JOURNAL CULTUREL DE L’ABITIBI-TÉMIS C AMINGUE - JUIN 2021 - VOL 12 - NO 09
GRATUIT
MICHÈLE AUDETTE
DE CŒUR ET DE ROC + SPÉCIAL PREMIÈRES NATIONS
07
BIENNALE INTERNATIONALE D’ART MINIATURE
09
NI TAKINAN : UNE VISION DU TERRITOIRE
19
ET ON DÉ JEUNE : NOUVEAU GROUPE PLEIN DE PROJETS
26
S OUTIEN CULTUREL POUR LES COMMUNAUTÉS ANICINABEK
33
SOUTERRAIN : HOMMAGE REMARQUABLE
L’indice bohémien est un indice qui permet de mesurer la qualité de vie, la tolérance et la créativité culturelle d’une ville et d’une région. 150, avenue du Lac, Rouyn-Noranda (Québec) J9X 4N5
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CHRONIQUES
ISSN 1920-6488 L’Indice bohémien
Valérie Martinez à direction@indicebohemien.org.
Publié 10 fois l’an et distribué gratui tement par la Coopérative de
Merci à l’ensemble de nos collaboratrices et collaborateurs bénévoles pour
solidarité du journal culturel de l’Abitibi- Témiscamingue, fondée en
leur soutien et leur engagement.
novembre 2006, L’Indice bohémien est un journal socioculturel régional et
ÉDITORIAL 3
indépendant qui a pour mission d’informer les gens sur la vie culturelle et
ENVIRONNEMENT 32
les enjeux sociaux et politiques de l’Abitibi-Témiscamingue.
HISTOIRE 12
Voici nos collaborateurs bénévoles pour ce numéro : MRC D’ABITIBI
L’ANACHRONIQUE 8
CONSEIL D’ADMINISTRATION
Jocelyne Bilodeau, Josée Bouchard, Valérie Castonguay, Jocelyne Cossette,
MA RÉGION, J’EN MANGE
37
Marie-France Beaudry, présidente | Ville de Rouyn-Noranda
Paul Gagné, Gaston Lacroix, Monique Masse, Annie Quenneville et Sylvie Tremblay.
MÉDIAS ET SOCIÉTÉ
16
Anne-Laure Bourdaleix-Manin, vice-présidente | MRC de La Vallée-de-l’Or
PREMIÈRES NATIONS
14
Marie-Déelle Séguin-Carrier, trésorière | Ville de Rouyn-Noranda
MRC D’ABITIBI-OUEST
TÊTE CHERCHEUSE
6
Joanie Harnois, secrétaire | Ville de Rouyn-Noranda
Raphaël Morand, Sophie Ouellet et Mario Tremblay.
Lyne Garneau | Ville de Rouyn-Noranda
SOMMAIRE
Pascal Lemercier | Ville de Rouyn-Noranda
VILLE DE ROUYN-NORANDA
Annie Quenneville | MRC d’Abitibi
Gilles Beaulieu, Anne-Marie Lemieux, Suzanne Ménard, Annette St-Onge et
À LA UNE
5
ARTS VISUELS
7 ET 9
DIRECTION GÉNÉRALE ET VENTES PUBLICITAIRES
CINÉMA
31 ET 33
Valérie Martinez
MRC DE TÉMISCAMINGUE
LITTÉRATURE
11, 13, 15
direction@indicebohemien.org
Émilie B. Côté, Véronic Beaulé, Carole Marcoux et Lise Millette.
MUSIQUE 19 PREMIÈRES NATIONS
Denis Trudel.
819 763-2677
22 À 29
SPECTACLE 17
MRC DE LA VALLÉE-DE-L’OR
RÉDACTION ET COMMUNICATIONS
Julie Allard, Nicole Garceau, Rachelle Gilbert, Renaud Martel,
Jade Bourgeois, coordonnatrice
Brigitte Richard, Sophie Richard-Ferderber et Ginette Vézina.
redaction@indicebohemien.org 819 277-8738
CONCEPTION GRAPHIQUE
Lise Millette, éditorialiste invitée
Feu follet
Lise Millette, collaboratrice à la une
CORRECTION RÉDACTION DES ARTICLES ET DES CHRONIQUES
Geneviève Blais
Amélie Brassard, Marine Clément-Colson, Joannie Cotten, Gabrielle Demers, Joanie Dion, Laura Fontaine, Isabelle Gilbert, Gabrielle Izaguirré-Falardeau,
IMPRESSION
Hélène Jager, Philippe Marquis, Lise Millette, MO, Christiane Pichette,
Imprimeries Transcontinental
Dominique Roy, Dominic Ruel, Louis-Paul Willis et Alec White.
TYPOGRAPHIE COORDINATION RÉGIONALE
Carouge et Migration par André SImard
Louise Magny | MRC d’Abitibi Amélie Brassard Sophie Ouellet | MRC d’Abitibi-Ouest Alex Turpin-Kirouac | Ville de Rouyn-Noranda Véronic Beaulé | MRC de Témiscamingue Stéphanie Poitras | MRC de la Vallée-de-l’Or
EN COUVERTURE Michèle Audette, adjointe au vice-recteur aux études et aux affaires étudiantes et conseillère principale à la réconciliation
Certifié PEFC
et à l’éducation autochtone, Université Laval
Ce produit est issu de forêts gérées durablement et de sources contrôlées
Photo : Louise Leblanc PEFC/01-31-106
2 JUIN 2021 L’INDICE BOHÉMIEN
www.pefc.org
– ÉDITORIAL –
POUR NE PAS OUBLIER LISE MILLETTE
Dans une entrevue accordée en 2014, à Winnipeg, au moment d’inaugurer le Musée des droits de la personne, l’anthropologue Serge Bouchard s’est lancé dans une leçon d’histoire. Une lancée factuelle, comme il en avait l’habitude, et au terme de laquelle on peut juste réfléchir, l’esprit suspendu, pour mesurer la force des mots utilisés.
PLUS QU’UN HÉRITAGE, UN DEVOIR DE SAUVEGARDE Après des années de survivance, un virage s’est amorcé à l’égard des Premières Nations. Une prise de conscience collective a émergé devant l’ampleur des horreurs subies.
Une des plus grandes tragédies de l’humanité, c’est l’Amérique. Très peu de gens savent que l’Amérique du Nord, l’Amérique centrale et l’Amérique du Sud avaient une population équivalente à la population européenne au moment du contact. Donc ce n’est pas une Europe surpeuplée qui rencontre un désert américain.
Très tôt, dans son métier d’anthropologue, Serge Bouchard s’est aussi intéressé à la nordicité, aux Premiers Peuples, à la richesse de l’histoire et de la culture et des langues des Premières Nations. « Le Canada ne reconnaît pas aucun génocide à l’intérieur de ses frontières. C’est factuellement faux », a encore affirmé Serge Bouchard. Notre pays reconnaît l’histoire douloureuse du génocide arménien, l’Holocauste, le génocide du Rwanda. Autant de drames connus, commémorés, étudiés, décryptés et pour lesquels il y a eu excuses et réparations. Enfin, réparations dans la mesure où il est possible de repriser et réunir ce qui a été mis en lambeaux par la seule haine de l’autre.
Y’avait des nations partout, il n’y avait aucun lieu désert. Et ces gens vont disparaître à 80 %. Le matin du 11 mai dernier, l’annonce de sa mort est tombée froidement. Deux jours plus tôt, Serge Bouchard disait encore qu’il ne lui restait que quelques jours à patienter avant de retrouver le micro et ses auditeurs, complices de ses réflexions. Je ne connaissais pas Serge Bouchard personnellement, mais je l’ai entendu tant de fois et j’ai lu ses mots si souvent que son départ a résonné comme si un ami était parti. C’est ça aussi, la radio. Cette impression de proximité créée par l’écoute d’une voix, parfois dans des instants de solitude, de déplacement ou de repos. Cette présence, simplement, régulière comme un métronome. On se laisse accompagner et rapidement s’installe l’illusion de se connaître un peu. Il appréciait Derrière cette voix, l’homme n’était pas qu’auteur ou tête d’affiche. Il se faisait surtout et d’abord profondément humain, jusqu’à aimer – et dénoncer lorsqu’il le fallait – les pires travers de cette humanité.
savait distinguer pour ce qu’ils sont, avec leurs différences géographiques, historiques et la distinction de leur ADN.
Bien sûr, il y a eu les travaux des deux grandes commissions, la Commission d’enquête sur les relations entre les Autochtones et certains services publics au Québec et la Commission de vérité et réconciliation au Canada. Une enquête publique se penche aussi sur le décès de Joyce Echaquan, une femme atikamekw, qui a rendu l’âme à l’hôpital de Joliette dans des circonstances dégradantes. D’autres efforts de documentation sont en cours pour révéler au jour les violences obstétricales et les stérilisations forcées dont ont été victimes des femmes autochtones qui ignoraient qu’en se présentant en salle d’accouchement, elles en ressortiraient nouvelles mères et stériles.
l’Abitibi et son Témiscamingue, deux territoires qu’il savait distinguer pour ce qu’ils sont, avec leurs différences géographiques, historiques et la distinction de leur ADN.
Dans les textes laissés derrière lui, un regard lucide et parfois brutal de vérité. Il affectionnait le territoire tout en repoussant ses frontières. Il tentait de rassembler tout en soulignant les nuances à respecter. Il revisitait le sens des mots entendus mille fois, précisant que Manitoba signifie « passage du Grand Esprit » et que la province avait été nommée ainsi sous l’insistance de Louis Riel. On peut y voir une certaine ironie considérant le sort qui a été réservé à ce patriote. Il appréciait l’Abitibi et son Témiscamingue, deux territoires qu’il
Ces témoignages s’ajoutent aux richesses du passé, ces savoirs légués à ceux qui sont venus l’Amérique, qui ont poussé la curiosité jusqu’au fond des terres. Il faut dorénavant réhabiliter l’histoire non pas uniquement pour excuser ou guérir le passé, mais pour planifier demain et faire en sorte que toutes et tous aient un avenir où s’épanouir, rayonner et vivre dans la fierté.
Il y aura d’autres anthropologues, d’autres analystes, d’autres porteurs de mémoires qui monteront à la tribune, mais si chacune et chacun s’investit à faire en sorte de garder ces nations vivantes, de leur permettre de renouer avec une culture à diffuser et surtout à ne plus taire, mais à cohabiter, alors il n’y aura plus d’oubliés.
DES PROGRAMMES POUR MIEUX CONNAÎTRE LES RÉALITÉS AUTOCHTONES OFFERTS À L'AUTOMNE 2021 - SUR CAMPUS ET À DISTANCE Études autochtones Intervention enfance-famille en contexte autochtone Gouvernance autochtone NOUVEAUTÉ Gestion publique en contexte autochtone (2e cycle) uqat.ca/etudes/etudes-autochtones
L’INDICE BOHÉMIEN JUIN 2021 3
ABOBE STOCK 4 JUIN 2021 L’INDICE BOHÉMIEN
– À LA UNE –
DEBOUT ET FIÈRE : MICHÈLE AUDETTE LISE MILLETTE
« Quand la vidéo a commencé à circuler, ça m’a frappée. Il n’y a pas grand monde qui a dormi cette nuit-là. J’ai voulu faire quelque chose. Messenger m’a ouvert la porte des membres de la communauté. On est tissés serrés, on a tous quelqu’un en commun », se rappelle Michèle Audette au sujet de Joyce Échaquan, cette Attikamek décédée le 28 septembre 2020 à l’hôpital de Joliette. Elle tenait à faire quelque chose, mais son rôle n’en est pas un de premier plan. « Je suis là comme une femme pleine d’amour. Je me sens capable de soutenir », mentionne-t-elle. Au début des audiences le 13 mai, elle était sur place à Trois-Rivières et avait aussi assisté à la préparation de la famille qui devait témoigner. Les preuves sont accablantes. Tout est lourd. « J’essaie quant à moi de rester normale dans quelque chose qui est tout à fait anormal », résume-t-elle pour expliquer qu’il faut rester fort pour soutenir celles et ceux qui devront prendre la parole. Son espoir réside dans le fait que ces familles ont des voix.
« Encore une fois, pour la famille et les proches, il faudra prouver, débattre, expliquer l’inexplicable. Ce n’est pas à une famille ou à une nation de porter ça quand on voit que c’est un système qui est en cause. C’est là où je sens monter l’indignation », confie-t-elle. « Quand je me sens comme un petit hérisson, je dis parfois à mes proches de me laisser le temps de “processer dans mon cœur” pour ensuite continuer. C’est important. Tout comme le câlin est un mécanisme de guérison incroyable aussi… » L’enquête menée par la coroner Géhane Kamel pourrait bien marquer un tournant selon Michèle Audette. Après des décennies de dénonciation, le moment est venu d’après elle d’opérer le changement. « Cette fois, on parle d’impératifs juridiques ici, ce ne sera pas que des recommandations. C’est en quelque sorte le système qui répond au système, avec le même langage. Je crois que ça va obliger nos institutions à faire le virage nécessaire. »
COURTOISIE
La réponse au sort réservé à Joyce Échaquan a ébranlé les autorités en haut lieu et rapidement mené à la mise en place d’une enquête interne, puis d’une enquête publique nationale. Pour celle qui a présidé l’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées, ce drame l’a replongé dans la douleur.
