Sparse 35 (Sept. 2021)

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sparse magazine mieux

Bitcoin, guinguettes, gros camions, charbon, amiante, anthropocène, naturisme... 80 pages de sang-froid en temps d’hystérie collective.

sparse | numéro 35 | trimestriel

juin. juil. aoû. 2021 • www.sparse.fr

GRATUIT • BOURGOGNE-FRANCHE-COMTÉ

Imprimé à énormément d’exemplaires À lire aux cabinets


musees.dijon.fr


édito. « Quand l’hystérie s’empare d’une société qui a perdu ses repères, je reviens aux fondamentaux de paix : Sparse. Solide sur les appuis. Gratos et en équipe. Sans se prendre au sérieux. Je le lis aux cabinets. Ça me calme, ça me fait relativiser tout en apprenant et en me bidonnant. Je peux enfin observer ce monde d’un point de vue à hauteur d’homme, genre 1m69. Et je dois bien avouer que c’est pratique quand il n’y a plus de papier. » Emmanuel Kant, août 2021.

Par Chablis Winston Photo : Mathilde Leconte


sommaire ours

3. ÉDITO

Ce magazine est édité par Sparse Média. Siret : 750 725 806 00038 - APE : 5814Z www.sparse.fr - contact@sparse.fr media.sparse.fr - boutique.sparse.fr

8. BD

DIRECTEUR DE PUBLICATION Alexandre Class

6. CONTRIBUTEURS

- LA REMISE DE PRIX CULTE 12. GUESTLIST 10. CINÉ

REPORTAGE GROS CAMIONS

RÉDACTEUR EN CHEF Antoine Gauthier

16. LES

CONTRIBUTEURS Loïc Baruteu, Nils Bruder, Cédric De Montceau Arthur Guillaumot, Clément Guillet, Yannick Grossetête, Le Kiosque, François Meylan, Édouard Roussel, Frank le Tank, Chablis Winston, Léos Van Melckebeke, Nicolas Popovitch, James Granville forever.

24. SUR

DIRECTION ARTISTIQUE Cédric De Montceau PHOTOGRAPHIES Cédric De Montceau, Mathilde Leconte, ThaïBinh Phan-Van, Élodie Perret, Édouard Roussel, Léos Van Melckebeke, Diego Zébina, ILLUSTRATIONS Michaël Sallit, Yannick Grossetête, Mr. Choubi. COMITÉ DE RELECTURE Martin Caye, Marion Godey, Lise Le Joncour Aurore Schaferlee. COUVERTURE Édouard Roussel (juillet 2020) IMPRIMEUR Estimprim (25) Dépôt légal : à la sortie du magazine ISSN : 2260-7617 Tous droits réservés © 2021 Merci à nos partenaires ainsi qu’à celles et ceux qui ont permis la réalisation de ce numéro. Prochain numéro : décembre 2021 Sparse bénéficie du soutien du Ministère de la culture et de la communication, fonds de soutien aux médias d’information sociale de proximité, et de la DRDJSCS au titre du Fonds de développement de la vie associative (FDVA)

ENQUÊTE LE BITCOIN DE LA GUEULE COMBAT

30. RIFIFI

À MONT-SAINT-VINCENT

ENTRETIEN 38. L’HOMME

CASSE LA PLANÈTE

IMMERSION NUL EN BFC

44. CUL

HISTOIRE LAVOIR À LAVOIR À CHARBON DE MONTCEAU-LES-MINES

50. LE

BOULEVARD DES HITS 54. KOMOREBI

DIAPORAMA 56. ESPRIT GUINGUETTE 64. ROMAN-PHOTO 68. LA

TITRAILLE PAGE MODE 72. HOROSCOPE 76. COURRIER DES LECTEURS 78. ABONNEMENT ET BOUTIQUE 70. LA



contributeurs

Par Chablis Winston Photos : DR

Thaï-Binh Phan-Van | Scania Ça fait long alors on l’appelle Thaï, tout simplement. Tapi dans la boue depuis 6h du mat’, Thaï attend de pouvoir photographier l’animal sauvage le plus sauvage de Bourgogne-Franche-Comté, celui qu’on ne peut apercevoir qu’en été à l’aube aux abords de Pont d’eau, pendant sa parade nuptiale. Cette bête féroce, c’est le gros camion diesel. Une espèce rare, qui ne se laisse pas approchée par le premier venu. Thaï n’est pas le premier venu, c’est le Crocodile Dundee de la photographie poids lourd

Michael Sallit | Retour à la mer Le Micka n’en a clairement plus rien à foutre. Depuis le premier confinement, il s’est exilé en Bretagne avec femme et enfants. Fini la ville, fini les embouteillages. C’est épuisette, alcool et kouign amann pour lui. Le gars peut travailler depuis un ordinateur alors il vit sa vie en short et en claquettes de piscine (avec un petit ciré quand même). Il fignole ses illustrations le regard posé sur l’océan. Le monde d’après, c’est ce mec-là. Le gars le plus détendu d’Europe. Vacciné au rhum. Plus haut c’est le soleil.

Elodie Perret

| En attente

Elodie est la vidéaste la plus affutée de l’Auxois. Elle monte des vidéos comme d’autres des chevaux en amazone, avec classe et élégance. Mais comme sur papier, c’est compliqué de faire des vidéos, elle fait aussi des photos. Ça passe mieux pour le magazine. Parce qu’on a essayé de faire un truc mais pour appuyer sur lecture, ça marchait pas top. Ou alors il fallait sortir le mag sur tablette mais c’est moins cool et ça coûte plus cher...

Clément Guillet et Leos Van Melckebeke | 2 flics ami-ami Clément je le connais; ça fait des années qu’il nous fait les immersions les plus malaisantes de la région. Là où personne n’ose aller. Là où les limites de la morale t’emmènent. Mais Leos, je ne sais pas qui c’est. Jamais vu. Il paraît que c’est un pote de Clément, mais si ça se trouve, c’est Clément lui même. L’autre Clément, ou un des autres. Fight Club, Tyler Durden. J’enquête et je vous redis.

Cyril Jacquens | La dernière séance Des petits bijoux de western oubliés, des séries Z injustement boudées, Jean-Claude Van Damme en grand écart entre deux camions qui roulent, Bud Spencer qui met des baffes...Cyril te le conte calmement. Cyril est le Pierre Tchernia, le monsieur cinéma de Sparse. Le mec qu’on attendait fébriles le mardi soir pour se mater un Belmondo (RIP). Le gars qui te disait de ne pas zapper pour ne pas rater le grand débat juste après le film alors que toi t’avais pas le droit, tu devais aller te coucher...

Apolline de Malherbe | Regarde, écoute, apprend L’odeur des frites, des rires gras, des survet’, du Pontarlier, une Dacia Sandero, une pinte en terrasse, un hypermarché, juillet à Palavas...Tout ce qu’Apolline n’a jamais connu, elle vient le découvrir chez Sparse en stage « vraie vie ». Entre le 16e arrondissement de Paris, les locaux de BFM/RMC et sa maison de vacances à Biarritz, Apolline ne s’est pas immergée dans le bain de la France merguez/chipo. Notre France. Ça se sent clairement dans ses émissions. Elle ne sait pas la meuf, elle ne connaît pas. Sinon elle ne dirait pas n’importe quoi à l’antenne (sincèrement on s’en était rendu compte à son nom, mais comme c’est discriminant, on l’a pas dit trop fort...). 6


ALORS ON RE DANSE

43 concerts • Avishai Cohen Trio • Michel Portal MP85 • Émile Parisien & Vincent Peirani • Trilok Gurtu/Omar Sosa/Paolo Fresu • Kyle Eastwood quintet… Concerts à 3 €, 5 €, 10 € et 15 €, soirées de 10 à 28 € Programme complet et billets en vente sur

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D’Jazz Nevers s’engage à respecter les mesures sanitaires




Par Cyril Jacquens

Rappelle-toi tes « fiches profil » pour préparer le bac. Tout était résumé. On n’avait pas besoin de lire les bouquins pour en parler. Chez Sparse, c’est pareil pour le cinéma : on a regardé des classiques pour toi. Plus besoin de t’emmerder à mater ces trucs trop lents alors qu’il y a plein de super films avec des explosions sur Netflix. Ne passe plus pour un inculte mais deviens un vrai usurpateur grâce à Sparse et fais croire à tout le monde que tu as vu ces bijoux du 7ème art. ATTENTION MAXI SPOILER !

LA FICHE POUR BRILLER EN SOCIÉTÉ (n°5)

ROLLERBALL

(1975)

Réalisateur : Norman Jewison d’après la nouvelle de William Harrison Genre : film de boules ultime, en SF Durée : 120 min de film culte, de baston et dystopie politico-socio-médiatique.

Tourné à Munich pour ses décors futuristes. L’anecdote qui tue : le logo du groupe Scorpion est pompé sur le logo Rollerball de l’affiche.

Le Contexte Rollerball ? C’est un sport imaginaire et futuriste particulièrement violent combinant tous les sports les plus durs du vingtième siècle. Hockey, course de moto, roller race, football américain, arts martiaux, etc… Le Rollerball apparaît dans la nouvelle Rollerball Murder (Meurtre au jeu de boules en version française, classe, non ?) écrite par le romancier américain William Harrison en avril 1973. Le succès est immédiat. Quelques semaines après sa publication dans les pages de l’Esquire, Norman Jewison achète les droits en vue d’une adaptation cinématographique, ce qui peut surprendre car Jewison est considéré comme arty à l’époque. Bill Harrison, l’auteur de la nouvelle, rejoint le projet et

participe à l’écriture du film. Le film sera articulé autour d’un homme, un gladiateur des temps modernes plongé au cœur d’un circus maximus infernal… Norman Jewison décide de solliciter la mythique United Artists. « C’est quoi ce sport de fou ? » lui demande-t-on. « Les joueurs portent des casques, ils ont des gants avec des pics et ils cognent leurs adversaires dès que possible ». « Banco ! » Lui répondent les financeurs. Le tournage peut débuter, il aura lieu en grande partie à Munich, pour ses décors futuristes pour l’époque. Le siège de la corporation des énergies dans le film n’est autre que la tour BMW.

Le Casting Le nom de James Caan est tout de suite avancé. Sa participation à la saga du Parrain lui a apporté une grande popularité. Il vient de triompher dans Brian’s Song et sa filmographie déjà fournie fait de lui une tête de gondole idéale pour le projet, categorie beau gosse un peu violent. Il sera 10

rejoint par un casting conséquent avec notamment dans les rôles féminins, les pin-up Maud Adams (James Bond girl dans l’Homme au pistolet d’or ) et Pamela Hensley (super star des sériés TV américaine).


L’Ambiance Pour bien comprendre l’importance de Rollerball, il faut resituer le film dans son contexte. Depuis la fin des années soixante, le cinéma américain est bouleversé à tous les étages. Un vent de renouveau souffle désormais sur Hollywood. La production de films de science-fiction ne fait pas exception. Exit les films d’anticipation de série B étriqués tournés à la vavite mettant en scène des monstres atomiques ou des attaques extra-terrestres. Sans se détourner complètement de l’espace et sa conquête (de 2001 en passant par un certain Star Wars), la production SF nord-américaine propose sa vision radicale et pessimiste des sociétés futures. D’un côté des films qui annoncent la fin d’une ère moderne et décrivent des sociétés retournées à l’état sauvage à la suite d’un cataclysme mondial provoqué par l’Homme (pollution, guerre, accident atomique, etc…). Comme La planète des singes et ses cinq suites. De l’autre, une vision d’un futur digne de George Orwell. Une société totalitaire et entièrement sous le joug de

la technologie et du pass sanitaire. C’est l’ordinateur Hal de 2001, ou Silent Running de Douglas Trumbull. Certains films très ambitieux comme le cultissime Soleil Vert de Richard Fleischer parviennent même à faire cohabiter ces deux univers. Rollerball fait partie de cette catégorie. Avec Jewison aux manettes, le caractère SF du film est dépassé par les enjeux politico-sociaux-médiatiques de cette société corporatiste qui assoit son pouvoir sur une hystérie collective de la population. Ce revival des jeux de Rome est totalement assumé par le réalisateur qui n’hésite pas à multiplier les scènes de violence. Ralenti de crâne défoncé à coups de poing, joueur écrasé par des motos, on n’avait encore jamais vu sur grand écran des choses aussi violentes et trashs. Donc même ceux qui ne comprennent pas forcement les enjeux politico-sociauxmediatiques vont quand même pouvoir kiffer la violence. Maintenant y’a le MMA, mais avant ça n’existait pas. Le film est un énorme succès mondial malgré la censure qui le touche.

Nice - Marseille à la 75ème.

Le Spoiler 21ème siècle, les nations ont été abolies. C’est le règne des multinationales : les Corporations. Une classe de cadres en col blanc remplace les politiciens. Ils organisent l’ensemble des activités humaines sous le contrôle de six départements : Energie, Luxe, Alimentation, Logement, Communication et Transports. Dans cette société parfaite, il n’existe ni faim, ni maladie, ni guerre, ni pollution, ni misère… Les femmes sont envisagées comme des courtisanes. Les drogues très prisées sont légales (là je commence à avoir ton attention). Pour distraire les foules, un sport collectif compulsant les sports les plus violents du XXème siècle a été intronisé : le Rollerball. Jonathan E, capitaine de l’équipe de Houston est le joueur le plus populaire de la ligue mondiale. Après dix ans de carrière, il est devenu une véritable icône. Son équipe semble invincible et chaque victoire renforce davantage l’aura et la popularité du joueur. La longévité inattendue de la carrière du joueur commence à sérieusement inquiéter les hauts responsables qui

voient en Jonathan E une véritable menace. Aucun homme n’est censé valoir le jeu lui-même. Pourtant Jonathan est endoctriné comme tous les autres et ne prétend à aucun moment remettre en cause le système corporatiste. Jonathan E est un combattant, un gladiateur, survivre à l’adversité fait partie intégrante de son sport. Lorsqu’il est convoqué par le responsable du jeu qui lui signifie sa retraite. Il répond simplement : « Je ne veux pas résister, je veux juste comprendre ». Ses coéquipiers ont besoin de lui. C’est sa seule raison d’être. Mais quand un oligarque lui pique sa femme de force, il dit non. Contre la volonté de ses dirigeants, Jonathan E mène son équipe à la victoire contre Tokyo en demi-finale du championnat, une belle boucherie soit dit en passant, à laquelle seul survit Jonathan. La scène finale où la foule hystérique scande le nom de son héros laisse imaginer la fin proche de la société des cols blancs… Quelle fin magnifique !!! Voilà ce qu’il convient d’appeler un film burné.

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guestlist Par Chablis Winston

Patrice Forsans Photomane (25)

Patrice a ouvert avec d’autres la maison pour l’image et la photographie à Besançon, dont il est directeur artistique. Calée place Marulaz (dans LE Marulaz, si tu connais), au coeur du quartier Battant, la MIP c’est des expos mensuelles, un troquet, des soirées ciné, des rencontres avec des pros du milieu...Un projet monté par des photographes dans un lieu de partage. Prochain vernissage (petits fours !) : Début novembre pour une exposition de Denis Olivier.

