Éclats de silences
Omar Hallouche
1. Natif d’Aghbala, en Kabylie, le sociologue Abdelmalek Sayad (1933-1998) est surnommé « le Socrate algérien ». Se liant d’amitié avec Pierre Bourdieu, il entreprend de développer une lecture sociale de la question de l’émigrationimmigration et devient directeur de recherche au Centre national de la recherche scientifique (CNRS) et à l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS). El Watan, 17 juillet 2008.
À Abdelmalek Sayad, le « Socrate d’Algérie1 », qui m’a accompagné et éclairé par ses écrits…
Remerciements
À mon ami Christophe Clerc, ex-délégué régional de l’ASSFAM,
à ma comparse Magali Galizzi, qui m’a accompagné dans ces déambulations vaudaises avec son intelligence, sa sensibilité et son humour,
à feue Catherine Jouandon, mon amie et « passeur » auprès de Christophe, à toutes les institutions qui nous ont soutenu moralement et financièrement,
à feu Daniel Pelligra,
à Leïla Houari pour son éclairage amical,
à Marie-Hélène Roinat, photographe et vidéaste qui avait illustré avec talent Paroles d’hommes à trois voix, aux habitants de Vaulx-en-Velin, aux anonymes rencontrés dans les cafés et aux animateurs de centres sociaux du Grand Vire et de l’Espace Carco, aux jeunes volontaires d’Unis-Cité, aux résidents du foyer « La Pie » et à sa directrice Khadidja Doghman,
à Annette Carayon qui m’a suivi pas à pas et qui a « passé le plumeau » sur mes écrits,
à Marc Fontrier, pour son aide amicale et précieuse à la mise en forme de mes textes,
à Florence Codet, Dominique Lurcel, Jean-François Vallette, Michel Serfati pour leurs relectures et leurs conseils avisés,
au père Christian Delorme qui m’a fait l’honneur de préfacer mon livre.
Père Christian Delorme2. Christian
Delorme est prêtre catholique du diocèse de Lyon. Il a une longue histoire auprès de l’immigration. Avec le pasteur Jean Costil et quelques jeunes du quartier des Minguettes à Vénissieux, il a été, notamment, un des initiateurs de la Marche pour l’égalité et contre le racisme de 1983. Il est l’auteur de plusieurs ouvrages.
Préface
Quand j’ai plongé dans les Éclats de silences d’Omar Hallouche, je me suis très vite dit : voilà un homme qui aime véritablement ses congénères ! Voilà un homme qui a le don d’aimer ses frères en humanité ! Il faut, en effet, avoir en soi beaucoup d’amour à l’égard des êtres humains en général, beaucoup d’empathie pour autrui, pour avoir passé ainsi des années à recueillir des récits de vie, à les avoir retranscrits et en avoir gardé trace dans des cahiers soigneusement conservés.
D’aucuns rétorqueront peut-être que c’est là le « b. a.-ba » du métier d’anthropologue ou de celui de sociologue ! Mais il y a la manière de le faire. Dans l’ouvrage d’Omar Hallouche, que tout lecteur pourra maintenant avoir entre les mains, il ne s’agit pas de fiches sans âme, de renseignements correspondant à des cases à remplir. Ce que l’on entend tout au long des pages qui nous sont offertes, ce sont de vrais morceaux de vie, de vraies voix d’hommes où se bousculent la souffrance et la lutte, la honte et la fierté, l’amertume et la sagesse. Même s’il y a, de toute évidence, un savoir-faire d’enquêteur chez notre auteur, une méthode rigoureuse de recueil des témoignages, les paroles des écoutés restent vives, singulières, oserais-je dire : « à l’état brut » ?
La grande Histoire, on le sait, est presque toujours écrite à partir de la vie – au demeurant plus ou moins embellie – des puissants. Et quand on se rappelle que ce sont les peuples qui sont les vrais moteurs de l’Histoire, on reste encore tenté d’aller chercher des figures héroïques et considérées comme finalement « exceptionnelles ». On oublie trop souvent celles et ceux qui, pourtant, sont les premiers à constituer les peuples : celles et ceux que d’aucuns ont choisi d’appeler « les gens de peu ». Or ce sont eux, les pauvres, les sans grade, les sans argent, les sans pouvoir qui font fonctionner toutes les sociétés ! Ce sont eux les « invisibles » sur les épaules desquels repose tout, en réalité ! Aucune ville ne peut exister et fonctionner sans aide-maçons et sans personnes chargées de l’entretien des voiries. Aucune machine ne peut durer sans mécanicien. Aucun hôpital ne peut accomplir sa mission de soigner s’il n’y a pas des « aides-soignantes » pour accomplir les tâches les plus ingrates comme celle de changer les malades, et s’il n’y a pas des « techniciens de surface »
3. Ben Jelloun, Tahar, La plus haute des solitudes, Seuil, 1977.
4. Historien et professeur à l’EHESS. Voir son article : « Paria – Colonialisme, émigration et relations de pouvoir », Zaama, n° 33, 2006.
