DOSSIER
Une charpente en forme de bateau, des lustres en verre gravé, de belles tapisseries… Dire le contraire serait mentir : les nouvelles salles du cinéma La Salamandre ont de la gueule. Après plusieurs décennies passées en périphérie de Morlaix, l’établissement art et essai déménage en centre-ville, dans l’ancienne Manufacture des tabacs qui abrite aujourd’hui le SEW, ce nouveau pôle culturel réunissant Wart, le théâtre de l’Entresort et donc La Salamandre. Le cinéma passe ainsi d’une salle unique de 145 places à désormais trois salles de 150, 100 et 50 places. Trois nouveaux bébés à l’esthétique soignée. « On ne construit pas un cinéma tous les ans, alors autant qu’il soit beau et qu’il ait un look unique, justifie Véronique L’Allain, sa directrice. L’architecte avait carte blanche. La seule chose que je ne voulais pas, c’était une grande boîte noire, comme on en voit trop souvent. Aller au cinéma doit être une expérience totale : on y vient pour le film bien sûr, mais aussi pour sa localisation, 24
juin-juillet-août 2021 #52
Bikini
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LES SALLES DE CINÉ ONT-ELLES (ENFIN) FINI
son bâtiment, son ambiance… » À l’origine de ces salles, le cabinet Construire qui a piloté la réalisation du SEW. « En tout, cela représente 5000 m2. Si sur la majeure partie de cette surface, nous avons laissé apparentes les traces du passé ouvrier du lieu, la réflexion était tout autre avec le cinéma, explique l’architecte Loïc Julienne. Il s’agit de pièces indépendantes qu’on a voulu transformer en mondes merveilleux. On s’imagine qu’il s’agit de trois bateaux dont on aurait retourné la coque, avant de les habiller de leur propre univers : la salle bleue est inspirée de Moby Dick, la rouge de Vingt Mille Lieues sous les mers et la verte des aventures du commandant Cousteau. Cela permet de raconter une histoire avant le début du film. » Une esthétique qui tranche avec de nombreux cinémas (les multiplexes pour ne pas les citer) qui, il faut l’avouer, sont le plus souvent impersonnels et standardisés, réduits à de simples fonctions techniques. À l’opposé des salles du début du
20e siècle au style art déco. À l’image des arabesques sur la façade du Celtic à Brest qui, depuis 1933, sont toujours là. « Le cinéma a été rénové à plusieurs reprises, notamment l’intérieur des salles où il faut toujours être à la pointe du confort et de la technologie, mais il n’a jamais été question de modifier l’architecture extérieure. Cette façade atypique fait partie de l’identité du Celtic », justifie Nadine Cornette, la directrice adjointe.
« Coller à l’identité du cinéma »
Un héritage architectural auquel tient également de nombreux petits cinémas associatifs et municipaux qui essaiment la région. Comme Le Beaumanoir à Josselin. Un établissement au look gothique érigé en 1939 et « inspiré d’une ancienne maison à arcades du centre-ville », fait savoir Hervé Guyot, bénévole depuis 45 ans. Jusqu’à présent connu pour ses colonnes néoclassiques sur sa devanture, le cinéma Arvor à Rennes change radicalement d’esthétique en déménagement dans le quartier de la gare.