La maison pour l’image et la photo est située dans un bistrot. C’est un coup marketing pour faire venir le public plus rapidement, c’est ça ? Carrément ! (Mais c’est aussi une passion que nous désirons partager dans la convivialité). Est-ce que les Bourguignons ont quand même le droit de rentrer dedans ? Oui bien sûr mais avec un pass sanitaire spécial bourguignon. Nikon ou Canon ? Plutôt Hasselblad ou Sinar mais une grosse préférence pour Arca Suisse (de Besançon)... sinon perso... Nikon. Est ce qu’un mec (ou une fille) avec un appareil photo est forcément un photographe ? Est ce qu’un mec (ou une fille) avec un stylo bille est forcément un écrivain ? Le masque, quand tu n’es pas obligé de le mettre sur ta bouche, c’est dans la poche ou négligemment porté au poignet ? De préférence dans la poubelle, sinon dans ma sacoche. Pourquoi est-ce qu’on enferme encore des tigres ou des singes au zoo de la citadelle ? Probablement que le privilège du roi prévaut, ça semble d’actualité.

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T’as déjà fait de la luge l’hiver sur les pentes du quartier Battant ? Franchement non... mais j’ai connu en 2006 de sacrés chutes de neige à Besac qui ont ravi l’enfant en moi. T’as déjà goûté le CBD toi ? Ça sert à quelque chose ce truc ? Jamais personnellement... ni autre chose du genre. À l’apéro, un kir ou un Pontarlier ? Un ricard bien sûr !!!! plus sérieusement... sans alcool. Jean Moulin se serait-il fait vacciner ? Très certainement... ou pas. Un message pour ceux qui ont adopté le look claquettes/ chaussettes ? Rejoignez le groupe toujours plus grand de la coupe mulet ! Plutôt Auxerre ? Sochaux ? ou DFCO ? Nous avons installé un bel écran derrière le comptoir de notre bar sur lequel vous ne verrez jamais de foot ! T’as traîné où dans la région cet été ? Chevigney Lès Vercels (super club équestre que je recommande). Le prochain vernissage d’une expo à la maison pour l’image et la photo, c’est quand ? Début novembre pour une exposition de Denis Olivier, la date du vernissage est à découvrir sur notre site : maison-photographie.com



guestlist

Maggy Bolle Chanteuse distinguée (25)

Avec sa gratte, Maggy Bolle est la chanteuse à texte la plus romantique de France. Non je déconne. Elle a le talent de réunir le bon goût et le trash en une seule personne, la sienne. La Franc-Comtoise a dernièrement annulé une partie de sa tournée pléthorique pour « cause de pass nazitaire » ; alors elle va jouer dans des circuits alternatifs, des granges, des squats, des parkings d’Auchan... Et c’est tout aussi bien. Dernier album : Jsuis pas ta mère (qui commence à dater un peu quand même hein...va falloir se bouger un peu madame).

Maggy Bolle ? T’es de la famille de Muriel Bolle ? Ben en fait c’est ma mère. Et le petit Gregory c’était le gosse de mon tonton qui est aussi mon papa... Mais je l’ai pas encore dit à Voici.

On t’as pas vue aux JO de Tokyo ? T’étais suspendue pour dopage ou quoi ? J’étais suspendu par les boyaux de saucisses de Morteau à la frontière BFC...

Qu’est ce qu’on va faire à la libération des Franc-Comtois qui ont couché avec des Bourguignons ? On les suspend par les pieds avec des boyaux de saucisses de Morteau en les tartinant d’époisses coulant, on les attache tous ensemble et on se sert de cette nouvelle guirlande humaine pour faire une vraie frontière entre les 2 régions.

C’était qui ton perso préféré dans Hélène et les garçons ? Alors je me rappelle de Chrichri d’Amour, pis c’est à peu près tout... Je suis bien dans la merde parce qu’il était quand même franchement con....

L’institut Pasteur est en train de tester un médicament contre le covid en suppositoire. Ils l’ont fait exprès tu penses ? Ça les fait marrer de mettre des choses dans le finfin des gens ? J’attends ça depuis longtemps, ça me fait rêver d’avance, d’ailleurs je suis la première inscrite sur la liste de cobaye... Et je crois bien que j’ai vu ton nom en 2ème... Tu bingewatch quoi en ce moment ? Hé, arrête de me causer avec des mots que je comprends pas... (putain de magazine de merde).

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Toi qui connais la région, où est-ce qu’on est le mieux reçu quand on va faire un concert ? À L’antonnoir à Besac, au Moulin de Brainans, à la péniche Cancale à Dijon, chez Gigi au Pinky Bar à Nommay, au Loue Bar dans le Jura, aux Festives de Meloisey, au bistrot à Pont d’Ouche, au Léonz Café à Lons-le-Saunier, à la Rodia, Besac... En fait y’a pas beaucoup d’endroits qui ne savent pas recevoir chez nous ! (Vindieuuuuuu) On se refait la bise maintenant ? Ou on profite de cette pause sanitaire pour arrêter définitivement ? On se fout à poil, on se tartine de cancoillotte, on s’arrose de Pommard et on se lèche tous ensemble... Mais si on veut on peut se laver les mains à la gentiane avant de se toucher.


SAISON 21-22

APERÇU DE LA PROGRAMMATION D’AUTOMNE DANSE 1ER ET 2 OCTOBRE 2021

31 RUE VANDENBRANDEN

GRATUIT

LES VOYAGES

DANSE ÉLECTRO 17 NOVEMBRE 2021

ROOM WITH A VIEW

COMPAGNIE XY

BALLET NATIONAL DE MARSEILLE –

LE CORPS DES SONGES

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Arago

© Man

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uel Bu © Sam

FANTAISIE LYRIQUE 23 ET 24 NOVEMBRE 2021

NOSFELL

DIRECTION (LA)HORDE / MUSIQUE DE RONE

ton

© Michel Cavalca

GABRIELA CARRIZO ET FRANCK CHARTIER – PEEPING TOM / BALLET DE L’OPÉRA DE LYON

CIRQUE EN ESPACE URBAIN 1ER > 3 OCTOBRE 2021

ESPACE-DES-ARTS.COM

DIJON BESANÇON

L’HOMME CANON VEND.17 SEPT. 2021 > 20H SAM. 18 SEPT. 2021 > 16H Rémi Luchez

En partenariat avec Cirq’Ônflex dans le cadre du festival PRISE DE CIRQ’

au Théâtre Mansart

LA MÉLODIE DE L’HIPPOCAMPE

ENTRAILLES

DANS TES BRAS

Cie La Carotte

au Théâtre de la bouloie

Cie Fernweh

Cie Anomalie

JEU.14 OCT. 2021 > 20H30 En partenariat avec Cirq’Ônflex

au Théâtre Mansart

JEU.30 SEPT. 2021 > 19H

JEU. 7 OCT. 2021 > 19H au Théâtre de la bouloie


« Je crois qu’on a tapé quelque chose Dédé... »


hot s l e e wh n Le France Truck Trial, pratique confidentielle de gros camions, déposait ses roues crantées dans la Plaine de Saône cet été. On revient de cette expérience les chaussures pleines de boue et surtout des étoiles plein les yeux. Ambiance. Par Frank Le Tank Photos : Thaï-Binh Phan-Van


S

amedi 3 juin 2021, Perrigny-sur-l’Ognon. Un bruit fracassant ; celui d’un camion Mercoss de 8 roues et plus de deux mètres cinquante de haut qui éclate son essieu sur un bloc de béton en tentant un passage en force. La manœuvre paraît impossible mais les pilotes semblaient y croire dur comme fer. Les roues ont beau faire à peu près notre taille, on reste quand même dubitatif sur la possibilité de franchissement d’un tel obstacle. Pourtant après une pression appuyée sur l’accélérateur, le camion se cabre et entame alors l’impossible : un franchissement du bloc. Le camion rugit, la fumée noire s’échappe du tube d’échappement, les gaz sont lâchés. La première roue passe et franchit miraculeusement l’obstacle. Le pilote et son coéquipier ont la tête dehors, par la fenêtre, s’assurant du bon déroulement de leur aventure. C’est au tour de la deuxième et ça a l’air de fonctionner. Cependant le coup d’accélérateur est trop appuyé et le camion frotte l’essieu. Le résultat est cinglant : essieu explosé le tout avec une bonne odeur de gasoil dans l’air : c’est ça l’ambiance grisante du France Truck Trial ! Pourtant en arrivant sur site, qu’on se le dise, on n’en menait pas large. Le spot est difficilement trouvable et on se gare à l’arrache entre plusieurs camions, ambiance les taxis de la Marne, c’est Verdun le bordel ; il y a de la boue partout et ma voiture citadine manque de partir en sucette. Tentes vitabris aux couleurs de célèbres marques d’équipementiers auto, barbecues, enfants qui courent, grosses caravanes et poids lourds, l’ambiance à l’entrée est plus proche d’un camp de manouches que d’une compétition auto. Les gens sont posés autour de tables de camping et déjeunent. Il est environ 13h30 et le temps n’est pas au beau fixe. Le ciel excessivement bas et gris rajoute un côté apocalyptique. On a rencard avec Alain sur site, c’est notre contact, il est président de l’association France Truck Trial et est également pilote émérite. On cherche bien évidemment la buvette (la base), sacrosaint lieu de rencontres dans ce genre de raouts extérieurs. Pas le temps d’évaluer le cours de la saucisse ou de la Kro en 25, puisqu’on tombe quasiment nez-à-nez avec ce sexagénaire jovial qui va bientôt tout nous apprendre sur la pratique.

Turbo Le Truck Trial c’est un nom ronflant qui sonne bien viril et guerrier, mais, il faut le dire, n’est pas ultra développé de ce côté-ci de l’Atlantique. La seule lointaine connaissance que l’on possède ce sont les petites voiture Hot Wheels de notre enfance et la pratique américaine reine : le Monster Truck. Apparues aux USA en 1974, ces voitures, appelées « Big Foot » aux dimensions disproportionnées et impressionnantes sont « starifiées » et mises en scène dans des arènes accueillant des centaines de milliers de personnes. En Europe, cette pratique cousine a été créée par un Allemand il y a 32 ans. Alain quant à lui évolue depuis 25 ans dans le circuit. Il nous explique qu’il existe aussi deux compétitions européennes et une compétition en République Tchèque. Les Tchèques c’est d’ailleurs eux les reustas de la pratique, ce sont les spécialistes du cametar, le gasoil coule dans leurs veines et ils remportent quasiment tous les Dakar en camion. D’ailleurs, à part cette compétition qui donne une visibilité internationale à la pratique tout cela se passe de façon assez confidentielle sur un niveau amateur. On ne parle pas de championnat de France de Truck Trial mais bien d’un trophée : « Le 1er reçoit une coupe, des bouteilles de vins, 18

ENTRE CREVASSES, ÉNORMES BLOCKOSS, , TROUS BÉANTS ET MARAIS IL Y A DE QUOI SE MARRER 5 MINUTES EN PROFITANT DES PLAISIRS SIMPLES DE LA VIE : À SAVOIR REGARDER LES CAMIONS TOUT DÉZINGUER. quelques lots offerts par les sponsors et une petite enveloppe. C’est pour ça que l’on campe sur le site ; on limite les frais au maximum ». C’est ce que l’on ressent à Perrigny ; il y a peu de public présent sur le parcours aujourd’hui, une cinquantaine à tout casser. Il faut dire que le paf n’est pas donné : 10 euros pour un jour, 15 pour les deux, et surtout il faut être motivé avec cette météo peu clémente, ambiance Loire-et-Cher « On dirait qu’ça te gêne de marcher dans la boue ». Alain nous rassure tout de même, en nous disant qu’en temps normal il y a une vrai fan base qui se déplace : « Ce sont souvent des passionnés qui font des kilomètres pour suivre le truck trial ».

WTF is TFTT ?

(What the fuck is France Truck Trial) Si tu n’as toujours pas capté le concept du France Truck Trial, c’est simplissime ; il s’agit de camions qui font des franchissements d’obstacles dans un temps imparti. Easyles-Moulineaux, sur le papier en tout cas, car le terrain, assez vaste est réparti en 4 zones distinctes plutôt très accidentées. Aujourd’hui à Perrigny, le terrain est artificiel : « C’est un terrain aménagé au fur et à mesure des années. Le propriétaire a ajouté des cailloux, des blocs béton et des troncs d’arbres au fil des ans ». Le championnat est réparti entre 4 étapes au cours de l’année, ils sillonnait la France, alternant entre des terrains artificiels (comme celui-ci) et des terrains naturels. Comme l’atteste Amélie, une des pilotes de camion rencontrée sur site : « C’est moins difficile sur de l’artificiel et un peu moins bien aussi. A Montalieu (une spéciale en Rhône Alpes ndlr), on se retrouve en plein milieu des bois avec des gros troncs d’arbres et des pentes impressionnantes, c’est mieux ». Pour les novices que nous sommes, le spot envoie quand même ; entre crevasses, énormes blockoss, trous béants et marais, il y a de quoi se marrer 5 minutes en profitant des plaisirs simples de la vie, à savoir regarder les camions tout dézinguer là-dedans.


D’où l’expression « se foutre dans le fossé ».


Sur le tournage de Mad Max : Au-delà du dôme du tonnerre.

« C’EST UNE PRATIQUE FAMILIALE, LA PLUPART D’ENTRE EUX VIENT DU MONDE DU TRANSPORT : MÉCANO, CHAUFFEUR ROUTIER, FOU DU CAMION. POUR MA PART J’AI BOSSÉ, ENTRE AUTRES, DANS UNE AUTO-ÉCOLE POUR POIDS-LOURD » Alain, président France Truck Trial 20

Parlons-en des camions, puisque c’est quand même la raison principale de notre venue. Comme je le disais un peu plus haut, nous sommes assez loin du Monster Truck, ici on est sur du camion façon Paris-Dakar (Big up Stéphane Peterhansel) avec plusieurs catégories, 7 en l’occurrence, qui vont s’articuler en fonction de la taille mais aussi en fonction du nombre d’essieux, de la motorisation, etc… Aujourd’hui 24 camions sont présents pour un total de 26 équipes. Alain nous précise qu’il existe aujourd’hui 43 camions homologués en France, soit plus de la moitié à Perrigny aujourd’hui, la classe ! Bien sûr, la question nous brûle instantanément les lèvres ; comment fait-on pour se fabriquer un cametar, et surtout combien ça coûte (jurisprudence Jean-Pierre Pernaud) ? Alain nous répond du tac au tac : « On part d’un camion d’origine puis on le transforme avec le respect des règles (arceau de sécurité, coupe batterie, arrêt moteur, extincteur…), il doit ensuite passer au contrôle technique puis être homologué par un comité européen, le Europa truck pour le trial ou le camion cross » (autre discipline phare du camion en mode course cette fois-ci ndlr). Combien ça coûte ? « Pas nécessairement trop cher. Ce sont des véhicules qui ont entre 10 et 20 ans. Tu récupères un ancien camion de pompier ou de la DDE et tu le rachètes à prix correct, entre 1000 et 2000 euros. Par contre, tu passes un an de travail dessus après ». Amélie, notre pilote nous le confirme : « Cela représente énormément de temps, de patience et d’investissement personnel ; tous les samedis on est au garage à bricoler ou à chercher des sponsors ».


Le Trial reste une pratique amateure qui demande pas mal d’huile de coude, et qui reste un sport de passionnés. Passionné de mécanique dans un premier temps d’ailleurs à en croire Alain : « C’est une pratique familiale, la plupart d’entre eux vient du monde du transport : mécano, chauffeur routier, fou du camion. Pour ma part j’ai bossé, entre autres, dans une auto-école pour poids-lourd ». Sur le stand d’à côté, c’est en effet toute la famille qui a fait le déplacement depuis Carcassonne : le père et le fils, deux braves gaillards font équipe avec un prototype mais ce n’est pas tout, le rejeton a également une deuxième équipe avec sa petite amie. C’est d’ailleurs la première fois qu’Émilie concourt, elle qui vient d’habitude en tant que support avec son petit ami. Elle nous confie avoir un peu la pression : « les co-pilotes ont un rôle important à jouer, ils gèrent les manettes pour passer de deux à quatre roues motrices par exemple, c’est important pour les franchissements » nous confie-t-elle. La mère quant à elle s’occupe de la logistique ; tout le monde a un rôle à jouer dans la team de gang of Carcassonne.

