VIE QUOTIDIENNE
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p. 82 Écoutez, bougez, apprenez ! p. 86 Acquérez l’œil de l’expert ! p. 90 La mélatonine aide-t-elle vraiment à s’endormir ?
Psychorigide... ou neuroflexible ? Par Anna von Hopffgarten, biologiste et cheffe de la section neurosciences de la revue Gehirn & Geist.
La routine et les habitudes nous font économiser de l’énergie cérébrale. Mais il faut parfois reconfigurer nos réseaux de neurones pour faire face aux changements. Comment s’y prendre ?
EN BREF
£ Le cerveau humain dispose de zones spécifiques permettant de s’adapter à une multitude de contextes. £ Attention : la flexibilité a aussi des désavantages car elle disperse l’attention et rend moins efficace dans les tâches où il faut être focalisé. £ La clé : savoir basculer d’un mode rigide à un mode flexible au bon moment. Une sorte de « superflexibilité ». £ Sport et pratique des langues sont de très bons exercices pour cela.
N° 142 - Avril 2022
« J’ai été surprise de voir à quel point la plupart d’entre nous y sont parvenus, explique Gesine Dreisbach, de l’université de Regensburg, en Allemagne. Notamment, nous avons rapidement intériorisé le fait de ne plus se serrer la main, d’éviter les embrassades. » La psychologue étudie avec son équipe les facteurs qui influencent la flexibilité cognitive des personnes. RECÂBLAGE NEURONAL Mais qu’est-ce que cela signifie réellement d’être « mentalement flexible » ? Selon les chercheurs en sciences cognitives, cet attribut s’applique aux personnes capables de modifier rapidement leur comportement et leurs schémas de pensée lorsque les circonstances extérieures l’exigent. Des études montrent qu’elles sont en moyenne plus performantes dans leur travail et qu’elles obtiennent de meilleurs résultats académiques que les personnes à l’esprit plus rigide. Alors, qu’est-ce qui fait que l’on est psychorigide ou neuroflexible ? Les psychologues considèrent que la flexibilité cognitive fait partie d’un ensemble de capacités cognitives qu’on appelle les « fonctions exécutives ».
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U
n Européen continental qui descend du car-ferry à Hull, dans l’est de l’Angleterre, doit faire preuve d’une bonne dose de flexibilité mentale. Dès la sortie du port, il va devoir s’engouffrer dans un énorme rond-point à plusieurs voies qui brasse une gigantesque masse de voitures – le tout en roulant à gauche, bien sûr ! Il faut réagir à la vitesse de l’éclair : où se placer ? Dans quelle direction regarder ? Comment sortir de ce tourbillon ? Inutile de dire que si vous avez toujours roulé sur le côté droit de la route, une telle situation est un cauchemar. Mais de courte durée. Dès le deuxième ou troisième rond-point, la tension diminue généralement, et une certaine routine s’installe. Notre cerveau est plus adaptable qu’on ne le pense. Le passage de la circulation à droite à la circulation à gauche (et inversement, bien sûr) en est une très bonne illustration. De la même façon, nous parvenons également à adapter notre comportement à des conditions changeantes dans d’innombrables autres situations. La crise du Covid-19 en est un exemple. Nous avons dû à maintes reprises revoir nos actions et nos opinions en tenant compte de nouvelles données.