Comment tout cela s’est-il fait ?
« Je n’étais pas absent. Ma présence m’engageait dans l’intériorité des autres. Je ne sais pas jusqu’à quel niveau je m’y installais et, de ce fait, je ne sais plus qui observait qui. »
Je ne sais pas jusqu’à quel niveau je m’y installais et, de ce fait, je ne sais plus qui observait qui. »
Tahar Ben Jelloun3
Tahar Ben Jelloun3
« Pour comprendre le monde des émigrants/immigrants, il faut leur redonner la parole, restituer la cohérence et la complexité de leurs discours. »
Gérard Noiriel4
« Pour comprendre le monde des émigrants/ immigrants, il faut leur redonner la parole, restituer la cohérence et la complexité de leurs discours. »
Gérard Noiriel4
Comment tout cela s’est-il fait ?
« Je n’étais pas absent. Ma présence m’engageait dans l’intériorité des autres.
5. Association Service Social Familial Migrants.
6. Habitants de Vaulx-en-Velin.
7. Ce recueil a été publié par l’ASSFAM.
L’aventure a commencé au début de l’année 2000 lorsque Christophe Clerc, ex-délégué régional de l’ASSFAM5 , m’a confié un projet articulé autour de la question des mémoires migratoires. Celui-ci est né d’un constat (postulat ?) des travailleurs sociaux de la ville de Vaulx-en-Velin : les immigrés seraient peu enclins à raconter leurs histoires migratoires à leurs enfants. Pourquoi ce silence et comment faire pour les inciter à en sortir ? Pour tenter de répondre à ces questions, nous avons été à la rencontre de Vaudais6. Ce travail a donné lieu à la publication en 2004 d’un recueil que j’ai écrit sous le titre Paroles d’hommes à trois voix7. Il s’agissait à l’époque de laisser des traces de cette expérience en en tirant la « substantifique moelle ». Une partie des textes d’Éclats de silences en sont tirés. Ils ont été, je le précise d’emblée, réécrits et enrichis par d’autres textes.
Un petit retour en arrière s’impose pour comprendre comment tout cela s’est fait… Accompagné de Magali Gallizi, une travailleuse sociale, nous avons pris le parti d’aller sur le terrain, là où se trouvaient les hommes : foyers de travailleurs migrants, centres sociaux. La majorité d’entre eux était issue de pays anciennement colonisés (Algérie, Maroc), d’autres d’Arménie, du Calvados ou de l’Ain. Ils avaient soif de reconnaissance. « Rares sont ceux qui viennent vers nous, c’est comme si nous n’existions pas. » Ils nous ont fait confiance et ont accepté de lever le voile sur leurs histoires migratoires. Nous leur avons demandé par la suite de partager leurs récits avec des plus jeunes. Il suffisait de parler de soi. Mais comment parler de soi ? Ces hommes, très pudiques, n’y étaient pas habitués. Et si l’on prend ce risque, comment dire son histoire personnelle, si longtemps refoulée ? Au début, ce furent des : « Que veux-tu que je te raconte ? », « Il n’y a rien d’intéressant, ma vie est banale », ou encore : « C’est une simple histoire d’ouvrier ». Pour nous, les vies d’ouvriers n’étaient pas interchangeables. Nous avons dû nous montrer convaincants, et les langues se sont déliées. Ces hommes ont fini par accepter de lever le voile sur des souvenirs longtemps refoulés : la misère qui leur avait fait quitter leurs campagnes, la découverte de villes froides et inhospitalières, la dureté du monde du travail, la douleur de l’exil, l’habitat précaire. À cela s’ajoutait pour les Al-
gériens la culpabilité d’être partis pendant la guerre qui opposait leur pays à la France en laissant derrière eux leurs familles. Ces paroles ont fait écho à ce que j’avais moi-même vécu dans d’autres circonstances. J’ai quitté mon pays, l’Algérie, à l’âge de 45 ans, fuyant la « décennie noire8 ». J’ai moi aussi traversé les tourments et les deuils de l’exil, et cette même culpabilité d’avoir laissé derrière moi ma famille, mes proches et la tragédie qui dénaturait mon pays.
Après avoir recueilli et écrit les paroles de ces hommes, nous leur avons demandé de les partager lors de rencontres-débats avec d’autres personnes appartenant à la deuxième génération qui ont découvert avec émotion les histoires de leurs « aînés ». Ces lectures ont suscité un vif intérêt, libéré des questionnements, comme si les paroles écrites avaient permis de donner forme et sens à leurs demandes incertaines. Cinq d’entre eux ont témoigné. Ils revendiquaient leur double appartenance culturelle, mais souffraient du silence de leurs pères. Ils ont cherché à en savoir plus sur leur histoire familiale. D’écho en écho s’est alors formée une chaîne de paroles devenues références partagées, et peu à peu histoire commune.