DE CŒUR ET DE ROC Michèle Audette reconnaît néanmoins se sentir encore ébranlée, bouleversée et avoir besoin de s’accorder des moments de pause pour prendre le temps de respirer. « Mon conjoint m’a déjà dit, “Michèle, tu es en train de tomber”, alors je fais aussi attention à moi dans tout ça. Je prends le temps de méditer, de rire aussi pour ne pas sombrer. » Ça lui est déjà arrivé, plus d’une fois d’ailleurs, de se sentir presque avalée par l’horreur, mais lorsqu’on tombe une fois, on comprend que la seule manière de ne pas sombrer de nouveau est de continuer d’avancer. Néanmoins, avec l’exposition à la peine et aux drames portés par tant de gens, elle dit que parfois, c’est comme s’il « fallait avoir été vacciné à ça pour être capable d’entendre certains témoignages ».
Michèle Audette a elle-même traversé un sentier houleux, elle porte en elle les cicatrices de violences passées, mais elle se sent « mocassins libres » et forte pour affronter, défendre et porter les voix des siennes et des siens. Plus jamais la honte. Plus jamais le silence non plus. Aujourd’hui, après avoir été à la tête de grandes organisations comme présidente de l’Association des femmes autochtones du Québec, présidente de l’Association des femmes autochtones du Canada, sous-ministre associée au Secrétariat à la condition féminine, elle est, à l’Université Laval, adjointe au vice-recteur aux études et aux affaires étudiantes et conseillère principale à la réconciliation et à l’éducation autochtone.
L’INDICE BOHÉMIEN JUIN 2021 5
– TÊTE CHERCHEUSE –
À MES ENFANTS ET À CEUX DES AUTRES DOMINIC RUEL
Je vous vois aller depuis plus d’un an, de près quand même, dans ce chapitre de vos vies qui passera à l’histoire et que vous raconterez à vos propres enfants quand ils voudront entendre parler du temps de votre jeunesse, comme on le faisait, nous, avec nos parents. Et quand votre ado, un jour, vous en voudra de ne pas le laisser sortir trop tard un vendredi, vous pourrez lui dire qu’en 2020 et 2021, vous avez été enfermé à la maison deux mois de temps avec père et mère, frère et sœur, 24 heures sur 24 et que vous aviez des couvre-feux, qui n’étaient pas très, très tard! Il ne saura quoi répondre à ça! Je vous vois aller depuis plus d’un an. On vous en a demandé beaucoup, vous avez peut-être eu l’impression d’avoir été oublié ou laissé de côté. Comme sis sur le Titanic, on avait crié, « Les plus vieux d’abord! », et qu’on vous avait demandé de rejoindre l’orchestre sur le pont. Je vous vois aller depuis plus d’un an. Vous terminez une deuxième drôle d’année scolaire, avec les masques, des cours en ligne et ces allers-retours de la maison à l’école. Vous avez tant bien que mal avancé et appris (surtout!).
Profitez-en pour remercier chaleureusement vos profs qui ont su, avec patience, s’adapter au gré des consignes. Eux aussi ont dû sortir de leur zone de confort. Parce qu’ils avaient votre réussite à cœur! Beaucoup de gens, vous en avez entendu le dire, ont pu critiquer le premier ministre pour ses décisions et ses hésitations, mais je crois qu’il faut reconnaître qu’il a certainement tout fait pour vous garder à l’école le plus souvent et le plus longtemps possible. Je vous vois aller depuis plus d’un an, privés de vos activités, de vos sports et de vos amis. On vous entend, vous le dites, pour plusieurs, que ça ne tourne pas toujours rond entre les deux oreilles. Vous avez peut-être décroché, angoissé, pleuré sans trop savoir pourquoi, regardé devant et vu tout en noir. On vous avait promis des arcs-en-ciel et un mois ou deux d’efforts. Ça a duré plus longtemps. Gardez espoir! Faites-les mentir, tous ceux et celles qui vous appelleront « Génération COVID », pour expliquer des lacunes et des retards. Allez chercher vos diplômes et vos formations, lancez mille et un projets et reprenez le temps perdu en tissant de vrais réseaux sociaux (en présentiel!) solides et enrichissants. Je vous vois aller depuis plus d’un an et je veux que vous redressiez les épaules. Soyez fiers! Bien sûr, ce n’est pas la guerre. Il s’agit quand même de la plus grave crise
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6 JUIN 2021 L’INDICE BOHÉMIEN
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THOMAS PARK - UNSPLASH
Je suis père, d’abord, et je suis prof, ensuite.
depuis 75 ans. À ces plus vieux, et à ces autres cons aussi, qui ont pu vous traiter de petites natures et d’enfants gâtés, dites-leur qu’ils ne l’ont pas connue, non plus, la guerre. Ils n’ont pas été confinés à 15 ans, ils n’ont pas fait l’école à distance pendant des semaines. Depuis 1945, leurs pires crises ont été des récessions cycliques et des taux d’intérêt de 20 % en 1981! Chapeau, les jeunes, je suis fier de vous!
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– ARTS VISUELS–
LA BIENNALE INTERNATIONALE D’ART MINIATURE CÉLÈBRE SON 15 E ANNIVERSAIRE
ÉMILIE B. CÔTÉ
GABRIELLE IZAGUIRRÉ-FALARDEAU
L’année 2021 sera celle de la 15e anniversaire de la Biennale internationale d’Art miniature (BIAM) de Ville-Marie, qui se déroulera du 4 juin au 5 septembre à la galerie du Rift. Selon Émilie B. Côté, coordonnatrice, l’événement fondé en 1992 par Joanne Poitras et Danielle Desjardins émanait d’une envie de rejoindre le monde malgré le caractère éloigné, voire isolé, du Témiscamingue. Avec le temps, la population a développé un véritable sentiment d’appartenance envers la BIAM. C’est sur le parcours historique cet événement devenu incontournable que se penchera cette édition. RÉTROSPECTIVE Ce sont 135 nouvelles œuvres miniatures de 53 artistes issus de 11 pays qui seront exposées à la BIAM. Elles ont en commun d’être réalisées par les ex-participants à la BIAM ayant reçu un prix lors de leur passage, ce qui permettra de constater l’évolution de leur art au fil des ans. Selon Émilie B. Côté, les artistes contactés étaient enthousiastes et honorés par cette occasion d’afficher à nouveau leur travail sur les murs du Rift. Une exposition portant sur l’histoire de la BIAM sera également présentée. On pourra entre autres y voir 12 des 14 œuvres ayant remporté le grand prix des éditions passées. Émilie B. Côté souligne que retrouver les œuvres et les artistes gagnants de chaque édition a nécessité un travail de recherche considérable, mais qu’il était important de profiter de cette édition pour faire une rétrospective : « Quand on se rend compte qu’on est là depuis trente ans, ce n’est quand même pas rien de regarder en arrière et de faire un temps d’arrêt pour regarder tout le chemin parcouru, la qualité de l’événement dans son ensemble. Il n’y a pas une année où il n’y a pas quelque chose d’extraordinaire qui est arrivé. C’est de reconnaître l’ampleur de la biennale pour le milieu et pour les artistes. »
IMPACTS L’ampleur qu’évoque Émilie est tangible, alors que la fondation de la BIAM a permis la naissance d’un véritable réseau puisque d’autres événements du même type sont apparus dans les années suivantes. Émilie pense aussi que la BIAM stimule la création des artistes : « Ça les fait sortir de leur zone de confort, ça fait réfléchir les artistes autrement à leur pratique parce qu’ils doivent continuer ce qu’ils font habituellement, mais sur un format restreint. Je pense qu’il y a beaucoup d’artistes aussi dont la pratique a été influencée par la miniature, mais qui ne l’auraient peut-être pas été sans l’existence de la BIAM. » VERS L’AVENIR Parmi les nouveautés présentées cette année, on compte entre autres la numérisation d’œuvres miniatures par le cinéaste Serge Bordeleau. Les œuvres pourront être visionnées avec des lunettes de réalité virtuelle, les faisant apparaître en format monumental, comme s’il s’agissait de sculptures extérieures ou de projets de grande envergure. Le volet numérique pourrait prendre de plus en plus de place dans les années à venir, alors que l’équipe profite de cette quinzième édition pour faire le point et se questionner sur sa vision quant à l’avenir de la BIAM. Alors que la prochaine édition n’aura lieu qu’en 2024, Mme B. Côté exprime le désir de profiter cette période pour se pencher sur la question : « On veut revamper la BIAM, peut-être changer quelques éléments dans la formule. On aimerait vraiment sortir des sentiers battus et faire de cet événement-là quelque chose de plus grand, un événement en art contemporain qui devient un incontournable, encore plus qu’il ne l’est déjà. » Pour consulter la programmation complète de la 15e BIAM, rendez-vous sur le site Web du Rift. L’INDICE BOHÉMIEN JUIN 2021 7
– L’ANACHRONIQUE –
RÊVERIE DU SOLSTICE PHILIPPE MARQUIS
Le jour tombe ou la nuit se lève. Je ne sais pas, c’est à toi, dont les yeux parcourent ces lignes, de décider. Tu marches à travers une forêt. Tout est vivant. Le soleil passe doucement derrière les arbres. La lumière change. Tu marches pour rejoindre le sentier que tu avais laissé plus tôt. Sans t’énerver, tu as le temps, tu te le donnes, il n’y a rien à craindre. Un écureuil crie, tu t’approches pour mieux l’entendre et le voir. Il ne fuit pas. Tu t’approches encore plus et tends l’oreille pour comprendre ce qu’il raconte. Tu ne saisis pas, mais te dis qu’il te dévoile surement quelque chose… Tes jambes, ton corps frôlent les fougères, les aulnes, les épinettes. Tu te laisses émouvoir avec bonheur. Tout est si naturel. Puis, juste avant d’emprunter le sentier, tu t’arrêtes devant cet immense pin rouge, celui-là même qu’autrefois, tes amies et toi, aviez surnommé Solitaire. Tu lèves la tête, regarde les branches qui bougent sous un doux vent puis tu sers cet arbre aussi fort que possible dans tes bras. Avant de descendre jusqu’au lac en reprenant le sentier. Partout autour, ça sent le bois, ça sent l’été qui vient, ça sent la vie…
ÉCRIS DANS L’IB!
Le temps venu, de retour chez les humains, tes jambes te porteront dans les rues, les ruelles, les commerces et les maisons. Bientôt, tu te permettras d’approcher tes semblables si longtemps, trop longtemps, solitaires. Tu le feras avec bonheur et soulagement. Tu marcheras sans crainte parmi nous et te pencheras tout prêt pour mieux saisir nos secrets. Tu nous contempleras sous tous nos angles. Nous partagerons des repas, des blagues ou des peurs. Tu inventeras des histoires avec nous. Tu rêveras avec nous! Tu lèveras parfois les yeux aux cieux pour contempler les nuages et leur lumière. Le temps venu, tu serreras longuement, très fort et très longuement, celles et ceux que tu aimes. Tu les prendras enfin dans tes bras. Partout autour, ça sentira léger, ça sentira nouveau. Et ça goûtera la vie démasquée.
Tu te passionnes pour la culture de manière amateur ou professionnelle?
Écris pour L’Indice bohémien! Manifeste-toi à redaction@indicebohemien.org
8 JUIN 2021 L’INDICE BOHÉMIEN
– ARTS VISUELS –
EXPOSITION NI TAKINAN : UNE VISION DU TERRITOIRE À DÉCOUVRIR JOANIE DION
Carlos Kistabish a fait ses premiers pas dans les arts avec le dessin en reproduisant ceux de son grand-père et en l’observant pour apprendre les techniques. Ce n’est que plus tard au cégep qu’il découvre le moyen d’expression de la peinture dans un cours d’arts plastiques qui, au début, était loin de le passionner. Heureusement, la peinture acrylique l’a juste assez accroché. Aujourd’hui, il présente sa première exposition solo au Vieux-Palais d’Amos jusqu’au 7 juillet, Ni TAKiNAN.
M. Kistabish nous convie donc à son exposition dans un état d’esprit de découverte et de partage des cultures : « Je le fais pour montrer comment c’est beau chez nous. » Tout porte à croire que Ni TAKiNAN exprime la passion dans la simplicité du sentiment, mais également dans l’intensité intrinsèque de l’expérience unique anicinabe sur le territoire.