Destruction Derby Nous sommes interrompus dans notre discussion par la reprise des hostilités ; Alain est appelé pour faire la reconnaissance de sa première zone de l’après-midi. Il en a déjà fait deux ce matin et ça s’est plutôt bien passé selon lui ; petit bémol cependant, le camion a pris feu ! comme si c’était normal ! « Ce sont des fils qui ont fait court-circuit et qui ont fondu, on n’est pas inquiet pour si peu. C’est juste un petit aléa mécanique et on a pu finir la zone ».

LE CONDUCTEUR, PAR UN EXCÈS DE CONF’, . A FRACASSÉ SON CAMION K L’ÉQUIPE DE FRANCE TRUC TRIAL DOIT L’EXTRAIRE AVEC UN ENGIN DE CHANTIER, DE TYPE GRUE. C’EST LA FIN DU GAME POUR LUI.

Tribune VIP. 21


C’est sûrement ce que l’on appelle la sérénité du routier ! La reconnaissance dure un quart d’heure, Alain et son co-pilote nous invitent à les accompagner. Le principe : observer les 5 portes de la zone (c’est un peu comme au ski on doit passer entre deux bâtons pour valider le passage), les angles de franchissement, l’appréhension des obstacles... C’est marrant car on a le droit de passer la porte en marche avant ou en marche arrière. On accompagne Alain, le terrain est assez escarpé et il y a quand même bien moyen de se faire une cheville sur la reconnaissance, on essaye de ne pas se croûter et de se taper l’affiche. Le parcours n’est apparemment pas trop technique même s’il finit sur un énorme trou, très profond. Joël, le co-pilote m’affirme que cela ne leur fait pas peur : « On va le passer les yeux fermés ». Quel vantard ! Afin de s’assurer du bon respect des règles, des commissaires sont présents sur le terrain, c’est eux qui checkent si les camions passent bien dans les portes, s’ils ne percutent pas les poteaux, etc. Si c’est le cas, c’est l’amende direct avec des points de pénalité qui viennent alourdir le temps passé sur la zone. Amélie et sa co-équipière de la team des Amazones s’en sortent carrément bien, elles font des franchissements en marche arrière, et passent le méga trou en deux coups d’accélérateur. Impressionnés, on l’interroge à chaud après son passage : « J’ai changé la motorisation du camion d’un essence 80 CV à un diesel en 90 CV. C’est moins agressif, j’ai plus de douceur et donc une maîtrise, de la souplesse, voire de la légèreté dans mes franchissements ». C’est effectivement le ressenti que l’on a quand on la voit manœuvrer. On en profite pour lui demander si les femmes sont bien acceptées sur le circuit : « Les hommes ont tendance à dire que les femmes n’ont pas leur place dans ce métier. Aujourd’hui, il y a une ouverture d’esprit même s’il reste des misogynes qui estiment que ce n’est pas un sport pour les femmes. Au début je me mettais la pression en me disant que je n’allais pas y arriver parce que j’étais une femme et en fait on galère tout autant que les hommes sur certaines zones. Tout le monde est logé à la même enseigne ! ».

Apocalypse Now Les passages s’enchaînent, on peut passer allégrement d’une zone à l’autre pour voir les différents franchissements. Cela donne une ambiance apocalyptique au bazar. On a l’impression d’être au front, à courir entre les obus dans la terre et les douilles (enfin presque) ; le vrombissement des moteurs, l’acharnement des pieds sur les accélérateurs, les effluves de kérosène, les couleurs flashy des camions, la boue qui gicle à chaque franchissement, on se prend vite au jeu ! Un camion balaise avec plusieurs essieux nous impressionne, il traverse un marais profond et mange les blocs un par un. Rien ne semble le freiner là où les camions plus petits y vont en douceur. On se souvient des mots d’Amélie et on comprend l’approche stratégique de la pratique. Comme les camions partagent les mêmes zones, les plus petits sont obligés de feinter, là où les bourrins passent en force. Bonjour la sélection naturelle. Manque de pot, le gros cam’s qui fonce tout droit se vautre sur un bloc méga balaise ; le conducteur, par un excès de conf’, a fracassé son camion. 22

Caméra de recul.


L’équipe de France Truck Trial doit l’extraire avec un engin de chantier, de type grue. C’est la fin du game pour lui. Les pilotes doivent être bien blasés, parce qu’en plus d’une défaite, la réparation coûte sûrement un bras ! On observe la scène hallucinante à côté de deux mecs du public qui jubilent. Après avoir fait succinctement connaissance avec Jeannot et Maxence, ils me confient qu’ils viennent de Mirebeau-sur-Bèze, une ville attenante. C’est la première fois qu’ils viennent voir du Truck Trial, d’habitude ils viennent assister au moto-cross ici « c’est vrai que c’est quand même plus impressionnant ». Accaparé par l’action de sauvetage du gros camion, ils n’en diront pas plus mais comme nous en garderont des images vives. La pluie s’est installée sur le site, mais personne n’y prête vraiment attention ;

on s’est fait à cet environnement boueux, ça rajoute même un petit quelque chose au décorum. Sur la première zone les mâles de la famille de Carcassonne, sont en train de plier le jeu. C’est tout muscle dehors que Michel, habillé dans une combinaison de travail et casque sur la tête, tente le passage en marche arrière d’une porte installée au sommet d’un bloc. Il s’y reprend à plusieurs fois pour le franchissement, on voit qu’il a bien étudié le dossier, et qu’il ne se laissera pas avoir. Le camion vacille et se tord, il manque de se retourner à plusieurs reprises. Le public retient son souffle, il passe, la maîtrise est totale et on entend même des applaudissements chaleureux. Il lui reste un énorme trou de 3 mètres de profondeur à passer. Galvaniser par son passage précédent, il mange la crevasse d’une seule bouchée.

« QUAND ON REGARDE LE TENNIS QUI FAIT SE DÉPLACER DES JOUEURS EN AVION, NOUS ON EST DES RIGOLOS À CÔTÉ » Alain

« Mais où j’ai garé la twingo déjà ? »

Europe Écologie Les Verts Alain et Joël quant à eux sont pépères, ils ont raté une porte et n’ont pas passé le trou les yeux fermés mais s’en sortent plutôt bien. Il est temps de poser la question qui fâche pour les passionnés de grosses cylindrées : ce n’est pas un peu polluant votre truc ? Alain a l’habitude de ce genre de polémique et nous répond le sourire aux lèvres : « Les camions ça ne pollue pas plus qu’un véhicule qui se promène le dimanche pendant 3 heures. On roule pendant 5 à 10 minutes donc si on consomme 20 à 25 litres dans le weekend, c’est le grand max ». Il rajoute : « Quand on regarde le tennis qui fait se déplacer des joueurs en avion, nous on est des rigolos à côté ». Jeu, set et match mon cher Alain.

On quitte le site, refait, en manquant de s’embourber sur le parking dans notre C3. Nous aussi, un jour, on aura un camion, on fera des franchissements en marche arrière, en passant des ornières comme des fous et en montrant nos muscles en enfonçant l’accélérateur. On aura une team avec un nom improbable comme les Niglotins, Les sangliers du Morvan ou Les gangs of Sud-Est. Mais en attendant, on rentre le cœur léger prêts à retrouver nos vélos de citadins fragiles. A la seule différence que l’on emmène avec nous une odeur d’essence en plus sur les vêtements. Comme quand on montait derrière le booster de nos potes au collège. Le frisson. 23


clepto monnaie

Par Loïc Baruteu Illustrations : Michael Sallit

LA PLUS BELLE ARNAQUE AU BITCOIN EST BOURGUIGNONNE.

Crime en col blanc à Dijon pour l’une des affaires les plus rocambolesques des milieux financiers français. Un précédent qui fera date et qui met en scène des personnages de fiction, avec en tête d’affiche Vincent Ropiot, golden boy de Beaune, fondateur du fonds d’investissement RR Crypto désormais en liquidation judiciaire, aujourd’hui sous le coup de multiples chefs d’accusation et menacé de mort par ses anciens investisseurs après la perte de plus de 40 millions d’euros de fonds placés sur le marché des crypto-actifs. Un scénario de polar pour une escroquerie stupéfiante conduite par des amateurs irresponsables et marquée par l’omerta du milieu des affaires et la faillite de milliers de victimes. 24



SALUT, JEUNE ENTREPRENEUR Il était une fois Vincent, jeune Beaunois d’une vingtaine d’années à l’ambition dévorante. Dans la vie, Vincent veut mailler. Il découvre la crypto-monnaie en 2013, comme il le confie en février à Dijon l’Hebdo, et commence à investir dans les actifs numériques avec ses économies en 2016 ; d’après le Figaro, il passe à l’aise de 3 000€ à 300 000€ en l’espace de quelques mois grâce à ses investissements judicieux sur le marché et l’effet « bull run » de l’époque, une période de forte croissance. Une réussite fulgurante qui impressionne dans le milieu des affaires dijonnais et Vincent se retrouve à la tête de son propre fonds d’investissement début février 2019 : RR Crypto. Tous les matins, il gare sa Ferrari devant les immenses locaux de sa boîte à Longvic, orientée start up nation avec salle de sport et babyfoot. L’ambiance est au beau fixe, le bouche à oreille fonctionne à fond et les investisseurs affluent, amadoués par la vingtaine de conseillers tellement engagés dans le projet que la plupart « y ont placé leurs propres économies », nous confie l’un d’eux qui, comme la plupart des intéressés dans ce dossier, préfère rester anonyme. Des investisseurs qui pèsent, pour certains plusieurs millions d’euros, tels des hommes d’affaires de la région ou des personnalités du sport, qui font tourner à leur carnet d’adresse. Dans son entretien à Dijon l’Hebdo en février, Vincent annonce fièrement 1 500 investisseurs ralliés à la cause. Pourtant, depuis le lancement de la société, une sonnerie d’alarme résonnait à l’oreille de certains initiés ; Emmanuel (le prénom a été modifié), un homme d’affaires dijonnais qui a rencontré le jeune PDG et plusieurs collaborateurs, présentés comme des fondateurs et intervenants, au début de l’aventure RR Crypto se souvient de l’aplomb de ses interlocuteurs malgré le caractère opaque de leur projet : « c’est un univers nouveau et nébuleux et ils n’avaient pas d’habilitation auprès de l’AMF. » L’AMF, c’est l’Autorité des marchés financiers en France, qui décerne le statut de Prestataire de service sur actif numérique (PSAN) pour les entreprises qui gèrent des fonds d’investissement en crypto-monnaies. Un agrément que ne possède pas RR Crypto, montée en association loi 1901, une aberration phénoménale puisque ce type de structure ne peut générer des bénéfices majeurs sans être en infraction avec la loi française. Claire, qui évolue professionnellement dans cet univers financier complexe, se souvient : « dès le début on pouvait deviner ce qui allait arriver. Ce qui est fou, c’est que Vincent Ropiot ait

«DÈS LE DÉBUT ON POUVAIT DEVINER CE QUI ALLAIT ARRIVER. CE QUI EST FOU, C’EST QUE VINCENT ROPIOT AIT PU CONTINUER AUSSI LONGTEMPS AVANT QUE ÇA NE PÈTE».

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pu continuer aussi longtemps avant que ça ne pète ». Les vrais fonds d’investissements sont habilités par des organismes officiels afin d’éviter les escroqueries et ils sont évidemment plus armés face aux menaces telles que le piratage d’un compte ou le craquage mental d’un trader. Au cours du même entretien de février, Vincent se défend du statut de sa société et explique préparer un dépôt de dossier auprès de l’AMF. Tu mens, Vincent. Le gendarme financier s’est par la suite dédouané, précisant qu’aucun dossier n’a été déposé par RR Crypto. Cet argument d’une procédure en cours, ses conseillers s’en servaient pourtant lors des entretiens avec les clients.

KRYPTONITE Avec le bouche à oreille croissant et les multiples confinements, les conseillers de RR Crypto proposent des rendez-vous collectifs par visio-conférence. Nous avions participé à l’un d’entre eux en avril dernier, alors que Vincent Ropiot savait déjà que le compte de la société pointait à zéro euro. Comme dans tout bon système de Ponzi, les injections de fonds tout frais venant de nouveaux investisseurs auraient permis de financer les soit-disant bénéfices de l’association après la disparition du capital de la boîte. Lors de ces fameux rendez-vous, le conseiller ancien coach sportif, un profil exotique, démarre par l’introduction d’usage sur la genèse récente de la société et ses valeurs : savoir-faire, écoute, bienveillance. Le sujet tant attendu vient ensuite :


la moula. Faisant miroiter ses bénéfices colossaux en moins d’un an, étalant son relevé de compte bancaire perso truffé de chiffres, le conseiller sait faire briller les yeux des potentiels clients, tout en mettant en garde de temps en temps sur le caractère spéculatif de l’affaire mais rassurant sur la politique de la boîte qui investit uniquement sur des crypto-monnaies stables, entre deux étalages de chiffres qui donnent le tournis. Yoan, qui participait à la séance, est convaincu : « pour moi, des pros allaient gérer mon fric ». Les 18% de commission pour les traders sur ses futurs bénéfices lui paraissent dérisoires. Ce qui l’a sauvé des griffes de RR Crypto, c’est le conseiller qui avait perdu son dossier. Savoirfaire à fond. « Je connais quelqu’un qui a vendu sa voiture pour investir » raconte Mehdi*, lésé de 2 000€. Ce type de réunion aurait donc permis de faire grimper le chiffre de 1 500 investisseurs avancé par Vincent Ropiot en février à 4 500 au moment de la chute de RR Crypto, le 20 juin. Cet appel du 20 juin, les clients s’en souviendront longtemps. Ce jour-là, Vincent apprend à tous ses investisseurs par le biais d’un email que « le portefeuille de cryptoactifs ouvert sur la plateforme Binance, sur lequel l’ensemble des fonds confiés en gestion par nos clients sont conservés, a été réinitialisé ». Autrement dit, le pognon de tout le monde s’est volatilisé. « Je recevais des notifications toutes les deux secondes dans les conversations entre clients et conseillers sur Telegram, les gens devenaient fous » raconte Mehdi. Vincent explique avoir déposé une plainte auprès de la gendarmerie le 17 juin et s’identifie comme « le seul et unique responsable de cette situation. Les conseillers n’étaient pas au courant, ils se justifiaient comme ils pouvaient auprès des clients. Ils ont perdu leur épargne mais aussi leur taff » continue Mehdi. C’est là que débute la tempête pour le PDG de RR Crypto avec ce premier cas français d’arnaque sur des investissements en crypto-monnaie ; les journaux locaux et les médias nationaux se paraphrasent les uns les autres, les cabinets d’avocats se jettent sur l’occasion et le Parquet de Paris s’empare de l’enquête. On n’avait pas connu un tel emballement médiatique dans la région depuis le mec qui fracasse un Apple Store à la boule de pétanque ou la réunion des Tchétchènes de France aux Grésilles. On apprend ainsi de plus en plus de détails sordides, comme le statut d’association loi 1901 de la société, le déni de l’AMF et surtout la disparition des fonds dès mars, soit trois mois avant le mail de Vincent. “On recevait des faux relevés de compte tous les mois pendant cette période, avec le solde du 1er au 1er du mois suivant, le total en USDT, une crypto-monnaie stable, et sa valeur en euros” explique Mehdi. Tu mens encore, Vincent.