D’autres textes sont venus enrichir mon livre. Ils ont été écrits à partir d’entretiens avec cinq habitants de la Guillotière entre 2004 et 2007. D’autres ont été glanés tout au long de ma carrière professionnelle9 auprès d’hommes vivant dans les foyers de travailleurs migrants (FTM) de l’agglomération lyonnaise loin de leurs familles restées au pays. On les a appelés « pères à distance10 ». Les témoignages tirés de ces séries d’entretiens sont apparemment disparates par la singularité des parcours de leurs auteurs : origine, âge, contextes historiques et géographiques des migrations. Ils ont pourtant des caractéristiques communes.
La première est l’origine sociale : la majorité des hommes sont issus de la paysannerie et ont émigré dans l’espoir d’échapper à la pauvreté. Mais sans formation, prolétarisés, ils ont occupé les postes de travail les plus pénibles et les moins qualifiés.
La deuxième est liée au fait qu’ils sont majoritairement analphabètes11 ou illettrés. Handicaps rédhibitoires
8. La « décennie noire » est le nom qui a été donné à la période qui a suivi l’interruption par l’armée algérienne des élections législatives qui allaient être remportées par les islamistes du FIS (Front islamique du Salut). Il s’en est suivi une période de dix années d’une « guerre civile » particulièrement meurtrière.
9. J’ai exercé entre 1994 et 2013 au sein de l’ALS (Association de lutte contre le sida) un travail de prévention des maladies sexuellement transmissibles en direction des résidents des foyers Sonacotra et Aralis. J’y ai rencontré des centaines d’hommes originaires en majorité du Maghreb.
10. « Devenir un “père à distance” parce que l’on part travailler en France en laissant ses enfants au pays : c’est le sort qu’ont connu des milliers de travailleurs immigrés depuis le début des années 1960 sans que la société française s’interroge sur leurs liens avec leurs familles. La lacune vient d’être comblée par une étude intitulée Le devenir des enfants d’immigrés demeurés au pays d’origine : regards croisés pères/ enfants et réalisée par Jacques Barou, chercheur au CNRS. » Le Monde, 27 juin 2001.
11. Ces hommes n’ont aucun accès à l’information écrite. Mis à part un très faible pourcentage de personnes qui ont appris à écrire et à lire l’arabe dans les écoles coraniques, l’écrasante majorité d’entre eux est analphabète (aussi bien en arabe qu’en français). Cela signifie que leur connaissance des messages oraux en français par le biais de la télévision et la radio est elle-même limitée.
12. Les souvenirs d’injustices et d’humiliations ont refait surface lorsque les témoins vivaient des situations de forte pression : exclusion, perte de travail, sentiment de discrimination. Le sociologue M. Wieviorka parle de « retour du refoulé chez les populations issues des anciennes colonies dans les moments de crises ». Voir son article : « On ne doit pas diaboliser les affirmations identitaires », Journal du sida, n° 83, 1996.
lorsqu’ils se confrontent à la « culture de papier » dominante. La moindre démarche administrative est un parcours du combattant. J’ai encore en mémoire cette phrase de Allal M. qui avait décidé à l’âge de 70 ans d’apprendre à lire et à écrire : « Je n’ai pas envie de mourir idiot et continuer à dépendre de l’assistance sociale. »
Le troisième point commun et sans doute le plus important est le silence qui a entouré leurs vies, auquel s’ajoute l’absence de reconnaissance symbolique sur leur participation au développement et à la construction du pays. Ils restent encore aujourd’hui invisibles et inaudibles dans l’espace public. Un sentiment d’effacement qu’exprime Mourad : « C’est comme si nous n’existions pas… Nous nous sentons abandonnés par ce pays auquel nous avons tant donné 12 . »
C’est sans doute toutes ces raisons qui m’ont motivé à redonner vie à toutes ces paroles écrites il y a quelques années. Je les ai relues avec un grand plaisir, altéré toutefois par un sentiment de frustration et d’insatisfaction lorsque je me suis rendu compte qu’elles n’avaient pas été suffisamment mises en valeur en dehors des contextes où elles avaient été dites. Elles montrent mieux que toute démonstration le mépris qu’ont dû affronter tous ces transplantés. Elles rendent palpable la réalité crue et complexe des problèmes auxquels ils ont dû, et doivent encore faire face, la difficulté de transmission, l’héritage douloureux que doit porter la seconde génération. Pour toutes ces raisons, elles méritaient d’être reprises, étoffées et enrichies pour être offertes à d’autres publics. Elles restent en effet, heureusement ou malheureusement, d’actualité. Rien n’a vraiment changé pour ces hommes. Ils restent toujours invisibles et inaudibles. Ils ne votent toujours pas pour la plupart d’entre eux, ne sont toujours pas invités aux colloques dont ils sont le sujet, ni sur les plateaux de radio ou de télévision, ne sont jamais consultés par les chantres politiques de l’intégration alors qu’ils ont tant à nous dire. Ainsi, Mohammed G., un philosophe qui s’ignore, a inspiré à lui seul onze des textes de mon livre. Cet homme cherche « les bonnes portes » pour faire entendre la voix des habitants de son quartier, donner son opinion sur les problèmes qui entravent leur vie quotidienne, mais aussi parler des grands
