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CAFÉ DES LYONNES
JACOTTE BRAZIER
« Je rêvais de tout, sauf de faire ce métier ! » Chaque mois, Alexandra Carraz-Ceselli, fondatrice de L’équipe des Lyonnes, nous propose de partir à la découverte d’une lyonnaise au parcours remarquable, au cours d’un « Café des Lyonnes ». Ce mois-ci, le Chef Mathieu Viannay nous a ouvert les portes de la mythique «Mère Brazier», rue Royale, où Jacotte Brazier, petite-fille d’Eugénie Brazier — inspiratrice de plusieurs générations de cuisiniers et gratifiée de deux 3* — revisite pour nous son héritage familial, sa propre trajectoire à faire vivre ce patrimoine inédit et les choix qu’elle a opérés dans l’exigeant milieu de l’hôtellerie-restauration. Propos recueillis par Alexandre Carraz - Photo © Saby Maviel
ACC : L’histoire familiale n’est-elle pas un patrimoine trop lourd à porter ? JB : Pas du tout, au contraire, j’ai été un acteur de ce patrimoine et j’en suis très fière. Désormais je le transmets volontiers en parlant de ma grand-mère, de mes parents, de l’association que j’ai montée pour donner des bourses à de futures cuisinières et de jeunes apprentis. J’ai pris ce nom comme une chance. Pensez-vous être une femme engagée ? Je ne suis pas une femme engagée, au sens où je ne prends pas de position ni politique ni sociale. J’essaie de donner du temps à des gens, et grâce à Matthieu Viannay qui perpétue mon nom de famille, ce nom est encore porteur, donc je peux donner leur chance à des jeunes filles. Le choix lyon people • mai 2022 • 44 •
d’aider les femmes n’est pas lié à la cause féministe, c’est simplement que ma grandmère était une femme, je suis une femme, et malheureusement c’est toujours un peu difficile de pouvoir faire ce métier qu’est la cuisine quand on est une femme, donc je les aide. Quel a été le déclic pour vous lancer dans cette association ? J’ai eu la chance que Paul Bocuse me nomme secrétaire générale de sa fondation pendant 3 années. Cela m’a donné l’idée et l’envie de faire une association de femmes. Je suis allée le voir pour lui en parler, et il m’a dit « tu as raison, mais à l’inverse de l’Institut ou de la Fondation, il faut que tu prennes des jeunes filles en apprentissage », donc c’est ce que j’ai fait. Je travaille avec
plusieurs lycées hôteliers de la région, je trouve des jeunes filles défavorisées avec l’aide des professeurs et des proviseurs, et je les aide financièrement, avec des bourses, des stages, mais aussi en étant à leurs côtés, comme une marraine. J’ai aussi créé un Prix annuel du livre de cuisine écrit par une femme. Est-ce un métier difficile pour les femmes, le secteur de la restauration ? Oui, c’est un métier difficile pour les femmes. Du temps de ma grand-mère, dans les années 30, c’était un métier de femmes et de cuisinières bourgeoises, puisque c’étaient les femmes qui faisaient la cuisine. Et c’est aussi une question de caractère. Il n’y a pas beaucoup de femmes avec un caractère aussi fort que celui de ma grand-