despentes donnent corps à de grandes voix pourfendeuses du sexisme, mais aussi du racisme ou de l'hétéronormativité. À l'heure où l'extrêmedroite est obsédée par sa masculinité (on ne vise personne, Éric) et où la politique internationale devient affaire de gros bras (on ne vise personne, Vladimir), cette ambition n'est pas tout à fait incongrue. Accident biologique Avec la gouaille qu'on leur connaît, les artistes enchaînent des extraits de textes directs, crus mais toujours pertinents. Ils sont par
exemple signés Monique Wittig, fondatrice du féminisme lesbien dans les années 1980, par les écrivaines afro-américaines Audre Lorde et June Jordan ou encore l’activiste LGBT Itziar Ziga. Et sonnent comme autant de punchlines dévastatrices, à l'image de Valerie Solanas qui assure dans son SCUM Manifesto : « Le mâle est un accident biologique. Le gène Y n’est qu’un gène X incomplet. En d’autres termes, l’homme est une femme manquée ». Ouille… Alors oui, ces messieurs en prennent pour leur grade, et le propos est du genre radical mais, pour citer David Bobée : « Maintenant que la parole est libérée, il faut passer aux actes et la colère est la seule réaction possible. La seule arme pour s'opposer à la haine. Mais c'est une colère salutaire ». Julien Damien
Lille, 15 > 23.03, Théâtre du Nord, 20h, 25 > 6€, www.theatredunord.fr + soirées consacrées aux féminismes : 15 > 24.03 • Soirée électro féministe : 17.03, 20h Soirée ARTE - 24 heures dans la vie d'une femme : 24.03, 20h Bruxelles, 03 & 04.05, Le 140, 25 / 22€, www.le140.be Mons, 10.05, Théâtre le Manège, 21h, 20 > 15€, surmars.be 113
Claire Mirande © Pidz
EST-CE QUE VOUS POUVEZ LAISSER LA PORTE OUVERTE EN SORTANT ? Mémoire vive Antoine Lemaire affectionne les titres intrigants (tel Vivre sans but transcendant est devenu possible) et les histoires d'amour qui sortent de l'ordinaire. Ecrite en 2015, Est-ce que vous pouvez laisser la porte ouverte en sortant ? en est justement une. La pièce met en scène un couple de personnes âgées, une professeure de danse à la retraite et un écrivain. Un soir, elle rentre en pleine nuit, confuse, sans se rappeler de sa journée. La maladie d’Alzheimer est en train de frapper... Que faire ? S'adapter, pour continuer à vivre. Une nouvelle relation se met en place. Elle ne se souvient plus de lui, comme s’ils n’avaient jamais vécu ensemble ? Qu'importe, il va tout faire pour la reconquérir, leur réinventer une vie, tout rejouer sans cesse comme si c'était la première fois - un peu comme au théâtre... Au sein d'une scénographie épurée, Jean-Marc Chotteau et Claire Mirande incarnent cet homme et cette femme privés de repères au crépuscule de leur existence, mais pas d'amour. Une leçon de courage et de vie, livrée sans pathos mais avec juste ce qu'il faut de délicatesse. J.D. Tourcoing, 22.03 > 08.04, La Virgule, mar, mer, jeu & ven : 20h • sam : 17h, 20 > 8€ www.lavirgule.com 114
Nez rouge, maquillage dégoulinant et langue bien pendue… Qu'on se le dise : le mois de mars est celui des clownesses. Parmi les sept spectacles du festival, citons Elle de Stéphanie Bailly, qui se penche sur les injonctions de genre. On lui a dit qu'elle était une femme, mais ne sait pas trop ce que cela signifie. Alors elle va chercher… pour mieux railler les stéréotypes. De son côté, Adelaïde Anaconda nous offre une parenthèse plus intime, mais pas moins universelle. Dans L’Amour n’a pas d’écailles, elle s’adresse « à tous ceux qui ont déjà été amoureux » en proposant d’écrire la « plus belle lettre de rupture possible ». Ça promet ! M.M.