sujets de société : comment restaurer l’image écornée des pères face à la dérive de leurs enfants ? Comment lutter contre l’errance de certains jeunes sans repères identitaires, qui se nourrissent de rêves de vengeance contre la société qui a « stigmatisé » leurs parents ? Comment sauvegarder la mémoire de ses origines sans être pris dans le repli communautaire ? Comment s’intégrer dans la société française « sans s’y fondre comme le sucre dans l’eau » ? Comment se servir des leçons du passé pour éclairer le présent ? Comment digérer les « vertigineuses » mutations de la famille ? Comment vivre de manière apaisée sa religion en tant que musulman ? Comment lutter contre les amalgames dangereux entre islam et islamisme ? Comment « soigner » une école elle-même victime des fractures sociales ? Comment réinvestir la rue quand elle s’est transformée en « jungle » ? Ces questionnements13 nous concernent tous, ils n’ont rien perdu de leur sens, de leur acuité, parce que les causes qui les ont engendrés sont toujours présentes. Ils nous interpellent fortement à un moment où les crispations communautaires et la montée de la xénophobie qui s’exprime sans complexe menacent notre société et fragilisent notre démocratie. Ils appellent à des débats apaisés et des réponses justes et nuancées. Malheureusement, l’Histoire semble bégayer. En témoignent les monceaux de contre-vérités et de caricatures qui déferlent sur la plupart de nos médias aujourd’hui. À la Une, les émigrés. Journalistes, polémistes, dirigeants politiques, sociologues, électeurs, anthropologues, barmen, buveurs de bière, passionnés de foot et autres initiés… tous, là-dessus ont leur idée, des idées, débordent d’idées. Et Eux, les migrants, que disent-ils ? Grand silence qui, à bien l’écouter, se fait assourdissant ! C’est la raison pour laquelle il m’a semblé nécessaire de restituer de manière fidèle et respectueuse ces paroles singulières. Elles ont été recueillies, enregistrées, parfois traduites de l’arabe, validées et restituées à leurs auteurs, tout en préservant leur anonymat14. J’ai essayé de trouver le bon équilibre entre ces paroles et les références et citations « théoriques » extérieures à elles. Ma démarche était anthropologique, mais je me suis abstenu de toute analyse. J’ai privilégié la dimension essentielle de la parole vraie et brute, les
13. Il est intéressant de noter que ces questionnements rejoignent parfois ceux des chercheurs dont les citations émaillent nos écrits.
14. Les noms et prénoms utilisés au fil des textes ont été pour partie anonymisés, en accord avec les personnes rencontrées.
intonations parlées, les proverbes, la couleur « orale ». Nulle trace de jugement ni d’idéalisation dans ces écrits, pas de langue de bois ni de politiquement correct, pas de victimisation non plus. Les paroles disent ce que l’on a à entendre. Elles se suffisent à elles-mêmes.
Partir
Smaïn Laacher 15
« Nous ne sommes pas partis de notre gré pour librement choisir une autre terre ; Nous n’avons pas quitté notre pays pour vivre ailleurs, toujours. »
Bertolt Brecht 16
« Partir, c’est s’absenter, et cette absence est l’événement le moins naturel du monde. C’est la première épreuve. »
17. Petite coiffe rouge traditionnelle, portée par les Tunisiens.
18. Célèbre chanteur algérien de musique « chaâbi » rendu célèbre dans le monde entier grâce à Ya rayeh, sa plus célèbre chanson, traduite dans de nombreuses langues.
19. Amar a perdu l’usage de ses jambes lors d’un accident de voiture.
Le pays de Pierre Loti
Foyer La Pie. Nous projetons ce soir-là le film de Yamina Benguigui Mémoires d’immigrés. La cafétéria est bondée. Tous les vieux résidents sont là, mais aussi certains plus jeunes. Un personnage du film raconte sa traversée. L’homme qui s’exprime est élégant, costume gris clair, cravate sombre. Grâce à sa ténacité, cet ouvrier autodidacte, aujourd’hui à la retraite, a gravi les échelons dans son entreprise. Son français est parfait. Il raconte avec l’accent chantant des Tunisiens et en roulant les « r » sa première traversée : « À 17 ans, j’ai quitté les ruelles ensoleillées de Tunis. Je réalisais mon rêve : découvrir le pays de Pierre Loti. » Quarante ans après, il n’a rien oublié de cette nuit-là, sur le pont du bateau qui le menait vers Marseille : « J’ai jeté par-dessus bord mon tarbouche17 et les boulettes de viande conservées dans l’huile d’olive que m’avait préparées ma mère. » Le souvenir de son geste le rattrape, sa voix se casse, le sanglot qui l’étreint l’empêche de poursuivre et se perd dans Ya rayeh, le chant déchirant de l’exilé, de Dahmane el Harrachi18 .
