Urbanne Nantes #27

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LONGÉE AU CŒUR

du fait divers

Anaïs Denet a couvert l’« affaire Troadec » pour RMC et BFM. C’était le premier fait divers de la jeune journaliste tout juste arrivée dans l’Ouest. De cette expérience éreintante et hors du commun, elle a tiré un livre. Rencontre. C’était sa première affaire. Son premier « fait div’ ». La famille Troadec a disparu. Police et journalistes cherchent pendant des jours avant que la vérité n’éclate : ils ont tous été tués la même nuit dans leur pavillon d’Orvault. L’auteur présumé, Hubert Caouissin, un membre de la famille, a ensuite ramené les corps dans sa ferme du bout du Finistère pour les faire disparaître. Pendant chaque minute de cette enquête, Anaïs Denet a arpenté le terrain. « Je me suis mise à fond dans l’affaire sans protéger ma vie privée. Je me levais la nuit parce que j’étais persuadée d’avoir trouvé une piste. J’ai été happée. » Happée, au point de ne plus donner de nouvelles à son compagnon, de passer quinze jours de suite à Brest. Happée et sous pression. L’affaire est énorme, avec un retentissement national. Il faut être dans le tempo, nourrir ses deux rédactions. « Dans cette affaire, il y a un élément nouveau chaque jour : la voiture retrouvée, les affaires disséminées... J’étais sur le terrain, je suivais le rythme. » Mais le fait divers, c’est une spécialité du journalisme. Ça ne s’improvise pas. On fait appel, quand éclate une affaire de ce type, aux connaissances, au réseau, aux relations qu’on a tissées dans le temps, au fil des années.

« C’est tellement difficile d’aller frapper à la porte des gens qui souffrent » « Je n’avais pas de contact avec les flics ou les avocats. La seule chose que je pouvais faire, c’était d’aller frapper aux portes des témoins, de la famille. » Elle arrive à entrer en contact avec la famille du tueur présumé, Hubert Caouissin. « Je vais voir sa mère en mode ambitieuse, comme si j’étais détachée de l’humaine. Mais c’est tellement difficile d’aller frapper à la porte des gens qui souffrent. Il y a ce quart d’heure dans la voiture où tu mobilises ta volonté pour avoir la force d’y aller. Ça fait réfléchir. » Elle se frotte au monde assez masculin des correspondants des grands médias qui suivent eux aussi l’affaire. Elle fait sa place en étant là, à chaque tournant. C’est là que se dispensent 54

des cours qu’on ne donne pas à l’école. « Une journaliste du JDD m’a un jour sorti une phrase qui est restée gravée : « Un bon « fait diversier », c’est celui qui accepte de regarder le monstre qui est en lui. » Je me suis dit que cette affaire ne me laisserait pas indemne, quoi qu’il arrive. »

«Tu es humaine, en fait» Dans son livre, Anaïs Denet ne cache rien, même pas ce qu’elle appelle ses « dépassements de ligne ». Ces deux fois où elle transgresse la déontologie pour essayer d’avoir des infos. Elle se fait par exemple passer pour une cousine pour rencontrer une copine de Charlotte, la fille de la famille Troadec. « C’est comme ça que je me suis présentée dans son lycée. Je me suis fait griller tout de suite : elle n’a pas de cousine. Je me sens dégueulasse de ce que j’ai fait. » C’est toute cette histoire qu’elle raconte, toute cette enquête où elle montre, comme elle le dit, son « imperfection » et son « amateurisme ». « J’ai appris plein de choses. C’est pour ça que cette histoire, je ne pouvais la raconter que comme ça. » Depuis que le livre est sorti, elle rencontre des lecteurs, des gens qui savent maintenant ce qui se passe dans la tête d’un être humain qui doit raconter un drame horrible. « Je suis journaliste pour BFM, ça peut faire peur ou fantasmer. Certaines personnes m’ont même dit : « On te comprend, tu es humaine, en fait » ». 

« Troadec et moi » Anaïs Denet Éditions Denoël


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