Inspiré par son expérience sur le territoire, M. Kistabish représente ce qu’il a appris en forêt, comme l’observation des animaux et tout ce qui touche à sa culture. Il explique entre autres qu’aucune de ses œuvres n’est titrée afin que le public l’interprète à sa façon. « Nous autres, dans notre nature, l’apprentissage se fait par ce qu’on voit. Ce n’est pas comme apprendre des additions à l’école, c’est différent. Je pense que c’est un peu pour ça que je laisse les gens interpréter ce qu’ils voient. »
Justement, Ni TAKiNAN signifie « notre territoire », soit l’élément essentiel à son inspiration et la composante centrale de sa culture. « Pour moi, le territoire, c’est très important. Et ça, ça m’a été appris par mon grand-père, mon arrière-père et mon père aussi. Ce que je mets dans mes toiles, c’est ce que je connais en général de ma culture à moi. » Pourquoi avoir englobé l’exposition sous des mots désignant le territoire? « S’il n’y a pas de territoire, il n’y a pas de culture… sans le territoire, on n’est plus rien! » Carlos Kistabish ne se considère pas comme un artiste, pour l’unique raison qu’il peint par amour de la peinture et du partage de sa culture. « Je ne lance pas de message et je n’ai pas une vision grande comme on peut connaître de certains artistes. Sans dire que mes peintures sont simples… Je vois ça simple [ma démarche]! »
MARIE-RAPHAËLLE LEBLOND
Il appuie d’ailleurs sa réflexion par cette anecdote fort juste : « Mon père m’a amené souvent dans le bois quand j’étais jeune et, oui, ça arrivait qu’il me dise quoi faire… mais je le regardais souvent, ce qu’il faisait, et c’est comme ça que j’ai appris à me débrouiller en forêt. »
L’INDICE BOHÉMIEN JUIN 2021 9
On peut tous aider les familles à se retrouver. Faites-vous vacciner. Canada.ca/vaccin-covid 1-833-784-4397
10 JUIN 2021 L’INDICE BOHÉMIEN 72300_4_Vac_ripple_print_10 X 10,375_families_French.indd 1
2021-05-11 17:16
– LITTÉRATURE –
DISCUSSIONS DE COMPTOIR POUR UN UNIVERS DE PAPIER GABRIELLE DEMERS
« Y a pas d’première classe dans un bus, mais les bums s’assoient systématiquement en arrière. » – Alexandre Castonguay C’est un projet particulier, ce récit offert aux éditions de Ta Mère. Déjà, la quatrième de couverture nous happe dans l’histoire au ton franc et dynamique de Castonguay : « Dans J’attends l’autobus, tu vas être un Français qui travaille la nuit au Couche-Tard du terminus d’autobus de Montréal pis, pour plein de raisons, il va naître une relation d’amitié entre nous deux. […] J’vais laisser dérouler ma pensée au travers des allers-retours Montréal-Rouyn que je fais pour ma job. Je suis travailleur autonome. Comédien. »
CHRISTIAN LEDUC
C’est un récit. Pas un roman, pas une nouvelle, pas un journal de bord. Les parties vont d’une ligne à plusieurs pages. Est-ce qu’on a là des fragments? Un long monologue? Un carnet de route? Tout cela à la fois. Alexandre Castonguay raconte des bouts de sa vie, et on a droit à des anecdotes du passé colonial qui se frottent aux discussions de dépanneurs ou aux souvenirs d’adolescence. Et tout cela, dans un équilibre surprenant et à la fois tellement évident. L’intime, l’universel, le près, le loin, l’entre-deux, le désir, la jeunesse, le travail, l’ennui, l’attente, les succès : ce récit englobe tout ce qui fait de nos vies de petits théâtres autonomes. L’écriture embrasse la poésie de l’oralité, ce qui ajoute des allures de monologue. Car si le narrateur s’accoude au comptoir du commis du Couche-Tard de la station d’autobus à Montréal, on y est aussi. Avec eux. Notre liqueur dans une main et une revue dans l’autre, écoutant des propos qui nous plongent dans le quotidien d’un artiste, d’un étudiant étranger, de passants, de vous, de moi, de toute l’humanité, en fait. « Arrange-toé… toi… avec c’que tu comprends. Le reste, laisse faire. Ressens-le au lieu de l’comprendre, c’que j’dis. Des fois j’parle pointu et d’autres fois, rond. Mes oreilles ont baigné dans tellement d’univers parlés différents qu’ma langue fait à sa tête. » L’humanité, on la rencontre tout au long du texte. Dans les questionnements et les découvertes de l’adolescent, dans l’euphorie de la ville puis dans celle de la vie sur son territoire, le narrateur nous entraîne à sa suite dans les chemins de l’existence, en gardant toujours un clin d’œil au détour. La gravité de l’exigeante vie artistique est ponctuée de petits épisodes humoristiques : Castonguay a une façon bien à lui d’unir les univers.
SUZANNE BLAIS
DÉPUTÉE D’ABITIBI-OUEST
« J’suis pas certain qu’le mot “art” existe en anishnabe. J’pense qu’la spiritualité – dans l’sens transcendance –, l’artisanat – faire un vêtement, un canot, des raquettes –, faire des motifs sur d’l’écorce de bouleau avec du poil d’orignal – genre petit point – sont englobés par un seul et même mot. Un mot total. Lequel, j’sais pas. Faudrait que j’vérifie. […]
Bureau de La Sarre 29, 8e Avenue Est, La Sarre(QC), J9Z 1N5 819 339-7707
Le terminus d’autobus de Rouyn est sur la rue du Terminus. Si l’terminus venait qu’à déménager, est-ce qu’il faudrait rebaptiser la rue? » En lisant J’attends l’autobus, on est plongé dans notre région autant que dans tous les rubans de routes qui la relient au reste du territoire. Notre propre identité est motivée par celle de Castonguay, qui n’hésite pas à pointer les points faibles et les points forts de l’Abitibi, de l’Union des artistes (UDA), des arts vivants. Vivants comme nous, mais surtout comme lui. C’est dans et par l’expérience d’artiste de théâtre établi en région que Castonguay a tracé les contraintes de création de ce texte. Il voulait circonscrire ses expériences et nous les donner à lire. Savait-il qu’on les vivrait autant avec lui, grâce à son style direct et magistral à la fois?
Bureau Amos 259, 1re Avenue Ouest, Amos, (QC), J9T 1V1 819 444-5007 zz
L’INDICE BOHÉMIEN JUIN 2021 11
– HISTOIRE –
VENUE DES ALGONQUINS EN TERRITOIRE ABITIBIEN CHRISTIANE PICHETTE, SOCIÉTÉ D’HISTOIRE DE LA SARRE
Le peuplement de l’Abitibi-Témiscamingue s’est fait bien avant que la première personne de race blanche n’y mette les pieds. On a en effet retrouvé des traces d’occupation humaine qui prouvent que des gens ont habité ce territoire il y a plusieurs millénaires, à une époque antérieure à la construction des pyramides en Égypte. Ces gens étaient les ancêtres des Algonquins et des Cris qui habitent encore notre région.
succès. Les Algonquins de l’Abitibi-Témiscamingue ont toutefois moins souffert des attaques iroquoises que ceux du Bas-Outaouais, car ils sont en dehors de la grande route commerciale des Iroquois qui passe par Mattawa (Ontario).
Les Iroquois et les Algonquins se disputaient depuis très longtemps le contrôle des territoires de chasse et de trappe. L’arrivée des Européens en Nouvelle-France amplifie ces rivalités. Les Européens sont très avides de ces précieuses fourrures qu’ils échangent aux Amérindiens contre des objets. La fourrure acquiert alors plus de valeur et on se dispute plus âprement le contrôle des territoires.
Quelques lieux géographiques témoignent du passage des Iroquois dans notre région. Les Iroquois étaient souvent vus sur la rivière Nottaway qui prend sa source autour du lac Simon. Nadowek (pluriel de Nottaway) est l’ancien nom de la ville de Senneterre. Les Algonquins l’avaient baptisée ainsi, car c’était un lieu fréquenté par les Iroquois.
En 1701, c’est la signature de la Grande Paix entre toutes les nations amérindiennes du nord-est de l’Amérique du Nord qui sauve les Algonquins de l’extinction.
Source : L’Express sillonne la région de l’Abitibi-Témiscamingue, pages 7 et 9 Les Algonquins, grands chasseurs, trappeurs et voyageurs, occupent une position privilégiée. Ils contrôlent la rivière des Outaouais, qui donne accès à un grand territoire pour la fourrure, et sont installés depuis 1550 sur la rive nord du Saint-Laurent. En 1650, à la suite de nombreuses attaques iroquoises, les Algonquins doivent quitter la vallée du Saint-Laurent et leurs terres du Bas-Outaouais. Ils se réfugieront plus au nord, dans le territoire actuel de l’Abitibi-Témiscamingue. Cependant, les Iroquois poussent leurs incursions en pays algonquins jusqu’au lac Témiscamingue.
COURTOISIE
En 1688, ils délogent les quatorze Français du fort Témiscamingue et traquent les canots algonquins chargés de fourrures. Ils poursuivent les Algonquins jusque dans leurs derniers refuges de l’Abitibi et s’attaquent même aux Cris de la Baie-James, mais sans
Reproduction de la signature de la grande paix.
Au Centre d’exposition d’Amos… Inscription en cours... CAMP’ART, CAMP SPÉCIALISÉ EN ARTS PLASTIQUES POUR LES 8-12 ANS
POINTE-À-CALLIÈRE, CITÉ D’ARCHÉOLOGIE ET D’HISTOIRE DE MONTRÉAL
EXPOSITION COLLECTIVE
COPRODUCTION DES CENTRES D’EXPOSITION D’AMOS ET DE VAL-D’OR
POUR CRÉER EN COMPAGNIE D’ARTISTES PROFESSIONNELS DU 5 AU 9 JUILLET 2021
Ce projet a été rendu possible en partie grâce au gouvernement du Canada, et avec la collaboration du gouvernement du Québec.
12 JUIN 2021 L’INDICE BOHÉMIEN
© MARIE ANDRÉE GOUIN
Ouverture le 23 juin CIEL D’ABITIBI ET PATTES DE MOUCHE
© JOANNE LAVOIE
Jusqu’au 6 juin FOLIE D’ARTISTE SOCIÉTÉ DES ARTS HARRICANA
© POINTE-À-CALLIÈRE. PHOTO : LUC BOUVRETTE.
Jusqu’au 6 juin FRAGMENTS D’HUMANITÉ. ARCHÉOLOGIE DU QUÉBEC
Info et inscription : 819 732-6070
DU 14 JUIN AU 15 AOÛT
– LITTÉRATURE –
Venez profiter de la zone piétonne!
FRANÇOIS GENDRON : SIMPLICITÉ, FRANCHISE, HONNÊTETÉ JOANIE DION
Trois ans après l’annonce de sa retraite, celui qui détient le record de longévité à l’Assemblée nationale, avec 42 ans de carrière ininterrompue, lance sa biographie, François Gendron : 42 ans de passion pour le Québec et ses régions (Druide), écrite en collaboration avec l’écrivain-journaliste amossois Samuel Larochelle. Jeune, il fait face à « un conflit entre la commission scolaire de la ville de La Sarre et celle du canton de La Sarre. À cause d’un litige entre les présidents de ces organisations, les élèves de la campagne sont rarement acceptés à l’école secondaire de la ville pour continuer leurs études », écrit-il. Il naît dans une famille de « cultivailleurs » et ses parents n’ont pas les moyens de lui payer des études. Il lui faut relever ses manches de nombreuses fois encore afin d’avoir accès à l’éducation à laquelle il aspire et entrer chez les frères. C’est peu dire, puisqu’il doit, entre autres, négocier avec le directeur du collège de Berthierville afin de le réintégrer… « Ils acceptaient de me garder à certaines conditions. Je devais faire le ménage des toilettes, sans rotation, pour le reste de l’année. Pendant les récréations, on exigeait que je monte à l’étude pour ne pas côtoyer les autres, afin de ne pas les “corrompre” [car sa personnalité ne correspondait pas aux vœux de pauvreté, de chasteté et d’obéissance]. Puis, on m’a enlevé le poste de président du collège et le rôle de facteur. Plus tard, j’ai appris que la direction m’avait imposé tout ça pour me pousser à lâcher en cours d’année. » La même année, à l’âge de 17 ans, le père de Ti-Cul Gendron décède dans un accident de voiture. Son frère, alors passager, est blessé gravement. Les finances de la famille Gendron s’en retrouvent encore plus fragiles. De multiples autres obstacles se dressent en travers de son parcours scolaire. Parmi ceux-ci, un conseiller en orientation qui lui suggère de se diriger en recherche médicale appliquée… alors qu’il postule en parallèle « à l’École normale d’Amos pour devenir
ÉLYE CARRIER
Rares sont les gens qui n’ont jamais, jamais, jamais entendu parler de François Gendron, l’ex-député péquiste d’Abitibi-Ouest. Mais qui connaît Ti-Cul Gendron, qui se plaisait à faire des « coups pendables » et qui a dû user d’ingéniosité et de persévérance afin d’aller à l’école pour, plus tard, devenir ministre de l’Éducation? Depuis le 5 mai dernier, c’est tout le Québec qui a désormais l’occasion de découvrir l’ampleur de son implication hors norme, mais également la profondeur d’âme de l’homme derrière la cravate.