L’émotion est palpable dans la cafétéria. Amar, un des plus anciens résidents du foyer assis près de moi, suffoque sur son fauteuil roulant19. Il ne peut supporter d’en entendre plus. Magali et moi le sortons de la salle. Il transpire à grosses gouttes malgré la fraîcheur de cette soirée d’automne. La voix altérée, il nous signifie qu’il ne désire pas continuer à voir le film et demande à être ramené dans sa chambre.
Que s’est-il passé ce soir-là pour Amar ? Pourquoi le témoignage de cet ouvrier tunisien l’a-t-il autant bouleversé ? Quelque temps après, j’ai la réponse en relisant le récit qu’il m’avait fait de sa propre traversée. « J’avais dix-huit ans. J’étais heureux de partir avec mes copains. Je n’avais pas de peine, au contraire ! On allait avoir du travail en France. Je rêvais de découvrir ce pays où tout
le monde roulait en voiture et portait costume. » Seule ombre au tableau, un souvenir perturbant resurgit à ce moment de son récit. Après une longue pause, il poursuit, le visage grave, la gorge nouée. « Ma mère, elle, était très triste… Elle ne voulait pas que je la quitte, que je ne revienne plus… Elle avait peur que la France m’ensorcelle et rêvait de me voir poursuivre mes études et rester auprès d’elle. Mais moi, je ne pensais qu’à partir et rien ne pouvait me retenir ! » En écoutant Amar, je me suis souvenu de cette citation d’un ouvrier rapportée par Abdelmalek Sayad20 : « C’est ainsi que la France nous pénètre tous jusqu’aux os. Une fois que tu t’es mis cela dans la tête, c’est fini, cela ne sort plus de ton esprit ; finis pour toi les travaux, finie l’envie de faire quelque chose d’autre, on ne voit plus d’autre solution que partir. »
La dolma de sardines
12, rue de la Ferme. Le soleil de ce matin d’automne éclaire l’immeuble gris et froid où se trouve le local de l’ASSFAM. Amrane m’y attend en présence de Laura auprès de laquelle il vient « perfectionner son français ». Il est accompagné de ses deux filles qui, les yeux émerveillés, l’entendent parler pour la première fois de son enfance.
Tout en rondeur, l’homme a gardé, à plus de 50 ans, une allure juvénile. Très en verve, il déclare d’emblée : « Je n’aime pas le temps d’ici. Le soleil d’Algérie me manque. L’Algérie me manque… » Son visage souriant s’assombrit lorsqu’il raconte sa première traversée de la Méditerranée à bord du Kairouan (ce même bateau que j’avais pris pour venir en colonie de vacances en France) : « J’avais huit ans. Mon père m’a pris avec lui à Lyon pour soigner ma tuberculose. Une longue année de traitement et de convalescence m’a privé d’école. Après ma guérison, nous ne sommes pas revenus au pays. Ma famille s’est installée dans les bidonvilles de Bonnevay avant d’être logée dans des habitations en dur… Des années de misère. Il y avait une seule pompe d’eau pour toute la communauté. De la boue partout. Et des rats ! C’était dégueulasse ! À ce moment-là, il n’y avait que des Arabes. C’était l’époque de la guerre d’Algérie. Il y avait sans arrêt les CRS qui passaient pour contrôler ceux qui se trouvaient là. »
Le voile de tristesse disparaît lorsqu’il évoque son enfance à Mostaganem, ce port de l’Ouest algérien où il est né, ses retours avec la famille dans la maison que son père avait construite pour eux, près de la mer, une « maison blanchie à la chaux et aux fenêtres bleues », dont les volets ne s’ouvraient qu’à l’occasion de vacances de plus en plus rares.
Amrane n’est plus revenu au pays depuis de nombreuses années. Ses rêves de retour se sont peu à peu
éloignés. Reste sa sourde nostalgie d’une terre promise où il ne vivra jamais. Son visage s’illumine lorsqu’il parle de « là-bas », de ses escapades avec les copains sur les plages dorées de la « Salamandre21 » et de la mer, son odeur forte de sel, d’iode et d’embruns. « Ces sensations sont inscrites dans ma mémoire, comme les parfums de la cuisine de ma mère… La cuisine c’est important. Elle t’accompagne tout au long de ta vie… C’est ce qui reste quand les autres souvenirs s’effacent… » Amrane adore la dolma de sardines22 de sa mère et la cuisine de l’Ouest algérien, mais il rechigne à vivre d’autres aventures culinaires. « Par exemple, un Chinois et un Arabe, ce n’est pas la même chose. Ce n’est pas la même façon de manger, de penser. » J’ai tenté de le convaincre que les individus, comme la cuisine, les arômes et la musique voyagent, se mélangent, se marient parfois… Sans succès. J’ai alors conclu en riant : « On dit qu’il est plus facile de changer de religion que de cuisine. » En nous quittant, nous étions pourtant d’accord sur une chose : cette déambulation culinaire nous avait donné faim…
21. Plage de sable, proche de la ville portuaire de Mostaganem, à l’ouest de l’Algérie.
22. Plat à base de tomates, courgettes et patates farcies de hachis de sardines et de persil sur fond de sauce rouge.
Nous sommes tous des immigrés
Michel A. est toujours là. Il surgit chaque fois que nous arrivons, Magali et moi, au foyer La Pie. Silhouette fragile, tassée dans des vêtements trop grands. Un visage cabossé par la vie, une tignasse rebelle sous une casquette à carreaux qu’il arbore en toutes circonstances et qui lui donne une allure de poulbot au sourire triste.