EN BANDE ORGANISÉE « J’ai investi en fin d’année dernière après qu’un ami qui venait d’investir m’en ait parlé. Comme j’avais envie de débuter dans la crypto-monnaie, je leur ai donné un pourcentage de mon capital que je souhaitais répartir ». Olivier Champion a perdu 7 000€ et il est surtout l’un des rares à s’exprimer publiquement sur l’affaire du côté des bourses détroussées : « Je n’étais pas choqué car c’était un risque à prévoir et j’y avais déjà pensé » explique lucidement celui qui est aussi coach mental dans la vraie vie. Si certains avaient envisagé une perte, la plupart ne s’y attendait pas : « le risque identifié, ce sont les gens qui font des crédits pour investir » explique Claire. Outre ceux qui ont perdu toute leur épargne, d’autres n’ont vraiment pas apprécié ce dénouement, en particulier les investisseurs impliqués dans des activités illégales

et profitant de l’association pour du blanchiment d’argent. Si un établissement bancaire nous confirme que « tout dépôt en espèces doit pouvoir être justifié » quelle que soit la somme, dans le but évidemment d’empêcher le blanchiment d’argent au guichet, les possibilités offertes par la crypto-monnaie, relativement anonyme, attirent désormais ce type d’investisseurs, surtout au sein d’une structure comme RR Crypto qui ne vérifie pas la provenance des fonds, selon plusieurs clients rencontrés. Claire, notre experte en actifs numériques, nous explique qu’il existe différentes méthodes pour acheter des crypto-devises en espèces : « t’as des adresses pour ça ; tu peux faire un mandat cash avec Western Union vers un compte offshore pour ensuite acheter des cryptomonnaies depuis ce compte, il existe aussi quelques distributeurs de bitcoins en France, des cartes prépayées ». Pour l’heure, les charges retenues par les enquêteurs sont « vol en bande organisée, atteintes à un système de traitement automatisé de données et blanchiment en bande organisée » et de nombreuses victimes ont déposé plainte pour « faux, usage de faux, escroquerie, abus de confiance, exercice illégal d’une activité de prestataire sur actifs numériques, démarchage financier et direction d’un organisme de placement collectif sans agrément ». Plusieurs cabinets d’avocats, parisiens et dijonnais, se sont rués sur l’affaire, médiatique, et ont monté des groupes de victimes, qu’on peut intégrer moyennant minimum 600€, plus honoraires...

CET APPEL DU 20 JUIN, LES CLIENTS S’EN SOUVIENDRONT LONGTEMPS... LE POGNON DE TOUT LE MONDE S’EST VOLATILISÉ

PREMIER DE CORDÉE Ce que l’enquête pénale du Parquet de Paris devrait permettre de comprendre, c’est surtout comment cette faillite spectaculaire est survenue car plusieurs pistes sont à l’étude. La première, c’est celle avancée par Vincent : le compte de l’entreprise réinitialisé par Binance. La plate-forme s’en est défendue, se réservant même la possibilité de poursuivre le PDG pour diffamation, et a révélé au passage que RR Crypto ne possédait aucun compte d’entreprise . « C’est techniquement impossible que Binance ait fait disparaitre les fonds, c’est un broker qui met simplement en contact acheteurs et vendeurs », explique Claire. On découvre ainsi le fonctionnement de la société pour investir le pactole de ses clients : selon elle, RR Crypto ouvrait d’abord un compte sur la plateforme au nom de ses investisseurs grâce aux pièces fournies à l’inscription comme les justificatifs d’identité, puis transférait ensuite ces nouveaux fonds sur le compte personnel de Vincent. L’angoisse. L’autre piste, c’est celle qui découle de l’association entre le Beaunois et un avocat estonien obscur, Karmo Neider. En Estonie, la création d’une SA est quasiment à la 27


portée d’un gamin de dix ans, et Vincent se lie avec Karmo, expert dans la création d’entreprises spécialisées en cryptomonnaies dans le pays. Des entreprises pour la plupart épinglées par le régulateur financier anglais. L’Estonien se retrouve ainsi au board de la boîte enregistrée chez lui. Vincent a ensuite avoué avoir « fait confiance à la mauvaise personne », alors qu’une vingtaine de millions d’euros en provenance de l’association de Longvic ont été retrouvés en Estonie, bloqués. La dernière théorie, c’est que Vincent aurait abandonné ses idées d’investir sur des crypto-monnaies stables comme il l’annonçait à sa clientèle pour miser sur des actifs plus rapidement rentables mais forcément plus risqués. Il faudra prendre son mal en patience pour connaître le fin mot de l’histoire ; un procès contre les dirigeants de RR Crypto devrait se tenir entre 2023 et 2025 d’après les estimations des avocats, où le Parquet pourra finalement rendre les conclusions d’une enquête complexe. Pour l’heure, Vincent Ropiot est placé sous protection judiciaire pour échapper à ses clients les plus virulents après avoir reçu des menaces de mort. Qu’il s’agisse des anciens employés aujourd’hui au chômage ou des investisseurs aux poches retournées, on reste silencieux, sans doute écrasés par la honte de s’être fait duper comme des bleus. « C’était plus intéressant qu’un Livret A » se souvient Yoan. Pas trop finalement. Pour Claire, le fondateur de l’association a été

VINCENT ROPIOT EST PLACÉ SOUS PROTECTION JUDICIAIRE POUR ÉCHAPPER À SES CLIENTS LES PLUS VIRULENTS APRÈS AVOIR REÇU DES MENACES DE MORT. dépassé par la cascade d’événements : « au début ça marchait et il s’est retrouvé noyé ; il a pris de mauvaises décisions ». Si l’origine du mal partait sans doute de bonnes intentions, elles auront donc pavé la route de l’enfer qui s’est ouvert sous les pieds des clients de RR Crypto et de Vincent Ropiot, qui ne roulera plus jamais en Ferrari.

BITCOIN, BLOCKCHAIN, LE NOUVEAU LANGAGE DE L’ UNIVERS CRYPTO. La cryptomonnaie, c’est le nouvel Eldorado. Le principe ? Des transactions par voie numérique entre vendeurs et acheteurs à l’aide de monnaies digitales traçables et valorisées selon l’offre et la demande, sans intermédiaire et donc sans frais bancaires, comptabilisées par un système extrêmement pointu et inviolable ; la “blockchain”. Les premières crypto-monnaies apparaissent en 2009, avec le Bitcoin comme devise numérique la plus célèbre, et jouissent d’une réputation sulfureuse à leurs débuts puisqu’elles sont utilisées pour des transactions de flingues et de narcotiques sur le dark web. Beaucoup se sont enrichis avec les effets «bull run» des dernières années, une période sur laquelle le cours de certains actifs numériques s’envole, et tout le monde veut s’y mettre aujourd’hui, sans y comprendre grand chose la plupart du temps.

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Plus haut c’est le soleil.


ENQUÊTE

Mont-Saint-Vincent

Là-bas, il n’y a pas de pétrole mais il y a bien failli avoir de l’amiante... On est allé comprendre comment un projet d’enfouissement de déchets a déchaîné les passions dans un des plus beaux village perché de la Bourgogne-Franche-Comté. Texte et photos par Cédric De Montceau


L

e Mont-Saint-Vincent, c’est un phare historique et touristique au milieu de la Saône-et-Loire entre charolais et clunisois. Une charmante petite commune qui culmine à 589 mètres d’altitude et fait le bonheur de tous les randonneurs et cyclistes du coin qui veulent aiguiser leurs mollets. Le Mont-Saint-Vincent, c’est comme Uchon ou Solutré, c’est un moyen de se rapprocher du ciel et de s’inviter un peu plus près du balcon des dieux. Un de ces endroits sacrés et vénérés pour leur magnétisme naturel et leur point de vue sur les terres environnantes. Dernièrement, le symbole local a déchainé les passions. Écologie, amiante, sacrilèges et trahisons. Y’a eu du rififi dans le 71. En début d’année ça a commencé à grogner sec là-haut. Le MontSaint-Vincent accueille sur sa commune une carrière qui exploite un gisement de granit beige. Le sol appartient à la commune et l’activité d’extraction à l’entreprise Rougeot. Un géant du bâtiment bourguignon basé à Meursault. L’entreprise aurait déposé un dossier auprès de la DREAL (Direction Régionale de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement) afin de pouvoir enfouir de l’amiante et autres déchets dans la carrière qu’ils exploitent à MontSaint-Vincent depuis 2016. Des habitants sont alertés au détour d’un apéro improvisé avec un lanceur d’alerte local. Un habitant de Mont-Saint-Vincent nous rapporte « C’est en février 2021 qu’on a appris un peu par hasard ce projet d’enfouissement. En fait, c’est un conseiller municipal démissionnaire qui est venu nous en parler. Notre sang n’a fait qu’un tour ! ». Suite à des investigations un groupe d’opposants se forme, Joël Jouve, président du comité des fêtes de Mont-Saint-Vincent explique « En début d’année, on a découvert que la mairie connaissait ce projet depuis 2019. Le maire et les conseillers étaient donc au courant mais rien n’a été dit. Toute l’équipe avait pour instruction de ne pas en parler avant les élections municipales de 2020. Le projet a suivi son cours. On a appris que certains conseillers municipaux et monsieur le maire avaient été invités à visiter un autre site d’enfouissement du côté de Reims qui appartient également à Rougeot. L’entreprise a réussi à convaincre la mairie que le projet était sans risque. Mais on se demande comment ? ».

Mont-Saint-Vincent, c’est comme Uchon ou Solutré, c’est un moyen de se rapprocher du ciel et de s’inviter un peu plus près du balcon des dieux.


L’amertume gagne du terrain et la contestation grandit. Jean Girardon, le maire de Mont-Saint-Vincent est pointé du doigt pour sa discrétion douteuse et l’entreprise Rougeot est perçue comme un ogre oligarchique venu se torcher dans la butte adorée. Les citoyens décident de se mobiliser. Cathy Barboiron, présidente de l’association Préserver Mont-Saint-Vincent nous parle de la situation « Rougeot bénéficie d’un contrat de fortage avec la mairie depuis 2010. Celui-ci est valable jusqu’en 2022, maintenant ils veulent enfouir de l’amiante et des autres déchets. Heureusement que quelqu’un nous a prévenu sinon on ne l’aurait jamais su ! On a alors décidé de faire une pétition et on a récolté 100 signatures d’entrée de jeu en l’espace de 3 jours ». Pour informations, Mont-Saint-Vincent compte environs 350 habitants et 215 électeurs inscrits. « Après cette pétition, on s’est dit qu’on allait monter une association. On a fait une première réunion mais tout le monde n’était pas d’accord sur la manière de s’organiser ». La démocratie est un bistrot géant à ciel ouvert et on adore ça. La détermination semble être la même

remontée contre le projet. « Collonges est à 200 mètres en dessous à l’est de la carrière. Autant vous dire que la théorie du ruissellement, là elle va bien fonctionner ! La région du MontSaint-Vincent est protégée en ZNIEFF (zone naturelle d’intérêt écologique, faunistique et floristique) et même une partie de la carrière est dans cette zone. Collonges est en zone « Natura 2000 » parce qu’on héberge une race de chauve-souris qui est en voie d’extinction. Cette zone s’arrête à moins de 2km de la carrière. Vous savez, on demande aux habitants de respecter l’environnement et de ne pas utiliser de désherbant. Ici certaines habitations sont alimentées par les sources. On est sur la ligne de partage des eaux, les sources s’écoulent dans la Bourbince, l’Arroux et la Loire. Vous voyez le bazar ? » Malgré les guerres intestines, les associations et le collectif continuent leur campagne de sensibilisation. Affichage, conférence de presse, marche symbolique et contestation tenace. Le combat se fait entendre. Parce qu’il est question de ça : se faire entendre. Rebecca Maeder Kim, présidente de ACP Environnement évoque la stratégie :

Marketing agressif.

mais les opposants au projet ne sont pas raccord sur la forme. Ça clash directe ! Au final, l’association Préserver Mont-SaintVincent et ses alentours finie par se constituer laissant derrière elle une troupe de dissidents contestataires déçus. Ni une, ni deux, le collectif Comme un poison dans l’eau est créé (ils n’ont pas répondu à nos solicitations). En tête, une ancienne élue de la mairie de Mont-Saint-Vincent, est vite taxée de parasitage par ses désormais ex-anciens camarades de jeux. En cherchant l’unité, on trouve parfois la division. Pendant qu’on s’écorche en haut, un peu plus bas une autre commune concernée se réveille. Collonges-en-Charollais est directement touché par la problématique d’enfouissement et des risques de pollution des sols. Une association, ACP Environnement voit le jour. À la différence de Mont-SaintVincent, l’association est soutenue par la municipalité. Josette Lagrange, la maire de Collonges-en-Charollais, est très

« On a eu du mal à rassembler tout le monde, mais on a quand même réussi à rencontrer les dix maires des communes alentours. Collonges-en-Charollais, Marigny, Genouilly, Sigy-le-Châtel, Cluny, Salornay-sur-Guye, Joncy, Le Puley, Saint-Eusèbe et Gourdon. La plupart des élus étaient vent-debout contre ce projet d’enfouissement ! » En France, il reste près de 20 millions de tonnes d’amiante à extraire et il n’y a que 11 centres d’enfouissement. Mais pourquoi à Mont-Saint-Vincent ? Un des membres d’une des associations donne son avis « On a besoin de traiter cette amiante mais pas dans un lieu comme celui-ci. C’est un lieu historique et touristique. En plus on est en hauteur. C’est un non-sens ! Comment le maire peut-il accepter un projet pareil ? Nous on se pose des questions. Il y a un loup quelque part ».

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L

a colère gronde et les rumeurs enflent, Jean Girardon est presque suspecté d’y avoir des intérêts cachés. Le maire de Mont-SaintVincent, ancien professeur en Droit à la Sorbonne et spécialiste en matière d’aménagement et d’environnement est aussi élu à la mairie de la municipalité depuis 1983. Cet homme aime forcément son territoire, un animal politique comme lui ne peut pas être en faveur d’un tel projet. « La commune est tenue de rester sur la procédure. En ce qui concerne le fond de l’histoire, c’est la population qui décidera. On fera un referendum. À l’issu de ce vote, ce sera la décision de la commune et bien sûr en tant que maire je l’appliquerai. Si la DREAL admet que le projet de Rougeot est compatible, à ce moment là on entrera dans une nouvelle phase. Celle de l’enquête publique. À ce stade, on pourra donc intervenir. Dans l’enquête publique, il est prévu que la 34

commune donne son avis. Pas son accord hein ! Mais son avis » nous explique Jean Girardon. Cet avis sera arrêté par la population par voie de referendum. À partir de là le préfet peut décider si il y a lieu de faire un arrêté autorisant l’enfouissement ou non. Le maire est très attaché à l’idée de suivre une procédure bien précise. « Quand on me demande pourquoi je ne me suis pas opposé au projet, je réponds que mon problème dès le début, était de ne pas être exposé à un contentieux. Il faut avoir des billes pour s’opposer ! Si j’avais dit à l’entreprise : je ne veux pas de votre projet. Ce serait parti devant le juge. Et celui-ci m’aurait dit : monsieur comment pouvezvous vous opposé à un projet que vous ne connaissez pas ? Automatiquement, on se retrouvait dans une position de fragilité dès le départ. Quand vous débutez un processus et que vous avez une décision de justice qui ne vous est pas favorable, je vous assure que c’est compliqué. Il faut faire les

Faire disparaitre l’amiante est une question de santé publique mais aussi de marchés très juteux. Les mêmes qui ont fait du profit sur l’amiante en font maintenant avec le désamiantage.


choses au bon moment pour qu’elles pèsent. Nous on veut sortir de cette histoire par le haut. C’est-à-dire que la carrière continue son activité d’extraction mais pas d’enfouissement. J’en ai entendu parler en 2019 mais le projet n’a été déposé qu’en février 2021. On a même cru à un moment que le projet était abandonné ». Le maire semble joué la carte de l’honnêteté face à la soi-disant mauvaise compréhension du bordel juridique auquel il dit être soumis. Pour lui toute l’agitation du moment cache aussi des motivations inavouées. « Des associations et un collectif se sont formés et ça a été assez violent. Je pense qu’au tout début certains étaient motivés par des ambitions personnelles. Vu le contexte local, certains auraient voulu être au conseil municipal. C’est un peu vouloir être calife à la place du calife voyez-vous ».

