Une bibliothèque de naturaliste ? Peut-on parler, touchant la bibliothèque léguée par P.-A. Lesson, d’une « bibliothèque de naturaliste » ? Pour être assuré de cette caractérisation, il faudrait avoir des points de comparaison possibles. Or, les bibliothèques de naturalistes et de voyageurs actifs entre 1750 et 1850 sont rarement parvenues entières jusqu’à nous. Il est ainsi très difficile d’avoir une idée du contenu des bibliothèques de Cuvier, de Buffon, de Dumont d’Urville ou de Duperrey. Les inventaires après-décès n’étant pas systématiquement archivés au XIXe siècle, nous ne disposons souvent d’aucun instrument susceptible d’offrir une connaissance précise des bibliothèques comme outils de travail des naturalistes. La majorité de celles-ci ont été dispersées ou intégrées à des collections sans identification des provenances, ce qui semble avoir été le cas, par exemple, au Muséum d’Histoire Naturelle à Paris.
Naturalists Johann Reinhold Forster and his son Georg Forster in Tahiti. Tableau de John Francis Rigaud.
Le cas de la bibliothèque de Georg Forster (1754-1794) est peut-être le seul cas de bibliothèque de savant dont on connaisse précisément le contenu et qui soit comparable à celle léguée par P.-A. Lesson. Forster a participé, en tant qu’assistant de son père Johann Reinhold Forster, au second voyage d’exploration de James Cook (1772-1775). De par sa formation de naturaliste, son père était chargé de la partie botanique du voyage. Mais l’apport de Georg Forster va au-delà de la botanique : il recueille de nombreuses observations ethnologiques et s’intéresse de près aux langues et aux coutumes. Son récit, A Voyage round the world in His Britannic Majesty’s sloop Resolution, est publié à Londres en 1777. En tant qu’écrivain voyageur, naturaliste de formation, et de par son grand intérêt pour l’observation des mœurs et coutumes, Forster présente un profil similaire à celui des frères Lesson, même si la deuxième partie de sa vie le conduira à privilégier l’engagement politique et philosophique auprès des révolutionnaires français, plutôt que les recherches « océanistes ». La bibliothèque personnelle de Georg Forster fut dispersée en 1797 dans
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