Michel a le temps, beaucoup de temps, entre sa chambre et le bureau de Khadidja, la directrice du foyer. Il la suit comme son ombre. Le foyer est devenu sa véritable résidence. Comme s’il y avait toujours vécu, comme s’il y était né.
Michel est peu loquace, mais, encouragé par Amar, présent lors de notre entretien, il se livre peu à peu. Il a quitté sa Normandie natale pour trouver du travail. « Je me considère comme un émigré à Lyon depuis 1969, comme Amar… Comme ceux qui viennent de Nantes, de Strasbourg et d’ailleurs. » Il a encore des oncles, des tantes, dans la région du Calvados, non loin de Caen. Ses souvenirs du « pays » ? « La mer, la tempête, la grisaille… Pas de boulot, à part l’agriculture et la taille du granit. » Amar, péremptoire, confirme en ajoutant, comme pour décourager toute contestation : « Je le sais, j’ai une cousine qui y vit. »
La mère de Michel était couturière, mais, pour faire vivre sa famille après son divorce, elle a été obligée de faire des ménages. Il a très peu de liens avec son père.
« Je l’ai vu plusieurs fois, mais je ne le connais pas ». Il a aussi un frère qui vit en Normandie. « On se téléphone et puis c’est tout… »
Michel a tout fait, « usines, dynamo, nettoyage, manutention ». Il a travaillé pour Messidor, « une boîte d’insertion pour aider les gens à retrouver du travail ». Et puis, il y a eu ce jour où une voiture l’a renversé et où sa vie a basculé : « Tibia et col du fémur cassés… Une
longue hospitalisation suivie de plus d’une année de rééducation. […] Mon patron en a profité ; il s’est dit : celui-là c’est l’occasion de le balancer. […] À mon retour de la maison de repos, j’ai été licencié. Après, j’ai été au chômage pendant 4 ou 5 ans. Et puis voilà, maintenant je suis à la retraite forcée, mais ce n’est pas gros : 4 000 francs. »
Michel a lui aussi été marié. Il vit au foyer La Pie depuis qu’il est divorcé. Sa fille habite à Lyon avec son mari et son petit garçon, Cours Gambetta. « Elle n’aime pas venir me voir au foyer, comme si elle en avait honte… » Alors, c’est lui qui va la voir. Rarement. Peur de sortir. Peur de « se faire agresser par tous ces voyous qu’on croise dans la rue ».
Michel cherche un appartement en ville pour se rapprocher de sa fille et de son petit-fils. Avec l’aide d’une assistante sociale, il a déposé plusieurs dossiers de demande d’un logement social. Cela fera bientôt huit ans qu’il attend une réponse…
Je me suis performé tout seul
Jacques C., retraité, vit dans la résidence pour personnes âgées Benoît-Frachon. Ses manières un peu brusques et son visage rubicond rappellent son origine paysanne. Sous sa veste ample, on peut deviner un corps râblé, de forte carrure. Ses mains aux doigts noueux témoignent d’un passé de durs travaux. L’homme semble sorti tout droit d’un roman de Giono. Il est né en 1934 dans un « lieu-dit », non loin de Montluel dans le département de l’Ain. Il habite Vaulx-en-Velin depuis 34 ans. Il a 8 enfants et 14 petits-enfants. Il n’a jamais été à l’école. « Je me suis performé comme ça, tout seul », nous dit-il. Son enfance à la campagne a été une suite de malheurs et de traitements humiliants. « Mon père, vu que je n’ai pas connu ma mère, décédée lorsque j’avais 2 ans, m’a placé dans des fermes à l’âge de 7 ans. Quand ma mère est morte, il s’est mis à boire. Il est devenu violent… Il n’arrêtait pas de me taper dessus. Il a fini par se rendre compte qu’il ne pouvait plus me garder… Alors, il m’a envoyé dans la ferme chez mon oncle qui, lui aussi, me tapait dessus. »
Jacques a « trimé » toute son enfance de ferme en ferme. « J’étais berger… une vie de bête de somme. Peu de repos, jamais de vacances… Ils ne regardaient pas l’âge, les patrons, à cette époque-là. » Adolescent, pour se faire de « l’argent de poche », il participait en été aux « battages, derrière les grosses moissonneuses-batteuses, et ensuite, il fallait enchaîner avec les semences. C’est sans fin… Il faut toujours tout recommencer… Pas de répit…
Le travail de la terre ne s’arrête jamais… »
Jacques a quitté « son pays » au sortir de l’adolescence pour s’installer à Lyon en 1957. Changement de décor. Il rentre à l’usine Berliet de Vénissieux au montage des pneus ; il en sort en 1995, au moment de la retraite. « Ouvrier de base » à l’usine Berliet, il a longtemps