enseignant », profession qu’il occupera pendant 10 ans. Il commence d’ailleurs à enseigner au collège même où « il n’avait pas eu le droit de terminer ses études quelques années plus tôt ». De fil en aiguille, François Gendron s’implique au bureau syndical local, dans le soutien aux élèves à la Polyno de La Sarre comme tuteur désigné. Puis, en 1976, il gagne ses premières élections dans la circonscription d’Abitibi-Ouest, après une course électorale qu’il est convaincu de perdre. Il dirigera 11 ministères et occupera de nombreux postes à l’Assemblée nationale (whip adjoint, leader parlementaire adjoint de l’opposition, président du caucus ministériel, troisième vice-président de l’Assemblée nationale, vicepremier ministre et président de l’Assemblée nationale). Ceux qui le liront entendront son histoire racontée par luimême, par le travail d’écriture brillamment ficelé de Samuel Larochelle, et seront emplis d’espoir pour la suite. « Je souhaite qu’avec mon livre, les gens se rendent compte que la politique devrait tirer la société vers le haut », précise avec passion M. Gendron en entrevue. D’ailleurs, les mots de la conclusion lui reviennent et sont à l’image de l’homme qu’on découvre au long de la lecture : « C’est important d’accrocher les jeunes parce qu’ils sont l’avenir. Si on ne s’occupe pas de notre jeunesse et si la jeunesse ne s’occupe pas de jouer des rôles qui ont de l’impact… J’expliquais souvent aux élèves que la vie est un immense amphithéâtre comptant plusieurs rangées, de nombreux sièges par rangée, et que je devais les aider à trouver celui qui leur revenait et à l’occuper convenablement. » L’INDICE BOHÉMIEN JUIN 2021 13
- PREMIÈRES NATIONS -
HEALING JOURNEY, LES ANICINABEK CONTINUENT D’OCCUPER LE TERRITOIRE AMÉLIE BRASSARD – AGENTE DE DÉVELOPPEMENT CULTUREL À MINWASHIN
Tout au long du parcours, des enseignements et des cérémonies étaient transmis au groupe, mais appelons-les ici des outils. La roue de médecine est utilisée dans le développement personnel, dans la guérison et en santé mentale pour expliquer l’équilibre dans la vie. Pour cet article, j’ai envie de vous parler du projet Healing Journey sous l’angle humain de la roue de médecine : soit le physique, le mental, l’émotionnel et le spirituel. LE PHYSIQUE ET LE MENTAL En soi, marcher une quinzaine de kilomètres par jour en plein bois dans la neige est un défi de taille. Sillonner le territoire en raquettes avec un traineau comme compagnon
permet de comprendre concrètement l’importance de prendre soin de l’aspect physique de son corps. Pendant la marche, le réflexe du cerveau est de penser à la vitesse grand V tel un écureuil TDAH+! On observe le territoire, on s’observe aussi. On se compare aux autres et de là surgit une cascade de réflexions et d’introspections. « Les pieds et les jambes nous soutiennent et nous mènent sur le chemin de la guérison. C’est important d’en prendre soin », affirme Nathalie Mathias, l’instigatrice du projet. L’ÉMOTIONNEL ET LE SPIRITUEL La charge mentale grandit de plus en plus jusqu’à l’atteinte d’un point de rupture. On fait des liens entre des situations du passé et du présent, on comprend! Les outils viennent compléter la démarche afin de se libérer, de se laisser aller. Certains laissent couler les larmes, d’autres vocalisent, mais chacun doit parlementer avec ses émotions, et ce, dans le respect. Un vent vient balayer le brouillard dans lequel on est et on profite d’un rayon de soleil. On comprend le territoire, on comprend la culture, on se comprend. Ayant réalisé de telles marches auparavant, Nathalie Mathias avait préparé les participants à l’aventure lors de conférences virtuelles. La préparation consistait à organiser le bagage, mais surtout le mental. « Lorsque nous marcherons, le chemin ne sera pas toujours facile. Il y aura des obstacles, des montagnes que nous
Vous avez un projet Culturat? Contactez-nous à info@culturat.org
14 JUIN 2021 L’INDICE BOHÉMIEN
NATHALIE MATHIAS
Le Healing Journey est une expérience de vie que onze personnes de la Première Nation de Long Point (LPFN) ont vécue au printemps dernier. Pour cette première édition, une marche de 5 jours sur 81 km à travers le territoire ancestral (aki) était prévue. Un groupe Facebook permettait aux proches et à la communauté de transmettre des mots d’encouragement et des photos de la journée, ce qui a contribué à créer un énorme sentiment de fierté, un soutien émotionnel et un appui de la communauté. Le but de chaque participant était différent, mais chacun a traversé une gamme d’émotions afin de comprendre, de s’ouvrir ou d’accepter, mais surtout de guérir une blessure personnelle.
devrons affronter. Si vous êtes capable de traverser ces éléments de la nature, cela va se répercuter dans les obstacles de votre vie », leur a dit Nathalie Mathias. Tous les jours, sur le groupe Facebook, on voyait les sourires des participants qui avaient grandi, des paysages d’aki magnifiques, un groupe soudé par leur quête, mais surtout une mobilisation sans précédent de la communauté pour lui assurer un voyage sécuritaire et inoubliable. Mon coup de cœur est indéniablement la vidéo montrant l’arrivée dans la communauté. Pour l’avenir, Nathalie souhaite voir d’autres éditions au cours de différentes saisons. Elle visualise déjà le groupe en train de pagayer sur la rivière Winneway pour être accueilli par la communauté et pour montrer que les Anicinabek occupent encore le territoire.
– LITTÉRATURE –
UN PREMIER ROMAN POUR NICOLE JOANNETTE
Prolongée jusqu’au 20 juin
Here elswhere other hauntings
DOMINIQUE ROY
Jin-me Yoon
La Témiscamienne Nicole Joannette est une passionnée des mots. La lecture et l’écriture ont toujours fait partie de son univers, puisqu’elle a enseigné le français au secondaire pendant de nombreuses années. Des courts textes, elle en a produit des centaines, mais l’idée d’en écrire de plus longs s’est manifestée à sa retraite. Automne et pandémie réunis, le moment était opportun. « J’avais enfin le temps et, profitant des petits matins tranquilles, je me suis surprise à multiplier les récits. Au total, c’est cinq qui avaient été écrits! J’étais heureuse et comblée! Je savais que je pouvais y arriver. Ils ont dormi sur les tablettes un bon bout de temps avant que la pandémie m’en fasse ressortir un premier. »
« Le roman Les voleurs de vies met en scène une fillette qui fuit sa secte natale à la veille d’une tragédie épouvantable. Le drame fera d’elle une redoutable justicière qui traquera les abus et gourous de ce monde. Elle dénoncera l’inacceptable et parcourra plusieurs pays du monde. » L’autrice, qui se dit interpellée par les drames planétaires, a visé juste en abordant des sujets délicats tels que la violence, les mauvais traitements et l’aliénation qui font partie intégrante des sectes religieuses. Chaque tragédie dont il est question ressemble à ce qu’on voit, à ce qu’on entend, à ce qu’on lit dans l’actualité. Florence Gagnon, le personnage principal, est une véritable battante. Derrière sa fragilité se cache une jeune femme déterminée à sauver une par une les victimes tombées sous la coupe d’un gourou, peu importe le niveau de dangerosité de la mission et du pays. Envers et contre tous, elle veut redonner vie à ceux qui ont remis la leur entre les mains de ces guides spirituels fanatiques aux idéaux malveillants. En plus du processus d’écriture, Nicole Joannette a créé elle-même son lectorat en devenant l’éditrice de son œuvre. « Être publié par la voie traditionnelle est difficile et il faut s’armer de patience. J’ai bien sûr envoyé mon manuscrit à une trentaine de maisons d’édition. Il faut savoir que le milieu est plutôt fermé aux auteurs inconnus et on dit qu’un manuscrit sur six mille trouve une voie. J’ai reçu toutes sortes de réponses. Certaines, très froides; d’autres,
COURTOISIE
Et ce premier, Les voleurs de vies, elle l’a lu et relu. Elle en a effacé des pages entières. Elle a revu l’intrigue, les descriptions. Elle s’est questionnée encore et encore. Elle a consacré un temps précieux à la recherche pour que le sujet soit crédible et les lieux fidèles à la réalité. Habitée d’une grande discipline, elle a planché pendant des mois, atteignant chaque jour l’objectif fixé la veille. Et en avril dernier, elle bouclait la boucle avec le lancement de ce tout premier roman.
La dernière co-publication du MA est disponible en boutique!
plutôt encourageantes. » Ces refus n’allaient certainement pas freiner son élan. « J’ai donc décidé de me former et je me suis transformée en éditeur. Du dépôt légal, à l’obtention d’un code ISBN, en passant par la mise en page, la correction, la création des première et quatrième de couvertures et du plan de promotion, j’ai pris en charge toutes les étapes. L’expérience a été des plus enrichissantes! » Les réactions sont positives et les ventes vont bon train. Tout en s’adonnant au marketing, déjà, l’autrice émergente prépare la sortie d’un autre roman qui bouscule autant. Au drame psychologique qui définit bien Les voleurs de vies, elle ajoutera le roman à suspense pour plonger les lecteurs dans l’univers carcéral d’un tueur en série. La sortie est prévue pour l’automne.
Monique Régimbald-Zeiber Les ouvrages et les heures 132 pages
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L’INDICE BOHÉMIEN JUIN 2021 15
– MÉDIAS ET SOCIÉTÉ –
UNE CULTURE DU BANNISSEMENT ANTI-INTELLECTUELLE LOUIS-PAUL WILLIS
En marge des nombreux débats qui font rage au sein de notre contexte culturel et socionumérique (conspirationnistes, vaccins, laïcité, liberté universitaire, etc.), on retrouve un phénomène qui, bien qu’il existe depuis longtemps, prend une ampleur considérable : l’anti-intellectualisme.
Les événements tels que celui qui s’est déroulé à l’Université d’Ottawa l’automne passé, ou tels que ceux qui se sont déroulés à l’UQAM et relatés dans une série de chroniques d’Isabelle Hachey dans La Presse, ont mis en lumière le phénomène de la culture du bannissement, tout comme sa présence sur nos campus universitaires. Il n’en fallait pas moins pour qu’une poignée de chroniqueurs à tendance fortement réactionnaire tente de lier ce phénomène à une soi-disant « idéologie de gauche » qui gangrènerait nos campus et conditionnerait notre jeune génération. Qu’on ne me méprenne pas : je suis d’avis que la culture du bannissement est problématique et doit être abordée comme phénomène social. Mais je suis absolument contre les généralisations crasses qui pullulent dans certains médias. La principale généralisation qui ressort de ces chroniques à répétition consiste à pointer le doigt vers le phénomène woke pour expliquer le problème. Décrivant à l’origine un individu préoccupé par les injustices sociales, raciales et sexuelles, le terme woke est depuis détourné, gracieuseté d’un contexte médiatique où l’opinion domine largement, au péril de l’information. Selon ce groupe de chroniqueurs, la culture woke serait une forme de radicalisation issue
16 JUIN 2021 L’INDICE BOHÉMIEN
NATHAN DUMLAO - UNSPLASH
En effet, les médias à grand tirage (et leurs panels de chroniqueurs, trop souvent démesurément réactionnaires) se sont emparés des débats entourant les quelques regrettables événements qui ont mis en relief des failles dans la liberté universitaire. Je pense ici, bien entendu, à « l’affaire Lieutenant-Duval », entre autres. Évidemment, en tant que professeur d’université et en tant que chercheur, je ne peux que souligner une fois de plus l’importance capitale que revêt la liberté universitaire; elle est au cœur d’un établissement universitaire en santé, et à son tour, un établissement universitaire en santé est au cœur d’une démocratie en santé. Je suis donc entièrement en accord avec l’attention donnée aux dérives récentes entourant cette liberté sur certains campus.
du féminisme et des études de genre. J’ai même pu lire des chroniques s’attaquant à la notion de genre elle-même, et à plusieurs autres concepts au cœur des sciences sociales et humaines. Selon eux, il faudrait abolir ces cursus d’études de nos universités. Ici, je considère qu’on nage en plein délire anti-intellectuel! Comment peut-on renier le concept de genre et tout ce qu’il implique sur le plan culturel, social et linguistique? Dans la mesure où le genre est conçu comme une identité qui guide et détermine nos interactions sociales et sexuelles (je vulgarise ici, bien entendu), il se distingue du sexe qui, lui, se résume au fait biologique d’être né avec un sexe mâle ou femelle. Il est d’une absurdité sans précédent que de croire que nos identités sociales, culturelles et sexuelles sont liées à notre sexe biologique. Le fait de choisir des vêtements masculins ou féminins, de peindre la chambre du nouveau-né bleu ou rose, d’accorder nos qualificatifs au féminin ou au masculin; tous ces comportements n’ont absolument rien de biologique. On ne les retrouve pas dans la nature. Ils sont le produit d’un système de signification qui nous permet de nous situer dans une société et dans une culture en fonction d’identités que
nous revendiquons. Depuis plusieurs décennies, des chercheurs de partout dans le monde tentent de mieux comprendre ces phénomènes symboliques, nous permettant ainsi de mieux comprendre les facteurs psychodynamiques qui nous déterminent dans notre environnement. De les renier, et de décrire des concepts théoriques largement acceptés comme des hérésies, témoigne d’un anti-intellectualisme duquel il faut absolument se méfier. Certains chroniqueurs réactionnaires souhaiteraient voir disparaître des champs d’études complets de notre paysage universitaire, sous prétexte que ce sont des disciplines idéologiques se rattachant à une soi-disant « gauche radicale ». Le problème, ici, c’est que l’université est et sera toujours une institution progressiste. Ce progressisme n’est ni à gauche ni à droite; c’est un progressisme qui se résume simplement dans la mission même de l’université : développer, faire avancer et transmettre le savoir. Il faut croire que ce progressisme irrite certains réactionnaires qui semblent eux-mêmes plutôt radicaux : pour défendre la liberté universitaire, ils s’attaquent à… la liberté universitaire!