Farandole de pochettes à la ceinture pour Joël Jouve, ici accompagné de la député de la Saône-et-Loire Josiane Corneloup.


En effet, il n’y aura pas besoin de référendum puisque l’entreprise Rougeot a décidé de retirer le projet d’enfouissement.

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a craint avec l’amiante, y’en a partout et c’est pas bon pour la santé. Selon la CAVAM (coordination des associations de victimes de l’amiante et des maladies professionnelles) on devrait arriver à 100 000 morts d’ici 2050. Faire disparaître l’amiante est question de santé publique mais aussi de marchés très juteux. Les mêmes qui ont fait du profit sur l’amiante en font maintenant avec le désamiantage. Et ça se joue à coup de milliards. En France, seules deux solutions sont offertes : l’enfouissement ou l’inertage, la première étant majoritairement retenue en raison de son coût moindre et en l’absence de centres d’inertage en nombre suffisant. Le seul centre opérationnel sur notre territoire, agréé par l’ADEME (Agence de transition écologique), qui utilise la technique de la torche à plasma se situe dans les Landes, à Morcenx. Cette technique consiste à chauffer l’amiante à très haute température dont le résidu est inerte et valorisable sous forme de granulats comme souscouche routière. D’autres voies de valorisation sont à l’étude, 36

notamment pour le stockage d’énergie solaire. Ce processus est très intéressant mais il ne traite qu’une infime partie des déchets amiantés et reste onéreux. Une autre solution d’inertage est à l’étude. C’est un procédé chimique avec des bains d’acide puis thermique à faible température (-100°C). Laissez mijoter quelques heures, le temps de casser les fibres d’amiante, et le déchet devient totalement inoffensif. Avec en prime, des produits susceptibles d’être valorisés comme les sels de magnésium, le gypse, l’anhydrite… En laboratoire, la solution a fait ses preuves, ce système d’inertage devrait voir le jour dans la région Grand-Est dans peu de temps mais les associations dénoncent un manque d’engouement global. Cathy Barboiron sait très bien pourquoi « Tant qu’on acceptera d’enfouir parce que ça coûte moins cher, il n’y aura pas de fonds débloqués pour les solutions alternatives ». Les choses sont prévues en France, et ce dès janvier 2022 avec une loi datant de février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire. Et en 2025, l’Europe prévoit l’interdiction totale de l’enfouissement d’amiante.


Sympa le quartier.

Donc il va bien falloir avoir de l’imagination à un moment donné les gars ! À Mont-Saint-Vincent et aux environs on grince dents, ça rigole jaune et le ton monte. Les membres des associations sont remontés comme des coucous « Nous on se retrouve avec un projet d’enfouissement traditionnel sans projection sur le futur, c’est complètement archaïque par rapport à ce qu’on vit sur le plan écologique. Une oligarchie dans le dénie complet de plus qui piétine la santé humaine. Rougeot a quand même signé un protocole RSE (responsabilité sociétale des entreprises) qui est une contribution des entreprises au développement durable. Ils le font savoir mais c’est que de la com parce qu’au final ils courent après une chose bien plus importante à leur yeux que la santé publique ou l’environnement : l’argent ! Certains membres de la CUCM (Communauté urbaine Montceau-Creusot) nous ont félicité d’avoir mis Rougeot face à ses contradictions. Surtout que l’entreprise valorise ce RSE et s’en est servi pour signer des contrats BTP pour les J.O. 2024 ».

Pendant six mois le surprenant petit village à remuer ciel et terre mais aussi les coeurs, et ça n’a pas été vain. En effet, il n’y aura pas besoin de referendum puisque l’entreprise Rougeot a décidé de retirer le projet d’enfouissement (ils ont aussi oublié de nous répondre). NON, il n’y aura pas d’amiante à Mont-SaintVincent ! On le sait depuis le mois de juillet dernier et le contrat d’extraction devrait être reconduit en 2022. Bravo à ces hommes et à ces femmes qui se sont indignés. Ils ont fait renoncer les puissants. Ils ont su oeuvrer au bon moment et court-circuiter un processus qui s’apparentait à un piège. « Comment intervenir quand la machine est lancée ? » prévient un survivant. Enfouir des déchets physiques c’est un peu comme enfouir les déchets de l’âme. C’est risqué, un jour ou l’autre, ils ressurgissent plus puissants et plus dévastateurs. Puisse le combat du Mont-SaintVincent être un symbole victorieux face à l’obscurantisme économique. L’espoir est dans le pré.

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ANTHRO POCENE DE CRIME Par Nils Bruder Photos deep web

« On est assis à l’arrière d’une voiture qui fonce droit dans le mur, sans que les politiques assis au volant ne réagissent » Michel Magny


INTERVIEW

Vos sneakers fabriquées par des mômes avant de traverser la planète en porte-containers ; Bayer qui saupoudre des champs de céréales ; la France qui artificialise ses sols sur l’équivalent d’un département tous les sept ans… Ce sont autant de facettes de l’anthropocène, une « nouvelle époque géologique dans laquelle nous sommes récemment entrés et qui se caractérise par la pression sans précédent que les humains font peser sur l’écosystème terrestre. » Ça, c’est la définition qu’en donne Michel Magny, Directeur de recherches émérite au Laboratoire de ChronoEnvironnement de l’Université de Franche-Comté. Pour dire si c’est un calibre, il est Médaille d’argent du CNRS et auteur du Que saisje ? sur le phénomène qui, selon lui, relève autant d’une crise de la nature que d’une crise de l’humain. Autant dire qu’on n’est pas sortis du sable…

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Dans les grandes lignes, c’est quoi l’anthropocène ?

Le terme a été popularisé, au début des années 2000, par le météorologue Paul Crutzen (Prix Nobel de chimie en 1995). Il associait l’apparition de ce phénomène à la Révolution industrielle, ayant débuté dans la seconde moitié du xviiie siècle avec la mise au point de la machine à vapeur par Watt en 1784. Cela étant, les impacts de l’humain sur la nature ne sont pas brutalement apparus à cette période-là. Les traces des premières agressions fortes sur la biodiversité remontent aux chasseurscueilleurs du paléolithique, en -12000. L’émergence de la civilisation agricole, au néolithique, marque l’apparition d’une économie productive qui viendra amplifier les impacts sur l’environnement. En -3000, près de 20 % des forêts d’Europe et d’Asie étaient déjà perturbées par les humains. En parallèle à tous ces changements, les sociétés se transforment avec de fortes stratifications. Par exemple, l’esclavage remonte au néolithique. Bien entendu, il n’y a pas d’égalité originelle, mais c’est à partir de ce moment-là que les choses deviennent clairement inégalitaires du point de vue de la richesse. Les relations de l’humain à la nature seraient donc le reflet des relations des humains entre eux ?

CETTE CROISSANCE, LE CLUB DE ROME LA REMETTAIT DÉJÀ EN QUESTION EN 1972. OR, CE DISCOURS N’A PAS EU DE RÉELS EFFETS SUR NOS POLITIQUES OU SUR NOS MODES DE VIE…

En effet, et en tant que scientifiques, on voit tout cela comme une tragédie... On a une perception toujours plus aiguë des problèmes qui apparaissent et on a l’impression d’être assis à l’arrière d’une voiture qui fonce droit dans le mur, sans que les politiques assis au volant ne réagissent. A de rares exceptions près, on a dépassé le stade du climato-scepticisme, mais les décideurs reflètent encore le manque de formation et de sensibilisation générale quant à la gravité et à la rapidité des phénomènes en cours. On se fait rattraper par le climat, mais il faut avoir conscience que le pan écologique n’est que l’aspect le plus emblématique de la crise actuelle. C’est la société dans son ensemble qui ne se porte pas bien, comme en atteste la montée des populismes ou l’épisode des Gilets Jaunes. D’ailleurs, les bouleversements viendront peutêtre du côté social, autant que des menaces climatiques et environnementales.

«Les traces des premières agressions fortes sur la biodiversité remontent aux chasseurs-cueilleurs du paléolithique.»

Oui, et à ce titre, la crise écologique qu’on connaît aujourd’hui est aussi une crise qui s’étend à l’ensemble des sociétés. C’est pourquoi j’insiste sur deux grands « communs » dans mes ouvrages. Tout d’abord, l’humain appartient toujours à une société. N’en déplaise aux néolibéraux, il n’y a pas d’individus isolés. On se souvient de Margaret Thatcher qui, dans les années 1980, expliquait qu’il n’y avait pas de société, seulement un marché. Or, l’humain n’a pas émergé tout seul. En remontant entre six et sept millions d’années, les paléoanthropologues nous apprennent que l’apparition de Homo sapiens n’est pas un miracle de l’évolution, mais que celui-ci s’est développé en même temps qu’émergeait la société.

Quel est le second « commun » dont vous parliez ?

Outre la société, l’humain appartient aussi à la « communauté du vivant ». Celle-ci réunit les organismes – animaux, végétaux – qui vivent tous en interdépendance au sein de la biosphère, elle-même inscrite dans un système Terre aux ressources limitées. C’est un leitmotiv récurrent de la littérature scientifique que de parler des limites planétaires, mais il y a aujourd’hui une véritable révolution copernicienne à opérer pour affirmer la primauté de la préservation de nos deux « communs » face à une 40

idéologie néolibérale qui prône une croissance infinie.

Comment la situation peut-elle changer ?

Comme je l’évoquais, il y a un travail d’alphabétisation scientifique à mener auprès des responsables politiques, des acteurs du monde économique et de l’opinion publique. On voit que les rayons de librairies se remplissent de livres traitant ces questions et il faut s’en réjouir. Mais le pourcentage de personnes averties reste trop limité pour inciter les politiques à bouger. Pour cela, il faudrait une poussée très forte de la société. Et plus on agit tôt, plus la casse sera limitée. L’enjeu est de taille quand on sait qu’il y a, par exemple, une inertie d’environ 90 ans sur l’effet des émissions de CO2. Les actions actuelles dans ce domaine n’auront donc pas d’effets immédiats.

Vous semblez pessimiste quant aux capacités de l’humain à infléchir la tendance…

Je refuse de voir la question sous cet angle : le rôle du scientifique n’est pas d’être pessimiste ou optimiste, mais d’être lucide. Nous ne sommes pas là pour faire peur, mais pour partager avec le public les réalités telles qu’elles sont perçues par la communauté scientifique. Quand je parle de lucidité, c’est aussi prendre conscience qu’il n’est pas possible de continuer notre bonhomme de chemin en espérant qu’un « miracle technologique » nous sortira de l’ornière.



« Le rôle du scientifique n’est pas d’être pessimiste ou optimiste, mais d’être lucide. Nous ne sommes pas là pour faire peur, mais pour partager avec le public les réalités. »


Dès lors, quels sont les leviers d’action pour améliorer la situation ?

On en revient à la primauté du marché…

Là encore, je suis un scientifique et mon propos n’est pas d’écrire un Manuel du changement par temps de crise. L’enjeu est de construire collectivement de nouveaux projets pour les sociétés et pour la planète. Cela passe par le développement de connaissances scientifiques partagées, par une prise de conscience générale, mais aussi par l’émergence de nouveaux désirs. La notion de bien-être commun doit être opposée à l’idéologie néolibérale de la compétition. On en revient aux « communs » qui constituent une boussole pouvant nous guider pour éviter la catastrophe.

Et aux inégalités qui s’amplifient à grande vitesse depuis les années 1980. De nombreux rapports, comme celui d’Oxfam parmi les plus récents, mettent en lumière les disparités croissantes dans la distribution des richesses. Par exemple, quand on regarde l’évolution de la distribution des revenus mondiaux entre 1980 et 2016 – récapitulée par le Rapport sur les inégalités mondiales 2018 –, on observe que les disparités atteignent un niveau d’une obscénité insupportable : sur cette période, les 1 % les plus riches au monde ont capté autant de revenus que les 70 % les plus pauvres, et dans le détail, les 0,1 % les plus riches autant que les 50 % les plus pauvres.

Et plus concrètement ?

Des collectifs de scientifiques vont dans le détail avec, par exemple, des travaux autour des émissions de gaz à effet de serre. Sans surprise, ils appellent à la sobriété et à l’arrêt des subsides aux énergies fossiles. En 2020, celles-ci recueillaient encore 2 800 milliards d’euros. Une réponse peutelle être apportée à l’échelle individuelle ?

On est loin du bien-être commun dont vous parliez…

Et cela souligne toute l’urgence qu’il y a à restaurer à la fois la communauté des vivants et les sociétés. C’est un projet politique global et forcément long à mettre en œuvre. Il n’y aura pas de « grand soir ». Comme pour la trajectoire d’un paquebot, le changement de direction demande du temps. Surtout quand on tarde à engager la manœuvre, alors que l’urgence environnementale et sociale devient de plus en plus pressante.

« Les bouleversements viendront peut-être du côté social, autant que des menaces climatiques et environnementales. »

Les études font ressortir que l’action à la portée des individus représente environ 25 % des émissions de gaz à effet de serre. Le reste dépend des responsables politiques et économiques. Certes, 25 % ce n’est pas négligeable et la contribution de chacun compte, mais la somme des actions individuelles reste insuffisante. Nous faisons face à une crise systémique et c’est toute la structure du monde qu’il faut remettre en cause.

Les technologies n’ont-elles pas été un facteur de progrès ?

Il est vrai qu’en deux siècles, nos conditions de vie se sont améliorées. Mais c’est ambivalent. Face à l’industrialisation sauvage du xixe siècle, rappelons que les luttes sociales ont été dures et difficiles. Même aujourd’hui, on a tendance à sousestimer ce qui se passe dans le monde du travail. Il y a des dérives massives et des lois tentent tant bien que mal de limiter les régressions sociales. Soulignons aussi qu’on a externalisé les structures les plus discutables de la production industrielle vers les pays en voie de développement. On se souvient des vieilles photos du xixe siècle montrant des gamins de huit ans dans des ateliers à tisser, en France ou aux Etats-Unis, mais il faut rappeler que près de 150 millions d’enfants travaillent aujourd’hui, à travers le monde.

pour aller plus loin

Michel Magny sera à l’affiche de Sur Terre #1, à Besançon. Du 9 au 15 novembre, ce temps fort organisé par Les 2 Scènes réunit des artistes et des scientifiques qui sondent les grands enjeux environnementaux et sociétaux du moment. Au programme notamment, Inside, une conférence-performance de Bruno Latour. Natif de Beaune, ce philosophe des sciences est actuellement considéré comme le penseur français le plus influent au monde (genre Jean-Paul Sartre, le strabisme en moins)… + d’info : les2scenes.fr citation

« Entre 1980 et 2016, les 0,1 % les plus riches au monde ont capté autant de revenus que les 50 % les plus pauvres. C’est une obscénité insupportable. » Michel Magny.

