GREEN
Texte Neșem Ertan
POUR LA FINANCE Nous sommes en 2021. Cinq années ont passé depuis la signature de l’Accord de Paris et pas un jour ne passe sans que l’on ne parle de climat ou d'empreinte carbone. L’économie, la finance et l’écologie semblent se combattre tels des Titans dans nos esprits, dans nos journaux, dans nos fils twitter... et sur nos consciences. Mais ne peuvent-ils pas apprendre à devenir amis ? C’est ce que je vous propose d’explorer en nous intéressant dans ce numéro à la Green Finance. Son but ? Rediriger les investissements effectués dans les énergies fossiles vers des projets de développement d’énergies renouvelables et d’infrastructures écoresponsables.
Positionné en 2020 en 17e place dans le Global Financial Centres Index, sur un total de 114 pays, le Luxembourg représente l’un des plus grands marchés financiers au monde. Nous figurons également parmi les pays qui s’en sont le mieux sortis dans la traversée de la pandémie Covid19, avec un doux score de -0,65 dans la Pandemic Vulnerability Index. Eh oui, notre Grand-Duché est une réelle puissance globale. Or, les grands pouvoirs impliquent de grandes responsabilités. Alors quid de la Green Finance au Luxembourg ? Où en sommes-nous sur le soutien apporté par le secteur financier à la transition écologique ? Sur le site du gouvernement, nous pouvons lire le Premier ministre, Xavier Bettel, se positionner ainsi sur le sujet : « Au niveau de la finance verte, nous sommes devenus un leader mondial. Parce que nous avons tendance à être trop modestes. Or, nous avons créé à la bourse, dans le domaine de la finance verte, un top niveau mondial, et c'est quelque chose dont je suis très fier. »
« EN 2016, LE LUXEMBOURG GREEN EXCHANGE VOYAIT LE JOUR » QU’APPELLE-T-ON « GREEN FINANCE » ? Qui dit finance dit souvent « concepts trop complexes pour le commun des mortels ». Or, pour prendre nos pouvoirs de citoyens en main, nous avons besoin de comprendre. Alors faisons simple. La finance, dite verte, a pour but de rediriger les investissements des grandes institutions et entreprises vers des projets respectueux du vivant et de l’environnement. En gros, au lieu d’investir dans les énergies fossiles, on choisit d’investir dans l’énergie renouvelable. On permet ainsi aux infrastructures de notre monde d’évoluer vers les modèles qui nous permettront de pouvoir encore respirer dans quelques décennies. 52
Le livre Inventons notre avenir !, coécrit par Christiana Figueres et Tom Rivett Carnac, nous expose les deux scénarios possibles pour 2050 : un scénario d’anthropocène (signifiant la fin du monde causée par l’humain) si on ne change rien et un second plus souhaitable s’appuyant sur une multitude d’innovations vertes pour relever le défi de la transition écologique. Il serait donc sans doute bon, au final, que vous le lisiez pour que nous puissions mieux l’éviter ensemble. C’est justement dans le but « d’avancer ensemble » et ce dans la bonne direction, qu’en 2016, le Luxembourg Green Exchange voyait le jour. Cette place de marché dédiée au financement vert a pour but d’émettre des « obligations vertes », dites aussi « Green Bonds » en anglais. En promettant de réaliser ses projets de façon écoresponsable, une entreprise peut donc émettre des obligations vertes et accéder ainsi à un financement. Tout est donc au mieux dans la meilleure des transitions écologiques ? Not so fast…
BIEN DISTINGUER GREEN BONDS ET GREEN… WASHING Lucie Pinson, fondatrice de l’organisation Reclaim Finance dénonce ici deux problématiques clés. La première est qu’une entreprise peut faire « un peu de Green Bonds » un jour et continuer à investir dans les énergies fossiles « les autres jours de la semaine ». On peut donc faire du greenwashing, c'est-à-dire, se donner une image d’entreprise verte en communiquant uniquement sur les Green Bonds, sans pour autant enclencher une réelle transition écologique sur le long terme. La seconde, concerne le fait que les obligations vertes ne sont par ailleurs pas toutes aussi vertes les unes que les autres. Certaines sont… plutôt « vert kaki » si vous voyez ce que je veux dire. Les réglementations autour des Green Bonds ne sont pas encore abouties. Elles ne sont pas toutes évaluées selon les mêmes standards de confiance. Martina Holbach, chargée des campagnes finance chez Greenpeace Luxembourg, confirme d’ailleurs cette idée