– SPECTACLE –
LA TROUPE À CŒUR OUVERT S’OFFRE UN CADEAU POUR SON 40 E ANNIVERSAIRE ISABELLE GILBERT
Lise Bégin et, depuis 1987, Donald Renault occupe ce poste. Au départ, c’était surtout une troupe de théâtre. En 1990, la troupe commence à faire du théâtre d’été de style cabaret. Par la suite, la troupe a diversifié ses activités en créant des partenariats avec les milieux culturels, économiques et touristiques. À la fin des années 1990, le théâtre musical devient un nouveau créneau avec l’arrivée de Daniel Morin à la mise en scène et de Jocelyne Beaulieu à la direction musicale. S’enchaînent les productions Demain matin, Montréal m’attend, Grease, Le Roi Lion, Hair Spray, Annie, etc.
COURTOISIE
Au début des années 2000, Le Paradis du Nord, dont les textes ont été écrits par Danielle Trottier et la musique composée par Jacques Marchand, va occuper la troupe et ses nombreux bénévoles pendant sept années de magie.
Le 31 mars dernier, La Troupe À Cœur ouvert annonçait la production d’un documentaire dans le cadre de son 40e anniversaire prévu pour septembre 2021. Quel en sera le sujet? Le documentaire traitera de la production du spectacle à grand déploiement Le Paradis du Nord qui a été présenté de 2005 à 2011. Grâce à un financement de 25 000 $ de la MRC d’Abitibi-Ouest, la troupe se fera donc ce beau cadeau pour ses 40 chandelles. Le public pourra le visionner au cours de l’année 2022. Les thèmes abordés par le documentaire, réalisé par Jean Caron, seront le devoir de mémoire, la dimension humaine et Le Paradis du Nord comme levier identitaire, touristique et économique.
le 40e anniversaire. Elles incluront des témoignages de personnes ayant travaillé derrière ou devant la scène durant toutes ces années.
Pour bien démarrer les festivités, du 7 au 13 juin prochain, la troupe présentera 7 capsules web soulignant
La Troupe À Cœur ouvert a été fondée en 1982 par Gabriel Desjardins de La Sarre. La première présidente était
POUR DU CONTENU 100% RÉGIONAL
Au cours de l’été 2021, la troupe travaillera également sur une production qui sera présentée en août 2021 pour souligner son 40e anniversaire. Plusieurs artistes régionaux se joindront alors à la production. Il va sans dire que le spectacle se déroulera en respectant les consignes sanitaires qui seront en vigueur à ce moment. 40 ANS DE SPECTACLES
Au fil des ans, les activités de la troupe se sont déplacées à plusieurs reprises. Du Théâtre de Poche (Salle Liliane Perreault), à la salle des Chevaliers de Colomb, au Club de curling, à l’auditorium de La Cité étudiante Polyno (Salle Desjardins), au Colisée (Aréna Nicol Auto) ainsi que sur différentes scènes ailleurs dans la région. En 2003, la troupe s’est enracinée dans un lieu multifonctionnel où elle pouvait centraliser ses activités administratives, la préparation des productions et les répétitions. En 2008, pour assurer la relève dans le milieu, la troupe a fondé L’École des arts de la scène qui offre depuis des cours touchant les arts de la scène, les arts plastiques, la musique avec l’Harmonie séniore, la danse Cardio pour la mise en forme, etc. La Troupe À Cœur ouvert s’est aussi distinguée dans le milieu communautaire avec du théâtre interactif ou d’intervention sur certains sujets touchant le vivre-ensemble. On peut dire que cette troupe de théâtre a vraiment laissé sa marque dans l’histoire témiscabitibienne et nous leur souhaitons encore de nombreuses années à allumer des flammes dans nos yeux et nos cœurs!
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médiat.ca L’INDICE BOHÉMIEN JUIN 2021 17
Prix Partenariat : décerné par L’Indice bohémien à la Municipalité de Sainte-Germaine-Boulé
Allo, ami témiscabitibien!
J’me présente : je suis Sainte-Germaine-Boulé. Pour t’aider dans ta géographie, parce qu’on est quand même une grande région, je suis située dans le sud de la MRC d’Abitibi-Ouest. Le monde de chez nous disent souvent qu’on est quelque part à mi-chemin entre La Sarre et Rouyn-Noranda. Drette là où il faut que tu zigonnes avec le poste de ta radio de char pour te remettre sur la fréquence de Rouyn ou de La Sarre, selon le bord où tu t’en vas te promener. Mais, bien avant les histoires d’antennes de machin FM, il y a bientôt 90 ans de ça, j’ai vu le jour! Fondée grâce aux cœurs pleins de fierté et remplis d’espoir des pionniers arrivés de partout et à qui ça ne faisait pas peur de devoir se retrousser les manches. Quatre-vingt-dix ans déjà ou à peine (à toi de choisir)… C’est selon l’angle de ton point de vue, mais mes quelques tours de compteur sur l’horloge de l’existence des municipalités m’ont tout de même permis de voir passer passablement de monde et de modes de vie pour me donner une certaine vision panoramique de la patente. C’est vrai qu’il y a bien des gogosses qui ont changé et évolué, et se sont même tordues avec le temps, parfois pour le meilleur et d’autres pour le pire, comme dirait un bon curé de paroisse. La roue du rouet qui tourne, quoi!
Mais, au-delà des cossins apparents, y’a également des valeurs qui, elles, sont restées sensiblement pareilles, comme si elles avaient réussi ce tour de force de résister aux changements de la modernisation et de passer au travers des décennies. J’aimerais te parler de l’une d’entre elles qui est, encore aujourd’hui, bien présente chez les citoyens qui m’habitent : le goût du collectif, l’implication et la participation pour bâtir notre culture communautaire! Ça, j’en suis fière! Dans mon livre à moi, ce n’est rien de moins que notre âme. Ç’a beau être souvent invisible, tu peux la sentir cette énergie-là quand tu te promènes chez nous. La beauté de l’affaire ou la complexité de la patente à gosse, c’est que ça ne s’achète pas… même sur Amazon! Ça se construit plutôt au fil des ans et des générations, au travers des petites claques quotidiennes reçues, des fois dans le dos et d’autres fois dans la face, en se passant le flambeau de génération en génération. Quand une petite municipalité a encore ça en dedans d’elle, ça lui permet de pas lâcher le morceau, de se retrousser les manches comme à l’époque de nos pionniers et de continuer de se réaliser, de rester vivante comme communauté et de se tenir debout. Comme citoyen, c’est l’fun de pouvoir vivre dans un tel environnement et d’y participer à son tour. C’est pour ça que je suis vraiment fière du Prix d’excellence en arts et culture qu’on a reçu dernièrement. C’est mon nom qui est dessus, « Sainte-Germaine-Boulé », mais c’est tous ceux qui sont passés ici depuis ma fondation qui sont derrière ça. Bravo!
Il était une fois à Sainte-Germaine...
Le 15 avril dernier, j’étais ben relaxe. Le genre de veillée où tu te dis qu’il faudrait qu’on paye cher $$ pour te faire sortir. Quand tout à coup, KABOUM! C’est quoi ça? Y’a des bruits qui surgissent du village… Tracteurs, camions de pompier, klaxons de char et jeunesses sur leur vélo s’en donnaient à cœur joie. Un DÉFILÉ! On se reposera plus tard, enweille au village! Après tout, quand il y a battue au village, on doit y aller! C’était beau à voir aller en plus, ça respirait le bonheur et la fierté! Pas plus senteux qu’un autre, j’ai pris le temps d’aller m’informer de ce qui se passait. C’est là que j’ai appris que les miens venaient de mettre la main sur le Prix Partenariat d’excellence en arts et culture pour ses accomplissements dans la communauté. L’affaire qui est l’fun avec une belle récompense collective, c’est qu’on se la partage. Ça vient multiplier par mille l’effet de la victoire… Un peu comme le faisait
18 JUIN 2021 L’INDICE BOHÉMIEN
Mononc’ Jack avec ses bretelles… Quand tout le monde peut y toucher, avoir son boute et y participer, ben après, tu peux être certain d’avoir des bras avec toi pour déplacer des montagnes et même réussir l’impossible de pelleter des nuages pour mieux voir ton soleil. Avec cette belle reconnaissance-là du milieu, le défilé avec ma gang pis notre diplôme fraîchement reçu du Conseil de la culture de l’Abitibi-Témiscamingue, on m’a aussi dit que je devais écrire et me présenter dans les pages de ton journal dans un « publi-machin-truc ». Ça venait avec le prix… De quoi qui nous aiderait ou plutôt, une publicité qui pourrait te donner le goût à toi, ami lecteur témiscabitibien, de faire un détour pour venir nous voir et t’arrêter chez nous. Tout un défi pareil, t’en conviendras… Après m’être gratté pas mal la tête et avoir chiffonné trois ou quatre feuilles de papier, j’ai décidé de t’écrire personnellement pour t’inviter plutôt que d’essayer de jouer à l’agence de voyages avec toi. Ce n’est pas trop ma tasse de thé que d’essayer de te monter un bidule qui aurait ressemblé probablement davantage à un mauvais dépliant publicitaire qui veut essayer de te vendre sa dernière destination voyage. Si tu nous connais déjà, il y a de fortes chances que tu sois déjà venu nous voir pendant notre grosse fin de semaine du Festival du bœuf… C’te fin de semaine-là, y’a du monde au village. On start notre samedi matin avec un jogging collectif. Après l’effort collectif, ça relaxe un peu partout proche de l’aréna, les pieds sur un cooler. Ça jase et profite de l’après-midi en attendant de pouvoir manger comme des rois. Parce que leur souper de bœuf cuit sur la braise ne fait pas juste sentir bon mon ami, il est vraiment EXCELLENT! Tellement, qu’il y a même certains végétariens endurcis qui m’ont déjà glissé dans le creux de l’oreille qu’ils se donnent le droit de défroquer le temps du souper du Festival. Après t’être rempli la panse, tu vas même pouvoir sortir ton jeu de pieds des beaux jours et swinger avec le gros orchestre! Si, au contraire, on ne se connaît pas, ou même si on se connaît, je t’invite à profiter de ton été pour venir faire ton tour par chez nous! Le monde de la place aime ça la visite. Ils sont reconnus pour être légendaires, pas juste dans leurs histoires contées, mais aussi dans leur accueil des visiteurs. Loin de moi l’idée de vouloir profiter de notre Temple de la renommée pour nous péter les bretelles avec ça, mais sache qu’icitte, notre histoire, notre culture pis nos légendes, on en est bien fiers parce qu’ils ont été façonnés par notre monde, au fil des générations. Elles ne sont pas meilleures ni plus belles que celles des autres places, mais ce sont les nôtres, avec nos couleurs et notre saveur au travers de notre vécu, et tu ne les entendras pas ailleurs. Si tu veux qu’on te les raconte et apprendre à mieux me connaître, réserve ta place maintenant avec ta gang (cinq personnes) à bord de notre légendaire Pigeon mobile fraîchement électrifié pour un voyage guidé à l’intérieur de Sainte-Germaine-Boulé. Une balade guidée et contée de proche deux heures t’attend dans notre Sentier historique, culturel et légendaire (si la Santé publique le permet, évidemment). D’ici là, je te dis de faire attention à toi.
Sainte-Germaine-Boulé
À bientôt, mon ami!
Réserve ton tour!
819 787-6221, poste 42
mariotremblay7607@gmail.com Photo : la famille Pigeon et la Pigeon mobile.
– MUSIQUE –
ET ON DÉJEUNE : NOUVEAU GROUPE, DÉJÀ PLEIN DE PROJETS JOANNIE COTTEN
Le 17 avril, à Rouyn-Noranda, Et on déjeune nous a démontré tout le travail qu’un groupe de filles passionnées peut accomplir malgré les défis de la pandémie. Le fruit de leurs efforts a été présenté lors de deux représentations à l’Agora des Arts. Toutes originaires de la région, les cinq artistes de Et on déjeune ont uni leurs forces et commencé ce projet de groupe à la fin de l’été passé. Julie, Véro, Mélissa, Alix et Lou sont des musiciennes aux talents et aux carrières variés : actrice au théâtre, copropriétaire du « Cab », superviseure de mine, psychoéducatrice, en passant par DJ. Julie et Véro se sont connues enfants en faisant de la danse et les autres musiciennes se sont ajoutées au groupe dans les dernières années. Même si Mélissa était drummeuse au départ, elle voulait apprendre la guitare. Alix est donc la petite dernière à s’être jointe au projet pour s’occuper de la batterie!
