Cahier printemps TC 2022

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REGARDS REGARDS

Ehpad : quand on veut, on peut !

Les récentes enquêtes ont de nouveau mis en lumière la maltraitance dans certains Ehpad. Pourtant, de belles initiatives voient aussi le jour chez les seniors : repas fait maison, jardin partagé, échanges avec les enfants. Tour d’horizon des résidences où « ça se passe bien ». Par Sarah Boucault

C

haque matin, munie de son chariot, Marianne Burési, 80 ans, réceptionne le courrier et le distribue aux résidents de l’Ehpad de Saint-Julien-du-Sault, dans l’Yonne. « Le lundi, il y en a beaucoup car il s’accumule le week-end et il y a les magazines télé », remarque la factrice aguerrie, qui habite la résidence depuis dix ans. Cet Ehpad public, situé en plein cœur d’un village de 2 400 habitants, entre deux écoles et en face du cinéma, accueille soixante-cinq résidents. « Nous créons avant tout des lieux de vie, pas des lieux où l’on attend la mort, ni des lieux de travail, affirme Hugo Vidal-Rosset, directeur depuis quatre ans. Tout d’abord, nous appelons les personnes “résidents” ou “habitants” : ce sont des gens avec un paysage intérieur, un passé, des compétences. Sur les portes, on inscrit “Bienvenue chez” avec le prénom et le nom de la personne, et on ajoute des images de ce qui fait sens. » Sur la sienne, Daniel Dieudonné, 89 ans, a affiché des épagneuls. « Vic, mon épagneul, mangeait 250 g de bourguignon tous les jours. Il a vécu dix-huit ans et trois mois », se souvient l’ancien chef

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d’atelier mécanique, joueur de Triomino et photographe attitré de la résidence. Hugo Vidal-Rosset ne se reconnaît pas dans les descriptions de maltraitance faites par le journaliste Victor Castanet dans son livre Les Fossoyeurs à propos des Ehpad du groupe Orpea, ou par l’émission Cash Investigation concernant ceux gérés par Korian. Mais il n’est pas dupe pour autant : « Il faut sans cesse remplir des appels à projets, solliciter les fondateurs, l’agence régionale de santé, le département. Il y a un sous-­financement chronique de tous les Ehpad, mais on essaie d’être dans une logique vertueuse. Par exemple, de meilleures conditions de vie au travail entraînent moins d’absentéisme, donc une diminution des coûts et une situation financière positive. Même si on n’a jamais assez d’argent. » Pour casser l’aspect institutionnel, la résidence s’est basée sur la philosophie québécoise Carpe Diem : les soignants, hors soins, enfilent une tenue civile. L’Ehpad a aussi créé une unité Alzheimer où neuf chambres sont disposées autour d’une cuisine ouverte, un salon et un jardin. « Pour recréer un esprit colocation »,


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