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Ah, le tatouage creux de reins...


Le ciel, le soleil & les poils ................... Avec 2,6 millions de Français qui le pratiquent régulièrement et plus de 500 espaces dédiés, la France est la première première destination naturiste mondiale. Et la Bourgogne FrancheComté n’est pas la dernière à se mettre à nu. On a fait tomber slip et t-shirt pour un reportage en immersion chez les naturistes. ................... Texte et photos par Léos Van Melckebeke & Clément Guillet

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« On fait tomber la chemise, mais aussi, l’uniforme. Ici, pas de médecin, de pompier, ou de prof : on est tous pareil quand on est à poil » explique Joël « Bienvenue au Club du Soleil de Dijon ! » Joël m’ouvre le portail tout sourire en tenue d’Adam. Situé à Diénay, à une vingtaine de kilomètres de Dijon, au bout d’un chemin de terre en bordure de forêt, une minuscule pancarte en bois indique l’entrée du club. Trois hectares, soigneusement clôturés, sont dédiés à la pratique du naturisme. Joël, la soixantaine est le président de l’association depuis 2004 qui compte aujourd’hui une soixantaine de membres. Pétanque, barbecue, ping-pong, piscine ou bronzette, les activités proposées ici sont simples et bucoliques, sauf qu’elles se pratiquent à poil. À peine arrivé, comme une évidence, je fais aussi tomber le short et le slip pour mieux m’imprégner de mon sujet. On me tend deux boules et je commence une partie de pétanque avec mes hôtes. « C’est la première fois que tu te mets nu ? » me lance Joêl. « Et bien tu pourras plus le dire ! » Entre naturistes, le tutoiement s’impose très vite assez naturellement. Une fois déballée son intimité, difficile de continuer à se vouvoyer. « Ici on a un rapport plus direct aux gens, on fait tomber la chemise, mais aussi, l’uniforme. Ici, pas de médecin, de pompier, ou de prof : on est tous pareil quand on est à poil » explique Joël.

« Une manière de s’accepter » « J’ai découvert le naturisme sur une plage vers Perpignan, j’ai beaucoup aimé le contact du soleil, de l’eau et du vent sans maillot de bain ». Nelly, la cinquantaine fait partie du club depuis 2014. « J’avais fait de la chirurgie esthétique, puis, je me suis mis au naturisme. Le naturisme décomplexe car il permet de voir d’autres corps et d’accepter les différences et les formes. » Paradoxalement exposer le corps ferait l’oublier, alors que l’habiller, soulignerait les formes et serait plus propice aux comparaisons. « C’est dans les lieux naturistes que l’on rencontre le plus de personnes en situation de handicap. Elles se sentent peut-être moins jugés ». renchérit Joël. « Aujourd’hui, je n’ai plus de complexes en voyant les gens en maillots de bain » conclut Nelly. L’écologie du naturisme. Proust naturiste ?

Une madeleine de Proust naturiste Contrairement à ce que pense Joël, ce n’est pas la première fois que je me retrouve cul-nu en public. Jusqu’aux premiers jours de mon adolescence, mes souvenirs de vacances familiales ressemblent à tous ceux des enfants ayant connus les joies simples du camping en été : piscines bondées, sanitaires collectifs en béton et barbecues au milieu des guêpes. À un détail près : du maquis Corse aux dunes des Landes, tout le monde autour de moi était parfaitement nu, excepté les jours de pluie. « Ah mais je ne savais pas que tu étais naturiste ! » Lorsque j’évoque ces souvenirs, les réactions vont souvent du simple étonnement au léger malaise jusqu’au soupçon d’inceste parental et d’exhibitionnisme, voire aux amalgames avec le monde du libertinage. De mon côté, je me souviens plutôt avec nostalgie de ces


étés ensoleillés où la nudité était absolument naturelle et vite oubliée par tous, des fous rires partagés avec mes cousins et cousines lorsque mon oncle accrochait ses lunettes de soleil sur son pénis pour égayer les journées de baignades ou encore d’une rencontre atypique avec un couple de nains amis de PassePartout. Bref, des souvenirs de vacances heureuses et bucoliques. Venir au Club du Soleil allait-il faire remonter le plaisir du naturisme ? Me mettre cul nu avec Joël, ne serait-ce pas là ma madeleine de Proust naturiste ?

lorsque Joël devient président de l’association en 2004, seuls 13 personnes poursuivent l’aventure. Joël va alors donner une nouvelle impulsion au club : création du site internet, achat d’une piscine... Mais toujours sans eau courante ni électricité « Plus on est écolo mieux ça vaut » précise-t-il. « Seuls deux panneaux photovoltaïques ont été installés en 2016 pour la piscine » précise Joël. Pour les toilettes, l’eau de pluie est captée dans des réservoirs. En effet, l’écologie et le respect de la nature sont intrinsèquement liés au mouvement naturiste, comme le précise la FFN, qui définit ce dernier comme « une manière de vivre en harmonie avec la nature, caractérisée par la pratique de la nudité en commun, et qui a pour but de favoriser le respect de soi-même, le respect des autres et celui de l’environnement. » C’est notamment ce qui le distingue du simple nudisme – qui consiste à pratiquer des activités nu et notamment la baignade – tandis que le naturisme intègre une dimension comportementale voire philosophique : proximité avec la nature, style de vie sain et préservation d’un environnement naturel.

Le naturisme décomplexe car il permet de voir d’autres corps et d’accepter les différences et les formes.

En Bourgogne FrancheComté, chaque département compte aujourd’hui sur son territoire au moins un espace naturiste affilié à la Fédération Française de naturisme (FFN) – association, club ou camping – avec plusieurs centaines de membres. Le Club du Soleil de Dijon est le plus ancien de la région et accueille toute l’année ses adhérents. Créé en 1954 par un précurseur qui achète puis aménage le terrain, il a compté jusqu’à 250 membres dans les années 70. Mais

Les débutants ont encore la marque du slip.

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« Le confinement a réenclenché mon envie de liberté et ce besoin de communion avec la nature pour retrouver le lien avec les autres, après cette longue période enfermée dans mon appartement. » Christelle, adhérente depuis quelques mois, a commencé le naturisme avec ses parents à l’âge de 5 ans. Pendant que je fais une partie de ping-pong avec elle, elle se confie. « On partait chaque été dans des grands campings sur la côte atlantique. Se baigner dans les vagues toute nue, c’est une impression extraordinaire de communion avec les éléments. À l’adolescence c’était un peu plus complexe entre jeunes, et certains restaient habillés ». Après de longues années sans pratiquer, la pandémie de Covid-19 a été l’occasion pour elle de renouer avec ses souvenirs d’enfance. « Le confinement a réenclenché mon envie de liberté et ce besoin communion avec la nature pour retrouver le lien avec les autres, après cette longue période enfermée dans mon appartement. Dans l’état d’esprit du naturisme je retrouve une ambiance bienveillante. »

Les textiles La communauté s’organise-t-elle autour d’un séparatisme assumé contre les textiles – les campeurs et baigneurs habillés dans le jargon ? Au club de Dijon, la nudité n’est jamais imposée brutalement. « Un jour un membre m’a demandé si sa femme pouvait venir habillée » raconte Joël. « J’ai accepté et au bout de quelques semaines elle a essayé et ça lui a plu !» D’ailleurs, la nudité n’est pas systématique et dépend fortement des aléas météorologiques. « Quand quelqu’un a froid, il reste habillé. Et quand on fait des randonnées hors du club, on garde nos vêtements ! » Tous les membres n’en parlent pas avec la même facilité à leur entourage. Comme Christelle qui ne l’évoque pas avec ses proches. « Mes enfants me charrient un peu mais n’ont jamais critiqué mon choix », explique Nelly. Joël, ancien pompier, en parlait plus librement : même les colonels étaient au courant.

Cohabitation avec les voisins Comment se passe la cohabitation avec les voisins ? « On a de bonnes relations avec les habitants. Avant ils nous appelaient les « culs-nus » mais maintenant ça se passe très bien. » explique Joël. « Le maire m’invite régulièrement aux réunions des associations. » Certains curieux se sont cependant risqués à entrer sans faire partie du club. « On était en train de jouer aux boules quand on

a entendu des branches bouger dans la forêt. » raconte Nelly. Joël acquiesce : « Je n’ai pas pu le choper, sinon je lui aurais dit bonjour ! ». Mais ces cas sont exceptionnels et les intrus sont plus souvent liés à l’environnement. Si l’entretien du terrain requiert l’investissement de tous, la faune locale s’invite ainsi parfois aux festivités. « J’étais à poil sur le tracteur quand j’ai vu des sangliers sur le chemin, quatre, huit et puis douze ! » raconte Joël. « On a rebouché les trous dans le grillage ».

Doyenne du naturisme Parmi la soixantaine d’adhérents du club, on retrouve des enseignants, policiers, médecins et beaucoup de retraités. « Certains viennent avec leurs petits-enfants ! » fait remarquer Joël qui a commencé à 14 ans avec un oncle naturiste. « J’ai continué et pendant des années j’ai fait du naturisme sauvage dans la Vallée de l’Ouche, avant de découvrir le club. ». Si les plus jeunes membres ont une quarantaine d’années, la plupart sont plus âgés tandis que la doyenne du club a fêté ses 91 ans. « Il paraît que les naturistes vivent plus longtemps » rigole Joël. À l’image de Christiane Lecocq, pionnière du naturisme en France décédée à 103 ans (voir encadré). Journée galette des rois, cueillette du muguet et buffet de Noël rythment l’année, sans oublier les diverses journées portes ouvertes qui permettent aux curieux de découvrir la pratique du naturisme. Les activités ressemblent à celles de n’importe quelle association amicale : parties de pétanques, trempette dans la piscine et barbecues. Joël aimerait que plus de jeunes viennent découvrir le club : « J’ai même commandé une balançoire, pour les jeunes parents ». Il n’est plus nécessaire de fournir un certificat de bonnes mœurs, un extrait de casier judiciaire et un certificat médical, comme c’était le cas dans les premiers clubs naturistes du début du siècle. Pourtant, l’adhésion au Club du Soleil de Dijon n’est pas automatique. « On demande une lettre de motivation, puis les nouveaux membres sont à l’essai pendant un an. » explique Joël. « Après si quelqu’un veut découvrir le club il suffit de passer un coup de fil et il pourra venir une journée ». Avis aux lecteurs ! Pour ma pomme, l’été prochain, je n’hésiterai pas à partir bronzer sans mon slip.

L’ arrivée du naturisme en France Né en Allemagne au XIXème siècle, le naturisme apparait en France au début du XXème siècle. Les véritables pionniers et initiateurs du naturisme pendant l’entre-deux-guerres sont deux frères médecins, André et Gaston Durville, qui fondent la Société naturiste en 1927 puis le camp de Physiopolis en région parisienne et enfin en 1932 le domaine d’Héliopolis sur l’île du Levant

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au large du Var. Le mouvement se démocratise aprèsguerre, notamment sous l’impulsion des époux Albert et Christiane Lecocq, naturistes militants qui créent les premiers Clubs du Soleil, puis le désormais célébrissime Centre Héliomarin de Montalivet et enfin la FFN – Fédération française de naturisme en 1950.


Le naturisme intègre une dimension comportementale voire philosophique : proximité avec la nature, style de vie sain et préservation d’un environnement naturel.

Je crois que j’aperçois le cochonet.


Quand un archéologue se penche sur le cas du Lavoir des Chavannes de Montceau-les-mines. Textes François Meylan Photos François Meylan et Archéotech

Le lavoir des Chavannes à Montceau-les-Mines, est un lavoir à charbon. Construit en 1923, il est mis à l’arrêt en 1999. Installé sur une surface de 32 hectares, le bâtiment occupe 8000 m2 et s’organise sur plusieurs niveaux. Des centaines de personnes y travaillaient en même temps à trier le charbon et le schiste fraichement sortis de la mine. Ce fut une des plus grosses usines de traitement de minerai d’Europe, avec un débit de 1000 tonnes par heure.


« Pour que Montceau puisse passer à autre chose, il faut faire tomber le Lavoir des Chavannes », m’a déclaré en substance Ben, un Montcelien rencontré autour d’un café, la première fois que nous nous sommes rencontrés. Autant vous dire que l’archéologue que je suis a été surpris. Et c’est peu dire. En archéologie, particulièrement en archéologie préventive qui est mon domaine professionnel, j’interviens pour conserver la mémoire. Voire pour créer une mémoire jusque-là inexistante, lorsque le souvenir de prédécesseurs plus ou moins lointains a disparu. Il y a ici quelque chose de l’ordre de la résurrection.

DEVOIR DE MÉMOIRE C’est l’État qui a instauré ce devoir de mémoire. Qui a décidé que, lorsqu’un patrimoine reconnu comme tel allait être détruit, il fallait le sauvegarder par une étude. Par exemple, lorsqu’une future route va abîmer les vestiges d’une villa romaine, les archéologues débarquent, fouillent et documentent. Ce n’est qu’ensuite que la route est construite. C’est à ce prix – car ce n’est pas gratuit, c’est même l’aménageur qui paie, au principe du « qui casse paie » – que sont conciliés aménagement du territoire, développement économique et attention au patrimoine. Il y a là l’idée d’un héritage à préserver, qui nous situe dans le temps. Ma rencontre avec Ben, c’est une situation de ce genre qui l’a provoquée. Avec comme enjeu le lavoir à charbon des Chavannes, en marge sud de de Montceau-les-Mines. Une cathédrale d’acier et de béton, un labyrinthe de passerelles et de machines. Une gigantesque relique de 8000 m² d’un passé minier aujourd’hui révolu, mais qui survit dans l’adjonction « Les Mines » au nom d’un petit hameau devenu ville, qui a fait se réunir des gens de tous horizons, de toutes nationalités.

MÉMOIRE COURTE, MÉMOIRE SÉLECTIVE Ce n’est pas une autoroute, ou un nouveau canal, ou un projet de plateforme logistique, qui est venu troubler l’immense silence du monstre, et menacer le monstre lui-même. Rien de cela dans le cas du Lavoir. L’histoire est différente. A sa fermeture en 1999, l’État a décidé que le Lavoir méritait une « inscription aux monuments historiques ». Cela signifie qu’on reconnaît officiellement une valeur d’exemplarité à un édifice. Dès que le Lavoir a cessé de fonctionner, il s’est donc vu octroyer un rôle d’emblème d’une période et d’une architecture. Le Lavoir est devenu mémoire. Sauf que, quinze ans plus tard, ce statut de témoin protégé disparaît. Plus d’exemplarité, de représentativité, de singularité. Pourtant, le Lavoir des Chavannes est le dernier représentant en France de ces énormes bâtiments-machines. En 2013, l’Etat a décidé de ne pas s’opposer à la démolition du colosse. En cause ? L’absence de projet pour faire perdurer le bâtiment et sa mémoire, et le danger que commencent à représenter des infrastructures vieillissantes ou vandalisées. En contrepartie et en préalable à cette disparition, c’est une sauvegarde par l’étude qui est demandée, avec la mention

« dans l’esprit de l’archéologie préventive ». Si vous m’avez suivi, c’est là que la boucle est bouclée, et que vous comprenez pourquoi un archéologue s’est retrouvé à s’intéresser au Lavoir des Chavannes, et à boire des cafés avec Ben.