Placer cinq voix et plusieurs instruments de musique sur une scène conçue pour le théâtre a été un gros défi technique! C’est aussi sans compter la scénographie : heureusement, elles ont eu un peu d’aide d’amis metteurs en scène, Julie Renaud et François Bédard.
CAROL-ANN LEBEL
Ce qui nous amène à leur premier contact avec « le monde » : leur sortie de résidence en avril dernier à l’Agora des Arts. La préparation de ce spectacle a nécessité beaucoup de travail. En plus du spectacle en soi, le groupe a dû s’occuper du son, des accessoires, de l’aménagement de l’ancienne église norandienne – qui est maintenant l’Agora – pour gérer la distanciation physique, etc. Les gens avaient hâte de voir ce que les filles avaient préparé; elles ont donc dû faire deux représentations dans la même journée! Le spectacle initial ainsi que la supplémentaire étaient suivis d’une période de questions pendant laquelle le public a pu interagir avec les artistes et transmettre ses commentaires.
Le groupe ne se limite pas à un seul projet, il enregistre présentement son premier microalbum (EP) de cinq titres au studio d’enregistrement de Sébastien Greffard : une cabane dans les bois avec électricité, perdue à Rapide-Danseur, surnommée la Shed! L’enregistrement a commencé en février dernier et les filles font de leur mieux pour trouver du temps dans leurs horaires chargés afin de continuer tranquillement le projet, travaillant parfois en petits groupes. Elles sont les cinq filles seulement à la réalisation de l’album.
les filles ont organisé une campagne de sociofinancement en février; en seulement 40 jours, elles ont réussi à amasser 11 000 $! Les objectifs de cette collecte de fonds sont variés : les dons serviront entre autres à l’enregistrement de l’album, à la réalisation d’un vidéoclip, à payer les inscriptions à des festivals et à des concours, à acheter de l’équipement manquant et à financer une formation en gestion de carrière musicale. Le groupe est agréablement surpris de toute l’aide qu’il a reçue : il faut croire que les gens de la région ont vraiment leurs artistes à cœur! Elles ont d’ailleurs déjà des contrats pour l’été : au DeuxParQuatre et au St-Exupéry, entre autres.
Comme il n’est pas toujours facile pour les artistes émergents de trouver du financement pour lancer un nouveau projet,
Côté processus créatif, étant incapables de se caser dans un style musical déjà existant, les artistes décrivent leur
style comme étant « œstro-prog-alt-indie »! Julie ayant déjà quelques chansons d’écrites, Mélissa y a ajouté ses riffs de guitare et les autres complètent le tout avec leurs instruments respectifs. La chanteuse dit avoir un faible pour les compositions Marco et The Spill, les décrivant comme des chansons qui se sont écrites toutes seules et qui demandaient seulement qu’on les laisse sortir. Leur liste de pistes est composée autant de chansons en anglais qu’en français, ce qui, je crois, ira chercher les émotions d’un maximum de gens. Pour rester au courant de tous les projets, vous pouvez visiter leur page Facebook Et on déjeune.
L’INDICE BOHÉMIEN JUIN 2021 19
Même vacciné, on doit se protéger.
20 JUIN 2021 L’INDICE BOHÉMIEN
Continuons d’appliquer les mesures sanitaires pour se protéger et protéger les autres.
L’INDICE BOHÉMIEN JUIN 2021 21
MARIE-RAPHAËLLE LEBLOND
SPÉCIAL PREMIÈRES NATIONS
22 JUIN 2021 L’INDICE BOHÉMIEN
SPÉCIAL PREMIÈRES NATIONS
– PREMIÈRES NATIONS –
RAPPROCHER LA CARTE DU TERRITOIRE ALEC WHITE
Alors que les étudiants de la région arrivent à la fin de leur année scolaire et que les citoyennes et citoyens de la région peuvent enfin souhaiter profiter d’un été « normal », l’École d’études autochtones de l’UQAT a tenu du 12 au 14 mai dernier son tout premier séminaire de cartographies autochtones. Organisé en collaboration avec les communautés anicinabek de Pikogan, Lac-Simon et de Kitcisakik, ainsi qu’avec le Conseil de la Nation Atikamekw Nehirowisiw, cet évènement en ligne avait pour but de rassembler et de diffuser des connaissances liées à la cartographie participative autochtone à différents acteurs et actrices de la région et du Québec. Quand vient le temps de produire une carte, il arrive qu’un écart se creuse entre l’arbitraire du tracé et la complexité du territoire délimité. En effet, portée par certains intérêts, la prétention d’une carte à délimiter et à nommer l’espace peut en venir à oblitérer les représentations que certaines populations se font de celle-ci. Dans le contexte colonial
abitibien et plus largement canadien, ce phénomène peut être contrecarré au moyen de la cartographie participative autochtone. En mettant au jour ces autres représentations, la cartographie participative prend soin d’intégrer les perspectives de personnes autochtones, qu’il s’agisse d’universitaires, de jeunes ou d’aînés issus de différents milieux. Offert en trois jours, le séminaire s’est divisé en quatre axes. Pour lancer l’évènement, le premier axe développé concernait l’enjeu de la négociation et de la protection des territoires ancestraux. Offert le jour même, le deuxième axe portait sur les différentes relations territoriales possibles, ainsi qu’à la manière dont la transmission des savoirs ancestraux s’y effectue. Au lendemain, la journée de séminaire a commencé par le troisième axe qui abordait la manière dont différentes représentations des cartes et différentes conceptions cartographiques jouent un rôle fondamental dans la fondation de récits et de mémoires chez les Autochtones.
Pour clôturer ce premier séminaire, le quatrième axe s’est concentré sur la toponymie, soit l’étude des noms attribués aux lieux. L’organisateur et professeur à l’UQAT Benoit Éthier s’est d’ailleurs réjoui de l’importante participation d’acteurs autochtones à ce séminaire. Selon lui, « il arrive trop souvent que la voix des Autochtones ne soit pas assez entendue ». Questionné à savoir si les personnes n’ayant pas été en mesure de suivre le séminaire pourront prendre connaissance de ce qui a été dit, Benoit Éthier confirme qu’un rapport synthèse des présentations, ainsi que des enregistrements audios de celles-ci devraient éventuellement être accessibles à toutes et à tous. Pour M. Éthier, le recours à de telles recherches participera, il le souhaite, à entretenir ce qu’il définit comme étant le « devoir de mémoire » à porter envers le territoire et les différentes représentations et sensibilités qui l’habitent.
L’INDICE BOHÉMIEN JUIN 2021 23
SPÉCIAL PREMIÈRES NATIONS
– PREMIÈRES NATIONS –
LE PROJET MINO AYAWI : ENCOURAGER LA BIENVEILLANCE GRÂCE AUX AINÉS HÉLÈNE JAGER
MELISSA ROBINSON-KING
Mino Ayawi, qui signifie être bienveillant en anishnabemowin, est le dernier projet en date de la communauté de Wolf Lake First Nation dans la mission dont est chargée Melissa Robinson-King. Nommée Healing and Wellness Worker, Melissa s’est attelée à sa mission au sein du Mahingan Sagahigan Health and Wellness Centre en octobre dernier. Mahingan Sagahigan signifie « Wolf Lake » en anishnabemowin. Le centre a déjà mené de nombreuses actions, mais l’un des axes prioritaires choisis est celui de la santé mentale et de la lutte contre l’intimidation au sein des jeunes de la communauté. La proximité avec la nature et son lien avec la culture ancestrale ont mené à la production de vidéos inspirantes tournées par Ed Regan et mettant en scène des membres de la communauté. Les vidéos mettent en valeur la transmission de génération en génération de qualités fortes comme la résilience et le bien-être à se trouver au milieu et en harmonie avec la nature. Les spectateurs sont donc
amenés à prendre conscience des difficultés que les générations ainées ont pu rencontrer, car si ces difficultés étaient différentes, elles n’étaient pas inexistantes. L’objectif premier de ce projet est de donner aux nouvelles générations un sentiment de responsabilisation (empowerment), la conscience de la force de leur culture et l’ouverture d’esprit nécessaire pour trouver l’élan d’être bienveillant les uns avec les autres. Les tournages se sont étalés au cours de deux mois et ont parfois été effectués à Hunter’s Point, un lieu phare pour la communauté de Wolf Lake qui n’a pas de territoire attitré. L’accueil des premières vidéos par la communauté a été très positif et salué par des retours chaleureux et des encouragements. Il est maintenant prévu de faire un film plus long pour illustrer les migrations que la communauté a dû faire depuis Wolf Lake – d’où elle tire son nom – en passant par Hunter’s Point et les mouvements suivants jusqu’à
21 JUIN JOURNÉE NATIONALE DES PEUPLES AUTOCHTONES Cette journée est définie par une célébration officielle qui vise à reconnaître les contributions inestimables des Premières nations. Cette journée est le moment de s’arrêter et reconnaître la richesse insoupçonnée que ces peuples autochtones nous ont léguée. Nous devons leur concéder une juste place qui leur revient et nous unir pour un avenir prometteur dans le respect de chacun. Bonne journée nationale des peuples autochtones ! SYLVIE BÉRUBÉ Députée d’Abitibi-Baie-James-Nunavik-Eeyou Porte-parole des affaires autochtones | Chambre des communes 819 824-2942
24 JUIN 2021 L’INDICE BOHÉMIEN
MELISSA ROBINSON-KING
SPÉCIAL PREMIÈRES NATIONS
DES PROJETS RASSEMBLEURS Parmi les autres actions engagées par Melissa Robinson-King, il y a des rassemblements bimensuels pour les plus jeunes, des séances autour du thème de l’autonomisation (selfempowerment) et la création d’une communauté virtuelle qui rassemble les membres de Wolf Lake First Nation dispersés aux États-Unis et à North Bay en Ontario. Une nouvelle manière de se rencontrer et de se mettre en contact afin de remplacer les rassemblements physiques! De plus,
des actions très concrètes comme des chasses au trésor sont organisées. On souhaite principalement inciter les jeunes à se retrouver à l’extérieur et à participer à des activités de plein air qui vont alimenter leur confiance et leur santé mentale. Melissa a déjà réussi à rassembler autour de ses actions de nombreux membres et se sent reconnaissante de toute l’aide dont elle a pu bénéficier jusqu’ici, depuis le Algonquin Tribal Council qui a apporté le financement pour les vidéos, en passant par les personnes apparaissant dans les vidéos : Noella et Gerald Robinson, Dave et Jim Saint-Denis et Julia Coleman. Le souhait de Melissa est de voir ses pairs heureux, bienveillants, respectueux, se sentant en sécurité et à l’aise avec leur identité grâce à ces petites marches gravies les unes après les autres, tout en continuant de soutenir les jeunes.
ED REGAN
aujourd’hui. L’objectif prioritaire est d’inspirer les membres de la communauté de Wolf Lake, et plus particulièrement les jeunes, à se mettre en relation, à prendre confiance en leur culture et en leur héritage et à retrouver un sentiment de puissance et de responsabilité.
L’INDICE BOHÉMIEN JUIN 2021 25
SPÉCIAL PREMIÈRES NATIONS
– PREMIÈRES NATIONS –
DES POSTES D’AGENTS DE DÉVELOPPEMENT CULTUREL POUR LES COMMUNAUTÉS ANICINABEK AMÉLIE BRASSARD
Pour les gens qui ne sont pas familiers, il est difficile de comprendre la place prépondérante occupée par la culture au sein des communautés anicinabek. En fait, on la retrouve partout puisqu’elle se vit au quotidien : c’est une façon de vivre, de penser et d’agir. En ce sens, les secteurs de la santé et de l’éducation sont très actifs. Par exemple, en santé, beaucoup de culture est utilisée en lien avec la parentalité, la guérison et la santé mentale. En éducation, il n’y a pas de centre de services scolaire, c’est-à-dire que chaque communauté est libre d’élaborer son programme avec les conditions de diplomation québécoise. On voit alors fleurir des cours d’anicinabemowin, des sorties scolaires qui soutiennent des activités traditionnelles (chasse, trappage, pêche, raquette, canot, ateliers d’artisanat, etc.), des classes avec des aînés, des classes de plein air, etc. Tout cela est incorporé dans un programme scolaire bien ficelé et équilibré entre l’enseignement traditionnel et contemporain.
Riche de grands espaces, de vastes étendues d’eau et de forêts verdoyantes, l’Abitibi-Témiscamingue est « gâtée par la nature ». À toi d’en profiter. Cet été, planifie tes vacances dans ta région!
