NOURRIA NEWMAN I KAYAK
t n f i a t r a u n Co alter NE VOUS FIEZ PAS À SA VOIX FLUETTE ET SON PETIT GABARIT, PRESQUE TIMIDE SOUS SA CASQUETTE : NOURIA NEWMAN EST UN CONCENTRÉ DE DÉTERMINATION ET DE TÉMÉRITÉ. LA PEUR SEMBLE GLISSER SUR ELLE COMME L’EAU SUR LES PLUMES D’UN CANARD… OU SUR LA COMBI NÉOPRÈNE D’UNE KAYAKISTE EXTRÊME. PAR MÉLANIE MARULLAZ
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a frousse, la trouille, la pétoche, le trac ? Connaît pas. Nouria aborde les remous tranquilou, prend des bouillons comme d’autres des infusions, depuis qu’elle a 5 ans, elle est dans son élément au cœur des torrents. Elle a grandi au bord du Lac du Chevril, à côté de Tignes, et c’est devant le bateau d’un ami de la famille qu’elle écarquille les yeux la 1re fois. Il est bleu et jaune comme sa voiture Playmobil® qu’elle adore. Mais interdiction d’y monter, elle ne sait pas nager. En quelques leçons, c’est réglé. “Quand je suis arrivée avec mon certificat, mon père s’est senti obligé de m’emmener.” Rapidement elle contre-gîte, dessale et esquimaute en club, sur le bassin international de Bourg St Maurice, La Mecque du kayak, et se retrouve, sans y avoir trop réfléchi, en compétition. “Pour moi, c’était Noël, tu partais en week-end avec les copains et tu ramenais des cadeaux à la maison, des paniers de bonbons, des bananes Crédit
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Agricole et des coupes en plastique fluo. L’idée de perf’, de progression, est arrivée plus tard. Mais j’ai l’impression que tu ne la voies pas venir : à 9 ans, tu fais tes courses comme ça et 10 ans plus tard tu es sur les circuits mondiaux. Ce n’est pas comme si tu avais fait un choix, en te disant : « je veux devenir champion ». C’est plutôt un travail de longue haleine, on te construit des objectifs, d’ailleurs ce ne sont pas toujours vraiment les tiens. Mais moi, ça me correspondait.”
LIBRE COMME L’EAU En ayant commencé si tôt, Nouria finit par tourner en rond sur le circuit traditionnel. Heureusement, au détour d’une démo de freestyle - figures acrobatiques avec un kayak plus court et plus large - , elle croise Nicolas Chassing, star locale de la discipline, qui convainc son père de l’inscrire à son 1er contest. A l’adolescence, elle pagaie donc à la fois en championnat du monde de Freestyle et championnat de France de slalom. “Ce n’était pas très bien vu, il y avait des a-priori des deux côtés, comme en ski : ceux considérés comme psycho-rigides contre ceux qui ont une image de branleurs. Mais moi, je n’avais pas du tout envie de choisir. Du coup, pendant très longtemps, j’ai été vue comme la rebelle. Le problème, c’est que quand tu arrives avec cette étiquette-là, tu te fais un peu latter par les entraîneurs nationaux, et comme je ne me laissais pas faire… Finalement pour convaincre, ce qui marche le mieux dans ces cas-là, ce sont les résultats.” A 17 ans, elle décroche le titre de championne du monde de Freestyle, quelques années plus tard, c’est en slalom qu’elle monte sur la 2e marche du podium mondial, avant de dominer, de 2014 à 2017, les compétitions de kayak extrême. Ce que Nouria veut, Nouria l’atteint.