Elle © Fabien Debrabandere
ELLES EN RIENT ENCORE
Lille, 04 >18.03, Le Prato (+ maison Folie Moulins), 1 spectacle : 15 > 5€, leprato.fr Sélection / 10.03 : Justine Cambon - L'Amour n'a pas d'écailles // 17.03 : Stéphanie Bailly - Elle
© Fahd Zidouh
HOMO SAPIENS « Comment ne pas voir dans le passé de troublantes similitudes avec aujourd’hui ? », demande Samuel Tilman, metteur en scène d’Homo Sapiens. À travers des allers-retours entre les époques son complice au plateau, Fabrizio Rongione, déterre les racines des névroses et luttes contemporaines – où l'on découvre, entre autres, que Jules César était le roi des fake news. Le temps passe mais la médiocrité des hommes traverse les millénaires… Tant mieux ! M.M. Bruxelles, 09.03 > 02.04, Théâtre de la Toison d'Or mer > sam : 20h30, 25 > 8€, www.ttotheatre.com 116
© Matthieu Edet
ELLES VIVENT Poétique fiction
Qualifier le travail d’Antoine Defoort de "déjanté" tiendrait presque de la tautologie. Avec L’Amicale, la plateforme coopérative de production qu’il a créée voilà 12 ans avec Halory Goerger et Julien Fournet, le metteur en scène expérimente des formes nouvelles, du genre installation-performance-conférence, avec une inclination prononcée pour la poésie et l’absurde. Alors, quand il décide de s’attaquer aux turpitudes du discours politique et aux nouveaux gourous du développement personnel, on a l’œil qui frise. L’action se déroule dans une forêt (en images projetées) et le récit frôle la dystopie. Un homme, Michel, raconte la campagne électorale qu’il vient de mener avec son think tank "Plateforme, Contexte et Modalités" à son ami Taylor, jusque-là coupé du monde car enfermé dans un ashram (lieu isolé dédié au yoga et à la méditation) pendant deux ans, sans manger. Sur ce pitch déjà riche, Defoort ajoute une astuce narrative d’une folle créativité : un "mnémoprojecteur", soit un casque à souvenirs permettant aux personnages de présenter aux autres ce qu’ils ont vécu, à la manière d’un PowerPoint. Novlangue de l’entreprise, vacuité des nouvelles technologies… Notre société en prend pour son grade dans ce spectacle qui rappelle la force des histoires, et la puissance des idées. Marine Durand Dunkerque, 24 & 25.03, Le Bateau Feu, jeu : 19h • ven : 20h, 9€, www.lebateaufeu.com Bruxelles, 15 & 16.06, Kaaitheater, 20h30, 30 > 10€, www.kaaitheater.be 118
Babïl © Frederic Iovino
LOUSTIX EN FÊTE Des spectacles à hauteur d'enfants, mais pas au ras des pâquerettes. C'est tout l'esprit de ce "Loustix en fête". Citons la dernière création de Cédric Orain, qui s'inspire de l'histoire de Victor de l'Aveyron et Kaspar Hauser, qui ont grandi seuls dans la forêt, à l'écart du monde. Ici, un acrobate incarne ces "enfants sauvages" et initie une réflexion sur notre rapport à l'autre. Tout aussi futé, Babïl explique aux plus jeunes le pouvoir de la parole. Comment la prendre ? La laisser ? C'est ce qu'apprennent Tohu et Bohu, en pleine construction de la tour de Belba. Car pour bâtir ensemble, il va falloir s'entendre, donc s'écouter... Compris ? J.D. Valenciennes, 01 > 19.03, Le Phénix, 1 spectacle : 15 > 6€, www.lephenix.fr Sélection / 01 > 03.03 : Cédric Orain - Enfants sauvages // 08 & 09.03 : Bérangère Vantusso & Compagnie de l’Oiseau mouche - Bouger les lignes, histoires de cartes 16 > 19.03 : L’Embellie Cie - Babïl
© DR
QU'EST-CE QU'ON FABRIQUE EN FAMILLE ? Culture Commune a concocté un programme pour toute la maisonnée ! De formidables spectacles suivis par autant d'ateliers. Dans I Killed The Monster, Gildwen Peronno crée un film de série B avec tout ce qu'il trouve sur sa table : un abat-jour, une voiturette... Tout aussi déjantée, la compagnie Sens Ascensionnels nous raconte rien de moins qu'Une Petite histoire de l’humanité à travers celle de la patate – qu'on apprendra bien sûr à cuisiner dans la foulée. J.D.
Loos-en-Gohelle & Lens, 04 > 06.03, Base 11/19 & Cité des Provinces, 1 spectacle : 5/3€ • pass 10 spectacles : 35€, www.culturecommune.fr Sélection / 05.03 : A.I.M.E - Une échappée, Cie Sens Ascensionnels - Une petite histoire de l’humanité à travers celle de la patate // 05 & 06.03 : Cie La Bocca della Luna - À l’envers, à l’endroit, Roi ZIZO Théâtre - I Killed The Monster... // 06.03 : Cie Les Bas-Bleus - Filles et soie 120
OUVREZ LES VANNES !