26 JUIN 2021 L’INDICE BOHÉMIEN
UN PROJET PILOTE Depuis l’année 2018-2019, le ministère de la Culture et des Communications (MCC) a élaboré un projet pilote qui s’est concrétisé en une entente triennale dès 2019 pour embaucher et former des agents de développement culturels autochtones dans chaque communauté du Québec. En ce moment sur le territoire de l’Abitibi-Témiscamingue, les communautés de Kebaowek, Wolf Lake, Lac-Simon et Long Point bénéficient de ce programme.
MARIE-RAPHAËLLE LEBLOND
MARIE-RAPHAËLLE LEBLOND
On peut également remarquer le dynamisme des communautés anicinabek par l’organisation d’événements culturels tels que les pow-wow, les semaines ou les journées culturelles, la tenue de festivités pour la Journée nationale des autochtones, etc. De plus, les organisations culturelles comme la radio ainsi que les artistes s’assurent de produire, de développer et de diffuser la culture. Mais la réalité actuelle est qu’en plus d’en faire la mise en valeur, il faut aussi trouver des solutions afin de la sauvegarder.
SPÉCIAL PREMIÈRES NATIONS
LE MANDAT Le mandat premier de l’agent de développement culturel est de s’informer de tout ce qui se passe en matière de culture dans sa communauté. De plus, cette personne doit se tenir au courant de ce qui se passe en culture ailleurs, dans les autres communautés anicinabek et même à l’échelle régionale. Elle a la responsabilité de bâtir un plan culturel pour la communauté. En d’autres mots, elle s’assure que des projets voient le jour, qu’ils aient des suivis et surtout qu’ils soient déterminés en fonction des priorités de la communauté. LES IMPACTS Il y a une dizaine d’années, le MCC avait instauré un projet similaire pour les municipalités en créant des postes d’agents de développement pour le patrimoine. Les répercussions avaient été importantes puisque les milieux avaient compris l’importance d’une telle personne-ressource et cela avait contribué à la pérennisation d’un tel poste à l’échelle municipale.
« Faire de la télé ça me tente parce que... J’aime les interactions avec les autres joueurs et ça me permet de partager une de mes passions avec plein de gens. »
Alex Proteau Les brumes de Kad-Eliac
MARIE-RAPHAËLLE LEBLOND
Aujourd’hui, que des personnes anicinabek soient appelées à travailler sur les projets culturels de leur communauté est porteur d’un avenir prometteur. Pour la nation anicinabe, le fait d’avoir plusieurs agents de développement culturel pourra permettre de créer des échanges positifs entre les communautés tout en créant une boîte à outils en gestion de projets adaptée au milieu. Minwashin, un organisme culturel anicinabe, offrira une expertise à cette table de travail, d’échanges et de partages.
L’INDICE BOHÉMIEN JUIN 2021 27
SPÉCIAL PREMIÈRES NATIONS
– PREMIÈRES NATIONS –
VULGARISER SCIENTIFIQUEMENT GRÂCE À LA CULTURE JADE BOURGEOIS
Dans le but de trouver une façon ludique de présenter et d’expliquer les enjeux liés à la gestion des matières résiduelles (GMR), Isabelle Brûlé, géographe et maître en environnement, conseillère en environnement pour la communauté de Long Point First Nation, a décidé de créer une bande dessinée de vulgarisation scientifique destinée tout spécialement aux membres de la communauté. Ce projet a été réalisé en collaboration avec Martin Patenaude-Monette, bédéiste, Émilie Hébert-Houle, collègue géographe de Mme Brûlé, ainsi qu’avec l’un des aînés de la communauté.
Ce projet a été créé à la suite de la construction d’un écocentre et de la mise sur pied d’un système de tri des déchets dans la communauté de Long Point il y a deux ans. Ce changement a en effet nécessité la conception d’une campagne d’information, de sensibilisation et
COURTOISIE
« Le but de cette bande dessinée est que les gens de Long Point se sentent concernés par les enjeux liés à la gestion des matières résiduelles grâce à une BD qui leur ressemble. On voulait prendre des situations de la vie quotidienne de la communauté et les mettre en relation avec certains enjeux environnementaux. Les personnages et les lieux ont des traits anicinabek intéressants, selon moi, pour joindre notre public cible : les membres de Long Point », affirme Isabelle Brûlé. D’ailleurs, dans l’optique de rejoindre le plus grand nombre et de valoriser la culture anicinabe, l’ouvrage a été traduit en trois langues : français, anglais et anicinabe.
d’éducation pour expliquer les raisons d’un tel projet et renforcer les bonnes pratiques de GMR à la maison. La bande dessinée traite d’une foule de sujets, comme l’importance du tri des matières résiduelles à la maison; la connaissance du cycle de vie d’un déchet, d’une matière recyclable ou d’une matière dangereuse; l’importance de protéger la terre mère et de participer à la propreté du territoire, etc. Les lectrices et lecteurs de tous les âges trouveront leur compte dans cette bande dessinée. En effet, toutes les petites parties de la BD sont simples et ludiques pour joindre un public plus jeune, tout en étant accompagnées d’un texte explicatif qui détaille l’enjeu.
COURTOISIE
Bien que la bande dessinée complète ne soit pas encore sortie – conséquence de la pandémie – certains feuillets ont été distribués à la population au courant de la dernière année. Bonne nouvelle : on peut s’attendre à un lancement officiel des trois versions de la bande dessinée en juin!
28 JUIN 2021 L’INDICE BOHÉMIEN
SPÉCIAL PREMIÈRES NATIONS
– PREMIÈRES NATIONS –
TERRITOIRE DE RENCONTRES : GARDER DES TRACES JADE BOURGEOIS
AMY KISTABISH-JEROME
AMY KISTABISH-JEROME
Le projet Territoire de rencontres vise à créer des occasions d’échange entre les membres des communautés des Premières Nations puis à les documenter. L’idée du projet a émergé d’une rencontre entre un jeune Inuk et un aîné qui ont été rassemblés en 2017 lors d’un tournage documentaire sur un site historique sacré en territoire. N’ayant jamais été mis en relation auparavant autour d’un projet commun, ils ont découvert le fort potentiel de leurs échanges et l’importance de les transmettre avec leur communauté.
Selon la coordonnatrice de Territoire de rencontres, Marilyne Soucy, de l’organisation sans but lucratif la Boîte Rouge VIF, « chaque fois qu’un aîné disparaît, c’est une bibliothèque de savoirs qui disparaît ». Territoire de rencontres est donc né d’un besoin du milieu de conserver la culture, les pratiques et les savoirs traditionnels grâce, entre autres, à des échanges intergénérationnels. Pour ce faire, des porteuses et porteurs culturels issus des Premiers Peuples sont choisis pour participer à une formation sur la captation vidéo et la réalisation d’entrevues. Ensuite, les vidéos filmées par les participantes et participants lors de ces rencontres servent à inspirer l’œuvre d’une ou d’un artiste local. En Abitibi-Témiscamingue, ce sont Amy Kistabish-Jerome, de Pikogan, et Andrée-Ann Monforton de Kebaowek – une jeune participante de 10 ans! – qui ont été recrutées avec l’aide de Minwashin pour être les porteuses culturelles de cet ambitieux projet.
En plus de promouvoir et d’archiver des pans importants de la culture anicinabe, Territoire de rencontres est une expérience très enrichissante pour les participantes et participants et les personnes qui sont interviewées. Amy Kistabish-Jerome a adoré son expérience et a hâte de diffuser ses vidéos pour que plus de jeunes en profitent. Elle a eu le bonheur de profiter du projet pour interviewer des membres de sa famille : « C’est important de documenter leurs savoirs pour quand ils vont être partis. Avant, le savoir se transmettait grâce au bouche-à-oreille. Maintenant, la technologie nous permet de garder des traces. Moi, ça m’a permis d’aller dans le bois, d’apprendre sur le territoire et l’histoire de ma famille. J’ai appris à dépecer un lièvre, à déplumer, arranger et faire cuire une oie! » Les sujets sont multiples : il peut s’agir par exemple de faire une entrevue avec un aîné ou une aînée qui raconte une histoire ou une anecdote, filmer une artisane qui fait des mocassins, filmer un chasseur qui « arrange » son gibier tout en l’expliquant en anicinabe, etc. Selon Mme Soucy, lorsque l’on est prêts à filmer à tout moment grâce à de l’équipement simple et bien utilisé, les seules limites sont celles que l’on s’impose. D’ailleurs, l’une des participantes a pu capter la touchante vigie en l’honneur de Joyce Echaquan l’année dernière. Bien que ce ne soit pas le sujet habituel du projet, c’est un moment important qui doit être conservé et transmis. Le projet Territoire de rencontres n’est pas près de se terminer. Des porteuses et porteurs culturels seront bientôt recrutés dans d’autres communautés anicinabek de la région.
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30 JUIN 2021 L’INDICE BOHÉMIEN
– CINÉMA –
ANICINABE : UN FILM QUI ÉCOUTE MARINE CLÉMENT-COLSON
Prendre le temps de s’asseoir. Écouter. Retrouver les souvenirs, réveiller les mémoires. Écouter, enfin, une communauté qui a trop longtemps été oubliée. C’est d’une genèse attentive qu’est né le documentaire Anicinabe, là où les eaux se rencontrent. « Au-delà de la démarche cinématographique, il y avait surtout une démarche sociale », explique la réalisatrice, Sophie Chaffaut. Toutes les entrevues du film se sont déroulées lentement, comme de longues discussions autour d’un feu. C’était primordial pour toute l’équipe du film que les intervenants qui avaient accepté de se livrer devant la caméra puissent le faire dans un contexte très intime. C’est dans cette optique que la réalisatrice s’est entourée de Geneviève-Marie Le Gresley et Meggan Mathias-Cossette, étudiantes en travail social. Ensemble, elles forment un trio franco-québécois-anicinabe, mais surtout, une équipe de production à l’approche très humaine.
Avant d’ouvrir les caméras sur le tournage, elles s’installaient avec leurs intervenants. Discutaient, rassuraient aussi. Car derrière des entrevues si personnelles se cache un grand travail de mise en confiance. Le film, elles ne le voulaient pas misérabiliste, mais simplement vrai. Avec la vérité belle et la vérité qui fait mal, mais à la différence que cette fois, ce sont les Premières Nations qui témoignent de leurs savoirs, de leur version de l’histoire. De ce doux procédé ont émergé des entrevues si puissantes que certaines ont eu un effet cathartique sur les humains qui ont témoigné. Leur permettant de libérer des histoires qui n’étaient jamais, ou presque, sorties de leurs maisons.
du film, un jeune Montréalais stagiaire dans la communauté autochtone de Kitcisakik. Cette citation, elle est le moteur derrière le besoin essentiel de créer ce film. Dès les premières étapes de la création, le documentaire portait la mission d’être un outil pédagogique. Car les réalisatrices sont d’avis que c’est en se rapprochant des communautés autochtones, et surtout en les écoutant, que nous améliorerons les relations entre allochtones et autochtones. Écouter pour se souvenir. Écouter pour apprendre.
VOCATION ÉDUCATIVE « Ils sont tellement oubliés dans notre société, qu’on ne sait même pas qu’ils existent. […] Tout ce qu’on connaît, ce sont les stéréotypes véhiculés par la société », témoigne, à la fin
Anicinabe, qui a d’abord été diffusé à Rouyn-Noranda en 2017, est maintenant accessible à tous en ligne depuis le printemps 2021 sur la chaîne YouTube de Sophie C.
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– ENVIRONNEMENT –
LE CARIBOU, C’EST NOUS – ATIK U, TSHINANU AU!
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32 JUIN 2021 L’INDICE BOHÉMIEN
J’ai eu la chance de vivre une partie de ma vie dans l’intérieur des terres du Nitassinan. C’est donc entre le 117e et le 173e mile au nord de Sept-Îles et à Tshemanipishtiku (Sainte-Marguerite 3) que j’ai vécu mon enfance et appris de nos aînés. Nos parents et nos grands-parents ont toujours valorisé et assuré la transmission de notre langue, de notre culture et de nos traditions innues. Leurs enseignements et leurs savoir-faire m’ont fait constater à quel point le caribou, « atiku » dans ma langue maternelle, occupait une place importante dans notre culture et que le lien que nous avons avec lui est sacré. Le déclin des hardes, dû entre autres à la déforestation ainsi qu’aux perturbations de l’habitat du caribou par les compagnies minières, dans les dernières dizaines d’années a forcé la mise en place de mesures dérisoires afin de protéger l’espèce. En effet, ça fait déjà quelques années que nous diminuons considérablement notre chasse dans le but de protéger le caribou de la rivière Georges. De l’autre côté, le gouvernement et son ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs et celui de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques ne font rien pour garantir la survie du cheptel. Tout le fardeau est sur nos épaules, comme si le déclin du caribou était de notre faute et que d’arrêter de le chasser était la solution. Comme si on n’avait pas su, pendant des milliers d’années, comment chasser et respecter atiku. La baisse des populations du caribou a des effets considérables dans nos vies d’aujourd’hui. La viande, qui se fait de plus en plus rare, est désormais parfois vendue – ce qui était anciennement impensable considérant nos valeurs de partage. La répartition des quelques individus à chasser provoque d’importants différends entre les Premières Nations. Par conséquent, c’est non seulement notre culture et nos traditions qui écopent du déclin du caribou, mais nos valeurs
ANDRÉANNE LORD
LAURA FONTAINE
changent aussi en raison du colonialisme. Mon grandpère, un Innu de Matimekush (Schefferville), me disait « sois toujours fière de ta culture, de ta langue et de ton identité innues », mais comment voulez-vous que plus tard, je puisse en être fière si atiku, lui en qui s’enracine notre identité, disparaît? Ça voudra dire que je n’en ai plus, d’identité. Je ne pense pas que j’ai besoin de vous dire qu’enlever l’identité à un peuple c’est aussi faire en sorte que l’assimilation de celui-ci persiste. Ce que je vous raconte n’est pas unique à mon territoire ancestral. Le caribou devrait pouvoir continuer d’être maître partout dans la forêt boréale, dans la toundra et dans les montagnes. Que ce soit sur le Nitassinan ou sur le territoire anicinabe, l’inaction du gouvernement concernant le caribou est raciste et ses ministères devraient se conscientiser sur le génocide culturel qu’ils sont en train d’infliger une fois de plus aux prochaines générations de nos peuples.