LA GLOIRE & LA DÉFAITE Un petit parcours de l’histoire de Montceau-les-Mines fait mieux comprendre l’avis radical de Ben. Aujourd’hui cadenassé derrière ses lourdes grilles, le Lavoir des Chavannes évoque une période glorieuse de la destinée de la ville. Celle de la pleine exploitation minière, génératrice de travail, d’avenir, malgré la rudesse du travail. Réduit au silence, condamné à une quasi-solitude par la destruction des installations minières ou la reconversion de leurs parties les plus « nobles », le Lavoir témoigne d’une déchéance, d’une défaite qui s’étale sur plusieurs décennies. Celle de la fermeture des mines, de l’abandon de la politique charbonnnière de la France au profit de l’énergie nucléaire. C’est un passé illustre et lourd à la fois, qui se reflète dans le bassin de chargement du Lavoir. Par sa simple présence, le Lavoir nous dit-il que Montceau n’est pas encore passé à autre chose ? Il y a beaucoup d’humanité, d’émotion, derrière ce que dit Ben. L’abandon des mines, c’est aussi celui des mineurs.

Une gigantesque relique de 8000 m² d’un passé minier aujourd’hui révolu, mais qui survit dans l’adjonction « Les Mines » au nom d’un petit hameau devenu ville, qui a fait se réunir des gens de tous horizons, de toutes nationalités.

Deux chouettes sites internet ressources : tchorski.morkitu.org/1/chavannes-01.html www.patrimoine-minier.fr/chavannes 51


DE L’ÉMOTION À L’OBJECTIVITÉ En contraste, l’archéologue a une approche scientifique plus objective. Regarder le Lavoir avec des yeux d’archéologue, c’est chercher à comprendre son origine, son histoire, ses transformations, à travers l’étude de sa matérialité. C’est observer, décrire, analyser puis interpréter. Quelque chose de passionnant et inhabituel ici, est le fait que l’étude du Lavoir permet de croiser de multiples sources : le bâtiment lui-même, des archives particulièrement abondantes, des témoignages directs, des gens qui y ont travaillé, vécu ou qui vivent dans une relation plus ou moins proche au Lavoir. Vous conviendrez facilement que c’est moins courant quand on étudie des ruines romaines d’il y a deux mille ans. Surtout en ce qui concerne les survivants.

DES REGARDS À CROISER Pourquoi des archéologues, dans ce cas ? Et pas des architectes, des historiens, des archivistes, des sociologues, dont on peut imaginer que la réunion des compétences serait amplement suffisante ? Depuis quelques années, émerge une archéologie qu’on appelle « contemporaine ». On s’est rendu compte que les regards et les méthodes développés à propos de matériels anciens pouvaient être appliqués à des objets très récents. Que ce regard et ces méthodes diffèrent de ceux des architectes, des historiens, des archivistes et des sociologues. On voit poindre de la complémentarité et de l’enrichissement. Du supplément de sens.

Bien souvent des graffitis, par exemple sur les locomotives qui dorment à l’entrée sud du Lavoir. S’agit-il de vandalisme, ou d’expression artistique, ou les deux ?

AVANT, PENDANT, APRÈS : UNE RICHE HISTOIRE INACHEVÉE Un des enjeux de toute étude archéologique est la reconstitution de l’histoire d’un lieu. Pour le Lavoir, on peut facilement identifier des grandes périodes grâce aux archives accessibles sur internet : dossier d’inscription aux Monuments Historiques, archives du musée de Blanzy, descriptions remarquablement documentées d’amoureux de l’architecture industrielle. Montceau-Les-Mines, deux minutes d’arrêt.

Avant le grand lavoir, le tri et le lavage du charbon ont connu d’autres dispositifs, plus dispersés, accolés aux sites d’extraction. Les traces matérielles de ces antécédents ont sans doute disparu, il n’en reste que des images et des allusions – où l’on comprend que les travailleurs affectés à cette tâche sont surtout des femmes ou des enfants, avec une position assez basse dans les « grades » de la mine. 1923-1927 : c’est la construction du Lavoir des Chavannes, en réponse à une volonté de centraliser le traitement des matériaux bruts. De remarquables documents d’architecte illustrent ce programme initial.

Bien atypique, beaux espaces, quelques travaux à prévoir. 52

Après la seconde Guerre Mondiale, une grande partie des machines est remplacée et certaines toitures sont rehaussées. Le Lavoir prend l’aspect qu’on lui connaît aujourd’hui. Entre 1989 et 1994, en plein déclin de l’exploitation minière au niveau national, une dernière transformation est l’automatisation des machines.


L’arrêt définitif intervient en 1999, suivi de l’inscription aux monuments historiques en 2000. On entre dans la période de l’après, marquée par des interrogations et des projets, mais aussi par des réinvestissements non contrôlés des lieux par des acteurs aussi divers que des artistes, des explorateurs urbains ou de la végétation.

VANDALISME OU NOUVELLE OCCUPATION ? Un point intéressant est la notion de vandalisme, évoquée ci-dessus dans les arguments pour abandonner le Lavoir. Les images qui accompagnent ce sujet montrent bien souvent des graffitis, par exemple sur les locomotives qui dorment à l’entrée sud du Lavoir. S’agit-il de vandalisme, ou d’expression artistique, ou les deux ? Pour l’archéologue, il s’agit avant tout de traces de fréquentation, qui se rattachent à une phase d’occupation postérieure à la fermeture du site. Laquelle n’est pas à considérer comme une fin en soi, mais comme l’articulation entre deux phases d’histoire.

ON A MARCHÉ DANS LE LAVOIR Bien d’autres graffitis, inscriptions et affichages non officiels couvrent les structures du Lavoir : noms des ouvriers sur les vestiaires, instructions manuelles sur les machines, images érotiques dans les ateliers ou les réfectoires. Au cœur du bâtiment-machine, ces traces mineures évoquent la vie et du passage des humains, quels qu’ils soient, et méritent d’être décrits et enregistrés. Lorsqu’ils sont anciens, de l’époque romaine ou du Moyen âge, des graffitis de ce genre sont considérés comme de précieux témoignages et font l’objet d’analyses minutieuses. Il en va de même ici.

SITE DÉVASTÉ OU POMPÉI DU CHARBON ? Plus largement, une légende tenace a couru, selon laquelle le Lavoir avait été pillé dès sa fermeture. Lors de ma première visite, je m’attendais donc à trouver un site ravagé. En tant qu’archéologue, c’est l’impression contraire que j’ai eue. Les câblages arrachés, les quelques dégâts aux toitures ou aux vitrages, sont dérisoires face aux machines intactes, dont la plus petite doit peser plusieurs tonnes, ou face au sentiment d’être dans un bâtiment indestructible. Pour moi, le Lavoir est plutôt à considérer comme une Pompéi du charbon.

ÊTRE HABITÉ PAR LES RUINES D’une certaine manière, l’archéologue a pour mission d’habiter les ruines. Habiter au sens originel de fréquenter, se familiariser. Chercher à en savoir le plus possible, pour contribuer à sauvegarder et créer une mémoire. Pour ma part, le monument qu’est le Lavoir m’a fait un effet supplémentaire – et Ben par sa radicalité n’a fait qu’attiser cette attraction. Par un phénomène d’inversion, particulièrement puissant ici, c’est moi qui me suis retrouvé à mon tour habité par des ruines. Je m’écarte ainsi d’une posture scientifique, mais qu’importe. Je me sens proche des visiteurs clandestins, graffeurs et artistes, que je vois comme les discrets défricheurs de futurs possibles pour le Lavoir.

Cet article a été publié dans la revue Papier, éditée par Le média d’action de Bourgogne du sud (odil.tv), sous le titre Mémoire périphérique.


Par Frank Le Tank Photo : Alexandre Mellak

BOULEVARD DES HITS

Siamoises

DANS LA DISCOTHÈQUE DE

KOMOREBI

Komorebi, le duo féminin qui fait partie de la fine fleur de la scène électro de Besançon. Par électro j’entends électro-pop, rien à voir avec de la techno hardcore de fond de clairière, avec un soundsystem de 45 kg ! Caché sous ce nom japonais on retrouve donc un groupe qui s’est formé autour d’un concept : mettre en musique l’intraduisible ; des mots singuliers qui font référence à l’exception culturelle et à des idiomes poétiques ; comme Komorebi par exemple qui peut se traduire par « la lumière qui passe à travers les feuilles ». C’est beau putain...

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Après 3 années de prestations live sans disque en vue, le groupe fait amende honorable en nous offrant un premier EP en mai dernier. Sobrement appelé « Ici ». Une musique rayon de soleil, qui perce les compositions électroniques et poétiques du duo. Un shot de vitamine D. Afin de comprendre un peu mieux la musique de Komorebi, on s’est attardé avec Claire et Clara sur leurs influences à travers 4 disques essentiels dans l’ADN du groupe.


FLAVIEN BERGER

LÉVIATHAN

Clara : Flavien Berger, c’est le premier artiste avec lequel on s’est permis de se comparer. C’est ce vers quoi on tend, autant dans le fond que dans la forme. Bon, forcément ça diffère, Claire qui est à l’écriture a une façon différente d’écrire, c’est moins direct. Flavien Berger, il a cette désinvolture et cette espèce de second degré. Il est capable de sortir des trucs comme « le ciel est bleu » mais ça va passer grâce à cette nonchalance et à la qualité de ces productions. Pour moi, à la production, ça a été une grosse source d’inspiration. J’ai appris la MAO en copiant Flavien Berger ! J’essayais de retrouver son groove et les lignes mélodiques. Par contre, je n’ai jamais été vraiment une geek sur le type de claviers utilisés, je suis plus fascinée par le son global et la construction de ses morceaux. La chanson préférée du disque ?

Claire : Léviathan Clara : 88888888

MODERAT

MODERAT

Claire : « Celui-là, tu me l’as apporté sur un plateau ! » Clara : « C’est un album hyper important pour moi, même si de prime abord il est difficile de trouver du Moderat dans Komorebi. Mais je suis tout de même fascinée par le travail avec les différentes boucles et les textures apportées dans ce disque. Juste l’écoute d’un bref extrait me donne envie de tirer tout le fil et de me plonger dans l’album. C’est un disque qui me parle profondément, et ça doit jouer quelque part dans les compositions, peut-être par les compositions qui sont intéressantes ; c’est complètement déstructuré, et il y a une véritable liberté de mouvement. Je crois tout de même ce qui me fascine le plus, c’est ce son unique, reconnaissable immédiatement et qui donne à Moderat une identité propre hyper forte. C’est le but ultime pour un groupe d’avoir une si forte identité. » La chanson préférée du disque ?

CAMILLE

Claire : New Era Clara : Les grandes marches

LE FIL

Claire : « La première fois que j’ai écouté le disque, j’ai détesté ! Je suis une grande fan de Camille depuis toujours et au début je n’ai pas compris ce qui se passait dans cet album conceptuel. Puis j’ai fini par l’adorer ! C’est un album qui nous a liées quand on a commencé Komorebi. On l’écoutait respectivement de notre côté avant de se connaître et on était fascinée par le disque. Camille c’est une référence en termes de voix, de mélodies, d’harmonies bien évidemment mais elle a aussi un truc en plus. Je l’ai vu plusieurs fois en live, notamment sur une tournée où elle avait un micro caché dans ses cheveux. Cela donnait un côté magique à la prestation, et ça lui permettait d’occuper l’espace de façon différente. Pour en revenir au disque, il y a truc incroyable sur les formats ; une liberté de faire des mini-morceaux, des formats longs, de ne pas faire de pause entre les chansons. C’est quelque chose que l’on fait désormais dans les live de Komorebi, cela permet de créer une bulle, de conserver l’énergie. » La chanson préférée du disque ?

Claire : Pâle septembre Clara : La jeune fille aux cheveux blancs

Retrouvez le nouvel album de Komorebi – Ici

sur les Internets du world wide web et en live en BFC : • Le 2/10 Maison Colette - Besançon • Le 10/11 Le petit Kursaal – Besançon • Le 3/12 - La Vapeur – Dijon • Le 16/12 - Echo System – Médiathèque de Rioz

THE DO

SHAKE / SHOOK / SHAKEN

Claire : « Je ne sais pas si on a sélectionné ce disque pour les mêmes raisons… » Clara : « Pour les tubes ! » Claire : « Ah ben si en fait. En plus d’être composé que de tubes, le tracklisting est super punchy. Il n’y a pas vraiment de moments de pause ou de redescente dans ce disque. Il y a une énergie qui est véhiculée tout du long. Le travail sur les voix d’Olivia, les mélodies, c’est aussi quelque chose qui m’a beaucoup influencée avec Komorebi. Clara : « Personnellement je préfère le disque d’avant « Both way open jaws » qui est plus introspectif. Celui-ci est plus dans l’énergie, il peut vite devenir fatigant. Ça fait longtemps que je ne l’ai pas réécouté, mais ça a quand même été une source d’inspiration notamment pour les boîtes à rythmes dans notre travail, mais de façon indirecte. J’en étais encore à l’apprentissage de la musique quand il est sorti, et je ne voyais pas ce disque de façon technique, c’est plus une madeleine aujourd’hui. Je ne suis pas certaine que ce disque ait bien vieilli. » La chanson préférée du disque ?

Claire : Anita No ! Clara : Keep your lips sealed

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D I A P O R A M A

Esprit Guinguette Textes et photos par Édouard Roussel

Dehors c’est mieux. La BFC ce n’est pas vraiment Ibiza. Mais la région regorge de guinguettes, de paillottes, de gargotes pour se détendre au bord de l’eau, boire un verre et même guincher. Il y a encore 10 ans, les guinguettes c’était ringard. Mais ça c’était y’a 10 ans. Petit tour d’été non exhaustif du chill en BFC.

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Panthier (Côte d’Or).

Cuisery (Saône et Loire), la marina sur la seille. Y’a aussi une piscaille.

Le Midi Les Settons (Nièvre). Checke le kiosque à hot dog.


Esprit Guinguette

Grosbois en Montagne (Côte d’Or). Une VRAI guinguette.

La sentinelle Les Settons (Nièvre). Miko style.

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Cuisery (Saône-et-Loire). Saône of anarchy.

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Esprit Guinguette

Grosbois en montagne (Côte d’Or). Patinoire...mais comment ?

Extrabal Massily (Saône-et-Loire), l’esprit guinguette sans la plage. 4 caravanes posées dans un pré… Une pour la musique, une pour le bar, une pour la bouffe et l’autre pour les chiottes probablement.

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Le surchauffant, Vouglans (Jura).

La sentinelle Les Settons (Nièvre). Venez comme vous êtes !

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Esprit Guinguette

La Mercantile Vouglans (Jura). Le nutella est planqué en bas à droite.

Le Midi Les Settons (Nièvre).

Vouglans La Marina (Jura).

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auditOrium

granD théâtre

Belleville 2021 – Licences L-R-20-10149, L-R-20-10150, L-R-20-10151, L-R-20-10152

place Jean Bouhey

place du Théâtre

Abonnez-vous ! opéra musique danse cirque théâtre musical

Opéra de Dijon nouvelle saison 2021 2022 opera-dijon.fr


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Chiens écrasés en BFC Par Frank Le Tank

DOLE : UN POIDS LOURD SE RENVERSE. 25 TONNES DE PAPRIKA SUR L’A39.

DIJON : TROTTINETTE CONTRE VOITURE, LE CONFLIT DÉGÉNÈRE. LA CONDUCTRICE D’UNE TROTTINETTE A INJURIÉ, FRAPPÉ ET VOLÉ LES CLÉS D’UNE AUTOMOBILISTE.

bienpublic.com

bienpublic.com

Manger épicé.