© Magali R
Ils sont corrosifs, loufoques, burlesques ou poétiques… mais pareillement hilarants. Ces valeurs sûres (ou en devenir) de la gaudriole débarquent près de chez nous pour le meilleur et le rire – et ce n’est pas de la blague. J.D
GUILLAUME MEURICE L'élection présidentielle manquant de candidats (surtout à gauche), Guillaume Meurice franchit le Rubicon. Le chroniqueur de Par Jupiter ! a suffisamment tâté le pouls de la France avec ses micros-trottoirs pour envisager l'Elysée. Derrière son pupitre, habillé en costume-cravate (avec la petite plante posée dans un coin, histoire de rappeler la gravité des enjeux), il déroule son programme. Enfin, pour l'heure, il tape surtout sur ses concurrents, avec le sens de la formule qu'on lui connaît. Yannick Jadot ? « Une sorte de Général de Gaulle en tofu ». Eric Zemmour ? « Un juif qui aime Pétain, un peu comme un torero vegan ». Ben voyons... Boulogne-sur-Mer, 04.03, Carré Sam, 20h30, complet !, www.ville-boulogne-sur-mer.fr 122
© Bazil Hamard
© Louis De Caunes
GUILLERMO GUIZ
PATRICK TIMSIT
« Est-ce que je vous ai parlé de l’enterrement de mon père ? », interpelle d'entrée Guillermo Guiz dans son deuxième spectacle, cette fois centré sur la paternité et la transmission, la virilité et la masculinité... mais toujours aussi absurde et trash. Après avoir tenté de nous prouver qu’il avait un bon fond, le natif d'Anderlecht rend hommage à son paternel, partageant au passage un tas de conseils, du genre : « épouse ta meilleure amie » ou « ne pisse pas pendant un orage, tu vas t’électrocuter ». Pas bête.
Après 35 ans de vannes mythiques (au hasard : « y'a de plus en plus de cons chaque année. Mais cette année, j'ai l'impression que les cons de l'année prochaine sont déjà là »), Patrick Timsit tire sa révérence. Pourquoi ? Parce qu'il a « tous ses points de retraite » mais surtout : « il faut s’arrêter avant qu’on t’arrête ». Comment va-t-il occuper son temps après ça ? « Je vais aller chasser, j’ai toujours rêvé de tuer des animaux », assure le sniper, qui pour l'occasion a sorti la sulfateuse.
Namur, 27.03, le Delta, 15h, 25€ La Louvière, 31.03, Le Théâtre, 20h, 22 > 8€
Lille, 25.03, Théâtre Sébastopol, 20h, 47 > 35€ Bruxelles, 26.03, Cirque Royal, 20h, 47 > 29€
© Thomas Braut
FELIX RADU Marchant dans les pas du grand Raymond Devos, Félix Radu jongle avec les mots, l’absurde et (forcément) le surréalisme. Dans Les Mots s’improsent, ce Namurois réussit l'exploit de nous faire rire en citant Camus, Saint-Exupéry ou Shakespeare. Cet amoureux du beau verbe, révélé avec ses chroniques matinales sur La Première (RTBF) et une web-série (Félix déLIRE) vulgarisant la littérature, évoque la mort, l’amour ou le temps qui passe avec cette touche de loufoquerie propre à son mentor. Ath, 24.03, Le Palace, 20h, 29,50€ // Louvain-la-Neuve, 25.03, Aula Magna, 20h, 29,80€ // Namur, 26.03, le Delta, 15h, 25€ // Béthune, 31.03, Théâtre de municipal, 20h30, 22 > 11€, www.theatre-bethune.fr 123
Miramar (Christian Rizzo)
© Marc Domage
Dans la langue occitane, miramar signifie littéralement "qui regarde la mer". Inspiré par cette considération éminemment poétique (et mélancolique), Christian Rizzo imagine une pièce pour onze danseurs. Ou plutôt, pour dix interprètes et un individu en solo, mis en regard de ce groupe dont les mouvements de flux et de reflux évoqueraient le ressac des marées, entre chutes, projections ou gestes synchronisés. Une mise en perspective tout en mouvement, une émotion chorégraphiée. Lille, 05 & 06.03, Opéra, sam : 18h • dim : 16h, 23 > 5€ Dunkerque, 03.05, Le Bateau Feu, 20h, 9€