Envie de contribuer à la protec�on de l’environnement? Devenez membre !
– CINÉMA –
SOUTERRAIN : UN HOMMAGE REMARQUABLE ET TOUCHANT JADE BOURGEOIS
Bien que l’intrigue de Souterrain soit très différente de celle de Chien de garde, son premier long-métrage, Sophie Dupuis a pris conscience lors de la réalisation que des thèmes étaient similaires dans les deux histoires : « J’étais en train de faire un deuxième film sur la famille et la responsabilité de l’autre. De ne pas pouvoir faire des choix de vie parce qu’on en doit une à quelqu’un. » Concernant le rapport à la masculinité, le milieu des mines était tout indiqué pour couvrir cette thématique. La camaraderie qu’on y retrouve chez ces durs à cuire au cœur tendre est inimitable. C’est d’ailleurs dans cette ambiance de fraternité que le personnage principal, Maxime, revoit sa définition de ce que ça signifie être un homme, tout en trouvant le soutien nécessaire pour affronter les difficultés de sa vie.
BABAS LEVRAI
Sophie Dupuis est descendue plusieurs fois sous terre pour faire sa recherche et écrire le scénario. Elle a rapidement compris que le sujet du film ne serait pas la mine en soi, mais plutôt les personnes qui y travaillent et ce qu’elles vivent au quotidien : « La mine, c’est un contexte et un mode de vie. Le sujet est devenu autre chose, soit le rapport à la
masculinité, à la fraternité qui unit les mineurs, au sentiment d’appartenance à ses collègues. »
UNE HISTOIRE DE CHEZ NOUS J’ai eu le bonheur d’assister à une projection réservée aux médias en septembre 2020, juste avant la fermeture des cinémas. C’est rare qu’on ait la chance de voir notre ville, nos vies, à l’écran. Tout au long de Souterrain, j’ai ressenti un grand sentiment d’appartenance et beaucoup d’affection envers le lieu et les personnages. La crémerie locale dans une scène, un restaurant où j’ai travaillé dans une autre, une journée de congé sur le lac, etc. Difficile de ne pas se projeter en plein dans l’histoire lorsque l’on est originaire de Val-d’Or ou d’une autre ville minière.
BABAS LEVRAI
Après plusieurs reports, Souterrain, le plus récent film de Sophie Dupuis, sortira enfin en salles le 4 juin prochain. Campé à Val-d’Or, ce deuxième long-métrage de la réalisatrice valdorienne est un hommage aux mineurs et à la façon de vivre des gens d’ici. Cette sortie soulage Sophie Dupuis, qui a hâte que son œuvre soit diffusée : « C’est un moment tellement riche pour un cinéaste de savoir ce qui a touché le public, ce qui l’a bouleversé. Ça me manque beaucoup! On fait des films pour qu’ils soient vus. Souterrain n’a pas eu de vie encore et ça ne fait pas de sens parce qu’il existe depuis déjà deux ans. »
Cette sensibilité au film se fait encore plus sentir au milieu de l’action du sauvetage minier, qui est au cœur de l’intrigue. On pense à nos cousins, nos frères et nos pères. Le suspense est incroyable, difficile. Les prises de vue dans les tunnels de la mine sont oppressantes, mais magnifiques. Le tout est si réaliste, grâce entre autres aux performances des acteurs et à la qualité du son, qu’on sent l’humidité, le froid et la tension! Il était important pour la réalisatrice de mettre en lumière toute la passion, l’effort et le sérieux des mineurs qui s’impliquent dans la pratique du sauvetage minier. Pour que le public comprenne à quel point ça peut être angoissant, il était aussi nécessaire de le montrer en tournant un film d’action. L’INDICE BOHÉMIEN JUIN 2021 33
34 JUIN 2021 L’INDICE BOHÉMIEN
– EN BREF –
ODEIMEN : INTÉGRER LES ARTS ET LA CULTURE ANICINABE DANS LES ÉTABLISSEMENTS DE SANTÉ DU CISSSAT LA RÉDACTION
L’organisme culturel anicinabe Minwashin s’associe avec le Centre intégré de santé et de services sociaux de l’Abitibi-Témiscamingue (CISSSAT) et Tourisme Abitibi-Témiscamingue à travers sa démarche Culturat, pour lancer le projet Odeimen, qui intègrera les arts et la culture anicinabe dans huit établissements de soins de santé de la région. En langue anicinabe, le mot « odeimen » découle d’une légende. Il désigne la fraise, mais aussi les soigneurs et les guérisseurs. « La mort de Joyce Echaquan nous a tous bouleversés, confie Richard Kistabish, président de Minwashin. Elle a réveillé l’urgence de travailler avec le système de santé pour que les membres des communautés puissent s’y référer sans crainte. Un projet comme celui-ci est une opportunité de présenter les œuvres de nos artistes à la population régionale, de
SUIVEZ-NOUS !
les faire connaître et rayonner. Mais c’est surtout une ouverture pour la culture anicinabe dans les établissements de santé. » Les artistes issus des Premières Nations originaires de la région sont appelés à répondre à un appel d’offres. Celles ou ceux qui seront choisis devront créer chacun une œuvre qui sera affichée dans l’un des établissements du CISSSAT. « Ce projet va bien au-delà de l’art. C’est une opportunité de rapprochement, de dialogue, de partage qui pourra se traduire de multiples façons, avec une ouverture de part et d’autre, en se laissant guider par les besoins exprimés », affirme Caroline Roy, présidente-directrice générale du CISSSAT. Cette démarche sera aussi documentée par Marie-Pierre Renaud, étudiante au doctorat en études autochtones à l’UQAT, dont la recherche porte sur la sécurisation culturelle.
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36 JUIN 2021 L’INDICE BOHÉMIEN
– MA RÉGION, J’EN MANGE –
STEAK AU CAFÉ ÉPICÉ ET SAUCE TERIYAKI ÉRIC « MO » MORISSETTE
Bonne Fête nationale du Québec !
Qu’elle se partage et se bonifie parce qu’il n’existe pas de meilleure façon de vivre le Québec en liberté et ensemble « Tissé serré ». Un peuple québécois fier et attentionné de son prochain !
UNSPLASH
Après plus d’un an de confinement, nous reconnaissons, plus que jamais la force des Québécois et des Québécoises, notre fierté et notre appartenance en cette culture qui nous est propre.
INGRÉDIENTS 2 Au goût Au goût Quantité suffisante Quantité suffisante
Steak de côte de bœuf Gros sel Épices jalapenos Café moulu de votre choix Sauce teriyaki régionale
MÉTHODE
SYLVIE BÉRUBÉ
Députée d’Abitibi-Baie-James-Nunavik-Eeyou 819 824-2942 | deputee.sylvieberube.info
SÉBASTIEN LEMIRE
Député d’Abitibi-Témiscamingue 1 800 567-6433 | lemire.info
Saupoudrer les steaks de gros sel et les laisser reposer quelques minutes. Assaisonner les steaks d’épices jalapenos selon votre tolérance! Puis, à la grande surprise de tous, sortez vos grains de café préférés et une fois moulus, étendre une belle couche sur les steaks. Oui, c’est surprenant, mais attendez d’y goûter. Griller la viande sur le barbecue selon votre goût et laisser ensuite reposer le steak 5 minutes sous un papier d’aluminium. Trancher et servir. SUGGESTION DU GRILLARDIN Ajouter un filet de sauce teriyaki régionale préalablement réchauffée.
L’INDICE BOHÉMIEN JUIN 2021 37
– EN BREF –
UNE 17 E ÉDITION AUTOMNALE POUR LE FESTIVAL DES GUITARES DU MONDE LA RÉDACTION
Le 17e Festival des Guitares du Monde en Abitibi-Témiscamingue (FGMAT) aura lieu du 1er au 9 octobre prochain à Rouyn-Noranda. L’organisation a déjà confirmé la présence de l’as guitariste montréalais Jordan Officer pour la soirée du samedi 9 octobre.
L’organisation a dû s’adapter à cette année toute spéciale pour réussir à mettre sur pied l’événement et permettre à des artistes et à des techniciens de travailler. D’ailleurs, en plus de se dérouler comme d’habitude au Petit Théâtre du Vieux-Noranda, une partie de la programmation sera présentée pour la première fois au Théâtre du Cuivre. Le comité organisateur assure que rien ne sera laissé au hasard pour préserver le caractère unique du festival et la qualité des spectacles, malgré une formule un peu différente. C’est aussi une présence automnale exceptionnelle pour le FGMAT qui reviendra à sa case horaire habituelle en mai 2022.
38 JUIN 2021 L’INDICE BOHÉMIEN
COURTOISIE
« On avait vraiment hâte de pouvoir annoncer la venue de Jordan Officer. Sa visite était prévue l’an dernier, mais nous n’avons pas pu l’annoncer en raison de l’annulation de l’événement. Sa dernière visite au Festival remonte en 2011… ça fait 10 ans déjà! Notre équipe est fébrile de retrouver les festivaliers et très heureuse de pouvoir vous annoncer un premier spectacle », souligne Jean Royal, président du Festival.
Jordan Officer, premier artiste confirmé du Festival.
CALENDRIER CULTUREL CONSEIL DE LA CULTURE DE L’ABITIBI-TÉMISCAMINGUE
En raison des mesures annoncées par le gouvernement concernant la COVID-19, il se peut que certains des spectacles en présentiel du calendrier soient annulés. Veuillez vous référer directement aux diffuseurs pour les renseignements les plus à jour.
HUMOUR
CINÉMA
CONTE
Noir – Mike Ward 1er juin, Théâtre du cuivre (RN) 2 juin, Le Rift (Ville-Marie) 4 juin, Théâtre Télébec (VO) 5 juin, Salle de spectacles Desjardins (La Sarre) 6 juin, Théâtre des Eskers (Amos)
Demain : Un nouveau monde en marche 26 mai, Théâtre Lilianne-Perrault (La Sarre)
Le vilain petit canard – Conte sensoriel 29 mai, en ligne
EXPOSITIONS
Contes en balade – La naissance d’une petite étoile Jusqu’au 31 mai, en baladodiffusion
Les maîtres du monde sont des gens – Clément de Gaulejac Jusqu’au 30 mai, L’Écart (RN)
DIVERS
Fragments d’humanité. Archéologie du Québec Jusqu’au 6 juin, Centre d’exposition d’Amos
Dessin de modèle vivant 13 févr. au 5 juin, MA Musée d’art (RN)
Folie d’artiste Jusqu’au 6 juin, Centre d’exposition d’Amos
Atelier libre 12 févr. au 11 juin, MA Musée d’art (RN)
MUSIQUE 4 Gars, 4 micros, 2 mètres – QW4RTZ 26 mai, Théâtre du cuivre (RN) 27 mai, Salle de spectacles Desjardins (La Sarre) 28 mai, Le Rift (Ville-Marie) Pixel d’étoile – Océanne 29 mai, Théâtre du cuivre (RN) 30 mai, Théâtre Télébec (VO) 31 mai, 27 mai, Salle de spectacles Desjardins (La Sarre)
Colorier, colorer, couleurer Jusqu’au 13 juin, Centre d’exposition de Val-d’Or Le castor – Michel Villeneuve 19 juin au 6 septembre, Fort-Témiscamingue
Joseph Edgar 4 juin, Le Rift (Ville-Marie) 5 juin, le QG (RN)
Pour qu’il soit fait mention de votre événement dans la prochaine édition de L’Indice bohémien, vous devez l’inscrire vous-même, avant le 20 de chaque mois, à partir du site Web du CCAT au ccat.qc.ca/soumettre-evenement.php. L’Indice bohémien n’est pas responsable des erreurs ou des omissions d’inscription.
L’INDICE BOHÉMIEN JUIN 2021 39
La vaccination nous rapproche de ce moment. Suivez la séquence de vaccination prévue dans votre région et prenez votre rendez-vous en ligne à
Québec.ca/vaccinCOVID
40 JUIN 2021 L’INDICE BOHÉMIEN