(Thug Life + Trot’) x Boire ou conduire pourquoi choisir = Dijon Ville.

Bèze : Des panneaux d’entrée d’agglomération volés.

Longvic : Contrôlé pour ne pas avoir mis sa ceinture, il cachait des stupéfiants dans son caleçon.

bienpublic.com

Humour fascinant. Les villes de Poil et Montcuq en alerte orange.

BOURGOGNE : LA CÔTE-D’OR VICTIME D’UNE INVASION D’ESCARGOTS TURCS.

bienpublic.com

Le sens des priorités.

france3-regions

Tête de Turc. Du grains à moudre pour la bande à Bardella.

Dijon. Ivre, il termine en prison pour être retourné chez sa mère. bienpublic.com

BESANÇON. FLASHÉE 33 FOIS, ELLE IGNORAIT LE FONCTIONNEMENT DU RADAR TRONÇON. 20minutes.fr

Relégué en ligue 2 de la conduite avec 37 point dans les jumelles.

Allo, Maman bobo.

BESANÇON : UN HOMME CHUTE DE 12 MÈTRES APRÈS AVOIR VOULU URINER EN HAUT D’UN PRÉCIPICE. 20minutes.fr

Chute dangereuse dans le précipisse. 68

Dijon : Elle déverse plus de 47 000€ dans une fontaine, avant de s’y baigner. ladepeche.fr

Une belle somme en liquide.


Scène de musiques actuelles

Dijon

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Sept. Oct. Nov. Déc.

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49 rue des Lavaux 25300 Pontarlier

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L’ABUS D’ALCOOL EST DANGEREUX POUR LA SANTÉ. À CONSOMMER AVEC MODÉRATION

Gilberto Gil Feu! Chatterton Gaël Faye Altin Gün Lilly Wood and The Prick Paul Personne Kimberose AaRON Mansfield.TYA Benjamin Epps Prudence Johnny Mafia Laetitia Shériff Poupie Bonnie Banane Silly Boy Blue Nubiyan Twist J.E. Sunde Brain Damage Mademoiselle Jerusalem In My Heart Hyperculte Structures Coddiwomple Bantam Lyons La Battue …


la page mode

I WAN T T O S L IP

Par Chablis Winston & Arthur Guillaumot Photos : Diego Zébina Modèle : Romain Bouvier

C’E S T L E FA SHION C RU SH DU MOME N T ! Le slip revient en force après plusieurs décennies de mise au placard. Qui pourrait encore se passer de ces ravissants élastiques soutenant le paquet si majestueusement ? 70


Souplesse, légèreté, praticité, confort, liberté. Tels sont les mots qui reviennent dans la bouche des amoureux du slip pour décrire leur passion de ce vêtement effortless, qui occupe une place de choix dans notre dressing. Le slip peut aussi se teinter de couleurs acidulées ou d’imprimés féroces, laissant derrière lui une allure à la désinvolture maîtrisée. Il se porte désormais au beaux jours sans autres effets sur vous.

On ly sl ip

Dans sa version classique ou «de bain», le slip s’impose à nouveau dans les rues, les clubs ou les plages.

Glamour & dé si nvolte Il deviendra vite la pièce emblématique de votre vestiaire et saura séduire ces dames qui succombent unanimement au retour de la poutre apparente.

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horoscope

Par Nickdass Croasky Illustrations : Mr. Choubi

Cet été, le dernier rapport du GIEC est sorti en fanfare entre American Nightmare 6 et Pompon chez les pingouins 2 . Les rapports du GIEC, c’est LA série catastrophe des 30 dernières années, et le meilleur est à venir, un peu comme Fast and furious : sortie en grande pompe, plan marketing mondial, tapis rouge, champagne et petits fours… On prend les mêmes et on recommence tous les 5 ans, en toujours plus balèse. Du bon boulot, mais si vous lisez attentivement

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le générique final, vous n’y trouverez pas mon nom comme show runner : lamentable quand on sait que je suis astrologue d’acier 2020 et 2021 aux championnats du monde de Côte d’Or. Je sais que cette révélation vous la coupe, donc j’arrête là et je fais une offre directe aux producteurs du GIEC : je suis dispo pour leur prochain épisode, alors déconnez pas, sinon je prends le gros chèque signé par Netflix et je disrupte la franchise Le transporteur avec Jason Statham.

Cet automne, Uranus a décidé de bouleverser vos certitudes. Comme ça sans prévenir, le coquin. Une ribambelle de questions vous assaille entre 4h et 6h du mat’. Par contre, question pognon, ça va tomber dru comme la pluie dans le haut doubs cet été ! Ouvrez grand vos poches et changez de ville ensuite. (Né le 12).

Les bouleversements actuels sont bouleversants et vous incitent à puiser dans vos ressources intérieures et votre nouvel abonnement 5G (illimité si vous êtes du 2e décan). Vous êtes en quête de solitude connectée grâce à laquelle vous allez renouer avec votre force intérieure. Vous triompherez dans Fortnite, Candy Crush, Instagram ou TikTok en novembre (1er décan).

Pluton fait de vous une lopette en vous rendant totalement émotif. Crise de larmes les mercredi et samedi, surtout si vous êtes né un jeudi. Vous avez envie de changement et d’une vie plus intense les lundis et mardis. Si une super proposition se profile les vendredis, foncez (3e décan). Si c’est un jeudi, danger. Un samedi, un massage aux pierres chaudes vous détendrait.

Vous surréagissez aux situations les plus banales comme Iron man le fait si bien, mais lui il a une super armure adaptée. Tout ça parce que Jupiter taquine votre sensibilité. Si votre boulangère vous réclame deux euros pour une baguette de pain, vous allez tirer à vue et faire un carnage. RIP Jean Valjean. En même temps la baguette sera mal cuite. Pensez-y pour les circonstances atténuantes.

Comme 7 milliards de terriens, vous aspirez à changer d’air, mais vous concernant, Vénus est visitée par Mars, ce qui vous ouvre un boulevard. Malheureusement vos jambes gonflent (né le 17), compromettant vos envies d’exotisme. Evitez donc le sel dans les pâtes. Plastifiez votre pass sanitaire et faites vous vacciner en urgence contre la vaginite mousseuse. (2e décan)

Les planètes s’alignent pour vous ce qui n’était pas arrivé depuis un bon siècle. Mais Pluton (encore lui, le petit sacripan) a vraiment envie de vous faire chier, alors vous êtes plongé pour les trois mois à venir dans une léthargie crasse et vous remettez tous vos projets grandioses à perpèt’. Santé : reprenez confiance en vous grâce à des drogues de synthèse et à Disney++.

Vous n’avez rien foutu des vacances et c’est dans cette activité que vous excellez. Ça tombe rudement bien. Cette concordance cosmique est partie pour durer et les pronostics vous placent dans la short list du prix nobel de l’économie pour vos travaux pratiques sur la décroissance. Loisirs : écrivez vos mémoires.

Le sport c’est bon pour la santé dit l’adage. Mais pour vous, cet automne, il est trop tard. Les astres de la voie lactée font pleuvoir une tempête d’emmerdes sur les scorpions : mycoses mal placées, lupus génital, potomanie de rhum arrangé, fibrodysplasie ossifiante… Toutes vos tentatives pour rester en forme devant Gym direct sur C8 sont contrecarrées et la sécu vous gratifie d’une prise en charge 100%.

Sous l’influence de Mercure de France, vous alliez à merveille sourire ultra bright, conviction et charisme et crédibilité. Les opportunités professionnelles sont tellement nombreuses que vous allez changer de travail 153 fois ce trimestre. L’assemblée nationale s’emballe et légifère direct pour valider le CV de 20 pages et le préavis de départ de 2h. Dossier à remplir sur service public dot com.

Vos obsessions de vous-même vous rattrapent en septembre. Comme d’habitude, vous gérez les différentes activités de votre vie avec les qualités requises pour être adjudant-chef première classe à Guantanamo. Mars vous brosse dans le sens du poil (né-e le 21) et quand on s’aime, on ne compte pas. Santé : débranchez avant que vos proches ne le fassent pour vous !

Crevé-e le soir, enterré-e le matin prédisait le poète ! En vacances le boulot vous courait après, en septembre, c’est vous qui courez après le retard accumulé. Vous aimeriez bien survoler toussa avec la dextérité de Tom Cruise Top Gun, mais vous êtes imperméable à tous les conseils et vous êtes contraint à vous livrer dans l’intimité à des expériences classées XXX pour évacuer les tensions.

Plus proche de l’oursin que de la raie, votre automne sera plein de piquant les ami-e-s !! Vous lâchez les chevaux (de mer) : des flammes sortent de votre nez à chaque expiration ; vous êtes arrogants parce que vous le valez bien ; vous éclatez l’être aimé-e... Mais rassurez-vous, ça ne durera pas. Saturne vous piège dans ses anneaux et bouche tranquillou votre ligne d’horizon dès le 15 novembre. D’ici là, entretenez le feu sous la braise.


TRISTAN FELLMANN

Dualités les collections beaux-arts revisitées

Musée du château des ducs de Wurtemberg

Montbéliard

Antoine ETEX : L’Amour piqué par une abeille (colorisée), 1860 - Marbre : Collection Musées de Montbéliard - Photo : Jack Varlet - Conception :

2021 — 2023

Selah Sue Georgio Lilly Wood & the Prick Shame Folamour

DÉTONATION NATION du 23 au 25 septembre à Besançon

3 scènes x 30 artistes x bars et restauration locale

Horskh Victor Solf Delgres MYD Xixa Didjier Corrèze Gargäntua Crystal Murray Alta Rossa Mula ascendant vierge Franky Gogo Super Parquet Min Deed Fulu Miziki David Walters The Buttshakers Léopoldine HH Benjamin Epps S2 x Wasta Maxwell Farrington & Le SuperHomard + ... informations et réservations sur

detonation-festival.com



27 sept20. 21 3 oct. DIJON

MADEMOISELLE : RODOLPHE BURGER & SOFIANE SAIDI & MEHDI HADDAB

MOHAMED LAMOURI

& CHARLIE O / AFRICA2020 : FAIZAL MOSTRIXX & MORENA LERABA & IRI DI / GILBERTO GIL ADRIANA CALCANHOTTO

JAMES BKS / SKULLTONE INVITE MIKE LADD / RAÚL MONSALVE Y LOS FORAJIDOS / CRYING OUT LOUD – [THE BRIDGE 2.1] / BAD FAT

& NAPOLEON MADDOX

CHRISTINE SALEM

ZE TRIBU BRASS BAND infos et billetterie sur www.tribufestival.com


courrier des lecteurs Louis | Giromagny (90) Bonjour la mode, J’ai dernièrement fait l’acquisition d’un slip Sparse, et contrairement à ce que vous affirmiez, j’ai rien séduit pendant l’été. Nada. Walou. Vous allez me rendre mon pognon et fissa ! C’est quoi cette arnaque ? RÉPONSE DE LA RÉDACTION

Louis, le slip il faut le porter sur les vêtements, pas dessous. Sinon personne ne le voit. C’est élémentaire. Je ne vais quand même pas vous apprendre comment mettre votre slip ! L’hiver approchant, je vous file un conseil : par-dessus un pantalon de velours, c’est imparable. Une boucherie de virilité.

Constance | Besançon (25) Bonjour les anciens, c’est la fin des Z’amours sur France télévision, quelle tristesse... Vous avez pas une idée pour que l’amour continue à triompher dans les médias français. RÉPONSE DE LA RÉDACTION

Depuis le départ de Tex, c’était plus la même chose franchement, moins coquin. Mais c’est vrai que c’est triste. Surtout si c’est remplacé par une émission avec Cyril Féraud, le Philippe Risoli du pauvre. Mais je vais te dire, ce qui a tué l’amour en premier Constance, c’est l’arrêt de l’Île de la tentation. Là, t’avais du vrai, du brut. La substantifique moelle de l’humain. Faut relancer ça.

Bart | Eindhoven (NL) Hallo, we zijn begin augustus onze kleine kat op de camping Panthier verloren, zou je ons via je prachtige tijdschrift kunnen helpen hem te vinden ? RÉPONSE DE LA RÉDACTION

Olahlah ! ça va maintenant ! J’ai supporté cette langue tout l’été au camping et en bord de lac, c’est pas pour me la taper dans mon magazine. Donc quelque soit la question, c’est non ! Et encore désolé pour la dernière fois à Amsterdam, on avait trop fumé...

Gwendal | Dijon (21) Salut les moutons, combien de vos lecteurs continuent à écouter et à croire les médias dominants inféodés aux multinationales tout en continuant à traiter ceux qui font leurs propres recherches alternatives de complotistes ? RÉPONSE DE LA RÉDACTION

Salut Gwendal, ça va depuis ta dernière question sur les vaccins qui nous rendent transhumains et qui font de nous la propriété de Pfizer ? Merci de nous considérer comme un média dominant, c’est sympa. Entendons -ous sur le terme de recherche alternative et on pourra causer. Mais te connaissant je vais d’abord te répondre : 8244 selon notre dernier recensement. 76


Programme sep. déc. 2021 Jardin suspendu 11 > 18 septembre

Jardin botanique de l’Arquebuse

A.B.C. 2021-2022 | licences spectacles n°2 -1086057/ n°3 -1086058 | illustration & conception graphique © Simon Lépine.

bal populaire, théâtre, cirque, marionnettes, tiny librairie, concours de pétanques, soirée mix...

Africa 2020 29 septembre | 20h Le Cèdre - Chenôve

musiques actuelles africaines

5 sep. FesTIVAL sOUs L’BARNUM À MOReY : Le CHeVALIeR De RINCHY 9 sep. ANNONCe De pROG AU ROCK’N ART CAFÉ 18 sep. LA ReNTRÉe pLUs QUe JAMAIs AU TpN 25 sep. ORIGIN’ART : LA CHOse + O?NI 30 sep. L’ÉVÉNeMeNT ÉTUDIANT DU GRAND CHALON 6 OCT. CONFÉReNCe - CONCeRT : «UNe HIsTOIRe Des MUsIQUes eLeCTRONIQUes» 7, 8 & 9 OCT.

Ersatz

FESTIVAL DANCING PEOPLE DON’T DIE

théâtre & nouvelles technologies

17 OCT. « À LA LIGNe » pAR MICHeL CLOUp DUO eT pAsCAL BOUAZIZ

dans le cadre du Tribu Festival

5 & 6 octobre | 20h atheneum

Dominique Fils-Aimé 12 octobre | 20h Théâtre des Feuillants jazz

Que tout s'enflamme, nous attendrons 14 octobre | 14h30 & 20h atheneum théâtre & cirque

Hen

22 octobre | 20h Théâtre des Feuillants marionnettes & cabaret

Agréé par

24 OCT. OCCULT HAND ORDeR + NsDX

5 NOV. sIDILARseN + FeRRAILLe 11 NOV. pÉNICHe YRsLF :) 14 NOV. MONA KAZU ReLeAse pARTY + NO&RD

20 NOV. THe DeVILs + sCUFFLes 26 NOV. « eT sI L’AMOUR C’ÉTAIT AIMeR ? » De FABCARO : CINÉ-BD CONCeRT pAR TOTORRO AND FRIeND + peLOUse 8 DÉC. sOURDURe 11 DÉC. sUpeRGOMBO + DJ 18 DÉC. Le pÈRe NOËL esT UN ROCKeUR #7 52 quai Saint CoSme 71100 Chalon-Sur-Saône

www.lapeniche.org

Graphisme www.klauswalbrou.fr

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