| PARA MELDAR
Para Meldar Diplomates et espions français, héros oubliés
René Arav avec la collaboration de Jeanne Montagnon Balkans, 1940-1945 Les impliqués éditeur, octobre 2019. ISBN : 978-2-343-18567-5
René Arav donne très justement à son travail le qualificatif de « témoignage » et il a tout à fait raison. Car même s’il s’attache à suivre au plus près la vérité historique, il souligne que « la Mémoire est une forme d’exactitude » et se définit comme un simple témoin dans le siècle le plus sanglant de l’histoire. Et pourtant il avait bien commencé ce siècle pour cette « dynastie » venue d’Espagne, passée par Vienne pour s’établir à Samokov, à une heure de Sofia, puis à Sofia. Même après la libération de la Bulgarie par les Russes en 1878. Famille très prospère que celle de René Arav, dont les parents se marièrent au Cercle militaire, en présence de personnalités du monde diplomatique, politique et intellectuel de Sofia. Cette insertion dans la « mondanité » bulgare se révèlera décisive, aux moments sombres dont il semble bien que le point d’orgue fut donné par la mort du Roi Boris III en août 1943. Il semble bien aussi que cette mort, survenue juste après une entrevue entre le Roi et Hitler, qui n’avait pas du tout obtenu ce qu’il souhaitait, n’était pas vraiment accidentelle. Survient alors pour le père de René Arav une rencontre avec un officier allemand qui, à voix basse, lui décrit les horreurs du ghetto de Varsovie et lui dit : « je crois que cet ouragan viendra ici, en Bulgarie ».
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Choqué à l’extrême, il n’a d’abord pas cru à cette description d’apocalypse, puis a fait le tour de gens mieux informés. Le consul général Colonna Césari la lui confirme et lui déconseille de quitter le pays : votre passeport français, ici peut sans doute mieux vous protéger et c’est ainsi que la famille se vit offrir l’asile à la Légation de France. À partir de ce moment, René Arav porte témoignage des angoisses de la famille et de l’incroyable succession de bonnes volontés et de courages rencontrés sur leur chemin de fuite depuis Sofia. C’est ce chauffeur qui, devant leur camionnette embourbée par la neige décide de les sortir de là. C’est cet accueil, dans une propriété au milieu de la campagne bulgare, d’une famille juive en route vers un exil incertain. Ce sont tous ces diplomates en poste en Bulgarie qui, chassés de Sofia par les bombardements, vont aider la mère de famille à sortir indemne du poste de police où il y avait pourtant à l’entrée l’inscription suivante : « Vous qui entrez ici, n’ayez aucun espoir d’en sortir. » C ’est le capitaine Thomson , chef d’un commando anglais parachuté en Bulgarie, qui va tout faire pour sauver des jeunes filles envoyées par la résistance bulgare pour leur indiquer leur route. René Arav a raison de citer ces mots, pour une fois positifs, d’Hannah Arendt : « Le problème n’est pas ce que nos ennemis ont fait, mais ce que nos amis ont fait. » C’est en cela que le livre, pardon « le témoignage », de René Arav est roboratif : au milieu des pires détresses, des pires inquiétudes, se lèvent ça et là des efforts surhumains, inattendus, pour sauver l’humanité. Après ces évènements dramatiques, René Arav poursuivra sa route en France où il pourra accéder