Accords parfaits (Louis-Michel Colla / Isabelle Paternotte)
Marie, jeune cadre dynamique, découvre avec stupeur que le ménage de son appartement n'est pas fait par la gardienne d’immeuble mais par François, un inconnu qui lui a volé ses clés. Qui est donc ce séduisant jeune homme ? En réalité un musicien désargenté qui cache un lourd secret... Comment ces deux êtres, si différents, vont-ils s'accorder ? C'est tout le propos de cette comédie romantique. Entre stratagèmes, mensonges et quiproquos, résonnent les notes chaleureuses d'une mélodie du bonheur... Bruxelles, 09.03 > 03.04, Théâtre royal des Galeries, 20h15 (matinée : 15h), 26 > 10€, trg.be
Médée
(Sénèque / Tommy Milliot) C'est l'héroïne tragique par excellence. La femme qui commet le crime ultime, tuant ses enfants pour se venger de l'homme qui l'a répudiée... Mais comment devient-on Médée, celle qui transforme « la douleur en fureur » puis en meurtre inexpiable ? Tommy Milliot s'empare du mythe de Sénèque pour disséquer au plus près cette métamorphose. Dans la tradition du théâtre romain, c'est-à-dire sur un plateau sans décor, Bénédicte Cerutti brille dans le rôle-titre, ce monstre terriblement humain. Béthune, 10 > 12.03, La Comédie (Le Palace) jeu & ven : 20h • sam : 18h30, 20 > 6€ www.comediedebethune.org
La Dernière nuit du monde (Laurent Gaudé / Fabrice Murgia) Imaginez : une petite pilule offrirait, en 45 minutes, autant de repos réparateur qu’une nuit de huit heures. Chacun choisirait alors le moment où il dort, profitant de ces moments ainsi gagnés. Grâce à cette invention bouleversant « la façon dont l’espèce humaine va habiter le temps », les citoyens pourraient donc vivre plus… ou travailler plus. Entre thriller et SF, cette dystopie réveille de très contemporaines questions, notamment la productivité à outrance et l’exploitation des individus. La Louvière, 11 & 12.03, Le Théâtre, 20h, 15 > 8€, www.cestcentral.be 124
Un Chalet à Gstaad (Josiane Balasko) Cela faisait trois ans que Josiane Balasko n’était pas montée sur les planches. Pour l’occasion, l’ancienne membre de la troupe du Splendid retourne à ses premières amours : la comédie. Plus de 40 ans après les Bronzés font du ski, la revoici à la montagne pour caricaturer avec férocité de riches exilés fiscaux, dans un chalet enneigé en Suisse. Il est ici question d’un huis clos entre deux couples fortunés et assez odieux, mais aussi d’un coach de vie qui se révèlera gourou de malheur… Douai, 14.03, Théâtre municipal, 20h30, 41 > 20€, ville-douai.fr // Hem, 15.03, Le Zéphyr, 20h 43/40€, zephyrhem.fr // Le Touquet, 16.03, Palais des Congrès, 20h, 65 > 45€, letouquet.com
Le feu, la fumée, le soufre (Christopher Marlowe / Bruno Geslin & Jean-Michel Rabeux)
Contemporain de Shakespeare, Christopher Marlowe produisit un théâtre de la démesure. Bruno Geslin et JeanMichel Rabeux adaptent ici Édouard II, tragédie écrite à la fin du xvie siècle, soit l’histoire d’un roi écartelé entre ses désirs et l’exercice du pouvoir. La pièce relate la fin du règne du souverain qui, lorsqu’il décide d’anoblir son amant, provoque l’ire des nobles et de la reine. Sur le plateau, les tableaux se succèdent via une scénographie majestueuse, ponctuée d’intermèdes dansés ou chantés.
