ELLE Belgique Novembre - FR

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Texte et photo Ringo Gomez-Jorge

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À chaque génération ses figures rebelles qui font bouger les lignes du paysage urbain. Qui sont-elles aujourd'hui ? Rencontre avec Fenna De Backer (23 ans) alias Fenchi, une raver dans l'âme qui mêle fétichisme et lingerie dans ses outfits quotidiens, au nez et à la barbe de nombreux cat-callers.

on style est principalement influencé par la scène techno rave et la lingerie. J’essaie d’intégrer cette dernière dans ma tenue au quotidien, de façon plus ou moins subtile. Je travaille dans un magasin de lingerie et j’en crée également. Ma fascination pour les dessous a commencé vers l’âge de 16 ans. Je ne me rappelle pas exactement comment ça s’est passé. Mais, enfant déjà, je m’habillais toujours différemment des autres. À 12 ans, je portais un uniforme scolaire japonais à l’école. À Brasschaat, où je vivais, j’ai été victime de harcèlement solaire. Maintenant, certaines de ces brutes me suivent sur Instagram (rires). » « Outre la lingerie, j’aime aussi la mode fétichiste. Bien que beaucoup y voient une façon d’affirmer un côté sexy, il s’agit pour moi uniquement d’esthétique. En fait, je veux désexualiser les vêtements. Par exemple, je pense qu’il est totalement faux de croire que les femmes qui affichent leur nudité cherchent à susciter une attention d’ordre sexuel. Je crois juste que ces vêtements sont cool. Pour moi, la nudité est parfaitement naturelle. Je ne vois pas les gens comme des objets de convoitise. Quand je me tiens devant le miroir dans une tenue comme celle-ci, je me dis : BAM ! »

« Dans la rue, je sens les regards se poser moi. Il y a quelques années encore, les réactions réprobatrices me déprimaient, jusqu’à ce qu’un déclic se produise. Je refuse de me changer pour ne pas détonner. Si un homme me regarde dans le tram, je le fixe à mon tour pour voir qui tiendra le plus longtemps. Je singe l’attitude dominante des hommes et traverse le wagon la tête haute. Si certains tentent de m’intimider en bloquant le passage, je leur demande sèchement de s’écarter. De la même manière, je ne prête pas attention aux cat-callers (harceleurs de rue, NDLR). » « Ça ne veut pas dire que ma confiance est inébranlable. J’ai avec mon corps une relation amour-haine. Parfois, je l’admire, mais il suffit que je regarde une photo de moi un peu trop longtemps pour me trouver trop grosse. Nous ne sommes tout simplement pas faits pour passer trop de temps à nous scruter. À cet égard, les réseaux sociaux ne sont pas exactement ce que j’appellerais une bonne chose. » « Je veux fréquenter des lieux où je me sens en sécurité, comme les raves et les fêtes privées de la communauté LGBTQIA+. Je n’ai aucune envie de me retrouver sur une piste de danse remplie d’hommes cis en chemise blanche. Dans la communauté LGBTQIA+, il y a une bien plus grande ouverture d’esprit, non seulement en matière de sexualité, mais aussi de mode. À Berlin, la scène techno a encore plus de visibilité qu’ici. Là-bas, on me complimente à chaque fois que je sors en club. À tel point que j’ai choisi de porter surtout des marques berlinoises comme Namilia. Son univers est proche de celui des vêtements de course automobile, mais avec beaucoup moins de tissu. Tout dans ses pièces transpire Berlin et la techno. » fenchi_

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