Quelles transformations pour les industries culturelles et créatives au Maroc?

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Quelles transformations pour les industries culturelles et créatives au Maroc ?

Étude de terrain Janvier 2022

Les entrevues menées montrent que l’entrepreneuriat créatif et culturel au Maroc est souvent un entrepreneuriat par nécessité, qui se caractérise aussi par la volonté de promouvoir les savoirs, les savoir-faire et le riche patrimoine culturel marocain.

III. Analyse transversale des dynamiques

dynamique naissante reste à accompagner afin de permettre à ces structures une autonomisation financière et un « passage à l’échelle » (scalability).

• Un écosystème mixte Les opérateurs privés marocains du secteur culturel ne disposent pas d’un statut légal particulier. Pour pouvoir travailler, ils peuvent se constituer : (i) en association ; (ii) en coopérative ; (iii) en auto-entrepreneur ; (iv) en société à responsabilité limitée (SARL) ou en société anonyme (SA) ; auxquelles s’applique la fiscalité prévue pour les autres entreprises. Sont exonérés de TVA seulement les autoentrepreneurs pour les cinq premières années d’activité, les coopératives et les prestations non commerciales fournies par les associations reconnues d’utilité publique, avec l’application d’un taux réduit de 10 % aux œuvres et objets d’arts depuis 2015.

Associations

A ce jour, le secteur culturel marocain évolue avec une grande prévalence des statuts associatifs à but non lucratif. En 2015, le Maroc comptait 130 000 associations elles étaient 30 000 en 2002 — dont 9 040 (7%)8 à vocation culturelle et artistique. La notion de non lucratif ne signifie pas que ces structures n’apportent pas de contribution à l’économie. En plus de représenter un potentiel important en termes d’emploi, les associations sont soumises à des règles fiscales strictes. En vertu de l’article 2-I-3° du Code Général des Impôts (CGI), les associations sont considérées comme des personnes morales assimilables aux sociétés. Elles sont certes exonérées de l’Impôt sur les Sociétés (Art. 6-I-A-1° du CGI) mais cette exonération : « ne s’applique pas en ce qui concerne les établissements de ventes ou de services appartenant aux associations et organismes précités ». En matière de TVA, les associations sont fiscalement traitées comme des consommateurs finaux. Et si elles procèdent à des opérations taxables relevant du champ d’application de cette taxe (article 89 du CGI), elles deviennent légalement redevables comme n’importe quelle autre entreprise9. Le travail des associations marocaines est organisé par le Dahir n° 1-58-37610 réglementant le droit d’association. Au cours de la dernière décennie, le monde associatif marocain a investi le secteur de la culture en exerçant un rôle moteur dans le développement et la valorisation des expressions artistiques, du patrimoine et du fourmillement culturel du pays. Un nombre croissant d’associations recherchent de nouveaux modèles économiques afin de réduire leur dépendance aux subventions et de diversifier leurs revenus. Cette 32 ‫ ص‬.2016 ،2015 ‫ التقرير السنوي األول للرشاكة بني الدولة والجمعيات برسم سنة‬،‫ الوزارة املنتدبة لدى رئيس الحكومة املكلفة بالعالقات مع الربملان واملجتمع املدين‬.Cf .8 9. M. Amine, “La fiscalité des associations, entre le brouillard juridique et la fausse tolérance” publié dans le magazine Challenge (2014). 10. Dahir du 15 novembre 1958 (3 joumada I 1378) relatif aux rassemblements publics (publié au B.O. du 27 novembre 1958)

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Auto-entrepreneurs

Le statut d’auto-entrepreneur, institué par la loi du 19 mars 2015, est accessible à toute personne physique exerçant à titre individuel une activité industrielle, commerciale ou artisanale, ou prestataires de services, dont le chiffre d’affaires annuel encaissé ne dépasse pas 500 000 dhs pour les activités industrielles, commerciales et artisanales et 200 000 dirhams pour les prestations de services. Entre 2015 et 2019, 118.496 personnes ont adopté ce statut (tous secteurs confondus) et 2.878 auto-entrepreneurs ont bénéficié d’un accompagnement. Les chiffres de la ventilation sectorielle ne sont pas disponibles. Toutefois et d’après la collecte de données empirique, de nombreux entrepreneurs culturels, artistes, créateurs, et porteurs de projets individuels ont recours à ce statut en raison de son accessibilité et de ses avantages administratifs et fiscaux.

TPE-PME

La majorité des entreprises actives dans les filières culturelles et créatives sont de petite taille et produisent principalement une valeur immatérielle. La fracture entre les très petits opérateurs et les grandes PME, parfois filiales de grands groupes industriels internationaux (Hachette dans l’édition, Mégarama dans le cinéma, FNAC et Virgin dans la distribution, etc), génère une iniquité d’accès au marché et au financement. Afin de lutter contre le sous-emploi, le gouvernement marocain s’est fixé l’objectif de faire avancer les réformes de sa politique économique dans une optique de croissance inclusive et de création d’emplois. Les très petites, petites et moyennes entreprises (TPE-PME)11 jouent un rôle essentiel à ce propos. Elles constituent 93% de l’ensemble des entreprises au Maroc (dont 2/3 de TPE et ⅓ de PME) et jouent un rôle important dans la création de l’emploi12. Pour le moment, les grands réseaux de l’entrepreneuriat au Maroc (institutionnels ou privés) accompagnent très peu les entrepreneurs du secteur culturel. Leurs cibles sont des porteurs de projets évoluant dans des univers d’activité économique peu soumis à une «logique d’hybridation des ressources» et à une «logique de l’offre» (Emin, Schieb-Bienfait et Sammut, 2021).

11. Les très petites et moyennes entreprises (TPME) sont celles dont le chiffre d’affaires est inférieur à 75 millions de DH et des effectifs inférieurs à 200 employés. Les très petites entreprises (TPE) sont définies comme étant les unités ayant un CA de moins de 3 MDH et un effectif inférieur à 10 employés. Résultats de l’enquête nationale menée par le HCP auprès des entreprises en 2019. 12. Examen national volontaire sur la mise en œuvre des Objectifs de Développement Durable, 2020.

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A5 Glossaire

16min
pages 191-199

A4 Bibliographie

6min
pages 187-190

A3 Liste des acronymes

2min
pages 185-186

1. Présentation des grands axes

3min
pages 151-153

5. Internationalisation

2min
pages 149-150

1. Transverses

15min
pages 155-166

3. Transverses

5min
pages 170-172

4. Numérisation des contenus, des contenants et des marchés

13min
pages 142-148

3. Professionnalisation des acteurs et employabilité

6min
pages 138-141

2. Entrepreneuriat culturel et employabilité

10min
pages 133-137

et des acteurs

9min
pages 129-132

1. Musiques actuelles

41min
pages 68-91

3. Orientations des stratégies de coopération internationale

9min
pages 61-67

2. Arts de la scène

21min
pages 92-103

3. Livre & édition

21min
pages 104-113

2.3. Cadres budgétaire, législatif et fi scal

22min
pages 41-53

2.2. Défi nitions de concepts et contextualisations

11min
pages 34-40

2.4. Gouvernance nationale et territoriale

12min
pages 54-60

Finalités et approche

6min
pages 17-21
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