© Stanislalv Dobak
Douai, 15 > 17.03, L’Hippodrome, mar & mer : 20h • jeu : 19h, 22 > 5€, tandem-arrasdouai.eu
Falaise (Baro d’evel) Second volet d’un diptyque initié avec Là, Falaise nous projette dans un monde en noir et blanc. Sur scène, huit artistes, un cheval et des pigeons forment une tribu de survivants cherchant malgré tout la lumière dans un monde prêt à s’effondrer. Entre rock et baroque, danse et cirque, équilibre et déséquilibre, la compagnie franco-catalane Baro d’evel poursuit son théâtre poétique et animal. Une jouissive allégorie de la chute, mais où l’on finit toujours pas se rattraper. Maubeuge, 17 & 18.03, La Luna, 20h, 9/4€, www.lemanege.com // Roubaix, 23 & 24.03, Le Colisée, mer : 20h • jeu : 19h, 21/16€, www.coliseeroubaix.com // Charleroi, 22 & 23.04, PBA, 20h, 16 > 6€, www.pba.be
Garcimore est mort (Gaël Santisteva) Vous souvenez-vous de Garcimore ? Ce magicien au rire inimitable fut popularisé dans les années 1980 à la télévision, lors de tours magnifiquement bricolés, parfois longs, avant d’être évincé par un monde devenu hystérique. Gaël Santisteva célèbre cette figure éminemment poétique. Sur scène, entre danse et tours de passe-passe, mais aussi chansons ou numéros de claquettes, quatre interprètes livrent une ode pailletée à la simplicité et au ralentissement – en un mot, à la décroissance. Bruxelles, 17 & 18.03, La Raffinerie, 19h, 16 > 10€, charleroi-danse.be 126
Le Bruit des loups (Étienne Saglio / Cie Monstre(s)) Orfèvre de l’illusion, spécialiste en magie 2.0, Étienne Saglio nous avait ensorcelés avec Les Limbes. Le Breton a travaillé près de trois ans pour mettre au point ce nouveau spectacle. Il ravive ici le frisson des contes d’enfance. Depuis son appartement, un homme taciturne est projeté comme Alice au pays des merveilles dans une forêt mystérieuse, peuplée de plantes anthropomorphes, d’un géant ou d’un vrai loup. Se reconnectera-t-il avec la nature ? Et donc la sienne ? Telle est la question… Calais, 19.03, Le Channel, 19h30, 7 €, lechannel.fr
Boucle d’or 2021
La Réponse des hommes
(Alain Borek)
(Tiphaine Raffier)
On connaît tous l’histoire de cette petite fille perdue qui trouve refuge chez une famille d’ours. Dans ce spectacle pour le jeune public, Alain Borek se réapproprie le conte à travers un dispositif interactif évoquant le jeu vidéo. Nous suivons l’héroïne se déplaçant dans une forêt numérique, devant un écran géant servant de décor. À chaque moment clé, le spectateur oriente la trame du récit. Doit-on se méfier ou avoir confiance ? En filigrane, la pièce interroge les notions d'accueil et de migration.
Comment faire le bien ? Vaste question. Pour sa quatrième mise en scène, Tiphaine Raffier se penche sur les œuvres de Miséricorde, soit les actions de bienfaisance que se doit d’accomplir chaque chrétien – accueillir les étrangers, donner à boire aux assoiffés, assister les malades… Au fil d’un récit fragmenté en neuf tableaux, entre vidéo et musique classique, la pièce interroge notre humanité et notre engagement. Et pousse la morale dans ses retranchements. Valenciennes, 24 & 25.03, Le Phénix, 20h, 25 > 10€, www.lephenix.fr // Lille, 06 > 09.04, Théâtre du Nord, mer & ven : 20h • jeu : 19h • sam : 18h, 21 > 6€, www.larose.fr
23 fragments de ces derniers jours (Maroussia Diaz Verbèke / Instrumento de ver) La “circographe” Maroussia Diaz Verbèke n’aime rien tant que partager son terrain de jeu. Après avoir mis en scène FIQ ! pour le Groupe acrobatique de Tanger, elle s’associe ici au collectif brésilien Instrumento de ver. À travers une succession de tableaux et autant de prouesses, fragment par fragment, ils s’emparent d’objets du quotidien (des bouteilles de verre, du papier bulle) pour reconstruire ce qui est détruit dans le pays de Bolsonaro. En premier lieu : la joie et l’optimisme.
© Drago
Arras, 23.03, Théâtre d’Arras, 19h, 10 > 5€ www.tandem-arrasdouai.eu
Douai, 30 & 31.03, L’Hippodrome, mer : 19h • jeu : 20h, 22 > 5€ Lille, 05 & 06.05, Le Prato, 20h, 15 > 5€ 128
le mot d
e la fin
Le plastique c'est fantastique !
greenpeace.org
Bienvenue dans la nouvelle boutique vintage de Greenpeace ! Ici, vous trouverez une collection unique de produits oubliés depuis des lustres. Repêchés dans l'océan, ces articles ont parfois plus de 60 ans, témoignant de la longévité exceptionnelle du plastique, dont 17 tonnes sont déversées chaque minute dans les espaces marins… Blague à part, l'ONG s'est associée avec l'agence de communication Ogilvy (Pays-Bas) pour monter cette astucieuse campagne de sensibilisation et dénoncer ce péril en cours – et pas franchement drôle. 130