occupé des emplois subalternes. « Moi, j’étais à la ligne montage-pneus. Un boulot crevant… Il fallait être costaud pour faire ce travail. […] Il fallait ravitailler cinq lignes de montage. Ça fait beaucoup de roues à monter. » Son histoire d’« émigré de l’intérieur » rappelle celle de ceux qui viennent de l’autre rive de la Méditerranée. Paysan déraciné, il est devenu ouvrier et citadin, plus par nécessité que par choix. Il a accédé à un relatif confort en fin de carrière, mais son cœur est resté fidèle à sa campagne natale. Il en parle volontiers à ses huit enfants et à ses quatorze petits-enfants. Malgré les blessures profondes de son enfance, il a gardé la nostalgie de sa « vie d’avant ». « Accompagné des deux chiens qui m’aidaient à guider les troupeaux, je pouvais m’isoler. […] Je crois que j’étais heureux à ces moments-là. Je me sentais à la fois seul et libre, comme si la nature me protégeait et m’éloignait de la méchanceté des adultes. » Il conserve pieusement le souvenir des « verts pâturages » qu’il a parcourus tout au long de sa vie d’enfant et d’adolescent. « J’ai encore dans la tête l’odeur de la terre humide et des hautes herbes dans lesquelles j’aimais me coucher. […] J’entends encore le tintement des clochettes accrochées aux cous des vaches et le son de la corne qui me servait à appeler les autres bergers à travers les grandes prairies pour rassembler le troupeau de vaches avant de le ramener à la ferme. »
L’Ambassadeur
C’est dans son logement social de Vaulx-en-Velin qu’ont eu lieu mes premiers entretiens avec Mohammed G. Peau brun foncé, corps aux muscles fins et secs caractéristiques des montagnards berbères du Rif. Droit comme un « i », l’homme n’a pas un gramme de graisse. Son port altier, son visage allongé aux traits fins, son teint olivâtre, ses yeux noirs et vifs, légèrement bridés, et son bouc bien taillé lui donnent une allure à la fois austère et sage.
Né à Agouraï, une petite ville au sud de Meknès, au pied de l’Atlas, Mohammed a émigré en France à l’âge de vingt-deux ans. Ses camarades d’enfance l’appelaient le « le Parisien » parce qu’il parlait le français en grasseyant. La mort dans l’âme, il a dû renoncer au lycée après avoir brillamment obtenu son brevet. « On avait un peu de terre, mais insuffisamment pour vivre. Dès l’âge de neuf ans, j’ai gardé les moutons et aidé mon père au moment des labours. Je travaillais pendant mes vacances d’été. J’achetais des légumes le matin, je les mettais sur l’âne avec ma petite balance, et j’allais les revendre sur le marché le plus proche. Au douar où je vivais, il n’y avait rien. Le lycée de Meknès était à 20 kilomètres environ. Pour y aller, je partais tôt. Ma mère me préparait mon déjeuner pour midi. J’ai essayé pendant une année de faire ça à bicyclette, mais c’était dur… Par la suite, on m’a placé chez des amis de mes parents à Meknès, mais ces gens étaient eux-mêmes modestes. Il fallait participer matériellement, mais c’est devenu progressivement intenable. Par exemple, en quatrième, il fallait choisir entre acheter des livres ou s’habiller, et puis il fallait aider ma famille. Alors, j’ai dû renoncer à continuer mes études. Un grand malheur ! » En l’écoutant, je repensais à mes camarades de classe du village qui, pour les mêmes raisons, n’avaient jamais connu le lycée malgré leurs bons résultats scolaires.
À son arrivée à Lyon, Mohammed a épousé une femme originaire du Maroc. « J’ai eu trois garçons avec elle. Comme moi, ils parlent l’arabe, le berbère et le français. Leur maman n’avait connu que l’école coranique et, pour ne pas la mettre dans l’embarras, les enfants, quand ils étaient petits, ne lui parlaient qu’en arabe. »
Mohammed a commencé sa carrière comme ripeur23 avant de devenir ouvrier à la chaîne puis technicien chez Alstom. « Je me suis formé et j’ai terminé ma carrière dans un service d’achat dans cette entreprise jusqu’au jour où un diabète sévère m’a contraint à prendre une retraite anticipée. Je vis aujourd’hui très modestement de ma petite pension d’invalidité. »
Dans « son » café du vieux Vaulx-en-Velin, ses amis de toutes nationalités l’appellent « l’Ambassadeur ». Mohammed est un philosophe qui s’ignore. J’aime parler avec lui. Nous ne sommes pas d’accord sur tout, mais ses questionnements et ses réflexions me stimulent. Il est devenu mon ami. Je lui ai un jour offert un ordinateur et il s’est emparé de l’outil avec une impressionnante boulimie. Il est capable de monter et démonter la machine avec une extraordinaire aisance, d’en changer les pièces et de la « booster », comme il dit. C’est à lui que j’ai recours quand mon ordinateur me fait des misères. Il vit toujours à Vaulx-en-Velin. Après un long combat, il a réussi à guérir d’un cancer de la gorge, mais il en a gardé des séquelles et il a des difficultés à parler. Nous ne nous sommes pas beaucoup vus ces dernières années, mais il est toujours présent dans mon esprit.
23. Le ripeur est chargé de la collecte des déchets sur la voie publique, et de leur transport jusqu’à un centre de tri, d’enfouissement, d’incinération ou de compactage.
25. « Le 8 mai 1945, tandis que la France fêtait la victoire, son armée massacrait des milliers d’Algériens à Sétif et à Guelma. Ce traumatisme radicalisera irréversiblement le mouvement national. » Harbi, Mohammed, Le Monde diplomatique, mai 2005.
26. Mot arabe signifiant étang.
Le désert bleu
Farid G. se présente fièrement comme descendant de montagnards chaouis24 connus pour leur irrédentisme lors de la colonisation française. « Je suis originaire de Khenchela, une ville nichée dans les monts des Aurès qui garde le souvenir brûlant des représailles sanglantes des populations par l’armée française, le 8 mai 194525 . »
Grand, le teint clair, des yeux bleus sous des sourcils couleur poivre et sel, de fières bacchantes et une voix de stentor. Farid est un séducteur. Il taquine Magali : « Jeune, j’aurais voulu me marier avec une belle jeune fille comme toi, mais, aujourd’hui, je n’ai plus l’âge. » Réaliste, il ajoute en riant : « Tu ne veux pas épouser mon fils ? » Son style se fait fleuri lorsqu’il me raconte en arabe émaillé de rares mots en français les souvenirs lumineux de son enfance : « J’ai suivi les hommes de mon clan derrière les troupeaux de chèvres, j’ai moissonné, parcouru les paysages sauvages entre cactus, figuiers de barbarie et oliviers centenaires. Je me suis baigné dans les gueltas26 qui jalonnaient les oueds bordés de lauriers roses qui couraient le long des gorges profondes avant de rejoindre l’oasis de Biskra, enserrée dans son écrin de palmiers et de se perdre dans la mer de sable… C’est dans ces gueltas, avec mes copains d’enfance, que j’ai pêché mes premiers poissons. Nous les faisions griller et les mangions sur place. »
Farid a 17 ans quand il part en France pour gagner sa vie : « Je voulais fuir le pays, hors de question pour moi de faire le service militaire alors que mon frère, instituteur, venait d’être exécuté par l’armée française. Sur les papiers il est écrit que je suis né en 1942 alors que je suis né en 1939. C’est comme ça que j’ai évité l’armée française. »
Farid n’a pas oublié sa première traversée. Parti du port de Skikda, à l’est de l’Algérie, il découvre, ébloui,
Édition
Libel, Lyon
www.editions-libel.fr
Conception graphique
Cecilia Gérard
Impression
Corlet
Dépôt légal : mai 2023
ISBN : 978-2-491924-36-2
En couverture : Poème d’Omar Hallouche
Du même auteur : De Sebdou à la Croix-Rousse : Un paysan contrarié, L’Harmattan, 2021.
Paroles d'immigrés
« Éclats de silences » revisite des textes écrits il y a vingt ans à partir d’entretiens réalisés auprès d’hommes immigrés, autour de leurs mémoires migratoires. Originaires de pays anciennement colonisés, d’Arménie, d’Espagne ainsi que des campagnes françaises, ils vivaient à Vaulx-en-Velin, dans le quartier de la Guillotière, mais aussi dans les foyers de travailleurs migrants de l’agglomération lyonnaise. Difficulté de la transmission, héritage douloureux que doit porter la seconde génération… Aujourd’hui encore, leurs paroles résonnent et rendent palpable la réalité crue et complexe des problèmes auxquels ces transplantés ont dû, et doivent encore faire face. Ces témoignages précieux, toujours d’actualité, n’ont rien perdu de leur force émotionnelle et de leur pertinence.
Algérien d’origine, Omar Hallouche habite depuis 1992 à Lyon. Anthropologue, formateur, médiateur-santé, il met son entredeux culturel et linguistique au service d’hommes qui vivent depuis des décennies loin de leurs familles dans les FTM (Foyers de Travailleurs Migrants). Il est l’auteur d’un récit autobiographique intitulé De Sebdou à la Croix-Rousse : un paysan contrarié paru en 2021.
20,00 €
ISBN 978-2-491924-36-2
Dépôt légal : mai 2023
www.editions-libel.fr